1Double interrogation. D’abord celle du titre de cet article, qui pose une question de principe. Non pas quant aux innovations à introduire ou éventuellement à refouler, mais sur la nécessité même de l’innovation sociale. Pourquoi et comment l’innovation sociale serait-elle nécessaire, utile, prometteuse ou tout le contraire ? Question qui à son tour en appelle une autre : qu’entendre par « innovation sociale », quelles en sont les caractéristiques les plus significatives ? Comment et pourquoi un acte, une mesure, un dispositif relèvent-ils de l’innovation sociale, ou n’en relèvent-ils pas, ou plus ?
2Cette double interrogation aboutit à un résultat unique : la thématique de l’innovation n’a rien d’une évidence dont la seule évocation justifierait de la glorifier, ou en revanche de la récuser. Cette catégorie usuelle nécessite d’être définie aussi rigoureusement que possible. Prérequis indispensable, nous semble-t-il, pour comprendre pourquoi il faudrait, ou pas, de l’innovation, sociale de surcroît. Comme dans bien d’autres domaines, le travail social constitue à cet égard un cas exemplaire.
Innovation et social
3Nous sommes en présence d’une catégorie transverse, interchamps, passepartout : si tout le monde (ou presque) tient l’innovation en haute estime, il est peu probable que chacun valorise dans l’innovation concernée des contenus sinon identiques, du moins semblables. Telle innovation qu’un certain courant, école ou orientation tient pour positive témoigne pour d’autres courants d’une régression inadmissible. N’importe quelle innovation économique et politique peut l’illustrer !
4L’innovation qualifiée de « sociale » serait-elle plus précise que l’innovation tout court ? Las, rien de moins assuré ! Si ce vocable désigne des professions et des domaines relativement délimités, dès qu’il est accolé à l’innovation, l’énigme de cette dernière gagne en épaisseur bien plus qu’en clarté. Une innovation dite sociale est une espèce particulière d’innovation, distincte de l’innovation artistique et de l’innovation politique – lesquelles, pourtant, se déroulent bien dans le monde social, obéissent à des causes sociales et induisent des effets sociaux, tout en n’étant pas entièrement sociales en tant qu’innovations artistiques et politiques… « Innovation sociale » : voilà une éclatante évidence, soit un aveuglement partagé. Cette imprécision constitutive, structurelle, n’a-t-elle pas des effets sur les expériences concrètes d’innovation sociale ou qui s’en réclament ? Sur les facilités et/ou les difficultés des mises en œuvre ?
5Égrener cette énumération, incomplète au demeurant, n’équivaut pas à recenser uniquement des inconvénients. Car la multiplicité des logiques et des positionnements est un gage du bon accueil réservé à la catégorie de l’innovation. Son caractère énigmatique permet les usages les plus hétérogènes et en garantit ainsi l’extrême diffusion. Bref, l’innovation sociale est redevable de ses amphibologies, qui constituent autant de supports incontournables de signification.
6Sont très généralement encouragées les innovations qui, outre leur éventuel intérêt et degré de faisabilité probable, vont dans le sens de la perpétuation du système institutionnel, social ou politique qui les met en place. Aucun système n’encourage ni ne refoule non plus l’innovation tous azimuts, quelle qu’elle soit, indépendamment des contenus et de la portée chaque fois en cause. Sans que ce soit systématique ou univoque, il convient, pour comprendre les liens entre innovation et système, de raisonner en termes de tendances au sein desquelles les innovations sont immanquablement prises. Quand des innovations qui permettent de mieux utiliser les ressources naturelles et sociales sont stimulées, ce « mieux » se déchiffre dans une perspective de reproduction plus ou moins large de l’ensemble du système, avec des compromis, négociations et concessions, et à la condition de ne guère questionner l’ordre existant… A contrario, des innovations fructueuses, susceptibles d’alléger le sort de millions de personnes, mais qui ne remplissent pas des critères économiques et politiques, ne sont nullement suivies d’effet.
