Couverture de HOMI_1328

Article de revue

Mineurs migrants et traite des êtres humains

Les oubliés de la protection de l’enfance

Pages 35 à 42

Notes

  • [1]
    Ces statistiques ne reflètent pas le nombre réel de mineurs non accompagnés arrivés en Europe Dans certains pays comme la Grèce, l’Espagne ou la France, les demandes d’asile pour les mineurs non accompagnés sont peu pratiquées, tandis qu’en Suède ou en Allemagne elles sont quasi systématiques.
  • [2]
    Dans certains États, c’est l’échelon local qui est responsable de la protection de l’enfance et donc des budgets alloués à l’accueil des mineurs non accompagnés, dans d’autres États comme le Royaume-Uni, c’est le ministère de l’Intérieur qui finance leur prise en charge.
  • [3]
    Angelina Étiemble, « Les mineurs isolés étrangers en France », in Migrations études, n° 109, 2002.
  • [4]
    Observatoire sur la migration de mineurs (OMM), Mineurs isolés étrangers et sans protection en Europe. Rapport pour les jeunes et les enfants, adaptation du rapport Pucafreu, sous la direction de Daniel Senovilla Hernandez, 2014. On peut citer aussi le projet « Mario » mené par Terre des hommes sur ces mêmes aspects.
  • [5]
    Bénédicte Lavaud-Legendre (dir.), Prostitution nigériane : entre rêves de migration et réalité de la traite, Paris, Karthala, 2013 et, plus récemment, ECPAT France, Groupes religieux sociaux et criminels dans la traite des filles et femmes nigérianes. Le cas des temples, des femmes et des groupes cultists, Bonneuil-en-France, ECPAT France, mars 2019. Url : https://ecpat-france.fr/www.ecpat-france/wp-content/uploads/2019/04/WEB_rapport_nigeria_FR.pdf.
  • [6]
    Alain Reyniers « La troisième migration », in Revue d’études tsiganes, n° 1 1993.
  • [7]
    Voir sur ces aspects, Olivier Peyroux, Délinquants et victimes. La traite des mineurs d’Europe de l’Est en France, Paris, Non lieu éd., 2013.
  • [8]
    L’opération Europa, menée en 2010 dans le cadre du « Joint Investigation Team - UK and Romania » à l’initiative de la London Metropolitain Police, a révélé les situations d’exploitation dans les différents pays cités.
  • [9]
    Le 1er août 2017, le ministère de la Justice français annonce une augmentation sans précédent (16 % en un an) des mineurs incarcérés. Le détail des chiffres montre que cette augmentation concerne essentiellement les mineurs non accompagnés.
  • [10]
    Il existe même une association en Algérie venant en aide aux familles dont les enfants sont partis en Europe sans donner de nouvelles.
  • [11]
    Francesco Vacchiano, « 
  • [12]
    Cette information est confirmée par l’enquête des journalistes du Guardian, Annie Kelly, Mei-Ling McNamara, « 3,000 Children Enslaved in Britain after Being Trafficked from Vietnam », in The Guardian, 23 mai 2015.
  • [13]
    Voir National Crime Agency, National Referral Mechanism Statistics : End of Year Summar, Londres, National Crime Agency, 2014 et 2017.
  • [14]
    Nicolas Lainez, « L’exploitation de la sexualité des femmes par leur famille au Vietnam : financer les chocs exogènes et le crédit informel », in Autrepart, n° 66, 2013, pp. 133-152.
  • [15]
    Daniel Silverstone, Stephen Savage, « Farmers, Factories and Funds : Organised Crime and Illicit Drugs Cultivation within the British Vietnamese Community », in Global Crime, vol. 11, n° 1, 2010, pp. 16-33.
  • [16]
    En novembre 2010, près d’un an après la Serbie et la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine et l’Albanie obtiennent la libéralisation des visas de court séjour pour l’espace Schengen.
  • [17]
    Observations réalisées lors de plusieurs séjours en Albanie entre 2015 et 2017, voir aussi sur l’implication du crime organisé dans la migration irrégulière : Danilo Mandic, Separatists, Gangsters and Other Statesmen : The State, Secession and Organized Crime in Serbia and Georgia, 1989-2012, Thèse de doctorat en sociologie, Cambridge, Université d’Harvard, 2015.
  • [18]
    Entretien avec des magistrats du Royaume-Uni qui constatent l’utilisation de mineurs albanais pour le transport d’héroïne entre la France et le Royaume-Uni.
  • [19]
    Données tirées des rapports de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) des différentes directions territoriales et de discussions avec des éducateurs à Paris, à Lyon, à Lille, etc.
  • [20]
    On peut citer ici la Convention internationale des droits de l’enfant adoptée par l’ensemble des pays européen ou la directive UE/2011/36 qui met l’accent sur la protection des victimes de traite des êtres humains. Elle s’impose à l’ensemble des États membres depuis 2011 et avec obligation de transcription dans le droit national depuis avril 2013.
  • [21]
    Claudia Charles, Lola Schulmann, « De Rabat à Khartoum : l’externalisation en marche », in Migreurop, Atlas des migrants en Europe, Paris, Armand Colin, 2017.
  • [22]
    En octobre 2019, le procès dit « Roman expess », qui s’est tenu au Tribunal de grande instance de Paris et concernait une trentaine d’enfants exploités comme pickpockets dans le métro parisien, reflète cette tendance. Malgré les écoutes téléphoniques faisant état des menaces sur les enfants ne rapportant pas assez d’argent, les mauvais traitements constatés et l’aspect très lucratif de cette exploitation, certains enfants pouvant rapporter jusqu’à 20 000 euros par mois, les condamnations des auteurs oscillaient entre 3 ans et 6 ans et demi. Aucun enfant n’était présent lors du procès. Aucun enfant n’a été protégé en France. Une partie d’entre eux a été déplacée en Espagne afin d’y être exploitée de la même manière.
  • [23]
    Loi 2013-711 du 5 août 2013 qui mentionne : « L’exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d’un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d’agression ou d’atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l’un de ses organes, d’exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d’hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit. »

