Notes
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[1]
Colloque qui s’est déroulé le 29 et 30 novembre 2007 sous le titre « Économie sociale et solidaire, territoire et politique : regards croisés ».
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[2]
« Le Nouvel espace public » (no 4), « Espaces publics, traditions et communautés » (no 10), « Espaces publics en images » (no 13-14), « Économie solidaire et démocratie » (no 36) – dont le titre initial était « Économie solidaire et espace public » –, « L’opinion publique. Perspectives anglo-saxonnes » (no 31), « Paroles publiques, communiquer dans la cité » (no 47).
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[3]
À travers les textes de Pierre Livet (1988) et Plinio Walder Prado (1988).
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[4]
Date de publication d’un ouvrage collectif discutant des thèses d’Habermas (Calhoun, 1992).
1La revue Hermès comporte trois sous-titres : cognition, communication, politique. Ce dernier terme est fortement polysémique. Pour Edgar Morin (2018, p. 62), il désigne « la réinvention commune du monde », alors que pour le pape François (2017, p. 40), il renvoie « à une des formes de charité les plus élevées ». C’est cette polysémie qui intéresse la revue, qui n’a pas souhaité donné un article défini à ce terme. Le pari intellectuel est en effet d’englober la plupart des acceptions courantes sans en privilégier ou en négliger aucune. C’est pourquoi la revue aborde la politique, aussi bien dans sa version idéaliste promue par Aristote (la recherche du souverain bien) que dans sa version pragmatique défendue par Machiavel (l’art de préserver le pouvoir en place). Les articles normatifs de philosophie politique portant sur l’espace public, l’argumentation ou l’éthique de la discussion côtoient ainsi des descriptions empiriques sur les stratégies de communication des acteurs politiques. De même, la revue embrasse le politique. Ce terme désigne souvent un sous-secteur de la vie sociale comme chez Max Weber (1959) – qui oppose le politique (caractérisé par le monopole de la violence légitime) à l’économique et au social – ou chez Niklas Luhmann (1999) – pour qui le politique est un sous-système autopoéïtique régi par un média symbolique généralisé spécifique : le pouvoir. Pour Claude Lefort (1986), au contraire, on ne saurait désigner le politique « comme un secteur particulier de la vie sociale […] Il implique, au contraire, la notion d’un principe, ou d’un ensemble de principes générateur des relations que les hommes entretiennent entre eux et avec le monde ». Autrement dit, toute société est politique même si la société ne saurait se réduire au politique. La revue est en phase avec cette dernière conception du politique, mais ouvre ses pages à des auteurs qui, en s’appuyant sur Habermas, se rattachent à une conception plus weberienne. En un mot, la revue refuse de s’enfermer dans un dogmatisme castrateur et cherche, au contraire, à éclairer la globalité du politique : de la description du jeu d’acteur local à la théorie critique de la démocratie en passant par l’analyse des interactions complexes entre élus, journalistes et opinions publiques. En refusant l’article défini, Hermès définit un parti-pris fort : éclairer le vivre-ensemble dans toute sa complexité.
Une anthropologie du politique pluridisciplinaire et ouverte à la confrontation doctrinale
2Pour le dire autrement, le projet scientifique d’Hermès n’est pas de défendre telle ou telle conception du ou de la politique, mais de développer une anthropologie politique qui soit pluridisciplinaire. On retrouve ce projet scientifique dès le premier numéro, qui présente des travaux relevant de la philosophie politique (J.-P. Dupuy), de la sociologie (F. Bourricaud) et même des sciences de gestion (G. Achache). Travaux qui mobilisaient des références théoriques aussi différentes que celle de Wittgenstein (Plinio Walder Prado Jr.), Pascal (Christian Lazzeri) ou Weber (Giacomo Marramao). Si la pluridisciplinarité et l’ouverture doctrinale sont si présentes dans la revue, c’est parce que l’appréhension du thème politique par Hermès n’est pas confinée à un domaine particulier (la politique institutionnelle), à une discipline singulière (la science politique) ou à un espace géographique unique (l’État nation), mais répond à une exigence intellectuelle forte : rendre compte de la pluralité des perceptions des enjeux de la mondialisation en multipliant les aires géographiques étudiées (Europe, Asie, Amérique du Sud, etc.), les disciplines (philosophie, sociologie, anthropologie, etc.) et les références théoriques (Habermas, Beck, Hall, etc.). Il ne s’agit pas de lire le monde exclusivement sous l’angle politique, mais d’éclairer, dans tous les domaines, les enjeux politiques qui structurent les bouleversements techniques, les chocs culturels ou les revendications identitaires. Telle est la première caractéristique de l’anthropologie politique développée depuis trente ans par la revue Hermès.
