Notes
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[*]
Prépare une thèse à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne intitulée État, pouvoir et société en Arabie de l’Est aux xviie-xixe siècles : une tentative d’histoire sociopolitique sous la direction de Nadine Picaudou et Pierre Vermeren, en cotutelle avec l’Université d’État de Saint-Pétersbourg.
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[1]
Entre 1624 et 1744, l’Oman est gouverné par les Imâms al-Ya‘âriba. L’imâm est le chef politico-religieux de l’Imamat, modèle étatique prôné par l’ibadisme, courant de l’islam et l’école de droit majoritaire en Oman. Depuis 1749, la dynastie des Âl Bû Sa‘îd est au pouvoir. Seuls les deux premiers dirigeants des Âl Bû Sa‘îd portent le titre d’Imâm, leurs successeurs ne prétendant pas à l’autorité religieuse. Entre 1920 et 1955, deux États coexistent en Oman : le Sultanat contrôle la côte et l’Imamat l’intérieur (J. C. Wilkinson, The Imamate Tradition of Oman, Cambridge, 1987).
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[2]
S. S. Damluji, The Architecture of Oman, Reading, 1998 ; S. Bandyopadhyay, Manah, an Omani Oasis, an Arabian Legacy : Architecture and Social History of an Omani Settlement, Liverpool, 2011 ; Oases Settlements in Oman, A. Gangler dir., Stuttgart, 2008 ; P. Costa, « Notes on settlement patterns in traditional Oman », Journal of Oman Studies (JOS), 6/2 (1983), p. 239-246 ; B. Merschen, « Settlement space and architecture in South-Arabian Oases – ethno-archaeological investigations in recently abandoned settlement quarters in inner Oman », Proceedings of the Seminar for Arabian Studies (PSAS), 28 (1998), p. 201-214.
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[3]
C. Eickelman, Women and Community in Oman, New York, 1984.
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[4]
W. G. Flanagan, Contemporary Urban Sociology, Cambridge, 1993 ; P. C. W. Gutkind, Urban Anthropology, 1974 ; M. Segaud, Anthropologie de l’espace : habiter, fonder, distribuer, transformer, Paris, 2010 ; F. Paul-Levy et M. Segaud, Anthropologie de l’espace, Paris, 1983 ; J. Rémy, Sociologie urbaine et rurale : l’espace et l’agir, Paris, 1998 ; F. Choay, Pour une anthropologie de l’espace, Paris, 2006 ; Dictionnaire de la géographie, J. Levy et M. Lussault dir., Paris, 2003.
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[5]
J. Abu Lughod, « The Islamic City : Historic Myth, Islamic essence, and contemporary relevance », International Journal of Middle East Studies, 19 (1987), p. 155-176 ; R. Brunschvig, « Urbanisme médiéval et droit musulman », Revue des études islamiques, 15 (1947), p. 127-155 ; L’Espace social de la ville arabe, D. Chevallier dir., Paris, 1979 ; La Ville arabe dans l’islam, A. Boudhiba et D. Chevallier dir., Tunis, 1982 ; The Islamic City, A. H. Hourani et S. M. Stern éd., Oxford, 1970 ; Les Villes dans l’empire ottoman : activités et sociétés, D. Panzac dir., Paris, 1991 ; A. Raymond, La ville arabe, Alep, à l’époque ottomane (xvie-xviiie siècles), Damas, 1998 ; The City in the Islamic World, S. K. Jayyusi et al. dir., Leyde, 2008, etc.
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[6]
Pour la question des similarités structurelles entre les villes et les villages au Moyen-Orient, voir, par exemple, Middle Eastern Cities, I. M. Lapidus dir., Berkeley/Los Angeles, 1969 ; M. Massoud, Espace habité et développement rural en Iran, Thèse de 3e cycle en urbanisme, Aix-Marseille, 1986.
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[7]
États, sociétés et cultures du monde musulman médiéval, xe-xve siècle, J.-C. Garcin et al. dir., vol 2, Paris, 2000, p. 129.
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[8]
Al-‘Ulyâ dans Wâdî Banî Kharûs, al-Qâbil et al-Zhâhir à Biddyya (M. H. Custers, Al-Ibâdiyya : a Bibliography, Maastricht, vol. 1, 2006, p. 207 et 360).
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[9]
« L’urbain est toujours plus dense, plus divers » (Dictionnaire de la géographie, op. cit., p. 949).
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[10]
Ibn Khaldun, Discours sur l’Histoire universelle, Paris, 1978, vol. 1, p. 73 et 85, vol. 2, p. 615 et 878.
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[11]
Voir, par exemple, le processus de la réunification du pays par l’Imâm Nâsir b. Murshid al-Ya‘rubî (Ibn Qaysar (xviie siècle), Sîrat al-Imâm Nâsir b. Murshid, Londres, 2002).
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[12]
S. Al-Azkawi (xviiie siècle), Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas min kitâb kashf al-ghumma aljâmi‘ li-akhbâr al-umma, Mascate, 2005, p. 98-100, 128, 129, etc. ; Ibn Ruzayq (Humayd b. Muhammad, xixe siècle), Al-fath al-mubîn fî sîrat al-sâdat al-bûsa‘îdiyyîn, Mascate, 1984, p. 229, 263, 337, etc. ; Ibn Qaysar, Sîrat al-Imâm Nâsir…, op. cit. ; ‘I. Al-Harithi (m. 1946), Khulâsat al-wasâ’il bi-tartîb al-masâ’il, Mascate, vol. 3, 2006, p. 417-418, 438-439.
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[13]
Al-munjid fî-l-lugha wa-l-i‘lâm, Beyrouth, 1986, p. 47 et 626.
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[14]
Les principales notions de l’urbanisme arabo-musulman sont dorénavant bien présentées pour les non-arabisants dans l’ouvrage de C. Topalov et al., L’Aventure des mots de la ville à travers le temps, les langues, les sociétés, Paris, 2010 (pour l’‘umrân en tant que zone construite et habitée, voir p. 414). Voir aussi B. Johansen, « Urban structures in the view of Muslim jurists. The case of Damascus in the early Nineteenth century », Revue des Mondes Musulmans et de la Méditerranée (REMMM), 55-56 (1987), p. 94-100.
