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Article de revue

Place et rôle des usages des jeux vidéo et d'internet dans la souffrance psychologique

Pages 117 à 134

Notes

1Internet et les jeux vidéo offrent des nouveaux espaces dans notre environnement. Ces espaces ont la particularité d’être virtuels, c’est-à-dire d’exister seulement « à l’état de simple possibilité ». Cette particularité nous permet de faire des projections de notre monde réel. Internet et les jeux vidéo auraient donc la possibilité d’être une réalité projetée. L’existence de mondes virtuels vient bouleverser chez le sujet son rapport à la réalité. Internet est un support virtuel, mais qui peut donner lieu à des événements effectifs. Lorsque deux personnes se rencontrent sur internet, la relation peut être idéalisée ou fantasmée, mais elle est réelle, elle est effective.

2La fréquentation de ces mondes virtuels par le sujet aurait un impact réel sur son comportement et favoriserait chez certains sujets l’émergence de comportements pathologiques, tels que l’addiction ou des comportements déviants, la violence par exemple.

3Les jeux vidéo et internet mettent en exergue deux problématiques : celle de la dépendance et celle de la confusion entre ce qui est réel et ce qui est virtuel, dans certains cas l’une venant entretenir l’autre. Par l’usage des jeux vidéo et d’internet, ce qui est posé c’est la question du contact entre le sujet et son environnement. Car si nous pouvons regarder les espaces virtuels comme des espaces de projection, nous pouvons aussi les regarder comme des moments de l’espace-temps du sujet pendant lequel il n’est pas en contact avec d’autres éléments de son environnement. Qu’est-ce que le sujet projette ? Mais aussi que fait-il et qu’est-ce qu’il évite ?

4De nombreux auteurs s’intéressent à l’influence que ces nouvelles technologies peuvent avoir sur le sujet. Ils cherchent à démontrer ou réfuter l’existence d’un lien de cause à effet entre internet et les jeux vidéo et l’émergence de psychopathologies. Ces chercheurs prennent l’objet comme point de départ de leur réflexion. L’objet de notre première partie sera de faire le point sur ces études [1] en ce qui concerne l’addiction et la violence, qui sont les deux phénomènes majeurs étudiés.

5Dans une deuxième, partie nous examinerons comment émergent des problématiques autour des jeux vidéo et d’internet pour des personnes qui sont en souffrance psychologique. Il ne s’agit plus ici de placer les objets, jeux vidéo et internet, comme point de départ de l’observation, mais le sujet. Comment le sujet souffrant et se reconnaissant en tant que tel, aborde des problématiques autour des jeux vidéo et d’internet dans son processus psychothérapeutique. Pour se faire, nous avons mené une étude auprès de psychothérapeutes afin d’étudier les processus d’émergence de problèmes liés aux usages des jeux vidéo et d’internet abordées par des personnes en psychothérapie quels que soient les symptômes pour lesquels ils sont venus consulter.

6En mettant le sujet au centre de l’étude, nous souhaitons regarder les sens que peuvent avoir des problématiques d’usage des jeux vidéo et d’internet dans la problématique globale du sujet. Cette approche doit nous permettre de sortir des normes quantitatives de définitions des comportements addictifs ou normaux et de sortir des débats en termes de bien et de mal des jeux vidéo et d’internet.

Etudes sur les psychopathologies des usages des jeux vidéo et d’internet

7La littérature américaine sur internet et les jeux vidéo est très abondante. De nombreux chercheurs en sciences humaines et sociales s’interrogent sur les impacts de ces deux outils technologiques tant au niveau de l’individu, qu’au niveau de la société. Leurs orientations disciplinaires influencent leur manière de considérer cet impact. Nous remarquons que, généralement, ce ne sont pas les mêmes auteurs qui travaillent sur internet et sur les jeux vidéo et que la médiatisation de leurs écrits ne sera pas la même.

8Un des thèmes les plus développés sur la psychopathologie des usages d’internet est le trouble d’addiction à internet. La plupart des études sont réalisées par des psychologues cliniciens comportementalistes. La médiatisation par le biais du web est très forte. La plupart des études statistiques sont réalisées en ligne. Les recherches sont en général disponibles sur le web. Il existe même une clinique virtuelle pour l’addiction à internet. Grâce à cette médiatisation, l’addiction à internet donne aujourd’hui l’impression aux Etats-Unis d’être devenue un problème de santé publique. On trouve également sur le web les écrits de quelques psychiatres et de psychologues d’orientation analytique. Par contre, si l’on s’intéresse à d’autres comportements psychopathologiques en lien avec l’utilisation d’internet, il s’avère que très peu d’articles sont disponibles sur le web. La psychopathologie de l’usage des jeux vidéo se centre moins sur le phénomène d’addiction, mais plus sur celui de la violence contenue dans ces jeux et de l’agressivité qu’ils peuvent déclencher chez leurs utilisateurs. La littérature semble moins productive que pour internet. Elle porte essentiellement sur les jeunes enfants et les adolescents. Pratiquement aucune étude ne prend en compte une population adulte. Ce que l’on peut également remarquer, c’est que beaucoup de psychologues sociaux se sont intéressés à l’impact des jeux vidéo sur le comportement du jeune utilisateur.

