1Naomi Klein a déjà publié plusieurs ouvrages, dont La stratégie du choc, 2008, où elle dénonçait déjà la manipulation de la violence et des catastrophes par les groupes multinationaux. L’audience est considérable et polarise violemment débats et critiques. Cette journaliste est une militante mais bien d’autres choses aussi.
2Son livre surprend par sa densité. C’est une formidable leçon de courage et d’espoir. L’analyse des stratégies des grands groupes nous plonge dans la psychologie des conservateurs radicaux mais interpelle aussi nos immobilismes - qui ne sont parfois qu’apparents - comme ces forteresses de sable sur nos plages, qui ne résisteront pas à la marée montante. Car les forces de la vie réémergent déjà du chaos. Dénoncer, d’autres l’ont fait. Mais nous oublions sans cesse que deux degrés Celcius de plus signifient déjà des bouleversements écologiques considérables, des famines, des phénomènes météorologiques extrêmes - et surtout le malheur ajouté au malheur des plus pauvres. Et c’est le double ou le triple - ou l’inconnu -qui nous attend si nous ne faisons rien.
3« Tout peut changer » encore. Pour deux ans ? Au plus pour dix. Après, quoi qu’on fasse, il sera trop tard et les catastrophes engloutiront jusqu’à la démocratie. Comment et pourquoi ne pas désespérer ? Naomi Klein se réfère à la lutte obstinée et de plus en plus souvent victorieuse des Peuples Premiers comme les Indiens canadiens ou d’Amazonie auprès de qui elle a mené de longues enquêtes. Pouvonsnous le comprendre ? Oui si nous voyons les multinationales détruire méthodiquement nos racines, nos modes de vie et de penser. Retenons d’abord l’impérieuse nécessité - et la possibilité - de rompre avec « l’extractivisme » des énergies fossiles. Mais ce qui se joue avant tout est bien de « transformer complètement notre façon d’habiter la planète », retrouver les solidarités et la fraternité, réduire les inégalités, assurer un avenir à nos enfants, mais aussi à nousmêmes, tant les échéances sont imminentes. Nous pourrons alors « redonner du sens à nos vies ».
4Vaste programme qui se ramène néanmoins à des revendications essentielles laisser sous terre 80% des ressources fossiles, développer massivement les énergies renouvelables, et surtout, changer le modèle politique, « sociétal » et coopératif. Pour cela, il ne faut pas craindre de parler du bien et du mal, il ne faut pas renoncer à exprimer notre amour et notre indignation. Il s’agit de rejeter le discours pragmatique et calculateur de la rentabilité. Inaccessible étoile ? Non; lumière essentielle à la vie. La tâche est immense : libérer la Terre de l’esclavage où nous la tenons. Justement, nous avons aboli l’esclavage des hommes.
5C’est bien la preuve que tout est possible. Tout peut changer.