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[15]
De la jurisprudence musulmane résulta une image négative de la ville musulmane forgée par des orientalistes, tel Jean Sauvaget dans les années Trente, il faut attendre près d’un demi-siècle pour qu’elle soit considérée comme un système urbain original qui mérite d’être étudié (A. Raymond, « Ville musulmane, ville arabe : mythes orientalistes et recherches récentes », dans id., La Ville arabe, Alep…, op. cit., p. 29 et 38).
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[16]
Mu‘jam mustalahât al-ibâdiyya, I. Bahhâz, ‘A. Al-Salimi dir., Mascate, vol. 1, 2008, p. 237.
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[17]
J. C. Wilkinson, The Imamate Tradition of Oman, op. cit., p. 222-224 ; S. Al-Azkawi, Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas…, op. cit., p. 114-152 ; C. Le Cour Grandmaison, « Spatial organization, tribal groupings and kinship in Ibra », JOS, 3/2 (1977), p. 95-106 ; Interview à Mascate, 14.03.2010.
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[18]
Interviews à el-Hamrâ’ et Adam (2010) ; Nizwâ ‘abr al-ta’rîkh, Mascate, 2001, p. 92.
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[19]
S. Al-Azkawi, Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas…, op. cit., p. 107.
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[20]
‘A. Al-Bisyâni, Kitâb mukhtasar al-Bisyawî, Londres, 2007, p. 288 et 291-292 ; Acte de vente d’une maison du quartier al-Fîqayn du village Manah, 8 sha‘bân 1265/29 juin 1849 (collection privée de Sayf b. Khalfân b. Khalîfa al-Bûsa‘îdî, al-Fîqayn, Manah).
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[21]
Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, P. Bonte et M. Izard dir., Paris, 2007, p. 235.
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[22]
L’Espace social de la ville arabe…, op. cit., p. 11 ; A. Miquel, La Géographie humaine du monde musulman jusqu’au milieu du xie siècle, Paris, vol. 4, 1988, p. 201-228 ; États, sociétés et cultures…, op. cit., vol. 2, p. 129 ; G. Baer, « The City », dans Readings in Arab Middle Eastern Societies and Cultures, A. Lutfiyya et C. Churchill éd., Paris/La Hague, 1970, p. 635-636.
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[23]
S. Bandyopadhyay, Manah, an Omani Oasis…, op. cit., p. 129-158 ; visites à al-Hamrâ’ 31.12.2009, à al-Fîqayn 20.03.2010.
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[24]
C’est-à-dire tenant compte des particularités « climatiques » d’Oman et de l’austérité spécifique aux ibadites.
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[25]
‘I. Al-Harithi, Khulâsat al-wasâ’il…, op. cit., p. 397.
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[26]
Ibid., p. 398.
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[27]
Interview à al-Hamra, 31.12.2009. « Règles pour les chemins et les rues », dans A. Al-Kindi, Al-Musannaf, Mascate, vol. 17, 1983, p. 138-146.
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[28]
Nizwâ ‘abr al-ta’rîkh, p. 93-95.
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[29]
Mu‘jam mustalahât al-ibâdiyya, op. cit., p. 113, 464.
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[30]
S. Al-Azkawi, Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas…, op. cit., p. 106.
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[31]
À l’origine de la bibliothèque publique actuelle d’Al-Hamrâ’ était un waqf établi par les notables de la tribu al-‘Abriyyin au xviie siècle spécialement pour l’achat des livres (Interview à al-Hamra, 31.12.2009).
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[32]
J. C. Wilkinson, Water and Tribal Settlement in South-East Arabia : the Study of the Aflâj in Oman, Oxford, 1977.
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[33]
Interview et visite à al-Hamrâ’, 31.12.2010. Cf. l’exemple tunisien dans R. Brunschvig, « Urbanisme médiéval… », art. cité.
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[34]
En témoignent les testaments comme ceux des xixe et xxe siècles provenant de la collection privée de Sultân b. Sayf b. Qaswar al-‘Abrî (al-Hamrâ’). Certains ont été traités dans O. Andriyanova, « Some observations on women in Omani sources », PSAS, 41 (2011), p. 1-12.
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[35]
Testament avec waqfiyya (collection Sultân b. Sayf b. Qaswar al-‘Abrî, al-Hamrâ’).
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[36]
Testaments de Sâlima bint Hamad al-‘Abriyya, 21 shawwal 1306 ; Nakîda bint ‘Abûd al-‘Abriyya, n.d. (collection Sultân b. Sayf b. Qaswar al-‘Abrî, al-Hamrâ’).
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[37]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân li kull al-azmân, Mascate, 1987-1990, vol. 2, n° 1052 ; A. S. G. Jayakar, Omani proverbs (première publication – Journal of the Bombay Branch of the Royal Asiatic Society, 21 (1900-1903)), Cambridge/New York, 1987, n° 214.
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[38]
Cf. Dictionnaire de la géographie, op. cit., p. 701.
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[39]
Trois recueils de proverbes seront utilisés : deux sont anciens, effectués par les représentants Européens à la fin du xixe siècle (Reinhardt, Jayakar) et un recueil très complet est contemporain (Al-Humaydi).
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[40]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 3, n° 2145 et 2192.
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[41]
‘A. Al-Salimi, Jawhar al-nizâm fî ‘ilmay al-adyân wa-l-ahkâm, Seeb, vol. 1, 2006, p. 120.
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[42]
Chez les bédouins, le cercle des voisins se définit par la visibilité et la disponibilité du feu d’un camp voisin. Voir Al-Salimi, Jawhar al-nizâm…, op. cit., vol. 4, p. 319-320.
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[43]
Ibid., p. 320.
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[44]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 1, n° 187 ; vol. 3, n° 2163 ; Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 298.
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[45]
Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 21 ; Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 2, n° 730.
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[46]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 3, n° 2214 ; voir aussi Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 51, 239.
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[47]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 1, n° 245 ; vol. 2, n° 1031 ; vol. 3, n° 1488 ; Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 72.