Sur l’addiction à internet et aux jeux vidéo

Sur la notion d’addiction

9La notion de toxicomanie, désignée en anglais par l’expression addiction to drug fut progressivement remplacée dans le discours médico-psychiatrique par la notion d’addiction. Le terme, qui désigna tout d’abord les conduites de dépendances à des substances psychoactives (alcool, drogue…), fut étendu à partir des années 1990 aux conduites de dépendances à un comportement, telle que la boulimie, la cleptomanie ou plus récemment l’addiction à internet. Cependant la notion d’addiction ne fait pas l’unanimité auprès des professionnels de la santé mentale, car sa définition reste encore aujourd’hui floue.

10Selon M. Valleur et J.-C. Matysiak [2], l’addiction est aujourd’hui une variante des termes dépendance et toxicomanie. Le terme est employé afin de désigner des formes de dépendance, ou des habitudes, qui sont devenues « maladives ». Là réside toute la complexité du terme « addiction » : est-ce une psychopathologie ou simplement une « mauvaise » habitude ?

11L’adjectif « addictif » fait écho à deux situations :

  • à la difficulté de mettre fin à une sensation particulière,
  • à la tendance de persister dans une conduite.
Peu à peu, la notion d’addiction tend à se diversifier. Des auteurs parlent aujourd’hui, dans la lignée de la pensée d’E. Glover, de conduites addictives qui n’impliqueraient pas l’utilisation par le sujet d’une substance psychoactive, mais qui mettraient en jeu des séquences de comportements. Ce nouveau phénomène est appelé, comme l’avait à l’origine proposé O. Fenichel, « addiction sans drogue » ou encore « addiction comportementale ». Ce concept, qui est encore loin d’être reconnu par tous les professionnels de la santé mentale, regroupe actuellement les faits cliniques suivants : le jeu pathologique, les troubles des conduites alimentaires (l’anorexie et la boulimie), les achats compulsifs, l’addiction au jeu vidéo, l’addiction à internet, l’addiction au sexe, l’addiction au crime, l’addiction au sport et l’addiction au travail.

12Le psychologue phénoménologiste E. Loonis propose un modèle global de compréhension des addictions sous la dénomination « d’addiction de la vie quotidienne » ; titre qui fait allusion à l’ouvrage Psychopathologie de la vie quotidienne de Sigmund Freud.

13Certains auteurs justifient le concept d’addiction comportementale en arguant du fait que ce sont des réalités cliniques. Le problème reste de savoir quand ces comportements peuvent être qualifiés de pathologiques et surtout si les conduites addictives constituent une entité psychiatrique, à répertorier dans les classifications médico-psychiatriques.

Addiction à internet

14La plupart des auteurs s’accordent à dire, même John Grohol pour qui l’addiction à internet n’a pas valeur d’entité clinique, qu’il existe un usage « abusif » d’internet. Cet usage abusif est défini quantitativement chez certains, et qualitativement en rapport avec les conséquences qu’il peut avoir sur la vie « réelle » de l’internaute.

15L’abus est tout d’abord déterminé en lien avec le temps que durent les connexions à internet. Le temps est cette variable indéfinie et indéfinissable, derrière laquelle courent tous ces auteurs. Elle représente l’élément central qui leur permettrait de remédier au flou entourant le concept d’addiction ; une variable scientifique et mathématique, qui indiquerait exactement quand le sujet se trouve dans la normalité et quand il se trouve dans l’anormalité. Mais malgré leurs efforts, ce « temps » reste indénombrable. Les auteurs tentent alors de le définir de façon plus qualitative, ce qui enlève une certaine rigueur et conduit à des jugements plus subjectifs.

16Young parle d’usage abusif d’internet, lorsque le sujet passe plus de temps dans le monde virtuel que dans le monde réel.

17Orzack estime que l’internaute fait une utilisation excessive d’internet, quand la personne passe de plus en plus de temps sur internet et que cela interfère avec « les obligations de la vie réelle ».

18Greenfield et Grohol définissent également l’usage excessif d’internet par rapport au temps passé à surfer.

19Un usage excessif se mesurerait donc en termes de temps passé sur internet et serait une caractéristique d’une personne qui développe une dépendance à internet.

20Les répercussions sur la vie quotidienne (problèmes familiaux, scolaires, professionnels, financiers ou juridiques) constituent le second facteur, qui en complément du facteur « temps » va permettre de diagnostiquer un usage pathologique d’internet. Ce facteur caractérise plutôt un usage nocif d’internet.

