Notes
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[*]
Professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Barcelone, Departement d’Història Contemporània, Facultat de Geografia i Història, C/ Montalegre 4-6, 08001-Barcelona. Courriel : <llferrer@ ub. edu>.
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[1]
Ferrer Alos, 1993, 1998, 2004. Construit sur le latin latifundium, le minifundio est une petite exploitation agricole peu rentable.
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[2]
Lison Tolosana, 1976, p. 38-49 ; Mikelarena, 1992b, p. 29-30 et Contreras, 1991.
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[3]
De la même manière, il y a des zones de fuero comme la Navarre où se mêlent dans un espace restreint des pratiques égalitaires et inégalitaires.
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[4]
Cartes dans Béaur, 2000, p. 43 et Yver, 1966. L’historiographie française récente a beaucoup apporté pour comprendre cette complexité : Le Roy Ladurie, 1972 ; Bouchard, Goy et Head-König, 1998.
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[5]
En France, ces pratiques ont été largement étudiées : Chiva et Goy, 1981 ; Claverie et Lamaison, 1982 ; Collomp, 1983 ; Fauve Chamoux, 1984 ; Zink, 1993.
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[6]
Terradas, 1980 ; To, 1993.
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[7]
Au niveau juridique, des décisions ont été prises pour ratifier ce que la société catalane développait dans la pratique. C’est en 1343 que la légitime est réduite à un quart et, aux Cortes de Perpignan de 1351, on reconnaît l’existence de l’heretament : Broca de Amell, 1987, p. 368-369 ; Puig Salellas, 1996, p. 131.
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[8]
Il ne reste à payer qu’une somme symbolique appelée drets de casa (droits de maison), mais jamais réclamée. Elle maintient le lien entre le cadet et la maison.
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[9]
Dans certaines familles, faute d’héritier mâle, c’est une fille (la pubilla) qui devient responsable du patrimoine en tant qu’aînée. Les rôles sont inversés et certains cadets (hommes) peuvent occuper la place traditionnelle des filles mais la situation est rare.
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[10]
Il existe une institution appelée associació de compres i millores près de Tarragone ou Tortosa et convinença ou mitja guadanyeria dans le Val d’Aran : Broca de Amell, 1987, p. 832-844.
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[11]
Moreno et Zabalza, 1999, et Mikelarena, 1992a et 1995, p. 309-315.
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[12]
Robada : mesure navarraise égale à 8,98 ares.
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[13]
En Navarre, le système de l’héritier unique s’est développé autour d’Aoiz, dans la province de Pampelune, et dans une bonne partie de celles d’Estella et de Tafalla : Mikelarena, 1992a et 1995, p. 318.
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[14]
À l’exception des 19 villes qui font partie de la seigneurie de Biscaye régies par le droit castillan : Navajas Laporte, 1975, p. 245-250.
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[15]
Ibañez et al., 1994, p. 39-41 ; Navajas Laporte, 1975, p. 248-249.
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[16]
Voir Gonzales Portilla et Urritikoetchea, 2003 ; Homobono, 1991 ; Ibañez et al., 1994 ; Urritikoetxea, 1992. Sur le Pays Basque français voir Arrizabalaga, 1997, 2002a, 2002b.
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[17]
En Navarre, les dots masculines sont en général plus faibles que celles des filles, les garçons semblent plus aptes à les faire fructifier : Moreno et Zabalza, 1999.
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[18]
Les études démographiques sur Irún ou Bergara montrent que dans les zones d’habitat dispersé ou de hameaux, le nombre de mariages est extrêmement faible, le taux de célibat, l’âge du mariage très tardif pour les deux sexes, une forte différence d’âge entre les conjoints et des secondes noces rares : Ibañez et al., 1994 ; Urritikoetxea, 1992.
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[19]
Gacto, 1987.
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[20]
Garcia Fernandez, 1994, p. 23.
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[21]
Voir pour le nord du Portugal : O’Neill, 1987, p. 306-340 ; et pour Santa María del Monte en León : Behar, 1986, p. 68-90.
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[22]
Navajas Laporte, 1975, p. 90-105.
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[23]
Urrutikoetxea, 1992.
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[24]
Gomez Pellon, 1991 ; Pedregal, 1981.
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[25]
Navajas Laporte, 1975, p. 253.
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[26]
Dans les Asturies, on observe des pratiques complexes : alors que le système de l’héritier unique est en principe majoritaire, dans le hameau d’Escobinos, on pratique le partage égalitaire entre les frères et sœurs et la recomposition patrimoniale se fait grâce au mariage, « au troc » entre parents très proches ou grâce au rachat par l’un des frères ou sœurs des parts des autres (paiement différé de la réserve héréditaire). Fernandez et Lellep Fernandez, 1988, p. 123-142.
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[27]
Ce n’est que dans certaines zones d’Orense que l’on pratique le partage égalitaire au sens strict. Dans le reste le système de mejora corta.
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[28]
Saavedra, 1988, p. 111-113.
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[29]
Lison Tolosana, 1971, p. 173-1830 ; Saavedra, 1988, p. 115-129 et 2002, p. 147-149.
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[30]
Lanza Garcia, 1988.
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[31]
De nombreux travaux sur le système castillan se contentent de quantifier les types de testaments et déduisent les pratiques d’après le choix du testateur. En réalité, dans un système légal si ouvert, il faut reconstruire les familles et les patrimoines pour comprendre la reproduction sociale.
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[32]
D’après Ceballos Cuerno, 1999, p. 55-68, qui a étudié la vallée de Curiezo en Cantabrie, la tendance égalitaire initiale évolue du fait de l’apparition des legs comme forme de pratiques non égalitaires. Toutefois, on n’en connaît pas le montant et il est difficile d’affirmer qu’il s’agit de la pratique de l’héritier unique. Les mariages « de troc » et les mariages entre consanguins évoquent plutôt des pratiques égalitaires. Au centre de la cordillère cantabrique le système familial rappelle celui des Asturies avec la création d’une société de pan y mantel (mangeant à table bien garnie) : Lopez Moran, 1981, p. 253-258.
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[33]
Sur le majorat, voir les travaux classiques de Clavero, 1989 et Perez Picazo, 1990. Pour Martínez Lopez, 1996, la bourgeoisie grenadine ne pratique ni le majorat ni la mejora du 1/3 et du 1/5e : elle organise le partage de manière égalitaire. En Castille comme autour de Grenade, pour éviter une division excessive, la bourgeoisie recourt à diverses solutions : avances sur héritage, partage de certains biens en fonction du sexe, réduction des familles où est possible de trouver épouse ou taux de célibat élevé : Heran, 1980, p. 215-244. Dans d’autres cas, le majorat et la concentration des biens libres sur un des fils conduisent à réserver à un seul héritier 92,7 % de tous les biens : Parias Sainz de Rozas, 1991.
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[34]
Dedieu, 2002. Sur la création de majorats par des commerçants de Murcie, voir Velasco Hernandez, 1997 ; sur Valence, voir Casey, 1991, p. 64-67. Voir en outre la famille Espadero-Paredes d’Estrémadure : Teston et Sanchez, 2002.
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[35]
Au cours des dernières années, l’historiographie française, pour qui les systèmes égalitaires conduisent à la destruction des exploitations, a révisé ce jugement en cherchant à en comprendre la logique : Derouet, 1982, 1989, 1993, 1994 et 1997. Sur les zones où domine le partage égalitaire : Augustins, 1989 ; Barthelémy de Saiziet, 1985 ; Bonnain et al.,1992 ; Pingaud, 1971 et 1995 ; Rolley, 1998a.
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[36]
À la fin du xviiie siècle dans le Salnés galicien, on trouve 3,96 héritiers par testament : Perez Garcia, 1991, p. 300-301. Vers 1750 à Valladolid, on chiffre à 2,9 enfants la moyenne des familles ayant une descendance : Garcia Fernandez, 1994, p. 271. Parallèlement, 20,1 % des familles de commerçants de Cadix n’ont pas d’enfants et 34,6 %, 2 au plus : Fernandez Perez, 1997, p. 243-268.
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[37]
Le système de partage égalitaire a été étudié pour l’essentiel à partir des desiderata des testateurs mais non des pratiques signalées par les inventaires, les mémoires d’imposition, les partijas ainsi que d’autres documents du même ordre. Une étude extrêmement détaillée de cette documentation à la Vega del Esla en León montre que les acquêts représentent un montant important dans les comptes du fisc sur lesquels se font les partages : Pérez García, 1998. Voir aussi les calculs effectués par Bartolome Bartolome, 2002, p. 183.
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[38]
Cf. le cas de la société familiale galicienne du Morrazo : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 453-458.
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[39]
Une analyse des héritiers à Cáceres souligne que 52,3 % sont les enfants, 18,3 % les conjoints, 14,4 % les frères et sœurs, 8,5 % d’autres membres de la famille : Santillana Perez, 1992. Au xviiie siècle dans le Morrazo galicien, 10,3 % des testaments sont signés par des célibataires et les biens sont pour l’essentiel distribués entre neveux et nièces (9) et frères et sœurs (4) : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 451. Dans les Rías Baixas, les célibataires et les personnes mariés sans enfants désignent comme héritiers les conjoints (7), les frères et sœurs (10), les neveux et nièces (17), les cousins et cousines (3) ainsi que les voisins (8) : Perez Garcia, 2002, p. 47-104. Dans la Tierra de Montes, 22,3 % des testaments sont faits par des couples mariés sans enfant ou des célibataires avec comme héritiers les parents proches (35,5 %), les neveux et nièces (29 %), les frères et sœurs (22,6 %) ou conjointement les frères, les neveux et nièces (6,4 %) : Fernandez Cortizo, 1988, p. 158.
Dans le León, 7,2 % sont des célibataires. 24,8 % des couples sont sans enfant, 27,02 % en ont seulement un et 19,86 % deux : Perez Garcia, 1998. La moyenne des enfants par testament est de 2,19, chiffre très proche de la situation optimum de reproduction sociale dans la logique du système successoral.
García Fernandez, 1994, p. 188 et 271, fait les mêmes constatations pour Valladolid. Les célibataires et les couples mariés sans enfant participent au rééquilibrage du système. Dans les testaments étudiés par lui, 51,1 % des testateurs n’ont pas d’enfant et, dans le reste, 12 % n’en ont qu’un et 12,8 % deux. Cependant le nombre de testaments sans enfant est trop élevé, peut-être parce que les célibataires et les ecclésiastiques ont été pris en compte. -
[40]
Voir, pour le nord du Portugal O’Neill, 1987, p. 306-340 ; pour Becedas (Madrid) Brandes, 1975, p. 107-120 ; pour Cuenca, Reher, 1996, p. 76-77 ; pour Murcie Chacon Jimenez, 1990c ; pour l’Andalousie Moreno, 1972, p. 279-284.
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[41]
Voir, pour le cas de Cáceres en Estrémadure Santillana Perez, 1992, p. 106. Pour le León, Behar, 1986, p. 104-109 ; Bartolome Bartolome, 2002, p. 183. Sur Valladolid, Garcia Fernandez, 1994, p. 255. Pour Pozuelo (Madrid), Barbazza, 1998, p. 87-102. Pour Murcie, Chacon Jimenez, 1990c. Pour Grenade, Casey et Vincent, 1987, p. 192.
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[42]
Un dicton résume bien cette situation : « Los suegros son como las patatas, no dan fruto hasta que estan bajo tierra » (Les beaux-parents sont comme les pommes de terre, ils ne donnent pas de fruit avant d’être sous terre) : Behar, 1986, p. 68.