Des choix théoriques majeurs assurant une cohérence forte
3La deuxième caractéristique est d’avoir, sans forcément l’expliciter, procédé à des choix théoriques forts et cohérents qui ont évité une anomie théorique. On aurait pu craindre, en effet, que cette ouverture doctrinale ne débouche sur une accumulation de textes ressemblant plus à une auberge espagnole qu’à un banquet scientifique soigneusement organisé. Or, il n’en est rien. Pour deux raisons. Premièrement, chaque numéro s’articule autour d’une problématique solidement définie et explicitée dans sa présentation, si bien que la diversité reste cohérente : elle éclaire les multiples facettes d’un objet, ne cherche pas à présenter un échantillon exhaustif de tous les travaux sur le sujet. Deuxième raison, le comité de rédaction et le directeur de la revue ont su assumer trois choix majeurs :
41) Éclairer l’ambiguïté des processus. Hermès est connue pour son opposition farouche à l’idée de déterminisme technologique et pour sa volonté de valoriser la communication à l’heure où elle est assimilée à la manipulation. Ces choix éditoriaux, forts et revendiqués, s’accompagnent d’une volonté de proposer des analyses qui remettent en cause l’évidence de certains paradigmes académiques. Un exemple : dans le numéro consacré aux « langues de bois », nombre d’articles s’attaquent, comme il est d’usage, à décrire les mécanismes de fabrication de ce langage et à en dénoncer certains effets pervers (par exemple, ceux de J. Nowicki et L. Radut-Gaghi). Cependant, d’autres textes (en particuliers ceux de O. Arifon et A.-M. Laulan), en soulignant la proximité de la langue de bois avec le langage diplomatique ou en montrant les dangers d’un « parler vrai » prétendant s’affranchir de la langue de bois (M. Oustinoff), invitent le chercheur à se départir d’une trop facile posture dénonciatrice.
52) Contester la coupure entre économie et politique. Revenant à l’esprit de l’Encyclopédie (c’est Rousseau qui rédige la notice « Économie » de l’ouvrage dirigé par Diderot et d’Alembert) et fidèle à sa volonté d’interdisciplinarité, Hermès ne traite pas de l’économie comme un champ autonome, mais comme un aspect du vivre-ensemble qui ne peut être totalement détaché des questions politiques. C’est particulièrement vrai du no 36 (« Économie solidaire et démocratie », 2003) qui se propose d’interroger la notion d’espace public à partir des pratiques économiques d’acteurs cherchant une alternative au capitalisme. Interrogation qui est, en réalité, une critique de la position habermassienne faisant de l’économie un système autonome cherchant à coloniser le monde vécu sans voir qu’elle est aussi un terrain de lutte où des citoyens organisés collectivement tâchent de conquérir des capacités d’autodétermination.
