Notes
-
[1]
James Turner, Philology: The Forgotten Origins of the Modern Humanities, Princeton, Princeton University Press, 2014.
-
[2]
Crane Brinton, The Anatomy of Revolution, New York, W. Norton and Company, 1938 ; Barrington Moore Jr., Social Origins of Dictatorship and Democracy: Lord and Peasant in the Making of the Modern World, Boston, Beacon Books, 1966 ; Theda Skocpol, States and Social Revolutions: A Comparative Analysis of France, Russia and China, Cambridge, Cambridge University Press, 1979.
-
[3]
Comparative Studies in Society and History, Cambridge, Cambridge University Press, 1958.
-
[4]
George M. Fredrickson, « From exceptionalism to variability: Recent developments in cross-national comparative history », in The Journal of American History, vol. 82, n° 2, 1995, pp. 587-604 ; Michael Werner, Bénédicte Zimmermann (dir.), De la comparaison à l’histoire croisée, Paris, Seuil, 2004 ; Nicolas Mariot, Jay Rowell, « Une comparaison asymétrique : visites de souveraineté et construction nationale en France et en Allemagne à la veille de la Première Guerre mondiale », in Michael Werner, Bénédicte Zimmermann, op. cit., pp. 181-212.
-
[5]
Steven Vertovec, « Super-diversity and its implications », in Ethnic and Racial Studies, vol. 30, n° 6, 2007, pp. 1024-1054 ; Insee, Résultats statistiques, recensement de 2013.
-
[6]
En revanche, le rôle de Berlin en tant que métropole coloniale a commencé bien plus tard au XIXe siècle et s’est terminé plus tôt, en 1918. C’est l’inverse à Lisbonne : elle commence sans doute au début du XVe siècle et ne prend fin qu’avec la Révolution portugaise en 1974.
-
[7]
Angéline Escafré-Dublet, Martin Evans, Stéphane Malfettes (dir.), Paris-Londres (1962-1989) : Music Migrations, Paris, RMN, 2019
-
[8]
Martin Evans, « Origine du mouvement Rock Against Racism », in Angéline Escafré-Dublet, Martin Evans, Stéphane Malfettes (dir.), op. cit., pp. 94-95.
-
[9]
Entretien avec Paul Gilroy réalisé par Martin Evans, le 12 novembre 2018.
-
[10]
Akira Iriye, « The internationalisation of history », in The American Historical Review, vol. 94, n° 1, 1989, pp. 1-10.
-
[11]
Akira Iriye, Global and Transnational History: The Past, Present and Future, Londres, Palgrave, 2012 ; Pierre-Yves Saunier, Transnational History, Londres, Red Globe Press, 2013.
-
[12]
C. A. Bayly, Sven Beckert, Matthew Connelly, Isabel Hofmeyr, Wendy Kozol, Patricia Seed, « AHR Conversation: On Transnational History », in The American Historical Review, vol. 11, n° 5, 2006, pp. 1441-1464 ; Sven Beckert, Empire of Cotton: A Global History, New York, Alfred A. Knof, 2014.
-
[13]
Anne Curthoys, Marilyn Lake (dir.), Connected Worlds: History in Transnational Perspectives, Canberra, Australian National University Press, 2005, pp. 1-2.
-
[14]
Susan Pedersen, The Guardians: The League of Nations and the Crisis of Empire, Oxford, Oxford University Press, 2015 ; Mark Mazower, Governing the World: The History of an Idea, 1815 to the Present, New York, The Penguin Press, 2012.
-
[15]
Edward Said, Orientalism, New York, Pantheon Books, 1978 ; Culture and Imperialism, Londres, Chatto & Windus, 1993.
-
[16]
Catherine Hall (dir.), Cultures of Empire: A Reader. Colonisers in Britain and the Empire in Nineteenth and Twentieth Centuries, Manchester, Manchester University Press, 2000 ; Civilising Subjects: Metropole and Colony in the English Imagination, 1830-1867, Cambridge, Polity Press, 2002 ; avec Keith McClelland (dir.), Race, Nation and Empire: Making Histories, 1750 to the Present, Manchester, Manchester University Press, 2010 ; Paul Gilroy, Ain’t No Black in the Union Jack, Londres, Hutchinson, 1987 ; The Black Atlantic, Londres, Verso, 1993 ; After Empire: Melancholia or Convivial Culture, Londres, Routledge, 2004.
-
[17]
W. E. B. Du Bois, Black Reconstruction in America, New York, Harcourt, Brace and Company, 1935 ; C. L. R. James, The Black Jacobins, Londres, Secker & Warburg, 1938 ; Sidney Lemelle, Robin D. G. Kelley (dir.), Imaging Home: Class, Culture and Nationalism in the African Diaspora, Londres, Verso, 1994.
-
[18]
Stéphane Malfettes, « L’Open Market de Marc Zermati », in Angéline Escafré-Dublet, Martin Evans et Stéphane Malfettes (dir.), op. cit., p. 120.
-
[19]
Barry Miles, London Calling: A Countercultural History of London since 1945, Londres, Atlantic Books, 2010, p. 347.
-
[20]
Marc Zermati, « Skydog Records », in Stuart Baker, Les Punks: The French Connection, Londres, Soul Jazz Records, 2016, pp. 28-29.
-
[21]
Entretien avec Brian James in John Robb, Punk Rock: An Oral History, Londres, Ebury Press, 2006, p. 154.
-
[22]
Entretien avec Rat Scabies in Ibid., p. 209.
-
[23]
Entretien avec Vivien Goldman par Amar Ediriwa, « Ladbroke Groove! The complete story of record shop culture in Notting Hill », in The Vinyl Factory, 29 août 2015.
-
[24]
Stéphane Malfettes, op. cit., p. 120.
-
[25]
Ibid.
-
[26]
Marc Zermati, op. cit., p. 29.
-
[27]
Guy Debord, La société du spectacle, Paris, Buchet-Chastel, 1967.
-
[28]
« Mod » est l’abréviation de « Modernism ».
-
[29]
L’extrait du documentaire de la BBC, Whicker’s World, en 1964, commence au Sombrero Club à Kingston, en Jamaïque.
-
[30]
Richard Weight, Mod: A Very British Style History, Londres, Bodley Head, 2013, p. 85.
-
[31]
LeRoi Jones, Le peuple du blues : la musique noire dans l’Amérique blanche, Paris, Gallimard, 1968 (1963). LeRoi Jones a pris le nom d’Amiri Baraka en 1967.
-
[32]
Entretien avec Paul Gilroy réalisé par Martin Evans, le 12 novembre 2018.
-
[33]
Ben Sidran, Black Talk, New York, Holt, Rinehart and Winston, 1971.
-
[34]
Voir les contributions suivantes dans le catalogue de l’exposition : Anne-Marie Angelo, « Le Desmond’s Hip City : rythmes et résistance à Brixton » ; Christopher Warne, « Sidney et le rôle de l’émission H.I.P. H.O.P. dans l’histoire du rap français » : Rob Waters, « Aux rythmes des marchés de Londres », in Angéline Escafré-Dublet, Martin Evans, Stéphane Malfettes (dir.), op. cit.
1L’idée d’un projet d’exposition consacrée à Paris et Londres a vu le jour en mai 2014, lors d’une conversation au Palais de la Porte Dorée avec Hédia Yelles-Chaouche, cheffe des projets d’exposition au Musée national de l’histoire de l’immigration. Nous avons ensemble envisagé l’idée de comparer l’histoire de l’immigration dans les deux métropoles. Au départ, nous avons évoqué la période couvrant 1918-1945, avant de nous recentrer sur les années 1962-1989. Dès le début, l’objectif était d’analyser une mutation à l’œuvre dans les deux capitales. De plus, il semblait crucial de se focaliser sur les migrants au sein de ces deux villes. Nous voulions montrer en quoi ils étaient les agents d’une transformation historique qui modifiait jusqu’à la signification du fait d’être Parisien ou Londonien au cours de ces trente années. Dans cet article, je souhaiterais mettre en évidence les trois concepts analytiques – comparatif, transnational, interdisciplinaire – qui ont émergé durant la réflexion préalable, et qui ont ensuite servi de cadre au projet d’exposition.
Histoire comparée
2Le point de départ, fil conducteur théorique de ce projet, a été la méthode comparative qui consiste à juxtaposer les histoires de Paris et Londres entre 1962 et 1989, pour en explorer les similitudes, les différences et les points de connexion. C’est ainsi que s’est dessinée une méthodologie bien établie dans les sciences humaines et sociales. Dans une réflexion lumineuse sur l’histoire de la méthode comparative depuis le début du XIXe siècle, James Turner l’avait qualifiée d’« ancienne et peut-être universelle [1] ».
3Concernant plus particulièrement l’histoire, ce projet s’est initialement tourné vers des travaux académiques tels que L’anatomie de la révolution de Crane Brinton, Les origines sociales de la dictature et de la démocratie de Barrington Moore Jr. et États et révolutions sociales de Theda Skocpol [2]. Chacun de ces historiens a construit ses arguments à partir d’études de cas comparatives. Ils ont analysé une série d’exemples en veillant à équilibrer les cas de similarités et de différences, de façon à dégager les facteurs de causalité présents dans tout contexte révolutionnaire.
4De plus, le projet a été élaboré dans le cadre des travaux académiques de la revue Comparative Studies in Society and History (CSSH) fondée en 1958, désormais un important forum international où se forgent de nouvelles interprétations consacrées aux modèles communs, dans le domaine de la transformation des sociétés humaines à travers le temps et l’espace, dans le monde contemporain [3]. La revue a notamment joué un rôle précurseur dans l’approche interdisciplinaire des recherches historiques comparées au sein des pays anglophones, de façon à abattre les frontières disciplinaires et à explorer les recoupements entre l’histoire et les études culturelles, l’anthropologie, les sciences politiques et la sociologie.
5En ce qui concerne les études comparatives les plus récentes, le projet s’est appuyé sur les travaux de Fredrickson au sujet de « l’histoire comparative transnationale », ceux de Werner et Zimmermann à propos de « l’histoire croisée », et de Mariot et Rowell sur la « comparaison asymétrique [4] ». Ces communications d’actualité ont souligné le besoin de trouver de nouvelles formes d’études comparatives qui n’accordent pas la primauté à l’intégrité de l’État-nation. En effet, de telles approches mettent en exergue l’interaction entre des flux migratoires historiques globaux qui circulent entre et à travers des individus, des groupes, des partis politiques, des associations culturelles, des régions, des villes et des organisations internationales, affectant aussi bien la notion d’histoire nationale indépendante que le pouvoir des récits forgés par les États-nations. En adoptant cette perspective, le projet a donc eu pour ambition de saper deux présupposés contraires mais aussi dangereux l’un que l’autre : l’illusion d’une régularité parfaite et celle d’une unicité absolue. Il visait à approfondir notre compréhension de l’histoire des deux capitales postcoloniales en les comparant de façon systématique.
Paris-Londres : histoire d’une comparaison
6L’application de cette méthodologie comparative a fait apparaître une question primordiale au cours des premières étapes du projet Paris-Londres, celle de savoir en quoi il était plus pertinent de comparer Paris à Londres plutôt qu’à Berlin, New York ou Lisbonne. Le raisonnement était triple.
7En premier lieu, les deux métropoles ont suivi un processus comparable de transformation historique, du colonialisme au postcolonialisme. En 1945, Paris et Londres étaient le centre des deux plus grands empires coloniaux du monde. À partir de 1962, à la suite de la décolonisation, ces métropoles ont entamé un processus de transformation, à savoir devenir des capitales de petits États-nations qui étaient en train de se réinventer comme moteurs d’un pouvoir culturel, centré sur les cultures de la jeune génération et les nouvelles technologies. Qui plus est, une grande vague de migrations issues de leurs colonies respectives au cours des années 1940 et 1950 a profondément redéfini ces deux métropoles, par le multiculturalisme et les répercussions du colonialisme, en particulier la persistance du schéma colonial du racisme, dans un contexte postcolonial.
8En second lieu, ce processus s’est déroulé au cours d’une période chronologiquement similaire. Le rapprochement était alors plus facile à envisager, pour explorer de manière cohérente les similitudes et les différences. Finalement, il a été décidé de commencer en 1962, année de l’indépendance de l’Algérie et de la Jamaïque, et de conclure en 1989, à la fin de la Guerre froide qui a marqué une nouvelle phase dans le processus de mondialisation. Cette périodisation était suffisamment étendue, près de trois décennies, pour analyser les processus de transformation historique. En effet, l’impact des migrations a modifié l’idée même de ce que signifiait être Parisien ou Londonien à la fin des années 1980, faisant de la diversité une partie intégrante de leur identité respective.
9En troisième lieu, les deux métropoles ont une superficie et un volume démographique comparables, si l’on considère le Grand Londres et la région parisienne de l’Île-de-France, tous deux d’une diversité équivalente. Londres se composait de 179 nationalités d’après le recensement de 2001, tandis que Paris a accueilli des vagues migratoires successives de migrants français au cours du XIXe siècle et de groupes originaires du monde entier au XXe siècle. La population parisienne se compose de 20 % de migrants, contre 8,9 % pour le reste du pays (18,4 % en Île-de-France) [5].
10Ainsi, Paris et Londres sont les deux métropoles de rang mondial dont les histoires se ressemblent le plus, par leur contexte historique, la chronologie et la superficie. Elles sont assez similaires pour permettre une comparaison dans le respect des structures, des processus et des causes, mais aussi suffisamment différentes pour mener une analyse signifiante des raisons de leurs différences [6]. Le projet vise donc à expliquer les processus de causalité communs ainsi que les éléments saillants de divergence entre les deux métropoles. De manière tout aussi signifiante, il s’efforce d’examiner comment la comparaison spécifique de Paris et Londres illustre des tendances passées plus globales, telles que l’émergence d’une nouvelle culture jeune, le rôle des médias de masse et l’impact d’une économie mondialisée.
Migration, formes musicales et identités urbaines
11L’exposition s’attache in fine à montrer les liens entre migration, formes musicales et identités urbaines. Elle montre comment les habitants de ces deux anciennes capitales coloniales se sont emparés d’une forme d’expression universelle, la musique, pour faire entendre leurs voix, pour prendre leur place dans l’espace public et contribuer à la transformation de Paris et Londres en métropoles globales.
12L’exposition a été divisée en trois parties avec pour objectif de comparer les processus du changement. La première partie, de 1962 à 1968, explore le décollage de la musique en tant que moyen d’expression culturel par excellence pour la jeune génération, à travers le phénomène du rock’n’roll et des yéyés, apparu au fil des années 1960 et induit par la présence de chanteurs et musiciens migrants [7]. La seconde partie s’attache à l’utilisation de la musique comme instrument de mobilisation des migrants. Elle montre comment les communautés migrantes ont fait de la rue un lieu d’expression musicale. Cette occupation de l’espace public va du carnaval de Notting Hill à la campagne Rock Against Racism en passant par le festival militant pour la défense des travailleurs migrants entre 1975 et 1979 et le mouvement parisien Rock Against Police [8]. Quant à la troisième partie de l’exposition, elle montre comment, dans les années 1980, l’identité des métropoles est façonnée par ces ambiances musicales multiculturelles profondément ancrées. Ce processus apparaît aussi bien en 1988 avec le concert hommage à Mandela au stade de Wembley à Londres, que lors des cérémonies officielles du Bicentenaire de la Révolution française organisées en 1989 par Jean-Paul Goude.
13L’exposition montre que l’espace est un concept essentiel au cours de ces trois décennies, en particulier par sa nature multidimensionnelle, multi-couches et multidirectionnelle, et par sa relation aux mutations que l’on observe à Paris et à Londres.
14À grande échelle, le thème de l’organisation politique et économique de l’espace se dégage, au moment où Paris et Londres sont passés du colonialisme à la première phase postcoloniale. On voit comment deux systèmes migratoires organisés en grande partie – mais pas uniquement – autour de l’identité coloniale ont continué à être liés aux politiques et aux économies coloniales.
15Ces deux systèmes de flux économiques et migratoires sont conditionnés par une expansion économique continue, caractéristique de la phase postcoloniale des Trente Glorieuses à partir de 1962. Mais ils sont également conditionnés par une volonté politique contradictoire de restriction des flux d’arrivants non blancs, explicitée en 1962 par le Commonwealth Immigrants Act, la loi du Parti conservateur qui renforce la législation à l’égard des ressortissants du Commonwealth. Seuls les détenteurs d’un permis de travail délivré par les pouvoirs publics ont la possibilité d’établir une résidence, tout en restant soumis à des quotas. Toutefois, la justification économique des migrations a brutalement pris fin avec la crise pétrolière de 1973 et après que Paris et Londres aient subi des restrictions aux frontières. Ce contexte s’est radicalement transformé en 1989, la fin de la Guerre froide inaugurant une nouvelle phase de la mondialisation caractérisée par l’expansion de l’Union européenne, le triomphe d’une économie néolibérale et la disparition des frontières entre l’Europe centrale et orientale.
16À petite échelle, les individus et les communautés de migrants ont créé des espaces alternatifs pour s’adapter à des changements ayant eu lieu à une échelle plus large, mais aussi pour y résister et les faire évoluer. La musique, par exemple, était un moyen de relier « ici », Paris et Londres, à « là-bas », disons les Caraïbes ou le Maghreb.
17Mais la musique est aussi un élément clé de la manière dont le « là-bas » peut faire partie de l’« ici » et le transformer en profondeur. C’est ce que rappelle Paul Gilroy, Londonien né en 1956, en évoquant l’effet heureux produit sur lui-même et sa famille par le hit caribéen « My Boy Lollipop » de Millie Small en 1964 : « Je me rappelle que l’album de Millie Small était un immense succès. Je me revois en train de tourner autour de la maison de l’amie de ma mère en dansant avec ses enfants sur du Millie à la radio… C’était franchement un produit culturel caribéen que la génération de nos parents a eu l’impression d’introduire dans l’imaginaire collectif de la culture anglaise [9]. » Dans cet exemple, Paul Gilroy parle de l’impact émotionnel de la musique sur le plan privé et familial, sur sa propre psyché culturelle. Par sa créativité propre, il a pu créer un pont sonore avec l’héritage caribéen de sa mère. Cependant, à la fin des années 1960 et 1970, la musique est devenue une façon d’occuper l’espace et d’affirmer une présence publique permanente. Ceci apparaît avec une évidence particulière au carnaval de Notting Hill à Londres au milieu des années 1970, lorsque le reggae et la culture des sound systems, porteurs d’un message de résistance pour les jeunes Londoniens noirs, se sont solidement implantés dans le carnaval. C’était aussi une dimension fondamentale de Rock Again Racism en 1978 à Londres et de Rock Against Police à Paris au début des années 1980. Dans ces différents cas, la musique a joué un rôle mobilisateur en réunissant physiquement les gens dans un espace commun pour exprimer une revendication antiraciste.
Histoire transnationale
18Si l’histoire comparée est le premier cadre d’analyse de l’exposition Paris-Londres, la seconde est l’histoire transnationale. De la même façon, l’intérêt grandissant pour l’histoire transnationale a émergé au début des années 1990, reflétant le souhait des historiens de remettre en question la centralité de la nation comme cause première. L’enjeu est le suivant : si cet État-nation a pu déformer ou limiter notre compréhension du passé, une approche transnationale permettrait d’écrire l’histoire à l’aide de nouvelles grilles d’analyse plus exhaustives.
19Le point de départ se situe en 1989, quand Akira Iriye souhaite fonder une nouvelle recherche centrée sur « des thèmes et des conceptions signifiantes par-delà les frontières nationales, en lançant un appel à contribution à destination de différentes disciplines comme l’anthropologie et la sociologie, qui ont manifesté un intérêt de longue date pour les phénomènes de diffusion et de transformation culturelles [10] ». Iriye a largement contribué au développement de l’histoire transnationale, dont il considère que l’un des éléments constitutifs est lié aux flux et aux échanges transfrontaliers. Il s’ensuit ainsi que l’histoire transnationale est ouverte à une multiplicité d’approches analytiques qui correspondent bien aux objets d’étude, notamment dans les sous-disciplines spécifiques que sont les histoires politique, culturelle, intellectuelle et économique, dont la dimension transnationale est évidente [11].
20Les travaux de Sven Beckert, portant sur les États-Unis au XIXe siècle, identifient un concept clé de l’histoire transnationale : l’interconnectivité [12]. Tout en reconnaissant l’importance des empires coloniaux et des nations, Beckert souligne l’importance des réseaux, des processus, des croyances et des institutions qui transcendent les espaces délimités par la sphère politique. Selon lui, il est trop réducteur de subsumer le terme « transnational » sous l’idée de « nation ». Il englobe en réalité une grande variété d’entités politiques plutôt que le seul État-nation. Ce point de vue est également mis en avant par Anne Curthoys et Marilyn Lake dans leur ouvrage Mondes connectés, l’histoire dans une perspective transnationale [13], dans laquelle l’histoire transnationale consiste à interroger, situer, dépasser ou même contourner totalement l’État-nation. Dans leurs réactions hostiles aux histoires nationales considérées comme rigides et limitantes, nombre de ces chercheurs passionnés par l’histoire transnationale ont recours aux métaphores de la fluidité et au lexique de la circulation et des flux (des personnes, des discours et des marchandises), usant alors de métaphores de la connexion et de la relation.
21L’impulsion de ce virage transnational vient de trois directions. Tout récemment, des organisations internationales comme la Société des Nations et les Nations unies ont suscité l’intérêt d’historiens comme Susan Pedersen et Mark Mazower pour un terrain qui explore les réseaux et l’impact des organisations internationales dans et entre les États-nations [14]. Si l’on remonte aux années 1980 et 1990, l’autre impulsion a été le tournant transnational de l’histoire coloniale britannique. Sous l’influence de l’ouvrage Orientalisme d’Edward Said (1978) et de nombreuses études littéraires, culturelles et sociologiques, ce tournant a permis d’explorer les liens entre la métropole britannique et les colonies [15].
22Théoriquement, ce virage transnational a pour objectif de repenser l’histoire britannique non pas en termes d’État-nation, mais d’État colonial. À ce sujet, Catherine Hall est une voix de premier plan qui a évoqué l’intrication complexe des relations entre la Jamaïque et la Grande-Bretagne [16]. Il en va de même pour Paul Gilroy qui place les esclaves au centre de l’histoire de l’Atlantique, montrant comment les systèmes esclavagistes qui reliaient l’Afrique, l’Amérique, l’Europe et les Caraïbes depuis la fin du XVe siècle ont produit une culture atlantique noire qui transcende le nationalisme et conteste les approches étroites fondées sur l’afrocentrisme, l’eurocentrisme, les études caribéennes ou britanniques.
23Puis, en remontant encore plus loin dans les années 1930, le virage transnational est engendré par les travaux fondateurs de l’histoire des Noirs de W. E. B. Du Bois et de C. L. R. James, lesquels ont toujours eu un cadre transnational, comme l’a souligné Robin Kelley [17]. Ces premiers historiens noirs avaient, en effet, une sensibilité diasporique, façonnée par une politique antiraciste et anticolonialiste, qui leur faisait explorer la circulation des peuples et des idées à travers le temps et l’espace, comme l’a fait C. L. R. James en 1938 dans son étude, Les Jacobins noirs, sur les connexions entre les révolutions française et haïtienne.
Les points nodaux de la contre-culture londonienne
24L’élaboration de ce corpus de recherches transnationales a conduit à placer au cœur de l’exposition le flux de connexions qu’incarne la musique, et la manière dont ces migrations musicales sont intimement liées à la circulation des peuples, des idées et des coutumes. En ce sens, l’exposition examine les flux entre Paris, Londres et leurs anciennes colonies respectives. Elle montre aussi comment, dans un contexte postcolonial, les modèles de circulation et d’échange étaient encore conditionnés par l’héritage des relations coloniales respectives des deux métropoles. En outre, elle se penche aussi sur les réseaux d’interactions entre Paris et Londres, en explorant la nature des intersections multiculturelles entre ces deux espaces, bien souvent pour la première fois.
25En termes de connexions croisées, l’essentiel réside dans le point nodal – une connexion entre deux espaces – qui était un lieu d’entrée, d’échange, d’engagement et de transformation. Dans le cadre de l’exposition, le point nodal récurrent dans les deux villes est le magasin de disques. Dans un monde analogique, le magasin de disques était un espace transformateur parce que les gens y faisaient des découvertes et interagissaient avec une musique venue d’ailleurs. Au milieu des années 1970, sur Praed Street à Paddington, Bizarre Records était l’un de ces points nodaux, dirigé par Larry Debay et Marc Zermati, deux Français [18]. Marc Zermati avait lancé Skydog Records à Amsterdam en décembre 1972, à l’origine de l’engouement pour Iggy Pop, Frank Zappa, les Flaming Groovies aussi bien que pour les rares enregistrements pirates de Roxy Music, des Velvet Underground et des Rolling Stones [19]. Dans le contexte londonien, ces sorties de Skydog sont diffusées auprès du grand public par l’intermédiaire de Bizarre Records, qui est également une société de distribution pour d’autres labels indépendants étrangers, et devient donc un canal important pour le punk new-yorkais comme pour tous les nouveaux albums français et néerlandais.
26Bizarre, comme Zermati l’a souligné, était un incontournable lieu de rencontre avant-gardiste : « Je vivais à Paris une partie du temps et l’autre partie à Londres. J’avais ce bureau à Praed Street, à Paddington, avec un certain Larry Debay, et nous avions une société de distribution appelée Bizarre, où nous distribuions tous les disques des labels indépendants. Nous avons importé tous les premiers disques indépendants d’Amérique comme Piss Factory de Patti Smith et Little Johny Jewel de Television. Nous étions les premiers – avant Rough Trade. On a commencé avant le punk, mais on avait une attitude punk [20]. »
27En tant que tel, Bizarre a été un espace clé pour faire avancer la révolution punk parce qu’il était fréquenté par des gens aux vues similaires qui aimaient la même musique, comme Brian James du groupe The Damned : « On pouvait le sentir dans l’air, il se passait quelque chose. Bizarre Records à Londres vendait les Stooges et les Flamin’ Groovies, toutes sortes de choses qu’on ne trouvait pas dans les magasins de disques habituels. C’était un rendez-vous [21]. » C’est ainsi que Bizarre a joué un rôle crucial dans l’organisation du premier festival punk du Sud de la France en 1976, à Mont-de-Marsan. Il était organisé par Zermati, fait souligné par Rat Scabies de The Damned : « Le festival de Mont-de-Marsan est né d’un disque à Paddington qui était au cœur du punk. Tout le monde vivait à Notting Hill Gate et s’est inscrit à Lisson Grove, juste à côté de l’endroit où nous avons répété. Il y avait un magasin de disques au coin de la rue, qui s’appelait Bizarre, dirigé par deux types français, Marc Zermati et Larry Debay. Marc a organisé le festival de Mont-de-Marsan. C’était un grand fan des Stooges [22]. »
28Plus généralement, Bizarre faisait partie d’une contre-culture, celle des magasins de disques sur Ladbroke Grove et ses environs, qui comprenait Honest Jon’s Records and Rough Trade, fondé en 1975 sur des principes collectivistes, pro-féministes, égalitaires et anti-establishement. Le Rough Trade Shop en particulier est devenu l’épicentre de la culture reggae-punk à Londres, d’abord parce qu’il a été le premier magasin à proposer le magazine Punk de New York, et ensuite parce qu’il a atteint la communauté afro-caribéenne locale avec une large sélection des sorties reggae les plus récentes. Comme cela apparaît dans les propos de Vivien Goldman, Rough Trade était aussi un important point nodal de connectivité multiculturelle : « Pour promouvoir la culture à coups de soirées reggae punk, Rough Trade était irremplaçable. Parce qu’il est devenu le centre d’intérêt d’un mouvement à l’époque pré-internet, le tableau d’affichage des fanzines, les concerts étaient épinglés pour les musiciens comme les forums de discussion en ligne aujourd’hui – sauf que les gens devaient être présents, si bien que des conversations et collaborations inattendues ont souvent suivi [23]. »
Le rôle des individus
29Dans le cas de Marc Zermati, l’histoire de Bizarre met également en lumière le rôle des individus en tant que points nodaux personnels au sein de ces connexions croisées Paris-Londres. Son sentiment d’exclusion de la société française provient du fait qu’il est né en 1945 en Algérie française, et explique, à son avis, pourquoi il s’est tourné vers la culture rock naissante à Londres, dès le début des années 1960 : « Je ne suis pas né en France. C’est primordial. Je suis né en Algérie. Quand j’arrive à Paris en 1961 à l’âge de dix-sept ans, je suis sidéré par le niveau d’inculture rock. C’est pour ça que je multiplie très tôt les séjours à Londres. L’exil et la perte de la terre natale te poussent à avoir une attitude différente : tu es plus ouvert sur ce qui t’entoure, tu as une curiosité plus aiguisée, tu as envie de découvrir le monde [24]. » À Londres, il était enthousiasmé par la nouvelle culture musicale axée sur la jeunesse, qui était pour lui tout le contraire de ce qui se passait en France où les jeunes étaient ignorés. C’est à la lumière de ces visites qu’il décide de faire venir cette culture rock londonienne à Paris avec sa maison de disques Skydog et son magasin, l’Open Market, tous deux créés en 1972 : « En France, les nouvelles générations ne sont jamais prises au sérieux… Au Royaume-Uni, c’était différent. À l’époque, le rock était vraiment révolutionnaire. À la fois un exutoire et une réaction viscérale à l’oppression ambiante. J’ai voulu importer à Paris la révolution électrique et le combat rock en créant un label (Skydog), en produisant des groupes et en ouvrant un magasin pour diffuser toute sorte de mouvements contestataires [25]. »
30L’axe Paris-Londres de Zermati a produit un réseau de contacts et de connexions entre les deux villes, dont l’un avec Malcolm McLaren qui est devenu un ami intime. Selon Zermati, les fréquentes visites de McLaren dans la capitale française l’ont ouvert à de nouvelles influences musicales – c’est par Zermati que McLaren a d’abord vu à Paris les New York Dolls qu’il a ensuite managés – et lui ont aussi permis d’absorber de nombreuses idées avant-gardistes parisiennes qui sont devenues un point de départ pour le punk londonien : « Malcolm McLaren venait souvent voir ce qui se passait. C’était un gars de la mode, il n’avait rien à voir avec le punk à l’origine. Il a rencontré les New York Dolls à Paris. Après mon retour d’Amérique, j’ai organisé leurs premiers concerts à Paris… Nous dînions très souvent avec des groupes à La Coupole, un restaurant parisien à Montparnasse, célèbre lieu de rencontre des surréalistes, Picasso, Sartre, etc. C’était un type intelligent, culturellement – nous étions un peu en avance sur les Anglais en culture et politique. Il a compris les idées situationnistes [26]. » Ainsi, en ce qui concerne l’attaque provocatrice des Sex Pistol contre la Reine en 1977 avec God Save The Queen, qui est allée de pair avec cette brillante œuvre de la Reine arborant une épingle de sûreté dans le nez, de Jamie Reid, McLaren s’inspirait clairement de la notion situationniste de « détournement », farce politique subversive qui, dans ce cas, a servi à choquer l’establishment britannique [27].
Les inspirations croisées du style « Mod »
31Si le magasin de disques et le personnage clé constituent bien deux points nodaux dans cette histoire des connexions croisées Paris-Londres entre 1962 et 1989, le cinéma en constitue un autre. Dans le cas du mouvement londonien « Mod », qui a commencé avec quelques centaines de jeunes hommes et de jeunes femmes soucieux de leur style, fréquentant Soho vers 1958, leur style s’est construit en regardant les films français de la Nouvelle Vague, devenus une référence essentielle [28].
32La veste courte d’étudiant que porte Jean-Paul Belmondo dans À bout de souffle de Jean-Luc Godard en 1960 était très utilisée par les Mods masculins, tandis que trois ans plus tard, dans Le Mépris, également réalisé par Godard, Brigitte Bardot inventait la signature d’un look féminin avec le large bandeau dans les cheveux, le pull marin négligé et la coiffure choucroute. Le style des Mods français rejetait l’américanisation pour préférer une Europe considérée comme plus sophistiquée ; à cela, il fallait ajouter l’impact du look gangster du ghetto jamaïcain, connu sous le nom de rude boy. Ce style ostentatoire et très viril, composé de chapeaux en croûte de porc, de costumes étroits et de cravates minces, a fait son apparition sur le devant de la scène après l’indépendance jamaïcaine en août 1962, au moment où les chansons de ska ont de plus en plus souvent abordé le thème de la violence des rude boys, comme « Simmer Down » des Wailers en 1964 et « A Message to You, Rudy » de Dandy Livingstone en 1967, deux appels lancés aux rude boys pour qu’ils renoncent à la bagarre. À Londres, le look ska rude boy est arrivé avec les ressortissants du Commonwealth originaires des Caraïbes – un phénomène qu’explore le reportage en Jamaïque du journaliste de la BBC Alan Whicker en 1964, pour son émission Whicker’s World, et qui ouvre l’exposition Paris-Londres [29]. En ce qui concerne les Mods, il faut noter que le style rude boy a eu un impact local spécifique à Soho, à travers des clubs tels que le Roaring Twenties sur Carnaby Street, qui doivent être compris, dans leur spécificité, comme des points nodaux supplémentaires. Là, le DJ résident était le Jamaïcain Count Suckle, l’un des premiers pourvoyeurs de sound systems à Londres. Suckle a joué un rôle déterminant dans le lancement de la carrière britannique de Prince Buster, « le parrain du ska », en jouant ses disques et en l’emmenant ensuite dans une tournée britannique, en 1964. Pendant cette tournée, les Mods lui ont offert une escorte en scooter entre chaque ville où il jouait. L’influence de ces rude boys était donc palpable, même s’il n’y avait pas de Mods noirs, comme l’a rappelé plus tard John Paul Jones, qui était alors dans un groupe ska avant de jouer de la basse avec Led Zeppelin : tout le style Mod était jamaïcain, fait de cordelettes élimées et de boutons ajustés [30].
Histoire interdisciplinaire
33Le troisième cadre analytique qui a sous-tendu ce projet est l’histoire interdisciplinaire, c’est-à-dire une approche qui fait tomber les barrières non seulement entre l’histoire et d’autres disciplines, comme la politique, la géographie et la sociologie, mais aussi entre différents types d’histoires – politique, culturelle et sociale. En particulier, ce projet se concentre sur la relation complexe entre l’histoire de la migration et l’histoire de l’expression musicale.
34À ce stade, le projet s’est amplement inspiré du travail de Paul Gilroy, qui place la musique au centre de son analyse de l’expérience des Noirs britanniques, sur le plan de l’histoire de la diaspora. Dans un entretien, il adopte vraiment cette perspective. Au moment où il évoque cette question particulière, il indique que sa source d’inspiration littéraire était le livre Le peuple du blues : la musique noire dans l’Amérique blanche d’Amiri Baraka en 1963 [31]. De plus, pour écrire son ouvrage, Gilroy s’est inspiré de la rigueur avec laquelle Baraka analysait la musique, comme une expression culturelle complexe, non seulement par les relations entre la nouvelle musique noire, l’avant-garde et le courant dominant du rhythm and blues, mais aussi par « la plasticité de la musique, la versatilité de la musique avec ces grandes questions politiques et théoriques en tête [32] ».
35Toutefois, l’approche interdisciplinaire de Gilroy est aussi le résultat de sa formation intellectuelle de premier cycle à l’université du Sussex entre 1975 et 1978. Fondée en 1961, celle-ci a été pionnière dans cette approche de la recherche. Gilroy s’est plongé dans la collection Rosie Pool du Sussex (un fonds d’archives des mouvements politiques et culturels afro-américains du XXe siècle) et a découvert la thèse de doctorat de Ben Sidran, publiée plus tard en 1971 sous le titre Black Talk [33]. Pour Gilroy, Sidran fut une grande révélation car, en analysant la fonction sociale de la musique noire au sein de la diaspora afro-américaine, il valorisait la musique comme objet d’investigation. De plus, Sidran a montré comment les cultures musicales noires – jazz, blues, gospel, soul – étaient l’expression, consciente ou non, d’un héritage africain de contes oraux, disant dans quelles circonstances évoluait une culture minoritaire au sein d’une majorité blanche.
36Le cadre interdisciplinaire du Sussex a donc joué un rôle clé dans l’élaboration de ce projet, non seulement avec les travaux de Gilroy, mais aussi par ma contribution en tant que co-commissaire, et celle des historiens du Sussex, Anne-Marie Angelo, Chris Warne et Rob Waters [34]. Cette approche interdisciplinaire place la musique au centre. En tant que moyen de protestation contre l’injustice, la musique a permis le recadrage des identités vers le multiculturalisme à l’œuvre dans les deux villes entre 1962 et 1989. Ainsi, la musique se révèle constituer une dimension primordiale de l’être humain, puisque les gens l’utilisaient pour affirmer leur place dans ces deux métropoles.
37Texte traduit de l’anglais par Vanessa Kientz.
Mots-clés éditeurs : contre-culture, Paris, histoire, musique, migration, période : 1962-1989, Londres
Mise en ligne 09/08/2019
https://doi.org/10.4000/hommesmigrations.9080Notes
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[6]
En revanche, le rôle de Berlin en tant que métropole coloniale a commencé bien plus tard au XIXe siècle et s’est terminé plus tôt, en 1918. C’est l’inverse à Lisbonne : elle commence sans doute au début du XVe siècle et ne prend fin qu’avec la Révolution portugaise en 1974.
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Entretien avec Paul Gilroy réalisé par Martin Evans, le 12 novembre 2018.
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[18]
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[19]
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[20]
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[21]
Entretien avec Brian James in John Robb, Punk Rock: An Oral History, Londres, Ebury Press, 2006, p. 154.
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[22]
Entretien avec Rat Scabies in Ibid., p. 209.
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[23]
Entretien avec Vivien Goldman par Amar Ediriwa, « Ladbroke Groove! The complete story of record shop culture in Notting Hill », in The Vinyl Factory, 29 août 2015.
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[24]
Stéphane Malfettes, op. cit., p. 120.
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[25]
Ibid.
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[26]
Marc Zermati, op. cit., p. 29.
-
[27]
Guy Debord, La société du spectacle, Paris, Buchet-Chastel, 1967.
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[28]
« Mod » est l’abréviation de « Modernism ».
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[29]
L’extrait du documentaire de la BBC, Whicker’s World, en 1964, commence au Sombrero Club à Kingston, en Jamaïque.
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[30]
Richard Weight, Mod: A Very British Style History, Londres, Bodley Head, 2013, p. 85.
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[31]
LeRoi Jones, Le peuple du blues : la musique noire dans l’Amérique blanche, Paris, Gallimard, 1968 (1963). LeRoi Jones a pris le nom d’Amiri Baraka en 1967.
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[32]
Entretien avec Paul Gilroy réalisé par Martin Evans, le 12 novembre 2018.
-
[33]
Ben Sidran, Black Talk, New York, Holt, Rinehart and Winston, 1971.
-
[34]
Voir les contributions suivantes dans le catalogue de l’exposition : Anne-Marie Angelo, « Le Desmond’s Hip City : rythmes et résistance à Brixton » ; Christopher Warne, « Sidney et le rôle de l’émission H.I.P. H.O.P. dans l’histoire du rap français » : Rob Waters, « Aux rythmes des marchés de Londres », in Angéline Escafré-Dublet, Martin Evans, Stéphane Malfettes (dir.), op. cit.