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[43]
O’Neill, 1987, p. 288-305. Lison Tolosana, 1971, p. 312-313, décrit la faible importance des mariages à Orense, qui ne se font que presque cachés.
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[44]
Pour une description des pratiques nato-locales voir Lison Tolosana, 1971, p. 182. Voir le cas de Fontelas dans le nord du Portugal : O’Neill, 1987, p. 288-305. Pour le cas d’Orense, voir Lison Tolosana, 1971, p. 312-313. Pour le León, Behar, 1986, p. 104-109. Pour Becedas (Madrid), Brandes, 1975, p. 107-120. Sur Camino Viejo (Guadalajara), voir Perez Diaz, 1972, p. 81. Dans la zone de Tortosa en Catalogne : Jociles, 1989, p. 75-76. En Andalousie, voir Moreno, 1972, p. 279-284.
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[45]
Voir cette réflexion pour Tortosa (Catalogne) dans Jociles, 1989, p. 85.
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[46]
Saavedra, 2002, p. 143.
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[47]
Dans une partie importante de la Galice, on adopte cette solution comme dans le Morrazo : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 449 ; voir aussi Lison Tolosana, 1971, p. 173-183. Pour la zone des Rias Baixas : Perez Garcia, 2002, p. 47-104, où c’est le même modèle que celui de la Lanzada et de la Tierra de Montes : Fernandez Cortizo, 1988, p. 158. À Valladolid aussi il semble bien que la mejora corta a ce sens : García Fernandez, 1994, p. 166.
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[48]
Dans la Galice, ce système s’appelle a congra : Lison Tolosana, 1971, p. 182. On en trouve des exemples dans le Morrazo galicien (Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 451), à le León (Behar, 1986, p. 68-90) et à Cuenca (Reher, 1988, p. 201-235).
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[49]
Dans le Morrazo, ceci prend fin lorsque la mère ne peut plus subvenir à ses besoins. Alors une fille la prend en charge et ses frères et sœurs lui versent un certain montant : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 451. On trouve aussi des exemples à Becedas (Madrid) : Brandes, 1975, p. 107-120. À Cuenca, les anciens qui vont d’une maison à une autre sont appelés meseros (au mois) ou semaneros (à la semaine) : Reher, 1988, p. 201-235. À Tortosa (Catalogne), lorsqu’on ne verse pas la mejora à un héritier pour prendre en charge les parents, chacun s’en occupe à tour de rôle : soit les parents se déplacent, soit les enfants vont à la maison des parents : Jociles, 1989, p. 81-84.
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[50]
La situation des enfants au moment de l’héritage peut conditionner leurs relations futures. Tous sont égaux au point de départ mais les situations sont inégales, ce qui peut expliquer les accords auxquels parviennent les frères et sœurs : O’Neill, 1987, p. 306-340.
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[51]
Voir pour Murcie Chacon Jimenez, 1990c.
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[52]
Voir des exemples à Valladolid : Garcia Fernandez, 1994, p. 179, et à Pozuelo : Barbazza, 1998, p. 87-102.
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[53]
Dans les Rías Baixas galiciennes, le nombre de mariages « au troc » se situe entre 12,5 % et 25 % : Perez Garcia, 2002, p. 47-104 et 2004. Pour la Tierra de Montes à Pontevedra, voir Fernandez Cortizo, 2004. Pour une analyse plus générale sur la Galice : Rey catelao, 1990. Pour Pozuelo (Madrid) : Barbazza, 1998.
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[54]
Voir certains exemples de Cuenca : Reher, 1988, p. 201-235.
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[55]
On peut en trouver une description dans Behar, 1986, p. 109-112.
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[56]
Il existe peu d’informations sur le rôle des frères qui entrent dans les Ordres. Garcia Fernandez, 1994, p. 259-265, affirme que ceux qui entrent en religion renoncent à la réserve héréditaire et sont donc exclus des partages. Dans les testaments du milieu du xviiie siècle, 13,7 % des enfants sont entrés en religion. Néanmoins ils peuvent tester, mais il faudrait savoir en faveur de qui : Ferrer Alos, 1991.
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[57]
On trouvera des réflexions générales dans Saavedra, 2002, p. 142-146. Voir sur le Morrazo Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 439. Pour le nord du Portugal, O’Neill, 1987, p. 306-340, trouve des taux d’enfants naturels de 47,4 %. À Becedas (Madrid) on rencontre le même cas : Brandes, 1975, p. 107-120. Le pourcentage d’enfants illégitimes dans des paroisses du Portugal atteint 15 à 20 % : Volpi Scott, 1999, p. 222-224. Dans la province de Lugo, de 1840 à 1859, ce pourcentage se situe entre 15 et 20 %.
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[58]
Voir les données sur le nord du Portugal : Volpi Scott, 1999, p. 248-249. Dans le León, on rencontre 13,2 % de solitaires (Perez Garcia, 1998) constatés aussi par Perez Alvarez, 1997, p. 259-260. À Becedas (Madrid) : Brandes, 1975, p. 107-120. À Cuenca : Reher, 1988, p. 59-74. À La Ñora (Murcie) : Martinez Carrion, 1988, p. 96. En 1752 dans Grenade : Casey et Vincent, 1987, p. 176. Au nord-est de l’Algarve : Bastos, 1988, p. 115.
1En Catalogne, on a longtemps cru que le système de l’héritier unique passe pour la meilleure manière de transmettre le patrimoine, par opposition au système égalitaire prédominant dans le reste de l’Espagne, qui entraîne la division des parcelles à l’infini et la constitution de minifundio [1]. Dans des régions de pratiques égalitaires, on rencontre des zones de minifundio, comme en Galice ainsi que des zones de latifundium comme en Andalousie, au milieu de nombreuses situations intermédiaires. La structure de la propriété n’est pas la conséquence directe du système successoral. Parallèlement, l’absence de fragmentation patrimoniale dans certaines zones suggère que des mécanismes et des stratégies permettent de recomposer les patrimoines ou d’éviter leur division.
2L’objet de cet article ? Mettre en évidence la logique qui découle de la réglementation relative à l’héritier unique ainsi qu’au système égalitaire castillan. Mettre au jour aussi les difficultés de la reproduction sociale ainsi que les stratégies développées pour éviter la déchéance sociale, dans un cas, et de pulvérisation de la propriété, dans l’autre. Ma thèse est que l’on ne peut rendre responsable le système successoral du processus de destruction des patrimoines car les deux options recèlent des ressources suffisantes pour éviter la dévalorisation des exploitations. Par conséquent, aucun système n’a secrété un déterminisme unique.
3Dans l’Espagne du xviiie siècle, les systèmes successoraux sont les suivants : au nord, à partir de la Catalogne (la région de Tortosa mise à part) jusqu’à certaines zones de la Galice, en passant par le nord de l’Aragon, une partie de la Navarre, le Pays Basque, la Cantabrie et les Asturies, prédomine le système de l’héritier unique. Dans le reste de la Péninsule (la province d’Orense, les deux Castilles, l’Estrémadure, l’Andalousie, les provinces de Murcie et de Valence) on rencontre un système de partage égalitaire plutôt strict (carte 1) [2].
Systèmes égalitaires et inégalitaires dans l’Espagne de l’Ancien Régime
Systèmes égalitaires et inégalitaires dans l’Espagne de l’Ancien Régime
4La première surprise vient que, du point de vue légal, la zone de prédominance de la législation castillane ne coïncide pas avec le système égalitaire (dans les provinces de Guipúzcoa, de Cantabrie, des Asturies et de la Galice). Il existe, en effet, un système d’héritier unique calqué sur celui des zones à réglementation coutumière (fuero) : en Castille, les pratiques affichent une certaine souplesse et ont plus à voir avec les coutumes et l’utilité sociale qu’avec les dispositions réglementaires [3]. On doit donc prendre en compte la grande diversité des solutions que les familles paysannes mettent en œuvre pour transmettre leur héritage.
5La même complexité apparaît en France où le droit écrit prédomine dans le Sud et la coutume au Nord. Au sein de ces zones, on peut trouver des systèmes égalitaires stricts ou entre les mâles, des formules d’aînesse absolue ou non égalitaires variables [4].
Le système de l’héritier unique avec préférence masculine
6La zone proche des Pyrénées coïncide avec l’existence d’un droit écrit qui laisse la liberté de tester. Elle est à l’origine de la pratique de l’héritier unique qui maintient les patrimoines intacts aux mains de la même famille [5].
7Le modèle qui s’est développé en Catalogne depuis le Moyen Âge servira de référence : les seigneurs exigent que les terres soient transmises à un seul enfant et « inventent » l’héritier unique, ce que la législation ratifie au xive siècle lorsque ce système est accepté socialement [6]. On réduit progressivement la quotité disponible (la réserve héréditaire), au quart des biens avant de développer l’heretament (héritage), qui reconnaît la liberté de choisir son héritier, en l’occurrence l’enfant mâle premier-né [7]. En Catalogne le système de l’héritier unique laisse toute liberté de choix : l’heretament peut être aussi utilisé pour partager le patrimoine à parts égales.
8Le schéma qui en résulte peut être résumé ainsi : le père désigne comme héritier l’enfant mâle premier-né avec l’obligation de se marier et de demeurer dans la maison, de prendre soin de ses parents pendant leurs vieux jours, en réglant à ses frères et sœurs la part de réserve héréditaire qui leur revient. Les autres enfants, appelés cabalers (cadets), doivent quitter peu à peu la maison à mesure qu’ils se marient – dans le cas des filles – ou qu’ils trouvent une place dans l’Église ou à la campagne, ou encore qu’ils se consacrent à un métier ou un office quelconque à la ville. Chaque fois qu’un enfant quitte la maison, on lui donne la totalité de la réserve héréditaire paternelle et maternelle – une simple dot dans le cas des filles –, mais il ne peut plus rien réclamer sa vie durant [8]. Comme seuls les enfants mâles héritent, ce sont les filles qui partent pour entrer sous un autre toit à l’occasion du mariage, ouvrant la voie à l’établissement de relations entre les « maisons ».
9Dans ce système, le mariage de l’héritier est le moment-clé de la transmission. Les capítols matrimonials (contrats de mariage) établissent un pacte entre les deux familles : on garantit que l’aîné mâle sera bien l’héritier du patrimoine, les parents se réservant l’usufruit pour ne pas être chassés de la maison et pouvoir garantir le montant nécessaire au paiement des réserves héréditaires aux cadets. On fixe la dot de la future épouse qui renonce à tout autre apport au titre de la réserve héréditaire. On détermine comment celle-ci circulera en cas de décès sans enfant, on fixe l’escreix – la rétribution de la dot – et l’on détermine le système de succession dont bénéficieront les enfants du nouveau couple. Les règles du jeu sont fixées et les capítols forment la pièce essentielle de l’organisation de la succession. Le testament n’est qu’un simple aide-mémoire, puisqu’il se contente de définir les réserves héréditaires qui doivent être payées et celles qui ne l’ont pas encore été.
10La chaîne successive des héritiers confère une importance fondamentale à la maison et au patrimoine qui passe de génération en génération. L’objectif de l’héritier, c’est de sauvegarder le patrimoine et tous les enfants y contribuent, jusqu’au sacrifice personnel. Le patrimoine génère les ressources permettant de placer les cadets qui y trouvent aussi un refuge au cas où les choses tourneraient mal.
