Notes
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[1]
Voir Masini (1993). Voir aussi l’ensemble des textes recueillis dans Lackner, Amelung et Kurtz (2001).
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[2]
Gernet (1990, p. 189).
-
[3]
Sur l’aspect proprement scientifique de l’œuvre de traduction en chinois des missionnaires, voir en particulier Standaert (éd.) (2001, pp. 688-808).
-
[4]
Cité in Lundbæk (1986, p. 103). Voir aussi Roy (1972, pp. 119-152).
-
[5]
Voir Peyraube (1988, pp. 264-286).
-
[6]
Des romans populaires en donnent même une image tout à fait ridicule, comme dans le récit des aventures chinoises que conte Paul d’Ivoi (s.d. ; fin xixe siècle) de « Cigale, émule de Lavarède », jeune français qui « renonce à apprendre la langue de Confucius ». Nous ne relèverons que deux passages qui montrent bien le sentiment de la supériorité du français écrit sur le chinois pour le premier et la confusion et le mépris pour le second : (p. 496), « l’alphabet latin de 25 lettres suffit aux Français pour représenter sur le vélin toutes leurs pensées ; les Chinois, au contraire, avec 40 000 signes différents… ne réussissent pas toujours à figurer les sensations de leur cerveau ». (p. 497) : « En résumé, trente années de la vie d’un lettré suffisent à peine pour apprendre les innombrables caractères écrits. L’européen fera donc sagement de ne pas viser à la littérature chinoise. Par contre, il se mettra facilement en état de converser et de se faire entendre des indigènes. Pour cela, il aura à assimiler 214 signes, 214 mots qui sont les radicaux de la langue, et grâce auxquels il pourra, dans la plupart des circonstances, exprimer sa pensée et comprendre ses interlocuteurs ».
-
[7]
Granet (1953, p. 154). Cet article a été originellement publié dans la Revue philosophique (mars-avril 1920).
-
[8]
Il signale (p. i) que dès 1950, enquêtes, unification et réformes commencent dans le chaos de la terminologie scientifique. Une Commission de travail d’unification des termes scientifiques dépendant de la Commission pour l’enseignement et la culture du conseil d’administration du gouvernement fut créée avec cinq grandes commissions pour les sciences naturelles, les sciences sociales, le domaine médical (avec médecine, pharmacopée et hygiène), les sciences artistiques et enfin, le vocabulaire courant. Avec de nombreuses équipes et sous-groupes par sous-disciplines le travail était projeté à l’échelon national.
-
[9]
La citation est extraite de « Methods of Imparting Western Knowledge to the Chinese », Journal of the China Branch of the Royal Asiatic Society, 1886, 21, pp. 1-21 : « no language, not even the German or the Greek, lends itself with more facility than the Chinese to the composition of technical terms. Its elements being devoid of inflection form compounds by mere juxtaposition – each component reflecting on the other a tinge of its own colour ». Cité dans Wright (1998, p. 669 ; 2000, p. 236).
-
[10]
Voir Hagège, Métailié, Peyraube (1984, pp. 190-193).
-
[11]
Alleton (2002, p. 11).
-
[12]
Anon. 2 (2001, p. 2).
-
[13]
Une liste des caractères les plus fréquents figure (pp. 278-290) dans la Grammaire du chinois contemporain, Xiandai hanyu (Anon. 1, 1963).
-
[14]
Voir le tableau des 214 clés avec leur traduction en français (p. 106-107), in : Métailié (2000).
-
[15]
Le lecteur trouvera la présentation de deux de ces lettrés, qui étaient aussi des médecins, dans le livre de d’Hubert Maës (1970) et l’article d’Annick Horiuchi (1994). Sur l’aspect naturaliste de l’œuvre de Kaibara Ekiken, personnage dont traite Annick Horiuchi, voir Métailié (2001a).
-
[16]
Isono (2002, p. 471).
-
[17]
Voir Vande Walle et Kasaya (2001) et en particulier l’article de Matsuda Kiyoshi, pp. 191-219.
-
[18]
Isono (2002, p. 492). Une édition augmentée du même ouvrage est parue en 1828.
-
[19]
Isono (2002, p. 494).
-
[20]
Voir Morton (1981, en particulier le chapitre 7).
-
[21]
Métailié (1994).
-
[22]
Métailié (1981).
-
[23]
Métailié (2001b). Voir la table 1 (p. 330) pour les termes chinois, et la table 2 (p. 334) pour les termes japonais.
-
[24]
Isono (2002, p. 517).
-
[25]
Cette arrivée est attestée par Léon Wieger, un missionnaire jésuite, dans la préface à un dictionnaire français-chinois des termes scientifiques et techniques (Taranzano, 1914, p. III), voir Métailié (1993), p. 243).
-
[26]
Voir Alleton (1966), Rolland (1985), Wright (2000).
