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Article de revue

La régionalisation africaine ou l’émergence d’un nouveau mode de gestion des conflits ?

Pages 75 à 99

Notes

  • [1]
    Éditorial de S. Sur dans « Les conflits en Afrique », Questions internationales, n° 5, janvier-février 2004, p. 1.
  • [2]
    A. S. Millet-Devalle, « L’évolution des OMP en Afrique » ARES, n° 50, fascicule I, vol. XX, janvier 2003, p. 17.
  • [3]
    K. Rosecrance, B. Badie, P. Hassner, P. de Senarclens, Débat sur l’État virtuel, Paris, Presses de Sciences Po, 2002, p. 131.
  • [4]
    M. Fontrier, « De nouvelles guerres africaines : transformations de la violence et menaces sur les tracés frontaliers en Afrique centrale », Stratégique, n° 80, 2000, p. 44.
  • [5]
    « Violent imaginaires and violent practice », in Anthropology of Violence and Conflict, dirigé par B. E. Schmidt et I. W. Schroder, Londres, Routledge, 2001, VI, p. 229.
  • [6]
    « Les conflits en Afrique », Questions internationales, n° 5, janvier-février 2004, p. 29.
  • [7]
    La création de ce mot résulte de la combinaison des termes « soldats » et « rebelles ».
  • [8]
    D. Ugresic, écrivain cité dans Anthropology of Violence and Conflict, op. cit.
  • [9]
    J.-F. Bayart, « L’embrasement de l’Afrique subsaharienne », Politique internationale, n°77, 1997, p. 185-202.
  • [10]
    M. Liégeois, « Opérations de paix : la question de la régionalisation », in Guide du maintien de la paix, dirige par J. Coulon, Canada, Éditions Athéna, 2004, p. 17-33.
  • [11]
    Le multilatéralisme est défini comme « forme institutionnelle élémentaire de la vie internationale moderne », par Ruggie cité dans B. L. Job, « Multilatéralisme et résolution des conflits régionaux : les illusions de la coopération », Études internationales, décembre 1995, n° 4, p. 668.
  • [12]
    Buzan, People, States and Fear, Londres, Harvester Wheatshcaf, 1991.
  • [13]
    La sous-région ou l’échelon sous-régional seront considérés comme un sous-ensemble parmi d’autres qui composent le continent, ce dernier étant qualifié généralement d’échelon régional. Par exemple : la CEDEAO à l’ouest, la CEEAC au centre ou l’IGAD à l’est sont des sous-régions ; à l’inverse l’Union africaine est une organisation régionale regroupant tous les États africains, excepté le Maroc.
  • [14]
    La Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC) et l’Union du Maghreb arabe (UMA).
  • [15]
    Voir annexe 1.
  • [16]
    W. A. Knight, « Multilatéralisme ascendant et descendant : deux voies dans la quête d’une gouvernance globale », Études internationales, décembre 1995, n° 1 p. 705.
  • [17]
    J. Mueller, « Le concept de puissance et la politique internationale depuis la fin de la Guerre froide », Études internationales, op. cit., p. 717.
  • [18]
    M. Pugh, The world Order Politics of Regionalization, United Nations and Regional Security : Europe and Beyond, p. 38.
  • [19]
    Il est ici fait référence à la place occupée par le Nigeria dans le cadre sous-régional. L’intervention de l’ECOMOG a en effet été critiquée par certains États du fait de la prédominance nigériane au sein de la force ainsi qu’au regard de l’impact de son rôle hégémonique dans la gestion du conflit.
  • [20]
    La résolution 1484 a été adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies le 30 mai 2003, et la décision d’action commune du Conseil a été prise le 5 juin 2003.
  • [21]
    Dans la déclaration de Petersberg du 19 juin 2002, le Conseil des ministres de l’UEO indiquait que les forces des États membres pouvaient être utilisées pour « des missions humanitaires ou d’évacuation de ressortissants, des missions de maintien de la paix et des missions de forces de combat pour la gestion des crises, y compris des opérations de rétablissement de maintien de la paix ».
  • [22]
    Développé et avalisé par la déclaration de Paris du Conseil des ministres de l’UEO le 13 mai 1997, ce concept permet à un des pays membres disposant de moyens adaptés de piloter une éventuelle opération. L’objectif était de donner à l’UEO les moyens de réaliser de manière entièrement autonome une action conforme aux missions de Petersberg. Ce concept autorise également la mise en place dans les plus brefs délais d’un état-major européen sur la base de moyens nationaux.
  • [23]
    Elle lutte notamment contre l’émergence de foyers terroristes ou extrémistes, ainsi que pour limiter toute immigration clandestine.
  • [24]
    En Afrique de l’Ouest (CEDEAO) création de l’ECOMOG (force d’interposition de la CEDEAO) en 1990 et en 1999 le Protocole relatif aux mécanismes de prévention, de gestion, de règlements des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité ; pour l’Afrique australe (SADC) création de l’Organe chargé de la politique, de la défense et de la sécurité en 1996, en Afrique centrale (CEEAC) naissance du Conseil de paix et de sécurité de l’Afrique centrale (COPAX) en 1999.
  • [25]
    Organisation de l’unité africaine créée en 1963. Le processus de transformation de l’OUA en Union africaine (UA) a débuté en 1999 et s’est achevé en 2002, date à laquelle l’UA a été officiellement lancée.
  • [26]
    Créé sur le modèle du Conseil de sécurité des Nations unies, ce nouvel organe doit fonctionner avec quinze membres élus en rotation. Sa particularité tient à la présence de cinq personnalités du continent, apolitiques mais reconnues pour leur autorité morale, formant un Conseil des sages, capable d’orienter les décisions. Il a parmi ses fonctions le vote de résolutions et la prise de décision pour l’envoi de troupes sur le terrain.
  • [27]
    Il est possible de citer pour exemple la Facilité de paix. Ce programme repose sur le principe de l’appropriation africaine, il appuie les opérations de maintien de la paix conduites par les pays africains en Afrique et le renforcement des capacités de la structure de sécurité naissante de l’Union africaine (UA). Ces opérations seront lancées et mises en œuvre par les organisations de l’Union africaine et/ou les organisations sous-régionales. La mission de l’UA au Darfour (Soudan) est la première à être financée au titre de la Facilité de paix.
  • [28]
    Il vise notamment le financement des activités opérationnelles du Conseil de paix et sécurité, celles permettant la médiation et le maintien de la paix, ainsi que toutes actions de formation au maintien de la paix et toutes prestations de soutien logistique et financier pour le déploiement des forces africaines de maintien de la paix.
  • [29]
    P. Hassner, « Par-delà la guerre et la paix : violence et intervention après la Guerre froide », Études, n° 9, septembre 1996, p. 156.
  • [30]
    A. N. Ayissi, « Maintien de la paix en Afrique : responsabilité et responsabilisation du continent », La prévention des conflits en Afrique : prospective pour une culture de paix, P. E. Ango (dir.), Paris, Karthala, 2001, p. 177-188.
  • [31]
    Ibidem, p. 181.

Introduction

1« L’Afrique est à beaucoup d’égards un banc d’essai – pas seulement un “laboratoire” de la conflictualité, mais aussi des solutions, puisqu’on y a rôdé aussi bien les opérations du maintien ou du rétablissement de la paix des Nations unies que la création de nouveaux États, leur construction ou leur reconstruction. » [1]

2L’Afrique reste un continent très fortement troublé par les violences extrêmes et les conflits permanents. Les guerres dont ce continent fait l’objet constituent plus que jamais un véritable défi. Victimes de leur image et d’eux-mêmes, les États africains peinent à aboutir seuls à des solutions non seulement efficaces mais s’imposant sur le long terme. La question qui se pose alors est celle du rôle à octroyer à l’État en tant qu’artisan de la paix, alors qu’il est totalement défaillant sur son propre territoire.