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[48]
Ibid., n° 56. Aussi Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 3, n° 2128 et 2188.
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[49]
Ibid., n° 1467 ; Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 96.
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[50]
P. et G. Bonnenfant et S. Al-Harithi, « Architecture and Social History at Mudayrib », JOS, 3/2 (1977), p. 107-136 ; C. Le Cour Grandmaison, « Spatial Organization… », art. cité ; id, « L’eau du vendredi : Droits d’eau et hiérarchie sociale en Sharqîya (Sultanat d‘Oman) », Études rurales, 93/94 (1984), p. 7-42.
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[51]
Inscription de Khamîs b. Abî Nabhân al-Kharûsî, 1242/1827.
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[52]
Visite à Ibrâ, 23.02.2010. Les inscriptions et les recherches sur l’histoire de la famille al-Tawqî sont publiées, dans M. Al-‘Aysarî, Al-bayt al-‘ûd : shumûkh al-‘imârat wa sutûr al-dhâkira, s. l., 2009.
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[53]
M. Segaud, Anthropologie de l’espace…, op. cit., p. 95.
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[54]
Tableau dressé à partir des données recueillies au début du xxe siècle par les Britanniques et présentées dans J. C. Lorimer, Gazetteer of the Persian Gulf, Oman and Central Arabia, Calcutta, 1908-1915 (édition fac-similé, Oxford, 2003). Il s’agit de la première tentative d’établir des statistiques, même très approximatives, concernant l’Oman et la région du golfe Persique.
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[55]
À la même époque, la population de Mascate (capitale) est estimée à 10 000 personnes, et celle de Matrah (principal pôle économique) à 14 000 (J. C. Lorimer, Gazetteer…, op. cit., Oxford, vol. 6, 2003, p. 1185, 1200).
1Cette étude porte sur l’espace bâti et son territoire adjacent dans les oasis de l’intérieur d’Oman où l’on peut encore voir les vestiges des quartiers anciens abandonnés à partir des années 1970. Il s’agit essentiellement des localités d’al-Rustâq, Sitâl, al-Hamrâ’, Nizwâ, Adam, Manah, Ibrâ, et al-Mudhayrib, situées dans les piémonts des montagnes al-Hajar et les régions adjacentes. Les oasis de Nizwâ et d’al-Rustâq sont les anciennes capitales omanaises et les centres intellectuels et religieux. Ibrâ et al-Mudhayrib peuvent se vanter de leurs grandes familles commerçantes, les autres (al-Hamrâ’, Manah) sont fameuses pour leurs exploitations agricoles. Le choix des lieux est tout à fait arbitraire et s’explique par les sources écrites et les témoignages oraux à notre disposition.
2Malgré les changements politiques [1], la vie sociale et l’économie de l’intérieur du pays, fondée sur une agriculture de subsistance et le commerce maritime, n’ont pas subi de changements radicaux avant l’avènement du pétrole et du sultan Qabous, qui amorce la « Renaissance omanaise ». Cette invariabilité relative de la situation socio-économique dans le cœur de l’Oman historique permet de mener une enquête sur la longue durée. Notre corpus se constitue de chroniques historiques, de recueils de proverbes et de sources juridiques (traités juridiques et documents manuscrits de natures diverses, i. e. actes d’achat / vente ou de waqf, legs pieux, testaments). Nous utilisons aussi les travaux d’archéologues, d’anthropologues et d’ethnologues : relevés effectués sur certains espaces [2] ; enquêtes menées dans la société contemporaine [3] ; photos-satellites (Google Earth) ; et enfin « nos » données, recueillies dans le cadre de séjours de terrain.
3Le croisement de ces sources permet d’étudier la constitution de l’espace habité en Oman (carte ci-après), d’aborder son fonctionnement, en démontrant le lien entre structure des lieux et cadre socio-économique et religieux, ainsi que de débusquer les traces (assez rares) évoquant la perception locale de ces espaces et l’identification de la personne par rapport à son habitat.
Le concept d’al-‘umrân et la constitution de l’espace habité en Oman
4Aborder le fait d’habiter dans le contexte omanais permet de se rendre compte que la matière omanaise est bien particulière et qu’elle s’insère mal dans les analyses contemporaines avec leurs dichotomies villes / campagnes, urbain / rural – ou encore avec le nouveau paradigme urbain / péri-urbain / extra-urbain [4] – que dans le fil de l’historiographie abondante consacrée à la ville arabo-musulmane, surtout aux grandes villes telles que Damas, Alep ou Le Caire [5].
Carte de la partie Nord du Sultanat d’Oman avec les lieux mentionnés soulignés, d’après la carte du JOS, 6/2, 1983
Carte de la partie Nord du Sultanat d’Oman avec les lieux mentionnés soulignés, d’après la carte du JOS, 6/2, 1983
5En Oman, des agglomérations oasiennes peuvent avoir un nombre d’habitants considérable, mais rester, du fait de leur économie et de leur mode de vie, de grands villages, autrement dit des espaces ruraux [6]. Il est difficile de différencier ville et village puisque lesdits « signes urbains » [7] comme l’agriculture et l’élevage de subsistance sont présents dans les deux cas. Les « villes » ne se distinguent des « villages » que par l’ampleur de certains phénomènes tels que l’importance du marché, de la citadelle ou de la représentation du pouvoir central. Quant au niveau du développement du savoir, notamment religieux, l’Oman peut se vanter de posséder des villages qui sont devenus de vrais pôles intellectuels grâce à l’activité des ulémas y résidant [8]. Par ailleurs, à considérer des paramètres tels que la densité [9], la nécessité de rester près des aflâj (canaux acheminant l’eau) tout autant que les considérations de sécurité, ont contribué à maintenir la population bien compacte.
