Couverture de INPSY_9104

Article de revue

Admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent (SPPI) : une solution de facilité ?

Étude descriptive rétrospective réalisée aux urgences du Centre hospitalier Le Vinatier

Pages 339 à 347

Notes

  • [1]
    Circonstancié : si une explication concernant l’absence de tiers figure dans le certificat.
  • [2]
    Justifiée : s’il n’existe effectivement pas de tiers en capacité de demander l’hospitalisation.

LE CHIFFRE DU MOIS

28 %
C’est le pourcentage d’internes en psychiatrie se déclarant intéressés par la pratique expertale (n = 242 sur 853 répondants).
D’après une enquête réalisée par l’AFFEP (Association française fédérative des étudiants en psychiatrie) auprès des internes inscrits au DES de psychiatrie pour l’année universitaire 2011-2012 (taux de participation = 53 %).
Berger-Vergiat A, Chauvelin L, Van Effenterre A. Souhaits de pratique des internes en psychiatrie résultats d’une enquête nationale. L’Encéphale 41 ; 1 : 17-24.

Introduction

1La loi du 5 juillet 2011 introduit de nouvelles pratiques dont la possibilité d’hospitaliser un patient sans son consentement, en cas de péril imminent, sans demande d’un tiers et avec un seul certificat médical : il s’agit des soins psychiatriques en cas de péril imminent (SPPI) [1, 2].

2 Cette loi a répondu à plusieurs attentes : d’une part celle du Conseil constitutionnel imposant l’harmonisation des pratiques européennes en matière d’hospitalisations psychiatriques, et d’autre part celles de familles et de psychiatres se plaignant qu’un certain nombre de patients ne pouvaient faire l’objet de soins du fait de l’absence de tiers mobilisable : les patients isolés et désocialisés, sans domicile fixe, en voyage pathologique, ceux dont l’identité reste inconnue, ou encore ceux pour lesquels aucun proche ne peut être contacté ou identifié [3-8].

3Dans le projet de loi, l’admission en SPPI est réservée aux situations exceptionnelles : s’« il s’avère impossible d’obtenir une demande de tiers » et en cas d’« immédiateté du danger pour la santé ou la vie de patient » [1, 2]. Le caractère imprécis du texte de loi permet une grande liberté d’interprétation et donc d’utilisation de cette modalité de soins [9].

4Si l’admission en soins psychiatriques en l’absence de tiers et en cas de péril imminent est décrite dans la littérature, son utilisation et ses conséquences potentielles sont peu interrogées [10-29].

Figure 1

figure im1

Figure 1

Répartition des mesures d’hospitalisation sans consentement au CH Le Vinatier de 2011 à 2013.
SPD : soins psychiatriques des détenus. SDIP : soins des détenus en cas d’irresponsabilité pénale.

5Les chiffres du Centre hospitalier (CH) Le Vinatier montrent, entre 2011 et 2013, une stabilité des hospitalisations sans consentement, qui représentent environ un quart de l’ensemble des hospitalisations en psychiatrie : 1462 en 2011 (24 % du total des admissions), 1565 en 2012 (24 %) et 1563 en 2013 (26 %).

6Parmi l’ensemble des hospitalisations sans consentement, la part de soins psychiatriques à la demande du représentant de l’État (SPDRE) a diminué de 21 % à 12 % entre 2011 et 2013. La proportion de soins psychiatriques à la demande d’un tiers (SPDT) également a diminué de 69 % en 2011 à 56 % en 2013.

7Entre 2011 et 2013, l’apparition des 21 % de SPPI (324 admissions en 2013) s’accompagne ainsi d’une diminution concomitante de 9 % des SPDRE et de 13 % des SPDT (figure 1, tableau 1).

8Une telle proportion d’admissions en SPPI, 21 % des hospitalisations sans consentement sur l’année 2013, situe cette mesure hors du cadre « exceptionnel » pensé par la loi et questionne les situations dans lesquelles cette modalité d’admission est privilégiée.

Tableau 1

tableau im2

Tableau 1

Répartition des mesures d’hospitalisation sans consentement au CH Le Vinatier de 2011 à 2013.