-
[27]
Le tableau des éléments en chinois se trouve à la fin de nombreux dictionnaires chinois, tel le Xinhua zidian. Il est reproduit, p. 109, in Métailié (2000).
-
[28]
Cheng (1997, p. 32.).
-
[29]
On comprend pourquoi Joseph Needham et Lu Gwei-djen (1986, pp. 178-182) envisageaient la possibilité que le chinois devienne un jour, lorsque les procédés de reconnaissance automatique des formes seraient suffisamment développés, la langue écrite internationale pour les nomenclatures scientifiques en botanique et zoologie, afin d’éviter certaines ambiguïtés des termes latinisés. Ainsi, au premier coup d’œil, on reconnaîtrait s’il s’agit d’un animal ou d’un végétal.
-
[30]
Alleton (2002, p. 20.).
1Jusqu’à la première moitié du xxe siècle s’est posée en Chine et à l’étranger la question de la capacité de la langue chinoise à exprimer des idées et, de là, à pouvoir être utilisée dans un contexte scientifique. Cependant, au cours du xixe siècle, des traducteurs étrangers, travaillant en Chine pour des institutions chinoises et des missionnaires associés à des lettrés chinois, commençaient à composer des ouvrages en chinois pour présenter les connaissances scientifiques occidentales [1]. Une première terminologie scientifique chinoise a ainsi commencé à se constituer. Une massive importation de termes créés au Japon à l’aide de caractères chinois s’effectue également peu à peu à partir de la fin du xixe siècle. Ces deux mouvements donneront la terminologie scientifique et technique chinoise moderne. Dans ce processus, il est remarquable que l’écriture chinoise, jugée souvent contraire à l’expression scientifique, a joué un rôle essentiel.
2Des lettrés chinois avaient été depuis longtemps amenés à traduire des textes à partir de langues étrangères. La pénétration du bouddhisme, commencée avant 65 de l’ère chrétienne [2], sous la dynastie des Han, entraîna la traduction en chinois de nombreux textes sanscrits. Au xviie siècle, à l’initiative de missionnaires jésuites, tout un courant de traductions s’exerce à partir de textes originellement composés en latin, particulièrement des ouvrages de mathématiques et de physique [3]. Cependant au cours de la seconde moitié du xixe siècle, sans doute conséquence des revers chinois dans les guerres avec des puissances européennes, de la montée du mythe du « Péril jaune » et de l’européocentrisme de certaines théories linguistiques qui considèrent le chinois comme une langue « primitive », l’idée se répand de l’inadéquation de cette langue pour exprimer une pensée structurée. Nous montrerons la fausseté de ce préjugé et, à partir de quelques exemples, démontrerons la remarquable propension du chinois moderne à la néologie dans les domaines scientifiques et techniques.
1 – Le chinois peut-il servir à penser ?
3Cette question étrange aujourd’hui a été posée de diverses façons. Le chinois a longtemps fasciné les européens cultivés. Leibniz écrivait que « si Dieu avait enseigné à l’humanité une langue cela aurait été quelque chose ressemblant au chinois [4] ». Dans l’époque moderne, le chinois parlé [5] est souvent perçu par les observateurs étrangers comme une langue non écrite d’une grande diversité dialectale et très rudimentaire. Aussi, seule est généralement prise en compte la langue écrite classique connue des lettrés à travers l’empire chinois. Cependant, l’absence de reconnaissance dans cette langue de catégories grammaticales semblables à celles des langues européennes conduisait à conclure qu’elle ne permettait pas de transcrire de façon satisfaisante une pensée discursive, comme le rappelle le texte d’Élisée et Onésime Reclus dans un chapitre consacré à la langue chinoise (1902, p. 64) : « Quoique policés depuis tant de siècles, bien avant l’époque où les Occidentaux commencèrent à émerger de la barbarie, les Chinois se distinguent parmi tous les peuples civilisés par la forme encore rudimentaire de leur langage : ils sont restés à cet égard dans une période de développement qui, chez les Aryens et les Sémites, appartient à la période préhistorique » [6]. Plus étonnant est ce texte de Marcel Granet [7] (« Langue et pensée chinoises »), dans lequel l’auteur écrit à propos du chinois : « une langue faite pour la poésie et composée d’images et non point de concepts, non seulement n’est pas un instrument d’analyse, mais encore ne constitue pas un riche héritage du travail d’abstraction que chaque génération a pu faire : qui la parle doit refaire par lui-même – dans la mesure où cette langue le permet – tout cet effort pour abstraire et généraliser qui nous paraît l’essentiel de la pensée ». Dans la dernière phrase de sa conclusion, il doute même de la possibilité de la pratique ou de l’expression de la pensée scientifique