1Les politiques migratoires restrictives mises en place après les Printemps arabes ont entraîné l’augmentation du nombre de mineurs non accompagnés en Europe. La quasi-impossibilité pour les jeunes ressortissants de nombreux pays d’obtenir un visa a fait que le statut de « mineur non accompagné » (MNA) est devenu l’une des seules possibilités, avec l’asile, pour pouvoir se maintenir légalement dans l’UE, obtenir une prise en charge et espérer une régularisation après 18 ans. Selon Eurostat, entre 2008 et 2013, le nombre de MNA sollicitant l’asile en Europe était constant et s’établissait autour de 11 000. En 2014, leur nombre a doublé tandis qu’en 2015 ils étaient 96 465, soit presque 9 fois plus qu’en 2013 [1]. Ces évolutions expliquent les changements de pratiques des États et leurs conséquences en matière de standards de protection de l’enfance. Depuis 2014, bien qu’il existe de fortes disparités au sein des régions d’un même pays [2], la tendance, pour l’ensemble des pays européens, est la mise en place de mesures visant à limiter les coûts liés à la prise en charge de ces mineurs, et donc leur protection.

2Cette baisse des standards de protection s’est accompagnée d’une augmentation des situations de mineurs exploités. Désormais, à côté des mineurs d’Europe de l’Est pris dans des réseaux familiaux, précédemment majoritaires parmi les enfants victimes de traite des êtres humains, d’autres types sont apparus : les mineurs migrants voyageant par étapes (step by step), exploités temporairement pour pouvoir payer les passeurs ; les mineurs endettés devant trouver des moyens de gagner de l’argent pour rembourser leur famille ou leur proche ayant financé leur venue en Europe ; les adolescents n’arrivant pas à réaliser leur projet migratoire et cherchant à mettre en scène sur les réseaux sociaux leur réussite matérielle ; les jeunes filles dont l’exploitation sexuelle est devenue une voie pour atteindre l’Europe.

3Dans la littérature scientifique, la question de l’utilisation d’enfants en migration pour commettre des délits demeure très peu documentée. Les travaux portent sur les raisons du départ et se fondent souvent sur la typologie d’Angelina Étiemble [3]. Du point de vue de la protection de ces enfants, des recherches-actions financées par l’Union européenne pendant plusieurs années ont passé en revue les failles des dispositifs de prise en charge en Europe de l’Ouest [4] sans forcément s’intéresser au fonctionnement de cette exploitation. Enfin, concernant la question de la traite des êtres humains, les recherches se sont surtout concentrées sur la situation des femmes et jeunes filles nigérianes [5] exploitées sexuellement en Afrique et en Europe. Ainsi, depuis 2015, les autorités judiciaires françaises et celles de nombreux pays d’Europe constatent une augmentation d’enfants étrangers impliqués dans des vols à la personne, des cambriolages ou encore du trafic de drogues. Ces délits sont surtout interprétés comme des actes de délinquance ou de « débrouille économique ».

4L’absence de travaux de recherche masque des phénomènes d’exploitation pour lesquels les mineurs en migration sont davantage exposés. La non prise en compte de ces enjeux en Europe par les autorités crée un cercle vicieux. Elle limite la création de dispositifs de protection adaptée et vient alors renforcer l’attrait pour des organisations criminelles diverses (familiale, communautaire, etc.). Bien qu’il existe une hétérogénéité importante de ces enfants, elles apparaissent comme un des seuls moyens pour atteindre l’avenir souhaité. En partant de situations concrètes, cet article a pour objectif de décrypter le fonctionnement des mécanismes d’exploitation dont sont victimes ces jeunes. Il repose sur un travail de terrain démarré en 2005 et qui se poursuit actuellement auprès des mineurs étrangers utilisés dans la commission de délits en région parisienne. Les données se fondent sur des entretiens avec ces enfants dans des squats, des bidonvilles ou en prison, de nombreux séjours dans les pays d’origine afin de rencontrer les familles, d’étudier les raisons du départ et le fonctionnement des groupes criminels qui en profitent.