7Cible, enjeu et prétexte pour des alliances et des confrontations, l’innovation est une pratique engagée, inscrite d’emblée dans un système social donné, encouragée parce qu’elle le sert, ou suspectée et entravée parce que jugée par trop dissidente. Ce, indépendamment des intentions, bonnes et mauvaises, des uns et des autres. Mais ce lien est loin d’être univoque : toute innovation ne va pas, mécaniquement, dans le sens d’une reproduction pure et simple des organisations et systèmes en place ; elle peut en rester au stade de la poudre aux yeux ; elle peut, aussi, se révéler plus ou moins subversive.
Une innovation nécessaire ?
8La réponse est dans la question. Celle-ci se pose car les institutions existantes, les pratiques qui y sont développées, les modalités d’exercice professionnel ne sont pas complètement adéquates à l’objet et aux objectifs qui sont les leurs. Pas complètement, voire même pas du tout adéquates… Il faut de l’innovation parce que la répétition guette tout ce qui existe. La qualité des actions passées ne garantit nullement la pertinence des actions présentes. Il n’en reste pas moins que l’innovation ne suffit pas à enrayer la répétition ; la course à l’innovation typique d’une certaine « modernose » se révèle aussi fastidieuse que la monotonie à laquelle elle est censée remédier. Il y a également une raison structurelle : il faut, en effet, de l’innovation parce que le travail social ne peut aller au-delà des « trois tâches impossibles » détaillées par Freud : gouverner, éduquer, soigner. Tâches indispensables, mais inachevées et inachevables. Directeurs, travailleurs sociaux, psychologues : tous sont condamnés à rater peu ou prou leur but affiché, à faire ce qu’ils disent tout en faisant un peu ou beaucoup autre chose, voire le contraire, ce qui d’ailleurs n’est pas forcément pire. Ni les uns ni les autres ne sont à la hauteur des besoins des populations censées bénéficier de leur travail, incapables de colmater tous les trous, d’effectuer toutes les réparations, de discerner toutes les nuances de ce qui arrive aux enfants, aux adultes, aux familles… Et pas seulement à cause des urgences, du surcroît de travail, des 35 heures – ces contraintes réelles n’autorisent que des explications très partielles et des excuses trop usitées. Des innovations sont nécessaires pour recycler des modalités d’écoute, pour débloquer des ankyloses diverses et variées.
9D’où mes réserves quand on parle de « bénéficiaires », appellation qui exprime un vœu plutôt pieux : on fait l’hypothèse que les gens dont on s’occupe iront mieux après l’intervention. Probable, mais nullement garanti ! Ne serait-ce que parce que vouloir réaliser le bien d’autrui est un projet qui implique le consentement du destinataire. L’accomplissement de soi, la guérison, l’amélioration de situations personnelles et familiales douloureuses, le dépassement d’impasses économiques constituent des idéaux aussi exaltants que des réalités passablement étriquées, sinon décevantes.
10Bref, l’innovation est rendue nécessaire parce qu’il n’y a pas de « bon » directeur, de « bon » éducateur, de « bon » psychologue. Il y a des professionnels moins mauvais que d’autres, moins agrippés que d’autres aux aveuglantes évidences et aux imputrescibles lieux communs. Des professionnels qui font de la lucidité un emblème.
Innover pour qui ?