dans cette langue. Une telle attitude n’était pas propre aux étrangers puisque, en 1953, Guo Moruo (p. 2), à l’appui du mot d’ordre lancé par Mao Zedong « Sinisation de la science » (xueshu zhongguohua), critiquait comme « grave pensée semi-coloniale » le fait que la plupart des scientifiques chinois publient et fassent des cours dans l’enseignement supérieur en langues étrangères ou même les pratiquent dans leurs rapports de travail, en particulier en médecine et en architecture. « Plus grave », écrivait-il, « il y a des gens qui pensent que l’écriture chinoise ne convient fondamentalement pas pour exposer la science, n’ayant pas l’aisance et la fluidité des langues occidentales » [8]. Une des rares appréciations positives a été celle d’un traducteur employé par le gouvernement chinois à l’Office de traduction de Pékin (Beijing Tongwenguan), William A. P. Martin. Dans un article intitulé « Méthodes pour transmettre le savoir occidental aux Chinois », il écrivait en 1886 : « Sont-ils [les caractères chinois] comme de vieilles bouteilles qui ne peuvent pas supporter l’infusion d’un vin nouveau ? Rien n’est plus éloigné de la vérité ; car, aucune langue, pas même l’allemand ou le grec, ne se prête avec plus de facilité que le chinois à la composition de termes techniques. Ses éléments étant dépourvus de flexion forment des composés par simple juxtaposition – chaque composant reflétant sur l’autre une nuance de sa propre couleur. Il ne s’agit donc pas d’un milieu incolore… mais ses teintes résiduelles offrent dans la plupart des cas une aide plutôt qu’un obstacle à l’appréhension et à la mémoire… » (trad. auct.) [9].
2 – Particularités de la langue chinoise. Langue écrite/langue parlée
4Si l’existence officielle du putonghua, « langue commune », date d’après 1949, l’élaboration concertée de cette langue contemporaine a commencé dès la fin du xixe siècle [10]. Chaque syllabe y porte un ton et possède un sens (cela dans l’immense majorité des cas). L’écriture chinoise n’est ni alphabétique ni syllabique mais utilise des signes composés à partir d’une dizaine de traits. On appelle généralement ces signes « caractères » et parfois « sinogrammes ». « Les caractères sont des formes graphiques indépendantes, isolées matériellement les unes des autres par un espace, et invariables en ce sens que leur tracé ne change pas, quelles que soient les formes environnantes » [11]. Les traits qui les forment sont tracés selon un ordre strict et peuvent apparaître plusieurs fois dans un même caractère. Il y a des caractères à un seul trait et certains peuvent atteindre plus de trente. Quel que soit le nombre de ses éléments, chaque caractère s’inscrit dans un carré virtuel. On distingue formellement deux grands types de caractères, les simples et les composés ; les premiers représentent une forme graphique minimum ayant un sens. Les seconds peuvent être décomposés en au moins un caractère simple et un autre élément graphique. Ces caractères simples marquent, généralement, l’appartenance des caractères dans lesquels ils apparaissent à un même champ sémantique. Ce sont des « clés » ou « radicaux ». Dans la plupart des caractères composés, l’ensemble des traits en dehors de la clé possède une valeur phonétique. Chaque morphème est écrit à l’aide d’un seul caractère. Aussi lorsqu’on dit du chinois qu’il est une langue monosyllabique, cela ne signifie pas qu’il n’y a que des mots d’une seule syllabe mais que chaque syllabe possède un sens. Tout ce qui précède est vrai pour la langue écrite classique.
5La grande majorité des mots du chinois courant est formée de di- et trisyllabes. Dans les terminologies scientifiques et techniques, on rencontre en plus un assez grand nombre de termes de quatre syllabes et plus. La structure la plus courante des mots nominaux est sur le modèle : déterminant – déterminé, où le déterminé est le plus souvent un nom, tandis que le déterminant peut avoir une valeur nominale, mais aussi adjectivale ou verbale. Ainsi, véhicule à roues : che, train : huoche (littéralement « véhicule [à] feu »), automobile : qiche (« véhicule [à] vapeur »), autobus : gonggongqiche (« voiture commune »).
6On évalue à plus de 50 000 le nombre de caractères [Kangxi zidian (Dictionnaire de caractères [de l’ère] Kangxi), 1716]. Le dictionnaire contemporain le plus courant, publié en 1957 et régulièrement révisé et réédité depuis 1962, le Xinhua zidian (Dictionnaire de caractères de la Chine nouvelle), en compte 10 000 [12]. 6 000 caractères entrent dans la composition de la plupart des termes de la langue courante (presse et littérature) et 1 500 d’entre eux [13] apparaissent avec une haute fréquence dans ce vocabulaire formé de mots en majorité (80 %) di- et trisyllabiques.