Une réalité ancienne

5Les enfants contraints à commettre des délits, forme d’exploitation relevant de la traite des êtres humains, sont une pratique ancienne en Europe. Parmi les premiers groupes toujours actifs actuellement, on peut citer le cas de jeunes filles roms yougoslaves dont quelques familles se sont spécialisées, dès les années 1980, dans l’utilisation d’enfants pour commettre des cambriolages ou des vols de portefeuilles [6]. Contraints à voler par leur famille ou leur belle-famille, l’emprise psychologique reposait sur un dévoiement des fonctionnements familiaux. La majorité de ces jeunes filles étaient recrutées par mariage. Lors de la noce, la contre-dot versée par la famille du futur mari au père de la jeune fille était, chez ces familles déviantes, nettement plus élevée que la pratique usuelle au sein du groupe. Cette somme d’argent se transformait pour la jeune fille en une dette auprès de sa belle-famille qu’elle devait rembourser par des vols. Quarante ans plus tard, ces mêmes groupes familiaux – certains en sont à la troisième génération – continuent de recruter et d’exploiter des jeunes filles en France, en Allemagne, en Italie ou en Autriche selon les mêmes modalités sans être véritablement inquiétés. Dans certains cas, la contre-dot versée peut atteindre les 100 000 euros [7].

6À la fin des années 2000, des groupes criminels provenant de petites villes roumaines vont à leur tour exploiter des enfants à travers la mendicité ou le vol. Le cas de la ville de Tandarei est l’un des plus emblématiques. Malgré les différentes enquêtes sur et les arrestations des membres d’une organisation reposant sur quelques individus ayant migré au Royaume-Uni et faisant venir des enfants pour les contraindre, dix ans plus tard, l’asservissement s’est transformé en un modèle économique familial signe de prestige social. Les enfants sont désormais exploités en France, en Espagne, au Royaume-Uni et en Allemagne [8]. Signe de cette intensification de la traite des enfants, si, au milieu des années 2000, Tandarei possédait une quarantaine de villas appartenant aux différents clans, aujourd’hui le nombre de « palais » est supérieur à 200. Cette expansion traduit une répartition des gains entre un nombre croissant de familles de la ville. L’exploitation des enfants se mue localement en un modèle d’ascension sociale et de prestige.

7En dehors des modalités d’emprise reposant sur des conflits de loyauté et de la servitude pour dettes, ces différents groupes utilisent des stratégies communes afin d’échapper aux poursuites pénales. L’objectif est d’empêcher un suivi de ces enfants. Les jeunes doivent livrer un discours stéréotypé dont l’objectif est d’empêcher les autorités de remonter jusqu’aux donneurs d’ordre. Parfois, ils refusent toute prise d’empreintes et utilisent de nombreux alias. Lorsque ces jeunes sont placés dans des foyers d’urgence, ils ont pour consigne de fuguer. Lorsqu’ils sont incarcérés (dès 13 ans en France), après leur détention, ils sont déplacés par leurs exploiteurs dans un autre pays d’Europe afin de pouvoir à nouveau les utiliser. Leur exploitation se répète alors sans cesse, sans qu’une issue se dessine en l’absence de lieux adaptés et d’outils de suivi européen pour ces enfants en danger. Ces situations révèlent, depuis toutes ces années, un échec collectif, au niveau des États comme à l’échelle européenne, à penser une protection de l’enfance adaptée à cette problématique.

8Si, jusqu’en 2015, ces situations de traite se limitaient à des groupes familiaux relativement restreints, l’arrivée importante de mineurs non accompagnés en Europe a conduit à un développement de cette forme d’exploitation [9].

Recrutement des mineurs sans véritable projet migratoire

9L’exemple des mineurs non accompagnés algériens exploités dans la délinquance illustre ce phénomène encore peu identifié par les services de protection de l’enfance des différents pays. Au cours de mes recherches auprès des autorités comme des ONG de terrain, j’ai observé une surreprésentation de jeunes algériens impliqués dans des activités délinquantes : en Allemagne, en Autriche (dans le Sud du pays), en Belgique, en Espagne, en France, en Grèce, en Italie et en Suisse. Les délits enregistrés sont semblables quel que soit le pays : vol à l’arraché (téléphones portables, chaînes en or), cambriolages, vente de drogues et de cigarettes de contrebande. Pour ce qui est du recrutement, le modus operandi est le même. Ces jeunes sont recrutés localement par des compatriotes installés depuis de nombreuses années dans ces pays de destination, qui les utilisent pour leurs trafics.