6L’étude de la terminologie utilisée dans les sources locales ne résout guère le problème de la classification des lieux habités. Il est néanmoins intéressant de relever que nous ne trouvons pas le terme de madîna (ville, cité, polis) utilisé par Ibn Khaldûn pour parler de la civilisation citadine [10]. Mascate, la ville la plus peuplée d’Oman, est fréquemment désignée par le mot persan bandar (port). Les chefs-lieux sont le plus souvent nommés par leur toponyme ou par leur toponyme couplé avec le mot husn (forteresse). L’importance de chaque localité pour le contrôle du territoire adjacent se mesure à la place qui lui est attribuée dans les sources narratives relatant l’histoire du processus de l’affirmation du pouvoir par chaque dirigeant [11]. Pour ces mêmes chefs-lieux et les autres localités, les mots balad / balda (ville, village) et qarya (village) sont employés de façon interchangeable. Les habitants du lieu sont communément désignés comme ahl al-balad (les gens du village) [12]. Si le terme balad paraît assez neutre et porte en soi la notion de vivre, de résider, le mot qarya a plus de rapport avec la vie sociale et signifie étymologiquement un lieu où les gens se rassemblent, un lieu d’hospitalité [13]. Cette absence de catégorisation corrèle parfaitement avec l’approche employée par les juristes musulmans. La jurisprudence musulmane (fiqh), y compris le fiqh ibadite, réunit l’espace bâti des villes et les villages, dans la seule catégorie d’al-‘umrân, en proposant des règles unifiées pour gérer les zones construites et habitées [14] par les populations sédentaires (fiqh al-‘umrân ou al-fiqh al-hadarî) [15].
7En effet, quand nous regardons de près les espaces habités dans les oasis de l’intérieur d’Oman, nous ne voyons pas de différences majeures dans la manière d’habiter le lieu. Un quartier (hâra, hilla ou encore hujra) souvent pourvu d’un fort ou, au moins, de tours de garde, constitue l’élément de base. C’est un groupe de maisons entouré par des murs et pourvu d’une ou plusieurs portes en fonction de sa taille [16]. Il peut être mono- ou pluritribal. Le quartier correspond parfaitement aux nécessités de la société omanaise qui est tribale, musulmane (le plus souvent ibadite, pour les lieux pris comme exemple) et hiérarchisée. Les petites oasis peuvent contenir un seul quartier, tandis que les grandes, souvent beaucoup moins homogènes du point de vue de l’affiliation tribale de leur population, sont constituées de plusieurs quartiers divisés par les cours de wâdî-s (oueds) ou par les plantations de palmier-dattiers. Souvent la division purement géographique des oasis en deux parties – al-‘Alâya (partie haute) et al-Sufâla (partie basse) en fonction de leur position par rapport au cours du wâdî – correspond aussi à la division des tribus omanaises en deux coalitions (al-Hinâwiyya et al-Ghâfiriyya) formées au moment de la guerre civile dans la première moitié du xviiie siècle et compliquant la division déjà existante en Yéménites et Nizârites [17]. Telle est la situation des oasis d’Ibrâ ou d’Izkî (tableau en annexe).
8Beaucoup de familles ont deux maisons en fonction de la saison – l’une dans le quartier résidentiel et l’autre, servant de résidence d’été, dans une plantation de palmiers-dattiers (mâl) ou dans une ferme (‘âbiya), où l’air est plus frais [18]. Pour la même raison, le toit de la maison peut être utilisé en tant que chambre à coucher [19]. Les matériaux de construction sont les briques en terre, le juss, une sorte du ciment local renforcé, les matériaux dérivés des palmiers (troncs pour les poutres, nattes de branchages pour les planchers), du joli bois pour les portes et les fenêtres. Il est à noter qu’au moment de la vente d’une maison, suivant la règle du fiqh selon laquelle la propriété vendue doit être connue, tous ces éléments structurels sont nommés dans l’acte de vente : la maison est vendue « avec toutes ses limites et chemins, avec tous ses murs et cloisons, portes, toutes ses poutres, poutrelles et nattes » [20].
9Après cet inventaire rapide des lieux habités depuis le niveau le plus haut, celui d’une ville ou d’un village, jusqu’aux parties constituantes du logement, nous souhaitons analyser le fonctionnement de ces lieux dans le contexte religieux, socio-économique et politique.
Le fonctionnement des espaces habités
10Toute société imprime sa marque sur son espace et, inversement, l’organisation de l’espace apparaît comme un mode de manifestation ou d’expression de la société [21]. Selon les analyses classiques, la ville arabo-musulmane est caractérisée par la présence de quatre espaces : 1) l’espace modelé par la structure de la société arabe ; 2) l’espace commandé par l’Islam ; 3) l’espace aménagé pour les fonctions économiques – surtout le sûq (marché) et les industries ; 4) la forteresse, espace du pouvoir et intermédiaire entre la société et le pouvoir [22]. En Oman, la vie d’une localité est structurée par ces quatre pôles.
11Habiter en Oman signifie tout d’abord partager la vie d’une communauté tissée, d’un côté, par les liens de parenté (famille, clan, tribu) de l’autre, par les liens spatiaux (voisins, quartier, village / ville, région). Souvent les habitants des maisons voisines sont membres du même clan [23]. Les règles de voisinage, inscrites dans le fiqh (ibadite et omanais), visent à prémunir les habitants de toute nuisance (madârr) [24]. Ainsi est-il indiqué qu’il ne convient pas de rehausser sa maison d’un étage, puisque cela peut nuire à la ventilation de la maison voisine [25]. Il faut veiller également à la manière d’habiter sa maison : seuls les bruits gênants dus à l’exercice d’un métier sont admissibles, mais en dehors des heures de repos [26] ; il faut s’occuper de son jardin ou de sa plantation, car l’espace public limitrophe ne doit pas être encombré, notamment la partie de la rue adjacente [27]. L’hospitalité – concept-clé pour comprendre la vie en Oman – fonde le lien social et commande l’habitat : généralement, la maison (bayt, de bâta – passer la nuit) comporte un majlis (salon où les étrangers peuvent être accueillis et, si nécessaire, dormir) et des ghuraf (sg. ghurfa, chambre) ou un sakan (logement) dont le droit d’accès est restreint aux membres de la famille [28].