Divers systèmes ont été proposés afin de classer cet ensemble. Le plus répandu aujourd’hui est celui qui consiste à choisir des clés comme marqueurs de sous-ensembles. Ces clés ont une valeur sémantique telle que arc, flèche, métal, pierre, air, eau, terre, arbre/bois, herbe, riz, millet, caprin, bovin, cœur, etc. Le système classique en compte 214 [14], nombre qui a été réduit à 191 en 1962 dans le Dictionnaire de caractères de la Chine nouvelle (Xinhua zidian). Lorsqu’on rencontre un caractère inconnu dans un texte, il faut procéder à une double démarche pour le trouver dans le dictionnaire : identifier quelle est sa clé et évaluer ensuite le nombre de traits que compte la partie en dehors de la clé. On se reporte alors à l’index dans lequel tous les caractères sont rangés par clés et à l’intérieur de ces catégories, par nombre de traits.
3 – Caractéristiques des terminologies chinoises modernes
7Pour évoquer les terminologies modernes en chinois, il faut aussi mentionner les terminologies créées au Japon, en utilisant le chinois classique, lors du mouvement dit des « Études hollandaises » (rangaku), qui commença après 1740. Ce mouvement toucha particulièrement les interprètes au service de la concession hollandaise de Deshima dans la baie de Nagasaki, et des lettrés issus des milieux de samouraïs, formés dans des écoles qui leur étaient réservées et où ils recevaient un enseignement classique chinois, faisant d’eux des jusha, « confucianistes » engagés au service des daimyô, les seigneurs, chefs militaires locaux [15].
8Ces guerriers-lettrés composaient souvent leurs écrits en chinois classique kanbun mais aussi en japonais classique bungo. En bungo, les caractères chinois étaient associés à un syllabaire katakana essentiellement pour transcrire les diverses formes verbales de la langue japonaise, en l’absence de toute conjugaison en chinois. Ce syllabaire était aussi utilisé pour indiquer la prononciation des mots étrangers. Malgré cette possibilité de transcription phonétique des mots étrangers, les terminologies scientifiques et techniques des langues européennes traduites en japonais furent toujours créées en caractères chinois jusqu’à la première moitié du xxe siècle. Ces néologismes étaient des calques sémantiques, dans la majorité des cas. Rarement des emprunts phonétiques, tel seimi pour « chimie ». La plupart du temps les termes nouveaux en caractères étaient flanqués d’indications en syllabaire katakana, principalement pour préciser la prononciation des caractères chinois. Parfois même figurent d’un côté la prononciation en japonais et de l’autre la transcription phonétique du terme dans la langue originale.
9Les « savants en savoir hollandais » (rangakusha), devant le choix possible d’emprunts phonétiques en syllabaire et en caractères (comme dans le cas de seimi), ou bien d’emprunts sémantiques construits à l’aide de caractères chinois, vont choisir quasi systématiquement la seconde possibilité. Pour ce faire, ils puisent dans le réservoir qu’offre le chinois classique. Certains vont même dépouiller des textes chinois anciens en relevant les termes techniques qu’ils peuvent y trouver (cas de la botanique en particulier) et utiliser ce matériau pour leurs créations lexicales.
Ainsi de la démarche d’Udagawa Yôan (1798-1848), qui introduisit la botanique moderne et fit connaître la chimie au Japon. Il commença à rédiger en mars 1815 le Shôbutsu ikô meisô, qui est un recueil de noms de plantes et d’animaux relevés dans les textes chinois, identifiés par rapport aux produits naturels du Japon [16]. En décembre de la même année, il achevait d’écrire un lexique de 670 entrées, résultat de ses recherches sur le Cruydt-Boeck (Histoire des plantes) de Dodoens dont une édition de 1618 joua un rôle crucial pour la sensibilisation aux connaissances botaniques occidentales au Japon [17]. En 1820, il publia avec son père, également médecin, un Miroir des drogues hollandaise en japonais [18], présentation de 23 plantes médicinales hollandaises ; et la même année, en hollandais, une liste de 33 noms de plantes entrant dans la matière médicale sino-japonaise [19]. En 1822, il rédige une liste de 157 noms de plantes indiennes à partir du dépouillement de textes bouddhiques et de pharmacopées chinoises. La même année, il publie en chinois classique un Sutra de la botanique (Botanika kyô), premier texte présentant les grandes lignes de la science botanique au Japon. Douze ans plus tard, en 1834, il publie un traité, le Source des lumières de la botanique (Shokugaku geiken) qui, pour les botanistes japonais, est le texte fondateur de l’histoire de la botanique moderne au Japon. Dans ces deux derniers textes, il fait à la fois œuvre de vulgarisateur et de terminologue. La terminologie des pièces florales est un bon exemple d’adaptation conceptuelle en japonais car la mise en évidence de la sexualité végétale en Europe entre les dernières années du xviie et les premières du xviiie avait conduit à en faire une analyse très fine [20].