10Pour mieux comprendre ce fonctionnement, prenons l’exemple français. À Paris, à partir de 2015, les Algériens sont les plus nombreux au niveau des défèrements et des incarcérations parmi les mineurs non accompagnés. En 2017, au quartier de Fleury-Mérogis, le nombre de mineurs algériens incarcérés était d’environ 70, les mineurs marocains environ 40 et les mineur(e)s d’Europe de l’Est une vingtaine. Ces chiffres donnent une tendance mais ne reflètent pas nécessairement l’activité délinquante chez les mineurs non accompagnés en région parisienne. Ils correspondent à la politique du Parquet des mineurs qui décide, selon ses propres critères, de déférer ou non tel ou tel mineur en fonction du délit commis, de sa situation familiale, du nombre de mineurs déjà déférés, etc. À Lille, à Marseille ou à Nantes, le constat est proche concernant la répartition des nationalités en détention. Au niveau de l’Aide sociale à l’enfance, l’arrivée de ces mineurs est passée relativement inaperçue. Leur nombre par rapport aux MNA de nationalité afghane ou malienne étant relativement faible.

11Pour ces jeunes, l’ouverture de la route des Balkans (en 2015) a créé une nouvelle voie pour rejoindre l’Europe. Beaucoup de jeunes algériens, sans réelles possibilités d’obtenir un visa pour l’espace Schengen, ont pris un vol pour Istanbul avec un visa de touriste. Ils ont ensuite rejoint la Grèce, ce qui leur a permis d’atteindre l’Europe de l’Ouest suivant les mêmes modalités que les Syriens ou les Afghans. En revanche, une fois arrivés dans les pays de destination, leur possibilité extrêmement restreinte d’obtenir l’asile les a incités à opter pour d’autres stratégies que celles du droit commun. Parmi les candidats au départ, il est impossible de connaître la proportion de ceux qui sont récupérés par des organisations criminelles locales pour des périodes plus ou moins longues. Il n’est pas non plus possible de dresser un profil sociologique particulier. Ce qui relie les jeunes pris dans ces formes d’exploitation, c’est leur absence de relais fiables au sein des pays de destination. Dans la majorité des cas, ces adolescents sont partis sans tenir compte de l’avis de leurs parents et même parfois sans les informer [10]. Ils n’ont pas misé sur des attaches familiales solides installées à l’étranger [11].

12S’agissant plus particulièrement de la France, au cours des entretiens, la majorité des jeunes expliquaient avoir rejoint dans un premier temps une parenté éloignée installée depuis de nombreuses années en France. Au bout de quelques semaines de vie commune, les liens n’étaient pas suffisamment forts, des tensions sont apparues, le jeune a donc préféré partir et tenter seul sa chance dans de grandes villes comme Paris, Marseille, Lille, etc. Le choix des villes s’effectue par les réseaux sociaux où de nombreuses informations circulent sur les points de rencontre (le quartier de la Goutte d’Or pour Paris, etc.), mais aussi les modalités à suivre pour bénéficier d’un logement gratuit, d’argent de poche… La réalité étant éloignée des promesses de réussite mises en scène sur Facebook, un sentiment d’injustice et d’abandon s’abat sur ces adolescents qui se retrouvent à la rue, sans accès à des activités rémunératrices.

13Le recrutement par des organisations criminelles locales intervient essentiellement après cette série d’échecs. Ces jeunes s’adressent alors ou sont abordés par des compatriotes installés en France depuis de nombreuses années et originaires des mêmes villes (Annaba, Alger, Oran, etc.). Ces personnes proposent de les héberger et de leur fournir du « travail » comme la vente à la sauvette de cigarettes. Rapidement, des formes de dépendance et d’endettement apparaissent qui les font basculer sur d’autres formes d’exploitation : vente de haschich, vol à la personne, cambriolages. En recoupant différentes informations données par les jeunes au cours de l’année 2017, l’emprise se nouerait progressivement par un mélange entre un besoin d’hébergement, un endettement provenant de la confiscation par les forces de l’ordre des cartouches de cigarettes, des dépendances à des produits stupéfiants et des violences physiques.

14Si, actuellement, les mineurs algériens pris dans ces fonctionnements sont les plus nombreux en raison d’une implantation ancienne de petits groupes criminels dans différentes villes en Europe, d’autres organisations semblent s’inspirer de ces pratiques, comme en témoignent des situations similaires de mineurs marocains, sénégalais, camerounais…

La récupération des mineurs non accompagnés pour le trafic de drogues

15Les mineurs exploités dans le vol bénéficient d’une forte attention des autorités en raison de leurs activités qui engendrent un trouble à l’ordre public. Si cette attention ne se traduit pas nécessairement par une véritable protection, ces mineurs sont connus parce qu’ils sont ciblés par les politiques répressives visant à lutter contre la criminalité.

16D’autres adolescents contraints par des organisations criminelles nettement plus structurées sont loin de connaître cette visibilité auprès des autorités, à l’exception du Royaume-Uni. La situation des mineurs vietnamiens exploités dans la culture de cannabis est révélatrice de cette autre forme de traite des êtres humains mise en place par les trafiquants de drogues.