21Young considère que les répercussions sur l’entourage du comportement du sujet sont significatives d’un comportement pathologique. Si le sujet ne semble pas vouloir pour autant remettre en cause son comportement, ni même reconnaître le problème, il se trouve alors dans le déni.

22Suler axe son étude sur cet aspect plus qualitatif du phénomène. Un sujet fait un usage pathologique d’internet lorsqu’il opère une dissociation entre son activité virtuelle et son activité réelle. Les personnes deviennent dépendantes à internet, ou agissent de façon pathologique dans le cyberespace, quand ils l’ont dissocié dans leur vie réelle. Leurs activités dans le cyberespace forment un monde à part entière. Ils n’en parlent pas avec des personnes de leur vie réelle. Cela devient un puissant substitut ou un moyen de fuir leur vie.

23Young se sert du diagnostic du jeu d’argent pathologique comme modèle clinique de l’addiction à internet. Tous les auteurs ne suivent pas Young dans cette démarche. Grohol estime qu’il n’y a pas de comparaison possible entre les paris et autres jeux d’argent et internet. Le jeu d’argent est une activité par nature antisociale, qui apporte des faibles échanges sociaux. internet serait au contraire « un médium prosocial, interactif, et qui véhicule de l’information [3] ».

24Suler souligne dans son article « Addiction à l’ordinateur et au cyberespace » [4], le flou qui règne autour du concept d’addiction, car le problème est, dit-il, « de trouver la limite entre l’enthousiasme "normal" et la préoccupation "anormale" ». Ceci se complique d’autant plus avec le concept « d’addiction positive ».

25« L’addiction – définie de façon approximative – peut être saine, malsaine, ou un mélange des deux. » Les addictions positives (ou « saines ») désignent des activités qui sont devenues des besoins pour le sujet et qu’il ne peut s’empêcher de réaliser, mais qui n’ont pas de conséquences négatives sur la vie du sujet ou son entourage. Bien au contraire, elles sont dites « positives », car elles apportent des bénéfices au sujet, qui viennent compenser le fait d’être devenu dépendant.

26Ce concept tend également à objectiver le phénomène d’addiction. Un regard extérieur et arbitraire est posé sur des comportements individuels. Ce n’est pas le sujet acteur de la conduite qui juge si son comportement lui apporte des bénéfices, mais un regard normatif et social. On perçoit encore ici l’influence de la médecine et de la clinique médico-psychiatrique, dont le paradigme pourrait être : « un esprit sain dans un corps sain. »

27De façon implicite, un certain usage d’internet est toléré (les e-mails, le www…), qui concerne l’aspect informatif d’internet. Internet en tant qu’outil de savoir est valorisé, mais tout ce qui concerne l’aspect récréatif (les jeux en ligne, les chats…) est déprécié. Dans une de ses enquêtes, Young établit que les sujets dépendants seraient plus attirés vers les jeux en ligne et les chats, tandis que les sujets non dépendants utiliseraient internet pour les e-mails et l’information.

28On retrouve de façon très prégnante un appel au « bon sens » social et à la morale. Plus qu’un problème individuel, l’addiction à internet devient pour cet auteur un problème de société, car il a des répercussions sur la famille et l’entourage des sujets dépendants. Internet est source de divorces, de licenciements et d’échecs scolaires.

29Le sujet dépendant est également vu comme un individu « prédisposé » ou montrant une « vulnérabilité » aux addictions. Il est la victime, et de sa faiblesse (il cherche à fuir des problèmes), et de la « perversité » des nouvelles technologies, ce que Greenfield nomme le « potentiel addictif d’internet ».

30Le sujet dépendant est vu tour à tour comme coupable d’un usage qualifié « d’excessif », « d’abusif », de « maladapté » ; cet usage pouvant même être puni par la loi. Le sujet est également vu comme une victime du potentiel addictif d’internet. Selon l’expression de Greenfield, ils sont « piégés sur le net ». L’individu addicté à internet a perdu sa liberté.

31Une partie de la difficulté à définir le concept d’addiction provient du fait que l’addiction à internet n’est plus seulement un phénomène concernant le monde médico-psychiatrique, mais concerne aujourd’hui le monde juridique et la société. Cela devient désormais un problème de santé publique.

32L’usage que fait l’individu d’internet est complètement objectivé et les chercheurs tendent à en faire un phénomène généralisé. Ce que dénonce d’ailleurs King et Grohol en reprochant à leurs collègues de grossir le phénomène et de ne pas être assez rigoureux lors de leurs enquêtes. Par exemple, peu d’enquêtes prennent en compte la catégorie des « nouveaux utilisateurs », où l’usage excessif d’internet pourrait s’expliquer par l’envie de découverte du médium et la curiosité.

