Notes
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[1]
Cité dans Solnon, 1987, p. 58 (la citation date de 1539).
-
[2]
Claude de Lorraine, premier duc de Guise, fut grand veneur à partir de 1526 ; son fils François reçut la même charge par lettres du 4 juin 1556, charge dont il se démit plus tard en faveur de son frère, le duc d’Aumale, tout en continuant à jouir des gages jusqu’à sa mort en 1563 (Sainte-Marie, 1733, t. viii, p. 731-732). Les grandes histoires de la chasse écrites au xixe siècle ne manquent jamais, à ce titre, de consacrer quelques pages aux Lorrains (Dunoyer de Noirmont, 1867, t. i, p. 168-169 ; La Ferrière, 1869, p. 8-12) ; Auguste de Chabot les comptait, lui, parmi les « célébrités de la vénerie française » (Chabot, 1891, p. 32).
-
[3]
Un gruyer était un officier chargé de veiller au respect des droits d’usage dans les forêts.
-
[4]
Bibliothèque nationale de France (désormais BnF), manuscrit français (désormais fr.) 20471, fol. 5.
-
[5]
Machiavel, 1513, chap. xiv.
-
[6]
Castiglione, 1538, fol. 30 v°.
-
[7]
Isambert, 1829, p. 507.
-
[8]
BnF, fr. 5802, fol. 57 v°.
-
[9]
Xénophon (1), chap. xii et Xénophon (2), i, 2, 10.
-
[10]
Salvadori, 1996, p. 20.
-
[11]
Kaminsky, 1993.
-
[12]
Pour une analyse convergente, bien que menée de façon différente, voir Rösener, 2000.
-
[13]
Brioist, 2002, p. 57-59.
-
[14]
Pastoureau, 2000.
-
[15]
Reynaud, 1983.
-
[16]
Salvadori, 1996, p. 80-81.
-
[17]
du Fouilloux, 1614, p. 18. La croissance des bois annuels du cerf commence vers la fin du mois de mars et se termine en juillet-août (voire en octobre, en fonction de l’âge de l’animal). Au rythme d’environ 1 cm par jour, l’essentiel de la ramure est donc déjà reconstitué à la mi-juin (Crigel, Balligand et Heinen, 2001, p. 27-29).
-
[18]
BnF, fr. 8181, fol. 160 v° et 180 r°.
-
[19]
BnF, fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20550, fol. 24 ; fr. 20513, fol. 23.
-
[20]
BnF, fr. 20541, fol. 39. Le grand cerf d’Effincourt était presque une figure locale puisque l’on retrouve mention de lui dans une lettre de François de La Chaussée datée de juin 1553 : « Votre dit gruyer me mena dimanche dernier aux boys d’Effincourt où il me monstra et de bien près le vieil cerf dudit Effincourt qui est le plus grand cerf et qui a la plus belle teste qui soit en tout ce pays cy » (BnF, fr. 20470, fol. 117).
-
[21]
du Fouilloux, 1614, p. 18.
-
[22]
BnF, fr. 8181, fol. 171 v° et 181 v°.
-
[23]
BnF, collection Clairambault (désormais Clair.) 346, fol. 255 ; fr. 20544, fol. 15.
-
[24]
BnF, fr. 20529, fol. 142.
-
[25]
Arch. Nat., N iii, Haute-Marne, n° 4 (Plan par terre du château de Joinville).
-
[26]
BnF, fr. 20544, fol. 15.
-
[27]
BnF, fr. 3231, fol. 83 ; BnF, fr. 8181, fol. 67 v° et 81 v°.
-
[28]
Pastoureau, 2000.
-
[29]
Binet, 1621, p. 24.
-
[30]
du Fouilloux, 1614, p. 56.
-
[31]
BnF, fr. 20467, fol. 151 ; fr. 20552, fol. 152-153. En janvier 1557, Henri de Lorraine, alors prince de Joinville, avait tout juste sept ans.
-
[32]
BnF, fr. 8181, fol. 182 r°.
-
[33]
du Fouilloux, 1614, p. 78. La remarque sur la jeune compagne est tirée du chapitre lxii du traité – manquant sur l’exemplaire numérisé visible sur Gallica – et citée dans Salvadori, 1996, p. 376.
-
[34]
BnF, fr. 8181, fol. 437 v°.
-
[35]
Les lettres comportant des récits détaillés de chasse au héron et/ou au milan sont en effet très nombreuses dans les archives des Guise. Voir notamment : BnF, fr. 20541, fol. 120, 124 et 132 ; fr. 20514 ; fol. 80-81, fr. 20545, fol. 103.
-
[36]
Salvadori, 1996, p. 88-89.
-
[37]
BnF, fr. 20470, fol. 117 ; fr. 20550, fol. 41-42 ; Clair. 344, fol. 167 ; Clair. 346, fol. 255. Archives du château de Chantilly (désormais acc), 1-A-14 (Dépense extraordinaire de mars 1582).
-
[38]
Pour plus de détails sur les chiens des Guise (races, pratiques d’élevage et de dressage, conditions de vie…), voir Meiss-Even, à paraître.
-
[39]
du Fouilloux, 1614, chap. ii ; Charles IX, 1625, chap. x. BnF, fr. 20530, fol. 55 ; fr. 20550, fol. 41-42 ; Clair. 347, fol. 256 et 295.
-
[40]
Charles IX, 1625, chap. x.
-
[41]
BnF, fr. 20530, fol. 55 ; fr. 20544, fol. 15 ; fr. 20550, fol. 41-42 ; Clair. 346, fol. 255 ; Clair. 347, fol. 256.
-
[42]
BnF, fr. 8181, fol. 78 v° et 89 v° ; fr. 20467, fol. 151-157 ; fr. 20472, fol. 151, 171 et 213 ; fr. 20512, fol. 7 ; fr. 20534, fol. 38 ; fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20544, fol. 130 ; fr. 20554, fol. 111 ; Clair. 341, fol. 224 ; Clair. 344, fol. 46 et 167 ; Clair. 348, fol. 56 ; acc, 1-A-14 (dépense extraordinaire de juillet 1581) et 1-GE vii-15.
-
[43]
Vigarello, 2004, p. 29-31 ; Pérouse, 1990, p. 61-76.
-
[44]
Liébault, 1582, p. 6.
-
[45]
BnF, fr. 20530, fol. 55 ; fr. 20540, fol. 23 ; fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20544, fol. 15.
-
[46]
BnF, fr. 20530, fol. 55.
-
[47]
Fébus, 1507, chap. xv.
-
[48]
Jouanna, 1976.
-
[49]
BnF, Clair. 344, fol. 46.
-
[50]
Jouanna, 1976, p. 124-126.
-
[51]
Francières, 1567, p. 4.
-
[52]
Salvadori, 1996, p. 98-99.
-
[53]
BnF, fr. 5802, fol. 57 v°.
-
[54]
BnF, fr. 20515, fol. 104 ; fr. 20530, fol. 86 ; fr. 20534, fol. 38 ; fr. 20540, fol. 78 et 79 ; fr. 20544, fol. 47 et 130 ; fr. 20545, fol. 87 et 149 ; Clair. 344, fol. 167 ; Clair. 347, fol. 256 et 295.
-
[55]
BnF, fr. 20471, fol. 227 ; fr. 20513, fol. 119 ; fr. 20517, fol. 53 ; fr. 20540, fol. 78 ; fr. 20541, fol. 120-124-132 ; fr. 20545, fol. 103 ; fr. 20550, fol. 43 ; fr. 20554, fol. 15 ; fr. 20641, fol. 12 ; Clair. 346, fol. 236 ; Clair. 352, fol. 270-271.
-
[56]
BnF, fr. 20541, fol. 124. « Saure » et « hagard » sont des termes relatifs à l’âge auquel l’oiseau a été capturé : l’oiseau saure l’a été avant sa première mue (son pennage était alors encore saure, c’est-à-dire d’un jaune brun), au contraire de l’oiseau hagard qui a déjà mué une fois (Nicot, 1606) ; le second est réputé plus agressif et plus difficile à dresser en raison de sa plus longue vie en liberté.
-
[57]
BnF, fr. 20545, fol. 103 ; Clair. 349, fol. 256 ; Clair. 352, fol. 270 et 271.
-
[58]
La notion de « communautés imaginées » (imagined communities) a été proposée au début des années 1980 par l’historien Benedict Anderson pour renouveler la définition de la nation : « [La nation est] une communauté politique imaginaire, et imaginée comme intrinsèquement limitée et souveraine. Elle est imaginaire (imagined) parce que même les membres de la plus petite des nations ne connaîtront jamais la plupart de leurs concitoyens : jamais ils ne les croiseront ni n’entendront parler d’eux, bien que dans l’esprit de chacun vive l’image de leur communion. […] Elle est imaginée comme une communauté parce que, indépendamment des inégalités et de l’exploitation qui peuvent y régner, la nation est toujours conçue comme une camaraderie profonde, horizontale » (Anderson, 1996, p. 19-21). Sur le don comme reconnaissance réciproque du statut noble, voir Davis, 2003, p. 57-70 et Neuschel, 1989, chap. 3-4.
-
[59]
Schalk, 1996.
-
[60]
Salvadori, 1996, p. 146.
-
[61]
BnF, fr. 8181, fol. 67 v°, 74 r°, 81 v°, 86 r°, 172 v°, 180 r° et 199 r° ; Clair. 347, fol. 256.
-
[62]
Belleau, 1565, p. 76. Nicot définit le relais ainsi : « C’est un terme de venerie, pour les chiens qu’on tient ordonnez en certain lieu par où la beste doit fuir, pour au passer les lascher et haler apres, et rafraichir ceux qui la couroyent. Il se prent aussi pour le lieu où les chiens du relais sont stationnez ». L’assemblée est la réunion pendant laquelle les chasseurs mangent et écoutent les rapports relatifs au gibier avant de commencer la chasse à courre.
-
[63]
Buridant, 2007, p. 164-165.
-
[64]
BnF, fr. 8181, fol. 58 r°, 198 v°, 213 r°.
-
[65]
BnF, fr. 20470, fol. 117.
-
[66]
BnF, Clair. 347, fol. 256.
-
[67]
Ibid., fol. 295.
-
[68]
Ibid., 348, fol. 52.
-
[69]
BnF, fr. 20550, fol. 41-42.
-
[70]
BnF, Clair. 346, fol. 255 et fr. 20470, fol. 117.
-
[71]
Salvadori, 1996, p. 208 ; Derex, 2007, p. 251-267.
-
[72]
BnF, fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20515, fol. 87 ; fr. 20544, fol. 15 ; fr. 20470, fol. 117 ; fr. 20529, fol. 142.
-
[73]
BnF, fr. 20544, fol. 15.
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[74]
Ibid., fol. 15 v°.
-
[75]
BnF, fr. 20515, fol. 87.
-
[76]
BnF, fr. 20544, fol. 15 ; fr. 20470, fol. 117.
-
[77]
BnF, Clair. 347, fol. 295.
-
[78]
Ibid., fol. 157.
-
[79]
Ibid., 347, fol. 256.
-
[80]
BnF, fr. 8181, fol. 67 v°, 74 r°, 81 v°, 86 r°, 103 v°, 159 r°.
-
[81]
Ibid., fol. 178 r°-188 v°.
-
[82]
Sur cette chasse, voir d’Anthenaise, 2007.
-
[83]
d’Anthenaise, 2007, p. 75.
