Loving can hurt
Loving can hurt sometimes...
Les blessures d’amour
1 Ceux que je rencontre dans ma pratique de conseil conjugal et de thérapie de couple sont des grands blessés de l’amour. Ils souffrent tellement et depuis si longtemps que la douleur les aveugle, les rend sourds et insensibles. Ils se sentent confus et déçus. Cela fait souvent des années qu’ils s’abiment au sein du lien qu’ils forment l’un auprès de l’autre.
2 Certains couples sont dans une dynamique de conflits récurrents et violents. Chez eux, à huit clos, à la moindre occasion, les reproches fusent comme des flèches, les « quatre vérités » sont employées pour ériger des remparts contre l’autre. Chacun est prêt à tout pour prouver sa raison et discréditer le partenaire. Leur douleur, ainsi que celle de leur entourage, est très vive.
3 Dans d’autres couples, en apparence, il y a un partenaire droit et juste, et l’autre, un bon à rien. Autant l’un dit faire tous les efforts pour la maison et la famille, autant l’autre ne fait que « des bêtises » – il joue trop aux jeux vidéo, mange trop, fait trop de sport, passe du temps sur les sites pornographiques, ou peut-être même, il boit en cachette.
4 D’autres encore vivent dans un palais de glace. Toute chose est minutieusement posée à sa place, l’heure du repas et du coucher est scrupuleusement respectée, les vacances planifiées bien à l’avance. Dans ces couples souvent, on vit sans conflit apparent : les émotions négatives sont mises sous le tapis pour éviter des confrontations et préserver l’apparence de paix en famille. Malgré tous ces efforts, les partenaires sont rongés par une sensation sourde de douleur et de solitude.
5 Dans toutes ces configurations peut s’inviter la violence : cris, insultes, chantage, intimidation, dénigrement, humiliation, mépris, ignorance, obstruction, silence, mise à l’écart, coups et agressions sexuelles.
Au commencement…
6 Ce qui ajoute à la souffrance des couples, c’est qu’au début, ça commençait bien entre eux. Beaucoup se souviennent de ces premiers moments, où ils étaient saisis par le visage de leur futur partenaire, qui se démarquait des autres. Quelque chose d’indicible dans les yeux, dans le sourire, dans la voix, dans le toucher, dans la façon de bouger les a attiré, a touché une corde sensible au fond de leur cœur. Ils se souviennent des longues conversations où ils avaient l’impression de se comprendre complétement, d’avoir même trouvé une âme-sœur. Ils se sont sentis en lien facilement, sans effort.
7 Certains gardent enfoui dans leur mémoire ce véritable sentiment amoureux qui s’était développé au début de leur relation – l’envie irrésistible d’être auprès de l’autre, les battements du cœur à chaque fois qu’un coup de fil ou un message ont été reçus, suivi d’un terrible sentiment de manque à chaque séparation, même momentanée, comme dans une sorte de symbiose.
8 Même si tous n’ont pas connu ce sentiment fort – et c’est très important de mentionner cela, car, dans notre culture occidentale où le sentiment amoureux est idolâtré, certains peuvent se sentir lésés de ne pas avoir ressenti les papillons dans le ventre – tous les couples se souviennent de quelque chose de bon du début de leur relation : une certaine idée d’harmonie, d’entente, ou même une simple joie d’avoir trouvé quelqu’un qui leur correspond.
9 Linda Carroll, une thérapeute de couple IMAGO basée aux Etats-Unis, mentionne dans son livre Love Cycles, the five essential stages of lasting love qu’à ce stade amoureux initial, le cerveau, comme voilé, ne permet pas de voir clair dans la relation : les défauts du partenaire, même s’ils sont remarqués, sont vus dans une lumière favorable. Malgré son imperfection, ce stade, doux et léger, joue un rôle important dans la création du couple.
La désillusion
10 Lorsque l’imprégnation hormonale décroit, une chose qui arrive immanquablement après un laps de temps plus ou moins long, un sentiment froid et désagréable de déconnexion apparaît. Les partenaires commencent à ressentir clairement ces moments, où le comportement de l’autre les agace, les stresse, et là, ils n’ont plus l’anesthésie nécessaire pour le supporter. Ils voient et entendent tout ce que leur partenaire dit et fait qui ne leur convient pas.
11 Ainsi, un partenaire qui attirait par son extraordinaire culture générale et sa largeur d’esprit désespère par ses retards et ses oublis de rendez-vous. Un homme qui assurait par sa douceur et ses attentions délicates apparaît comme indécis et faible. Une femme qui a été admirée pour son plein d’énergie fini par fatiguer par ses exigences.