33internet est accusé d’avoir des répercussions néfastes sur la vie sociale de l’individu et d’isoler les internautes, soit au contraire à connotation positive, où le médium est vu comme un outil de socialisation permettant d’agrandir son cercle de connaissances et de rencontrer virtuellement des gens qui se trouvent à plus de mille kilomètres de nous. « It’s a small, small world… »

34Certains auteurs postulent qu’internet est un médium addictif, parce qu’il satisfait au besoin de socialisation de l’homme.

35King considère que ces éléments ne favorisent pas la communication et ne font que la simuler. Cette communication est en fait « une mascarade ». Le monde virtuel déforme la perception que nous avons des autres et que les autres ont de nous. Nous avons l’impression de communiquer nos pensées les plus intimes, mais en fait la communication se déroule avec un écran d’ordinateur. Les internautes montrent uniquement ce qu’ils veulent et interagissent uniquement quand ils le veulent. Internet serait un moyen d’éviter le contact social intime.

36Plutôt que de porter un jugement de valeur, qui ne fera que stigmatiser encore plus le handicap des internautes, s’ils ont réellement du mal à entretenir des relations interpersonnelles réelles, pourquoi ne pas s’interroger comme le fait Suler sur l’intérêt et la satisfaction qu’ils y trouvent ?

37Le concept d’addiction à internet trouve des difficultés à s’imposer de façon consensuelle auprès de l’ensemble des professionnels de la santé mentale. La notion d’« addiction » étant elle-même contestée, l’acceptation du « trouble d’addiction à internet » en est d’autant plus critiqué. L’amalgame fait par certains entre « addiction positive » et « addiction négative » contribue à maintenir une limite floue entre un usage normal et un usage pathologique.

Addiction aux jeux vidéo

38La nature addictive du jeu vidéo fut soulignée en 1998 dans une étude réalisée par Mark Griffiths. Il estime alors qu’un adolescent sur cinq peut être diagnostiqué comme dépendant pathologiquement des jeux d’ordinateur. La liste diagnostic utilisée pour son enquête est très proche de celle proposée par Young pour le trouble d’addiction à internet.

39Selon Griffiths, les jeux vidéo offrent au joueur de fortes récompenses psychologiques, qui vont participer à l’émergence d’un comportement addictif. Les nouveaux jeux sur console du XXIe siècle présenteraient encore plus de risques pour le jeune joueur que ceux des années 1980. Ils seraient de « nature addictive » : les jeux sont de plus en plus complexe et demandent donc plus de réflexion et de dextérité. A cela viendraient s’ajouter l’amélioration du graphisme et la valorisation sociale des thèmes, que mettent en scène les nouveaux jeux.

40L’addiction aux jeux vidéo est vue par Griffiths comme une sous-catégorie de « l’addiction technologique ». Le phénomène continue d’être traité sous un angle comportementaliste.

41Jeanne Funk [5], docteur en psychologie clinique, aborde le phénomène en s’intéressant à l’histoire de vie du sujet et à la place que vient occuper le jeu vidéo dans son histoire. Elle fait l’hypothèse que certains enfants pourraient être plus vulnérables que d’autres à l’impact des jeux sur console. Elle nomme ce groupe les « joueurs à haut risque ». L’explication qu’elle propose tente d’éclairer la problématique des enfants qui sont pris dans des conduites addictives.

42Le jeu vidéo peut devenir un lieu de refuge pour certains enfants qui présentent des problèmes d’adaptation. L’auteur prend l’exemple de l’enfant en difficulté scolaire, qui fuit cette situation dans le jeu vidéo. Mais bien qu’il puisse en tirer des bénéfices temporaires (réussite dans le jeu et rehaussement de l’estime de soi), cela aggrave à long terme ses problèmes scolaires et diminue sa confiance en soi. Les jeux sur console, en particulier ceux à contenu violent, pourraient également représenter un risque d’addiction pour des enfants qui contrôlent difficilement leurs émotions. Ils ne vont pas ressentir les expériences de « stimulation négative », que procure le jeu vidéo violent. Ils recherchent constamment la stimulation et trouvent pleine satisfaction à leur besoin à travers les jeux vidéo. En s’immergeant totalement dans cette activité, ils cherchent avant tout à éviter des affects négatifs, tels que l’anxiété et la dépression.