9Rapide et simple à mettre en place, avec un seul certificat médical et pas de tiers signataire, doit-on craindre que l’admission en SPPI ne soit le low cost des soins psychiatriques sans consentement ?

10Des études récentes s’inquiètent de la progression du recours aux SPPI et appellent à mener des analyses à la fois quantitatives et qualitatives de ce type de décisions pour vérifier que les conditions limitatives pensées par la loi sont respectées [20-22].

11Dans cette optique, nous avons mené une étude monocentrique aux urgences du CH Le Vinatier sur une période de 6 mois.

Matériel et méthode

12Cette étude a inclus 122 patients admis en SPPI entre le 1er juillet et le 31 décembre 2013 aux urgences du CH Le Vinatier (unité médicale d’accueil, UMA).

13Tous les patients admis à l’UMA en SPPI durant cette période ont été inclus, aucun critère d’exclusion n’a été retenu.

14L’objectif de cette étude est de décrire l’utilisation de la modalité SPPI, en évaluant les critères suivant : l’adresseur, le caractère circonstancié  [1] du certificat initial concernant l’absence de tiers, l’existence ou l’absence effective de tiers, la justification  [2] de la mise en place de la mesure de SPPI, le caractère circonstancié du certificat initial concernant le péril imminent, le devenir de la mesure (maintien ou main levée, suite des soins), la durée moyenne de séjour.

15Le recueil des données s’est effectué au DIM (département d’information médicale), puis au bureau des entrées afin de consulter les certificats médicaux et les ordonnances des JLD (juge des libertés et de la détention). Lorsque des informations manquaient, elles étaient systématiquement recherchées dans le dossier médical informatisé du patient via le logiciel de soins Cortexte.

Résultats

16Parmi les 122 patients admis en SPPI durant la période d’étude, seuls 117 ont été analysés (96 %), les 5 dossiers n’ayant pu être analysés (4 %) n’étant pas consultables au moment de l’étude.

17 Par ailleurs, lorsque des données manquaient, en particulier concernant l’existence de tiers, la mesure de SPPI a été considérée comme justifiée.

Adresseur

18Les patients étaient adressés par un service d’urgences ou par SOS médecins dans 91 % des cas (service d’urgences dans 68 % des cas [n = 79], SOS médecins dans 23 % des cas [n = 27]). Dans 9 % des cas (n = 11), un autre établissement de santé ou un médecin libéral adressait le patient en SPPI.

Caractère circonstancié du certificat initial concernant le tiers

19Concernant l’absence de tiers, le certificat médical initial n’était pas circonstancié dans 78 % des cas (n = 91), seule la mention « qu’il s’avère impossible d’obtenir une demande de tiers » pré-remplie en bas du certificat figurait, sans décrire l’impossibilité de joindre un tiers ( figure 1).

20Cela signifie que dans seulement 22 % des admissions en SPPI (n = 26), le certificat initial remplit cette exigence ( figure 2).

21Les raisons du choix de SPPI, lorsque circonstanciées dans le certificat, étaient : dans la moitié des cas (50 %, n = 13) des patients isolés sur le plan socio-familial, à 19 % (n = 5) le refus de signature du tiers malgré son accord pour l’hospitalisation, à 15 % (n = 4) une famille non joignable ou non mobilisable, à 12 % (n = 3) pour protéger un tiers antérieurement victime de violence de la part du patient. Dans seulement 1 cas (4 %) l’admission en SPPI a été décidée du fait du refus de l’hospitalisation par le tiers (figure 3).

Figure 2

figure im3

Figure 2

Le premier certificat est-il circonstancié concernant l’absence de tiers ?

Figure 3

figure im4

Figure 3

Motif de mise en place de SPPI dans les certificats circonstanciés. Isolement socio-familial = absence de tiers.

Existence effective de tiers

22Sur l’ensemble des admissions en SPPI, un tiers existait dans 67 % des cas (n = 78) (figures 4 et 7 ).

Figure 4

figure im5

Figure 4

Existence de tiers pour les patients admis en SPPI.

Mesure de SPPI justifiée ?