63) Légitimer scientifiquement des objets marginalisés par les approches politiques classiques. Essayer d’aborder la politique sans a priori définitionnel et doctrinal permet de s’affranchir des frontières disciplinaires et d’examiner scientifiquement des objets que la science politique, la philosophie politique ou la sociologie politique négligent. À cet égard, deux numéros sont emblématiques. Le premier, que nous avons déjà évoqué, est le numéro « Économie solidaire et démocratie », qui a permis de sortir les pratiques solidaires de la seule socio-économie. En effet, si les deux premières parties (historique et descriptive) font appel aux chercheurs reconnus de l’économie solidaire (J.-L. Laville, L. Fraisse, D. Goujon), la troisième demande à des chercheurs non spécialistes de ce secteur de revenir sur leurs conceptions de l’espace public à la lumière des initiatives solidaires étudiées dans les deux premières parties. Ce qui a permis à des chercheurs en sciences politiques (J. Weisbien), en sociologie (L. Roulleau-Berger) ou en sciences de l’information et de la communication (B. Floris) d’intégrer à leurs analyses ce nouveau champ de recherche. Ainsi mise sous le feu de l’actualité scientifique, l’économie solidaire deviendra peu à peu un des objets de la science politique, comme en témoigne le colloque qui lui fut consacré par l’Institut d’études politiques de Bordeaux en 2007 [1]. Le second numéro est le numéro 34, dédié aux « enjeux politiques de l’espace ». « Deux objectifs ont guidé l’élaboration de ce numéro : faire découvrir à un public, en général étranger à ce domaine et à la littérature spécialisée qui en traite, les enjeux de l’espace et tenter de mettre en œuvre des approches multi-disciplinaires pour donner une nouvelle grille de lecture des activités spatiales et de leurs ressorts. » (Sourbès-Verger, 2002, p. 9) Dans cet esprit, la première partie – « L’espace imaginé » – s’intéresse aux représentations de l’espace. La seconde – « Politiques spatiales et communication politique » – étudie les rapports entre les décisions politiques des gouvernements et les politiques de communication mises en place par les agences spatiales. La troisième – « Le retour sur terre » – analyse comment la découverte de l’espace se transforme, sur Terre, en enjeux politiques et économiques. Malheureusement, ce numéro original n’a pas réussi à légitimer l’espace comme thème d’analyse en sciences politiques, en sciences de l’information et de la communication ou en sociologie. Ici comme ailleurs, le récepteur est roi.
7L’ouverture d’esprit, la volonté d’analyser la dimension politique des processus sociaux dans toute leur complexité : c’est là la première caractéristique de cette revue, son ADN constitutif. En cherchant à restituer l’ambiguïté des processus analysés, en refusant de céder au « sophiste économiste » (Polanyi, 2007) qui sépare les choix économiques des institutions qui procèdent à ces choix et en prenant le risque d’analyser des objets qui n’étaient pas légitimés par les politologues, la revue offre une vision heuristique du terme politique. C’est là sa deuxième caractéristique. La troisième est d’avoir légitimé, en France, la recherche sur la communication politique tout en donnant à voir les potentialités scientifiques du concept d’espace public.