12Chaque quartier est doté d’un nombre de bâtiments d’utilité publique. Un bâtiment spacieux bien bâti, la sabla sert de lieu de rassemblement dans lequel sont prises les décisions concernant la communauté. S’il s’agit d’une grande oasis pourvue d’un fort et d’un représentant du pouvoir central (wâlî – gouverneur), c’est la barza, la plus grande salle du fort, qui rassemble le wâlî, le qâdî (juge) et les cheikhs des tribus pour exercer le pouvoir et la justice [29]. La mosquée et ses dépendances sont les autres lieux-pivots de la vie de la communauté : en dehors des heures de prière, la mosquée sert de lieu de repos (on peut même y dormir [30]), de discussion, d’enseignement et d’études. Les premières bibliothèques accessibles au public en Oman étaient celles des mosquées et des maisons des ulémas [31].
13Dans les oasis de l’intérieur d’Oman, l’espace habité est organisé autour du falaj [32], plus précisément autour de la partie aérienne de cet aqueduc. Les mosquées, pour des raisons rituelles, et les forts, pour des considérations de sécurité, ont des accès directs à l’eau. Les maisons des notables locaux peuvent aussi avoir des accès privatifs aux sources d’eau (partie du canal et puits). Pour les autres habitants, des bains publics sont organisés. Ce n’est qu’après avoir desservi les lieux de culte et d’habitation que l’eau est dirigée vers les champs et les plantations. Les oasis telles qu’al-Hamrâ’, fondée au milieu du xviie siècle pour jouer le rôle de chef-lieu de la tribu al-‘Abriyyîn, sont bâties et organisées de façon plus régulière : le quartier est plus homogène, les rues principales sont larges, l’espace mieux distribué, les maisons orientées de façon à ce qu’elles soient mieux éclairées et ventilées, mais sans pourtant contredire le principe de la protection de la vie familiale des regards extérieurs (portes sans vis-à-vis, fenêtres petites et grillagées (mashrabiyya) [33].
14En place d’une autorité municipale à l’européenne, l’autogestion est pratiquée. La distribution de l’eau du falaj et le respect des droits des propriétaires des parts d’eau sont gérés par le wakîl al-falaj qui reçoit pour salaire une part d’eau. Le système du waqf, ou donation pieuse, permet de financer les œuvres de charité, l’entretien des mosquées, des rues et des édifices publics, l’enseignement dans les écoles coraniques. Si les femmes ne sont pas présentes dans l’espace public, leur rôle dans la charité et dans l’entretien du quartier est néanmoins essentiel [34], les donations constituent la forme matérielle et visible à tous de la piété personnelle de femmes qui ne sortent pas du cercle étroit de la famille et des proches.
15Les grandes oasis possèdent un ou plusieurs marchés (sûq-s) avec des boutiques dotées de portes et de galeries recouvertes de branches de palmiers. Les espaces liés à la vie économique de l’oasis mordent parfois sur l’espace privé au nom de l’utilité publique : en 1900, un homme du village Misfât al-‘Abriyyîn dans la région d’al-Hamrâ’ a légué une partie de sa maison pour les besoins des producteurs et des consommateurs de vinaigre et pour le stockage des récipients [35]. Enfin, le cimetière est un élément structurel des espaces habités en Oman. Situé à l’écart des quartiers résidentiels, il peut être doté de ses propres petites mosquées auxquelles on accède par des chemins, partie intégrante de l’espace public, qui sont souvent entretenus avec l’argent provenant des donations pieuses. L’enterrement des pauvres du village est également effectué avec l’argent du waqf [36].
16Le quartier (ou le village) en Oman constitue un système unifié, un tout autonome et autogéré : le bâti, les habitants, l’économie et les pratiques religieuses sont liés. Une personne est identifiée non seulement par le nom de sa tribu, mais aussi par celui de son village ou quartier. Certes, le système a des défauts (ce qu’atteste la sagesse populaire [37]), mais c’est cette structure solidaire qui permet à la communauté de survivre dans les conditions d’une économie de subsistance et d’une situation politique complexe.
Les perceptions locales
17Analyser les représentations du monde et les perceptions de l’espace chez les habitants de l’Oman pré-contemporain est une chose difficile [38]. Seuls les principes et les règles fixés dans les traités juridiques, confrontés à l’expérience sociale exprimée par les proverbes et aux données recueillies sur le terrain, nous permettent d’en donner un aperçu [39].
18L’attachement des Omanais à leur patrie (watan, dâr) est très fort et « celui qui est parti de sa patrie est peu apprécié » [40]. Selon les juristes, la patrie de l’homme est le lieu où il habite, où son âme trouve la paix. On ne peut la quitter sans raison importante. Le nomadisme, qu’il soit mode de vie ou métier, est pris en compte : la patrie, pour le bédouin, ce sont les perches de sa tente ; pour le pasteur, ses moutons au milieu du désert ; pour le gouverneur, le lieu de son service ; pour le soldat, la terre où il porte ses armes ; pour le marin enfin, le bateau [41].
19Les relations de voisinage ont une importance primordiale : il est obligatoire de les entretenir de la même façon que celles de la parenté. Dans les espaces bâtis, le voisinage est constitué des quarante maisons les plus proches [42]. On peut donc parler d’une construction sociale de l’espace, qui est limité tant par des frontières physiques (murs, quartiers) que des frontières sociales. Habiter au milieu des voisins signifie suivre un certain nombre de règles :
« Si tu as acheté de la nourriture rare, cache-la ; si tu l’as montrée, il faut la partager […] On ne peut pas fermer la maison aux parents ou aux voisins […] Celui qui aide et protège son voisin est lui-même protégé et aidé par le Créateur […] Il vaut mieux partir en mer que d’avoir un mauvais voisin […] » [43].
21La sagesse populaire des proverbes va dans le même sens. Faire partie d’une communauté, avoir une vie stable, être entouré par des proches est perçu comme un signe de réussite sociale [44]. L’hospitalité est la règle (« Soit tu ouvres ta porte et fais du bien aux autres, soit tu la fermes et deviens inconnu », « L’invité avant l’épée » [45]), mais les visiteurs de leur côté doivent connaître ses limites, savoir la rendre (« Celui qui rend les visites trop souvent finit par être négligé par son voisin » [46]) et ne pas menacer l’espace privé (« On entre dans la maison par sa porte » ; « Celui qui pense partir ne monte pas dans les chambres ») [47]. Les proverbes préviennent aussi contre les mauvaises actions envers les voisins : « Celui qui est content [des malheurs] du voisin, aura sa maison en ruines » [48].