23Sur l’ensemble des admissions en SPPI, 44 % sont injustifiées, un tiers étant en capacité de faire une demande d’hospitalisation mais n’ayant pas été sollicité (figures 5 et 7).

Figure 5

figure im6

Figure 5

Proportion de SPPI justifiée.

24Lorsqu’un tiers existait, le chiffre s’élève à deux tiers (67 %) de mesures de SPPI non justifiées (n = 52), c’est-à-dire qu’il existait un tiers en capacité de signer une demande d’hospitalisation mais qu’il n’a pas été sollicité (figure 6).

Figure 6

figure im7

Figure 6

Admission en SPPI justifiée, lorsqu’il existe un tiers.

25Ainsi, lorsqu’un tiers existait, seul un tiers (33 %) des mesures étaient justifiées : 57 % par impossibilité de le contacter ou mobiliser, 22 % par isolement socio-familial (absence de tiers, marginalisation), 14 % par refus de signer et 7 % pour protéger la famille.

Figure 7

figure im8

Figure 7

Récapitulatif.

Caractère circonstancié du certificat initial concernant le péril imminent

26 Concernant le péril imminent, la totalité des médecins a fait usage d’un modèle pré enregistré de certificat initial qui stipule « de plus, il existe un péril imminent », sans détailler. La description clinique figurant en amont dans le certificat est la seule source d’information concernant la nature du péril imminent.

Devenir des SPPI

27Un peu plus de la moitié (52 %, n = 61) des mesures ont été maintenues par le JLD, 3 % (n = 3) levées par le JLD et 45 % (n = 53) levées par un médecin avant passage devant le JLD.

28Ces résultats sont comparables que la mesure soit justifiée ou non.

29Ainsi, parmi les 52 cas de SPPI non justifiés, la moitié (50 %) ont été maintenus par le JLD (n = 26), 46 % ont été levés par le médecin avant passage devant le JLD (n = 24) et 4 % ont été levés par le JLD (n = 2).

30La durée moyenne de séjour (DMS) des patients admis en SPPI, en excluant les mesures toujours en cours (patients non sortis), est de 29 jours.

31On observe que la moitié (50 %, n = 54) des patients admis en SPPI sont hospitalisés 15 jours ou moins ( figure 8 ).

Figure 8

figure im9

Figure 8

Répartition des durées d’hospitalisation en SPPI.

32Lorsque l’hospitalisation complète en SPPI n’était pas maintenue (n = 56, soit 47 % des SPPI), 38 % (n = 21) des patients sont restés hospitalisés (en hospitalisation libre [HL] en clinique ou à l’hôpital, ou après remise en place d’un mesure de soins sous contrainte), 29 % sortaient sans suite (n = 16), 18 % (n = 21) ont poursuivi des soins ambulatoires et 3 patients (5 %) ont fait l’objet d’une levée de mesure par le JLD. Concernant les 6 autres patients, la fin de l’hospitalisation en SPPI correspondait à une fugue, une expulsion de territoire ou à un transfert inter-hospitalier.

Discussion

33Ni le passage devant le JLD ni le nombre de certificats n’ont freiné le recours aux hospitalisations sans consentement. Leur chiffre est relativement stable depuis 2011.

34En revanche, la répartition des mesures de soins sous contrainte a été bouleversée par la loi du 5 juillet 2011 [20-22].

35Auparavant, lorsqu’aucun tiers n’était disponible, la transformation en HO (hospitalisation d’office, ancienne SPDRE) de ce qui aurait dû être une HDT (hospitalisation à la demande d’un tiers, ancienne SPDT) était une pratique décriée mais utilisée, puisque seul moyen d’apporter des soins nécessaires dans certains cas, plus sociaux que cliniques [3, 4, 23].

36On pouvait donc penser que la modalité SPPI aurait pris la place de ces anciennes HO, mais on peut constater que l’apparition des 21 % de SPPI s’accompagne d’une diminution concomitante de seulement 9 % des SPDRE mais de 13 % des SPDT (figure 1, tableau 1 ). L’utilisation de la modalité de péril imminent se fait donc également au détriment des admissions en SPDT.