La volonté de lier communication et politique
8Pas de politique sans communication et, inversement, toute communication dans l’espace public recèle une dimension politique. Dans cette perspective, la « communication politique » n’est pas un sous-domaine de la politique ou de la communication, mais l’affirmation théorique du lien indéfectible entre communication et politique. C’est pourquoi la communication politique représente le pilier fondateur de la revue : « Hermès consacre son premier numéro à la communication politique. Comment fonctionne la communication politique dans nos démocraties contemporaines ? » C’est par ces mots que débute le premier numéro de la revue. C’est dire si la communication politique occupe une place importante. Importante et reconnue par les chercheurs, puisque certains articles sur la modélisation de la communication politique (Wolton, 1989), la communication électronique locale (Maigret et Monnoyer-Smith, 2000) ou le marketing politique (Achache, 1989) sont presque toujours cités dans les thèses ou les ouvrages consacrés à ces secteurs de la communication politique. Reconnu, aussi par le grand public, puisque le volume qui s’est le plus vendu de la collection « les Essentiels d’Hermès » (collection qui vise à valoriser les articles de la revue auprès des étudiants et des personnes curieuses) s’intitule La Communication politique. Il est coordonné par Arnaud Mercier, spécialiste reconnu du domaine, un des piliers du comité de rédaction d’Hermès à la fin des années 1990. Le premier apport intellectuel de la revue Hermès est donc d’avoir légitimé la communication politique comme objet d’étude ne se réduisant pas à la manipulation ou au marketing. Le deuxième est de développer une analyse de la complexification du jeu politique engendré par les médias, en s’éloignant tout à la fois du fonctionnalisme américain, de l’analyse marxiste et du déterminisme technologique. Voie étroite qui semble aujourd’hui naturelle mais qu’Hermès a fortement contribué à tracer à une époque (1988) où, en France, McLuhan, Katz ou Adorno étaient des références dominantes au sein de sciences de l’information et de la communication encore adolescentes. Le troisième point est de proposer cette analyse médiatique sans la déconnecter des recherches, plus traditionnelles, sur la rhétorique et l’argumentation. En témoignent les articles d’A. Gosselin (« La rhétorique des conséquences non prévues », 1995) et d’A.-M. Gingras (« L’argumentation dans les débats télévisés entre candidats à la présidence américaine », 1995). Quatrième et dernier apport intellectuel de la revue à l’analyse de la communication politique, une interrogation critique à l’égard de la révolution que proposerait Internet pour le meilleur ou pour le pire. Les contributions consacrées à ce sujet contredisent cette idée de révolution numérique qui ferait changer d’ère la communication politique. Elles insistent plutôt, comme le fait le numéro « www.démocratielocale.fr » (Hermès, no 26-27, 2000) sur le réagencement des liens entre élus, citoyens et médias, sur les hybridations entre mass media et médias numériques ou sur les injonctions contradictoires de ce nouveau système médiatique. Pour le dire autrement, les travaux diffusés par Hermès prennent en compte la nouvelle matérialité des dispositifs de communication politique sans pour autant sombrer dans un déterminisme technologique que la revue ne cesse de combattre.
Un travail au long cours de diffusion critique de la notion d’espace public
9Cette volonté scientifique de légitimer la communication politique s’est appuyée sur un travail conceptuel riche et de longue durée concernant l’espace public. Hermès a consacré pas moins de 7 numéros à cette thématiques [2]. Le premier de ces numéros (« Le Nouvel espace public », Hermès, no 4, 1989) est devenu un classique référencé dans la plupart des travaux académiques consacrés à ce sujet. En effet, ce numéro, qui regroupe des contributions d’auteurs prestigieux (R. Boudon, A. Touraine, E. Katz, etc.) joue un rôle pionnier, dans l’aire francophone, puisque les thèses d’Habermas (présentes dès le no 1 de la revue [3]) ne seront véritablement discutées dans les sciences sociales anglo-saxonnes qu’à partir de 1992 [4]. De plus, le numéro « Espaces publics, traditions et communautés » (Hermès, no 10, 1992) a proposé des distinctions claires entre espace public, espace politique et espace commun qui sont toujours d’actualité, tandis que le numéro « Espaces publics en images » (Hermès, no 13-14, 1992) a permis de sortir des idées reçues sur l’espace public télévisuel en montrant le rôle structurant des médias dans les démocraties modernes. De son côté, le numéro « Économie solidaire et démocratie » (Hermès, no 36, 2003), nous l’avons dit, a abordé le dimension économique de l’espace public dans une perspective critique mais non marxiste. De même, le numéro « L’opinion publique. Perspectives anglo-saxonnes » (Hermès, no 31, 2001) a offert une traduction de textes (ceux de Dewey, Lippmann ou Gallup, notamment) permettant de penser l’espace public en dehors de la perspective habermassienne. Enfin, « Paroles publiques, communiquer dans la cité » (Hermès, no 47, 2007) a croisé ces approches classiques de l’espace public avec les théories de la démocratie délibérative et participative qui structurent aujourd’hui le champ académique. Au total, l’entreprise intellectuelle d’Hermès fut un succès. Le concept d’espace public est devenu un concept clé des sciences sociales francophones et la revue est désormais une référence intellectuelle incontournable pour qui veut utiliser cette notion.