4 – Usage des caractères chinois
4.1 – Néologie par usage de caractères existants
10Si l’on regarde les notions de pistil et d’étamine, il n’existe aucun terme équivalent dans les textes chinois et japonais antérieurs à l’arrivée de la botanique moderne [21]. Ces deux organes de la fleur, en effet, n’y sont pas perçus de manière distincte. Mais on reconnaît un ensemble coloré indistinct au centre des fleurs, qu’on nomme xin, « cœur » (en sino-japonais shin), et dans ce cœur de la fleur, des parties dressées et des parties pendantes. Les premières, qui regroupent essentiellement les filets des étamines et le style du pistil, sont nommées xu « barbes » (en sino-japonais shu), ou parfois jiao « cornes », leng « piquets » ; les secondes, rui (en sino-japonais zui), sont généralement les anthères mais le terme désigne aussi le cœur jaune de certaines fleurs, en particulier les composées (Asteracées) et dans ce cas il s’agit des stigmates de l’ensemble des fleurons. Udagawa Yoan, le découvreur de la botanique moderne et l’auteur des deux premiers écrits théoriques sur le sujet au Japon, fait un choix dans cet ensemble de caractères et crée avec trois d’entre eux deux termes dissyllabiques shuzui/barbe-rui/pour étamine et shinzui /cœur-rui/ pour pistil. Ce faisant, il affecte un sens nouveau et précis mais implicite au morphème zui/rui, qui semble ne pouvoir signifier ici que « organe sexuel de la fleur ». Ce sens est bien confirmé par l’usage que fait du terme un autre botaniste contemporain, Itô Keisuke (1803-1901). Dans une flore publiée en 1829, il précise la terminologie et propose, pour désigner en japonais l’étamine, yûzui /rui mâle/ et shizui/rui femelle/ pour traduire pistil.
11Li Shanlan (1810-1882), lettré mathématicien chinois et Alexander Williamson (1829-1890), missionnaire presbytérien écossais arrivé en Chine en 1855, choisissent ensemble une autre voie. Dans le premier ouvrage de botanique moderne publié en Chine en 1858, intitulé Zhiwuxue (Botanique), néologisme signifiant littéralement « étude des plantes », inspiré de manuels du botaniste anglais John Lindley (1799-1865), ils traduisent pistil par xu « barbe » et étamine par xin, « cœur » [22]. Ces deux termes seront repris dans un nouvel ouvrage Zhiwuxue qimeng (Manuel élémentaire de botanique), dû à deux Anglais, Robert S. Hart (1835-1911) et Joseph Edkins (1823-1905). En 1895 et 1898, un autre traducteur étranger, John Fryer (1839-1928), travaillant en équipe avec un lettré chinois propose respectivement huaxu « barbe de fleur » et huaxin, « cœur de fleur ». Si on compare les deux séries de termes créés indépendamment au Japon et en Chine, il est remarquable que le choix des auteurs s’est porté, en majeure partie, sur les mêmes morphèmes et caractères [23]. Si les auteurs des ouvrages publiés en Chine étaient avant tout des traducteurs, vulgarisateurs du savoir occidental, les deux auteurs japonais, pour leur part, s’intéressaient particulièrement à la botanique ; l’un et l’autre ont rencontré Philipp Franz von Siebold (1796-1866) lors de son séjour au Japon, en particulier en 1826 [24]. Les néologismes d’Itô Keisuke seront progressivement adoptés par les autres botanistes japonais et ils passeront en Chine au début du xxe siècle [25]. Pour les parties du pistil, le style et le stigmate, ainsi que pour l’anthère, sommet de l’étamine qui porte le pollen, ce sont les créations d’Udagawa Yoan qui vont se retrouver tant en japonais qu’en chinois moderne. Ces deux jeunes savants naturalistes auront forgé les termes sino-japonais pour étamine, anthère, pollen, filet, pistil, stigmate et style encore en usage aujourd’hui dans les deux langues. Un autre exemple permet d’apprécier la démarche d’Udagawa Yoan. Pour traduire « chaton », inflorescence qu’on peut voir sur les saules, les châtaigniers, les noyers, il choisit un terme ancien disyllabique qu’il emprunte à Li Shizhen (1518-1593), un médecin chinois, auteur d’un célèbre Matière médicale classifiée (Bencao gangmu), achevé en 1578 et publié en 1596. Li Shizhen désignait par routi /bourgeon mou/ spécifiquement les chatons des saules. Udagawa modifie légèrement la graphie du premier caractère de ce terme en ajoutant au dessus la clé de l’herbe. Il signale dans son texte que le nom occidental signifie « chat » et il juxtapose au caractère chinois désignant cet animal une transcription en syllabaire katakana, katto. De plus, le texte renvoie à une figure avec une légende où les deux caractères chinois du terme sont associés à un autre terme en syllabaire katakana qui se lit katkensu, « catkins », terme désignant les chatons en anglais.