La lutte de pouvoir : à qui la faute ?
12 Les partenaires présument quasi-systématiquement que l’autre a changé et qu’il faut le ramener dans le droit chemin pour que la vie redevienne agréable, comme au début. C’est le moment où chacun blâme l’autre pour l’insatisfaction au sein du couple. Les conflits deviennent de plus en plus fréquents – c’est la phase de lutte de pouvoir.
13 Le sentiment de désamour et de désunion fait tellement mal que les partenaires sont également prêts à blâmer les facteurs extérieurs – le travail, la belle famille, l’acquisition d’un bien immobilier, et, par-dessus tout, ô combien, la naissance des enfants.
14 A ce stade, les partenaires enfilent les costumes de survie qu’ils avaient l’habitude de porter dans leur enfance – une armure, une carapace – et qu’ils ont laissés au placard au début de leur histoire.
15 Certains vont aller jusqu’à se dire qu’après tout, ils sont avec un partenaire mal assorti, et, tout à coup, tant d’autres personnes paraissent plus à l’écoute, plus attrayants. Ce sont les moments où un collègue attentionné ou une amie d’enfance perdue de vue depuis un moment peuvent se présenter comme une solution rêvée pour sortir du pétrin dans lequel se trouve le couple.
16 C’est le plus souvent à ce stade que les couples viennent consulter. Certains le vivent depuis quelques mois, d’autres depuis de très longues années, mais tous diront ne plus vouloir vivre comme ça.
La place des blessures affectives dans le choix du partenaire romantique
17 Bien qu’un certain nombre d’éléments conscients soit nécessaire pour que la rencontre ait lieu, le choix du partenaire romantique reste largement inconscient. La plupart des couples peinent à expliquer leur attirance initiale. « Elle était jolie, il était gentil, on partageait les mêmes centres d’intérêt. » Ou encore : « Nous avons senti toutes les deux comme un courant électrique qui nous a transpercées de la tête aux pieds ! » D’aucun dira clairement pourquoi c’était ce partenaire là et non pas un autre qui a été choisi.
18 Ce que tous savent en revanche, c’est qu’avec le temps, ce même partenaire a fini par appuyer là, où ça fait mal, très mal et fini par faire et dire exactement la chose que l’on n’a pas envie d’entendre et faire les choses que l’on n’a surtout pas envie que l’on nous fasse. Certains, des rares, portant déjà un regard un peu lucide sur leur situation, diront : « Madame, j’ai déjà vécu cela dans mon enfance, et j’ai fait tout dans mon possible pour le fuir, mais j’ai l’impression que le passé me rattrape. »
19 C’est peut-être ici la clé de cette attirance inconsciente : nous tombons amoureux de personnes avec la même blessure de l’enfance, mais avec une différente façon de s’adapter à cette blessure. Il y aura un partenaire qui aura tendance à être plus réfléchi, introverti, dans une tendance à minimiser les événements et les émotions, que nous appelons « un minimiseur », et une personne qui portera son énergie plus vers l’extérieur et qui choisira des façons plus bruyantes pour exprimer ses émotions et ses besoins, que nous appellerons « un maximiseur. »
La structuration de l’Imago
20 Les blessures d’enfance, les traumas vécus au début de notre vie restent avec nous. C’est dans nos liens initiaux que nous apprenons à être en lien. C’est auprès de notre mère, notre père, mais aussi nos frères et sœurs, ou d’autres figures importantes qui nous entourent, que nous apprenons à être en relation.
21 Nous vivons des expériences positives, tout comme des expériences négatives au cours de notre enfance, que nous en soyons conscients ou pas. Nous avons ressenti des émotions agréables et désagréables, et nous avons eu certain nombre de nos besoins comblés ou insatisfaits. Un ensemble de ces expériences forme notre Imago, défini dans la thérapie relationnelle Imago comme « l’image inconsciente de l’amour familier. »
22 Nous pensons que nous nous mettons en couple en fonction des caractéristiques positives de ceux qui ont pris soin de nous dans notre enfance, alors que nous sommes en réalité plus attirés par la capacité d’un partenaire potentiel à déclencher en nous le tourment des émotions négatives liées à notre enfance, car là même, dans cet endroit, il nous reste encore quelque chose à résoudre et à dépasser pour nous accomplir sur le plan personnel et au sein de notre relation amoureuse.