3En outre, les solutions en matière de règlement des conflits se retrouvent face à un autre type de défi, celui de la tendance des crises à se propager, causant la déstabilisation de pays frontaliers. Les enjeux sont en effet de plus en plus régionaux en raison de l’imbrication des sphères étatiques. La mise en commun par les pays de leurs capacités, au sein d’organisations sous-régionales à vocation économique, s’est également fortement accélérée. Ces regroupements d’États ont désormais évolué, développant leur action en matière de paix et de sécurité, thématique intimement liée aux questions économiques.

4La dynamique africaine, quant à elle, a été accentuée par la redéfinition des coopérations bilatérales entre partenaires extérieures et certains États africains, ainsi que par le développement d’une nouvelle forme de multilatéralisme compensant le désengagement onusien. En matière de maintien de la paix, l’heure est à la « décentralisation » des opérations. L’accent est mis sur la régionalisation de la gestion des conflits, ce concept étant entendu au sens large du terme. Cette notion recouvre, en effet, trois processus liés les uns aux autres, à savoir la participation des organisations régionales dans la gestion des conflits, l’implication des puissances dans leur sphère régionale et enfin le recours à des forces de maintien de la paix composées essentiellement de contingents locaux.

5En conséquence, la question de la régionalisation apparaît, au regard des débats qui agitent les enceintes internationales, comme l’une des questions essentielles de ce XXIe siècle. Elle souligne tout d’abord l’idée que les rapports entre l’Afrique et les Nations unies sont à redéfinir. En effet, il est certain que « entre délégation et coopération, ou désengagement et alibi, les liens entre l’Onu et les opérations africaines présentent néanmoins de grandes ambiguïtés » [2] qu’il est temps de dépasser. En outre, l’aide au renforcement des capacités africaines de maintien de la paix est entrée dans une nouvelle phase, tendant à faire de l’Afrique un acteur à part entière dans la résolution de ses conflits sans pour autant ignorer ses lacunes.

6La problématique de la régionalisation s’inscrit donc dans un cadre bien précis qu’il sera nécessaire, au préalable, de déterminer. La complexité des facteurs à l’origine des conflits ainsi que leur impact à l’échelle d’un État, voire de la sous-région, nécessiteront un retour sur la naissance de la violence conduisant à la militarisation des sociétés. Alors il sera possible de définir la place de la régionalisation comme mode de gestion des conflits et d’en envisager l’avenir.

De la naissance de la violence à la militarisation de la société

7L’image transmise par l’Afrique est souvent celle d’un continent où la violence se déchaîne et où des sociétés entières se déchirent. À partir de l’étude de l’émergence de la conflictualité, il est toutefois possible de s’interroger sur les conséquences d’un État oscillant entre une position d’acteur et de spectateur de sa propre faillite. En outre, du fait de cette position de faiblesse, la violence tend à légitimer une nouvelle conquête du pouvoir par des acteurs non étatiques et dont les motivations sont parfois équivoques.

L’État africain : acteur ou spectateur de sa faillite ?

8La plupart des États africains souffrent de ce que Bertrand Badie qualifie de « souveraineté fictive » [3]. En effet, l’interdépendance entre différents acteurs, comme le précise l’auteur, s’est banalisée et son impact reste très largement sous-estimé. Face à ce défi, la particularité africaine réside dans le paradoxe d’un État subissant l’ingérence du système international qui pourtant ne lui confère aucune légitimité. La défaillance de l’État africain est également d’autant plus réelle que ni sa population ni son territoire ou une quelconque autorité ne s’inscrivent dans une identité nationale. L’exacerbation de l’ethnicité comme le localisme en Afrique ne seraient pas simplement le contrecoup de la mondialisation, mais au contraire la résultante de l’échec de l’institution étatique, de son développement ainsi que des manipulations liées aux transitions politiques dont elle a fait l’objet. En outre, la question des frontières, régulièrement invoquée comme cause des conflits, doit être remise dans son contexte. Si la création de l’Organisation de l’unité africaine a assuré, grâce au principe de l’intangibilité des frontières, un statu quo, il est certain que le découpage des États alimente la porosité des limites étatiques. Il est en effet fréquent que des mouvements de rébellions internes à un État soient soutenus par des groupes ou ethnies implantés dans un pays frontalier. Il en résulte que des guerres, à l’origine internes, prennent souvent une dimension sous-régionale. L’État, à défaut de trouver une sécurité nationale dans l’insécurité régionale, accroît ainsi les risques d’instabilité pour son environnement.

9En effet, la plupart des prérogatives régaliennes dans les domaines économique, politique et sécuritaire sont quasi inexistantes. Au niveau économique, l’échec a été en s’accroissant du fait de l’ouverture des économies et de la mondialisation. Ce système a contribué au maintien de la division nord/sud même si certaines organisations comme le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale tendent à agir en faveur d’un rééquilibrage. Au niveau politique, le revers des transitions postindépendance est réel car la nécessité de créer une unité a eu pour principal effet la mise en place de régimes autoritaires. Enfin au niveau sécuritaire, l’État est non seulement incapable d’agir en matière de sécurité « traditionnelle », notamment pour la sécurisation de ses frontières, mais il l’est encore moins face aux nouveaux défis sécuritaires parmi lesquels figure la question du Sida. Cette faillite en matière de sécurité est d’autant plus considérable que l’État est artisan de sa propre insécurité. La finalité, les modes de légitimation et d’organisation comme les modes de gouvernement et de production du droit et du pouvoir sont autant de caractéristiques belligènes faisant le jeu des ingérences extérieures.

10En conséquence, quelle place faut-il accordera l’ingérence alors qu’un acteur se trouve dans l’impossibilité d’agir efficacement pour sa propre survie ? Quelle est donc la limite entre l’ingérence et la dépendance, née de la colonisation et entretenue par des liens existants entre l’Afrique et les autres continents ? En matière d’ingérence, il est nécessaire de distinguer deux types d’intervention, celles qui servent la politique des organisations supranationales face aux « souverainetés en déshérence » et celles qui ne sont en réalité qu’un moyen pour certains États de s’immiscer dans les affaires des pays voisins. La question est alors celle de savoir si la participation d’acteurs extérieurs contribue ou non à la déstructuration de l’État. Une telle appréciation est d’autant plus difficile que les intérêts des acteurs engagés dans le conflit suffisent souvent à légitimer une action favorisée par le défaut de prérogatives régaliennes.

11Affaibli sur la scène internationale et contraint à la remise en question du modèle qu’il tend à mettre en œuvre, l’État s’engage dans une phase de quête de légitimité. La recherche d’un espace au sein duquel il pourrait exercer son pouvoir devient sa principale priorité. Le plus souvent de manière démesurée, il crée à son tour une véritable dépendance à l’égard de sa population. L’État devient alors d’autant plus défaillant qu’il engendre ses propres ennemis intérieurs. Non seulement il suscite soulèvements et rébellions au sein de la population, mais il instrumentalise ces mécontentements, faisant du désordre un instrument politique. En effet, ne parvenant pas à éviter la dégradation d’une situation conflictuelle, d’une crise latente, voire d’un conflit violent, l’État cherche au contraire à retourner cette situation à son propre avantage. Il se fonde alors sur la division en ethnies, clans ou familles, pour mieux régner ainsi que pour s’assurer le monopole sur les richesses du pays.

12Les effets de la mondialisation intensifiés par l’inadéquation de l’institution étatique aux besoins du pays contribuent au développement de la pauvreté. Cet état de survie quotidien s’intègre alors dans un cercle vicieux. Face à la montée des contestations menaçant l’État, ce dernier assure sa protection en augmentant les dépenses militaires. Parallèlement, il puise dans les réserves du pays en proie à une paralysie de l’économie nationale. En outre, de ce système politique exclusif, résulte un sentiment d’injustice sociale, lui-même engendrant frustration et désespoir. L’absence de moyens pacifiques pour exprimer tout désaccord aboutit alors au recours à la violence, apparaissant comme l’unique moyen de remettre en question le pouvoir en place. En pleine phase de mutations sociales, culturelles et politiques, les États ayant recours aux pratiques autoritaires traditionnelles font dès lors de plus en plus le jeu des contestataires dont les références sont issues des valeurs modernes.