11Quel est le montant de la réserve héréditaire et celui des dots féminines ? Au xive siècle, la législation catalane fixe la réserve héréditaire obligatoire à un quart des biens que l’on peut distribuer en biens fonciers ou immobiliers. Dans le partage entrent tous les enfants, y compris l’héritier. Comment s’établit le calcul ? Sur la foi de nombreux capítols la réserve héréditaire ne correspond jamais au quart ; plus encore, on n’estime jamais les biens de l’héritier et il est donc impossible de répondre à la question. En outre, les sources donnent lieu à des hypothèses (« selon les capacités de la maison »), qui révèlent bien des adaptations de la norme légale.
12Dans la consolidation de ce système, les cadets reçoivent de l’argent liquide mais pas une miette du patrimoine. Si l’on avait dû payer, à chaque génération, les réserves héréditaires en biens-fonds, un processus de fragmentation se serait produit. La compensation en argent liquide modifie la perspective et assure la conservation de l’assise terrienne : le montant que l’on paye aux cadets égale la dot de l’épouse qui entre dans la maison à laquelle viennent s’ajouter les capitaux nets produits par le patrimoine lui-même. À chaque maison correspond une valeur dont découle le montant possible de réserve héréditaire à payer. Cette valeur peut changer dans le temps, en fonction de la conjoncture familiale ou agricole et de la rentabilité des investissements. Les réserves héréditaires à payer varient aussi en fonction de ces facteurs.
13Dans ces conditions, chaque maison aspire à obtenir une dot en rapport avec sa propre valeur. Pour s’en rendre compte, effectuons un calcul théorique du principe légal catalan sur la base d’une réserve héréditaire d’un quart du patrimoine suivant le nombre d’enfants, y compris l’héritier (tableau 1).
Réserve héréditaire théorique dans le système héréditaire catalan (quart de la valeur des biens)
Réserve héréditaire théorique dans le système héréditaire catalan (quart de la valeur des biens)
14Avec 5 frères et sœurs, cet héritier conserve entre 79,2 % et 100 %, alors que les cadets reçoivent entre 4,2 % lorsqu’ils sont six et 12,5 % lorsqu’il n’y a que deux enfants. Sur cette base, le montant à consacrer aux dots est de 12,5 % de la valeur du patrimoine. S’il n’y a qu’une seule cadette à marier, elle peut recevoir ces 12,5 % intégralement mais avec six enfants, la dot n’est plus que de 4,2 %, c’est-à-dire bien moindre. À quelle dot peut prétendre l’héritier d’une maison ? Si l’on se réfère au principe légal, une maison peut aspirer à reconstituer, grâce à la dot, le montant qu’elle doit payer aux enfants au titre de la réserve héréditaire pour maintenir le patrimoine dans son intégrité. Dans le tableau, ce montant oscille entre 12,5 % s’il n’y a qu’un seul enfant et 20,8 % s’il y en a six. Ce n’est que dans le cas où une famille a deux enfants et qu’elle s’unit à une autre maison de même composition que les deux maisons ont la même valeur patrimoniale, étant donné que pour chacune la fille apporte les 12,5 % qui viennent de partir dans l’autre.
15Autrement l’héritier doit se marier avec une femme issue d’une famille au patrimoine supérieur. Y a-t-il a plus de deux enfants, que l’on réduit la part du patrimoine de l’héritier : si l’on dote six enfants, par exemple, ce pourcentage est réduit à 79,2 %. Obtenir une dot équivalente au pourcentage qui manque pour parvenir à 100 % implique une union avec une femme issue d’une famille plus aisée. De même, si la famille avec laquelle l’alliance est envisagée a elle-même plus de deux enfants, les 12,5 % théoriques sont réduits. Pour parvenir à la dot théorique souhaitée, le patrimoine doit avoir une valeur supérieure à celle du patrimoine de l’héritier. L’héritier se marie alors avec une femme issue d’une maison plus aisée. Il n’en est pas de même avec les cadets.
Le traitement différentiel des cadets et des cadettes
16Puisque l’aîné des garçons est désigné comme héritier, seules les femmes peuvent accéder à ces patrimoines et, par conséquent, les cadets (hommes) sont exclus ou doivent abandonner la maison paternelle et fonder un nouveau foyer [9]. Tous les cadets doivent en théorie recevoir la même part au titre de la réserve héréditaire. Toutefois l’opération ne permet pas à ceux qui se marient d’accéder au même niveau patrimonial. La logique est simple : pour ressembler à leur frère héritier les cadets (hommes) convertissent en patrimoine leur réserve héréditaire et à ce patrimoine nouvellement créé correspond la dot d’une femme estimée à 1/8e de sa valeur. Simulons, avec un patrimoine théorique de 10 000 livres, ce qui se produit pour les cadets (hommes) (tableau 2).
Réserve héréditaire théorique dans le système héréditaire catalan (quart de la valeur des biens)
Réserve héréditaire théorique dans le système héréditaire catalan (quart de la valeur des biens)
17Au mieux, le patrimoine du cadet ajouté à la dot apportée par sa femme représente 13,1 % du patrimoine de son frère héritier et il diminue en fonction du nombre de frères et sœurs – jusqu’à 4,6 % dans le cas d’une famille de 6 enfants. Dans ce système, la déchéance sociale des cadets est spectaculaire. Pour les cadettes, les choses sont différentes. La dot que leur frère héritier leur donne correspond à 1/8e de la valeur du patrimoine de leur famille d’adoption. Seuls les ménages avec 2 enfants survivants – un héritier et une cadette – laissent espérer à la fille une valeur patrimoniale comparable à celle de sa propre famille. Par contre, à partir de 3 enfants, la valeur patrimoniale proposée chute à 66,6 %, 50 %, 40 % et 33,3 % lorsqu’il y a six enfants à placer. Les cadettes sont condamnées à se marier vers le bas, même si leur déchéance sociale reste inférieure à celle des garçons.
18La Catalogne ne connaît point le système d’acquêts [10]. La dot de la femme est administrée par le mari et se fond dans le patrimoine. La rétribution de la dot s’effectue au travers de l’escreix qui équivaut en général à 25 % de la valeur de la dot. De cette manière, les acquêts qui proviennent de la gestion du patrimoine sont incorporés à la maison principale ; ils servent de liquidités pour régler les réserves héréditaires et les dots des enfants qui quittent le giron familial. C’est un peu comme s’ils avaient servi à racheter à chaque génération les parcelles qu’il aurait fallu séparer du patrimoine principal pour payer les réserves héréditaires. Ces acquêts servent sûrement aussi à améliorer les montants à payer aux cadets et à éviter la déchéance sociale à laquelle ils sont condamnés, mais ce n’est point une obligation.
19Les dots ainsi que les réserves héréditaires sont arbitraires, quoique l’on tente de placer les cadets le mieux possible, semble-t-il. Ce que l’on peut payer dépend directement du patrimoine, mais ce que l’on débourse effectivement est une décision politique. On peut payer davantage pour s’allier à une famille d’un certain rang, ou moins si la maison est en difficulté. Le montant dépend aussi de l’offre et de la demande, selon la conjoncture les dots sont supérieures ou inférieures à ce que les familles peuvent assurer.
20Dans ce contexte la préservation du patrimoine, génération après génération, a un coût social : le déclin des cadets, et il est donc nécessaire de développer des stratégies pour l’éviter. Il est primordial que chacun assume son rôle en fonction de la naissance, ce que l’on obtient en mythifiant la maison et en lui attribuant un rôle protecteur. Les études menées sur les masíes (grandes maisons rurales) les plus aisées du xviiie siècle montrent que les héritiers tendent à retarder l’âge du mariage afin de réduire le nombre de générations dans le temps ainsi que le nombre de cadets à placer. Les cadets restent célibataires dans la maison ou occupent une charge ecclésiastique quelconque. Dans les familles moins aisées, les héritiers laissent au cadet la possibilité de cultiver une parcelle ou de s’occuper d’une partie du cheptel afin qu’il puisse se constituer un pécule pour compléter la réserve héréditaire qu’il recevra. Dans les familles pauvres, les cadets sont envoyés travailler comme mosso (valet de ferme) dans certaines maisons ou comme berger afin d’économiser en attendant le moment où il faudra abandonner la maison. Dans d’autres cas encore, on préfère que le cadet aille au village proche apprendre un métier, car l’on considère que la réserve héréditaire sera plus productive en investissant dans l’apprentissage qu’en achetant une parcelle aux rendements très limités. Tout ceci constitue autant de tentatives pour réduire le plus possible la dégradation sociale des cadets.
21Le célibat et l’entrée au couvent ne semblent pas avoir tenté des cadettes. La majorité d’entre elles reçoivent la dot et se marient lorsque c’est possible avec l’héritier d’une autre maison, tissant ainsi un réseau de relations sociales complexe entre maisons. Pour éviter le déclin les familles essayent d’améliorer la dots des filles. Elles recherchent de plus beaux partis grâce à la création des Causas Pías (œuvres pieuses destinées à marier les jeunes filles), une institution qui propose des prêts aux petits paysans pour augmenter les dots. Dans les familles humbles, être domestique pendant une certaine période ou ouvrière dans une fabrique textile permet d’augmenter la dot monétaire et de pouvoir se marier mieux.
Le système héréditaire sans préférence définie
22En marge de la législation castillane, le système de l’héritier unique s’est développé dans une partie de la Navarre et de la Biscaye à partir de quelques lois spécifiques avec une différence fondamentale pour la Catalogne et le nord de l’Aragon. Dans ces deux cas la préférence n’est pas définie : peut hériter aussi bien un garçon qu’une fille.
23Les premières synthèses du droit civil navarrais ont été effectuées en 1238 avec la rédaction du Fuero General modifié et complété en 1330 (Amejoramiento del Rey D. Felipe) et en 1418 (Amejoramiento de Carlos III), ensemble de lois imprimé pour la première fois en 1686. La solution de l’héritier unique y est pensée surtout pour les classes aisées afin de préserver leurs patrimoines en recourant, comme en Catalogne, au principe de la liberté de disposition des biens. On peut donc faire les partages à parts égales ou de manière inégalitaire à la condition que les non-héritiers reçoivent le nécessaire pour constituer une maison dans le voisinage. Les autres groupes sociaux doivent faire les partages de manière égalitaire avec la faculté de favoriser un enfant. Les pratiques sociales révèlent parfois les avantages du système de l’héritier unique qu’autorise la législation en 1576 et 1583 [11]. Le système juridique est allé plus loin et, en 1688, on doit réduire la réserve héréditaire au minimum (5 sols faibles ou carlins, et une robada de terre dans les biens communaux [12]). Si en Catalogne on fixe la réserve héréditaire au quart, ici c’est à discrétion. Dans la pratique, les familles développent les stratégies les plus adaptées à leurs intérêts et le paiement des dots favorise la reproduction sociale de tous leurs membres [13]. Le système navarrais rejoint donc le catalan avec néanmoins une différence : l’héritier peut être aussi bien un garçon qu’une fille, et ce n’est pas nécessairement l’aîné, en dépit d’une légère préférence pour les garçons.