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[84]
BnF, fr. 8181, fol. 269 r° et 293 r°.
-
[85]
BnF, Clair. 347, fol. 295.
-
[86]
BnF, fr. 8181, fol. 188 r° ; fr. 20513, fol. 23 ; fr. 20530, fol. 55.
-
[87]
En 1552, cinq archers des toiles mirent deux jours à tendre les panneaux (BnF, fr. 8181, fol. 402 r°). L’année suivante, les mêmes archers passèrent plusieurs jours à installer les toiles pour prendre finalement treize « bestes noires » (ibid., fol. 437 v°).
-
[88]
Ibid., fol. 285 v°-286 r° et 370 r°v°.
-
[89]
En 1527, Claude de Lorraine paya 40 sous, soit 2 livres, à « des bonnes gens qui [avaient] gardé les loups estans aux toilles » : BnF, fr. 8181, fol. 90 v°.
-
[90]
Bibliothèque de Joinville, collection Lemoine, pièce n° 413. Je remercie chaleureusement M. Yvon Gaillet de m’avoir signalé l’existence de ce document et de m’en avoir procuré une transcription.
-
[91]
Barbier, 1997 ; Janequin, 1988.
-
[92]
Achetées par Mazarin en 1654, Les Chasses de Maximilien entrèrent dans les collections royales sous Louis XIV. Elles sont aujourd’hui conservées et exposées au musée du Louvre (inv. OA 7314 à 7325). Sur cette tapisserie, voir Schneebalg-Perelman, 1982, Delmarcel, 1984, Balis, 1993.
-
[93]
Arch. Nat., K 529 A, fol. 1 r°.
-
[94]
Sauval, 1724, t. iii, p. 10.
-
[95]
Ferrières, vers 1370.
-
[96]
« Si tu n’omets rien de ce qui est juste, si vivant bien tu ne fais point de mal, accomplissant envers tous ton devoir, que peut-il y avoir de plus beau que la pratique de la chasse, réglée par Modus et dirigée par dame Ratio ? Préservé de l’oisiveté et de la gourmandise, t’occupant de ce qui est honnête, tu te maintiendras sain et sauf, tu réchaufferas tes membres par le labeur ; l’année passera joyeusement dans cet exercice, et ta vie s’écoulera heureusement en jours pleins de santé. »
-
[97]
Xénophon (1), chap. xii, 18.
1« Ici, l’on ne pense qu’aux chasses. Et quand on tombe sur un de ces gîtes, on y reste tant que durent les hérons qui sont dans le pays et les milans, lesquels, si nombreux qu’ils soient, durent peu, parce qu’entre le roi et les grands de la cour il y a plus de cinq cents faucons... Ensuite on court le cerf deux fois [le jour], quelquefois plus, on chasse une fois avec les toiles, et puis on change de gîte » [1]. L’insatiable passion de la cour des derniers Valois pour la chasse, si elle mettait l’évêque de Saluces au comble de l’exaspération, n’épargnait pas la maison de Guise, qui fournit à deux reprises des grands veneurs de France au cours du xvie siècle [2]. La correspondance de François de Lorraine, deuxième duc de Guise (1519-1563), en est la meilleure preuve, tant elle réserve une place de choix aux récits circonstanciés des exploits des meutes ducales ou du délicat élevage des oiseaux de chasse. Il n’est aucun autre sujet, en-dehors des affaires politiques du royaume, pour donner lieu à des correspondances aussi détaillées. François de Lorraine a laissé une lettre confirmant le plaisir qu’il pouvait trouver à la lecture de ces longues missives. En juin 1557, alors que la campagne d’Italie le retenait loin de ses terres, le duc de Guise écrivit à sa mère cette pressante demande :
« Je vous supplie tres humblement, Madame, vouloir dire à Grantmont et au gruyer [3] qu’ilz m’escrivent ung petit mot de nos chasses en que pour le moings, si je n’en puys avoir le plaisir par effet, que je me consolle à lire ce qu’il vous plaira m’en escrire ainsy qu’ilz feront de leur costé [4]. »
3Pour les Lorrains comme pour les autres Grands de la Renaissance, la chasse était bien une passion dévorante.
4Pour légitimer le temps passé à cette activité, la noblesse du xvie siècle avait coutume de rappeler les liens de parenté unissant la chasse à la guerre. La chasse requérait en effet endurance, résistance aux éléments, maîtrise du cheval et du maniement des armes, anticipation du mouvement de « l’ennemi », courage physique, autant de compétences et de qualités utiles au soldat et donc au noble faisant profession des armes. Dans un passage fameux du Prince (1513), Machiavel affirmait ainsi que ce divertissement endurcissait le militaire en l’habituant à la fatigue, de même qu’il l’entraînait à prêter attention à la topographie du terrain où il allait livrer bataille à l’animal [5]. Quant à Baldassare Castiglione, il faisait figurer la chasse au rang des activités physiques recommandées au parfait courtisan, arguant du fait qu’elle avait « une certaine semblance de guerre » et qu’elle était par conséquent « ung passetemps de grans seigneurs » [6]. Henri III ne disait pas autre chose lorsqu’il affirmait, dans une ordonnance du 10 décembre 1581, que la chasse était « chose plus que nulle approchant le faict des armes et bien séante à la noblesse » [7]. Il n’y a donc rien d’étonnant à voir Fornier, l’un des historiographes de la maison de Guise, recourir à cet argument rebattu pour justifier les loisirs qui occupaient Claude de Lorraine (1496-1550), retiré à Joinville, au cœur de ses terres de Champagne :
« [Il] se plaisait […] extremement au travail, bien loin de s’estre retiré pour chercher l’oisiveté, de manière que n’ayant plus de guerres à faire, il faisait ses délices de la chasse, laquelle selon Xenophon en est une espece [8]. »
6L’Antiquité fournissait l’argument d’autorité décisif, car l’auteur athénien (ca. 426 av. J.-C. -354 av. J.-C.), dans sa Cyropédie comme dans son Art de la chasse, avait été l’un des premiers à faire de la chasse une parfaite école des vertus physiques et morales du guerrier [9].
7Pourtant, la chasse était plus que le prolongement de la guerre par d’autres moyens. Comment comprendre en effet que François de Lorraine, accaparé par l’expédition d’Italie, eût pu se montrer nostalgique de ses chasses champenoises si celles-ci n’avaient été qu’un substitut ordinaire au fait militaire ? Il faut donc voir dans ce lieu commun un discours de justification qui n’épuise pas les raisons de l’engagement nobiliaire dans la pratique cynégétique. Et de fait, la chasse constituait au xvie siècle une activité à part entière, appréciée pour elle-même, conjuguant exercice physique, excitation de la poursuite et franche camaraderie. Toutefois, elle dépassait le statut de simple « passetemps de grans seigneurs » : elle était une composante essentielle du « vivre noblement », et plus encore à mesure que la monarchie travaillait à faire de la chasse un privilège nobiliaire et non plus seigneurial [10]. L’état de noblesse ne se résumait pas alors à la condition sociale d’un individu, résultante de facteurs familiaux, sociaux et économiques. Il revêtait une incontournable dimension publique et exigeait de l’individu qu’il caractérisait qu’il exhibât par chacun de ses gestes, chacun de ses comportements, chacune de ses possessions, sa place dans la structure sociale de son temps [11]. La chasse répondait merveilleusement à cet impératif car elle tissait autour des nobles la pratiquant un réseau très dense d’allusions à leur appartenance aux élites du royaume. Qualités « naturelles », aptitudes physiques, valeurs religieuses, morales et chevaleresques étaient simultanément célébrées dans un rituel spectaculaire où éclatait la puissance aristocratique [12].
8La richesse des sources disponibles sur les pratiques cynégétiques des ducs de Guise fait de la maison ducale un parfait observatoire de la chasse comme cristallisation de l’état de noblesse. La correspondance domestique, en particulier la correspondance passive de François de Lorraine, recèle en effet quelques dizaines de lettres donnant à voir la préparation au quotidien des chasses ducales, comme prise sur le vif. D’autres types de documents, comme les pièces comptables, et notamment les cahiers de la dépense ordinaire mensuelle, délivrent quelques renseignements complémentaires lorsqu’une partie de chasse a provoqué une série de paiements ou a fait naître une tension entre les habitants des localités traversées et la suite ducale. Confrontées à la littérature cynégétique de la Renaissance, ces sources font apparaître les types de chasses réellement pratiquées par les Guise, révélant les gibiers traqués comme les auxiliaires animaux nécessaires à la capture des proies. Se dessine alors une élite animale, parée des plus hautes vertus physiques et morales, qui vient faire écho à l’élite de la société humaine par toute une série de rapprochements symboliques. La noblesse animale permet ainsi de définir par analogie les caractéristiques supposées de la noblesse humaine. L’imaginaire n’est cependant pas le seul à l’œuvre dans cette opération d’exhibition de l’« être noble ». Par l’ampleur des territoires parcourus comme par le nombre des hommes mobilisés, par la dramatisation de la mise à mort comme par les échos artistiques qu’elle suscitait, la chasse aristocratique du xvie siècle prenait l’aspect d’un véritable spectacle de la puissance seigneuriale et nobiliaire.
La noblesse animale, miroir de la noblesse humaine
9Les rapprochements symboliques entre hommes et bêtes faits dans la cynégétique du xvie siècle n’avaient pas grand chose à voir avec une forme d’anthropomorphisme, et moins encore avec un goût pour une rhétorique de la métaphore. Pour appréhender le monde qui les entourait, les hommes de la Renaissance disposaient en effet d’un « outillage mental » dans lequel la pensée analogique occupait une place centrale [13]. L’univers, la société et l’homme étaient conçus comme organisés de semblable façon, les progrès de l’esprit humain consistant à mettre en lumière les correspondances cachées afin de louer la Création divine. Pointer les ressemblances entre la proie, le chien ou l’oiseau de chasse et le veneur, c’était par conséquent saisir l’essence même de la noblesse.
La plus noble des proies pour le plus noble des veneurs : le cerf
10Un principe fondamental était en effet à l’œuvre au moment de se mettre en chasse : l’élite nobiliaire se devait de consacrer l’essentiel de son temps au gibier le plus noble, le plus digne d’être combattu. Or, du point de vue français, rien ne pouvait dépasser la chasse au cerf. Les raisons de cette prédilection étaient à la fois cynégétiques et symboliques. Le cerf est un animal rapide et intelligent, capable de semer les veneurs en multipliant les ruses et en amenant les chiens à prendre le change, c’est-à-dire à se tromper de voie et à suivre celle d’un autre cerf croisé au fil de la course. Sa poursuite s’avère donc complexe et oblige le chasseur à déployer tout son sens de la stratégie. De plus, son endurance et sa vitesse font que les chiens mettent du temps et parcourent un vaste territoire avant de le terrasser, si bien que seuls les propriétaires de vastes domaines forestiers disposent d’un terrain de chasse adapté. Depuis l’ère paléochrétienne, le cerf était en outre l’objet d’un discours très favorable de la part de l’Église qui le présentait souvent comme un médiateur entre le Ciel et la Terre [14]. La légende de saint Hubert, le protecteur des chasseurs, voulait qu’un cerf blanc portant une croix lumineuse entre ses bois fût apparu au noble évêque de Maastricht pour lui reprocher de s’adonner à sa passion un Vendredi saint (figure 1). L’animal était paré de toutes les vertus chrétiennes et ses bois, lorsqu’ils comportaient dix branches (cas d’un dix-cors), étaient assimilés aux Dix Commandements. Le cerf passait même pour être une figure christique : la chute annuelle de ses bois et leur repousse étaient perçues comme une image de la Résurrection, tandis que sa mise à mort ritualisée au cours de la chasse était mise en parallèle avec la Passion. Entre 1524 et 1529, le frère aîné de Claude de Lorraine, le duc Antoine, avait d’ailleurs fait réaliser au palais ducal de Nancy un décor peint où se déroulaient en parallèle la vie du cerf et la vie du Christ, ce qui atteste la vigueur de ce rapprochement au sein de la maison de Lorraine [15].