13En conséquence, ce changement en cours ne marquerait-il pas le début d’une dynamique interne, où l’État ne serait plus une victime mais un enjeu ? Cette recomposition traduirait non pas une volonté d’éradication du pouvoir, tel qu’il s’est créé après les indépendances africaines, mais davantage la recherche d’une appropriation de l’institution étatique au service des intérêts locaux et régionaux. Le conflit engagé entre l’État et ses opposants apparaît de ce fait inéluctable. Les différents protagonistes, pour certains n’étant pas préparés à cet état conflictuel et pour d’autres tentant de l’instrumentaliser, se lancent dans une conquête sans fin. Les repères temporels sont totalement effacés et désormais seule compte la finalité, laissant place à la perpétuation d’un état où s’entremêlent guerre et paix.

14Les conflits en Afrique se singularisent par cette alliance entre un état de guerre, parfois latent, et des périodes de paix. En effet, avant que ne s’instaure un état conflictuel, un certain nombre d’indicateurs peuvent révéler une situation susceptible de dégénérer. En outre, une fois les combats ayant éclaté et du fait de leur prolongement dans le temps, des périodes qui s’apparentent à des moments de paix sont parfois perceptibles. Il s’agit là d’une des caractéristiques des conflits africains, à savoir « la répétition d’un scénario », rejoué jusqu’à l’épuisement du sens donné à la guerre ou jusqu’à sa résolution. La temporalité dans les conflits constituerait ainsi l’un des défis majeurs pour leur règlement. L’absence de limites dans le temps et dans l’espace garantit aux belligérants la possibilité d’accéder au pouvoir tandis qu’elle nuit à une prise de repères nécessaires pour apporter les solutions adéquates.

15Ce rapport au temps mais aussi à l’espace du fait de la disparition de limites spatio-temporelles aboutit également à la disparition de la séparation entre les mondes civil et militaire. Les combattants gardent comme seul moyen de reconnaissance, à défaut d’uniforme, leur soif de pouvoir. Les femmes deviennent les victimes d’un état de siège quotidien, où leur vie est rythmée par la peur de devenir la proie de ces folies guerrières, de se retrouver niées par la société, par le viol et le vol de leur identité. Les enfants, quant à eux, perdent tout repère et toute innocence pour devenir soldat. La jeunesse, public cible de discours ambigus sur la révolution, l’honneur national et l’indépendance, ne lutte plus pour son avenir mais tente de se donner une identité dans un monde présent qui lui renie toute ascension sociale.

16En conséquence, comme le soulignait Philippe Delmas, « la guerre paraît [véritablement] ne plus être liée à la puissance mais à la faiblesse des États ». L’incapacité des institutions étatiques à maintenir la paix et l’unité nationale entraîne dès lors la recomposition de l’environnement sécuritaire, favorisant parallèlement la réémergence du réflexe ethnique. En raison du défaut de « forces de sécurités nationales légitimes réapparaissent d’anciennes lignes voire d’anciennes aires de séparation ou de superposition des zones de peuplement » [4]. Se déclenche alors une spirale non vertueuse où les individus se regroupent au sein de clans, d’ethnies et perçoivent toute personne extérieure comme un ennemi potentiel. Les ethnies véhiculent dès lors un sentiment d’exclusion, favorisant une fragmentation de la société. En conséquence, les guerres deviennent complexes car combinant « guerres de conscience » où la considération de soi conduit au rejet de l’autre et « guerre d’intérêts » où prime la légitimité de la lutte vue comme un moyen d’accéder au pouvoir.

La légitimité de la guerre comme moyen d’accession au pouvoir

17Le conflit, à l’origine alimenté par la volonté des populations d’agir pour instaurer un nouveau mode de gouvernement, n’atteint généralement pas son but. La violence, récupérée à des fins singulières, est le fait d’acteurs dont le nombre ne cesse de s’accroître. En effet, les populations voient la lutte armée comme un moyen de survie, voire d’ascension sociale, tandis que les dirigeants, victimes de transitions politiques ayant échoué, la considèrent comme un moyen d’accéder au pouvoir. Les acteurs tentent donc de trouver leur place dans cette instabilité quotidienne, leur action s’inscrivant dans une dimension temporelle. Sur le long terme, la lutte de certains s’apparente à la stratégie d’un groupe qui tente de se maintenir, de s’assurer une reproduction sociale et physique de lui-même ; tandis que sur le court terme, elle offre des bénéfices, des gains matériels et une reconnaissance sociale. Ainsi se distinguent deux types d’acteurs, à savoir ceux pour qui la guerre a une finalité sociale et ceux pour qui sa finalité est principalement politique.

18Précipitée dans un état de guerre permanent et face à l’obligation de se protéger, la société s’organise autour de milices. Généralement créées pour la défense des territoires dans lesquels ses membres vivent, elles cherchent à s’immiscer dans les conflits les plus locaux. Un lien étroit peut parfois se nouer entre les milices qui tentent d’affirmer leur pouvoir sur les civils et ces derniers qui ont pour objectif de les instrumentaliser pour leurs propres desseins, comme par exemple, au Kivu en République démocratique du Congo (RDC). La jeunesse tend elle aussi à sa manière à faire face à cet état d’instabilité permanent. Oubliés des aînés ou orphelins, les enfants et les adolescents se créent des rôles et vivent dans l’illusion du pouvoir et de la reconnaissance que confère le port d’une arme. Ni dans la stratégie ni dans la recherche de gains, ces enfants soldats sont les instruments de ceux qui contribuent à la destruction de l’État jusque dans son potentiel d’avenir. Ainsi « la violence comme intégration sociale fait[-elle] de la guerre une réalité sociale » [5], mais aussi un moyen légitime d’accession au pouvoir.

19En effet, la guerre reste pour beaucoup d’acteurs une stratégie d’obtention de gains matériels puis politiques. Le contrôle des ressources et des territoires devient alors un enjeu pour les groupes armés qui oscillent la plupart du temps entre banditisme, guérilla et affrontement direct avec les forces gouvernementales. Des seigneurs de la guerre contrôlent ces groupes tout en se faisant passer pour des protecteurs. En outre, ils constituent les principaux rivaux de l’État et s’opposent les uns aux autres pour s’emparer du pouvoir, leur principe se limitant à admettre que « la guerre apparaît aujourd’hui comme une stratégie crédible, qui n’est pas d’emblée vouée à l’échec » [6]. Ils mènent des combats d’endurance, recourant à des « stratégies défensives » pour se maintenir et ne visant aucune action militaire d’envergure. Ces chefs et leurs groupes pratiquent une sorte de jeu interactif sans morale ni valeur. La guerre n’a alors plus de règle, exception faite des leurs, et chaque action est une réponse au mouvement de leurs adversaires. Plus la guerre dure dans le temps et plus s’installe un mimétisme entre les belligérants qui recourent aux mêmes armes et aux mêmes arguments. Les dirigeants des milices et les forces irrégulières tendent également à développer un « complexe obsidional » au service de leurs intérêts car seul compte l’accroissement constant des territoires qu’ils contrôlent, leur permettant de se substituer progressivement à l’autorité étatique. Désormais, les États africains, affranchis de la tutelle occidentale, élaborent leurs propres stratégies où la guerre n’est plus une prérogative régalienne mais un semblant de révolte citoyenne derrière lequel se cachent des intérêts privés.

20Le paysage politique africain apparaît comme étant en pleine restructuration. La déliquescence des États s’accompagne d’une forme d’organisation économique et politico-territoriale parallèle. À la « milicianisation » de la société, à savoir la multiplication des milices issues de la population, se combine un phénomène de « désinstitutionnalisation » de l’armée. Ainsi selon Marc Fontrier, les forces armées « tirent [-elles] l’essentiel de [leurs] revenus non de [leur] allégeance à l’État mais des ressources confisquées à la collectivité nationale sous formes d’exactions diverses ». Le terme de « sobels » [7] qualifie désormais la transformation des soldats le jour en rebelles la nuit. De cet état de fait résultent une autonomisation des groupes armés et la prolifération des chefs de guerre, traduisant une nouvelle perception de la res publica. La privatisation de la guerre apparaît alors comme l’une des conséquences du vide laissé par un État dans l’impossibilité d’assurer ses missions régaliennes. En outre, la privatisation de la guerre, conséquence de la privatisation de l’État, accentue la dissémination des prérogatives étatiques, voire leur détournement à des fins personnelles.