43Sylvain Missonier propose d’entrevoir le jeu vidéo comme un moyen de pouvoir exprimer pour le jeune sujet son mal-être et sa souffrance. A ce propos, il écrit : « [ … ] pour nous, acteurs de la santé mentale, le jeu vidéo est désormais potentiellement au cœur de la relation psychothérapique. Un premier entretien avec un enfant constitue aujourd’hui un exemple emblématique à partir d’un échange sur sa position sur ces jeux, le clinicien recueillera des informations capitales sur son interlocuteur. Si c’est un pratiquant, un dialogue sur la fréquence et la durée de cette activité, ses titres de prédilection, ses héros favoris, cet intérêt dans ses contacts sociaux, l’état des lieux de la négociation avec ses parents sur cette occupation… permettra d’accéder à la complexité de son fonctionnement cognitif, affectif et fantasmatique[6]. »

Jeux vidéo et violence

44La majorité des jeux vidéo ont aujourd’hui non seulement un contenu violent et agressif (certains jeux comportant même de façon explicite un but antisocial ou illégal). Ils ont également un graphisme de plus en plus réaliste. Des recherches récentes s’interrogent sur un lien possible entre le fait de jouer à un jeu vidéo violent et l’émission d’un comportement agressif à court terme ou à long terme. Même si les études divergent dans leur conclusion, toutes s’accordent à reconnaître que le jeu vidéo est une activité particulièrement stimulante, qui excite l’individu.

45Il existe trois modèles théoriques qui expliquent l’impact d’un contenu médiatique à caractère violent et agressif : la théorie de la stimulation, la théorie de la catharsis et la théorie de l’apprentissage social. La première théorie postule que lorsque les enfants sont stimulés par un contenu agressif, ils risquent de manifester plus de comportements agressifs dans la vie quotidienne. La théorie de la catharsis considère que le fait de voir de la violence encourage le désir de se comporter agressivement. La théorie de l’apprentissage social, quant à elle, suggère que les jeux vidéo offrent un renforcement positif à l’émission d’un comportement antisocial, et qu’en retour l’individu va attendre la même récompense dans sa vie quotidienne pour un comportement antisocial.

46Souhaitant vérifier l’impact de la violence présente dans certains jeux vidéo sur l’individu, Anderson et Dill, psychologues, réalisent en 1999, deux études ayant pour thème « les jeux vidéo et les comportements, les pensées et les sentiments agressifs en laboratoire et dans la vie ».

47Les résultats montrent des effets sur le comportement agressif : le fait de jouer à des jeux vidéo violents est corrélé positivement à l’augmentation du comportement agressif.

48Les auteurs alertent les parents contre le risque sérieux que représente la violence dans les jeux vidéo, plus néfaste selon eux, que la violence à la télévision ou au cinéma. Ils évoquent trois raisons : tout d’abord l’identification avec l’agresseur est plus importante dans les jeux vidéo et augmente son impact. Ensuite, il y a une participation active au médium, qui conduit à la construction d’un script d’agression plus complet. Et enfin, ils soulignent la nature addictive du jeu vidéo et rappellent les conclusions trouvées par d’autres collègues à ce propos : Griffiths et Hunt, en 1988, estimaient qu’un adolescent sur cinq pouvait être diagnostiqué comme dépendant pathologiquement des jeux d’ordinateur. Les jeux vidéo violents représentent donc un terrain d’apprentissage et de pratique de réponses agressives aux situations de conflits.

49Pour S. Tisseron [7], psychiatre et psychanalyste, la confusion entre le réel et l’imaginaire est un des deux dangers des jeux vidéo (le second étant le risque du repliement sur soi). Les victimes seraient d’ailleurs à ses yeux plutôt les adultes que les enfants : les parents s’inquiètent de voir leurs enfants massacrer des monstres virtuels, alors que justement ce ne sont que des créatures virtuelles… Reprenant l’exemple des tamagotshis, il souligne que ce sont des adultes, qui enterrent leur petit animal électronique quand il meurt, et non des enfants. « La confusion entre le réel et l’imaginaire, quand elle existe, n’est jamais quelque chose que l’enfant se construit seul. C’est toujours une erreur à laquelle l’environnement l’engage, et parfois sans s’en rendre compte, comme [dans le cas des jeux vidéo]. » Ainsi, « Ce n’est pas l’envahissement des objets qu’il faut craindre, c’est la difficulté où nous risquons de nous trouver d’opérer cette opération psychique de réversibilité au fur et à mesure que les machines qui nous environnent seront plus compliquées. Mais en même temps, la complexité croissante des machines est ce qui nous condamne à devoir entrer avec elles dans ce jeu de la réversibilité. Car sinon les machines risquent fort de nous apparaître soit comme des concurrents, soit comme des persécuteurs. » Il apparaît déjà de façon clinique que certains joueurs se trouvent à un moment dans l’incapacité de réaliser cette opération psychique de réversibilité. Les relations de dépendance avec l’ordinateur ou la console pourraient être interprétées dans ce sens. Les concepteurs de jeux participent à faire disparaître ce mouvement de réversibilité, afin de fidéliser encore plus le joueur. Plus le joueur s’identifie et donne vie au héros du jeu, plus il a de difficulté à s’en séparer. Le risque ne résiderait donc pas dans la machine ou dans le jeu, mais dans la relation que le sujet établit avec elle ; cette relation étant façonnée par l’histoire personnelle de ce sujet et de sa relation à l’environnement.