37Le CH Le Vinatier assiste à un nombre croissant de SPPI depuis 2011, atteignant 21 % des admissions sans consentement en 2013. Ces résultats sont comparables aux études rapportées dans la littérature [20-22].

38Certaines hospitalisations ont pu avoir lieu grâce à l’accès aux soins facilité par l’admission en SPPI pour certains patients isolés et désocialisés, sans domicile fixe, en voyage pathologique, ou encore ceux pour lesquels un proche ne peut être identifié ou contacté [3].

39Mais cette part croissante d’hospitalisations en SPPI inquiète, car, « si elles peuvent effectivement se justifier dans certaines situations de vraie absence de tiers, [elles] sont souvent utilisées pour accélérer le processus d’orientation à partir des urgences en faisant l’économie d’un échange quasi pédagogique avec le tiers pour l’amener à assumer une responsabilité de substitution salutaire à l’égard de la personne en situation de souffrance et de danger » [24].

Adresseurs

40En effet, on observe que les médecins adresseurs sont majoritairement des médecins des urgences ou des généralistes de SOS médecins (91 % au total).

41Le recours à la modalité SPPI est parfois justifié par la difficulté à attendre aux urgences. L’admission en SPPI aiderait à la gestion de patients psychiatriques qui seraient ainsi plus rapidement pris en charge en milieu spécialisé et permettrait de diminuer le phénomène de saturation des urgences générales [22, 25].

42La mesure de péril imminent est plus simple et plus rapide à mettre en place mais il faut souligner que l’orientation rapide des patients à partir des structures d’urgence des hôpitaux généraux n’est pas dénuée de risques, notamment celui de réduire le temps d’évaluation initiale et de réflexion soignante, ainsi que de favoriser le soin sans consentement pour faciliter une hospitalisation dans un hôpital spécialisé en manque de places [3, 26].

43Le risque est grand de se « laisser prendre par la violence de l’institution d’urgence » et « d’agir, de plus en plus vite, quitte à « évacuer » le malade » [22, 27].

44Cette inquiétude est mentionnée dans le projet de réforme législative de 2013 : « tout en respectant les formes prescrites par la loi, il n’est toutefois pas exclus qu’un certain nombre d’admissions en soins sans consentement, qui auraient pu faire intervenir un tiers dans le dispositif antérieur, soient désormais prises selon la procédure de péril imminent, afin (…) de simplifier l’admission dans un contexte d’urgence » [20].

45Par ailleurs, certains auteurs soulignent que l’initiation aux urgences d’une hospitalisation sans consentement peut s’effectuer dans un contexte d’« indifférence » et de « désintérêt » des urgentistes face à la modalité choisie [22, 28].

46La modalité de SPPI peut parfois être choisie comme une version low cost des SPDT, plus simple à mettre en place et ne nécessitant pas de solliciter un tiers.

Tiers

47Or le tiers joue un rôle important dans la prise en charge d’un patient sous contrainte et sa place a été modifiée en profondeur par la loi du 5 juillet 2011.

48La loi permet désormais d’hospitaliser sans tiers, c’est-à-dire sans un membre de la famille ou une personne ayant eu des relations antérieures avec le patient, agissant dans l’intérêt de celui-ci [29-33].

49La possibilité d’hospitaliser le patient sans tiers est fondamentale lorsque le psychiatre est confronté à la nécessité de donner des soins et de protéger une personne isolée, désocialisée, en voyage pathologique, sans tiers pour soutenir une hospitalisation ou lorsque les tiers sont désignés comme persécuteurs ou hostiles aux soins [3, 25].

50Cependant, lors de la mise en place d’une modalité de SPPI, la recherche de tiers « facultative » peut ne pas être entreprise, la charge incombant alors au directeur de l’hôpital spécialisé [3, 26, 34].

51Dans notre étude, 44 % des admissions en SPPI n’étaient pas justifiées, c’est-à-dire qu’il existait un tiers signataire qui n’a pas été sollicité.

52Avec l’existence de la modalité de SPPI, le tiers n’est plus systématiquement reçu. On perd ainsi la relation soignante et pédagogique avec lui pour l’informer sur la maladie de son proche et l’impliquer aux côtés des soignants par rapport à la nécessité de soins [25].