11Autant de qualités faisait du cerf un animal d’une grande noblesse et une proie réservée aux rois et aux ducs. Sa chasse reprenait dès que possible, c’est-à-dire dès que les animaux avaient commencé à reconstituer la ramure couronnant leur tête et étaient ainsi redevenus des adversaires dignes d’être affrontés en combat singulier [16]. Cet événement tant attendu arrivait, selon La Vénerie de Jacques du Fouilloux (1561), vers la mi-juin :
« Après que les cerfs ont mué, ils commencent dès le mois de Mars & Avril à pousser les bosses : & comme le Soleil se haussera, & que le viandis croistra & durcira, ne plus ne moins leurs testes & venaison croistront & augmenteront : & dès la moitié de Juin leurs testes seront semées de ce qu’elles doivent porter toute l’année […] [17]. »
13Aussi n’est-il guère étonnant de voir Claude de Lorraine, jusque là occupé à chasser au faucon, se tourner vers la chasse au cerf et prendre le premier le 19 du mois de juin 1532 [18].
14L’attrait particulier de la chasse au cerf n’était pas moindre pour François de Lorraine que pour son père. Les lettres écrites pour informer le second duc de Guise de l’état des réserves de gibier autour de Joinville faisaient en effet toujours une large place aux cervidés et s’attachaient tout particulièrement à signaler les individus présentant les ramures les plus impressionnantes [19]. François de la Chaussée, gentilhomme proche de François de Lorraine, intermédiaire privilégié du duc au sujet de la vie de la principauté de Joinville et auteur de la plupart de ces lettres, se réjouissait en ces termes en février 1551 :
« J’ay esté avec votre gruyer en voz boys et forestz de pardeca estans soubz sa charge et où j’ay veu de grans cerfz ayans de fort belles testes et si ay esté en la forest de Monstier sur Saulx où j’ay aussi veu de grans cerfz. Le grant viel cerf est tousjours ou ban d’Effincourt qui porte une belle grant teste. J’ay dit à votredit gruyer qu’il se donne bien garde que la mue en soit perdue et qu’il treuve facon de la recouvrer. Il m’a baillé deux massacres de deux grans vielz cerfz tuez de haquebuttes, l’un fut trouvé vers le ban dudit Effincourt qui porte xvi, une teste fort haulte et bien ouverte, et l’autre porte xiiii qui fut trouvé vers ledit Monstier tyrant vers Morlay. L’abbé de Janvillers m’en a envoyé ung autre qui a esté tué aussi de haquebutte vers ses boys […] [20]. »
16Cet intérêt pour la taille des ramures est tout à fait significatif car les bois concentraient, aux yeux des chasseurs de la Renaissance, la noblesse du cerf. Non contents d’alimenter le parallèle christologique, ils symbolisaient aussi la valeur guerrière et la virilité du cerf puisqu’ils atteignent leur plein développement et perdent le velours qui les recouvrent au moment du rut, lorsque l’animal est pris d’une fièvre sexuelle qui le pousse à des combats d’une grande violence pour la conquête des femelles. Les bois résumaient à ce point la nature exceptionnelle du cerf que celui-ci ne pouvait que se cacher lors de leur chute annuelle, selon Jacques du Fouilloux, « pour la honte qu’[il avait] d’avoir perdu [sa] force et beauté » [21]. Les Guise faisaient d’ailleurs soigneusement ramasser les bois tombés de la tête des mâles dans les forêts leur appartenant. En juin 1532, Claude de Lorraine offrit ainsi vingt-six sous à six femmes qui étaient venues lui présenter des mues de cerf ; quatre jours plus tard, un homme reçut six sous et huit deniers pour une tête de cerf [22]. En avril 1553, François de La Chaussée répondit à la demande de François de Lorraine en promettant de réunir « toutes les plus belles mues de pardeca pour [lui] en envoyer six », ce qu’il fit le mois suivant [23]. En février 1558, un agent du duc écrivit qu’il avait récupéré la tête de cerf que voulait François de Lorraine, mais qu’à sa grande déception elle ne portait pas autant de bois qu’on l’avait dit [24]. Le ramassage des bois tombés, combiné aux prélèvements effectués sur les dépouilles des proies tuées au cours des parties de chasse, permit aux Guise de se constituer une véritable collection destinée à décorer la porte d’entrée du château familial de Joinville, la Porte du Cerf [25]. François de La Chaussée demanda d’ailleurs au duc de Guise, en mai 1553, de bien vouloir lui renvoyer les six mues et la dépouille de cerf qu’il lui avait fait parvenir « pour mectre au cerf de la porte du chasteau de Joynville » [26]. Le berceau familial était ainsi placé sous le signe de la vaillance, de la noblesse et de la piété.
La noblesse ambiguë du sanglier
17Les Guise aimaient aussi à chasser le sanglier, qui pullulait sur leurs terres. En novembre 1527, Claude de Lorraine eut la satisfaction d’en prendre plusieurs près de Joinville ; une quarantaine d’années plus tard, le cardinal de Guise avertissait le duc de Nemours qu’il projetait de se rendre avec ses neveux à Éclaron « où il i a[vait] force beste noyre » [27]. La bête ne jouissait pas d’un préjugé aussi favorable que le cerf, bien au contraire [28]. Outre que sa poursuite se révèle moins exaltante (il file droit au lieu de faire des ruses), le sanglier se voyait prêter les pires défauts par les traités de vénerie médiévaux et renaissants : laideur, puanteur, félonie, colère, orgueil… Reflet inversé du cerf, il apparaissait comme une figure diabolique cumulant dans son être les péchés capitaux, à la seule exception de l’avarice. Pourtant, il restait digne d’être chassé en raison de la valeur guerrière dont il fait preuve au moment de l’assaut. Ne disait-on pas alors que l’homme de guerre devait avoir « assaut de lévrier, fuite de loup et défense de sanglier » [29] ? Sachant d’expérience combien la bête acculée pouvait se révéler dangereuse, Jacques du Fouilloux mettait en garde ses lecteurs soucieux de protéger leur meute :
Bien des chiens menant l’assaut agonisaient le ventre ouvert par les défenses du sanglier, aussi le chasseur devait-il faire preuve de vaillance et d’habileté pour l’abattre d’un puissant coup d’épée ou d’épieu avant de voir sa meute décimée (figure 2). Tuer un sanglier dans un véritable combat singulier était la marque ultime du courage physique.« [Le] Sanglier, s’il blesse un chien de la dent, au coffre du corps, il n’en cuidera jamais eschapper. Et a ceste malice, que s’il se voit une bonne meute de chiens qui le chassent de près, il fuira dedans le plus grand fort qu’il pourra trouver, là où il les pensera tuer à son aise [30]. »
Les autres chasses terrestres
18La prédilection des Guise et de leurs semblables pour ces nobles proies qu’étaient le cerf et le sanglier ne doit pas laisser accroire qu’ils ne pratiquaient jamais des chasses plus vulgaires. Les Guise ne dédaignaient pas, à l’occasion, celles dont l’aspect distrayant compensait quelque peu le manque de prestige. Ils s’adonnaient notamment à la chasse au lièvre, animal dont la ruse et la rapidité étaient censés rendre la poursuite toujours surprenante et intéressante. L’écuyer de François de Lorraine, détaillant les qualités d’une jeune jument née au haras ducal, précisait ainsi que le duc la trouverait certainement « à [son] plaisir pour courir les lièvres ou possible le cerf » ; de son côté, le jeune prince de Joinville s’en était donné à cœur joie avec ses camarades de la petite cour de France, en janvier 1557, puisqu’ils avaient « tant couru de lièvres que les paiges laissoient les croustes pour manger le dedens » [31]. Les serviteurs ducaux chargés de rendre compte de l’état des réserves de gibier sur les terres de la famille n’oubliaient donc jamais de mentionner cet animal. Les archives de la maison signalent par ailleurs une chasse au blaireau (appelé alors « tesson ») menée en juin 1532, mais elle ne fut peut-être qu’une simple extermination de nuisibles [32]. Ce type de chasse, qui requérait que des domestiques creusent à l’aide de pioches et de pelles pour éventrer les terriers, ne pouvait en effet rivaliser avec l’excitation des chasses à courre. Jacques du Fouilloux, jamais avare de grivoiseries, recommandait d’ailleurs d’aller à cette chasse accompagné d’une « fillette aagée de seze à dix sept ans » afin de remédier à l’ennui et s’excusait du faible nombre de pages qu’il consacrait à cette chasse par le fait que « peu d’hommes y prennent plaisir » [33] ! En revanche, les sources ne mentionnent pas explicitement de chasse au loup. Il est possible que la mention d’un versement de cinq livres à des archers en novembre 1553 pour la prise de « trese bestes noires » masque un tel événement car l’expression « bestes noires » pouvait désigner des loups autant que des sangliers [34]. Le nombre d’animaux capturés pourrait correspondre à une meute que François de La Chaussée, qui donna l’ordre de la chasse, aurait jugée dangereuse pour les habitants des terres ducales. Quoi qu’il en soit, le duc de Guise ne semble pas avoir lui-même participé à l’opération.
Le dégradé social des gibiers à plumes
19Dans les airs vivaient d’autres valeureux combattants dignes de l’intérêt du chasseur noble. Si l’on se réfère à la part occupée par chaque chasse aérienne dans la correspondance cynégétique de François de Lorraine, celle du héron et celle du milan étaient de loin les préférées du second duc de Guise [35]. Cette faveur provenait du fait que les hommes de la Renaissance, dans leur perception hiérarchique de l’organisation du règne animal, plaçaient ces deux oiseaux au sommet des gibiers à plumes. Le héron est en effet, avec la cigogne et la grue cendrée, le plus grand oiseau d’Europe, et son vol était considéré à l’époque moderne comme le plus beau de la fauconnerie. Le milan, quant à lui, est un oiseau de proie qui était alors relégué au rang de gibier en raison de son manque d’ardeur au combat ; sa taille et sa nature de prédateur en faisaient toutefois une proie digne d’un grand seigneur [36]. La chasse au canard, repérable dans les sources à travers les mentions des oiseaux « pour rivière », suscitait aussi l’intérêt sans avoir la même noblesse que celles du héron et du milan ; faisans et perdrix faisaient également les frais de la passion cynégétique des ducs, néanmoins la chasse de ces volatiles ne donnait lieu qu’à de courtes mentions dépourvues d’enthousiasme de la part des fauconniers ducaux [37]. La valeur d’un gibier dépendant de sa place dans le système d’équivalences établi entre règne animal et humanité, seul un gibier situé au sommet de la hiérarchie animale pouvait donner au noble chasseur un plaisir total en reflétant ses qualités physiques et morales. À excellence, excellence et demie.