21En effet, la substitution des forces de sécurité par des mercenaires et des sociétés privées contribue à l’affaiblissement des institutions étatiques. Parallèlement, cette vulnérabilité a pour résultat l’émergence d’acteurs concurrents, créant à leur niveau un système totalement indépendant, y compris au niveau financier. Désormais la seule logique qui prévaut est celle de la guerre perçue comme une « délicieuse part de gâteau » [8] et dont chacun veut le plus gros morceau. Dans les sociétés en guerre, il n’existe dès lors plus aucun projet politique transcendant la violence, la recherche du pouvoir et l’enrichissement, considérés comme les seuls enjeux fondamentaux. Pour alimenter leur combat, les groupes armés installent tout d’abord une économie de guerre parallèle, basée sur l’exploitation des richesses naturelles, les pillages des populations ainsi que le détournement de l’aide humanitaire. En outre, ils créent des alliances avec de grandes compagnies internationales, minières et pétrolières plus ou moins discrètement impliquées dans le conflit. Il est dès lors certain que si toutes les guerres n’ont pas une explication économique, toutes ont besoin d’un financement.

22Selon Jean-François Bayart [9], les enjeux des guerres croisées ont à présent des modalités inédites. Ces conflits contribuent à un mouvement général de libéralisation en laissant de plus en plus de possibilités pour des opérateurs privés. Ces derniers agissent de deux manières soit ils « sponsorisent » un conflit afin d’en retirer un profit ou d’en minimiser les effets négatifs ; soit ils prennent part aux combats. Dans ce dernier cas, ils sont rémunérés par les intérêts qu’ils défendent ou en recevant en contrepartie des concessions minières ou autres comme c’est le cas pour la société Executive Outcomes. L’ouverture à des acteurs étrangers privés accentue le dysfonctionnement profond dont souffrent les sociétés africaines et alimente la guerre qui a déjà un coût faible en puisant dans une population jeune, de chômeurs et sans ressource. À cela s’ajoute la facilité avec laquelle il est possible d’équiper les soldats avec des armes légères, simples d’utilisation et dont le prix reste peu élevé. La circulation des armes, simplifiée par l’absence de contrôle, rend d’autant plus difficile la possibilité d’agir efficacement contre la militarisation de la société qu’elles suscitent au sein des jeunes populations un attrait relativement fort. Il est incontestable que, bénéficiant de leurs propres revenus, les groupes armés sont beaucoup moins contrôlables. Il en résulte une autonomisation progressive des belligérants mais aussi de la guerre qui engendre sa propre dynamique, créant un véritable système de conflit.

23Si les causes d’un conflit sont souvent d’origine interne, certains facteurs, du fait de leur mobilité, favorise la propagation du conflit. Les réfugiés constituent un groupe spécifique de population au statut théoriquement provisoire, mais dont l’histoire des dernières décennies indique qu’il peut se pérenniser. En Afrique, cette question a pris au fil des ans et de la cadence des conflits, une importance considérable, le continent détenant le record peu enviable des déplacements forcés. Ce phénomène contribue en outre à la déstabilisation des États, incapables d’y faire face tant sur le plan logistique que politique. En conséquence, la création de camps est censée pouvoir endiguer ces déplacements. Émergent alors des acteurs tels que les organisations humanitaires qui, à travers le concept d’ingérence humanitaire, s’immiscent petit à petit dans les conflits. Ces mouvements de masse sont néanmoins doublement déstabilisateurs, non seulement car ils peuvent susciter des affrontements avec les populations locales, mais aussi car ils servent souvent de base arrière à des mouvements de rébellion. Ils permettent aussi le ravitaillement de forces rebelles qui pratiquent la prédation à l’encontre des populations. Le conflit se déplace donc d’une zone à une autre, créant un système de conflit à l’échelle de la sous-région.

24Le système de conflit pourrait se définir comme une articulation entre conflits armés, produits dans des conjonctures nationales. Relevant d’acteurs, de modalités et d’enjeux différents, et du fait de cette articulation, les frontières sociales, spatiales et politiques qui les dirigeaient initialement sont brouillées. Ces situations conflictuelles entrent en résonance et s’imbriquent les unes aux autres. Elles transforment leur forme de reproduction, les parties qui s’affrontent ainsi que les enjeux de la lutte. La conséquence de cette imbrication est la création d’un système qui rend complexes les logiques des acteurs et obscurcit les alliances qui peuvent paraître sans logique. Par exemple l’impact du conflit libérien avec Charles Taylor a été perceptible en Sierra Leone et en Guinée, avec une implication de la Côte-d’Ivoire, du Burkina Faso et du Nigeria.

25Ainsi, les conflits africains s’inscrivent dans une problématique générale qui est celle de la faiblesse de l’État et ses conséquences. La lutte armée se retrouve instrumentalisée par des entités concurrentes, qui constituent à leur tour des vecteurs potentiels d’extension du conflit. Aussi, après avoir insisté sur les facteurs générateurs de conflit, est-il nécessaire de comprendre en quoi la gestion des conflits africains est si complexe. Comment expliquer l’incapacité à gérer et résoudre un conflit, y compris par ceux qui l’engendrent et l’alimentent ? Face aux différents enjeux, un certain nombre de solutions ont été proposées, prônant une action non plus à l’échelle nationale mais au niveau supranational. La question serait donc désormais de savoir si le concept de régionalisation est susceptible de constituer un élément de réponse aux crises africaines.

La régionalisation : un mode de gestion des conflits

26Il est désormais nécessaire de s’interroger sur la régionalisation, non seulement car il s’agit d’un concept d’actualité, mais aussi car cette notion ne fait pas l’objet d’une définition précise. En effet, la volonté de faire de l’échelon régional un cadre adapté à la gestion des conflits reste un défi. En outre, cette réussite est d’autant plus incertaine que se pose encore la question, au regard de ses avantages et de ses inconvénients, de l’avenir de cette régionalisation.

Le cadre régional en tant que défi conceptuel

27La notion de régionalisation est loin de faire l’objet d’une définition communément acceptée au regard du contexte et des auteurs. Pour tenter de déterminer la nature de ce concept, il est possible de retenir trois processus envisagés par Michel Liégeois [10]. Tout d’abord « une implication croissante des organisations régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité au sein de leur aire de compétence », puis « un engagement prioritaire des puissances dans la résolution à l’intérieur de leur sphère régionale d’influence », enfin « des forces de maintien de la paix constituées essentiellement par des contingents en provenance de pays de la région de déploiement ». Le terme de multilatéralisme [11] régional fera ici référence au concept de « complexe de sécurité » [12], tel que défini par Buzan. Ce dernier recouvre en effet un système composé d’acteurs, de structures, de moyens, d’intérêts et d’attitudes divers. Les États peuvent alors être divisés en différentes catégories :

  • « les puissances globales » dont les intérêts sont planétaires et dont le déploiement est quasi illimité ;
  • « les grandes puissances » dont les intérêts sont nationaux et le déploiement est limité au-delà de leur région d’appartenance ;
  • « les puissances régionales » dont les intérêts sont régionaux et le déploiement possible uniquement sur leur zone d’appartenance ;
  • « les petits États, militairement faibles » qui ne peuvent pas répondre à leurs besoins de sécurité, sauf en s’entraidant, ni contester ou se défendre contre les trois premières catégories d’État citées.