53La modalité de SPPI questionne les places respectives de la famille et du psychiatre dans la décision d’admission en soins psychiatriques sans consentement [35].

54Le rapport médecin-malade est profondément modifié par l’admission en SPPI.

55Le recours à un tiers qui se positionne pour les soins aux côtés de son proche malade permet au médecin de ne pas être seul à porter la contrainte, décale le dialogue patient-médecin sur un autre domaine que celui de la confrontation [3].

56L’implication du tiers permet également de se placer dans une autre temporalité que celle de l’urgence et de préparer, en amont, la suite des soins.

57La loi du 5 juillet 2011autorise à présent à imposer des soins sans autre opinion que celle du corps médical. N’est-ce pas trop responsabilisant pour le médecin, qui décide seul ?

58L’imprécision légale de la condition concernant l’absence de demande de tiers permet l’admission à l’encontre ou en absence de l’avis de la famille et place le psychiatre dans une nouvelle situation de responsabilité [5, 36].

59D’autre part, cette mesure de SPPI risque de s’accompagner d’un désengagement des familles. L’« effacement du tiers » dans la modalité de péril imminent peut permettre au tiers de ne pas se positionner tout en exigeant par ailleurs des soins pour son proche [3, 37, 38].

60Enfin, il est important de souligner que, lorsque les patients sont adressés en SPPI à l’UMA, que le tiers est présent lors de l’admission du patient, le péril imminent n’est pas transformé en SPDT, afin de simplifier les démarches administratives. La place du tiers est ainsi bien différente de celle qu’il aurait eue en étant impliqué dès le début de la procédure [3, 22].

Péril imminent

61La définition du péril imminent, l’« immédiateté du danger pour la santé ou la vie du patient » est assez floue et permet une grande liberté d’interprétation [3, 25, 39, 40]. Cela soulève la question de la responsabilité du psychiatre lors du refus des tiers de signer une demande d’hospitalisation, s’il n’est pas constaté de péril imminent au moment de la consultation, mais qu’un passage à l’acte grave survient quelques jours après.

62« Le psychiatre n’a pas encore obligation de résultats mais de moyens, encore faut-il qu’il le décrive de façon précise dans le dossier » [25].

63En pratique, dans tous les dossiers étudiés, la justification du péril imminent était à chercher par le JLD dans la description clinique circonstanciée figurant au-dessus de la mention « de plus, il existe un péril imminent ».

Devenir des mesures de SPPI

64Seule la moitié des patients admis en SPPI sont hospitalisés plus de 15 jours et passent donc devant le JLD. On observe un faible nombre de mains levées de SPPI pour problème de forme, alors même que des certificats médicaux précisent qu’un tiers était pourtant disponible pour mettre en place une mesure de SPDT. Il n’existe pas à ce jour de jurisprudence claire concernant les SPPI non justifiées et l’attitude des JLD n’est pas systématique. Nombre d’entre eux s’appuient sur l’évaluation médicale et préfèrent garder une attitude sécuritaire, ne retenant pas le problème de forme et autorisant donc le maintien des soins.

Conclusion

65La loi du 5 juillet 2011 introduit de nouvelles pratiques dont la possibilité d’hospitaliser sans consentement sans tiers en cas de péril imminent : les SPPI.

66La possibilité d’hospitaliser le patient sans tiers est fondamentale lorsque le psychiatre est confronté à la nécessité de donner des soins et de protéger une personne isolée, non consciente de ses troubles, et en péril imminent.

67Cependant on observe une augmentation de cette modalité d’admission – 21 % des hospitalisations sans consentement –, alors que le chiffre des hospitalisations sans consentement est stable.

68Dans 78 % des cas, il n’existe pas de traçabilité de la recherche d’un tiers, le certificat initial n’étant pas circonstancié.

69La commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) du Rhône s’intéresse de près aux cas de SPPI non justifiés, qui représentent 44 % des admissions en péril imminent.

70Une des suggestions est la mise en place d’une fiche de traçabilité de recherche de tiers « [L’établissement de santé] doit faire la preuve, par tous les moyens, de la recherche du tiers, les démarches entreprises précisant les personnes contactées. Ces informations seraient mentionnées dans le dossier médical » [9, 41].