Les chiens de chasse, compagnons d’armes du noble chasseur
20Le rapprochement symbolique opéré entre la société humaine et le règne animal concernait tout autant les auxiliaires de chasse que le gibier. Chiens et oiseaux appartenaient eux aussi aux espèces dites nobles et étaient sommés de mettre leurs aptitudes guerrières au service de leurs maîtres. Au cours de leurs parties de chasse, les Guise étaient ainsi entourés d’une véritable armée canine [38]. Le gros de la troupe était composé de chiens courants, c’est-à-dire de chiens réunis en meute pour courir les cerfs et sangliers. Beaucoup étaient de la race des chiens blancs dont les traités de vénerie de Jacques du Fouilloux et du roi Charles IX affirmaient qu’elle était le fruit de croisements réalisés dans les milieux aristocratiques à l’époque de Louis XII, puis d’améliorations apportées sous François Ier [39]. Forts, résistants et dotés d’un bon nez, ces chiens particulièrement réputés pour la chasse au cerf étaient alors considérés comme de « vrays chiens de Roy » [40]. Ils avaient détrôné les chiens gris que Louis IX aurait rapportés d’Orient et qui furent les chiens courants les plus appréciés jusqu’à la fin du xve siècle. Ces chiens gris, réputés plus polyvalents, étaient eux aussi présents dans les meutes ducales [41]. Les Lorrains possédaient en outre des mâtins, des lévriers, des braques, des épagneuls, des griffons, des chiens de caille, des chiens d’Artois [42].
21Les qualités physiques qui faisaient que les serviteurs des Guise appelaient un chien un « beau chien » n’étaient pas si différentes de celles attendues d’un bel homme. La beauté masculine était alors faite de puissance et de capacité à impressionner plus qu’à séduire [43]. Virilité et force allaient de pair, comme le soulignait Jean Liébault en 1582 en affirmant que les hommes, à la différence des femmes, ont le corps « robuste, fort et puissant » [44]. Or, au moment de constituer leurs meutes, les Guise sélectionnaient impitoyablement leurs chiens en fonction de leur haute taille et de leur force, signes de leur aptitude à supporter une course harassante puis à affronter une bête sauvage aux abois [45]. L’obsession était telle qu’en février 1556, le maître d’hôtel Simon de Grammont envoya à François de Lorraine une corde sur laquelle avaient été faits deux nœuds indiquant la taille respective de deux jeunes chiens blancs particulièrement prometteurs [46]. Résistance, puissance et agressivité devaient ainsi caractériser la meute autant que le chasseur.
22Ce parallèle physique était redoublé d’un parallèle moral hérité du Livre de la chasse (1389) de Gaston Fébus. Dans son traité, qui était toujours une référence pour les veneurs du xvie siècle, le comte de Foix s’était en effet laissé aller à un éloge très appuyé du chien [47]. Il vantait sa loyauté, sa franchise, son intelligence, sa force, sa bonté, sa vaillance… Mais plus que toute autre qualité, c’était sa fidélité qui conférait au chien sa noblesse et en faisait un digne compagnon du gentilhomme. Ses vertus entraient en résonance avec celles de son maître, qui devait exprimer lors de la chasse ses qualités chevaleresques en chassant « bellement » et « courtoisement », c’est-à-dire en laissant l’animal faire ses ruses et se défendre au lieu de l’attaquer par surprise. La droiture « morale » du chien et l’honneur du noble chasseur étaient les deux faces d’une même médaille.
23Le rapprochement de nature entre le noble veneur et ses chiens culminait dans le culte de la race. Le terme est ici à comprendre dans son sens aristocratique d’appartenance à une longue lignée de glorieux ancêtres ayant prouvé leur valeur et dont le sang prédisposait leur descendant à la vertu [48]. Pour les Guise, qui partageaient là une profonde conviction du roi-veneur qu’était Charles IX, le seul indice fiable de la qualité d’un chien était la lignée dont il était issu. En témoigne une lettre reçue par François de Lorraine en mars 1550 :
« Monseigneur, je vous envoye deulx levrettes, l’une a dix huit moys qui a le commencement d’estre bonne, l’autre en a quinze et n’a point enchorres couru, si croy je qu’elle ne sera moindre que sa compaigne car elle vient de fort bonne race [49]. »
25L’appartenance de la chienne à un véritable lignage canin la prédisposait à devenir une grande chasseuse et à réitérer les exploits de ses ancêtres. De la même façon que l’éducation permettait au jeune homme bien né de développer pleinement les potentialités héritées de ses aïeux, le chien pouvait, grâce au dressage, apprendre à exprimer les qualités de chasseur transmises par ses géniteurs. En cela, les chiens réaffirmaient dans la sphère animale la différence de nature entre la noblesse toujours en voie d’amélioration et la roture condamnée à stagner dans la médiocrité [50].
L’oiseau de proie et la nature du guerrier
26La noblesse définissait tout autant l’oiseau de chasse, moins cette fois en raison d’une filiation établie – comment connaître les ancêtres d’un animal sauvage ? – que pour ses qualités intrinsèques de guerrier. Au contraire du milan déclassé à cause de sa gloutonnerie et de sa paresse au combat, faucons et éperviers suscitaient l’admiration parce qu’ils semblaient, d’après Jean de Francières (1462-1468), « plus s’efforcer à faire vol grand et hautain pour quelque sentiment de gloire et honneur de la victoire, que pour appetit de la proye » [51]. La supériorité du noble chassant par plaisir et souci de sa gloire sur le manant braconnant par nécessité, en somme. Cette affinité « naturelle » entre l’oiseau de proie et le gentilhomme explique le goût des Grands de la Renaissance pour la fauconnerie. Celle-ci distingue les oiseaux de leurre (ou de haut vol) des oiseaux de poing (ou de bas vol). Les premiers chassent en s’élevant très haut puis en piquant à une vitesse foudroyante sur leur proie ; ils reviennent ensuite vers le leurre que le fauconnier agite au bout d’une longe. Les seconds sont plutôt lancés contre la proie qu’ils saisissent au moment où elle prend son envol ; ils se posent après cela sur le poing de leur maître. Les faucons – eux-mêmes divisés en sous-espèces : gerfaut, sacre, lanier, pèlerin, hobereau et émerillon – appartiennent à la première catégorie, tandis que les autours et éperviers se rattachent à la seconde [52].
27Les Guise pratiquaient les deux types de chasse, même si les oiseaux de bas vol ne jouissaient pas de la même considération que leurs congénères de haut vol. Claude de Lorraine était même réputé pour son art de conduire les oiseaux de poing. D’après Fornier (toujours suspect de flagornerie), ce dernier
« avoit pour [la chasse] des connaissances si particulieres, qu’il ne se trouvoit personne de son temps, qui connût à l’égal de luy, la nature des chiens, des oyseaux, et de toute sorte de venerie, et il portoit particulierement les oyseaux sur le poing de si bonne grace, et les faisoit voler si addroitement, qu’il estoit en admiration aux plus habiles en cet art [53]. »
29La correspondance de François de Lorraine atteste qu’il possédait lui aussi des éperviers et des autours, utilisés pour chasser les perdrix [54]. Les fauconniers ducaux s’attardaient cependant plus, dans leurs lettres, sur les exploits des oiseaux de leurre – qui étaient presque exclusivement des gerfauts et des sacres, soit les plus prestigieux des faucons – dans leurs combats face aux hérons et aux milans [55]. Ces oiseaux à l’agressivité spectaculaire devenaient, dans les récits des fauconniers, des guerriers héroïques dont on commentait les plus beaux gestes comme on l’aurait fait d’un preux chevalier. Le sieur de Canaples se plaisait spécialement à ces descriptions de bataille, comme en témoigne l’extrait suivant, tiré d’une lettre de mars 1551 :
« J’ay aujourd’huy laissé voz oiseaulx pour millan tous ensemble près de Bacon, craignant qu’il ne me vienne toute telle adventure qu’il m’est venue ce mattin, car les deux hagardz du More se sont mestroussez et est demeuré son sacre sor avec le millan bien fort hault qui m’a faict hazarder le sacre d’une mue de Fontaine et son sacret hagard et vous puis dire qu’ilz ont faict le plus beau vol qu’il est possible de pouvoir faire et a esté le millan porté à terre et prins. De voz oiseaulx pour heron ils vollerent vendredy ung heron bien et aujourd’huy ung aultre. Le tiercelet n’a voullu demeurer avec le gerfault apres avoir faict deux venues et est allé resercher ung aultre heron qui estoit plus hault que celluy qu’ilz combatoient et l’a rendu sur la riviere de Loire [56]. »
31L’adéquation des techniques de chasse des rapaces de haut vol avec l’imaginaire chevaleresque des aristocrates de la Renaissance faisait de ces oiseaux un objet d’échange entre nobles particulièrement apprécié. On ne compte plus dans la correspondance des Guise les mentions de cadeaux, faits aux Guise ou bien par eux, d’échanges ou de prêts d’oiseaux afin de constituer des vols aussi harmonieux et efficaces que possible. Trois exemples pris dans la seconde moitié des années 1550 sont de ce point de vue très significatifs. En 1555, des Bourguignons amis d’un fidèle du duc François lui proposèrent douze faucons, dont de rares et précieux faucons blancs, en échange de six sacres ; l’année suivante, Anne de Montmorency sollicita de François de Lorraine le don d’un lanier pour accompagner les deux oiseaux que le duc d’Aumale avait déjà cédés au connétable ; en novembre 1558 enfin, le jeune duc de Lorraine Charles promit au duc de Guise des faucons du Rhin et des gerfauts en échange de sacres dressés à chasser le héron [57]. Ces dons faits en tous sens tissaient entre les participants les liens d’une appartenance commune à la culture chevaleresque européenne et plus encore à l’élite sociale du royaume : l’échange était en cela aussi ostentatoire que la simple possession et faisait entrer les acteurs dans la « communauté imaginée » des aristocrates européens, c’est-à-dire dans une communauté soudée non par une connaissance interpersonnelle mais par le sentiment d’une fraternité et par le partage de valeurs communes [58].
32À l’instar des proies, les animaux auxiliaires de chasse s’intégraient donc dans le système de correspondances tissé entre animalité et humanité. Les compagnons à poils et à plumes du chasseur réactivaient dans le monde animal les différentes facettes de l’identité nobiliaire puisque le rapace incarnait une noblesse faite tout entière de valeur guerrière quand le chien symbolisait l’importance de l’hérédité et de la filiation [59]. Sans trancher définitivement sur la part de l’inné et de l’acquis dans la supériorité corporelle, morale et sociale de la noblesse sur la roture, la compagnonnage de l’homme et de l’animal au cours de la chasse permettait en tout cas de rendre explicite le caractère inéluctable de cette différence ontologique. Fiers adversaires ou auxiliaires courageux, les animaux permettaient de manifester dans l’ordre naturel la supériorité sociale du noble chasseur finalement vainqueur. Restait à mettre en scène, voire à ritualiser le triomphe de l’homme sur le monde sauvage.
Un spectacle de la puissance
33Bien qu’assez fréquente, une chasse princière restait un événement. Elle mobilisait un très grand nombre d’hommes, de chevaux et de chiens, les amenait à traverser d’immenses étendues de forêts. Hommes, bêtes et espaces mis au service du plaisir du prince contribuaient ainsi à mettre en scène le spectacle de sa puissance.