12Si l’on considère toute la terminologie botanique en chinois moderne, on ne trouvera que des termes créés selon ce principe d’utilisation du stock de morphèmes existants en chinois. Souvent des termes ayant un sens technique dans les textes anciens sont repris et leur sens précisé. Par exemple, gen désigne la partie souterraine d’une plante dans la littérature technique ancienne. Le terme est repris dans la terminologie botanique moderne avec le sens précis de « racine ». Ye désigne à la fois « feuille » et « pétale ». Ce terme est repris avec le sens exclusif de « feuille » en botanique moderne, tandis qu’un autre terme, ban, signifiant occasionnellement dans des textes anciens « pétale », est choisi pour créer un nouveau terme huaban signifiant exclusivement « pétale de fleur ». Ainsi, des termes techniques anciens sont également associés dans un rapport de détermination, le plus fréquemment, avec des morphèmes de la langue non spécialisée pour créer des termes techniques nouveaux. Par exemple jing « tige » sert de base pour traduire « rhizome » : gen(zhuang)jing /tige (en forme de) racine/, ou encore « stolon » pufujing /tige rampante/. D’autres termes, surtout des qualificatifs, sont souvent créés seulement à l’aide d’éléments du vocabulaire commun. Le sens des qualificatifs concolore et discolore, qui renseignent sur la similitude ou la différence de couleur entre dessus et dessous du limbe des feuilles, est rendu en chinois respectivement par shangxiatongse /dessus dessous même couleur/ et shangxiayise /dessus dessous couleur différente/.
Il ressort de là que le processus de création lexicale en chinois passe d’abord par l’écrit. Les caractères présentent une remarquable possibilité qui a été utilisée constamment au cours de l’histoire de la Chine, la dérivation. Un même caractère peut ainsi posséder un grand nombre de sens et de fonctions. Cette faculté des caractères, qui présente un avantage considérable pour la création lexicale, était pourtant un des arguments constamment avancés par ceux qui mettaient en doute la possibilité du chinois de devenir un outil scientifique. À côté de ce procédé de création lexicale par utilisation du stock de caractères-morphèmes existants en chinois, une autre possibilité existe : celle de forger des caractères nouveaux. Très peu employé dans la langue courante – un des rares exemples est le caractère pang, désignant l’unité de poids britannique, la livre anglaise pound – ce procédé a, en revanche, été largement utilisé dans le domaine de la chimie.
4.2 – Néologie par caractères nouveaux
13La nomenclature ainsi que la terminologie de la chimie en chinois ayant fait l’objet de diverses analyses [26], je ne ferai ici qu’un bref rappel des principes régissant la formation de la nomenclature des corps simples. On procède à la création de caractères nouveaux par combinaison de clés ayant une valeur sémantique, shi « minéral » pour les métalloïdes, jin « métal, or » pour les métaux, qi « air » pour les corps gazeux à température normale, avec des éléments phonétiques. La prononciation du nouveau caractère reprend la prononciation de la première syllabe du nom standard ou celle des lettres du symbole, bien sûr passée au filtre de la phonologie du chinois. La grande majorité des termes, tous monosyllabiques, désignant les corps simples, a été créée sur ce modèle tandis que certains termes désignant des produits anciennement connus ont été également empruntés, tels les termes pour mercure, arsenic, étain [27]…
5 – Approche comparée de la terminologie : racines chinoises et racines grecques et latines
14Les quelques exemples qui ont été cités précédemment montrent qu’il existe une différence sensible entre terminologies française et chinoise en ce qui concerne l’appréhension immédiate du signifié à la lecture ou l’audition d’un terme. Le recours constant à des racines grecques et latines dans la terminologie botanique ou anatomique française rend la compréhension du sens d’un terme inconnu difficile sinon impossible pour la grande majorité des francophones. À l’opposé, le fait que les caractères chinois n’ont pas subi de modification de forme depuis environ 2 000 ans permet, à l’écrit, pour tout nouveau terme, une compréhension du sens de ses éléments et, par là, une première appréhension de son sens technique. Néanmoins, il n’est pas sûr qu’un terme simplement entendu soit aussi clairement interprété. Ceci ne veut pas dire non plus que la signification précise du terme pourra être connue à la simple lecture, mais on pourra s’en faire une première idée. Par exemple huabei /couverture de la fleur/ est plus immédiatement perceptible pour un Chinois que « périanthe » pour un francophone ou perianth pour un anglophone ; de même, yebing /manche de la feuille/ par rapport à « pétiole ». Tous les termes d’anatomie désignant les os du squelette sont construits sur la base –gu, qui signifie « os ». La comparaison avec les équivalents français de quelques-uns est illustrative :