Liens d’intérêts

71les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêt en relation avec cet article.


Exemple de formulaire de traçabilité

equation im10

Références

  • 1. Loi no 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. Loi no 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. Journal officiel no 155 du 2011-07-06. www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000024312722&dateTexte=&categorieLien= id..
  • 2. Loi no 2013-869 du 27 septembre 2013 modifiant certaines dispositions issues de la loi no 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. Loi no 2013-869 du 27 septembre 2013 modifiant certaines dispositions issues de la loi no 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. Journal officiel no 227 du 2013-09-29. www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027996629&dateTexte=&categorieLien= id..
  • 3. Mondoloni A., Le péril imminent dans la loi du 5 juillet 2011 : quelles implications sur les soins ?. Encéphale 2014  ; .
  • 4. Braitman A., Dauriac-Le Masson V., Beghelli F., La décision d’hospitalisation sans consentement aux urgences : approche dimensionnelle ou catégorielle ?. Encéphale 2013  ; 40 : 247-54.
  • 5. Jonas C.. Soins sans consentement prévus par la loi du 5 juillet 2011. EMC Psychiatrie 2013  ; .
  • 6. Unafam. Le soin psychiatrique. Positions et demandes des familles. www.unafam38.org/Doc-a-telecharger/Rapport_SOiNS.pdf (consulté le 09/09/14)..
  • 7. Direction des affaires juridiques, Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent ou la procédure sans demande de tiers. http: //portail-web.aphp.fr/affairesjuridiques/IMG/pdf/Admission_soins_psy_en_cas_de_PI.pdf (consulté le 09/09/14)..
  • 8. Direction des affaires juridiques, Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Le mémento de l’administrateur de garde. http://affairesjuridiques.aphp.fr/ (consulté le 19/05/14)..
  • 9. Syndicat des psychiatres d’exercice public (SPEP). Dossier de la conférence de presse. www.spep.fr/textes/dospres90.pdf (consulté le 09/09/14)..
  • 10. Boillet D., Welniarz B.. La loi du 5 juillet 2011 : une loi de défiance à l’égard des malades et de leurs médecins. Perspectives Psy 2011  ; 50 : 207-9.
  • 11. Fnapsy-Fédération nationale des associations d’usagers en psychiatrie Analyse des articles pertinents du Code de la Santé Publique. Droit, déontologie et soin 2011  ; 11 : 449-502.
  • 12. Fnapsy Le nouveau régime des soins sous contrainte (loi du 5 juillet 2011). Droit, déontologie et soin 2011  ; 11 : 438-502.
  • 13. Hémery Y.. Une loi fâcheuse. L’information psychiatrique 2011  ; 87 : 451-4.
  • 14. Lachaux B.. La loi du 05 juillet 2011 ou la défense du sujet passant de la médecine au droit. PSN 2011  ; 9 : 177-80.
  • 15. Naudin J., Lancon C., Bouloudnine S.. Soins sans consentement : trois mots, trois problèmes. Santé Mentale 2011  ; 161 : 25-30.
  • 16. Pénochet J.C.. Du point de vue des syndicats. Journal français de psychiatrie 2013  ; 38 : 28-31.
  • 17. Rhenter P.. La réforme des hospitalisations psychiatriques sans consentement : un éclairage historique. Journal français de psychiatrie 2013  ; 38 : 12-5.
  • 18. Rome I.. Pour un juge garant de la liberté individuelle de chaque patient. L’information psychiatrique 2011  ; 87 : 757-62.
  • 19. Union syndicale de la psychiatrie. Communiqué de l’Intersyndicale des praticiens hospitaliers du 6 mai 2010 sur la psychiatrie. www.uspsy.fr/Communique-de-Intersyndicales-des.html (consulté le 09/09/14)..
  • 20. Robiliard D. Rapport no1284 du 17 juillet 2013, fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi relative aux soins sans consentement en psychiatrie. www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rapports/r1284.pdf..
  • 21. Le site santé du ministère des Affaires sociales et de la santé Santé.gouv.fr. « Innovation légale : la contrainte sans tiers » : Bilan après 3 mois d’application. www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/CDSP_president_Nord.pdf..