Guérir en couple de nos blessures d’enfance
23 Selon Harville Hendrix, le créateur de la thérapie relationnelle Imago, « Nous nous marrions toujours avec une personne dans un but de terminer notre enfance. »
24 Il est possible donc d’imaginer le couple non pas seulement comme une fatalité malheureuse de répétition de liens douloureux, mais une occasion de guérison de blessures de l’enfance, et même, au-delà de cela, une singulière possibilité de maturation personnelle.
25 Cela revient à dire que le couple en soi peut être un lieu propice d’une thérapie individuelle, car pour résoudre les problèmes de l’enfance il ne suffit pas de vouloir imposer à l’autre de changer, il faut s’ouvrir à la remise en cause et au travail personnel : plutôt que de changer de partenaire, devenir soi-même un partenaire adéquat.
26 « Nous naissons dans une relation, nous sommes blessés dans une relation et nous pouvons guérir dans une relation. » Harville Hendrix
Le dialogue intentionnel
27 Le chemin privilégié pour passer de la relation inconsciente au couple conscient lors de la thérapie relationnelle Imago est le dialogue intentionnel. Les partenaires, assis face à face, sont invités à se regarder dans les yeux et se toucher légèrement dans la mesure du possible.
28 Ce dialogue structuré implique qu’il y a à la fois un partenaire qui parle (émetteur) et un partenaire qui écoute (récepteur). Le thérapeute se place à coté, assez proche, car il est le garant de la sécurité du cadre.
29 La structure du dialogue s’inspire à la fois de l’écoute empathique et de la communication non-violente. Lorsque l’émetteur parle, le partenaire récepteur est invité à reformuler régulièrement ce qu’il entend : tout d’abord, par une simple reformulation miroir, qui doit rester la plus proche du langage de l’émetteur, sans omissions ni interprétation, puis par une reformulation-validation, qui indique à l’émetteur que même si le récepteur ne vit pas les choses de la même manière, il comprend le point de vue de son conjoint. Et en dernier, le récepteur sera invité à une reformulation empathique, où il cherchera à comprendre et à nommer le vécu émotionnel de son partenaire.
30 Pendant cet échange, le thérapeute est présent pour veiller de près au lien du couple et le guider pour que l’échange soit imprégné d’une compassion authentique – dans les paroles, dans l’expression vocale, ainsi que le langage corporel. Le travail donc du thérapeute ne sera pas de résoudre les problèmes du couple, mais de reconnecter les deux partenaires. Et c’est grâce à ce lien restauré que les partenaires se mettront éventuellement sur le chemin de la guérison.
31 Des techniques méditatives peuvent être employées afin de rendre les partenaires attentifs aux sensations de leur propre corps et les aider à réguler leurs émotions au début ou même au cours de la séance, si nécessaire.
Un exemple d’un cas clinique
32 F., 28 ans, et M. 30 ans, sont ensemble depuis 10 ans. Ils ont un fils de 3 ans. F. est venue me voir seule d’abord, car le couple se dispute pour tout. F. se plaint que les réactions de M. sont devenues de plus en plus violentes : à la moindre remarque de F., M. crie, tape dans les murs et a même menacé de s’en prendre à elle. F. a cherché également de l’aide pour le fils du couple, qui se comporte violemment envers ses camarades de l’école et le pédopsychiatre a vivement recommandé « d’abord s’occuper de leur couple ». F. fini par avouer que derrière sa lassitude se trouve le fait que M., qui travaille à son compte, boit beaucoup et qu’elle ne supporte plus le voir en état d’ivresse. Elle dit qu’elle est décidée à partir, mais que quelque chose la retient, qu’elle a peut-être peur de se retrouver seule.
33 Je lui propose de revenir me voir avec son compagnon, car quelle que soit l’issue de leur couple, le travail à deux leur serait bénéfique. A ma surprise, F. reprend vite contact pour un travail de couple, car M. se montre très volontaire.
34 Lors de la première séance de couple, les partenaires racontent leur vision de ce qui est le problème au sein de leur couple. Pour compléter la version de F., M. dit qu’il est très stressé à cause du travail au sein de son entreprise. Il se sent souvent coincé, car il a du mal à prendre des décisions quotidiennes et il dit « se laisser faire » très souvent, il dit avoir été poussé par F. à s’installer à son compte. Il a très honte du fait que F. a raconté à tout l’entourage familial le fait qu’il boit. Il se dit très triste que F., qui travaille dans la restauration est souvent absente le soir et les week-ends et cela lui donne un grand sentiment de solitude.
35 A la fin de la première séance, le couple s’engage, sous forme du dialogue intentionnel, dans le travail de reconnexion grâce au retour vers les souvenirs positifs du couple, qui s’avère très fructueux, car les partenaires ont encore beaucoup de choses positives à se dire, notamment sur leurs sentiments et sur leur attirance mutuelle.