17L’ONG Antisalvery International estime qu’en 2014 près de 3 000 mineurs étaient exploités par le crime organisé vietnamien au Royaume-Uni [12]. La grande majorité était recrutée comme jardiniers pour la culture indoor du cannabis au Royaume-Uni. Entre 2014 et 2017, le nombre de mineurs vietnamiens identifiés par les autorités britanniques comme victimes potentielles de traite d’êtres humains a triplé. Il est passé de 117 en 2014 à 362 en 2017 [13], ce qui peut être interprété comme un développement de cette industrie. Si pour l’instant seules les autorités britanniques reconnaissent officiellement la présence de mineurs victimes de traite des êtres humains, il est probable qu’ailleurs des situations similaires existent, même si elles ne sont absolument pas repérées par les autorités.

18Les migrants vietnamiens actuels sont originaires des régions rurales du centre et du nord du Vietnam. La province de Nghe An y est particulièrement représentée. Les personnes qui partent sont majoritairement des hommes seuls ou des mineurs que ne peuvent pas compter sur des réseaux de proches dans les pays de destination. Ces migrants proviennent de familles d’agriculteurs ou de pêcheurs. Au pays, ils n’ont pas accès au crédit bancaire et doivent donc recourir à des prêteurs privés. Les travaux de Nicolas Lainez [14] montrent la diversité des prêts informels et la variabilité des taux en fonction de la durée de l’emprunt, de la réputation de la famille, etc. Les taux les plus élevés pourraient aller jusqu’à 25 % par mois. Ces fonctionnements rapportés aux personnes utilisées dans la culture de cannabis, ainsi que quelques entretiens rendent compte d’une diversité de statuts au sein des jardiniers. Pour certains, cette activité est un moyen rapide de rembourser sa dette, condition nécessaire pour pouvoir à nouveau emprunter à la communauté afin d’ouvrir sa propre affaire. Pour d’autres, il s’agit d’un asservissement qui peut durer plusieurs années avec des risques de représailles sur la famille restée au pays [15].

19Les Vietnamiens ne sont pas les seuls à utiliser des mineurs pour le trafic de drogues. D’autres situations nettement moins documentées sont apparues ces dernières années. Parmi elles, on peut citer le cas des mineurs albanais utilisés pour le transport et la vente d’héroïne. Comme au Vietnam, ce processus s’inscrit dans une nouvelle vague migratoire qui a débuté à partir de 2010. Lors de la libéralisation des visas de court séjour pour l’espace Schengen [16], des pays comme l’Allemagne et la Belgique voient affluer un grand nombre de demandeurs d’asile albanais, macédoniens, serbes, etc. En 2014, les ressortissants albanais représentaient la première nationalité pour la demande d’asile en Allemagne. Avec l’arrivée des réfugiés syriens à partir de 2015 et les conséquences en termes de prises en charge et de taux de reconnaissance de plus en plus faible pour les Albanais, le nombre de départs n’a pas diminué.

20Des petites organisations criminelles albanaises ont cherché à tirer profit de cette migration. Cela a pris la forme d’agences fleurissant dans les rues de Shkodër ou de Tirana vendant des prestations pour la migration et pour l’obtention de la demande d’asile en France ou en Allemagne avec la fourniture de faux certificats de gjakmarrja (vendetta) [17].

21En ce qui concerne plus particulièrement les mineurs isolés albanais, la nécessité, pour certains d’entre eux, de rembourser des dettes a facilité leur recrutement pour les cambriolages, et surtout le trafic d’héroïne. Cette drogue, dont la consommation était en nette diminution, a fait son retour dans plusieurs pays comme l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Belgique, etc. Si l’augmentation de la quantité d’héroïne au niveau mondial s’explique par la surproduction de pavot en Afghanistan, en Europe, d’après les rapports de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), ce trafic est surtout contrôlé par des groupes criminels turcs et albanophones (Kosovo, Albanie). D’après les observations de terrain, ces groupes ont depuis quelques années recours à des mineurs albanais, candidats à la migration, pour la revente et aussi le transport d’une ville à l’autre ou d’un pays à l’autre [18]. Si certains mineurs ont des positions au sein de ces organisations, d’autres sont exploités avec des pressions importantes sur eux et leur famille restée au pays.

22Le recours à des mineurs pour le trafic de drogues ne cesse de s’étendre à de nouvelles nationalités. Depuis 2015, les services médico-judiciaires, à Lille comme à Paris, reçoivent des mineurs guinéens ayant ingéré des dizaines de capsules contenant de la cocaïne. Des constatations similaires sont d’ailleurs faites à Madrid ou à Bruxelles. Si ces mineurs donnent très peu d’information sur les personnes qui leur ont demandé d’ingérer la drogue en échange d’un billet d’avion, ils font comprendre que cette alternative leur semblait nettement moins risquée et coûteuse que de traverser toute l’Afrique pour rejoindre l’Europe.