11L’innovation suppose des destinataires, dont le nombre et la qualité sont bien plus complexes qu’il n’y paraît. Il y a, bien sûr, les destinataires explicites, soit les publics accueillis dans des structures innovantes ou visés par des initiatives innovantes. Publics qui vivent au sein d’une famille, qui s’y rapportent d’une manière ou d’une autre, tout comme ils vivent dans un quartier, fréquentent ou ne fréquentent pas l’école, font nécessairement partie d’un groupe social… Toutes ces personnes sont là des destinataires indirects, par procuration en quelque sorte, mais bel et bien réels dans la mesure où les effets de l’intervention auprès du jeune ou de l’adulte vivant dans cette famille, dans ce voisinage, s’y répercutent. Ce, sans préjuger des bénéfices ou au contraire des inconvénients que la même innovation apporte aux uns et aux autres…
12Liste éminemment incomplète. On ne saurait en effet oublier ces destinataires majeurs, privilégiés, implicites mais très directement concernés que sont les personnels chargés d’imaginer, conduire et éventuellement rectifier les innovations : éducateurs, directeurs d’établissement, psychologues, décideurs administratifs et politiques. On ne saurait réduire les destinataires aux seuls publics ! Il faut des innovations afin de remotiver les équipes, renouer avec des idéaux institutionnels, trouver des stimulants pour le travail de chacun. Sociales ou pas, les innovations servent à décoincer le désir des entrepreneurs.
13Une anecdote significative à cet égard : dans un service d’Aide sociale à l’enfance (ASE) où j’assurais deux journées de formation consécutives par mois, des éducateurs m’ont proposé de les accompagner dans la mise sur pied d’un service téléphonique à l’intention d’adolescents, qu’ils comptaient assurer bénévolement en dehors de leurs horaires de travail. Avec le statut de la loi de 1901, ce service devait leur garantir de larges marges de manœuvre, au-delà des tutelles administratives. Nous y avons travaillé en soirée plus de six mois : genre d’écoute, modalités d’engagement de chaque intervenant, mécanismes des prises de décision, rapport aux structures officielles, publics visés… Mon contrat avec l’ASE terminé, je quittai cette ville et ne pus continuer mon accompagnement bénévole ; quelques mois plus tard, je demandai des nouvelles de cette expérience innovante : les éducateurs me dirent recevoir très, très peu d’appels téléphoniques, mais ils se portaient à merveille, motivés, intéressés par l’évolution de leur travail. Guère en soirée, cependant, puisqu’ils avaient peu de demandes, en revanche, leur journée de travail ordinaire s’enrichissait de leur expérience innovante, quoique quasi virtuelle, grâce à laquelle ils se permettaient des libertés et des insoumissions jusque-là inconcevables…
Une tension indépassable
14Définition malaisée, repérage difficile, adhésions et rejets récurrents. Mais il faut bien construire la définition, repérer la portée, expliquer ces adhésions et ces rejets. Pour ce faire, pensons l’innovation sur un continuum balisé par des binômes antinomiques du genre « risque-recyclage », « subversion-rafistolage », ou encore « irruption-institutionnalisation ».
15Dans ce continuum, aucune case n’est réservée en propre à l’innovation. Celle-ci n’y apparaît pas en tant que telle, sous son nom propre. Elle ne se rapporte à aucun des termes ni des binômes mais à leur dynamique, soit aux tensions et contradictions qui lient et séparent ces différents éléments. Ni pur risque ni simple recyclage de vieilles lunes, mais dialectique de l’un à l’autre.
16C’est pourquoi nous parlons de tension indépassable : chaque innovation concrète accentue l’une ou l’autre des composantes des binômes – mais aucune innovation ne se situe en dehors de ces structures antagonistes. Le lieu propre de l’innovation est le parcours du continuum et l’accentuation de l’un ou de l’autre de ses éléments.