28Dans le cadre de la région, la question principale tourne principalement autour du dilemme de sécurité, élément accélérateur dans la formation du complexe régional. Il existe en effet deux types de dilemme de sécurité, un dilemme externe auxquels tous les États sont soumis et un dilemme interne. Lié à la survie et au maintien du régime au pouvoir, ce deuxième dilemme caractérise les « États faibles » qui tendent à privilégier l’instance, globale ou locale, qui préservera les principes de non-ingérence, d’intégrité territoriale et de souveraineté. En outre, le dilemme externe souligne l’idée que l’interaction avec les acteurs extérieurs conduit chacun des États à s’interroger sur la nature de ses relations avec ses pays voisins. Dans un souci de maintenir un certain équilibre et un climat de paix et de stabilité, les États vont favoriser le regroupement au sein d’organisations à vocations diverses (politique, économique). Ils vont ainsi établir des principes de non-discrimination, d’indivisibilité, de réciprocité mais aussi de continuité afin d’éviter que les différences de puissance entre les États ne conduisent à l’établissement d’un leadership interne. Les petits États se retrouvent dés lors dans la possibilité de revendiquer le respect de leur souveraineté à un échelon supranational. Ils ont également l’assurance qu’en cas d’agression à leur encontre, des États plus puissants réagiront. En ce qui concerne les autres acteurs régionaux, en fonction de leur puissance, ils chercheront davantage à promouvoir un consensus afin de contrer toute possibilité d’hégémonie régionale. Le complexe s’assimilera donc à un « concert régional ». Enfin, dans le cas où les intérêts des grandes puissances sont en conflit, le complexe aura tendance à évoluer en pacte de défense collectif. Ainsi, quelles que soient les capacités des États, l’établissement d’institutions régionales apparaît-il comme le noyau dur à partir duquel le multilatéralisme pourra se développer dans la région.

29La création de structures assurant une réponse au quotidien et de manière la plus rapide et la plus adaptée possible va donc s’imposer. La question qui se pose toutefois est celle de savoir si l’échelon régional [13] favorise un interventionnisme sous-régional. Les complexes « globaux » donnent-ils du sens à la sous-région ? En effet, quelle place laisser à l’Onu en tant qu’organisation internationale à vocation universelle mais aussi à l’Union africaine, organisation régionale africaine par excellence ? Dans la pratique comme dans les textes, la sous-région n’est pas mise à l’écart, voire occupe une place privilégiée. L’Union africaine, qui envisage la création de forces africaines en attente (FAA), confie une importance majeure à cinq organisations [14] au sein desquelles elle envisage la création d’une brigade sous-régionale. Quant à l’Onu, le chapitre VIII, relatif aux accords régionaux [15], prévoit le recours à des « accords ou organismes régionaux pour l’application des mesures coercitives prises sous son autorité ». Bien que cette « décentralisation » du système de sécurité collective ait été critiquée, elle révèle néanmoins l’incapacité du système des Nations unies à supporter le poids des opérations de maintien de la paix (OMP) durant la Guerre froide. En outre, elle souligne aussi l’incapacité à répondre aux défis posés par de nouveaux types d’interventions.

30Conséquence de la fin de la Guerre froide, un nouvel environnement international a émergé au début des années 1990. En effet, après les contraintes posées par la bipolarité, la scène internationale a été caractérisée par la mise en place d’un système multipolaire. Par sa nature, l’antagonisme Est-Ouest, qui avait abouti à la formation d’organisations sécuritaires regroupant les États, a conduit à privilégier les actions collectives par rapport aux interventions individuelles. Cette période est aussi marquée par une évolution des différents degrés de coopération et d’intégration. Le développement d’opérations réalisées sans autorisation préalable du Conseil de sécurité va alors coïncider avec la montée en puissance des organisations régionales. Dans ce contexte, la régionalisation apparaît principalement comme un moyen de combler les lacunes d’un système onusien jusque-là jugé inefficace, contraignant et surtout paralysé par l’antagonisme entre les deux blocs. En outre, la nature des conflits post-Guerre froide, ainsi que leurs enjeux, majoritairement intra-étatiques (décolonisation, conflits de faible intensité) et ayant une tendance à la propagation régionale, vont impliquer la nécessité non seulement d’une connaissance régionale supérieure mais aussi d’une meilleure maîtrise des sensibilités culturelles.

31Ainsi la mise en place d’un nouveau système international a eu pour corollaire l’évolution du concept de paix et de sécurité. Il est désormais nécessaire de favoriser le développement de réponses adaptées dépassant le simple cadre étatique. La globalisation comme les innovations technologiques ont, sur la souveraineté comme sur la notion de frontière, un impact direct et de plus en plus grand. Le progrès dans les communications et les transports crée des degrés d’interdépendance complexe et les distances culturelles, économiques, politiques et sociales tendent à se réduire. L’émergence de ce qui pourrait être qualifié de « citoyenneté planétaire » [16] favorise le transfert de prérogatives individuelles vers des entités supranationales. La globalisation a aussi augmenté le nombre d’acteurs pouvant participer à des actions multilatérales. Alors que l’Onu tend à se faire sa place sur la scène internationale, les valeurs sur lesquelles elle s’était fondée (la souveraineté, la non-ingérence et l’intangibilité des frontières), progressivement pour certaines se transforment et pour d’autres s’effondrent.

32La question qui se pose alors est celle de l’intérêt des États à recourir à une sécurité collective, contaminée par l’enjeu de la sécurité régionale, et parallèlement de leur engagement dans les opérations de maintien de la paix. Il est certain que la participation des États à une OMP permet avant tout d’asseoir leur réputation et leur place en tant qu’acteurs militaires et politiques. L’option de l’action collective a l’avantage de répartir le coût sur l’ensemble des acteurs et de faire l’objet d’une certaine légitimité. La politique étrangère des pays industrialisés après la Guerre froide pourrait ainsi se résumer en plusieurs principes [17] : « Devenir aussi riche que possible (le but primordial est la prospérité) ; attaquer les grands problèmes de l’heure avec détermination et célérité, traiter les problèmes majeurs, à long terme, de façon avisée et judicieuse ; faciliter le développement des pays les moins favorisés lorsque ceux-ci “se prennent en main” et expriment leur volonté de faire une réelle contribution à la communauté internationale ; s’efforcer, sur une base multilatérale, de résoudre les conflits dans le monde, surtout si cela peut être fait de façon économique et sans effusion de sang ; chercher à confiner et à contenir les conflits mineurs si on ne peut y trouver une solution. » L’avenir de la régionalisation ne dépendrait donc ni de l’organisation qui agit, ni des bénéficiaires, mais principalement des pays membres et contributeurs. Le multilatéralisme régional, comme tout mode de règlement des conflits, présente en effet un certain nombre d’avantages et d’inconvénients.

33Le recours à la régionalisation aux dépens des actions étatiques ou des actions menées en vertu du multilatéralisme onusien soulève certaines interrogations. L’argument qui est le plus souvent invoqué est celui du risque d’aboutir à une fragmentation de la sécurité où ni les États et ni l’Onu n’auraient leur place. La résolution des conflits serait alors soumise à un cycle sans fin où les États délégueraient à l’Onu qui déléguerait aux organisations régionales. La question qui se pose alors est celle de savoir s’il s’agit d’une véritable stratégie de délégation ou d’un état de fait, et dans ce contexte, de savoir comment la notion de régionalisation va pouvoir se développer. Le concept de sécurité régionale, entré dans une phase d’accélération, n’est-il pas en train de devenir autonome ? En outre, cette tentative de déresponsabilisation ne conduirait-elle pas à une réorganisation de la légitimité des actions collectives et surtout à la dilution de l’idéalisme universel. La plupart des inconvénients, invoqués lors des premières opérations menées dans un cadre régional tendent, quant à eux, à être surmontés. En effet, déléguer la gestion des conflits à un échelon régional, voire sous-régional, a souvent été perçu comme un moyen de légitimer une intervention dans la mesure où ces organisations n’avaient ni les moyens financiers ni les capacités logistiques. En outre, cette aide extérieure pouvait conduire à une répartition inégale des compétences régionales, dans la mesure où certaines organisations pouvaient être favorisées par rapport à d’autres. Le principal risque reste la mise à l’écart de certaines régions favorisant l’émergence de zones de non-droit, et créant une sorte d’apartheid où les « Deprived areas that are economically and strategically peripheral will experience the double deficit of perpetual economic crisis and a peacekeeping apartheid » [18].