24Au Pays Basque se développe un système très proche mais sur des bases juridiques différentes. Alors que la Biscaye est régie par le Fuero Viejo de 1452 modifié en 1526 [14], la région de Guipúzcoa l’est par le droit castillan, même si les pratiques successorales réelles sont identiques. Dans le modèle juridique biscayen, le fuero lui-même rassemble déjà trois principes fondamentaux : la liberté de tester, la troncalidad et la comunicación foral, ou communauté, ou encore société de biens. En Biscaye, la liberté de tester est entière de telle manière que la réserve héréditaire n’existe pas, pas davantage que l’obligation de payer des dots, ce qui laisse le champ libre. La loi n’impose ni le choix d’un héritier unique ni le paiement de dots aux autres enfants. La troncalidad implique une série de limitations légales selon lesquelles la propriété peut circuler hors de l’environnement familial, et la comunicación foral fait de tous les biens apportés par le mariage des biens partagés, de même que les acquêts générés [15]. Le contrat de mariage, comme dans tous les systèmes à héritier unique, reste le document-clé puisqu’il organise la succession et la gestion future de la maison. Comme en Navarre, l’héritier peut être n’importe quel fils ou fille [16].
25Aussi bien en Navarre qu’en Biscaye, le système de l’héritier unique présente deux différences fondamentales par rapport à la Catalogne : la non-existence de la réserve héréditaire et le fait que l’héritier peut être n’importe quel enfant, indépendamment de son sexe. Si en Catalogne la limitation de la réserve héréditaire est plus théorique que réelle au sens où on l’assure « en fonction des possibilités de la maison », par contre en Navarre et en Biscaye, où elle n’est pas régulée, les familles payent des dots exactement selon le même critère.
26Que se passe-t-il lorsque l’héritier n’a pas été choisi en fonction de son sexe ? La question est d’importance. Dans le système catalan, seules les femmes circulant de maison en maison pour épouser un héritier, les cadets sont tenus de convertir leur réserve héréditaire en patrimoine et aspirent à se marier avec une femme qui apporte une dot équivalente à leurs maigres biens. Supposons que, dans la moitié des maisons de Navarre et de Biscaye, un homme hérite et dans l’autre moitié une femme : cela signifie que les garçons comme les filles cadets peuvent entrer dans une autre maison. Les possibilités de placement sont ouvertes aux deux sexes. La déchéance sociale des cadets affectera de manière égale les hommes et les femmes. Si une femme ou un homme réussit grâce à sa dot à entrer dans une maison, la déchéance sociale est moindre, alors que si cette dot ne sert qu’à constituer le patrimoine propre, il leur arrivera la même chose qu’aux cadets de Catalogne. Par contre, en Navarre ou au Pays Basque, le travail masculin pour améliorer la dot ou la réserve héréditaire confère au dernier-né un certain avantage par rapport à ses sœurs qui ont moins de latitude. Les cadets, s’ils recourent à cette pratique, peuvent se marier dans de meilleures conditions que leurs sœurs, dans le cas où cet avantage n’est pas déjà décompté dans tout ce qu’on devra leur payer [17].
27Si en Catalogne ce sont les cadets qui demeurent célibataires dans la maison, entrent dans les Ordres ou retardent l’âge du mariage jusqu’à avoir accumulé un patrimoine minimum, en Navarre et au Pays Basque, cette situation touche également les deux sexes. Les cadets à la situation problématique sont parmi les uns et les autres [18].
La régulation castillane du système de l’héritage
28Dans chaque zone les traditions juridiques du droit romain, gothique et justinien ont été interprétées en fonction des intérêts des divers groupes sociaux. Les royaumes de Castille ont choisi les traditions gothiques dans lesquelles la protection des enfants revêt plus d’importance.
29En Castille, on admet qu’une partie des biens doit obligatoirement être transmise aux enfants. La base juridique médiévale réside dans le Fuero Real et les Partidas qui contiennent des dispositions contradictoires. Le Fuero Real recueille la tradition gothique consistant à réserver aux enfants les 4/5e des biens et de n’en laisser que 1/5e à la libre disposition du testateur. Une partie de la réserve héréditaire, appelée mejora (avantage, amélioration), peut être accordée à un enfant donné. Les Partidas, en revanche, sont inspirées du droit justinien et déterminent un montant de réserve héréditaire en fonction du nombre d’enfants : un tiers s’ils sont moins de 5 et la moitié s’ils sont plus nombreux. De cette manière, les parents disposent à discrétion d’un 1/3 ou de la moitié des biens en fonction du nombre d’enfants.
30C’est en 1505, avec la compilation des Lois de Toro, qu’est établi définitivement le système successoral castillan, plus inspiré du Fuero Real que des Partidas. Ainsi, l’héritage du testateur se divise en 5 parts : l’une disponible pour payer les dettes, faire des dons, des legs ou tout ce que l’on considère comme opportun, les 4 autres elles-mêmes divisées en 3 : 2/3 servent nécessairement au partage obligatoire et le 1/3 restant peut être donné à l’enfant ou aux enfants de son choix. Ce préciput est ce que l’on appelle la mejora de tercio [19]. Cela ouvre toute une série de possibilités que l’on rencontre dans toute l’Espagne. En simplifiant, on peut dire qu’il y a 4 solutions principales :
31a. Un système entièrement égalitaire (sans préciput du 1/5e ni du 1/3). Après avoir payé les dettes et les frais d’enterrement, tout ce qui reste entre dans la succession pour être reparti à parts égales. À la mort des parents, les enfants reçoivent un pourcentage du patrimoine qui varie en fonction de leur nombre (tableau 3) :
Patrimoine reçu dans un système entièrement égalitaire selon le nombre d’enfants
Patrimoine reçu dans un système entièrement égalitaire selon le nombre d’enfants
32b. Un système héréditaire avec mejora du 1/5e. On utilise le 1/5e pour améliorer la situation d’un enfant et l’on repartit tout le reste à parts égales. Dans ce cas, le patrimoine est partagé de la manière suivante (tableau 4) :
Patrimoine reçu dans un système à préciput du 1/5e selon le nombre d’enfants
Patrimoine reçu dans un système à préciput du 1/5e selon le nombre d’enfants
33c. Un système héréditaire avec mejora du 1/3. On avantage la situation d’un enfant, garçon ou fille, avec le 1/3 et l’on partage tout le reste (tableau 5) :
Patrimoine reçu dans un système à préciput du 1/3 selon le nombre d’enfants
Patrimoine reçu dans un système à préciput du 1/3 selon le nombre d’enfants
34d. Un système héréditaire avec préciput du 1/3 et du 1/5e. Même s’il est possible d’améliorer la situation d’un enfant avec le 1/5e de libre disposition et un autre avec le 1/3, il existe aussi la possibilité de préciput du 1/5e et du 1/3 pour un seul enfant. Dans ce cas, on ne peut pas parler d’un système égalitaire puisque c’est avec cette stratégie légale qu’ont été constitués, dans la pratique, des systèmes d’héritier unique (tableau 6) :
Patrimoine reçu dans un système à préciput du 1/3 selon le nombre d’enfants
Patrimoine reçu dans un système à préciput du 1/3 selon le nombre d’enfants
35Le système castillan autorise des stratégies héréditaires fort variées, et l’idée selon laquelle il conduit au partage égalitaire est donc erronée. Seule la première solution est strictement égalitaire : Les préciputs du 1/5e ou du 1/3 sont souvent en rapport avec une sorte de prime accordée à l’héritier qui prend soin de ses parents ou pour protéger un enfant malade qui éprouvent des difficultés dans la vie. Toutefois, réunir en un seul enfant les avantages du 1/5e et du 1/3 implique dans la pratique la constitution d’un système à héritier unique où l’on retrouve les caractéristiques des zones où prédomine ce système. À nouveau, le cadre juridique n’est pas déterminant, bien au contraire, ce sont les familles qui interprètent et adaptent celui qu’elles ont à leur disposition.
36Comment calculer ce qui revient à chacun [20] ? On inventorie l’ensemble des biens, on soustrait les dettes et on règle les funérailles : ce qui reste en liquide est utilisé pour la mejora du 1/3 ou du 1/5e. Tout d’abord le 1/5e ; l’opération faite, il reste de l’argent pour la mejora du 1/3. Ensuite le 1/3 et ce qui reste est partagé entre les héritiers. Ce qui revient à chacun reçoit le nom de hijuelas ou partijas [21]. Les acquêts sont pris en compte s’il y a une veuve. Dans ce cas, après avoir payé les dettes, on partage les acquêts entre le conjoint survivant et les enfants qui se distribuent les biens et la part des acquêts de l’autre conjoint.
Le système de l’héritier unique dans la législation castillane
37L’historiographie a réduit la législation castillane à un système égalitaire, ce qui ne correspond pas à ce que nous en savons aujourd’hui. Le cadre légal offre une grande latitude. Dans le Guipúzcoa (Pays basque), les Asturies, la Cantabrie ainsi que dans certaines parties de la Galice, le système légal castillan s’est orienté vers le système de l’héritier unique, similaire à celui de Catalogne.
Le Guipúzcoa
38Dans cette province, les lois de Toro de 1505 sont la règle mais s’est développé parallèlement le système de l’héritier unique. Les donations propter nupcias sont effectuées au travers des contrats de mariage et consistent en la donation de la mejora du 1/3 et du 1/5e à l’enfant qui est désigné comme l’héritier, la maison se trouvant parmi les biens. Celui qui reçoit les biens s’engage alors à assurer à ses frères et sœurs la réserve héréditaire qui doit être en argent liquide si l’on ne veut pas fragmenter le patrimoine. Le conjoint qui entre dans la maison apporte une dot en argent liquide qui aide à payer les réserves héréditaires des frères et sœurs qui doivent abandonner la maison. La donation est la garantie que cette dot aura une valeur propositionnelle à la maison.
39À l’approche de la mort, le donataire fait un testament et, en plus de rappeler les obligations de l’héritier, il le désigne comme bénéficiaire de la mejora du 1/3 et du 1/5e, enfin il fait un bilan des réserves héréditaires déjà versées ainsi que de ce qui reste à payer aux autres enfants.
40Les dots sont versées au lignage lorsqu’intervient la mort du conjoint sans descendance à partir de la loi de Toro VI, quoique cette interprétation en d’autres occasions ait pu être faite dans un sens contraire. On renforce l’idée de troncalidad, puisque l’on s’assure qu’il n’y a pas de dispersion des réserves héréditaires s’il n’y a pas de descendance [22].
41De cette manière, le système successoral du Guipúzcoa est identique à celui de Biscaye, de Navarre et d’autres zones des Pyrénées. Le cadre légal n’est pas déterminant. L’héritier peut être un garçon ou une fille, quoique des études sur la situation à Irun montrent pour le xviiie siècle une légère tendance en faveur de l’homme [23]. La logique et les contradictions de ce système sont les mêmes que celles exposées plus haut et les stratégies familiales ressemblent à celles qui sont développées en Biscaye.
Les Asturies
42Dans les Asturies, il n’y a jamais eu de droit privé ni de fuero spécifiques, et la législation qui régule le système héréditaire est par conséquent le droit castillan des lois de Toro. L’intérêt de conserver l’exploitation agricole entière conduit à adopter une solution qui rappelle celle du Guipúzcoa. La famille choisit un enfant comme futur héritier indépendamment de son sexe (le plus « aimé », le plus apte) afin qu’il demeure dans la maison lorsqu’il se mariera et constitue une société avec ses parents. Les contrats de mariage sont là aussi le document-clé pour organiser le processus successoral au travers de la donation propter nupcias. L’héritier reçoit la mejora du 1/3 et du 1/5e et l’on fixe la dot ou la réserve héréditaire que l’on doit payer aux autres fils et filles. Le garçon ou la fille bénéficiaire de cette mejora a aussi l’obligation de prendre soin de ses parents. Les enfants non-héritiers demeurent dans la maison où ils peuvent se constituer un petit pécule et auquel on peut payer, en acompte de la réserve héréditaire, les frais de voyage pour émigrer, la libération du service militaire ou des avancements d’hoirie leur permettant de se marier [24].