15La considération maintenant de l’ensemble des termes désignant les pièces florales conduit à la même constatation. Procédant de bas en haut et de l’extérieur vers l’intérieur de la fleur, nous rencontrons successivement le pédicelle, huabing, le réceptacle, huatuo, le calice, huae, formé de sépales, epian, la corolle, huaguan, formée de pétales, huaban, l’ensemble des deux enveloppes formant le périanthe, huabei. À l’intérieur, les étamines, xiongrui, formées d’un filet, huasi, portant les anthères huayao, et, au milieu, le pistil, cirui, formé de l’ovaire, zifang, surmonté par le style, huazhu, au sommet duquel se trouve le/s stigmate/s, zhutou. Si l’on compare les deux ensembles de termes chinois et français, une première remarque est la forte structuration du vocabulaire chinois, avec une fréquence très élevée du morphème hua signifiant « fleur ». Une deuxième remarque est également la fréquence élevée dans les caractères d’une clé particulière qui désigne l’herbe. De même, la prise en compte de l’ensemble des termes d’anatomie fait apparaître la prédominance de deux clés, désignant l’os et la chair. Pour les animaux aquatiques, deux clés se retrouvent dans la quasi totalité des caractères désignant leurs noms, la clé yu (poisson) pour tous ceux qui nagent, poissons ou mollusques, la clé chong (bestiole) pour ceux qui se déplacent au fond, comme les crabes, qui possèdent une coquille ou encore les méduses ; une troisième clé gui est spécifique aux noms de tortues. Peut-être pouvons-nous mieux apprécier maintenant la métaphore du traducteur anglais William Martin sur la « couleur » des caractères chinois. Le propos suivant d’Anne Cheng [28] nous paraît rendre compte de manière particulièrement pertinente de cette spécificité de l’écriture chinoise : « De par l’essence particulière de son écriture, la pensée chinoise s’inscrit dans le réel au lieu de s’y superposer. Cette proximité ou fusion avec les choses relève sans doute elle-même de la représentation, mais elle n’en détermine pas moins une forme de pensée qui, au lieu d’élaborer les objets dans la distance critique, tend au contraire à rester immergée dans le réel pour mieux en ressentir et en préserver l’harmonie ».
16Par les quelques exemples qui précèdent, on constate que l’écriture chinoise n’est pas un obstacle à la néologie dans les terminologies scientifiques et techniques modernes mais au contraire la favorise. De plus, une dimension classificatrice est inscrite dans la nature même de la langue chinoise écrite. Il y a ainsi de véritables marqueurs de champs sémantiques joués par les clés entrant dans la composition des caractères [29]. En analysant les termes ainsi créés dans diverses disciplines, on remarque une grande économie dans l’emploi des morphèmes et dans le jeu des caractères. Ce qui, dans le rapport du signifiant au signifié, semble conduire l’arbitraire du signe dans des champs graphiques et sémantiques plus limités que dans les langues non idéographiques. De fait, la structure même des caractères chinois indiquant explicitement une forme de classement par les clés, on note une fréquence particulièrement élevée de certaines clés dans tel ou tel domaine. Ainsi du rôle de la clé de l’herbe en botanique, des clés de l’os ou de la chair en anatomie humaine et animale. Pour ne donner que deux autres exemples, la fréquence élevée de la clé du métal dans le vocabulaire de l’outillage industriel tandis que les clés du bambou et du bois sont prédominantes dans la nomenclature des outils et machines agricoles traditionnels. En revanche, il n’en est pas de même si l’on considère la prononciation des caractères où l’arbitraire est total. Cependant, la plupart des termes scientifiques et techniques sont polysyllabiques et, pour l’ensemble de la terminologie d’un domaine donné, on ne peut que remarquer encore une fréquence élevée de certains morphèmes (cas de hua ‘fleur’ pour la nomenclature des pièces florales, cas de gu pour celle de l’anatomie). Dans cette perception, l’arbitraire constaté par Saussure entre signifiant et signifié est relatif et, en tout état de cause, relativisé dans l’écriture chinoise. Si, hors des vocabulaires de spécialité, nous admettons, avec Viviane Alleton, que l’arbitraire d’un signe est total, nous ne pouvons que la suivre quand elle précise : « Cela n’empêche pas qu’un Chinois, quand il rencontre un caractère qu’il ignore, cherche à deviner, à imaginer de quel mot il s’agit, et il y parvient souvent » [30].
Références bibliographiques
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Notes
-
[1]
Voir Masini (1993). Voir aussi l’ensemble des textes recueillis dans Lackner, Amelung et Kurtz (2001).
-
[2]
Gernet (1990, p. 189).
-
[3]
Sur l’aspect proprement scientifique de l’œuvre de traduction en chinois des missionnaires, voir en particulier Standaert (éd.) (2001, pp. 688-808).
-
[4]
Cité in Lundbæk (1986, p. 103). Voir aussi Roy (1972, pp. 119-152).
-
[5]
Voir Peyraube (1988, pp. 264-286).