Etude sur l’émergence des objets jeux vidéo et internet dans des processus psychothérapiques [8]

Problématique de l’enquête

50Les études et enquêtes dont il est fait référence dans la première partie placent les jeux vidéo et internet et leurs usages au centre des préoccupations. Les enquêtes de référence sont des enquêtes en ligne (internet) ou auprès d’usagers (jeu vidéo). Il est possible que cette problématique et les modalités des enquêtes amènent à poser les problématiques des usages essentiellement en termes de norme avec les problèmes que cela pose. Nous avons pu voir, en particulier autour de la notion d’addiction, qu’il y a pour les auteurs des présupposés sur les rôles positifs ou négatifs d’internet et des jeux vidéo dans la socialisation, qu’il y a de bons usages et de mauvais usages.

51Nous avons souhaité prendre une démarche différente et regarder les usages des jeux vidéo et d’internet du point de vue du sujet, voir comment émergent les usages et le sens que l’on peut leur donner. Ce que nous avons voulu – plus particulièrement – examiner, c’est comment dans l’environnement du sujet naissent des formes particulières qui se matérialisent par des usages d’internet et des jeux vidéo. Notre cadre théorique est phénoménologique tel qu’il est modélisé par la gestalt-thérapie. Ce sont donc les processus qui seront étudiés, voir quand et comment les usages d’internet et des jeux vidéo émergent dans le processus psychothérapique, la place qu’ils ont pour le sujet dans son environnement relationnel, comment ces usages évoluent au cours du processus psychothérapique.

Méthodologie de l’enquête

52Nous avons mené une enquête auprès de psychothérapeutes, qui travaillent en gestalt-thérapie pour les interroger sur l’émergence, dans les entretiens de psychothérapie qu’ils ont, des usages des TIC. Il ne s’agit donc pas de cibler les usages des TIC forcément comme symptôme de disfonctionnements comportementaux, mais de regarder quelles formes ils prennent dans des processus psychothérapiques et relationnels. L’addiction aux usages des TIC n’est pas le thème central, et si addiction il y a, elle est replacée dans l’ensemble des processus psychothérapiques et relationnels du sujet. Nous obtenons une série de monographies.

53Les psychothérapeutes qui ont été enquêtés ont répondu positivement à la question : « Avez-vous ou avez-vous eu parmi vos patients au moins une personne qui, dans le cours de sa psychothérapie, a abordé, de façon importante ou marginale, pour elle ou pour une personne de son entourage, des contenus liés aux usages d’internet et/ou de jeux vidéo ? »

54Le guide d’entretien était composé de quatre parties :

  1. problématique sur le pourquoi de la demande de psychothérapie, description des perturbations du contact du sujet avec son environnement,
  2. quand et comment dans le processus psychothérapique apparaît l’usage d’internet ou des jeux vidéo,
  3. la place que prennent ces usages dans le système relationnel du sujet,
  4. la place que prennent, en termes de contenu, ces usages dans le système psychothérapique.
Nous avons à ce jour quinze monographies. L’approche par monographie ne vise pas à donner des résultats statistiquement représentatifs. Il ne s’agit donc pas de donner des vérités sur les comportements psychopathologiques des usages d’internet et des jeux vidéo. Il s’agit de regarder comment se posent ces problématiques d’usage pour des personnes qui sont et se reconnaissent en souffrance psychologique.

L’addiction en question

55L’aspect addictif des usages d’internet et des jeux vidéo a pu être constaté sous deux formes différentes. L’une dans un contexte d’usage, l’autre dans un contexte d’angoisse.

Addiction et contexte d’usage

56Il s’agit de personnes qui, à partir du moment où elles se connectent ou commencent à jouer, perdent la notion de temps ou sont dans l’impossibilité d’arrêter leur pratique. Robert est un jeune homme de 25 ans. Il consulte depuis deux ans « car il ne s’intègre dans aucun groupe » ce qui lui pose des problèmes d’insertion professionnelle. Personne introvertie, pratique de nombreuses techniques de relaxation, Robert ne sent rien. Robert donne l’impression de s’auto-suffire, il n’a pas besoin des autres. Autodidacte en informatique, le travail (logiciel de gestion, de bureautique, de graphisme, de photo) sur ordinateur lui plaît bien. Par cet intermédiaire il va commencer à jouer, plutôt à des jeux de stratégie. Sa pratique du jeu « va déraper ». Par trois fois, il va rester 48 heures à jouer, ne s’interrompant que pour boire et manger. Ces expériences lui sont difficiles. Il est dans le sentiment de « ne pas pouvoir s’arrêter », « d’être pris par le jeu », « de ne plus être dans le temps ». Il va s’arrêter par épuisement. Robert aura un regard critique de cette activité de jeu vidéo et l’arrêtera complètement pour ne plus retomber dans ce piège.