Le déroulement du dialogue
36 A la séance suivante, je propose le travail au sujet de fuites, c’est-à-dire, des comportements dans lesquels les partenaires s’engagent plus ou moins consciemment pour fuir leur relation devenue insatisfaisante. L’objectif derrière cette démarche est d’identifier les obstacles qui empêchent les partenaires à réinvestir du temps, de l’énergie et de l’effort au sein du couple.
37 C’est au tour de F. d’être émettrice. Elle identifie ses passe-temps d’évitement – le sport, les promenades avec ses amies et le temps passée chez sa mère. Elle dit que ce sont bien des activités importantes, mais elle se rend clairement compte qu’elle tarde de rentrer chez elle pour ne pas se retrouver face à son conjoint. Elle développe son récit grâce à mes amorces proposées suivant le protocole :
38 F. : Quand je vais voir ma meilleure amie, alors que je sais que tu m’attends à la maison, je choisis d’aller lui parler, car j’aime bien passer du temps avec elle. Et surtout, je ne suis pas pressée de rentrer à la maison.
39 M., assis proche en face de F., regardant bien dans les yeux de sa compagne, écoute attentivement et reformule régulièrement ce qu’elle dit. Il a pour consigne de ne pas réagir, mais de découvrir comment F. vit cette situation « dans son monde à elle. » Leur rythme respiratoire se synchronise. Il semble la méditer.
40 F. : Ce que j’aime dans le temps passé avec ma meilleure amie, c’est que nous pouvons parler de tout et de rien. Dans ces moments, je me sens naturelle et détendue.
41 Une chose que je fuis en faisant cela ? Je me dis que je n’ai pas envie de me retrouver à la maison et d’entendre tes reproches.
42 Ce qui me fait le plus mal ? Je suis très maladroite, et quand je fais tomber quelque chose, tu me crie dessus et tu me reproches de ne pas faire attention.
43 Dans ces moments, je me sens incomprise, je me sens tendue. J’ai comme une boule dans la gorge. J’ai peur de faire encore d’autres bêtises. Je me crispe.
44 Quand M. reformule les paroles de F. en introduisant ses phrases par « Je t’entends dire... » il laisse paraitre de la tristesse, et en même temps, il semble très à l’écoute.
45 F. : Ce que cette sensation me rappelle de mon enfance ? (F. fait une longue pause.) Comme ça, je ne sais pas, j’ai vécu une enfance très heureuse. Ma mère et mes grands-parents étaient toujours là pour moi. Je me suis toujours sentie aimé auprès d’eux. Je ne me souviens pas d’avoir ressenti de la tension aussi forte.
46 Je l’invite à chercher une journée où elle aurait pu ressentir cette sensation toute particulière de tension. F. pause et semble chercher.
47 F. : Enfin, c’est peut-être lié à mon père. C’est surprenant, car je n’ai jamais pensé que cela avait de l’importance. Il nous a laissés très vite, ma mère, mon frère et moi. Mais parfois, nous allions, moi et mon frère à passer des week-ends chez lui. Il buvait et nous criait dessus. Nous devions nous cacher tous les deux afin qu’il ne s’en prenne pas à nous.
48 F. continue à expliquer comment elle éprouvait de la peur face à ce père, au point que parfois, son frère et elle devaient s’échapper pour aller se réfugier chez leur mère.
49 M. fait un résumé-miroir de ce qu’il a entendu, suivi par une reformulation-validation où il dit qu’il comprend tout à fait comment F. aurait pu se sentir étant petite, car lui-même a fait l’expérience de la violence et de la froideur du père de F. Lorsque M. reformule, F. l’écoute attentivement et acquiesce que M. a bien compris ses ressentis et que sa reformulation est juste. M. continue grâce aux amorces de la thérapeute. Il parait très ému :
50 M. : Ce qui me touche dans tes paroles, c’est que j’ai l’impression de répéter ce que ton père te faisait subir. Je comprends que tu n’aies pas envie de rentrer à la maison pour ne pas revivre ça. Dis-moi, de quoi as-tu le plus besoin de moi pour t’aider à réparer les blessures de ton enfance ?
51 F. répond qu’elle a besoin de compréhension de la part de son conjoint et qu’elle souhaite se sentir en sécurité dans sa propre maison. Elle a besoin de se sentir détendue et confiante auprès de M.