43La compensation de la donation du 1/5e et du 1/3 est la dot qu’apporte le conjoint qui entre dans la maison, versée au père du bénéficiaire de la mejora en qualité de dépôt. Il est normal de constituer alors une société comiendo a mesa y mantel (« mangeant à une table bien garnie ») entre les deux couples, de telle manière que les acquêts sont partagés entre les 4 personnes qui y ont participé à titre individuel. On évite ainsi que la totalité des acquêts générés par l’apport du couple qui demeure à la maison n’entre dans le partage [25]. Les réserves héréditaires propres aux enfants sont payées en argent liquide pour éviter la fragmentation.
44Le fait que les dots et les réserves héréditaires aient été calculées au mariage et non au décès laisse les acquêts futurs hors des calculs de l’héritage. De cette manière, les réserves héréditaires peuvent être plus modestes et les acquêts accumulés par la gestion des deux couples contribuent au paiement des frères et sœurs qui abandonnent la maison. L’option est très différente de celle des zones de partage égalitaire dans lesquelles les acquêts entrent aussi dans le calcul de la succession [26].
La province de Lugo (Galice)
45La Galice est la région d’Espagne qui montre le mieux les possibilités d’adaptation qu’offre la législation castillane. On y trouve tous les cas de figure : du système de l’héritier unique jusqu’au partage totalement égalitaire, en passant par des zones de petite mejora dans lesquelles on aide un peu l’enfant qui prend soin de ses parents [27]. Dans l’ancienne province de Lugo on retrouve le même système que dans les zones du Guipúzcoa et des Asturies de mejora du 1/3 et du 1/5e, dans ce cas en faveur de l’aîné des garçons, qui se marie et demeure à la maison, et qui a l’obligation de vivre « en compagnie tacite » ou « en mangeant à une table bien garnie » avec ses parents, dont il doit prendre soin et qu’il doit enterrer. Ailleurs les contrats de mariage reçoivent le nom de dotales et comportent la mejora à l’enfant et la dot qu’apporte la femme dans la nouvelle maison [28].
46Selon Saavedra, il existe à Lugo un système de partage égalitaire et c’est au xviiie siècle qu’il évolue l’héritier unique pour faire face aux problèmes économiques qui découlent de la pression démographique. Avec l’objectif de « perpétuer la maison et le nom », les enfants se mettent au service de l’héritier et à cet égard le taux élevé de célibat masculin et féminin permette une importante économie de réserves héréditaires, qui, de cette manière, ne sortent pas de la maison et aident à perpétuer le patrimoine [29].
Cantabrie
47D’après certaines recherches, le système légal castillan permet bien des adaptations. Lanza a analysé le cas de Liébana à Santander [30]. Au xviie siècle, fonctionne un partage égalitaire : 23 % des testaments par rapport à 19 % de mejoras du 1/5e et du 1/3. Par contre, au xixe siècle, 35 % sont des testaments de mejora et 3 % des partages égalitaires [31]. Les paysans ont évité ici la division à l’extrême de leurs exploitations grâce au mécanisme de la mejora du 1/3 et du 1/5e. La frontière entre pratiques égalitaires et non égalitaires est tres fragile et la réglementation castillanne facilitait l’adaptation [32].
Le majorat
48Les lois castillanes approuvées à Toro en 1505 offrent une autre solution pour éviter la fragmentation patrimoniale théorique que les forumules préciputaires du 1/5e et 1/3 : il s’agit du majorat, qui a été largement utilisé par les classes les plus aisées [33].
49Tout individu peut faire ce qu’il veut avec le 1/5e de libre disposition, et il peut donc créer un majorat avec cette partie du patrimoine. Une fois ce majorat créé, les biens ne peuvent plus sortir de ce lien et doivent circuler en marge des règles d’héritage habituelles, en fonction des critères établis par le fondateur (normalement, c’est l’enfant mâle premier-né qui hérite, puis les autres hommes et ensuite les femmes). Le majorat peut croître avec l’apport de la mejora du 1/3 de la part de l’héritier forcé et a besoin d’une autorisation royale. Une fois le majorat fondé, les biens libres d’un héritier peuvent y être incorporés sans difficulté. Avec l’application de la mejora du 1/3 et du 1/5e, on peut parvenir à réunir 73,3 % des biens patrimoniaux d’une famille. Le fait de lier les biens est, dans la pratique, une manière d’échapper aux lois castillanes sur l’héritage.
50Pour quelle raison a-t-on recours au majorat si l’on peut parvenir au même but avec la mejora du 1/3 et du 1/5e ? Parce que ce que cherchent les groupes sociaux aisées qui utilisent le majorat n’est pas de perpétuer le patrimoine, mais d’éviter la dégradation de la rente, une attitude caractéristique des familles nobiliaires. La création d’un majorat interdit la vente des biens qui le composent (terres incluses) et, par conséquent, seul celui qui en bénéficie peut aliéner les rentes mais pas les biens qui les génèrent. De cette manière, et malgré les difficultés, la noblesse ainsi que les groupes aisés conservent intacte leur base patrimoniale et évitent la pression des dettes et des ventes de terre éventuelles.
51Avec le majorat, on tente de reproduire un niveau social et de se défendre des forces de désagrégation propres aux groupes sociaux rentiers. Pour ce faire, on n’hésite pas à sacrifier les autres enfants en leur imposant le célibat. En Estrémadure, au cours du xviiie siècle, par exemple, 50 % des garçons cadets et 42 % des filles cadettes demeurent célibataires dans leurs maisons, et 20 % des garçons entrent dans les Ordres. Avec ces rares mariages, l’extinction de la noblesse paraît assurée. En effet, le risque de demeurer sans descendance est très élevé (des 27 familles nobles de Cadix au début du xviiie siècle, il n’en demeure que 7 à la fin du siècle). Cette élimination des familles nobles est aussi une manière de concentrer les majorats en peu de mains et de résoudre le problème de minorisation structurelle de la rente [34].
Les systèmes de partage égalitaire
52Le système de partage égalitaire a une logique très simple : tous les enfants garçons et filles sont égaux et, par conséquent, tous les biens familiaux doivent être repartis à parts égales entre tous [35]. Il s’agit d’une authentique liquidation et tous les biens – aussi bien meubles qu’immeubles – entrent dans le partage. Le partage, par conséquent, est égalitaire en ce qui concerne son montant global – calculé par des experts locaux d’une manière très précise – mais qu’il ne doit pas nécessairement l’être dans sa composition. Et cela est important parce que l’égalité théorique peut cesser ou l’on peut utiliser aussi cette manière d’organiser les partages pour obtenir d’autres résultats.
53Le fait que les filles reçoivent la même chose que les garçons est très important. Lorsque l’on parle de « pulvérisation », on fait un calcul très simple : un patrimoine de 10 ha est divisé entre 4 enfants, chacun recevant donc 2,5 ha ; ceux-ci ont chacun 4 enfants qui au moment du partage reçoivent 0,6 ha chacun, et ainsi de suite. Cependant on ne prend pas en compte ce qui constitue le premier mécanisme de la recomposition sociale : le patrimoine d’un couple est constitué de l’apport de l’époux et celui de l’épouse, ainsi la dispersion supposée est repoussée grâce au mariage.
Dot et mariage dans le système égalitaire
54Dans le système dotal, les choses sont très différentes étant donné que la femme entre dans la maison de l’héritier futur et apporte une dot conforme au patrimoine dans lequel elle pénètre. Les articles de mariage scellent le contrat : l’enfant sera l’héritier, il s’occupera de ses parents et paiera la réserve héréditaire à ses frères et sœurs. Dans ce système, le mariage de l’héritier est un moment extrêmement important de la succession.
55Dans les systèmes de partage égalitaire, il en va autrement. Les enfants, garçons et filles, reçoivent la même chose, et par conséquent le mariage ne se fait pas avec quelqu’un qui apporte moins, mais avec quelqu’un qui apporte la même chose que celui à qui il s’accorde. Les mariages tendent à se faire entre égaux ou, plus exactement, entre enfants garçons et filles qui apportent la même valeur. Un garçon peut se marier avec une fille d’une famille plus aisée si celle-ci a beaucoup d’enfants et ce qui revient à chacun est égal à ce que peut apporter sa famille avec moins d’enfants.
56Dans le tableau 7, j’ai reconstruit théoriquement ce qui se produirait avec un patrimoine d’une valeur de 10 000 livres et selon le nombre d’enfants.
Reconstitution du patrimoine dans un système de partage égalitaire
Reconstitution du patrimoine dans un système de partage égalitaire
57Avec un seul enfant, il n’y a pas de partage. À partir du second, ce qui revient à chacun diminue très rapidement. Avec 5 enfants, il ne revient plus à chacun que 20 % du total. La pulvérisation de la propriété est assurée. Toutefois, le mariage atténue cette situation de manière significative étant donné qu’il se produit entre égaux. Lorsqu’il y a un seul enfant, on peut espérer doubler le patrimoine initial et c’est donc le seul cas où se produit une ascension sociale tout à fait remarquable. Avec 2 enfants, on reproduit le niveau des parents et ce n’est qu’à partir du moment où il faut en placer 3 que commence le processus de dégradation sociale : 66,7 % avec 3 enfants, 50 % avec 4,40 % avec 5 et 33,3 % avec 6 [36].
L’importance des acquêts
58Il y a d’autres éléments dès le début qui améliorent aussi cette situation. Le système légal castillan constitue la famille en société d’acquêts, il est donc normal que les bénéfices (ou acquêts) soient incorporés à le partage. Les acquêts ne sortent pas de la maison (ou ce sont des économies en argent liquide ou ils sont investis dans l’achat de terres ou de bétail) de telle manière qu’à la fin les acquêts (ou intérêts générés par le patrimoine) entrent dans le partage comme tous les autres revenus, d’où leur importance [37]. Si ce qu’on veut reproduire est le patrimoine de départ, capable de générer une accumulation – traduite sous forme d’acquêts –, il est évident que ceux-ci représentent une amélioration des patrimoines reçus par les enfants, de telle manière que l’on peut encore améliorer davantage la situation de chacun au moment du partage [38]. Évidemment, les acquêts peuvent être positifs ou négatifs selon la conjoncture. Dans l’exemple qui suit, supposons un patrimoine théorique de 10 000 livres avec un rendement de 3 % pendant 10 ans, soit 3 000 livres d’acquêts. La nouvelle famille recevrait la partie d’acquêts de la part de la famille de l’époux et la partie de la part de la famille de l’épouse. Le patrimoine que recevraient les enfants une fois mariés avec un égal serait donc le suivant (tableau 8) :
Reconstitution du patrimoine dans un système de partage égalitaire avec répartition des acquêts et des héritages collatéraux
Reconstitution du patrimoine dans un système de partage égalitaire avec répartition des acquêts et des héritages collatéraux
59Quoique l’effet se dilue progressivement en fonction du nombre d’enfants, il est évident qu’avec un acquêt équivalent à 30 % du patrimoine familial, on parvient à ce que, lorsqu’il y a 3 enfants, les 3 obtiennent 86 % du patrimoine de départ et 66 % lorsqu’ils sont 4. Les acquêts (les bénéfices découlant de la gestion du patrimoine et d’autres activités complémentaires) constituent une aide très importante pour la reproduction sociale. S’ils sont négatifs, la situation empire, mais la cause en est la conjoncture agricole ou la position de la famille dans le réseau de relations sociales, non le système successoral.