La gestion du territoire de chasse et des ressources en gibier
34La chasse exige du chasseur une résistance au froid, à la chaleur, à la pluie, au vent, et le cavalier lancé à pleine allure à la poursuite d’un cerf doit s’attendre à avoir le visage et les membres fouettés par les branches. Cependant, l’espace de chasse pratiqué par les veneurs de la Renaissance n’appartenait en rien au monde réellement sauvage des hautes montagnes ou des forêts profondes. Les forêts fréquentées n’étaient jamais situées très loin des espaces anthropisés, et certaines étaient même aménagées pour rendre la chasse plus agréable [60]. Lors de ses campagnes de chasse de novembre 1527 et juin 1532, Claude de Lorraine circula dans une zone d’environ vingt kilomètres autour de Joinville, et les forêts qui servirent de terrain d’entraînement aux meutes de François de Lorraine en juillet 1554 étaient situées quant à elles dans un rayon de trente kilomètres maximum autour de Joinville, c’est-à-dire dans un espace jalonné par de très nombreux villages appartenant au duc de Guise [61]. En outre, la forêt commençant sous l’une des terrasses du château de Joinville était, selon La Bergerie de Rémi Belleau (1565), entièrement aménagée :
« Elle est partie de longues & larges routes, pour plus aisement & avec plus de plaisir courir le cerf à force, le sanglier, & le chevreul : En quelques endroits il y a des pavillons quarrez, faits & massonnez expres pour releier, ou pour faire l’assemblée [62]. »
36Ces ouvertures présentaient de nombreux avantages car elles faisaient du bois un terrain de chasse commode pour les participants à la poursuite en leur facilitant la circulation et l’orientation ; elles contribuaient en outre à la mise en spectacle de la chasse en ouvrant les perspectives et en éclaircissant les sous-bois. La forêt de Joinville rejoignait ainsi les forêts aménagées par d’autres prestigieux propriétaires puisque François Ier avait fait percer quatre grandes artères rectilignes en forêt de Compiègne dès 1521 et que le connétable Anne de Montmorency inaugura très certainement l’aménagement de la forêt de Chantilly [63].
37Pour garantir la réussite de la chasse des ducs au sein de ces espaces très maîtrisés, les serviteurs des Guise faisaient en sorte d’assurer le bon peuplement des terres ducales en gibier. Des hérons étaient nourris à Joinville : les comptes de la dépense ordinaire mentionnent en effet un approvisionnement important en moutons ou en bas morceaux pour entretenir ces oiseaux [64]. Leur destin était tout tracé, comme l’atteste cette lettre datée de juin 1553 : « Je vous faiz norrir une douzaine de herons pour si voz fauconniers de pardeca en ont affaire, ilz les trouveront tous prestz » [65]. En attendant l’issue funeste, les hérons étaient choyés puisque le duc François fit élever à leur intention un solide abri dont le sieur de La Chaussée lui décrivait les travaux en juillet 1554 (la lettre étant très abîmée, elle comporte des lacunes) : « Votre heronniere n’est encore du tout achevé[e…] j’ay esté d’advis pour la faire plus belle et [de] plus belle durée la massonner de sept piedz […] terre et y faire deux arches » [66]. Vingt jours plus tard, le petit édifice n’était toujours pas terminé : « La heronnyere n’est encores lattée et avons ung tres long cherpantier. J’ay vingt herons pour y mettre si tost qu’elle sera couverte » [67]. D’autres héronnières étaient dispersées sur les terres ducales, sans que l’on puisse savoir si toutes avaient été aménagées avec le même soin. Les nids spontanés étaient tout aussi surveillés et les conditions favorables à leur installation scrupuleusement observés, comme en témoigne cette lettre, également très abîmée, datée de février 1556 :
« Monseigneur, touchant votre hayronniere de la […] vous certiffie l’avoir souvent visitée et scay à […] sepmaines enca les hayrons s’y sont retirrez et y reffont nys en plus grand nombre que les années precedantes à cause qu’ils n’ont plus bruit ny fumierre des fourneaulx. […] Aussy monseigneur il y a une touche de boys de haulte fustaye derierre et bien près de l’abbaye de Saint Urbain qu’il a pleu à mondit seigneur le cardinal faire reserver sans plus y faire vente auquel y haut […] plusieurs hayrons que puis troys sepmaines enca y ont commencez troys [nids ?]. J’ay mis ordre pour les faire bien garder. […] Il y a des hayronneaulx sur l’orme dudit Fromville […] desquelz faict doubte qu’ilz ne meurrent pour la froydure qui contin[ue] [68]. »
39Un même souci d’assurer le bon peuplement en gibier existait pour les faisans, bien que ceux-ci ne procurassent pas le même plaisir à chasser. Soixante de ces volatiles, gardés jusque là à Éclaron où ils ne se plaisaient apparemment pas, furent ainsi transférés à Joinville « au petit bois du petit jardin où sont les poulaliers », où François de La Chaussée fit construire pour eux « une cloture pour sortir hors de poulalier pour venir leur ebatre en une partie de petit bois » durant la journée [69]. Un couple de faisans fut également installé derrière le château de Joinville au printemps 1553 et surveillé dans l’espoir qu’il fît des petits [70]. Si les sources n’ont pas livré de traces d’un parc de chasse clos – comme ceux de Chambord, de Vincennes ou du bois de Boulogne – destiné à densifier la population animale dans l’espace de chasse, la présence de héronnières très entretenues et de poulaillers à faisans atteste le souci des Guise de gérer leurs réserves de gibier jusqu’à créer artificiellement l’abondance [71]. Celle-ci constituait en effet un élément d’importance dans la mise en scène de la puissance, car il n’aurait pas été de très bon ton de revenir bredouille !
40La gestion des réserves de gibier impliquait en outre une lutte sévère contre le braconnage. Les chasseurs non-autorisés, presque tous porteurs d’armes à feu et désignés par conséquent dans les sources comme des « hacquebuttiers », portaient en effet atteinte aux privilèges ducaux en abattant des animaux qui auraient dû faire la joie du duc de Guise. Officiers et serviteurs de François de Lorraine découvraient régulièrement dans les bois avoisinant Joinville les dépouilles d’animaux tirés par des braconniers : trois cerfs en février 1551, deux autres en août 1552, un au moins en mai 1553, un encore en février 1558 ; en juin 1553 furent en outre dérobés les hérons de la héronnière de Parigny [72]. Non contents de priver le duc d’une partie de son plaisir, les contrevenants compromettaient le succès futur des chasses ducales en faisant fuir le gibier vers des forêts plus accueillantes, ainsi que le déplorait François de La Chaussée en mai 1553 :
« Et si vous voyez monsieur le conte de Senighan, s’il vous plaist luy direz qu’il y a ung de ses subjectz demourant à Leschiere nommé Le Paistre qui faict mestier long temps a de tirer de la haquebutte aux bestes fauves de sorte qu’il ne s’en trouve plus du costé de Brachey, Flammerecourt et Rouvroy [73]. »
42Le fait était d’autant plus insupportable à cette date que le passage régulier de garnisons occupées au siège de Metz avait considérablement augmenté la fréquence du délit et menaçait donc les réserves de gibier du duc [74]. Pour remédier à cette situation de braconnage endémique, le duc François tenta de faire preuve de fermeté. Il fit publier en août 1552 une défense de tirer à l’arquebuse sur ses terres champenoises, défense qui ne fut manifestement pas assez dissuasive [75]. Il faut dire que les officiers chargés de faire respecter les interdictions ne faisaient pas preuve de beaucoup de zèle : François de La Chaussée regrettait au printemps 1553 que le lieutenant du prévôt des maréchaux envoyé sur place pour lutter contre les braconniers n’eût fait qu’une courte apparition de quelques jours et que depuis on n’eût plus la moindre nouvelle de lui [76]. Il préconisait en juillet 1554 de s’« adresser à ung estranger neant cognoisance à nulz de ce pais », ce qui dit assez les complaisances et tolérances des officiers censés réprimer le braconnage [77]. Les serviteurs du duc étaient en revanche moins coulants si l’on en croit la lettre écrite en décembre 1553 au duc de Guise par un gentilhomme champenois : les fauconniers du duc avaient en effet confisqué l’arquebuse avec laquelle la femme du hobereau avait fait tirer pour elle quelque gibier et refusaient depuis de la restituer [78]. En veillant à la bonne gestion du territoire de chasse et des réserves de gibier, ces hommes avaient conscience de garantir le plein pouvoir de leur maître sur ses terres.
Les circulations cynégétiques comme appropriation du territoire
43Les campagnes de chasse étaient une occasion de marquer l’emprise du pouvoir ducal sur la principauté de Joinville et les baronnies adjacentes, car l’ensemble du territoire était alors parcouru. Le circuit prévu par François de La Chaussée pour l’entraînement des meutes à l’été 1554 est révélateur, bien que difficile à retracer dans tous ses détours (carte 1) [79]. Débutant en forêt de Saint-Dizier, il filait vers l’est par l’abbaye de Jovilliers (actuelle commune de Stainville) en direction de Dammarie-sur-Saulx et Morley, puis piquait vers le sud jusqu’à Reynel par la Rippe, descendait ensuite la vallée du Rognon (un petit affluent de la Marne) pour se rapprocher de Joinville avant de franchir la Marne et de se terminer en forêt de Wassy. À peu de choses près, ce trajet suivait les limites des possessions ducales en Champagne. Les comptes conservés pour novembre 1527 et juin 1532 confirment l’usage par Claude de Lorraine de l’ensemble de ses terres comme terrain de chasse puisqu’il poursuivit cerfs et sangliers du côté de Joinville, Nomécourt, Roches-sur-Marne, Montiers-sur-Saulx, Échenay, Sailly et Domrémy-Landéville [80].
44Les déplacements de la famille ducale à l’occasion de ces parties de chasse ne pouvaient guère passer inaperçus. Le carnet des dépenses de juin 1532 fournit un bon exemple de ce que pouvait représenter l’impact d’une chasse sur le territoire parcouru et sur les habitants des environs [81].
Les terres des Guise dans la principauté de Joinville
Les terres des Guise dans la principauté de Joinville
Éléments de localisation45Pendant une semaine, du 18 au 25 juin, le duc Claude, sa femme Antoinette de Bourbon et leurs trois aînés (Marie, 17 ans, François, 13 ans, et Louise, 12 ans) quittèrent leur château de Joinville pour arpenter la partie nord-est de leurs terres champenoises. Ils firent d’abord étape à Montiers-sur-Saulx (18 et 19 juin), puis à Stainville (20 juin), avant de faire un séjour un peu plus long à Biencourt (21-24 juin). Le but cynégétique de leur déplacement ne fait pas l’ombre d’un doute puisque la famille ducale menait avec elle des valets en charge d’au moins huit limiers, plusieurs valets de chiens avec leurs bêtes, cinq pages menant les lévriers et elle était suivie d’un chariot portant les toiles de chasse. Le duc et ses gentilshommes firent d’ailleurs deux assemblées, l’une le 19 juin, l’autre pendant le séjour à Biencourt, et prirent à chaque fois un cerf.