22La liaison commerciale d’Oman avec Zanzibar a apporté la prospérité économique à une partie de la population. « Celui qui revient de Zanzibar, revient très fort » (riche et en bonne santé), dit la sagesse populaire. Il est alors conseillé d’investir l’argent pour l’embellissement de la demeure familiale [49]. Plusieurs villages notamment dans la région d’al-Sharqiyya, sujette à des sécheresses poussant la population vers le commerce maritime, conservent les traces matérielles des richesses investies. Tels sont al-Manzafa, quartier d’Ibrâ joliment bâti au xviie siècle, ou encore le village de Mudhayrib qui compte d’immenses maisons de la tribu al-Hirth construites à la fin du xixe siècle ressemblant à des forteresses aux portes joliment sculptées [50].
23Il faut encore soulever la question de l’espace habité en tant que lieu de mémoire et étudier son lien avec la tradition écrite. Pour les époques éloignées, l’établissement du lien entre mémoire et habitat est malaisé, mais la tradition écrite nous a laissé quelques traces « analysables ». Ainsi, aux alentours du village de Sitâl dans le Wâdî Banî Kharûs sur les murs rocheux du wâdî, nous trouvons quelques inscriptions : certaines ne sont que de simples graffitis, parfois datés, qui conservent les noms de leurs auteurs [51] ; d’autres témoignent d’un conflit entre les deux tribus habitant dans le wâdî (Banî Kharûs et Banî Bahrî) en 1235 / 1819, d’une forte pluie qui s’est abattue sur le village en 1383 / 1963, etc. Un autre exemple étonnant nous est donné par une maison sise à Ibrâ, connue comme la « grande maison » (al-Bayt al-‘Ûd) d’un marchand enrichi par le commerce avec Zanzibar, Mas‘ûd b. Humayd al-Tawqî (al-Hirth), qui l’aurait construite à la fin du xixe siècle. Les murs à l’étage sont couverts d’inscriptions faites par les générations successives témoignant des naissances, des décès, des voyages à Zanzibar [52].
24Cette volonté de marquer le lieu, d’immortaliser un événement sur un support durable ne peut être expliquée que par le sentiment de l’indivisibilité entre l’habitant et son habitat, à l’échelle de la maison ou à l’échelle plus grande qui inclut le paysage environnant. En reformulant la définition de Marion Segaud, l’on peut dire que, à l’intérieur d’Oman, laisser des inscriptions liant pour toujours l’histoire de la communauté et de la famille avec l’espace habité constitue justement une des pratiques par l’intermédiaire desquelles on s’approprie un espace, en établissant « une relation entre cet espace et soi » [53].
25Pour tenter de répondre à la question « qu’est-ce qu’habiter un espace en Oman ? », nous avons fait le choix de ne pas nous arrêter sur une localité donnée, mais de dresser un tableau générique, en décrivant des pratiques attestées pour la majorité des villages ou des villes et théorisées dans les sources juridiques ibadites. Le croisement des données nous a permis de parcourir rapidement les modalités et les perceptions du fait d’habiter. Habiter un espace à l’intérieur d’Oman, c’est s’approprier ce lieu, assurer son approvisionnement en eau, le bâtir ou le rénover, établir ses limites et organiser sa défense et le bon fonctionnement socioculturel et économique de la communauté, en tenant compte du paysage et des ressources naturelles. C’est aussi relier ce lieu à la mémoire de la famille et à la mémoire collective, en l’inscrivant dans le folklore ou en y laissant des traces écrites. Habiter un lieu, c’est enfin ressentir comme sa patrie (dâr, watan) indépendamment des vicissitudes de la vie.
Notes
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[*]
Prépare une thèse à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne intitulée État, pouvoir et société en Arabie de l’Est aux xviie-xixe siècles : une tentative d’histoire sociopolitique sous la direction de Nadine Picaudou et Pierre Vermeren, en cotutelle avec l’Université d’État de Saint-Pétersbourg.
-
[1]
Entre 1624 et 1744, l’Oman est gouverné par les Imâms al-Ya‘âriba. L’imâm est le chef politico-religieux de l’Imamat, modèle étatique prôné par l’ibadisme, courant de l’islam et l’école de droit majoritaire en Oman. Depuis 1749, la dynastie des Âl Bû Sa‘îd est au pouvoir. Seuls les deux premiers dirigeants des Âl Bû Sa‘îd portent le titre d’Imâm, leurs successeurs ne prétendant pas à l’autorité religieuse. Entre 1920 et 1955, deux États coexistent en Oman : le Sultanat contrôle la côte et l’Imamat l’intérieur (J. C. Wilkinson, The Imamate Tradition of Oman, Cambridge, 1987).
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[2]
S. S. Damluji, The Architecture of Oman, Reading, 1998 ; S. Bandyopadhyay, Manah, an Omani Oasis, an Arabian Legacy : Architecture and Social History of an Omani Settlement, Liverpool, 2011 ; Oases Settlements in Oman, A. Gangler dir., Stuttgart, 2008 ; P. Costa, « Notes on settlement patterns in traditional Oman », Journal of Oman Studies (JOS), 6/2 (1983), p. 239-246 ; B. Merschen, « Settlement space and architecture in South-Arabian Oases – ethno-archaeological investigations in recently abandoned settlement quarters in inner Oman », Proceedings of the Seminar for Arabian Studies (PSAS), 28 (1998), p. 201-214.