52 Après avoir exprimé ses besoins profonds, elle propose trois pistes concrètes de comportement quotidien qu’elle souhaite voir chez M. Son conjoint accepte de changer deux comportements et nous nous mettons d’accord qu’il tiendra sa promesse jusqu’à la séance suivante qui doit avoir lieu dans deux semaines. Nous abordons également l’attitude de F. qui pourrait aider M. à tenir ses promesses.
53 Au cours de la séance suivante, M. lors de son tour à être émetteur, identifie l’alcool comme sa fuite de la peur de faire une erreur et d’être jugé. Il a grandi auprès de parents colériques qui s’occupaient beaucoup de son frère ainé qui avait « beaucoup de soucis » et qui n’avaient pas de temps pour M, qui devait être un enfant sage pour ne pas en rajouter. Quand F. passe peu de temps avec lui, il se sent de nouveau oublié. M. exprime son besoin d’écoute et de soutien et demande à F. de trouver des moments à passer ensemble.
Réaliser des changements durables
54 Grâce au cadre sécurisant du dialogue intentionnel, les deux partenaires ont pu regarder en arrière, revenir sur leur enfance et prendre conscience du fait que leurs conflits de couple faisaient écho à d’anciens conflits non-résolus. Grâce à l’écoute mutuelle et aux échanges profonds, ils se sont sentis en lien à nouveau.
55 Les changements de comportement, bien entendu, ont besoin d’être stabilisés dans la durée. De ce point de vue, la thérapie relationnelle Imago n’est pas une thérapie brève, mais une façon de voir le couple comme un lieu de thérapie personnelle. Il est demandé au couple de s’engager pour un minimum de 12 séances afin que les nouvelles façons d’être en lien puissent prendre ancrage.
56 Après un temps de suivi thérapeutique, certains vont aller jusqu’à dire que l’effort fourni pour répondre aux besoins de leur partenaire les a fait grandir à leur manière, comme s’ils développaient, grâce à leur partenaire, un côté de leur personnalité qui leur manquait. Ils disent savourer un sentiment de ce qui s’apparente à une maturation personnelle.
57 De nombreux couples peuvent démarrer une pente ascendante et vivent une rechute aux alentours de 5ème - 7ème séance, un moment qui est d’autant plus marqué par une déception supplémentaire – nous avons réussi à aller mieux, mais nous n’arrivons pas à faire durer cet état d’équilibre.
58 Ces moments vacillants sont des nouvelles ouvertures pour franchir les paliers et descendre dans l’analyse de raisons inconscientes qui maintiennent le couple dans les anciennes modes de fonctionnement. Comme dit Ellyn Bader, une thérapeute de couple, « il est difficile de lâcher les béquilles ».
59 Ce sont peut-être des moments de véritable choix conscient : est-ce que je veux rester avec mon partenaire et apprendre à l’aimer ? Suis-je prêt à m’engager pour l’aimer de façon dont il a besoin d’être aimé ? Certains, certes, décideront que le chemin de reconstruction est trop difficile, trop douloureux et décideront qu’il est mieux pour eux de se séparer. Pour ceux qui ont encore la foi en leur relation, le dialogue intentionnel appris dans les séances thérapeutiques devra être maintenu, afin de continuer le chemin commun de rééducation.
60 Le nouveau langage d’amour au sein du couple prend du temps, de l’engagement, de la pratique, tout comme l’apprentissage de n’importe quelle langue.
En conclusion, ou l’amour re-trouvé
61 Pour une conseillère conjugale et familiale et thérapeute de couple* que je suis, il est difficile de parler d’amour comme de quelque chose d’évident, comme s’il s’agissait d’une chose palpable, présente et entière.
62 En revanche, au fil des séances de travail avec des couples en crise, ce qui se donne à voir, c’est quelque chose qui ressemblerait à une mosaïque ancienne, délavée et pleine de petites fissures, de craquelures d’enduit, avec des bouts manquants. Nous essayons de trouver des morceaux, de reboucher les fissures et de voir si, au fil du temps, une vision claire, colorée et vivifiante se dessine. Dans cette nouvelle vision, les blessures passées ne sont pas cachées, mais mises en valeur, comme des endroits qui ont permis l’émergence du renouveau, qui est peut-être de l’amour.
Bibliographie
Bibliographie
- Harville HENDRIX et Helen LAKELLY HUNT (2017) Le guide des parents : Toi es toi, tu n’es pas moi !. Editions Imago
- Linda CARROLL (2014), Love Cycles. The five essential stages of Lasting Love. New world Library
Mots-clés éditeurs : théorie d’attachement, écoute empathique, relation symbiotique, Blessures d’enfance, thérapie relationnelle Imago
Mise en ligne 25/01/2019
https://doi.org/10.3917/imin.042.0021