46Les habitants des villages environnants auraient difficilement pu ignorer la présence de la suite ducale, car ils furent mis directement à contribution sous des formes multiples. Certains eurent à supporter les conséquences matérielles de la chasse : une femme eut l’un de ses veaux étranglé par la meute tandis qu’un paysan vit son champ de blé choisi comme lieu d’assemblée du duc et de ses hommes, et donc dûment piétiné ; tous deux furent cependant dédommagés de leurs pertes par le maître d’hôtel du duc. D’autres furent chargés de menues tâches en lien avec la chasse, comme garder les toiles tendues pour rabattre le gibier, partir à la recherche d’un cheval égaré ou bien encore transporter en charrette la dépouille du cerf abattu. De façon plus générale, la présence de la suite ducale suscitait une légère hausse d’activité pour les commerçants et artisans locaux. Un maréchal ferrant et un rouyer réparèrent ainsi le chariot portant les toiles pendant qu’un menuisier arrangeait les bâtons du lit de camp de Claude de Lorraine et qu’un artisan redonnait forme aux poêles de la cuisine. Les hommes du duc achetèrent aussi sur place des produits de consommation assez courante comme des longes pour les chevaux ou des cadenas pour les coffres. Certains habitants profitèrent également de l’occasion pour gagner quelques sous en portant une lettre ou un paquet jusqu’à Joinville.
47C’était toutefois le logement et l’entretien de cette suite qui entraînaient les conséquences les plus lourdes. Les nobles veneurs étaient en effet accompagnés des gentilshommes et des dames de leur chambre, mais aussi de pages, de laquais, de valets de chiens, de tendeurs de toiles et même de joueurs de fifre, de tambourin et de violon. Le décompte exact de ces individus est impossible à établir en raison de l’imprécision des sources, mais on pourra se faire une idée de l’ampleur de la suite en notant que les cinq membres de la famille ducale menaient avec eux soixante-douze chevaux et quinze mulets ! C’était donc une véritable petite cour qu’il fallait loger et nourrir chaque jour. À Biencourt, le duc et la duchesse s’établirent chez le prévôt, mais il fallut encore trouver un logis pour le jeune comte d’Aumale, un pour chacune de ses sœurs, dix pour les pages, deux pour les musiciens et quatre pour les garçons du chenil et ceux menant les lévriers, sans compter les abris pour les chevaux et les chiens. Les habitants se transformèrent ainsi en logeurs pour quelques nuits, et deux femmes vinrent renforcer les équipes en cuisine afin de veiller au confort de leur seigneur et maître.
48Ainsi, en chassant sur leurs terres, les Guise s’appropriaient l’espace tant par une connaissance intime de la topographie que par une proximité éphémère avec les habitants des villages traversés. Ils apparaissaient alors pleinement comme les seigneurs des lieux, jusque dans la saturation de l’espace sonore par le tumulte des hennissements et des aboiements mêlés au son des trompes. L’activité cynégétique contribuait dès lors à faire reconnaître à tous les dépendants la noblesse et la puissance de leurs seigneurs, quand bien même ils n’assistaient pas au clou du spectacle : la mise à mort du gibier.
La mort mise en scène : le spectacle de la chasse aux toiles
49La lecture des sources ne laisse pas de place au doute : les Guise aimaient à pratiquer la chasse aux toiles, la plus propice à une mise à mort spectaculaire de la proie [82]. Cette technique consistait à déployer plusieurs centaines de mètres de pans de forte toile dans la forêt pour canaliser les déplacements du gibier jusqu’à une sorte d’enceinte, l’accourre, destinée à servir d’aire de massacre (figure 3). Le procédé visait à favoriser la rencontre entre la proie et ses chasseurs pour permettre l’affrontement final. Il s’opposait par conséquent à la chasse plus libre et forcément plus hasardeuse menée à courre. Au xviie siècle, le veneur Robert de Salnove explicitait l’antagonisme entre les deux pratiques cynégétiques, l’une consistant à « faire courre par des chiens après une beste pour la forcer, la laissant dans sa liberté, en tenir la voye, & luy voir faire ses ruses d’elle-mesme », alors que dans l’autre les animaux « que l’on met dans les toiles sont forcés plustost par l’emprisonnement que l’on leur donne, que par la science & sagesse des chiens » [83]. En dépit de l’idéal chevaleresque toujours vivace à la cour de France, plutôt favorable à la chasse à courre, la glorification croissante du prince s’accommodait fort bien de la chasse aux toiles et de la démonstration de puissance dont elle était l’occasion. La chasse aux toiles était même devenue la chasse officielle par excellence dans la plupart des cours d’Europe.
50En effet, seul un puissant seigneur disposait des moyens financiers et humains nécessaires pour se livrer à une telle chasse. L’achat des longs panneaux était en soi un véritable investissement : en 1540, Claude de Lorraine déboursa 515 livres tournois pour quinze pièces de toile de chasse d’une longueur totale de 340 aunes (environ 404 m) ; à titre de comparaison, le gentilhomme servant le mieux rémunéré de l’hôtel ducal ne recevait à cette même date que 300 livres de gages annuels [84]. En 1554, François de Lorraine acheta, quant à lui, trente panneaux d’une longueur totale de 691 aunes (environ 821 m) pour 1 036 livres tournois [85]. Lourdes et volumineuses, ces toiles de chasse nécessitaient, pour être transportées de leur lieu de stockage à l’endroit de la forêt où elles allaient être tendues, l’emploi de plusieurs chariots [86]. Leur simple installation pouvaient requérir plusieurs jours de travail aux valets en charge de cette tâche [87]. La pratique de ce type de chasse supposait donc de la part du duc l’entretien d’un matériel coûteux et le paiement à l’année d’un personnel spécialisé, à l’instar des deux maîtres des toiles et du charretier rémunérés 170 livres à eux trois par Claude de Lorraine en 1540 et 1542 [88]. Cela sans compter la dépense annexe, il est vrai beaucoup plus modeste, des extras engagés le jour même de la chasse pour garder les toiles [89]. Pour en réduire les frais, les Guise n’hésitaient pas à user de leurs prérogatives seigneuriales et à mobiliser les habitants par le biais de la corvée, ce qui n’était pas sans créer de vives tensions. Ce fut le cas en particulier en janvier 1554, lorsque François de Lorraine fit ordonner aux habitants de Joinville de mener à Éclaron vingt-sept pièces de toile de chasse [90]. Les Joinvillois refusèrent, affirmant qu’ils n’avaient pas de chariot à disposition et que ceux qui en possédaient avaient déjà excédé leur temps de corvée depuis quinze jours que le duc était « journellement menans les toiles de lieu en lieu ». Ils louèrent alors douze chevaux et trois charrettes pour neuf livres tournois, puis présentèrent la note au duc… qui refusa de la payer. L’épisode résume à merveille tant la lourdeur logistique de la chasse aux toiles que son intégration dans les rapports de pouvoir locaux.
51Le jeu en valait néanmoins la chandelle. Autour de l’accourre se pressaient de nobles personnes qui n’avaient pas pris part à la poursuite – les dames, notamment – mais qui souhaitaient admirer l’habileté et la vaillance des veneurs à l’instant le plus dramatique : la mise à mort de l’animal. La disposition des toiles dans la forêt et le savant travail de rabattage effectué par les chasseurs et les chiens conduisaient le cerf ou le sanglier au centre d’une arène éphémère que les spectateurs dominaient depuis une tribune ou leur carrosse. Pris au piège, sans espoir de s’échapper, l’animal traqué devait alors faire face à son destin et affronter les mâtins et lévriers, puis les gentilshommes venus l’achever. Dès lors, la mort de l’animal au centre de l’accourre était transmuée en un spectacle délectable offert à des personnes de qualité pour célébrer la puissance ducale. Elle devenait un pur effet de la magnificence du duc de Guise qui le mettait au rang des plus grands princes d’Europe.
L’autre spectacle de la chasse : les motifs cynégétiques au château
52La brûlante passion des Guise pour la chasse trouvait encore à s’exprimer une fois la curée donnée aux chiens, les toiles repliées et les chevaux rentrés à l’écurie. Leur cadre de vie quotidien multipliait en effet les renvois plaisants à cette activité et la donnait à voir et à entendre à toutes les personnes amenées à franchir le seuil de la résidence ducale. La musique, omniprésente dans l’existence d’un puissant seigneur de la Renaissance, permettait de prolonger le plaisir et l’excitation de la poursuite jusque dans les murs du château. Il serait bien étonnant que François de Lorraine n’ait jamais demandé à Clément Janequin, devenu son maître de chapelle en 1549, de faire chanter et jouer pour son plaisir l’un de ses plus grands succès, la chanson de La Chasse [91]! Cette célèbre chanson invitait les « gentilz veneurs » – c’est-à-dire les nobles veneurs – à revivre une chasse royale au cerf en forêt de Fontainebleau, de la quête jusqu’à l’hallali. Fidèle au principe imitatif caractéristique de l’art musical profane du xvie siècle, Janequin y avait mis en musique les ordres des piqueurs, les encouragements prodigués à la meute et les aboiements des chiens. Comment le duc de Guise n’aurait-il pas vibré à cette évocation sonore, lui qui aimait à lire les récits des exploits de ses chiens ? Comment n’aurait-il pas souscrit à ces quelques vers : « Sur tous soulas, plaisir et lyesse, / Sur tous souhaitz qu’amour pourchasse, / Sur tous esbatz qui sont en noblesse, / Sur deduitz n’est que la chasse » ?
53Il était encore possible aux Lorrains de revivre leurs plus belles aventures cynégétiques simplement en regardant autour d’eux. S’il était alors courant de trouver suspendues aux murs des palais des tapisseries ayant pour motif une scène de chasse, les Guise pouvaient se targuer de posséder la plus belle de toutes ces tentures : la fameuse série des Chasses de Maximilien, parfois surnommées Belles chasses de Guise [92]. La date et la raison de l’entrée de cette tapisserie dans les collections ducales demeurent aujourd’hui mystérieuses puisqu’elle fut tissée pour les Habsbourg à Bruxelles au début des années 1530 sur des cartons du peintre Bernard van Orley. Diverses hypothèses ont bien été avancées – prise de guerre de François de Lorraine lors du siège de Metz, cadeau diplomatique de Charles-Quint au cardinal Jean de Lorraine ou à son neveu le cardinal Charles de Lorraine – mais sans qu’aucune preuve décisive n’ait été apportée. Le fait est que la première mention assurée de sa présence dans les possessions des Guise date de 1589, dans un inventaire des biens les plus précieux de la maison mis à l’abri après l’assassinat d’Henri de Lorraine (décembre 1588) [93]. Au xviie siècle, l’historien Sauval put l’admirer dans la grande salle de l’hôtel de Guise, à Paris [94].
54Cette somptueuse tapisserie, divisée en douze tentures représentant chacune un mois de l’année, retraçait le déroulement d’une chasse au faucon (mars-avril), d’une chasse au cerf (mai-octobre) et d’une chasse au sanglier (novembre-janvier). Le statut éminent de la chasse au cerf était visible dans la place qui lui était accordée au sein de la série (six tentures sur douze) et par la fidèle mise en images d’une journée consacrée à cette activité : halte des veneurs dans la forêt (mai), repas dans une clairière (juin), rapport des valets ayant passé les premières heures du jour en quête de la proie (juillet), course des limiers ayant lancé le cerf (août ; figure 4), « bat-l’eau », soit la prise du cerf après qu’il se fut jeté dans un étang dans une ultime tentative d’échapper à ses poursuivants (septembre) et enfin curée (octobre). Chaque scène était agrémentée de détails pittoresques insufflant de la vie à l’image et rappelant à l’observateur les joies et plaisirs d’une partie de chasse réussie (figure 5). Dans la tenture du mois de mai, par exemple, l’un des veneurs trompait l’attente en lutinant une accorte demoiselle pendant que les serviteurs, au loin, faisaient rôtir de belles volailles sur un feu ardent. La tenture suivante faisait passer des plaisirs de la chair à ceux de la bonne chère puisque les nobles convives commençaient à se regrouper autour d’une table où se pressaient volailles et pâtés bien dorés, pendant qu’un valet se penchait pour attraper un flacon de vin mis à rafraîchir dans le cours d’une petite rivière ; l’un des chasseurs caressait avec tendresse la tête d’un gros chien, tandis qu’un lévrier attaché à un arbre tendait le museau vers la table dans l’espoir, sans doute, d’attraper quelque bon morceau.