-
[3]
C. Eickelman, Women and Community in Oman, New York, 1984.
-
[4]
W. G. Flanagan, Contemporary Urban Sociology, Cambridge, 1993 ; P. C. W. Gutkind, Urban Anthropology, 1974 ; M. Segaud, Anthropologie de l’espace : habiter, fonder, distribuer, transformer, Paris, 2010 ; F. Paul-Levy et M. Segaud, Anthropologie de l’espace, Paris, 1983 ; J. Rémy, Sociologie urbaine et rurale : l’espace et l’agir, Paris, 1998 ; F. Choay, Pour une anthropologie de l’espace, Paris, 2006 ; Dictionnaire de la géographie, J. Levy et M. Lussault dir., Paris, 2003.
-
[5]
J. Abu Lughod, « The Islamic City : Historic Myth, Islamic essence, and contemporary relevance », International Journal of Middle East Studies, 19 (1987), p. 155-176 ; R. Brunschvig, « Urbanisme médiéval et droit musulman », Revue des études islamiques, 15 (1947), p. 127-155 ; L’Espace social de la ville arabe, D. Chevallier dir., Paris, 1979 ; La Ville arabe dans l’islam, A. Boudhiba et D. Chevallier dir., Tunis, 1982 ; The Islamic City, A. H. Hourani et S. M. Stern éd., Oxford, 1970 ; Les Villes dans l’empire ottoman : activités et sociétés, D. Panzac dir., Paris, 1991 ; A. Raymond, La ville arabe, Alep, à l’époque ottomane (xvie-xviiie siècles), Damas, 1998 ; The City in the Islamic World, S. K. Jayyusi et al. dir., Leyde, 2008, etc.
-
[6]
Pour la question des similarités structurelles entre les villes et les villages au Moyen-Orient, voir, par exemple, Middle Eastern Cities, I. M. Lapidus dir., Berkeley/Los Angeles, 1969 ; M. Massoud, Espace habité et développement rural en Iran, Thèse de 3e cycle en urbanisme, Aix-Marseille, 1986.
-
[7]
États, sociétés et cultures du monde musulman médiéval, xe-xve siècle, J.-C. Garcin et al. dir., vol 2, Paris, 2000, p. 129.
-
[8]
Al-‘Ulyâ dans Wâdî Banî Kharûs, al-Qâbil et al-Zhâhir à Biddyya (M. H. Custers, Al-Ibâdiyya : a Bibliography, Maastricht, vol. 1, 2006, p. 207 et 360).
-
[9]
« L’urbain est toujours plus dense, plus divers » (Dictionnaire de la géographie, op. cit., p. 949).
-
[10]
Ibn Khaldun, Discours sur l’Histoire universelle, Paris, 1978, vol. 1, p. 73 et 85, vol. 2, p. 615 et 878.
-
[11]
Voir, par exemple, le processus de la réunification du pays par l’Imâm Nâsir b. Murshid al-Ya‘rubî (Ibn Qaysar (xviie siècle), Sîrat al-Imâm Nâsir b. Murshid, Londres, 2002).
-
[12]
S. Al-Azkawi (xviiie siècle), Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas min kitâb kashf al-ghumma aljâmi‘ li-akhbâr al-umma, Mascate, 2005, p. 98-100, 128, 129, etc. ; Ibn Ruzayq (Humayd b. Muhammad, xixe siècle), Al-fath al-mubîn fî sîrat al-sâdat al-bûsa‘îdiyyîn, Mascate, 1984, p. 229, 263, 337, etc. ; Ibn Qaysar, Sîrat al-Imâm Nâsir…, op. cit. ; ‘I. Al-Harithi (m. 1946), Khulâsat al-wasâ’il bi-tartîb al-masâ’il, Mascate, vol. 3, 2006, p. 417-418, 438-439.
-
[13]
Al-munjid fî-l-lugha wa-l-i‘lâm, Beyrouth, 1986, p. 47 et 626.
-
[14]
Les principales notions de l’urbanisme arabo-musulman sont dorénavant bien présentées pour les non-arabisants dans l’ouvrage de C. Topalov et al., L’Aventure des mots de la ville à travers le temps, les langues, les sociétés, Paris, 2010 (pour l’‘umrân en tant que zone construite et habitée, voir p. 414). Voir aussi B. Johansen, « Urban structures in the view of Muslim jurists. The case of Damascus in the early Nineteenth century », Revue des Mondes Musulmans et de la Méditerranée (REMMM), 55-56 (1987), p. 94-100.
-
[15]
De la jurisprudence musulmane résulta une image négative de la ville musulmane forgée par des orientalistes, tel Jean Sauvaget dans les années Trente, il faut attendre près d’un demi-siècle pour qu’elle soit considérée comme un système urbain original qui mérite d’être étudié (A. Raymond, « Ville musulmane, ville arabe : mythes orientalistes et recherches récentes », dans id., La Ville arabe, Alep…, op. cit., p. 29 et 38).
-
[16]
Mu‘jam mustalahât al-ibâdiyya, I. Bahhâz, ‘A. Al-Salimi dir., Mascate, vol. 1, 2008, p. 237.
-
[17]
J. C. Wilkinson, The Imamate Tradition of Oman, op. cit., p. 222-224 ; S. Al-Azkawi, Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas…, op. cit., p. 114-152 ; C. Le Cour Grandmaison, « Spatial organization, tribal groupings and kinship in Ibra », JOS, 3/2 (1977), p. 95-106 ; Interview à Mascate, 14.03.2010.
-
[18]
Interviews à el-Hamrâ’ et Adam (2010) ; Nizwâ ‘abr al-ta’rîkh, Mascate, 2001, p. 92.
-
[19]
S. Al-Azkawi, Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas…, op. cit., p. 107.
-
[20]
‘A. Al-Bisyâni, Kitâb mukhtasar al-Bisyawî, Londres, 2007, p. 288 et 291-292 ; Acte de vente d’une maison du quartier al-Fîqayn du village Manah, 8 sha‘bân 1265/29 juin 1849 (collection privée de Sayf b. Khalfân b. Khalîfa al-Bûsa‘îdî, al-Fîqayn, Manah).
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[21]
Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, P. Bonte et M. Izard dir., Paris, 2007, p. 235.