34En outre, la question qui se pose cette fois, concernant le recours aux organisations sous-régionales comme mode de gestion des conflits, porte sur leur légitimité et son corollaire la souveraineté. En effet, l’exemple de l’intervention de l’ECOMOG, groupe d’interposition de la CEDEAO au Liberia entre 1990 et 1997 met en avant ces deux notions ainsi que les risques découlant de l’instauration ou de la pérennisation d’une situation d’hegémon[19]. En outre, comment légitimer une action régionale dans l’hypothèse où celle-ci n’est soumise à aucun mandat onusien ? Il est également indispensable de trouver une limite entre le respect de la souveraineté et l’ingérence dans les affaires internes d’un État. Cette séparation est d’autant plus difficile à faire à l’échelon sous-régional africain du fait de l’implication des États voisins dans les conflits régionaux. La possibilité laissée aux organisations sous-régionales d’agir ne doit donc pas pour autant exclure la nécessité d’un mandat clair et défini.

35Ainsi de cette tendance à la régionalisation des conflits, découle la nécessité de résoudre ces derniers à un échelon supranational. En effet, la complexité des conflits africains implique une connaissance des enjeux, des dynamiques internes et externes, et les États appartenant à la sous-région restent les mieux placés pour ce type d’expertise. En outre, la proximité du conflit et le partage d’un dilemme de sécurité et d’intérêts communs font des organisations sous-régionales des acteurs de premier plan. Cette affirmation est d’autant plus d’actualité que la volonté d’agir des États membres ne fait plus aucun doute. Même si l’échelon régional (Union africaine) est aussi à considérer, le nombre d’acteurs, réduits au niveau sous-régional simplifie les procédures de décisions, les rencontres au sommet et contribue aussi à une meilleure transparence. Parmi les arguments en faveur des actions sous-régionales, figurent ceux de l’infériorité des coûts, de la rapidité et de l’efficacité. La capacité de réaction face à un conflit est souvent déterminante pour la gestion de ce dernier. Néanmoins, il est souvent nécessaire de prendre le temps d’analyser une situation et de répondre de manière adaptée à une situation d’urgence. La rapidité dans la mise en place d’une intervention dépendra surtout des capacités d’anticipation et de suivi de la crise. La création de mécanismes d’alerte précoce reste donc primordiale car une crise se gère aussi en amont. En conséquence, face aux obstacles et aux limites auxquels doivent faire face les organisations sous-régionales, la place de la régionalisation reste encore à inscrire dans la durée.

Quel avenir pour la régionalisation en Afrique ?

36Considérer l’intérêt de la régionalisation dans la résolution des conflits africains ne signifie pas se limiter aux seuls acteurs africains. En effet, le multilatéralisme régional peut aussi être celui d’une organisation à vocation sécuritaire comme l’Union européenne, très engagée en Afrique, notamment depuis l’opération Artémis en République démocratique du Congo en 2003. Cette première opération européenne hors des frontières du continent s’est déroulée du 12 juin [20] au 1er septembre 2003 en République démocratique du Congo (RDC) dans la région de Bunia, au nord est du pays. Elle avait pour objectif la stabilisation du chef-lieu de la région de l’Ituri dans l’attente de l’arrivée d’un nouveau contingent de Casques bleus de la Mission des Nations unies en RDC (MONUC). Cette mission, définie comme étant de type Petersberg [21] a été mise en œuvre sans recourir pour la première fois aux accords de « Berlin Plus » prévoyant l’utilisation des moyens de l’Otan. Cette opération traduit de manière directe la volonté européenne de mettre en œuvre une politique de projection de stabilité et de sécurité dans un monde en mutation. La particularité d’Artémis tient aussi à l’emploi du concept de « nation cadre » [22] assuré par la France.

37L’intervention européenne a un certain nombre d’avantages comme d’inconvénients. La question est en premier lieu celle de l’intérêt des États membres. En effet, face à un continent sujet à une constante instabilité, l’Union européenne, tout en assurant sa propre sécurité [23], s’implique pour promouvoir la paix hors de ses frontières. Il semblerait donc que l’intérêt national trouve à s’exprimer à travers des actions collectives européennes. L’avantage de ce type d’action est qu’elle n’est pas marquée négativement comme ont pu l’être certaines interventions extérieures, notamment des pays dits « du Nord ». Principaux bénéficiaires du système des échanges internationaux et de l’exploitation des ressources naturelles, ils ont parfois été considérés comme des entités ayant imposé un modèle économique pas toujours satisfaisant. De même, certains pays se sont aussi vu reprocher leur soutien direct ou non aux régimes autoritaires. Au regard de ces critiques, il semblerait que le recours à une entité supranationale comme partenaire privilégié ne soit pas à exclure. Pourquoi ne pas alors envisager un dialogue de type interrégional comme partenariat d’avenir ?

38Dans le cadre de cette coopération, puis de ce partenariat, chacun des acteurs devra trouver sa place et surtout rester neutre. Il s’agira surtout d’éviter qu’une lecture différente du conflit, accentuée par l’ignorance de certaines spécificités du continent, ne conduise à une mauvaise action sur le terrain. Les acteurs engagés dans le conflit ont, en effet, généralement tendance à privilégier les évènements plutôt que les processus, les initiatives personnalisées plutôt que les évolutions spontanées, les péripéties plutôt que la dynamique autonome du phénomène conflictuel, l’anticipation d’une victoire ou d’une défaite plutôt que celle d’une résolution. La gestion d’un conflit impliquerait donc la mise en place d’une organisation de l’espace et du temps qui doit être commune aux différents acteurs présents, en favorisant la dynamique sous-régionale africaine.

39Historiquement, les organisations sous-régionales (OSR) ont été créées pour répondre à un besoin des États en matière de développement économique et social. Toutefois, en raison de la complexité grandissante des situations de crise en Afrique et de l’intérêt moins marqué de la communauté internationale, elles ont dû redéfinir leurs missions dans le domaine sécuritaire principalement à partir des années 1990 [24]. En outre, l’effet perturbateur des conflits sur la sous-région a eu des conséquences négatives sur les efforts de coopération et de développement. Les pays membres ont donc considéré que tout regroupement d’État était voué à l’échec s’il se limitait à une dimension économique. Désormais, les objectifs communs à toutes les OSR sont la création de mesures de confiance par des initiatives et des activités. De même, l’engagement et l’harmonisation de politiques entre les États membres permettront de lancer des opérations de gestion de crise ainsi que de mettre fin à la rivalité et à la méfiance profonde entre les États.

40Le relais ainsi opéré par les initiatives africaines pose néanmoins la question de la prise en charge et principalement des moyens pour répondre à leurs objectifs. En effet, les obstacles rencontrés par les États membres sont nombreux, que ce soit au niveau financier, politique ou opérationnel, et le seul moyen d’y faire face restera de faire appel à des contributeurs ou à des intervenants extérieurs au continent. Il s’agit alors d’envisager un soutien qui n’implique pas une présence et une immixtion trop importante de la part des partenaires extérieurs. L’objectif est de continuer à redéfinir un partenariat en prenant en considération les besoins des Africains, les moyens eux-mêmes tenant compte de la nature des conflits, sans oublier des mesures de contrôle adaptées. Un choix devrait alors être fait dans une sous-région en faveur d’OSR disposant d’une organisation appropriée ou, si celle-ci n’a pas la capacité et la légitimité, d’influer positivement sur son rôle en matière de paix et de développement.

41En outre, ce processus devra rester dans une logique régionale. Avant la création de l’UA [25], les États, soucieux de respecter les principes de souveraineté, d’intégrité territoriale et de non-ingérence dans les affaires intérieures, ont toujours tenté de résoudre leurs différends hors d’un cadre institutionnel. L’inefficacité de ce type d’approche a conduit à la création en 1993 du Mécanisme pour la prévention, la gestion le règlement des conflits. La naissance de l’UA en 2002 et la création du Conseil de paix et de sécurité [26] en 2004 ont impulsé un véritable mouvement qui a abouti au développement de nouveaux partenariats. L’Union européenne a établi notamment un soutien [27] aux différents mécanismes en matière de paix et de sécurité. En outre, afin de favoriser le dialogue, a été créé un sommet Europe-Afrique dont le premier s’est tenu au Caire en 2000. En 2002, un programme communautaire de soutien aux activités de consolidation de la paix et de la transition de l’UA a été signé [28]. Ainsi, ce multilatéralisme régional tend-il progressivement à se mettre en place, en se basant sur trois piliers qui sont l’Europe, l’Afrique et accessoirement l’Onu.