-
[6]
Des romans populaires en donnent même une image tout à fait ridicule, comme dans le récit des aventures chinoises que conte Paul d’Ivoi (s.d. ; fin xixe siècle) de « Cigale, émule de Lavarède », jeune français qui « renonce à apprendre la langue de Confucius ». Nous ne relèverons que deux passages qui montrent bien le sentiment de la supériorité du français écrit sur le chinois pour le premier et la confusion et le mépris pour le second : (p. 496), « l’alphabet latin de 25 lettres suffit aux Français pour représenter sur le vélin toutes leurs pensées ; les Chinois, au contraire, avec 40 000 signes différents… ne réussissent pas toujours à figurer les sensations de leur cerveau ». (p. 497) : « En résumé, trente années de la vie d’un lettré suffisent à peine pour apprendre les innombrables caractères écrits. L’européen fera donc sagement de ne pas viser à la littérature chinoise. Par contre, il se mettra facilement en état de converser et de se faire entendre des indigènes. Pour cela, il aura à assimiler 214 signes, 214 mots qui sont les radicaux de la langue, et grâce auxquels il pourra, dans la plupart des circonstances, exprimer sa pensée et comprendre ses interlocuteurs ».
-
[7]
Granet (1953, p. 154). Cet article a été originellement publié dans la Revue philosophique (mars-avril 1920).
-
[8]
Il signale (p. i) que dès 1950, enquêtes, unification et réformes commencent dans le chaos de la terminologie scientifique. Une Commission de travail d’unification des termes scientifiques dépendant de la Commission pour l’enseignement et la culture du conseil d’administration du gouvernement fut créée avec cinq grandes commissions pour les sciences naturelles, les sciences sociales, le domaine médical (avec médecine, pharmacopée et hygiène), les sciences artistiques et enfin, le vocabulaire courant. Avec de nombreuses équipes et sous-groupes par sous-disciplines le travail était projeté à l’échelon national.
-
[9]
La citation est extraite de « Methods of Imparting Western Knowledge to the Chinese », Journal of the China Branch of the Royal Asiatic Society, 1886, 21, pp. 1-21 : « no language, not even the German or the Greek, lends itself with more facility than the Chinese to the composition of technical terms. Its elements being devoid of inflection form compounds by mere juxtaposition – each component reflecting on the other a tinge of its own colour ». Cité dans Wright (1998, p. 669 ; 2000, p. 236).
-
[10]
Voir Hagège, Métailié, Peyraube (1984, pp. 190-193).
-
[11]
Alleton (2002, p. 11).
-
[12]
Anon. 2 (2001, p. 2).
-
[13]
Une liste des caractères les plus fréquents figure (pp. 278-290) dans la Grammaire du chinois contemporain, Xiandai hanyu (Anon. 1, 1963).
-
[14]
Voir le tableau des 214 clés avec leur traduction en français (p. 106-107), in : Métailié (2000).
-
[15]
Le lecteur trouvera la présentation de deux de ces lettrés, qui étaient aussi des médecins, dans le livre de d’Hubert Maës (1970) et l’article d’Annick Horiuchi (1994). Sur l’aspect naturaliste de l’œuvre de Kaibara Ekiken, personnage dont traite Annick Horiuchi, voir Métailié (2001a).
-
[16]
Isono (2002, p. 471).
-
[17]
Voir Vande Walle et Kasaya (2001) et en particulier l’article de Matsuda Kiyoshi, pp. 191-219.
-
[18]
Isono (2002, p. 492). Une édition augmentée du même ouvrage est parue en 1828.
-
[19]
Isono (2002, p. 494).
-
[20]
Voir Morton (1981, en particulier le chapitre 7).
-
[21]
Métailié (1994).
-
[22]
Métailié (1981).
-
[23]
Métailié (2001b). Voir la table 1 (p. 330) pour les termes chinois, et la table 2 (p. 334) pour les termes japonais.
-
[24]
Isono (2002, p. 517).
-
[25]
Cette arrivée est attestée par Léon Wieger, un missionnaire jésuite, dans la préface à un dictionnaire français-chinois des termes scientifiques et techniques (Taranzano, 1914, p. III), voir Métailié (1993), p. 243).
-
[26]
Voir Alleton (1966), Rolland (1985), Wright (2000).
-
[27]
Le tableau des éléments en chinois se trouve à la fin de nombreux dictionnaires chinois, tel le Xinhua zidian. Il est reproduit, p. 109, in Métailié (2000).
-
[28]
Cheng (1997, p. 32.).
-
[29]
On comprend pourquoi Joseph Needham et Lu Gwei-djen (1986, pp. 178-182) envisageaient la possibilité que le chinois devienne un jour, lorsque les procédés de reconnaissance automatique des formes seraient suffisamment développés, la langue écrite internationale pour les nomenclatures scientifiques en botanique et zoologie, afin d’éviter certaines ambiguïtés des termes latinisés. Ainsi, au premier coup d’œil, on reconnaîtrait s’il s’agit d’un animal ou d’un végétal.
-
[30]
Alleton (2002, p. 20.).