23La nouveauté ne provient donc pas du contrôle du trafic mais de l’emploi de mineurs non accompagnés qui, d’après le nombre de déferrements, se développent surtout à partir de 2015 [19]. L’envie de migrer, la quasi-impossibilité d’accéder à l’Europe par la voie légale (Guinée, Sénégal, Vietnam), les risques liés à la route ou le prix du passage sont utilisés comme moyen de recrutement. L’objectif de ces organisations est de limiter les risques de poursuite pénale en utilisant ces mineurs. Jusqu’à présent, en dehors des jeunes vietnamiens pour lesquels différents travaux ont permis une certaine vigilance des autorités au Royaume-Uni quant au risque de traite des êtres humains, lors des interpellations, ces jeunes sont traités uniquement comme délinquants et sont régulièrement incarcérés. Ce fonctionnement participe à leur isolement et au sentiment que les institutions de protection sont incapables de les protéger.

Une protection de l’enfance qui peine à s’adapter

24Cette nouvelle tendance, qui se renforce d’année en année, nécessite de repenser la protection de l’enfance en termes d’adaptation des structures d’accueil, de développement de mécanismes de suivi transnational en Europe et d’une meilleure coopération entre police, justice, travailleurs sociaux et ONG. Si, au sein de l’Union européenne, ces mesures ne sont pas si difficiles à mettre en place, pour l’instant les États ne semblent pas disposés à créer, par exemple, un fichier de signalement commun avec les mineurs potentiellement victimes de traite (TEH) pour éviter leur re-exploitation, ni à financer des établissements spécialisés pour les mineurs victimes de TEH ou à cibler davantage les familles ou les groupes qui les exploitent. Cette attitude, qui a de quoi surprendre tant au regard des principes adoptés concernant la protection de l’enfance que de la protection des victimes de la traite des êtres humains [20], s’explique par une politique de contrôle migratoire qui s’étend à tous les domaines.

25L’aide à la coopération est désormais conditionnée à l’adoption de mesures pour la lutte contre la migration clandestine [21]. Les mineurs non accompagnés n’échappant pas à cette logique, leur image d’enfant s’est effacée progressivement. Il devient alors moins choquant qu’ils soient dépourvus d’une protection inconditionnelle. Au contraire, ils se voient habiller du costume de fraudeur (faux mineur) ou de futur migrant clandestin. La tendance est alors de proposer une prise en charge a minima pour un coût réduit.

26Les perspectives des jeunes intégrant ces dispositifs sont limitées. L’accès aux cours de langue ou aux études est de plus en plus rare, ce qui hypothèque leur accès au marché du travail et leur possibilité de régularisation. Cette situation agit comme un cercle vicieux, car elle favorise les organisations criminelles qui se retrouvent seules à proposer des activités rémunératrices immédiates et/ou des perspectives d’avenir à travers une carrière en leur sein.

27Pour sortir de cette impasse, l’accueil des mineurs non accompagnés doit être repensé. Contrairement aux discours populistes, leur arrivée dans une Europe vieillissante, où de nombreux secteurs économiques connaissent d’importantes pénuries de main-d’œuvre, peut se révéler être un atout à condition que ces jeunes bénéficient d’une formation qualifiante. Cet investissement est non seulement un devoir par rapport aux engagements de la France en matière de protection de l’enfance et se révèle pertinent d’un point de vue économique. L’arrivée des mineurs non accompagnés s’avère ainsi être l’une des solutions pour pallier les déficits de main-d’œuvre dans les secteurs dits en tension. En termes de sécurité, une prise en charge avec des perspectives constitue la principale prévention contre les phénomènes de récupération de ces jeunes par des réseaux criminels.

28Pour les enfants actuellement victimes de traite des êtres humains, les exemples des familles ex-yougoslaves cités au début de cet article démontrent que tant que la protection ne sera pas adaptée, ces enfants continueront d’être exploités. À l’âge adulte, les suivis effectués sur une dizaine d’années montrent qu’une partie se destine à passer de l’autre côté de la barrière, c’est-à-dire à devenir à leur tour des auteurs d’exploitation. De ce point de vue, la protection joue un rôle préventif par rapport au développement de la criminalité. Au niveau européen, peu de dispositifs ont donné des résultats. Le foyer Espéranto, en Belgique, qui propose depuis près de 15 ans un accueil de ces enfants dans un lieu sécurisé avec une équipe spécialisée, s’est révélé être une étape nécessaire pour sortir efficacement ces enfants de l’emprise des réseaux. Cette approche privilégiant la protection des victimes va à l’encontre de la politique française actuelle sur la question des mineurs contraints à commettre des délits. En effet, actuellement, dès 13 ans faute de lieux de placement adaptés, ces jeunes sont traités uniquement comme des délinquants et sont régulièrement incarcérés. Ce fonctionnement participe à leur isolement et au sentiment que les institutions sont incapables de les protéger. Ce traitement nuit aussi à la répression car, jusqu’à présent, lors des procès portant sur cette forme de traite, aucune victime n’était présente à l’audience, fragilisant d’autant la position du ministère public et la fiabilité des témoignages à charge. L’absence de véritable protection conduit ces jeunes à revoir leur déposition pour se protéger lorsqu’ils comprennent qu’ils ne pourront bénéficier d’une véritable protection. Nombreux se voient héberger dans des hôtels ou des appartements partagés, ce qui n’est pas de nature à les rassurer et donc à les faire témoigner contre leurs donneurs d’ordre.