L’incidence du célibat et de la stérilité
60Le secret consiste donc à maîtriser le nombre d’enfants si l’on souhaite éviter une déchéance sociale rapide. Avec le système de l’héritier unique, le célibat est un mécanisme de régulation au sens où la réserve héréditaire ne quitte pas la maison et réduit les coûts de la reproduction. Ici le célibat ne permet pas de faire des économies – le célibataire entrera aussi dans le partage –, il est dû au fait qu’il y a assez de travail dans la maison et que l’on préfère cette situation plutôt que d’émigrer et de se retrouver dans une situation pleine d’incertitude. La situation du célibataire dans ces zones de partage égalitaire change lorsque les parents meurent et que le patrimoine fait l’objet d’un partage. Il se peut qu’il doive quitter la maison et aller vivre seul ou avec un frère ou une sœur célibataire ou marié(e). De nombreux célibataires préfèrent « vivre sur eux-mêmes » avec le patrimoine reçu et avoir un enfant illégitime qui prendra soin d’eux lorsqu’ils seront vieux. Ces célibataires ont leur importance parce que, à leur mort, on va aussi se partager ce qu’ils ont reçu de leurs parents. Ces biens recommencent à circuler au sein de la parentèle et aident à corriger les situations familiales les plus difficiles [39].
61Une autre situation assez fréquente est celle des couples mariés sans enfants qui, comme les autres, ont reçu un patrimoine de leurs parents et qui, à leur mort, le partagent comme il leur semble opportun entre leurs parents proches. Dans le tableau 8, une colonne fait référence à la manière dont les patrimoines sont reconstruits si un frère ou une sœur célibataire de l’un des parents partage le patrimoine entre ses neveux et nièces à parts égales. On peut voir, dans le tableau théorique, que le troisième enfant marié peut reproduire la situation patrimoniale de ses parents et le quatrième y parviendra à 75 %. Si l’on accumule l’effet des acquêts et la succession d’un parent quelconque, le quatrième enfant marié parvient à 90 % du patrimoine. Cela permet d’affirmer qu’avec ces mécanismes le système égalitaire offre de nombreuses possibilités de reproduction sociale.
L’importance du testament et le rôle secondaire de la dot
62Dans le système égalitaire, le partage se fait toujours au moment de la mort des parents [40]. C’est logique : leur survie et leur avenir se trouvent dans leurs biens. Transmettre ses biens avant, c’est déprécier ou affaiblir la famille elle-même, voire marquer des préférences qui peuvent être mal acceptées. Les partages liquident une situation et marquent le départ d’une nouvelle. Il ne peut y avoir de solution transitoire. Le testament reste le document-clé, celui qui clôt le processus.
63La dot dans ce système ne peut être la liquidation du droit de l’enfant comme dans les systèmes à héritier unique, c’est-à-dire le paiement de la réserve héréditaire entière. Elle ne peut être qu’une avance en argent liquide ou en biens meubles à déduire au moment du partage pour aider le nouveau couple à s’établir. Dans certains cas, la dot est insignifiante et se limite à un simple trousseau ou à du mobilier pour la nouvelle maison [41]. Les enfants héritent au moment de la mort de leurs parents.
64Il y a donc un laps de temps plus ou moins long entre le mariage des fils ou des filles et le moment d’accéder à l’héritage. La réalité est plus complexe, étant donné que le jeune couple reçoit les parts de son héritage à mesure que les parents du mari et de l’épouse meurent, c’est-à-dire en 4 phases. Entre le moment du mariage et l’héritage, il peut se passer une longue période [42]. De quoi vivent-ils en attendant ? Comment la transition est-elle organisée ?
65Le mariage, le moment plus important dans le système de l’héritier unique, est banal dans ce contexte. Il n’organise rien, n’assure pas la continuité de la maison, les cadets ne sont pas là pour établir des alliances étant donné que la notion de maison avec laquelle s’allier n’existe pas : en définitive, se marier n’est pas le moment decisif dans le système de partage égalitaire, sauf pour disposer de forces de travail à travers des enfants et prendre des assurances pour la vieillesse [43]. Si quelqu’un se marie, il ne sert à rien de demeurer dans la maison des parents (sauf situations exceptionnelles) : ce qui est normal, c’est de partir, d’avoir sa propre maison, afin que, le jour venu, le partage soit encore plus égalitaire. Cela ne signifie pas la rupture avec la famille, bien au contraire, étant donné que l’on vit souvent à proximité et que, peut-être, on travaille sur les terres paternelles ou maternelles, mais sans interférence avec un patrimoine qui serait destiné à l’ensemble des frères et sœurs.
66Dans toutes les zones de partage égalitaire les anthropologues ont trouvé des mariages nato-locaux [44]. Le jeune couple reçoit des parents vêtements et ustensiles domestiques, il cohabite avec les parents de l’un des deux, mais en réalité chacun a une vie séparée : le mari va le matin chez ses parents, où il travaille et est entretenu, et son épouse fait de même chez les siens. Les enfants du couple, qui vivent habituellement avec la mère, identifient davantage les grands-parents comme des parents que leur propre père. Ce type de situation peut durer jusqu’à ce que le couple puisse acheter une maison ou jusqu’à la mort de l’un des parents et au partage de l’héritage. Les parents des jeunes mariés rétribuent le travail de leurs enfants et leur laissent les fruits d’une pièce de terre afin qu’ils puissent économiser [45].
67Cette absence quasi totale de protection des enfants avant qu’ils n’héritent les oblige à saisir les occasions qui se présentent sur place : le travail chez les parents avec, parfois, la possibilité de conserver les fruits de certaines parcelles, les journées de travail chez des familles demandeuses qui n’ont pas d’enfants, l’apprentissage d’un métier ou encore une migration temporaire (saisonnière ou à long terme), une façon d’accéder à des ressources externes. Pegerto Saavedra a mis en évidence l’importance de ces revenus dans le nord de l’Espagne (Galice, Cantabrie, Asturies) et les a définis comme structurels [46]. Je suis d’accord avec cette interprétation, étant donné que le système oblige à chercher son revenu au sein du voisinage ou à l’extérieur, et qu’il peut servir, au moment des partages, à consolider les exploitations et à leur donner une certaine viabilité.
68Tout cela appelle une question : si l’on a suggéré que les cadets doivent abandonner la maison dans les systèmes à héritier unique, et que cela permet d’accéder à d’autres activités (on a même affirmé qu’en Catalogne ils ont été la base de la croissance industrielle), dans les systèmes égalitaires une partie des enfants se trouve dans la même situation tant qu’ils n’ont pas hérité. Cette période, très peu étudiée aussi bien par les anthropologues que les historiens, est cependant la clé qui permet de comprendre la reproduction des sociétés qui pratiquent le système égalitaire.
La vieillesse dans un système égalitaire
69Qui prend soin des parents âgés ? Que se passe-t-il lorsque les parents ne peuvent plus se prendre en charge ? Dans un système égalitaire, l’obligation n’incombe à aucun enfant en particulier et la question n’est pas envisagée avant que le problème ne se pose.
70On rencontre diverses situations : les parents peuvent ne pas être capables d’exploiter le patrimoine familial, mais demeurer en vie et en rester propriétaires ; l’un peut mourir, sa part peut être partagée, et l’autre conjoint peut lui survivre. Il est vrai aussi que la situation change d’une famille à une autre en fonction du nombre de frères et sœurs du mari ou de l’épouse, de la présence de célibataires dans la maison, de la proximité de la résidence des enfants, etc. Ces circonstances favorisent la diversité des solutions, plus variées que dans les zones à héritier unique.
71Il faut aussi distinguer les zones de partage égalitaire strict de celles qui recourent à la mejora pour l’un des enfants afin de compenser la prise en charge des parents au moment de leur vieillesse [47]. Que ce soit parce que l’un des enfants prend soin de ses parents avec l’accord de ses frères et sœurs ou à cause de la proximité, ou parce qu’un enfant célibataire est demeuré dans la maison et travaille avec les parents, les frères et sœurs acceptent que celui qui s’occupe des parents reçoive en compensation une partie du patrimoine. C’est dans le testament qu’apparaissent les avantages qui lui sont octroyés, la maison ainsi que d’autres biens. Ce système permet de déterminer assez tôt celui qui va se charger des parents et de ne provoquer aucun conflit quand l’un se retrouve veuf. Qu’un enfant demeure à la maison et en hérite comme récompense ne signifie pas que l’on est face au système de l’héritier unique, puisque le reste des biens entre totalement dans le partage.
72Dans le contexte des partages égalitaires stricts sans mejora les situations sont plus complexes. Si les aïeux ne peuvent plus cultiver, les enfants assurent ce travail, conformément à ce qui reviendra à chacun, en échange du paiement d’une rente à leurs parents [48]. Parfois, un frère ou une sœur prend en charge l’exploitation parce que les autres en sont éloignés ; c’est alors celui-là, ou celle-là, qui doit payer la rente.
73La mort du père ou de la mère ne représente pas les mêmes conséquences, quoique chacun ait les mêmes biens et les mêmes acquêts. Si c’est la mère qui disparaît, l’exploitation peut rester aux mains du père, alors que si c’est le père, le plus logique est que l’exploitation cesse et que la mère organise le partage des biens alors qu’elle est encore en vie, en échange des soins dont elle aura besoin dans ses vieux jours. La protection de la veuve est très importante, au cas où elle ne serait pas capable de s’occuper de ses terres. C’est la raison pour laquelle, dans certaines régions, le 1/5e de libre disposition lui est laissé afin de la protéger.
74La prise en charge des parents âgés peut aussi se faire « au mois ». Ils vont vivre pendant un temps et successivement chez chacun de leurs enfants, ce qui maintient aussi, de ce point de vue, le partage égalitaire strict [49].
Faire ses partages et reconstruire
75Comme on l’a précisé, le système du partage égalitaire possède trois mécanismes qui atténuent la prétendue division des exploitations agricoles : 1° le fait qu’une famille accumule le patrimoine du mari et celui de l’épouse ; 2° les acquêts qui s’ajoutent à ce que reçoivent les enfants ; et 3° les héritages qui viennent de personnes celibataires et de couples sans enfants. D’autres mécanismes tentent de réduire l’impact du partage égalitaire.
76La période écoulée jusqu’à la mort des parents, moment où se produit le partage, entraîne certains enfants à se marier hors du village ou à migrer temporairement, leur vie s’organisant hors de leur localité d’origine [50]. Il est assez habituel que les enfants qui demeurent dans leur village natal louent ou rachètent à leurs frères et sœurs les parcelles familiales, ce qui permet de reconstruire l’exploitation initiale [51]. On peut parler de paiement à terme des réserves héréditaires, toutefois, subsiste le doute sur l’origine des capitaux de celui qui procède à ces achats. Il est possible que les revenus provenant du travail réalisé comme journalier ou de migrations extérieures soient fondamentales pour réaliser ce rachat. Pour les frères et sœurs mariés dans d’autres villages, les ventes de ceux-ci, du fait de leur éloignement, constituent le capital nécessaire pour le rachat dans la communauté dans laquelle ils sont installés. D’autres, par contre, peuvent vendre pour disparaître de la communauté. Il n’y a pas de doute cependant que les migrations définitives sont une façon de réguler le système, de la même manière qu’une croissance démographique excessive peut altérer les équilibres internes et rompre l’efficacité des stratégies signalées.