42Un nouveau contexte politique a donc vu le jour concernant les relations interrégionales notamment entre l’Europe et l’Afrique. Désormais, il s’agit de déterminer non seulement le type de politique européenne ainsi que le cadre institutionnel africain à privilégier, mais aussi le nouveau multilatéralisme régional à mettre en place en Afrique. En effet, face à la prolifération des organisations sous-régionales africaines, il est nécessaire de déterminer lesquelles seront les plus aptes à mettre en œuvre des mesures de gestion des conflits ainsi que de définir une coordination optimale entre elles. Ensuite, il est également incontournable de s’interroger sur la place de l’UA en tant que relais des OSR au niveau européen, favorisant ainsi une « politique par le bas » ou en tant qu’élément d’impulsion à l’égard de ces organisations, créant ainsi une « politique par le haut ». L’heure est à la responsabilisation du continent africain. En effet, il semblerait que soit révolu le temps où les sociétés « individualistes et pacifiques, en proie à leurs propres crises intérieures, [interviennent] dans des guerres civiles ou des conflits ethniques dont les racines sont lointaines et les solutions peu évidentes, dont les protagonistes obéissent à des codes ou des systèmes de valeurs opposés » [29]. Pour autant, le concept de responsabilisation ne doit pas uniquement conduire à faire porter à l’Afrique l’ensemble de ses fardeaux. Cette notion se devra d’être constructive et laisser au continent sa part dans la construction de la paix et de responsabilité sans occulter les responsables des conflits en Afrique.

43Anatole N. Ayissi [30] prône à ce sujet une régionalisation au sens large favorisant le régionalisme, la flexibilité et la complémentarité. En effet, comme il le souligne, la question n’est pas tant de savoir si l’Afrique est seule responsable de ses conflits, mais de s’interroger sur les ordres et les degrés de responsabilité. En tant qu’entité géographique et sociopolitique, l’Afrique est un continent unique qui s’inscrit toutefois dans un système international, dont elle constitue un sous-système et dont elle dépend. « Parce que l’Afrique est le monde, et parce que le monde est aussi l’Afrique, rien de ce qui est insécurité en Afrique ne devrait, objectivement, laisser le monde indifférent. » [31] Il s’agit donc d’envisager une régionalisation où les institutions ayant le plus de capacités ne se focalisent pas sur leur propre expérience sans prendre en compte les organisations les plus faibles. Dans ce nouveau cadre, les Nations unies devront aussi trouver leur place afin que soit faite une division claire des tâches pour éviter de ne rien faire ou au contraire de dupliquer les efforts. Il s’agira de permettre la réalisation d’accords sur les mécanismes de consultation et d’éviter les tentatives d’hégémonisme. La régionalisation pourrait alors apparaître comme un compromis où l’Onu garde une part de responsabilité et où les OSR, soutenues par des acteurs extérieurs, voient leur action légitimée.

44L’Afrique pourrait ainsi devenir un lieu d’avenir pour les Nations unies et ses partenaires. La disparition des valeurs et principes sur lesquels s’est fondé l’Onu empêche l’organisation d’affronter cette période d’ambivalence et d’incertitude, cette époque de désordre, de turbulences et de transition. En conséquence, elle devra en tout état de cause se prêter à un exercice d’adaptation, pour rendre ses structures et ses processus souples pour survivre aux changements. […] Comme aimait à le rappeler Dag Hammarskjöld, ancien secrétaire général de l’Organisation – qui a perdu la vie au cours d’une mission de paix en Afrique – : « L’Onu n’a pas été créée pour conduire l’humanité au paradis mais pour la sauver de l’enfer. » L’Afrique sera peut-être le lieu où l’Onu retrouvera son paradis perdu. En outre, si avec une Onu plus forte, le cadre juridique ne fait plus défaut, se posera toujours la question de la gestion des crises. En outre, alors que les conflits africains ne cessent d’alimenter la recherche de solutions pour la paix, il est néanmoins évident qu’une société stable n’éradique pas ses conflits mais cherche au contraire à les maîtriser. Ainsi une gestion de conflit pour être efficace doit-elle avant tout être constructive. Il est donc fort à parier que seule une coopération efficace entre l’Union européenne, l’Onu et l’Afrique, sera à privilégier aux dépends des actions étatiques de moins en moins nombreuses et toujours aussi intéressées.


Annexe

Chapitre VIII de la Charte des Nations unies

Accords régionaux

Article 52

451 – Aucune disposition de la présente Charte ne s’oppose à l’existence d’accords ou d’organismes régionaux destinés à régler les affaires qui, touchant au maintien de la paix et de la sécurité internationales, se prêtent à une action de caractère régional, pourvu que ces accords ou ces organismes et leur activité soient compatibles avec les buts et les principes des Nations unies.

462 – Les membres des Nations unies qui concluent ces accords ou constituent ces organismes, doivent faire tous leurs efforts pour régler d’une manière pacifique, par le moyen desdits accords ou organismes, les différends d’ordre local, avant de les soumettre au Conseil de sécurité.

473 – Le Conseil de sécurité encourage le développement du règlement pacifique des différends d’ordre local par le moyen de ces accords ou de ces organismes régionaux, soit sur l’initiative des États intéressés, soit sur renvoi du Conseil de sécurité.

484 – Le présent article n’affecte en rien l’application des articles 34 et 35.

Article 53

491 – Le Conseil de sécurité utilise, s’il y a lieu, les accords ou organismes régionaux pour l’application des mesures coercitives prises sous son autorité. Toutefois, aucune action coercitive ne sera entreprise en vertu d’accords régionaux ou parties organismes régionaux sans l’autorisation du Conseil de sécurité ; sont exceptées les mesures contre tout État ennemi au sens de la définition donnée au paragraphe 2 du présent article, prévues en application de l’article 107 ou dans les accords régionaux dirigés contre la reprise, par un tel État, d’une politique d’agression, jusqu’au moment où l’Organisation pourra, il la demande des gouvernements intéressés, être chargée de la tâche de prévenir toute nouvelle agression de la part d’un tel État.

502 – Le terme « État ennemi », employé au paragraphe 1 du présent article, s’applique à tout État qui, au cours de la Seconde Guerre mondiale, a été l’ennemi de l’un quelconque des signataires de la présente Charte.

Article 54

51Le Conseil de sécurité doit, en tout temps, être tenu pleinement au courant de toute action entreprise ou envisagée, en vertu d’accords régionaux ou par des organismes régionaux, pour le maintien de la paix et de la sécurité internationale.

Bibliographie

  • Ouvrages

    • Ayissi (A. N.), « Maintien de la paix en Afrique : responsabilité et responsabilisation du continent », in La prévention des conflits en Afrique : prospective pour une culture de la paix, Ango Ela (P.), Paris, Karthala, 2001, p. 177-188.
    • Granvoinnet (H.) et Schneider (H.) (dir.), « La gestion de conflits en Afrique : un défi permanent », Centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques, programme de recherche « Croissance durable dans les pays pauvres, économie politique et développement en Afrique », in Contributions de la conférence « Politiques de prévention des conflits, le rôle de la communauté internationale », Paris, 3 et 4 avril 1997, Paris, OCDE, 1998.
    • Monroy (M.) et Fournier (A.), Figures du conflit : une analyse systémique des situations conflictuelles, Paris, PUF, 1997.
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    • « Disciplines et déchirures : les formes de la violence », Cahiers d’études africaines, Paris, Ehess, 1998, n° 150-152, vol. XXXVIII.
  • Articles

    • Bayart (J.-F.), « L’embrasement de l’Afrique subsaharienne », Politique internationale, n° 77, 1997, p. 185-202.
    • Bonnemaison (E.), « Refaire de la sécurité en Afrique un bien public », Afrique contemporaine, n° 200, octobre-décembre 2001, p. 3-16.
    • Cahin (G.), « Les Nations unies et la construction de la paix en Afrique : entre désengagement et expérimentation », Revue générale de droit international public, n° 1, 2000, p. 73-105.
    • Fontrier (M.), « De nouvelles guerres africaines : transformations de la violence et menaces sur les tracés frontaliers en Afrique centrale », Stratégique, n° 80, 2000, p. 37-72.
    • Hassner (P.), « Par-delà la guerre et la paix : violence et intervention après la Guerre froide », Études, n° 9, septembre 1996, p. 149-158.
    • Hugon (P.), « Comment comprendre les conflits en Afrique », Marchés tropicaux et méditerranéens, n° 2931, janvier 2002, p. 55-56.
    • Job (B. L.), « Multilatéralisme et résolution des conflits régionaux : les illusions de la coopération », Études internationales, décembre 1995, n° 4, p. 667-684.
    • Loungou (S.), « Économies parallèles et pérennisation des conflits armés en Afrique subsaharienne », Stratégique, n° 80, 2000, p. 89-109.
    • Vitalis (J.), « Les crises africaines. Violence, pouvoir et profit », Études, décembre 2003, p. 585-595.