55L’expressivité extraordinaire des personnages et des animaux, la qualité du rendu du mouvement, comme le soin accordé à la représentation du paysage, transportaient l’observateur en pleine forêt de Soignes en compagnie des chasseurs de la maison de Habsbourg. La dignité impériale de ces chasseurs de tissu compensait le fait que la tapisserie ne représentât pas les Guise eux-mêmes, aux prises avec le grand cerf d’Effincourt ou toute autre noble gibier de leurs terres de Champagne. Tout visiteur du xvie siècle amené à contempler Les Chasses de Maximilien en connaissait la provenance et ne pouvait que constater la puissance d’une famille ayant pu mettre la main sur un tel chef-d’œuvre. Tendue dans la grande salle de leur hôtel parisien, la tapisserie faisait revivre aux Guise les plaisirs de leurs propres chasses tout en matérialisant leur importance sur l’échiquier européen.
56La tenture finale de la série proposait en outre un véritable manifeste de la chasse comme activité noble et vertueuse (figure 6). La scène du mois de février tranchait en effet avec celles des autres mois de l’année puisque le décor forestier y avait été abandonné pour le cadre du palais urbain de deux figures royales, le roi Modus et la reine Ratio. Ces deux personnages allégoriques étaient les héros du Livre du roy Modus et de la reine Racio, rédigé vers 1370 par Henri de Ferrières, dont la première partie, consacrée à la chasse, est considéré comme le premier traité cynégétique de langue française [95]. Dans cet ouvrage écrit sous forme de dialogue, Modus (« la Mesure » ou « la Pratique ») enseignait à ses disciples l’art de la vénerie et de la fauconnerie et Ratio (« la Raison » ou « la Théorie ») intervenait par quelques remarques à portée moralisante. La dimension didactique et morale du traité était reprise dans la tenture finale des Chasses de Maximilien puisque les chasseurs s’étaient assemblés pour rendre hommage au couple royal siégeant devant une statue de Diane, déesse de la chasse, et foulant au pied l’oisiveté et la gourmandise. Un texte en latin inscrit dans un grand cartouche à fond bleu explicitait la scène :
« SI NIHIL QUOD RECTU EST, ET BENE VIVENS NIL NOCEAS PRESTANS ONIBUS OFFICIUM QUID MODERATE MODO ET DNA RATIONE IU BETE VENANDI STUDIO PULCHRIUS ESSE POTEST. OCA EXPERS ET GULETTE STUDIOSUS HONESTI INCOLUMEM REDDIS MEBRA LABORE FOUES HOC EXERCITIO LETATER DUCITUR ANNUS TRANSIGIT ET SANOS VITA BEATA DIES [96]. »
58La tenture reprenait là le lieu commun de la chasse comme préservatif des vices nés de l’oisiveté. Non seulement elle occupait le corps et l’esprit à une noble cause, les détournant de passions plus vulgaires, mais elle enseignait aussi la patience et le goût de l’effort nécessaires à la réalisation de grandes ambitions. Xénophon affirmait déjà dans L’Art de chasser :
« Chez les anciens, ceux des disciples de Chiron que j’ai mentionnés [Nestor, Méléagre, Thésée, Ulysse, Énée, Achille…] ont commencé, étant jeunes, par la chasse, pour acquérir un grand nombre de nobles connaissances. De là leur vint la haute vertu qui leur vaut aujourd’hui encore l’admiration. Et cette vertu, tout le monde en est épris mais, comme on ne peut l’atteindre que par l’effort, la majorité la repousse [97]. »
60Gaston Fébus et Henri de Ferrières ne disaient pas autre chose, dans un langage chrétien qui faisait de la chasse un moyen de lutter contre les tentations et de faire ainsi son salut. Ce topos, venant dans Les Chasses de Maximilien après onze tentures ayant vanté les joies bien terrestres de la chasse, invitait à relire l’ensemble du cycle à la lumière de cette recommandation morale. Le chasseur était alors appelé à dépasser le plaisir des sens et à dominer ses passions pour se transcender dans l’activité la plus digne d’un cœur noble. La chasse élevait l’âme noble jusqu’à son plein accomplissement en la consacrant à la vertu. La tapisserie condensait ainsi de façon saisissante la place de l’art de la chasse dans le « vivre noblement » de la Renaissance.
61***
62La chasse était bien plus qu’un simple exercice destiné à entretenir le corps noble dans ses compétences militaires en temps de paix. Elle était tout à la fois un conditionnement social du corps, un discours de l’excellence « naturelle » de la noblesse, une mise à l’épreuve de ses vertus chevaleresques, une affirmation du pouvoir seigneurial, une démonstration de puissance économique et sociale et une occasion de magnificence. Bien sûr, elle était aussi beaucoup moins que cela. Elle correspondait parfaitement aux goûts d’hommes d’action férus de vie au plein air et de dépense physique, habitués à la violence et au sang, appréciant les aspects de pure sociabilité de cette pratique. Dans cette jonction du symbolique et du sensible, de la représentation et du mode de vie, elle touchait en fin de compte à l’essence même de la culture, comprise au sens anthropologique de l’ensemble des façons de penser, de sentir et d’être. À cheval, lancé à la poursuite d’un cerf à travers les profondeurs de ses forêts, le duc de Guise ressentait jusqu’aux tréfonds de son être l’appel de sa noblesse.
Dossier Iconographique
Anonyme, La Vision de saint Hubert (1er quart du xviie siècle)
Anonyme, La Vision de saint Hubert (1er quart du xviie siècle)
Huile sur toile. 141 cm × 169 cm Église Notre-Dame, Joinville.Ce tableau, orné des armes de la maison de Guise, reprend la légende du cerf miraculeux apparu à saint Hubert dans un décor évoquant la forêt de Joinville et, au loin, le château des Guise.
Les Chasses de Maximilien, tenture du mois de décembre (détail), vers 1530. La mise à mort du sanglier
Les Chasses de Maximilien, tenture du mois de décembre (détail), vers 1530. La mise à mort du sanglier
Atelier bruxellois, d’après des cartons de Bernard Van Orley. Musée du Louvre, Paris. © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Droits réservés. La résistance acharnée du sanglier en faisait un adversaire particulièrement dangereux et exigeait du chasseur un grand courage physique pour achever l’animal à l’épée ou à l’épieu avant qu’il ne blesse ou tue les chiens. On notera que l’un des chiens représentés ici était revêtu d’une sorte de cotte de maille destinée à le protéger des défenses du sanglier.Philippe IV chassant le sanglier (La Tela real), Diego Velasquez (vers 1632-1637)
Philippe IV chassant le sanglier (La Tela real), Diego Velasquez (vers 1632-1637)
Huile sur toile. 182 cm × 302 cm. National Gallery, Londres. © The National Gallery, Londres, Dist. RMN-Grand Palais / National Gallery Photographic Department. Le déploiement de longs panneaux de toile de chasse permettait de canaliser les déplacements du gibier jusqu’à l’aire de massacre, l’accourre, où les spectateurs attendaient d’assister à la mise à mort de l’animal.Les Chasses de Maximilien, tenture du mois d’août, vers 1530
Les Chasses de Maximilien, tenture du mois d’août, vers 1530
La course des limiersAtelier bruxellois, d’après des cartons de Bernard Van Orley. Musée du Louvre, Paris. © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Daniel Arnaudet. La plus prestigieuse des chasses, celle du cerf, occupe six des douze panneaux des Chasses de Maximilien.
Les Chasses de Maximilien, tentures des mois de mai et juin, vers 1530
Les Chasses de Maximilien, tentures des mois de mai et juin, vers 1530
La tapisserie célèbre avec un luxe de détails pittoresques et une grande force expressive les plaisirs accompagnant la chasse : intimité amoureuse, convivialité du repas, plaisir gustatif, rapports affectueux avec les chiens.Les Chasses de Maximilien, tenture du mois de février, vers 1530
Les Chasses de Maximilien, tenture du mois de février, vers 1530
Atelier bruxellois, d’après des cartons de Bernard Van Orley. Musée du Louvre, Paris. © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Daniel ArnaudetLa dernière tenture de la tapisserie fait entrer le spectateur, à la suite des veneurs, dans le palais du roi Modus et de la reine Ratio. Les souverains imaginés au xive siècle par Henri de Ferrières exhortent les gentilshommes à la vertu par la pratique de la chasse.
Sources
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Mots-clés éditeurs : culture, forêt, chasse, XVIe siècle, Guise, arts, France, animal, noblesse
Date de mise en ligne : 27/12/2012
https://doi.org/10.3917/hsr.038.0085Notes
-
[1]
Cité dans Solnon, 1987, p. 58 (la citation date de 1539).
-
[2]
Claude de Lorraine, premier duc de Guise, fut grand veneur à partir de 1526 ; son fils François reçut la même charge par lettres du 4 juin 1556, charge dont il se démit plus tard en faveur de son frère, le duc d’Aumale, tout en continuant à jouir des gages jusqu’à sa mort en 1563 (Sainte-Marie, 1733, t. viii, p. 731-732). Les grandes histoires de la chasse écrites au xixe siècle ne manquent jamais, à ce titre, de consacrer quelques pages aux Lorrains (Dunoyer de Noirmont, 1867, t. i, p. 168-169 ; La Ferrière, 1869, p. 8-12) ; Auguste de Chabot les comptait, lui, parmi les « célébrités de la vénerie française » (Chabot, 1891, p. 32).
-
[3]
Un gruyer était un officier chargé de veiller au respect des droits d’usage dans les forêts.
-
[4]
Bibliothèque nationale de France (désormais BnF), manuscrit français (désormais fr.) 20471, fol. 5.
-
[5]
Machiavel, 1513, chap. xiv.
-
[6]
Castiglione, 1538, fol. 30 v°.
-
[7]
Isambert, 1829, p. 507.
-
[8]
BnF, fr. 5802, fol. 57 v°.
-
[9]
Xénophon (1), chap. xii et Xénophon (2), i, 2, 10.
-
[10]
Salvadori, 1996, p. 20.
-
[11]
Kaminsky, 1993.
-
[12]
Pour une analyse convergente, bien que menée de façon différente, voir Rösener, 2000.
-
[13]
Brioist, 2002, p. 57-59.
-
[14]
Pastoureau, 2000.
-
[15]
Reynaud, 1983.
-
[16]
Salvadori, 1996, p. 80-81.
-
[17]
du Fouilloux, 1614, p. 18. La croissance des bois annuels du cerf commence vers la fin du mois de mars et se termine en juillet-août (voire en octobre, en fonction de l’âge de l’animal). Au rythme d’environ 1 cm par jour, l’essentiel de la ramure est donc déjà reconstitué à la mi-juin (Crigel, Balligand et Heinen, 2001, p. 27-29).
-
[18]
BnF, fr. 8181, fol. 160 v° et 180 r°.
-
[19]
BnF, fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20550, fol. 24 ; fr. 20513, fol. 23.