Une ouverture internationale constante
10Le succès d’Hermès dans la légitimation de la communication politique et dans la diffusion du concept d’espace public s’explique sans doute par la large ouverture internationale qui marque ses travaux. Ouverture qui se marque de quatre manières :
11– La volonté d’explorer des zones géographiques précises avec des thématiques originales. À cet égard, le dernier numéro de la revue « Les BRICS un espace ignoré » (Hermès, no 79, 2017) est emblématique puisqu’il définit les BRICS comme un projet politique original reposant paradoxalement sur nombre d’incommunications. Au cours de son histoire, Hermès s’est ainsi intéressé au « monde Pacifique dans la mondialisation » (no 65, 2013), à la « Société civile et Internet en Chine et Asie Orientale » (no 55, 2009) ou à « L’Amérique latine » (no 28, 2000). La revue a aussi consacré deux numéros complémentaires à la construction européenne, puisque le premier s’est nommé « La cohabitation culturelle en Europe » (no 23-24, 1999) et le second « Les incommunications européennes » (no 77, 2017).
12– L’intérêt porté aux liens entre langues et politique internationale. Cet intérêt – que l’on retrouve en filigrane dans le numéro « Les langues de bois » (no 58, 2010) et au cœur des numéros « Traduction et mondialisation » (no 49, 2007 ; no 56, 2010) – s’est traduit par la conception de deux numéros dont les thèmes sont très généralement peu abordés par les spécialistes de la politique : « Francophonie et mondialisation » (no 40, 2004) et « Langues romanes : un milliard de locuteurs » (no 75, 2016).
13– L’ambition de croiser des perspectives nationales différentes sur une même problématique internationale. Dans la durée, l’analyse politique d’Hermès n’a pas seulement consisté à étudier la spécificité de telle ou telle aire géographique (l’Europe, par exemple), mais à croiser les perspectives de manière à décaler le regard et ainsi ouvrir à de nouvelles manières de comprendre un problème donné. À cet égard, le numéro « Événements mondiaux, regards nationaux » (no 46, 2006) est emblématique avec, en particulier, au cœur de ce numéro, quatre textes consacrés au rejet du traité constitutionnel européen, qui l’analysent depuis les perspectives de l’Europe des quinze, mais aussi de l’Europe de l’Est (Bulgarie et Roumanie) et même depuis le Canada. Regards croisés qui permettent à la fois de mesurer « le cadrage » national opéré par les médias quand ils relatent un événement international (ce qui est le but explicite du numéro), mais qui autorisent surtout les chercheurs francophones à se décentrer en découvrant la manière dont les chercheurs étrangers abordent la question.
14– Multiculturalité du comité de rédaction. Pour aborder les questions politiques internationales en se démarquant d’une approche franco-française, la revue fait l’effort financier d’intégrer dans son comité de rédaction – qui se réunit en présentiel et au grand complet deux fois par an – des chercheurs des cinq continents (40 % du comité de rédaction). Comme la plupart des numéros sont codirigés par trois personnes (les deux coordinateurs et un superviseur), cela permet, dans la construction même de la problématique, d’aborder d’une manière pluriculturelle les thèmes politique internationaux. Cette ouverture internationale du comité de rédaction facilite en outre la contribution de chercheurs étrangers spécialistes de leur domaine, mais pas forcément très connus en France, qui viennent apporter des références théoriques peu mobilisées dans la recherche franco-française.