Conclusion

29Les situations exposées viennent démontrer que le débat entre protection et répression présenté par les partis politiques comme une ligne de fracture idéologique n’a pas lieu d’être. Ces deux aspects représentent les deux faces d’une même pièce. Une victime mal protégée acceptera rarement de témoigner. Or, sans information provenant de l’intérieur, le travail d’enquête est laborieux. Il repose principalement sur des écoutes et des surveillances. Lors du procès, l’accusation, en l’absence de témoignage direct, est fragilisée. Or, jusqu’à maintenant en France, aucune victime n’a été présente lors d’un procès de traite des êtres humains concernant des mineurs contraints à commettre des délits. Cette absence explique en partie la faiblesse des condamnations des auteurs : elles dépassent rarement les 6 ans d’emprisonnement malgré l’établissement des faits [22].

30Sur le plan politique, l’échec de la protection et donc de la répression a un impact sur la montée du nationalisme. Les mineurs contraints à commettre des délits sont régulièrement utilisés pour alimenter les clichés racistes. Il devient alors facile de désigner les « Algériens », les « Marocains », les « Albanais », les « Roms » comme sources d’insécurité, afin de justifier une approche répressive et des politiques migratoires davantage restrictives. Cette stratégie contribue à produire l’inverse de ce qu’elle dénonce. En assimilant les jeunes de ces nationalités, ou l’ensemble des étrangers, à des criminels, cela réduit leur possibilité d’accès à une protection et permet aux réseaux criminels de prospérer. Ces organisations deviennent attractives à partir du moment où les prises en charge légales sont limitées avec peu d’espoir de régularisation.

31L’exemple de la gestion des migrants à la frontière entre les États-Unis et le Mexique est là pour rappeler que la seule approche sécuritaire ne fait que renforcer le développement du crime organisé au détriment des victimes comme de la société confrontée à une insécurité croissante. La situation des mineurs non accompagnés contraints à l’exploitation ne doit pas être perçue comme un phénomène propre aux étrangers. Elle est révélatrice d’une tendance à la marchandisation des êtres humains qui dépasse de loin la question de la migration. La jeunesse des différents pays y est davantage exposée en raison des possibilités de recrutement et de contrôle qu’offrent les réseaux sociaux. L’augmentation exponentielle de l’exploitation sexuelle des jeunes adolescentes françaises en est une illustration. En 2015, le nombre d’affaires de ce type traitées par la justice concernait une vingtaine de dossiers. En 2018, on en dénombre plus de 120. La majorité des victimes, dont certaines ont 13 ans, sont recrutées et exploitées par des garçons ou des jeunes filles de leur entourage, parfois mineurs.

32Jusqu’à présent, les autorités peinent à prendre conscience du développement de la traite des êtres humains. Les mineurs contraints à commettre des délits sont traités uniquement comme un problème de délinquance. Aucun d’entre eux n’a été reconnu officiellement victime de traite des êtres humains. Pourtant, la loi du 5 août 2013 [23] mentionne la contrainte à commettre des délits comme l’une des formes d’exploitation propre à la traite des êtres humains. L’exploitation sexuelle des adolescentes françaises, quant à elle, est désignée comme un « proxénétisme de cité » où, là encore, la référence indirecte à la délinquance masque la traite des êtres humains et tente de réduire ce phénomène à un groupe à part. La réalité sociologique des victimes et des prévenus, sans surprise, est nettement plus large que le sous-entend cet intitulé.

33Cette difficulté des politiques à prendre la mesure du développement de la traite des êtres humains au sein de notre société n’est pas sans rappeler la longue prise de conscience autour des violences faites aux femmes, considérées pendant de nombreuses années comme l’apanage des groupes sociaux défavorisés. Espérons que, pour la lutte contre la traite des êtres humains, la prise de mesures sera plus rapide. Comme le montre cet article, le déni actuel participe à l’attractivité de cette forme de criminalité dont le risque pénal, pour ses auteurs, demeure très faible… tant que les condamnations concerneront essentiellement les victimes.

