1Deux leçons exceptionnelles pour décaper et transformer radicalement notre écoute – rien de moins ! Jacques-Alain Miller arrache ici notre entendement au sens commun, aux fulgurances des significations, aux fictions de l’être, aux mythologies de l’amour, à l’illusion d’éternité et autres cosmologies imaginaires. Et ce, avec un appareil contre-intuitif, à la fois simple et puissant, qu’il façonne pour cadrer notre écoute.

2Cet appareil repose sur la distinction entre l’Être et l’Un, maintes fois reprise par Jacques Lacan. Mais ne nous y trompons pas, c’est en subvertissant ce vieux débat philosophique que Lacan en fait un pilier de son enseignement. Son existentialisme n’est ni un humanisme ni un naturalisme, mais un logicisme. Présente dès les tout premiers cours [1] de J.-A. Miller, cette référence de l’être et de l’existence trouve là son acmé et son point de capiton.

3Dégageant pas à pas une série d’oppositions, J.-A. Miller explicite leurs incidences pour notre pratique. Le langage fait advenir à l’être des choses qui n’existent pas : l’Autre n’existe pas, mais il est ; or cet être de parole, de semblant, est inconsistant. Tandis que l’Un, lui, existe – et il est réel. Il ne fait couple avec aucun Autre. Cet Un-tout-seul conditionne la répétition d’une jouissance immémoriale, addictive, réfractaire au savoir comme au sens. Pour la psychanalyse, l’Un est cette marque primordiale qui relève d’une autre dimension du langage où, loin des mirages de l’être, l’existence tient à l’écriture.

4L’Un est lettre qui nous sépare à jamais des autres, de l’Autre, et nous singularise aussi bien. Se rompre au réel de cet Un-signe, c’est donner chance au pathos de se rebrousser en effets de création.