Addiction et contexte d’angoisse

57« Il faut combler le vide. » Nadine consulte pour boulimie. Elle présente tous les symptômes classiques d’une personne boulimique. Souvent lorsqu’elle est seule, elle sent « venir une angoisse », « un grand vide intérieur », un besoin irrépressible de le combler. Elle a beau connaître le déroulement de la crise, elle ne peut s’en empêcher. Acheter des produits chocolatés, en manger jusqu’à épuisement, vomir et dormir. Lorsque Nadine parle de sa pratique des jeux vidéo, c’est une forme semblable qui est nommée. « Un sentiment de vide », « un besoin de combler le vide », une pratique de jeux de stratégie jusqu’à épuisement. « Après je dors, et je n’ai rien fait ».

58Dans cet exemple nous avons aussi une addiction dans un contexte d’usage, mais ce qui est premier c’est « le vide » qu’il faut combler.

Les « troubles de l’intimité »

59Nous mettrons dans cette catégorie les usages d’internet et des jeux vidéo dont la fonction est d’éviter un contact relationnel en présence avec autrui en faisant une distinction pour ce qui est des contacts sexuels.

Troubles du contact relationnel

60Pierre (35 ans) vit en couple avec Sophie et son fils Rémy (14 ans). Pierre a une activité professionnelle libérale qui lui prend beaucoup de temps. Il estime faire des semaines d’environ 50 heures. Pierre et Rémy jouent séparément à des jeux vidéo. En thérapie de couple, Sophie dit que Rémy et Pierre ont des comportements très différents. Ainsi Rémy sait quitter ses jeux et être en relation avec sa mère. Par contre, Pierre est dans l’incapacité, le soir et le week end, de quitter ses jeux et d’être en relation avec sa famille. Pierre dira en quoi les jeux (et son travail) l’occupent et lui évitent de se confronter à la relation et aux émotions avec ses proches. L’hyperactivité professionnelle et la pratique du jeu sont des comportements qui « occupent » Pierre et lui évitent la relation dans ce qu’elle peut avoir d’intime au niveau émotionnel.

Troubles du contact sexuel

61Il apparaît dans notre enquête trois types de relation entre les usages d’internet et des jeux vidéo et la sexualité.

L’évitement de la relation sexuelle

62Muriel tombe amoureuse sur internet. Elle fait la connaissance d’un homme sur un site de rencontre. Il est parfait. La rencontre physique se passe très mal. Elle ne supporte pas la demande sexuelle de cet homme. Elle ne donne pas suite. Elle renouvelle avec succès les rencontres sur internet, tombe amoureuse mais se refuse à la rencontre physique. « Le corps pervertit la beauté des sentiments. »

Les « Don Juan » du net

63Internet de par la facilité et la rapidité des contacts favorise les rencontres. Michel est dans une course à la rencontre féminine, à la séduction, au passage à l’acte sexuel. Les sites de rencontre vont lui permettre de multiplier et d’intensifier ses rencontres. Si nous acceptons la notion d’addiction sexuelle, internet est un média qui aura tendance à favoriser le passage à l’acte de cette addiction.

Le développement des pratiques perverses

64Laurent est chrétien pratiquant et homosexuel. Il change souvent de partenaire. De sa pratique sexuelle, il en retire beaucoup de honte et il la cache. Comme précédemment, les sites de rencontre spécialisés vont lui permettre de multiplier ses rencontres et ses expériences. Par l’intermédiaire de chat, il va pouvoir exprimer et partager ses fantasmes sado-masochistes. L’anonymat, la distance et le regroupement de personnes ayant les mêmes perversions les « normalisent » et déculpabilisent la personne de ses pensées. Laurent, « effrayé » par ces dialogues, ne passera pas à l’acte.

Le jeu comme espace de défoulement

65Nous donnerons deux exemples de pratique de jeux vidéo par des personnes paranoïaques.

Le jeu comme « béquille »

66Armand consulte sur les recommandations des services sociaux qui le suivent. Paranoïaque, Armand a mené une vie « chaotique » avec, en particulier, d’importants problèmes d’intégration professionnelle. Il a maintenant une forme de stabilité qui se traduit par une activité professionnelle fixe. Il est soutenu par deux éléments. Les structures sociales qui l’accompagnent et le soutiennent et une pratique des jeux vidéo. Ses week-end sont exclusivement réservés à cette activité qu’il pratique seul chez lui. Il joue à des jeux violents et des jeux de stratégie et « expulse » sa violence.