-
[20]
BnF, fr. 20541, fol. 39. Le grand cerf d’Effincourt était presque une figure locale puisque l’on retrouve mention de lui dans une lettre de François de La Chaussée datée de juin 1553 : « Votre dit gruyer me mena dimanche dernier aux boys d’Effincourt où il me monstra et de bien près le vieil cerf dudit Effincourt qui est le plus grand cerf et qui a la plus belle teste qui soit en tout ce pays cy » (BnF, fr. 20470, fol. 117).
-
[21]
du Fouilloux, 1614, p. 18.
-
[22]
BnF, fr. 8181, fol. 171 v° et 181 v°.
-
[23]
BnF, collection Clairambault (désormais Clair.) 346, fol. 255 ; fr. 20544, fol. 15.
-
[24]
BnF, fr. 20529, fol. 142.
-
[25]
Arch. Nat., N iii, Haute-Marne, n° 4 (Plan par terre du château de Joinville).
-
[26]
BnF, fr. 20544, fol. 15.
-
[27]
BnF, fr. 3231, fol. 83 ; BnF, fr. 8181, fol. 67 v° et 81 v°.
-
[28]
Pastoureau, 2000.
-
[29]
Binet, 1621, p. 24.
-
[30]
du Fouilloux, 1614, p. 56.
-
[31]
BnF, fr. 20467, fol. 151 ; fr. 20552, fol. 152-153. En janvier 1557, Henri de Lorraine, alors prince de Joinville, avait tout juste sept ans.
-
[32]
BnF, fr. 8181, fol. 182 r°.
-
[33]
du Fouilloux, 1614, p. 78. La remarque sur la jeune compagne est tirée du chapitre lxii du traité – manquant sur l’exemplaire numérisé visible sur Gallica – et citée dans Salvadori, 1996, p. 376.
-
[34]
BnF, fr. 8181, fol. 437 v°.
-
[35]
Les lettres comportant des récits détaillés de chasse au héron et/ou au milan sont en effet très nombreuses dans les archives des Guise. Voir notamment : BnF, fr. 20541, fol. 120, 124 et 132 ; fr. 20514 ; fol. 80-81, fr. 20545, fol. 103.
-
[36]
Salvadori, 1996, p. 88-89.
-
[37]
BnF, fr. 20470, fol. 117 ; fr. 20550, fol. 41-42 ; Clair. 344, fol. 167 ; Clair. 346, fol. 255. Archives du château de Chantilly (désormais acc), 1-A-14 (Dépense extraordinaire de mars 1582).
-
[38]
Pour plus de détails sur les chiens des Guise (races, pratiques d’élevage et de dressage, conditions de vie…), voir Meiss-Even, à paraître.
-
[39]
du Fouilloux, 1614, chap. ii ; Charles IX, 1625, chap. x. BnF, fr. 20530, fol. 55 ; fr. 20550, fol. 41-42 ; Clair. 347, fol. 256 et 295.
-
[40]
Charles IX, 1625, chap. x.
-
[41]
BnF, fr. 20530, fol. 55 ; fr. 20544, fol. 15 ; fr. 20550, fol. 41-42 ; Clair. 346, fol. 255 ; Clair. 347, fol. 256.
-
[42]
BnF, fr. 8181, fol. 78 v° et 89 v° ; fr. 20467, fol. 151-157 ; fr. 20472, fol. 151, 171 et 213 ; fr. 20512, fol. 7 ; fr. 20534, fol. 38 ; fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20544, fol. 130 ; fr. 20554, fol. 111 ; Clair. 341, fol. 224 ; Clair. 344, fol. 46 et 167 ; Clair. 348, fol. 56 ; acc, 1-A-14 (dépense extraordinaire de juillet 1581) et 1-GE vii-15.
-
[43]
Vigarello, 2004, p. 29-31 ; Pérouse, 1990, p. 61-76.
-
[44]
Liébault, 1582, p. 6.
-
[45]
BnF, fr. 20530, fol. 55 ; fr. 20540, fol. 23 ; fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20544, fol. 15.
-
[46]
BnF, fr. 20530, fol. 55.
-
[47]
Fébus, 1507, chap. xv.
-
[48]
Jouanna, 1976.
-
[49]
BnF, Clair. 344, fol. 46.
-
[50]
Jouanna, 1976, p. 124-126.
-
[51]
Francières, 1567, p. 4.
-
[52]
Salvadori, 1996, p. 98-99.
-
[53]
BnF, fr. 5802, fol. 57 v°.
-
[54]
BnF, fr. 20515, fol. 104 ; fr. 20530, fol. 86 ; fr. 20534, fol. 38 ; fr. 20540, fol. 78 et 79 ; fr. 20544, fol. 47 et 130 ; fr. 20545, fol. 87 et 149 ; Clair. 344, fol. 167 ; Clair. 347, fol. 256 et 295.
-
[55]
BnF, fr. 20471, fol. 227 ; fr. 20513, fol. 119 ; fr. 20517, fol. 53 ; fr. 20540, fol. 78 ; fr. 20541, fol. 120-124-132 ; fr. 20545, fol. 103 ; fr. 20550, fol. 43 ; fr. 20554, fol. 15 ; fr. 20641, fol. 12 ; Clair. 346, fol. 236 ; Clair. 352, fol. 270-271.
-
[56]
BnF, fr. 20541, fol. 124. « Saure » et « hagard » sont des termes relatifs à l’âge auquel l’oiseau a été capturé : l’oiseau saure l’a été avant sa première mue (son pennage était alors encore saure, c’est-à-dire d’un jaune brun), au contraire de l’oiseau hagard qui a déjà mué une fois (Nicot, 1606) ; le second est réputé plus agressif et plus difficile à dresser en raison de sa plus longue vie en liberté.
-
[57]
BnF, fr. 20545, fol. 103 ; Clair. 349, fol. 256 ; Clair. 352, fol. 270 et 271.
-
[58]
La notion de « communautés imaginées » (imagined communities) a été proposée au début des années 1980 par l’historien Benedict Anderson pour renouveler la définition de la nation : « [La nation est] une communauté politique imaginaire, et imaginée comme intrinsèquement limitée et souveraine. Elle est imaginaire (imagined) parce que même les membres de la plus petite des nations ne connaîtront jamais la plupart de leurs concitoyens : jamais ils ne les croiseront ni n’entendront parler d’eux, bien que dans l’esprit de chacun vive l’image de leur communion. […] Elle est imaginée comme une communauté parce que, indépendamment des inégalités et de l’exploitation qui peuvent y régner, la nation est toujours conçue comme une camaraderie profonde, horizontale » (Anderson, 1996, p. 19-21). Sur le don comme reconnaissance réciproque du statut noble, voir Davis, 2003, p. 57-70 et Neuschel, 1989, chap. 3-4.
-
[59]
Schalk, 1996.
-
[60]
Salvadori, 1996, p. 146.
-
[61]
BnF, fr. 8181, fol. 67 v°, 74 r°, 81 v°, 86 r°, 172 v°, 180 r° et 199 r° ; Clair. 347, fol. 256.
-
[62]
Belleau, 1565, p. 76. Nicot définit le relais ainsi : « C’est un terme de venerie, pour les chiens qu’on tient ordonnez en certain lieu par où la beste doit fuir, pour au passer les lascher et haler apres, et rafraichir ceux qui la couroyent. Il se prent aussi pour le lieu où les chiens du relais sont stationnez ». L’assemblée est la réunion pendant laquelle les chasseurs mangent et écoutent les rapports relatifs au gibier avant de commencer la chasse à courre.
-
[63]
Buridant, 2007, p. 164-165.
-
[64]
BnF, fr. 8181, fol. 58 r°, 198 v°, 213 r°.
-
[65]
BnF, fr. 20470, fol. 117.
-
[66]
BnF, Clair. 347, fol. 256.
-
[67]
Ibid., fol. 295.
-
[68]
Ibid., 348, fol. 52.
-
[69]
BnF, fr. 20550, fol. 41-42.
-
[70]
BnF, Clair. 346, fol. 255 et fr. 20470, fol. 117.
-
[71]
Salvadori, 1996, p. 208 ; Derex, 2007, p. 251-267.
-
[72]
BnF, fr. 20541, fol. 39 ; fr. 20515, fol. 87 ; fr. 20544, fol. 15 ; fr. 20470, fol. 117 ; fr. 20529, fol. 142.
-
[73]
BnF, fr. 20544, fol. 15.
-
[74]
Ibid., fol. 15 v°.
-
[75]
BnF, fr. 20515, fol. 87.
-
[76]
BnF, fr. 20544, fol. 15 ; fr. 20470, fol. 117.
-
[77]
BnF, Clair. 347, fol. 295.
-
[78]
Ibid., fol. 157.
-
[79]
Ibid., 347, fol. 256.
-
[80]
BnF, fr. 8181, fol. 67 v°, 74 r°, 81 v°, 86 r°, 103 v°, 159 r°.
-
[81]
Ibid., fol. 178 r°-188 v°.
-
[82]
Sur cette chasse, voir d’Anthenaise, 2007.
-
[83]
d’Anthenaise, 2007, p. 75.
-
[84]
BnF, fr. 8181, fol. 269 r° et 293 r°.
-
[85]
BnF, Clair. 347, fol. 295.
-
[86]
BnF, fr. 8181, fol. 188 r° ; fr. 20513, fol. 23 ; fr. 20530, fol. 55.
-
[87]
En 1552, cinq archers des toiles mirent deux jours à tendre les panneaux (BnF, fr. 8181, fol. 402 r°). L’année suivante, les mêmes archers passèrent plusieurs jours à installer les toiles pour prendre finalement treize « bestes noires » (ibid., fol. 437 v°).
-
[88]
Ibid., fol. 285 v°-286 r° et 370 r°v°.
-
[89]
En 1527, Claude de Lorraine paya 40 sous, soit 2 livres, à « des bonnes gens qui [avaient] gardé les loups estans aux toilles » : BnF, fr. 8181, fol. 90 v°.
-
[90]
Bibliothèque de Joinville, collection Lemoine, pièce n° 413. Je remercie chaleureusement M. Yvon Gaillet de m’avoir signalé l’existence de ce document et de m’en avoir procuré une transcription.
-
[91]
Barbier, 1997 ; Janequin, 1988.
-
[92]
Achetées par Mazarin en 1654, Les Chasses de Maximilien entrèrent dans les collections royales sous Louis XIV. Elles sont aujourd’hui conservées et exposées au musée du Louvre (inv. OA 7314 à 7325). Sur cette tapisserie, voir Schneebalg-Perelman, 1982, Delmarcel, 1984, Balis, 1993.
-
[93]
Arch. Nat., K 529 A, fol. 1 r°.
-
[94]
Sauval, 1724, t. iii, p. 10.
-
[95]
Ferrières, vers 1370.
-
[96]
« Si tu n’omets rien de ce qui est juste, si vivant bien tu ne fais point de mal, accomplissant envers tous ton devoir, que peut-il y avoir de plus beau que la pratique de la chasse, réglée par Modus et dirigée par dame Ratio ? Préservé de l’oisiveté et de la gourmandise, t’occupant de ce qui est honnête, tu te maintiendras sain et sauf, tu réchaufferas tes membres par le labeur ; l’année passera joyeusement dans cet exercice, et ta vie s’écoulera heureusement en jours pleins de santé. »
-
[97]
Xénophon (1), chap. xii, 18.