17L’innovation suppose une prise de risque(s), elle a toujours partie liée avec l’aventure et l’invention. Certes, il vaut mieux que des études, des réflexions rigoureuses et la prise en compte des coûts – pas que financiers – précèdent la mise en œuvre concrète d’une innovation. Mais, n’en déplaise aux managers, aux gestionnaires et autres rêveurs de transparence, tout n’est pas prévisible, ni calculable ni dicible. Ce n’est pas toujours par imprévoyance que l’innovation accomplie ne ressemble guère à l’innovation prévue. Diverses raisons à cela. L’innovation est un conglomérat de multiples acteurs. Il y a les réticences, les résistances et même les sabotages des récepteurs, ces « bénéficiaires » qui ne souhaitent pas forcément bénéficier des changements réels et/ou imaginaires attendus de l’innovation, qui craignent celle-ci, qui ne voient pas pourquoi ils modifieraient leur modus vivendi, qui doutent des capacités et de la sincérité des organisateurs dans la gestion des dégâts collatéraux de l’expérience innovante. Ils n’ont pas toujours raison, mais souvent des raisons. Il y a bien entendu les innovateurs, leur désir, leur engagement professionnel, leurs orientations politiques, leur conviction inébranlable ou leur cynisme insondable quant aux bienfaits de leurs propositions. Il y a l’intérêt précautionneux des tutelles, l’avis des financeurs, les demandes d’éclaircissement (pas toujours immotivés)… Last but not least, pour l’innovation, l’écueil par excellence réside dans sa mise en œuvre, ses avatars, ses inconnues, ses inexorables surprises.
18La prise de risque qu’est une innovation inclut des effets subversifs, en termes de transformation des rapports éducateurs/public, de rectification de la place réelle et/ou imaginaire des cadres et des dirigeants dans les fonctionnements institutionnels, de corrections de fond et de forme des prises en charge, de représentations des usagers… À l’extrême opposé du risque, l’innovation sert à recycler des liens interpersonnels, à toiletter des installations et des dispositifs.
19Des pratiques en cours depuis de longues années sont rebaptisées avec des vocables nouveaux, plus modernes. Au lieu de « personne », on dira plutôt « sujet », quoique sans imaginer que celui-ci (névrotique ou psychotique, pauvre ou riche, Français ou étranger) puisse savoir pour partie (comme l’éducateur !) ce qui est bon pour lui. L’innovation, ici, n’est pas conceptuelle en termes de contenus et de visées, de modalités d’intervention professionnelle, mais plutôt terminologique, langagière, simplement discursive. Pas toujours inutile cependant : parfois, un changement de nomenclature laisse passer un peu d’air frais, utile ventilation de la serre aux convictions… Faute d’étayage théorique et pratique, cependant, l’innovation relève d’une aimable causerie sans conséquences.
20Toute innovation comporte et du risque, voire des effets subversifs, et du recyclage, sinon du rafistolage ; ces différents volets sont toujours présents dans toute innovation, mais à des doses très variables. Il arrive, lorsque la mise en œuvre de l’innovation ne correspond guère à l’innovation prévue, que la forte attention prêtée au volet « risque » amène à sous-estimer le volet « art d’accommoder les restes » ; ce recyclage, exclu de la programmation et absent des protocoles, fait retour lors de la mise en œuvre concrète. Il en va de même, a contrario, quand la dimension subversive se trouve insuffisamment considérée. Quant à un hypothétique juste milieu, comment s’y prendre, puisque, à défaut de pouvoir situer l’innovation au beau milieu des tensions et des contradictions, celle-ci redevient une entité abstraite et passe-partout ?
Une contradiction constitutive
21L’innovation fait plus ou moins irruption, est rarement attendue, modifie peu ou prou ce qui se faisait jusque-là. Innovation rime avec transgression. C’est pourquoi elle ne saurait être ni excessivement convenable ni politiquement correcte. L’innovation est ce qui interroge. Même les méfiances qu’elle inspire peuvent être des compliments qui l’honorent.
22Et, en même temps, condition sine qua non de son exercice, l’innovation doit pouvoir être installée, prendre racine, convaincre (au moins, qu’on la laisse vivre) ; elle doit être étalée et étayée. Loin du romantisme de l’acte gratuit, l’innovation ne subsiste qu’en devenant un modèle à suivre et un idéal à atteindre. D’une façon ou d’une autre, l’innovation requiert des protocoles d’évaluation. « Soyez spontané, c’est un ordre ! », telle est l’injonction paradoxale qui anime et mine toute innovation.