Mariages « au troc » et échange des enfants
77Le mariage est une autre possibilité. Deux familles ayant des parcelles contiguës ont tout intérêt à « échanger » leurs enfants pour réunir leurs terres [52]. À d’autres moments, le troc des enfants est la meilleure manière d’annuler l’effet du partage. Le mariage « au troc » consiste à effectuer un double mariage en échangeant les enfants : un fils se marie avec une fille d’une autre maison et vice versa. En ce qui concerne ces enfants, les deux familles évitent le partage et les 4 enfants demeurent dans la même position [53]. C’est un type de mariage très fréquent dans les zones de partage égalitaire.
78Un autre type de mariage peut intervenir entre parents consanguins, quoique dans ce cas on n’évite pas le partage. Cousins germains, cousins issus de germains et cousins éloignés se marient entre eux, afin de réduire au maximum le marché matrimonial ainsi que les concurrents sur le marché de la terre qui peut se contracter [54].
79D’autres pratiquent la communauté des frères et des sœurs qui continuent à vivre ensemble et à travailler les terres familiales comme ils le faisaient du vivant de leurs parents [55]. Au lieu d’organiser le partage d’une manière stricte lorsqu’ils disparaissaient, il est assez fréquent de rencontrer des frères célibataires, épousant des sœurs elles aussi célibataires, qui vivent ensemble et s’occupent conjointement de l’exploitation familiale, économie d’échelle très efficace pour les deux couples qui, finalement, quand ils ont pu économiser assez, s’installent chacun dans une maison différente.
L’importance du célibat définitif
80Le célibat définitif est un autre moyen d’éviter la fragmentation des patrimoines. On a vu que plus il y a d’enfants qui se marient, moins cela affecte le partage. Malgré les mécanismes exposés, le célibat aussi bien masculin que féminin tend à être élevé, quoiqu’il ne réduit pas les effets du partage. Demeurer célibataire dans la maison implique de vivre au même niveau que la famille, quitter la maison constitue un risque (l’émigration, l’issue la plus fréquente). Si l’on a besoin de main-d’œuvre, le célibataire a du travail à la maison et n’émigre pas. Mais au moment du partage, le célibataire perd son travail et ne récupère que la partie qui lui revient dans l’héritage.
81Le célibataire, homme ou femme, reçoit sa part, et recommence une nouvelle vie [56]. Parfois, le patrimoine reçu et le revenu des travaux effectués comme journalier permettent de vivre seul. De nombreuses célibataires vivent « sur elles-mêmes », comme on dit en Galice, et certaines n’hésitent pas à avoir un enfant illégitime pour qu’il prenne soin d’elles sur leurs vieux jours. Le nombre d’enfants naturels dans la Galice et au nord du Portugal ne peut être compris que dans cette perspective [57]. Une autre solution consiste à former une famille sans liens conjugaux. Presque toutes les structures familiales reconstruites avec la méthode de Laslett dans ces zones de partage égalitaire donnent des pourcentages très élevés (aux alentours de 10 %) de foyers monoparentaux et le même pourcentage de foyers sans structure conjugale. C’est là que se rencontrent les célibataires, hommes et femmes, frères et sœurs ou non, vivant ensemble [58]. Le patrimoine de ces célibataires retourne, tôt ou tard, à la communauté déjà hors des neveux et nièces ou d’autres types de parents, comme on a vu. Cette solution aide aussi à la reconstitution des patrimoines.
82*
83Le moment est venu de réviser certains lieux communs propres aux systèmes de succession dans la péninsule Ibérique. En premier lieu, la loi ne fait pas la pratique. La législation de fueros de certaines zones qui avait évolué pour rendre possible l’existence de l’héritier unique permettait la répartition des patrimoines grâce à la liberté de tester. Dans des zones de Navarre ainsi que dans le sud de la Catalogne, on pratiquait des systèmes égalitaires sans difficulté. Il se produisait la même chose avec le système castillan qui, grâce à un préciput (mejora) du tiers et de cinquième, permettait, dans le Guipúzcoa, les Asturies, la Cantabrie et une partie de la Galice, de développer des pratiques quasi identiques à celles des zones de prédominance de l’héritier unique.
84En deuxième lieu, l’idée selon laquelle le système de répartition égalitaire entraînait la pulvérisation des exploitations. Nous pensons avoir apporté assez d’éléments pour montrer qu’il y avait des stratégies suffisantes (la somme des biens des deux conjoints, l’importance des acquêts, la remise en circulation des biens des célibataires ainsi que des couples sans enfant, la période antérieure à l’héritage qui permettait de capter des ressources dans d’autres environnements, etc.). Tout cela indique que les exploitations agricoles ne devaient pas nécessairement se dégrader en raison du système héréditaire égalitaire : tout autre chose était la croissance démographique excessive, ou une conjoncture agraire difficile conduisant à l’endettement et à la ruine des exploitations, mais cela se passait aussi dans les zones de prédominance de l’héritier unique.
85Et, en troisième lieu, l’idée selon laquelle aussi bien les groupes aisés que les élites paysannes avaient recours au majorat, pour réduire le risque de pulvérisation. On doit chercher d’autres raisons pour expliquer cette option. Le système égalitaire castillan permet la reproduction sociale des conditions de vie, mais au prix de la perte de la mémoire familiale et lignagère. En certaines occasions on a besoin de reproduire des relations de pouvoir ou de statut social et, de ce point de vue, le système égalitaire était peu utile. C’est pour cela que nous pensons que certains groupes sociaux, qui avaient fait de la mémoire un mécanisme de pouvoir et de prestige social, durent avoir recours à la primogéniture.
86Il n’est plus possible aujourd’hui de maintenir que le système provoque la pulvérisation foncière et la destructuration sociale quand tous les indicateurs montrent la capacité de réproduction des structures de la propriété dans le temps. Ce sont les relations sociales qui en déterminent l’évolution, non pas les systèmes de succession.
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Mots-clés éditeurs : reproduction sociale, système égalitaire, système inégalitaire, famille, Espagne, majorat, stratégies matrimoniales
Mise en ligne 01/01/2008
https://doi.org/10.3917/hsr.027.0037Notes
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[*]
Professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Barcelone, Departement d’Història Contemporània, Facultat de Geografia i Història, C/ Montalegre 4-6, 08001-Barcelona. Courriel : <llferrer@ ub. edu>.
-
[1]
Ferrer Alos, 1993, 1998, 2004. Construit sur le latin latifundium, le minifundio est une petite exploitation agricole peu rentable.
-
[2]
Lison Tolosana, 1976, p. 38-49 ; Mikelarena, 1992b, p. 29-30 et Contreras, 1991.
-
[3]
De la même manière, il y a des zones de fuero comme la Navarre où se mêlent dans un espace restreint des pratiques égalitaires et inégalitaires.
-
[4]
Cartes dans Béaur, 2000, p. 43 et Yver, 1966. L’historiographie française récente a beaucoup apporté pour comprendre cette complexité : Le Roy Ladurie, 1972 ; Bouchard, Goy et Head-König, 1998.
-
[5]
En France, ces pratiques ont été largement étudiées : Chiva et Goy, 1981 ; Claverie et Lamaison, 1982 ; Collomp, 1983 ; Fauve Chamoux, 1984 ; Zink, 1993.
-
[6]
Terradas, 1980 ; To, 1993.
-
[7]
Au niveau juridique, des décisions ont été prises pour ratifier ce que la société catalane développait dans la pratique. C’est en 1343 que la légitime est réduite à un quart et, aux Cortes de Perpignan de 1351, on reconnaît l’existence de l’heretament : Broca de Amell, 1987, p. 368-369 ; Puig Salellas, 1996, p. 131.
-
[8]
Il ne reste à payer qu’une somme symbolique appelée drets de casa (droits de maison), mais jamais réclamée. Elle maintient le lien entre le cadet et la maison.
-
[9]
Dans certaines familles, faute d’héritier mâle, c’est une fille (la pubilla) qui devient responsable du patrimoine en tant qu’aînée. Les rôles sont inversés et certains cadets (hommes) peuvent occuper la place traditionnelle des filles mais la situation est rare.
-
[10]
Il existe une institution appelée associació de compres i millores près de Tarragone ou Tortosa et convinença ou mitja guadanyeria dans le Val d’Aran : Broca de Amell, 1987, p. 832-844.
-
[11]
Moreno et Zabalza, 1999, et Mikelarena, 1992a et 1995, p. 309-315.
-
[12]
Robada : mesure navarraise égale à 8,98 ares.
-
[13]
En Navarre, le système de l’héritier unique s’est développé autour d’Aoiz, dans la province de Pampelune, et dans une bonne partie de celles d’Estella et de Tafalla : Mikelarena, 1992a et 1995, p. 318.
-
[14]
À l’exception des 19 villes qui font partie de la seigneurie de Biscaye régies par le droit castillan : Navajas Laporte, 1975, p. 245-250.
-
[15]
Ibañez et al., 1994, p. 39-41 ; Navajas Laporte, 1975, p. 248-249.
-
[16]
Voir Gonzales Portilla et Urritikoetchea, 2003 ; Homobono, 1991 ; Ibañez et al., 1994 ; Urritikoetxea, 1992. Sur le Pays Basque français voir Arrizabalaga, 1997, 2002a, 2002b.
-
[17]
En Navarre, les dots masculines sont en général plus faibles que celles des filles, les garçons semblent plus aptes à les faire fructifier : Moreno et Zabalza, 1999.
-
[18]
Les études démographiques sur Irún ou Bergara montrent que dans les zones d’habitat dispersé ou de hameaux, le nombre de mariages est extrêmement faible, le taux de célibat, l’âge du mariage très tardif pour les deux sexes, une forte différence d’âge entre les conjoints et des secondes noces rares : Ibañez et al., 1994 ; Urritikoetxea, 1992.
-
[19]
Gacto, 1987.
-
[20]
Garcia Fernandez, 1994, p. 23.
-
[21]
Voir pour le nord du Portugal : O’Neill, 1987, p. 306-340 ; et pour Santa María del Monte en León : Behar, 1986, p. 68-90.
-
[22]
Navajas Laporte, 1975, p. 90-105.
-
[23]
Urrutikoetxea, 1992.
-
[24]
Gomez Pellon, 1991 ; Pedregal, 1981.
-
[25]
Navajas Laporte, 1975, p. 253.
-
[26]
Dans les Asturies, on observe des pratiques complexes : alors que le système de l’héritier unique est en principe majoritaire, dans le hameau d’Escobinos, on pratique le partage égalitaire entre les frères et sœurs et la recomposition patrimoniale se fait grâce au mariage, « au troc » entre parents très proches ou grâce au rachat par l’un des frères ou sœurs des parts des autres (paiement différé de la réserve héréditaire). Fernandez et Lellep Fernandez, 1988, p. 123-142.
-
[27]
Ce n’est que dans certaines zones d’Orense que l’on pratique le partage égalitaire au sens strict. Dans le reste le système de mejora corta.
-
[28]
Saavedra, 1988, p. 111-113.
-
[29]
Lison Tolosana, 1971, p. 173-1830 ; Saavedra, 1988, p. 115-129 et 2002, p. 147-149.
-
[30]
Lanza Garcia, 1988.
-
[31]
De nombreux travaux sur le système castillan se contentent de quantifier les types de testaments et déduisent les pratiques d’après le choix du testateur. En réalité, dans un système légal si ouvert, il faut reconstruire les familles et les patrimoines pour comprendre la reproduction sociale.