Notes

  • [1]
    Ces statistiques ne reflètent pas le nombre réel de mineurs non accompagnés arrivés en Europe Dans certains pays comme la Grèce, l’Espagne ou la France, les demandes d’asile pour les mineurs non accompagnés sont peu pratiquées, tandis qu’en Suède ou en Allemagne elles sont quasi systématiques.
  • [2]
    Dans certains États, c’est l’échelon local qui est responsable de la protection de l’enfance et donc des budgets alloués à l’accueil des mineurs non accompagnés, dans d’autres États comme le Royaume-Uni, c’est le ministère de l’Intérieur qui finance leur prise en charge.
  • [3]
    Angelina Étiemble, « Les mineurs isolés étrangers en France », in Migrations études, n° 109, 2002.
  • [4]
    Observatoire sur la migration de mineurs (OMM), Mineurs isolés étrangers et sans protection en Europe. Rapport pour les jeunes et les enfants, adaptation du rapport Pucafreu, sous la direction de Daniel Senovilla Hernandez, 2014. On peut citer aussi le projet « Mario » mené par Terre des hommes sur ces mêmes aspects.
  • [5]
    Bénédicte Lavaud-Legendre (dir.), Prostitution nigériane : entre rêves de migration et réalité de la traite, Paris, Karthala, 2013 et, plus récemment, ECPAT France, Groupes religieux sociaux et criminels dans la traite des filles et femmes nigérianes. Le cas des temples, des femmes et des groupes cultists, Bonneuil-en-France, ECPAT France, mars 2019. Url : https://ecpat-france.fr/www.ecpat-france/wp-content/uploads/2019/04/WEB_rapport_nigeria_FR.pdf.
  • [6]
    Alain Reyniers « La troisième migration », in Revue d’études tsiganes, n° 1 1993.
  • [7]
    Voir sur ces aspects, Olivier Peyroux, Délinquants et victimes. La traite des mineurs d’Europe de l’Est en France, Paris, Non lieu éd., 2013.
  • [8]
    L’opération Europa, menée en 2010 dans le cadre du « Joint Investigation Team - UK and Romania » à l’initiative de la London Metropolitain Police, a révélé les situations d’exploitation dans les différents pays cités.
  • [9]
    Le 1er août 2017, le ministère de la Justice français annonce une augmentation sans précédent (16 % en un an) des mineurs incarcérés. Le détail des chiffres montre que cette augmentation concerne essentiellement les mineurs non accompagnés.
  • [10]
    Il existe même une association en Algérie venant en aide aux familles dont les enfants sont partis en Europe sans donner de nouvelles.
  • [11]
    Francesco Vacchiano, « 
  • [12]
    Cette information est confirmée par l’enquête des journalistes du Guardian, Annie Kelly, Mei-Ling McNamara, « 3,000 Children Enslaved in Britain after Being Trafficked from Vietnam », in The Guardian, 23 mai 2015.
  • [13]
    Voir National Crime Agency, National Referral Mechanism Statistics : End of Year Summar, Londres, National Crime Agency, 2014 et 2017.
  • [14]
    Nicolas Lainez, « L’exploitation de la sexualité des femmes par leur famille au Vietnam : financer les chocs exogènes et le crédit informel », in Autrepart, n° 66, 2013, pp. 133-152.
  • [15]
    Daniel Silverstone, Stephen Savage, « Farmers, Factories and Funds : Organised Crime and Illicit Drugs Cultivation within the British Vietnamese Community », in Global Crime, vol. 11, n° 1, 2010, pp. 16-33.
  • [16]
    En novembre 2010, près d’un an après la Serbie et la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine et l’Albanie obtiennent la libéralisation des visas de court séjour pour l’espace Schengen.
  • [17]
    Observations réalisées lors de plusieurs séjours en Albanie entre 2015 et 2017, voir aussi sur l’implication du crime organisé dans la migration irrégulière : Danilo Mandic, Separatists, Gangsters and Other Statesmen : The State, Secession and Organized Crime in Serbia and Georgia, 1989-2012, Thèse de doctorat en sociologie, Cambridge, Université d’Harvard, 2015.
  • [18]
    Entretien avec des magistrats du Royaume-Uni qui constatent l’utilisation de mineurs albanais pour le transport d’héroïne entre la France et le Royaume-Uni.
  • [19]
    Données tirées des rapports de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) des différentes directions territoriales et de discussions avec des éducateurs à Paris, à Lyon, à Lille, etc.
  • [20]
    On peut citer ici la Convention internationale des droits de l’enfant adoptée par l’ensemble des pays européen ou la directive UE/2011/36 qui met l’accent sur la protection des victimes de traite des êtres humains. Elle s’impose à l’ensemble des États membres depuis 2011 et avec obligation de transcription dans le droit national depuis avril 2013.
  • [21]
    Claudia Charles, Lola Schulmann, « De Rabat à Khartoum : l’externalisation en marche », in Migreurop, Atlas des migrants en Europe, Paris, Armand Colin, 2017.
  • [22]
    En octobre 2019, le procès dit « Roman expess », qui s’est tenu au Tribunal de grande instance de Paris et concernait une trentaine d’enfants exploités comme pickpockets dans le métro parisien, reflète cette tendance. Malgré les écoutes téléphoniques faisant état des menaces sur les enfants ne rapportant pas assez d’argent, les mauvais traitements constatés et l’aspect très lucratif de cette exploitation, certains enfants pouvant rapporter jusqu’à 20 000 euros par mois, les condamnations des auteurs oscillaient entre 3 ans et 6 ans et demi. Aucun enfant n’était présent lors du procès. Aucun enfant n’a été protégé en France. Une partie d’entre eux a été déplacée en Espagne afin d’y être exploitée de la même manière.
  • [23]
    Loi 2013-711 du 5 août 2013 qui mentionne : « L’exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d’un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d’agression ou d’atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l’un de ses organes, d’exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d’hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit. »
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