Le jeu comme espace transitionnel

67Denis consulte depuis trois ans. Au quotidien il ne réagit pas à toutes les agressions de la vie quotidienne.« Il encaisse ». Puis il développe des délires de persécution et devient dans la réalité très agressif. Denis apprécie les jeux violents, mais plus particulièrement les jeux de stratégie surtout s’il est question d’espions. Comme précédemment, la pratique du jeu permet à Denis d’expulser dans l’espace du jeu ses pulsions agressives, de jouer ses délires et de « se venger » des espions. Après trois ans, Denis joue moins et écrit des scénarii de jeux avec des espions. Ses écrits ont un contenu délirant en lien avec ses délires mais il prend du recul par rapport à eux par l’intermédiaire de l’écrit. Le scénario devient un objet transitionnel. Nous pouvons comprendre que dans un premier temps le jeu a été un objet transitionnel pour Denis, une première forme de symbolisation de ses délires. Par le jeu, un contenu a pu être nommé dans l’espace psychothérapeutique.

Internet comme média de socialisation

68Marine souffre de solitude. Issue d’un milieu « enfermant », Marine va suivre une psychothérapie. Au fur et à mesure que Marine va rompre ses loyautés familiales, elle va découvrir et apprivoiser l’outil informatique puis internet. Par internet elle va rencontrer des personnes avec lesquelles elle va partager des activités sportives et culturelles dans la rencontre physique.

Conclusion

69L’objet de notre étude a été de regarder dans un premier temps comment ont été étudiés les usages d’internet et des jeux vidéo en termes de psychopathologie. Les études, essentiellement anglo-saxonnes, en prenant internet et les jeux vidéo comme objet central d’étude, visent en fait à les qualifier en termes de bien et de mai, soit en eux-mêmes, soit par les comportements d’usage qu’ils induisent.

70Internet est étudié principalement sous l’angle de l’addiction. Ces études se heurtent au problème de la définition de l’addiction et à sa mesure. Centrés autour de l’objet, les chercheurs en arrivent rapidement à des jugements de valeur sur le produit ou sur les usages qui en sont faits.

71Ce sont les mêmes contenus, finalement des jugements de valeur, que nous pouvons observer sur les jeux vidéo. Concernant les jeux vidéo, si l’aspect addictif est étudié, ce sont essentiellement les répercussions sur les comportements violents qui sont examinées. Cependant, ces études se faisant en laboratoire, en dehors de l’environnement politique, économique et social, il nous semble que les résultats ne peuvent être qu’indicatifs.

72Nous avons choisi une autre démarche. Celle de nous centrer sur le sujet, et non pas sur l’objet, et de regarder comment émergent les problématiques d’usage d’internet et des jeux vidéo dans l’environnement du sujet et non pas de regarder les adaptations du sujet aux objets en dehors de son contexte. Les premiers résultats que nous obtenons pour l’instant montrent que les « particularités » d’internet et des jeux vidéo sont relativement peu importantes.

73Première « particularité », il semble que les comportements addictifs dans les usages d’internet et des jeux vidéo soient réels mais de court terme. Nous avons pu rencontrer des cas de personnes qui, à un moment donné, se sont senties « accros » dans leur pratique et ne pouvant plus en sortir. Mais, liées au produit, nous n’avons pas à ce jour constaté de compulsions à revenir à l’usage d’internet ou des jeux vidéo. Lorsque tel est le cas, il s’agit d’autres types de problématiques, comme la boulimie qui sont à l’origine du comportement qui peut apparaître comme addictif.

74Seconde « particularité », nous avons pu repérer que des personnalités paranoïaques pouvaient trouver en internet un espace de projection de leur violence et de leur délire de persécution. Cette activité peut permettre une socialisation du sujet, voire constituer un premier espace transitionnel dans un processus psychothérapeutique.

75Enfin, nous avons pu constater qu’internet et les jeux vidéo offrent de nouveaux espaces qui vont servir aux sujets à vivre, à mettre en acte leurs difficultés. Nous sommes ici dans l’émergence d’usage plus banal dans le sens où il n’y a pas de nouveauté, mais de nouvelles formes.

76Les jeux vidéo et internet peuvent fournir aux personnes qui ont des troubles de l’intimité, des activités où elles feront pour elles des choses sans lien physique avec autrui, évitant ainsi une intimité incarnée.

77Internet en tant que nouveau média va pouvoir favoriser les « boulimies » du contact, les regroupements « thématiques » de fonctionnement pervers. Internet est aussi le média qui pourra favoriser la socialisation du sujet. Globalement, internet et les jeux vidéo favorisent plutôt le développement de liens faibles et distants, plutôt que des liens forts et de proximité.

78Nous nous proposons donc de regarder les jeux vidéo et internet comme des formes nouvelles émergentes dans notre environnement. Ces formes ne sont pas indépendantes de notre environnement politique, économique, culturel, social… Regarder internet et les jeux vidéo, indépendamment de l’environnement du sujet usager risque de nous focaliser sur des aspects comportementaux et non pas sur le sens que l’usage a pour le sujet.

Bibliographie


Date de mise en ligne : 01/10/2010

Notes

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

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