-
[32]
D’après Ceballos Cuerno, 1999, p. 55-68, qui a étudié la vallée de Curiezo en Cantabrie, la tendance égalitaire initiale évolue du fait de l’apparition des legs comme forme de pratiques non égalitaires. Toutefois, on n’en connaît pas le montant et il est difficile d’affirmer qu’il s’agit de la pratique de l’héritier unique. Les mariages « de troc » et les mariages entre consanguins évoquent plutôt des pratiques égalitaires. Au centre de la cordillère cantabrique le système familial rappelle celui des Asturies avec la création d’une société de pan y mantel (mangeant à table bien garnie) : Lopez Moran, 1981, p. 253-258.
-
[33]
Sur le majorat, voir les travaux classiques de Clavero, 1989 et Perez Picazo, 1990. Pour Martínez Lopez, 1996, la bourgeoisie grenadine ne pratique ni le majorat ni la mejora du 1/3 et du 1/5e : elle organise le partage de manière égalitaire. En Castille comme autour de Grenade, pour éviter une division excessive, la bourgeoisie recourt à diverses solutions : avances sur héritage, partage de certains biens en fonction du sexe, réduction des familles où est possible de trouver épouse ou taux de célibat élevé : Heran, 1980, p. 215-244. Dans d’autres cas, le majorat et la concentration des biens libres sur un des fils conduisent à réserver à un seul héritier 92,7 % de tous les biens : Parias Sainz de Rozas, 1991.
-
[34]
Dedieu, 2002. Sur la création de majorats par des commerçants de Murcie, voir Velasco Hernandez, 1997 ; sur Valence, voir Casey, 1991, p. 64-67. Voir en outre la famille Espadero-Paredes d’Estrémadure : Teston et Sanchez, 2002.
-
[35]
Au cours des dernières années, l’historiographie française, pour qui les systèmes égalitaires conduisent à la destruction des exploitations, a révisé ce jugement en cherchant à en comprendre la logique : Derouet, 1982, 1989, 1993, 1994 et 1997. Sur les zones où domine le partage égalitaire : Augustins, 1989 ; Barthelémy de Saiziet, 1985 ; Bonnain et al.,1992 ; Pingaud, 1971 et 1995 ; Rolley, 1998a.
-
[36]
À la fin du xviiie siècle dans le Salnés galicien, on trouve 3,96 héritiers par testament : Perez Garcia, 1991, p. 300-301. Vers 1750 à Valladolid, on chiffre à 2,9 enfants la moyenne des familles ayant une descendance : Garcia Fernandez, 1994, p. 271. Parallèlement, 20,1 % des familles de commerçants de Cadix n’ont pas d’enfants et 34,6 %, 2 au plus : Fernandez Perez, 1997, p. 243-268.
-
[37]
Le système de partage égalitaire a été étudié pour l’essentiel à partir des desiderata des testateurs mais non des pratiques signalées par les inventaires, les mémoires d’imposition, les partijas ainsi que d’autres documents du même ordre. Une étude extrêmement détaillée de cette documentation à la Vega del Esla en León montre que les acquêts représentent un montant important dans les comptes du fisc sur lesquels se font les partages : Pérez García, 1998. Voir aussi les calculs effectués par Bartolome Bartolome, 2002, p. 183.
-
[38]
Cf. le cas de la société familiale galicienne du Morrazo : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 453-458.
-
[39]
Une analyse des héritiers à Cáceres souligne que 52,3 % sont les enfants, 18,3 % les conjoints, 14,4 % les frères et sœurs, 8,5 % d’autres membres de la famille : Santillana Perez, 1992. Au xviiie siècle dans le Morrazo galicien, 10,3 % des testaments sont signés par des célibataires et les biens sont pour l’essentiel distribués entre neveux et nièces (9) et frères et sœurs (4) : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 451. Dans les Rías Baixas, les célibataires et les personnes mariés sans enfants désignent comme héritiers les conjoints (7), les frères et sœurs (10), les neveux et nièces (17), les cousins et cousines (3) ainsi que les voisins (8) : Perez Garcia, 2002, p. 47-104. Dans la Tierra de Montes, 22,3 % des testaments sont faits par des couples mariés sans enfant ou des célibataires avec comme héritiers les parents proches (35,5 %), les neveux et nièces (29 %), les frères et sœurs (22,6 %) ou conjointement les frères, les neveux et nièces (6,4 %) : Fernandez Cortizo, 1988, p. 158.
Dans le León, 7,2 % sont des célibataires. 24,8 % des couples sont sans enfant, 27,02 % en ont seulement un et 19,86 % deux : Perez Garcia, 1998. La moyenne des enfants par testament est de 2,19, chiffre très proche de la situation optimum de reproduction sociale dans la logique du système successoral.
García Fernandez, 1994, p. 188 et 271, fait les mêmes constatations pour Valladolid. Les célibataires et les couples mariés sans enfant participent au rééquilibrage du système. Dans les testaments étudiés par lui, 51,1 % des testateurs n’ont pas d’enfant et, dans le reste, 12 % n’en ont qu’un et 12,8 % deux. Cependant le nombre de testaments sans enfant est trop élevé, peut-être parce que les célibataires et les ecclésiastiques ont été pris en compte. -
[40]
Voir, pour le nord du Portugal O’Neill, 1987, p. 306-340 ; pour Becedas (Madrid) Brandes, 1975, p. 107-120 ; pour Cuenca, Reher, 1996, p. 76-77 ; pour Murcie Chacon Jimenez, 1990c ; pour l’Andalousie Moreno, 1972, p. 279-284.
-
[41]
Voir, pour le cas de Cáceres en Estrémadure Santillana Perez, 1992, p. 106. Pour le León, Behar, 1986, p. 104-109 ; Bartolome Bartolome, 2002, p. 183. Sur Valladolid, Garcia Fernandez, 1994, p. 255. Pour Pozuelo (Madrid), Barbazza, 1998, p. 87-102. Pour Murcie, Chacon Jimenez, 1990c. Pour Grenade, Casey et Vincent, 1987, p. 192.
-
[42]
Un dicton résume bien cette situation : « Los suegros son como las patatas, no dan fruto hasta que estan bajo tierra » (Les beaux-parents sont comme les pommes de terre, ils ne donnent pas de fruit avant d’être sous terre) : Behar, 1986, p. 68.
-
[43]
O’Neill, 1987, p. 288-305. Lison Tolosana, 1971, p. 312-313, décrit la faible importance des mariages à Orense, qui ne se font que presque cachés.
-
[44]
Pour une description des pratiques nato-locales voir Lison Tolosana, 1971, p. 182. Voir le cas de Fontelas dans le nord du Portugal : O’Neill, 1987, p. 288-305. Pour le cas d’Orense, voir Lison Tolosana, 1971, p. 312-313. Pour le León, Behar, 1986, p. 104-109. Pour Becedas (Madrid), Brandes, 1975, p. 107-120. Sur Camino Viejo (Guadalajara), voir Perez Diaz, 1972, p. 81. Dans la zone de Tortosa en Catalogne : Jociles, 1989, p. 75-76. En Andalousie, voir Moreno, 1972, p. 279-284.
-
[45]
Voir cette réflexion pour Tortosa (Catalogne) dans Jociles, 1989, p. 85.
-
[46]
Saavedra, 2002, p. 143.
-
[47]
Dans une partie importante de la Galice, on adopte cette solution comme dans le Morrazo : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 449 ; voir aussi Lison Tolosana, 1971, p. 173-183. Pour la zone des Rias Baixas : Perez Garcia, 2002, p. 47-104, où c’est le même modèle que celui de la Lanzada et de la Tierra de Montes : Fernandez Cortizo, 1988, p. 158. À Valladolid aussi il semble bien que la mejora corta a ce sens : García Fernandez, 1994, p. 166.
-
[48]
Dans la Galice, ce système s’appelle a congra : Lison Tolosana, 1971, p. 182. On en trouve des exemples dans le Morrazo galicien (Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 451), à le León (Behar, 1986, p. 68-90) et à Cuenca (Reher, 1988, p. 201-235).
-
[49]
Dans le Morrazo, ceci prend fin lorsque la mère ne peut plus subvenir à ses besoins. Alors une fille la prend en charge et ses frères et sœurs lui versent un certain montant : Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 451. On trouve aussi des exemples à Becedas (Madrid) : Brandes, 1975, p. 107-120. À Cuenca, les anciens qui vont d’une maison à une autre sont appelés meseros (au mois) ou semaneros (à la semaine) : Reher, 1988, p. 201-235. À Tortosa (Catalogne), lorsqu’on ne verse pas la mejora à un héritier pour prendre en charge les parents, chacun s’en occupe à tour de rôle : soit les parents se déplacent, soit les enfants vont à la maison des parents : Jociles, 1989, p. 81-84.
-
[50]
La situation des enfants au moment de l’héritage peut conditionner leurs relations futures. Tous sont égaux au point de départ mais les situations sont inégales, ce qui peut expliquer les accords auxquels parviennent les frères et sœurs : O’Neill, 1987, p. 306-340.
-
[51]
Voir pour Murcie Chacon Jimenez, 1990c.
-
[52]
Voir des exemples à Valladolid : Garcia Fernandez, 1994, p. 179, et à Pozuelo : Barbazza, 1998, p. 87-102.
-
[53]
Dans les Rías Baixas galiciennes, le nombre de mariages « au troc » se situe entre 12,5 % et 25 % : Perez Garcia, 2002, p. 47-104 et 2004. Pour la Tierra de Montes à Pontevedra, voir Fernandez Cortizo, 2004. Pour une analyse plus générale sur la Galice : Rey catelao, 1990. Pour Pozuelo (Madrid) : Barbazza, 1998.
-
[54]
Voir certains exemples de Cuenca : Reher, 1988, p. 201-235.
-
[55]
On peut en trouver une description dans Behar, 1986, p. 109-112.
-
[56]
Il existe peu d’informations sur le rôle des frères qui entrent dans les Ordres. Garcia Fernandez, 1994, p. 259-265, affirme que ceux qui entrent en religion renoncent à la réserve héréditaire et sont donc exclus des partages. Dans les testaments du milieu du xviiie siècle, 13,7 % des enfants sont entrés en religion. Néanmoins ils peuvent tester, mais il faudrait savoir en faveur de qui : Ferrer Alos, 1991.
-
[57]
On trouvera des réflexions générales dans Saavedra, 2002, p. 142-146. Voir sur le Morrazo Rodriguez Ferreiro, 1984, p. 439. Pour le nord du Portugal, O’Neill, 1987, p. 306-340, trouve des taux d’enfants naturels de 47,4 %. À Becedas (Madrid) on rencontre le même cas : Brandes, 1975, p. 107-120. Le pourcentage d’enfants illégitimes dans des paroisses du Portugal atteint 15 à 20 % : Volpi Scott, 1999, p. 222-224. Dans la province de Lugo, de 1840 à 1859, ce pourcentage se situe entre 15 et 20 %.
-
[58]
Voir les données sur le nord du Portugal : Volpi Scott, 1999, p. 248-249. Dans le León, on rencontre 13,2 % de solitaires (Perez Garcia, 1998) constatés aussi par Perez Alvarez, 1997, p. 259-260. À Becedas (Madrid) : Brandes, 1975, p. 107-120. À Cuenca : Reher, 1988, p. 59-74. À La Ñora (Murcie) : Martinez Carrion, 1988, p. 96. En 1752 dans Grenade : Casey et Vincent, 1987, p. 176. Au nord-est de l’Algarve : Bastos, 1988, p. 115.