-
[22]
L’Espace social de la ville arabe…, op. cit., p. 11 ; A. Miquel, La Géographie humaine du monde musulman jusqu’au milieu du xie siècle, Paris, vol. 4, 1988, p. 201-228 ; États, sociétés et cultures…, op. cit., vol. 2, p. 129 ; G. Baer, « The City », dans Readings in Arab Middle Eastern Societies and Cultures, A. Lutfiyya et C. Churchill éd., Paris/La Hague, 1970, p. 635-636.
-
[23]
S. Bandyopadhyay, Manah, an Omani Oasis…, op. cit., p. 129-158 ; visites à al-Hamrâ’ 31.12.2009, à al-Fîqayn 20.03.2010.
-
[24]
C’est-à-dire tenant compte des particularités « climatiques » d’Oman et de l’austérité spécifique aux ibadites.
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[25]
‘I. Al-Harithi, Khulâsat al-wasâ’il…, op. cit., p. 397.
-
[26]
Ibid., p. 398.
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[27]
Interview à al-Hamra, 31.12.2009. « Règles pour les chemins et les rues », dans A. Al-Kindi, Al-Musannaf, Mascate, vol. 17, 1983, p. 138-146.
-
[28]
Nizwâ ‘abr al-ta’rîkh, p. 93-95.
-
[29]
Mu‘jam mustalahât al-ibâdiyya, op. cit., p. 113, 464.
-
[30]
S. Al-Azkawi, Ta’rîkh ‘Umân al-muqtabas…, op. cit., p. 106.
-
[31]
À l’origine de la bibliothèque publique actuelle d’Al-Hamrâ’ était un waqf établi par les notables de la tribu al-‘Abriyyin au xviie siècle spécialement pour l’achat des livres (Interview à al-Hamra, 31.12.2009).
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[32]
J. C. Wilkinson, Water and Tribal Settlement in South-East Arabia : the Study of the Aflâj in Oman, Oxford, 1977.
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[33]
Interview et visite à al-Hamrâ’, 31.12.2010. Cf. l’exemple tunisien dans R. Brunschvig, « Urbanisme médiéval… », art. cité.
-
[34]
En témoignent les testaments comme ceux des xixe et xxe siècles provenant de la collection privée de Sultân b. Sayf b. Qaswar al-‘Abrî (al-Hamrâ’). Certains ont été traités dans O. Andriyanova, « Some observations on women in Omani sources », PSAS, 41 (2011), p. 1-12.
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[35]
Testament avec waqfiyya (collection Sultân b. Sayf b. Qaswar al-‘Abrî, al-Hamrâ’).
-
[36]
Testaments de Sâlima bint Hamad al-‘Abriyya, 21 shawwal 1306 ; Nakîda bint ‘Abûd al-‘Abriyya, n.d. (collection Sultân b. Sayf b. Qaswar al-‘Abrî, al-Hamrâ’).
-
[37]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân li kull al-azmân, Mascate, 1987-1990, vol. 2, n° 1052 ; A. S. G. Jayakar, Omani proverbs (première publication – Journal of the Bombay Branch of the Royal Asiatic Society, 21 (1900-1903)), Cambridge/New York, 1987, n° 214.
-
[38]
Cf. Dictionnaire de la géographie, op. cit., p. 701.
-
[39]
Trois recueils de proverbes seront utilisés : deux sont anciens, effectués par les représentants Européens à la fin du xixe siècle (Reinhardt, Jayakar) et un recueil très complet est contemporain (Al-Humaydi).
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[40]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 3, n° 2145 et 2192.
-
[41]
‘A. Al-Salimi, Jawhar al-nizâm fî ‘ilmay al-adyân wa-l-ahkâm, Seeb, vol. 1, 2006, p. 120.
-
[42]
Chez les bédouins, le cercle des voisins se définit par la visibilité et la disponibilité du feu d’un camp voisin. Voir Al-Salimi, Jawhar al-nizâm…, op. cit., vol. 4, p. 319-320.
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[43]
Ibid., p. 320.
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[44]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 1, n° 187 ; vol. 3, n° 2163 ; Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 298.
-
[45]
Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 21 ; Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 2, n° 730.
-
[46]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 3, n° 2214 ; voir aussi Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 51, 239.
-
[47]
K. Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 1, n° 245 ; vol. 2, n° 1031 ; vol. 3, n° 1488 ; Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 72.
-
[48]
Ibid., n° 56. Aussi Al-Humaydi, Aqwâl ‘Umân…, op. cit., vol. 3, n° 2128 et 2188.
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[49]
Ibid., n° 1467 ; Jayakar, Omani proverbs, op. cit., n° 96.
-
[50]
P. et G. Bonnenfant et S. Al-Harithi, « Architecture and Social History at Mudayrib », JOS, 3/2 (1977), p. 107-136 ; C. Le Cour Grandmaison, « Spatial Organization… », art. cité ; id, « L’eau du vendredi : Droits d’eau et hiérarchie sociale en Sharqîya (Sultanat d‘Oman) », Études rurales, 93/94 (1984), p. 7-42.
-
[51]
Inscription de Khamîs b. Abî Nabhân al-Kharûsî, 1242/1827.
-
[52]
Visite à Ibrâ, 23.02.2010. Les inscriptions et les recherches sur l’histoire de la famille al-Tawqî sont publiées, dans M. Al-‘Aysarî, Al-bayt al-‘ûd : shumûkh al-‘imârat wa sutûr al-dhâkira, s. l., 2009.
-
[53]
M. Segaud, Anthropologie de l’espace…, op. cit., p. 95.
-
[54]
Tableau dressé à partir des données recueillies au début du xxe siècle par les Britanniques et présentées dans J. C. Lorimer, Gazetteer of the Persian Gulf, Oman and Central Arabia, Calcutta, 1908-1915 (édition fac-similé, Oxford, 2003). Il s’agit de la première tentative d’établir des statistiques, même très approximatives, concernant l’Oman et la région du golfe Persique.
-
[55]
À la même époque, la population de Mascate (capitale) est estimée à 10 000 personnes, et celle de Matrah (principal pôle économique) à 14 000 (J. C. Lorimer, Gazetteer…, op. cit., Oxford, vol. 6, 2003, p. 1185, 1200).