23Moralité : les innovations sont à retravailler sans cesse, leurs contradictions représentant autant de conditions d’existence et de pérennisation ; il faut les installer pour qu’elles développent ce dont elles sont capables, pour qu’elles s’épanouissent, mais en s’installant elles cessent progressivement d’être innovantes. Il faut alors inventer autre chose, parfois contre les innovations d’antan…
24Cette autre chose à inventer n’est pas forcément un nouveau dispositif. Ainsi de ces éducateurs voulant créer un espace expérimental en soirée afin d’écouter différemment des adolescents qu’ils écoutaient pendant la journée. L’innovation consiste ici à revisiter des pratiques déjà en place, à en réviser les présupposés et les visées, à éviter les pièges du « ça va de soi ». Ni mutation radicale ni replâtrage, mais passage du vécu au su, prise de distance, ouverture à des possibles.
Deux visées types
25Innover pour : modalité la plus pratique, la plus efficace, elle exige un temps minimum en concertations, assemblées, rectifications, réécritures, etc. Un dispositif innovant se construit d’autant plus vite que les énergies humaines et matérielles sont massivement centrées sur sa construction et peu sur les concertations. Cette démarche suppose de compter sur des bénéficiaires pas trop remuants, des tutelles plutôt consentantes, des équipes bien disposées, sinon carrément indifférentes. Hélas, il arrive que ces partenaires s’exclament : « Votre projet innovant est fort intéressant !» ; ils reconnaissent l’auteur et, en filigrane, ils font savoir dans quelle mesure relative ils soutiennent, eux, ledit projet… Par ailleurs, consulter tout le monde est difficile, dans le cas par exemple de résidents psychotiques : vont-ils comprendre ce dont on leur parle ? Parfois oui, parfois non. Comme les éducateurs, les directeurs, les psychologues…
26Innover avec : dans des institutions, ceux qui présentent de sérieuses difficultés de compréhension et de repérage spatio-temporel ne sont pas toujours les résidents. C’est pourquoi il convient d’étayer sans cesse les conditions d’expression de tout un chacun, en prenant appui sur le cadre légal sans nullement s’en contenter. Ainsi, installer un Conseil de la vie sociale n’est ni innovant ni banal : tout dépend de son fonctionnement, de l’étendue de ses attributions, de la portée effective des décisions. De ce point de vue, la mise en œuvre d’un projet innovant gagne à être aussi sa mise à l’épreuve, voire sa mise en critique ininterrompue : autrement dit, le processus de construction et de suivi joue un rôle déterminant dans la réalisation d’une innovation, voire dans son invalidation.
27Innover avec suppose des mutations plus ou moins radicales des représentations à propos des gens dits en difficulté. Une exigence majeure en est de ne pas réduire ceux-ci aux diagnostics (même fondés) forgés à leur endroit. Innover avec : revoir périodiquement les idéaux, les évidences, les fonctionnements. Faire du travail clinique une composante régulière du travail institutionnel. Accentuer ce que l’innovation comporte d’aventure, de secousse, de parade antihabitudes. Bref, la mise en avant d’une promesse démocratique est le symptôme d’une innovation sociale.
Pour (ne pas) conclure
28Deux dangers, finalement complémentaires, guettent l’innovation. D’une part, les sous-tendus, notamment quand ce mot est pris pour une vérité en soi, comme si ne pas dire et ne pas faire comme ceux qu’on critique suffisait à être innovant ; d’autre part, le fait de réduire l’innovation à ses seuls dispositifs techniques. Dispositifs indispensables, bien entendu – si toutefois leurs enjeux théoriques, idéologiques et politiques sont identifiés et mis en débat. Or, les inventions techniques marquent des innovations dans la mesure où des idéologies les investissent et des postures théoriques les orientent. Car l’innovation n’a rien d’une valeur en soi, elle n’est pas positive par essence mais toujours ancrée dans une histoire (celle d’une institution, d’un groupe, d’une organisation) hors de laquelle elle n’a littéralement aucun sens. Il n’y a pas d’innovation au singulier mais des innovations plurielles : certaines ouvrent des avenirs prometteurs et d’autres des perspectives beaucoup plus sombres.