  • 22. Kliffa M. L’admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent : reflet de l’évolution des places du tiers et du psychiatre dans la décision de soin sans consentement. [Thèse]. Lyon : Doctorat en médecine ; 2014..
  • 23. Bernardet P. Contribution à l’étude de l’évolution de l’hospitalisation psychiatrique en France de 1838 à nos jours. www.groupeinfoasiles.org/allfiles/theses-etudes-doctrine/Contribution_etude_evolution_HO.pdf (consulté le 09/09/14)..
  • 24. Menu A., Meyer P.. Paradoxes et contradictions de la nouvelle loi. Pluriels 2013  ; 99-100 : 18-20.
  • 25. Vacheron M.N.. Quel impact du dispositif du 5 juillet 2011 sur les soins deux ans après ?. Encéphale 2014  ; 40 : 97-9.
  • 26. Cambier G., Bougerol T., Micheletti P.. Enquête qualitative sur la loi du 5 juillet 2011 en psychiatrie. Santé Publique 2013  ; 25 : 793-802.
  • 27. Sassolas M, Cahn R, Campos Valadares J, et al. Les sept risques des urgences. In : Sassolas M. L’éloge du risque dans le soin psychiatrique. Toulouse : Érès ; 2006, p. 127-134..
  • 28. Danet F.. La médecine d’urgence. Du sale boulot à l’expansion sans limite. Les cahiers internationaux de psy sociale 2008  ; 78 : 67-78.
  • 29. Projet de loi no 2494 du 5 mai 2010 relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge..
  • 30. Lettre rectificative no 3116 du 26 janvier 2011 au projet de loi (no 2494) relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge..
  • 31. Lecerf JR. Avis no 477 du 27 avril 2011 présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge..
  • 32. Lefrand G. Rapport 3189 du 2 mars 2011 fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge..
  • 33. Lorrain JL. Rapport no 589 du 8 juin 2011 fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, adopté avec modifications par l’assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge..
  • 34. Salah HM, Nicolaieff G, Abgrall-Barbry G. Maniement des actes médicolégaux et médicosociaux en psychiatrie. AKOS (Traité de Médecine) 2013 [7-0143]. ..
  • 35. Unafam. Le Livre blanc des partenaires de santé mentale France, associations d’usagers de la psychiatrie, de soignant et de responsables du social dans la cité. Proposition faites lors des réunions de juin 2001. www.unafam.org/IMG/pdf/LivreBlancSanteMentale.pdf (consulté le 09/09/14)..
  • 36. Devers G, Le Droit, pour risquer la liberté. In : Sassolas M. L’éloge du risque dans le soin psychiatrique. Toulouse : Erès ; 2006 : 34-40..
  • 37. Odier B.. Réforme de la loi de 1990 : réunion des fédérations hospitalières et des conférences de présidents de CME. Ministère, 20 avril 2010. L’information psychiatrique 2010  ; 86 : 475-6.
  • 38. Berthon G.. Le paradoxe du respect du consentement dans les soins sous contrainte : entre norme juridique et éthique psychiatrique. L’information psychiatrique 2011  ; 87 : 459-65.
  • 39. Haute Autorité de santé. Recommandations pour la pratique clinique. Modalités de prise de décision concernant l’indication en urgence d’une hospitalisation sans consentement d’une personne présentant des troubles mentaux. 2005..
  • 40. La réforme de la loi relative aux soins psychiatriques sur le site sante.gouv.fr : textes législatifs et juridiques et foire aux questions de janvier 2013..
  • 41. Unafam. Révision de la loi de 1990 : communiqué de l’Unafam et de ses partenaires. www.unafam.org/Revision-de-la-loi-de-1990.html (consulté le 09/09/14)..

Date de mise en ligne : 27/04/2015

https://doi.org/10.1684/ipe.2015.1338

Notes

  • [1]
    Circonstancié : si une explication concernant l’absence de tiers figure dans le certificat.
  • [2]
    Justifiée : s’il n’existe effectivement pas de tiers en capacité de demander l’hospitalisation.

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.9.168

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions