Notes
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[1]
Les trois groupes WhatsApp sont : 1) « les Fils du Christ » : traduit de l’arabe (Abnaa Al Masih), il compte 196 membres ; « Prier sans interruption » : traduit de l’arabe (Sallou bila inqita3), il compte 232 membres ; « la Sainte famille » : traduit de l’arabe (Al 3a2ila al mouqaddasa), il compte 93 membres.
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[2]
Tunisie, Algérie, Maroc, Libye, Mauritanie et Sahara occidental.
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[3]
Irak, Syrie, Liban, Jordanie, Palestine et Koweït.
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[4]
Alphabet arabe.
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[5]
Rami, la personne interrogée, est administrateur d’une vingtaine de groupes chrétiens sur WhatsApp. Il parle le dialecte libanais
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[6]
Cf. <www.jordanembassyus.org/page/culture-and-religion>, page consultée le 20/09/2018.
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[7]
Alphabet arabe.
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[8]
Pour plus d’information, voir le site : <www.yamli.com/fr/>.
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[9]
Google Traduction (en anglais : Google Translate) est un service qui permet de traduire un texte dans une autre langue.
1Bien que l’utilisation de l’alphabet latin pour communiquer en arabe, proposée autrefois par le poète et linguiste Saïd Akl, ne fut pas adoptée au Liban, de nombreux Libanais communiquent aujourd’hui entre eux sur les réseaux socionumériques en dialecte arabe écrit en caractère latin ; cette écriture est souvent connue au Liban comme « Loughat al internet » – le « langage de l’internet ». De même, en Jordanie, le dialecte jordanien est écrit par le biais de cette écriture connue sous la nomination « Arabizi », dérivé des deux mots « arabe » et « inglizi » (mot arabe qui signifie « anglais »). Ainsi, l’alphabet du chat, l’arabizi, inclut des lettres de l’alphabet latin et des chiffres qui remplacent les graphèmes qui sont inconcevables sur un clavier « qwerty » ou « azerty ». Par ailleurs, le choix du chiffre arabe est basé principalement sur la similitude proche entre la forme du chiffre et la lettre arabe qu’il représente.
2Aujourd’hui, les communautés religieuses communiquent entre elles virtuellement suivant l’utilisation des réseaux numériques, créant ainsi des liens sociaux et des appartenances confessionnelles. C’est dans des groupes religieux chrétiens sur l’application WhatsApp que nous avons rencontré des Jordaniens et des Libanais qui communiquent entre eux de différentes manières.
3La problématique liée à notre analyse s’articule autour de la question suivante : comment la communication entre Libanais et Jordaniens diffère-t-elle dans le même groupe WhatsApp ?
4L’enquête a été menée en juillet 2018 sur les pratiques communicationnelles des membres libanais et jordaniens de trois groupes WhatsApp [1]. Son objectif était de donner plus de précisions sur les choix des moyens de communication entre les deux nationalités. Ainsi, le questionnaire comportait vingt questions concernant la langue apprise à l’école, la langue utilisée dans le chat, la manière de communiquer dans les groupes, la langue préférée pour une bonne discussion entre les Libanais et les Jordaniens, l’avantage et l’inconvénient de l’utilisation de l’écriture arabizi, etc. Au total, l’étude a réussi à recueillir 76 réponses aux questionnaires, dont 35 Libanais et 41 Jordaniens. 23,7 % avaient moins de 26 ans et 76,3 % plus de 26 ans.
5Des entretiens ont été entrepris avec deux Libanais et un entretien téléphonique a été réalisé avec Rami, un Jordanien, administrateur et membre actif de groupes sur WhatsApp. De plus, dans les trois groupes du WhatsApp, une observation des échanges produits entre Libanais et Jordaniens a été menée depuis le mois de janvier 2018.
6Nos objectifs sont multiples. Il s’agit tout d’abord de comprendre comment le dialecte arabe est retranscrit en arabizi dans les deux pays. Ensuite, il s’agit de décrire l’échange des Libanais et Jordaniens au sein d’un même groupe et, par la suite, il s’agit de comprendre l’influence de la communication des deux nationalités.
Dialecte libanais et jordanien
7Le monde arabe peut être divisé en deux : les pays dits du Machrek (le Levant) et les pays du Maghreb (le Couchant). Le Liban et la Jordanie font partie des pays du Machrek, dont la population est caractérisée par des appartenances religieuses et communautaires. La langue arabe est représentée sous trois types de langage : l’arabe littéraire classique, l’arabe moderne standard et l’arabe dialectal. L’arabe classique et l’arabe moderne se ressemblent beaucoup et sont compréhensibles par les citoyens de tous les pays arabes. Quelques syntaxes anciennes de l’arabe classique ont été remplacées par de nouveaux mots et/ou expressions. Par conséquent, la langue classique a été modernisée. Elle est utilisée par certains écrivains et se trouve pratiquée dans les journaux, devenant ainsi une langue commune pour tous les pays arabes et utilisée au niveau de la radio et de la télévision. L’arabe dialectal découle généralement de l’arabe classique et change beaucoup d’un pays à l’autre et d’une région à l’autre. Ainsi, bien que l’arabe dialectal libanais ou jordanien ne s’enseigne pas, il détient le statut de langue maternelle dans les deux pays. Il y a une large distinction entre dialectes du Maghreb et dialectes du Moyen-Orient. Notons par ailleurs que « l’arabe maghrébin » ou les dialectes arabes dans les pays du Maghreb [2] sont difficilement compréhensibles pour les arabophones du Proche-Orient du Machrek [3]. L’arabe classique ou moderne reste une langue commune pour tous les arabophones. Bien que la Jordanie et le Liban soient des pays proches géographiquement et bien que le dialecte jordanien soit classé comme un dialecte « syro-libanais », il est à noter que les dialectes libanais et jordaniens diffèrent énormément surtout au niveau du vocabulaire et de la prononciation (Barakat, 2000). Si le poète nationaliste Saïd Akl avait essayé dans la seconde moitié du siècle dernier d’écrire la langue arabe en utilisant des lettres latines, c’est l’avènement d’Internet qui a largement contribué à l’augmentation de cette pratique parmi les locuteurs de langues non écrites avec l’alphabet latin. De ce fait, le dialecte n’a pas une règle d’écriture grammaticale car les mots ne se trouvent ni dans le dictionnaire arabe ni dans la littérature arabe. Mais les Jordaniens et les Libanais l’écrivent soit en alphabet abjad (alphabet arabe), sans respecter les règles grammaticales et avec des fautes d’orthographe en arabe, soit en alphabet latin en utilisant la prononciation française ou anglaise. Par exemple le « i » est écrit par les Jordaniens comme ils le prononcent en anglais « ee » (« Kifik » en libanais et « Keefek » en jordanien, ce qui signifie « comment vas-tu »). Dans la conversation d’un même groupe WhatsApp, la façon dont l’arabe latin est écrit peut déterminer l’origine de la personne.
La cohabitation et la spécificité du Liban pour le monde arabe
8Grâce aux outils disponibles sur le réseau, les individus peuvent se rencontrer et dialoguer. Selon Rheingold (1993), les lieux essentiels dans la vie des individus, sont le lieu où l’on habite, le lieu où l’on travaille et enfin le lieu où l’on se rend pour satisfaire notre soif de convivialité que sont les « tiers lieux ». C’est dans ces lieux-là que se forment les communautés (Ibid.). Ainsi, le réseau numérique tel qu’un groupe sur WhatsApp pourrait être un tiers lieu où l’individu fait partie d’une communauté et cohabite dans un espace virtuel en ayant des rapports et des échanges d’opinions sur un sujet spécifique dans un même lieu, établissant des liens sociaux entre les membres du groupe. Dans le contexte des relations sur les réseaux, les interactions forment des relations interpersonnelles qui donnent naissance à des rassemblements de personnes autour d’intérêts communs. Les communautés chrétiennes se rencontrent aujourd’hui sur ces réseaux sociaux, et partagent des prières et des informations qui les intéressent. Des chrétiens libanais et jordaniens cohabitent au sein de plusieurs groupes WhatsApp, où ils peuvent communiquer soit en écrivant en arabe abjad [4] ou latin et même en envoyant des messages vocaux, créant ainsi des liens entre eux. Ces liens conduisent les Jordaniens à venir au Liban pour rencontrer les Libanais membres du même groupe et surtout pour visiter des lieux sacrés, car il y a beaucoup d’églises et de monastères au Liban. Des groupes de ce type-là existent depuis 2012 sur WhatsApp : cela fait donc des années de coexistences dans un tiers lieu, et certains membres considèrent les membres du groupe comme une deuxième famille. L’attachement des membres d’un même groupe est très remarquable. Nous parlons ici d’une confiance qui rayonne entre les croyants et c’est surtout grâce au sujet qui les intéresse : la religion.
9Le fait que les chrétiens au Liban ne sont pas minoritaires contribue à leur importance au sein de ces groupes. Effectivement, le président de la République libanaise doit être chrétien (coutume constitutionnelle) ; il s’agit d’une exception pour le monde arabe où la religion dominante est musulmane. Ainsi, les Jordaniens visitent le Liban dans un but non seulement culturel et religieux mais aussi pour rencontrer les membres du groupe et faire la visite du pays avec eux. Selon les entretiens, il est rare qu’un Libanais rende visite à un Jordanien. Une seule exception fut signalée : grâce à une forte relation datant depuis des années, Rami [5] a reçu des amis libanais chez lui en Jordanie une seule fois tandis qu’il visite le Liban chaque été depuis 2012. Selon l’ambassade du royaume de Jordanie, 6 % de la population jordanienne est constituée de chrétiens orthodoxes et catholiques et la majorité est musulmane sunnite (92 %) [6]. D’où une domination non seulement politique mais aussi au niveau de la culture islamique en Jordanie, qui influence sans doute culturellement les chrétiens jordaniens. De plus, au plan linguistique, la langue arabe relève d’une spécificité liée au texte coranique. En effet, « les musulmans ne considèrent le Coran comme livre sacré que dans sa version arabe originale. S’il peut être traduit, il n’est rituellement valide qu’en arabe, ce qui correspond à une notion de sacralité de la langue arabe » (Ait-Chaalal, 2007, p. 54). C’est pour cette raison que la langue arabe est fortement utilisée par les Jordaniens et l’anglais n’enrichit pas leur discussion quotidienne dans une sorte de mélange d’arabe et d’anglais. « Quant au bilinguisme franco-libanais au quotidien, ce langage très particulier qu’on appelle le “franbanais” consistait et consiste toujours à passer allègrement dans une même phrase de l’arabe au français et vice versa. Il était évidemment plus répandu dans les milieux chrétiens, mais était aussi pratiqué au sein des familles bourgeoises, toutes confessions confondues » (Makki, 2007, p. 163). En outre, « Le Liban est un cas très particulier du monde arabe, ayant eu longtemps une majorité chrétienne » (Montenay, 2011, p. 75). Ainsi au Liban, les chrétiens dominent aussi bien que les musulmans, comme l’affirme Kanafani dans ces recherches : « Au Liban, les différences communautaires ont souvent été présentées comme majeures et radicales : il existerait deux religions, deux cultures, deux modes de vie » (Kanafani, 2000, p. 122).
L’influence linguistique libanaise
10Après l’indépendance de la Jordanie en 1921, l’anglais commence à être enseigné dans toutes les écoles jordaniennes dès l’âge de onze ans. Ce n’est qu’au début des années 1990 que la langue anglaise prend sa position unique en Jordanie et devient une langue enseignée à côté de l’arabe classique à partir de six ans. Aujourd’hui, il existe toujours certaines écoles nationales où les cours de mathématiques et de sciences sont enseignés en arabe tout au long du parcours scolaire. Néanmoins, le secteur primaire et secondaire est anglo-arabe grâce aux écoles internationales américaine et britannique qui se trouvent en Jordanie. De ce fait, 7 % des interlocuteurs jordaniens affirment qu’ils ont appris le français et l’anglais à l’école et 93 % affirment que l’anglais était la seule langue enseignée à côté de l’arabe. Leur deuxième langue est l’anglais, enseigné dans presque toutes les universités.
11Avant la période du mandat français en 1926, le Liban adoptait la langue française comme deuxième langue. « À partir de 1736 l’église libanaise lance l’instruction gratuite des filles et des garçons, ce qui suscite la création de nombreuses écoles privées. Après les écoles viennent les collèges puis l’université avec celle de Saint-Joseph à Beyrouth en 1875. L’enseignement secondaire libanais francophone est encouragé par Paris. Dans cet enseignement francophone, il y avait, comme en France, des cours d’anglais. » (Montenay, 2011, p. 76) L’université américaine de Beyrouth est fondée en 1866 et en 1943, le parcours scolaire s’est fait en anglais à côté de l’arabe classique. Ainsi, le français et l’anglais deviennent des langues de culture au Liban. De fait, « au Liban, le paysage linguistique se caractérise par la coexistence, à côté de l’arabe dialectal libanais, d’une multitude de langues internationales de culture » (Tarazi-Sahab, 2013, p. 395). Notre analyse montre que 57 % des interlocuteurs croient que le français est la langue la plus utilisée au Liban, 26 % pensent que l’anglais domine alors que 17 % donnent faveurs aux deux langues. Ainsi, il y a 75 % de Jordaniens et de Libanais qui ont leurs comptes sur les réseaux sociaux en anglais, et 19,7 % en arabe (dont la majorité est jordanienne) et 5,3 % en français (dont la totalité est libanaise).
12Les discussions sur les groupes WhatsApp entre Libanais peuvent être réalisées soit en totalité en anglais soit en arabe latin en utilisant des mots ou des expressions en anglais et en français à l’intérieur d’une même phrase. Cette manière de communiquer en message vocal au sein d’un groupe pourrait influencer les Jordaniens qui répondent aussi par des messages vocaux en introduisant des mots étrangers ; or, d’habitude, ils ne mélangent pas les langues étrangères avec l’arabe dans une même phrase : cela n’est pas encore dans leur culture. Mais lors de l’entretien avec Rami, celui-ci affirme qu’aujourd’hui une partie des jeunes a tendance à parler jordanien en intégrant quelques mots en anglais dans une même phrase, en considérant que cela les rend « cool ». Rami ajoute que parmi tous les dialectes arabes, le dialecte libanais est considéré par les Jordaniens comme étant le dialecte le plus élégant, surtout au niveau de la prononciation avec la combinaison de l’arabe avec des expressions en anglais et en français. D’ailleurs, plusieurs Jordaniens laissent des commentaires sur le chat du groupe en s’appuyant sur l’idée de Rami, qu’ils aiment le dialecte libanais et qu’ils le trouvent beau.
L’influence de la communication jordanienne et libanaise
13Dans les trois groupes WhatsApp, les Libanais communiquent en utilisant les moyens suivants : en écrivant l’arabe classique en abjad (15 %), en écrivant l’arabe en latin (18 %) et en envoyant des messages vocaux (15 %). D’autre part, la majorité a choisi la communication en anglais (38 %) alors que 15 % des personnes répondent en mélangeant un peu d’arabe et un peu du dialecte en latin et de l’anglais. L’observation a permis de retenir que certains membres libanais du groupe changent leurs manières de communiquer selon la nationalité de leur interlocuteur. Autrement dit, si le membre avec lequel il discute est de nationalité libanaise et qu’il existe dans le groupe d’autres personnes de nationalité différente, il prend en considération ce fait et effectue un échange en adoptant un dialecte compréhensible par tous. Alors que d’autres personnes négligent la présence des Jordaniens et communiquent en dialecte libanais écrit en latin. Ainsi le multilinguisme offre aux locuteurs plusieurs choix de langues à utiliser dans une communication. Cependant, le choix de la langue en ligne ne se limite pas à déterminer la ou les langues que les utilisateurs choisissent parmi les options disponibles en fonction de leur contexte linguistique, mais englobe également la manière dont ils négocient leur choix dans leurs échanges et leurs pratiques en ligne (Lee, 2015).
14Les Jordaniens du même groupe écrivent presque tout le temps en arabe classique, ce qui permet à tous les membres du groupe de comprendre et de réagir s’ils le souhaitent. Plusieurs Libanais demandent l’explication d’un mot ou d’un lexique littéraire à la personne qui envoie des messages. Ainsi, nous pouvons parler d’une maîtrise de la langue arabe classique de la part des Jordaniens et d’une loyauté pour leur langue arabe ce qui n’est pas le cas pour la majorité des Libanais. De surcroît, une forte influence de la communication jordanienne sur les Libanais au niveau de l’utilisation de l’arabe classique dans les groupes a été mise en évidence. Cette conclusion se renforce du fait que les Libanais entre eux et en absence des autres nationalités dans un même groupe, communiquent en anglais ou en arabe latin mais quasiment jamais en arabe classique. En fait, quand les Libanais réagissent en anglais dans un groupe, les Jordaniens ne changent pas leurs choix de communication ; il est rare de voir un Jordanien qui écrit en arabe latin ou en anglais, sauf les mots répétés dans le groupe comme « Amen », « Thanks », « OK » ou « Hi ». Par contre, les Jordaniens écrivent souvent l’anglais en arabe : le mot « Hi » est écrit en arabe tel que l’on prononce en anglais « åÇí » ou « Bye / ÈÇí ». Au même niveau, d’autres éléments éclairés par l’observation consistent en : 1) la majorité des informations religieuses dans le groupe sont en arabe, alors que dans d’autres groupes WhatsApp où les membres sont strictement libanais, des informations et/ou des images divines sont partagées en anglais et en français. En conséquence, cette présence des Jordaniens au sein des groupes a permis à la langue arabe classique de dominer parmi les moyens de communication au sein du groupe ; 2) la majorité des réponses reçues par les Libanais concernant les avantages de l’écriture arabe en latin a considéré que l’écriture en alphabet latin est plus facile et rapide (76 %) alors que pour d’autres, l’utilisation de l’alphabet latin est compréhensible par ceux qui ne savent pas lire l’arabe en abjad [7]. Certains considèrent que cette écriture les distingue des autres. El Essawi (2011) affirme que la pratique de la romanisation (changement aussi des lettres) peut être expliquée comme une tentative de se conformer à l’image sociale, en particulier chez les jeunes, qui pensent que cela les rend « cool ».
15Lors des entretiens avec les Libanais, l’un d’entre eux nous a informés de la difficulté à trouver les alphabets arabes sur le clavier de son téléphone. D’où son utilisation d’un clavier intelligent en ligne, Yamli [8]. Il a été fondé par un Libanais en novembre 2007 et a pour fonction de convertir en temps réel le mot arabe écrit avec des caractères latins en caractères arabes. En juin 2012, l’écriture de l’arabizi est devenue connue par Google traduction [9]. Ainsi, l’utilisateur qui n’a pas un clavier arabe ou qui est lent en écrivant des phrases en arabe pourrait convertir les mots directement du latin en arabe soit avec Yamli ou soit avec Google Traduction.
16En conclusion, les Jordaniens utilisent dans la majorité des cas l’arabe classique pour communiquer. Ce fait incite les Libanais à utiliser cette même langue afin d’échanger avec les Jordaniens via les réseaux sociaux numériques. En outre, l’arabe classique est difficile pour la majorité des Libanais et risque de disparaître dans leurs conversations. Un questionnaire a été diffusé pour recueillir les avis sur la meilleure langue de communication entre ces deux peuples. De ce fait, 78 % des Jordaniens ont répondu que la communication est faite en arabe classique alors que 19 % ont préféré l’arabe latin. En revanche, pour les Libanais, 38 % ont préféré communiquer en message vocal et 38 % ont choisi la langue arabe classique et, enfin, les autres sont répartis entre anglais et écriture en arabe latin. Malgré une certaine difficulté rencontrée au niveau de la communication entre ces deux nationalités au sein des groupes, un lien fort s’est créé entre eux, qui a incité davantage les Jordaniens à venir visiter le Liban. Mais si certains chrétiens libanais ont accepté de communiquer en arabe classique avec les chrétiens jordaniens, auraient-ils réagi de la même façon s’ils avaient eu face à eux une personne d’une autre religion ?
Références bibliographiques
- Ait-Chaalal, A., « Langue(s) arabe(s), monde(s) arabe(s), arabité, arabisme : éléments de réflexion et d’évaluation de dynamiques complexes », Revue internationale de politique comparée, vol. 14, no 1, 2007, p. 51-68.
- Barkat, M., « Détermination d’indices acoustiques robustes pour l’identification automatique des parlers arabes », thèse de doctorat en sciences du langage, Lyon, université Lumière, 2000.
- El Essawi, R., « Arabic in Latin Script in Egypt : Who Uses It and Why », in Al-Issa, A. et Dahan, L. S. (dir.), Global English and Arabic Issues of Language, Culture, and Identity, Berne, Peter Lang, 2011, p. 253-284.
- Kanafani-Zahar, A., « Pluralisme relationnel entre chrétiens et musulmans au Liban : l’émergence d’un espace de “laïcité relative” », Archives de sciences sociales des religions, no 109, 2000, p. 119-145.
- Lee, C., « Multilingual Resources and Practices in Digital Communication », in Georgakopoulou, A. et Spilioti, T. (dir.), The Routledge of Language and Digital Communication, Abingdon, Routledge, 2015, p. 118-132.
- Makki, M., « La langue française au Liban : langue de division, langue de consensus ? », Hérodote, no 126, 2007, p. 161-167.
- Montenay, Y., « Le Liban : du bilinguisme au trilinguisme », Les Cahiers de l’Orient, no 103, 2011, p. 75-80.
- Rheingold, H., Les Communautés virtuelles, Paris, editions Addison-Wesley, 1996.
- Tarazi-Sahab, L. et Moro, M. R., « Changer de langue à l’adolescence chez les adolescents bilingues au Liban », La psychiatrie de l’enfant, vol. 56, 2013, p. 393-410.
Mots-clés éditeurs : arabe en latin, écriture arabe, dialecte arabe, Whatsapp, Arabizi, dialecte jordanien, dialecte libanais
Date de mise en ligne : 03/12/2018
https://doi.org/10.3917/herm.082.0216Notes
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[1]
Les trois groupes WhatsApp sont : 1) « les Fils du Christ » : traduit de l’arabe (Abnaa Al Masih), il compte 196 membres ; « Prier sans interruption » : traduit de l’arabe (Sallou bila inqita3), il compte 232 membres ; « la Sainte famille » : traduit de l’arabe (Al 3a2ila al mouqaddasa), il compte 93 membres.
-
[2]
Tunisie, Algérie, Maroc, Libye, Mauritanie et Sahara occidental.
-
[3]
Irak, Syrie, Liban, Jordanie, Palestine et Koweït.
-
[4]
Alphabet arabe.
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[5]
Rami, la personne interrogée, est administrateur d’une vingtaine de groupes chrétiens sur WhatsApp. Il parle le dialecte libanais
-
[6]
Cf. <www.jordanembassyus.org/page/culture-and-religion>, page consultée le 20/09/2018.
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[7]
Alphabet arabe.
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[8]
Pour plus d’information, voir le site : <www.yamli.com/fr/>.
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[9]
Google Traduction (en anglais : Google Translate) est un service qui permet de traduire un texte dans une autre langue.