Notes

  • [1]
    Éditorial de S. Sur dans « Les conflits en Afrique », Questions internationales, n° 5, janvier-février 2004, p. 1.
  • [2]
    A. S. Millet-Devalle, « L’évolution des OMP en Afrique » ARES, n° 50, fascicule I, vol. XX, janvier 2003, p. 17.
  • [3]
    K. Rosecrance, B. Badie, P. Hassner, P. de Senarclens, Débat sur l’État virtuel, Paris, Presses de Sciences Po, 2002, p. 131.
  • [4]
    M. Fontrier, « De nouvelles guerres africaines : transformations de la violence et menaces sur les tracés frontaliers en Afrique centrale », Stratégique, n° 80, 2000, p. 44.
  • [5]
    « Violent imaginaires and violent practice », in Anthropology of Violence and Conflict, dirigé par B. E. Schmidt et I. W. Schroder, Londres, Routledge, 2001, VI, p. 229.
  • [6]
    « Les conflits en Afrique », Questions internationales, n° 5, janvier-février 2004, p. 29.
  • [7]
    La création de ce mot résulte de la combinaison des termes « soldats » et « rebelles ».
  • [8]
    D. Ugresic, écrivain cité dans Anthropology of Violence and Conflict, op. cit.
  • [9]
    J.-F. Bayart, « L’embrasement de l’Afrique subsaharienne », Politique internationale, n°77, 1997, p. 185-202.
  • [10]
    M. Liégeois, « Opérations de paix : la question de la régionalisation », in Guide du maintien de la paix, dirige par J. Coulon, Canada, Éditions Athéna, 2004, p. 17-33.
  • [11]
    Le multilatéralisme est défini comme « forme institutionnelle élémentaire de la vie internationale moderne », par Ruggie cité dans B. L. Job, « Multilatéralisme et résolution des conflits régionaux : les illusions de la coopération », Études internationales, décembre 1995, n° 4, p. 668.
  • [12]
    Buzan, People, States and Fear, Londres, Harvester Wheatshcaf, 1991.
  • [13]
    La sous-région ou l’échelon sous-régional seront considérés comme un sous-ensemble parmi d’autres qui composent le continent, ce dernier étant qualifié généralement d’échelon régional. Par exemple : la CEDEAO à l’ouest, la CEEAC au centre ou l’IGAD à l’est sont des sous-régions ; à l’inverse l’Union africaine est une organisation régionale regroupant tous les États africains, excepté le Maroc.
  • [14]
    La Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC) et l’Union du Maghreb arabe (UMA).
  • [15]
    Voir annexe 1.
  • [16]
    W. A. Knight, « Multilatéralisme ascendant et descendant : deux voies dans la quête d’une gouvernance globale », Études internationales, décembre 1995, n° 1 p. 705.
  • [17]
    J. Mueller, « Le concept de puissance et la politique internationale depuis la fin de la Guerre froide », Études internationales, op. cit., p. 717.
  • [18]
    M. Pugh, The world Order Politics of Regionalization, United Nations and Regional Security : Europe and Beyond, p. 38.
  • [19]
    Il est ici fait référence à la place occupée par le Nigeria dans le cadre sous-régional. L’intervention de l’ECOMOG a en effet été critiquée par certains États du fait de la prédominance nigériane au sein de la force ainsi qu’au regard de l’impact de son rôle hégémonique dans la gestion du conflit.
  • [20]
    La résolution 1484 a été adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies le 30 mai 2003, et la décision d’action commune du Conseil a été prise le 5 juin 2003.
  • [21]
    Dans la déclaration de Petersberg du 19 juin 2002, le Conseil des ministres de l’UEO indiquait que les forces des États membres pouvaient être utilisées pour « des missions humanitaires ou d’évacuation de ressortissants, des missions de maintien de la paix et des missions de forces de combat pour la gestion des crises, y compris des opérations de rétablissement de maintien de la paix ».
  • [22]
    Développé et avalisé par la déclaration de Paris du Conseil des ministres de l’UEO le 13 mai 1997, ce concept permet à un des pays membres disposant de moyens adaptés de piloter une éventuelle opération. L’objectif était de donner à l’UEO les moyens de réaliser de manière entièrement autonome une action conforme aux missions de Petersberg. Ce concept autorise également la mise en place dans les plus brefs délais d’un état-major européen sur la base de moyens nationaux.
  • [23]
    Elle lutte notamment contre l’émergence de foyers terroristes ou extrémistes, ainsi que pour limiter toute immigration clandestine.
  • [24]
    En Afrique de l’Ouest (CEDEAO) création de l’ECOMOG (force d’interposition de la CEDEAO) en 1990 et en 1999 le Protocole relatif aux mécanismes de prévention, de gestion, de règlements des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité ; pour l’Afrique australe (SADC) création de l’Organe chargé de la politique, de la défense et de la sécurité en 1996, en Afrique centrale (CEEAC) naissance du Conseil de paix et de sécurité de l’Afrique centrale (COPAX) en 1999.
  • [25]
    Organisation de l’unité africaine créée en 1963. Le processus de transformation de l’OUA en Union africaine (UA) a débuté en 1999 et s’est achevé en 2002, date à laquelle l’UA a été officiellement lancée.
  • [26]
    Créé sur le modèle du Conseil de sécurité des Nations unies, ce nouvel organe doit fonctionner avec quinze membres élus en rotation. Sa particularité tient à la présence de cinq personnalités du continent, apolitiques mais reconnues pour leur autorité morale, formant un Conseil des sages, capable d’orienter les décisions. Il a parmi ses fonctions le vote de résolutions et la prise de décision pour l’envoi de troupes sur le terrain.
  • [27]
    Il est possible de citer pour exemple la Facilité de paix. Ce programme repose sur le principe de l’appropriation africaine, il appuie les opérations de maintien de la paix conduites par les pays africains en Afrique et le renforcement des capacités de la structure de sécurité naissante de l’Union africaine (UA). Ces opérations seront lancées et mises en œuvre par les organisations de l’Union africaine et/ou les organisations sous-régionales. La mission de l’UA au Darfour (Soudan) est la première à être financée au titre de la Facilité de paix.
  • [28]
    Il vise notamment le financement des activités opérationnelles du Conseil de paix et sécurité, celles permettant la médiation et le maintien de la paix, ainsi que toutes actions de formation au maintien de la paix et toutes prestations de soutien logistique et financier pour le déploiement des forces africaines de maintien de la paix.
  • [29]
    P. Hassner, « Par-delà la guerre et la paix : violence et intervention après la Guerre froide », Études, n° 9, septembre 1996, p. 156.
  • [30]
    A. N. Ayissi, « Maintien de la paix en Afrique : responsabilité et responsabilisation du continent », La prévention des conflits en Afrique : prospective pour une culture de paix, P. E. Ango (dir.), Paris, Karthala, 2001, p. 177-188.
  • [31]
    Ibidem, p. 181.
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