Trois pistes à explorer
15L’avenir des recherches politiques de la revue se situe ainsi en dehors des analyses convenues des bouleversements politiques suscités par les technologies de l’information et de la communication. Il s’agit plutôt d’explorer trois pistes. La première est de poursuivre le travail sur une interdisciplinarité à large spectre incluant les sciences sociales et la philosophie politique, comme c’est le cas aujourd’hui, mais aussi les sciences fondamentales. Le but étant de développer une anthropologie politique indisciplinée qui s’écarte des œillères disciplinaires pour mettre en dialogue et en tensions des approches qui trop souvent s’ignorent. La deuxième est de penser la mondialisation en se décentrant du logos occidental, en prenant en compte ce que B. de Sousa Santos (2015) nomme les « épistémologies du Sud ». Dans cette perspective, l’ouverture internationale du comité de rédaction est un atout qui peut sans doute être mieux exploité. Enfin, troisième piste à intégrer à l’analyse de la communication politique, les récents travaux, fortement soutenus par la revue, sur l’incommunication. Comment penser l’incommunication politique ? Quelles pistes théoriques ? Quelles méthodes empiriques ? Les trente années qui viennent s’annoncent aussi riches et passionnantes que les trente qui viennent de s’écouler.
Références bibliographiques
- Achache, G., « Le marketing politique », Hermès, no 4, 1989, p. 103-112.
- Calhoun, C., Habermas and the Public Sphere, Cambridge, MIT Press, 1992.
- Dacheux, E., « L’incommunication, sel de la communication », Hermès, no 71, 2015, p. 266-271.
- de Sousa Santos, B., Épistémologies du Sud, Paris, Desclée de Brouwer, 2015.
- Gingras, A.-M., « L’argumentation dans les débats télévisés entre candidats à la présidence américaine », Hermès, no 16, 1995, p. 187-200.
- Gosselin, A., « La rhétorique des conséquences non prévues », Hermès, no 17-18, 1995, p. 299-319.
- Lebon, G., Psychologie des foules, Paris, Presses universitaires de France, 2013 [1895].
- Lefort C., Essai sur le politique, Paris, Seuil, 1986.
- Livet, P., « Conventions et limitations de la communication », Hermès, no 1, 1988, p. 121-142.
- Luhmann, N., Politique et complexité. Les contributions de la théorie générale des systèmes, Paris, Le Cerf/Humanités, 1999.
- Maigret, E. et Monnoyer-Smith, L., « Des caméras dans un conseil municipal. Portée et limites de l’expérience d’Issy-les-Moulineaux », Hermès, no 26-27, 2000, p. 139-158.
- Morin, E., L’Esprit du temps. Essai sur la culture de masse, Paris, Grasset, 1962.
- Morin, E., « Tout reprendre à zéro », entretien avec R. Glucksman, Le Nouveau Magazine littéraire, no 1, 2018.
- Pape François, Politique et société, rencontres avec D. Wolton, Paris, éditions de l’Observatoire, 2017.
- Prado Jr, P. W., « Jeux de langage et théorie de la communication. Notes sur Wittgenstein et Habermas », Hermès, no 1, 1988, p. 143-159.
- Polanyi, K., « Le sophisme économiciste », Revue du Mauss, no 29, 2007, p. 63-79.
- Sourbès-Verger, I, « La tête dans les étoiles, les pieds sur Terre. Des représentations à la réalité », Hermès, no 34, 2002, p. 9-18.
- Riesman, D., La Foule solitaire, Paris, Arthaud, 1964.
- Weber, M., Le Savant et le politique, Paris, Plon, 1959 [1917].
- Wolton, D., « La communication politique : construction d’un modèle », Hermès, no 4, 1989, p. 27-42.
Publications d’Hermès citées
- Hermès, « Théorie politique et communication », sous la dir. de C. Lazzeri et J.-P. Chrétien-Goni, no 1, 1988.
- Hermès, « Le nouvel espace public », sous la dir. de D. Bregman, D. Dayan, J.-M. Ferry et D. Wolton, no 4, 1989.
- Hermès, « Espaces publics, traditions et communautés », sous la dir. de J.-M. Ferry, no 10, 1992.
- Hermès, « Espaces publics en images », sous la dir. de D. Dayan et I. Veyrat-Masson, no 13-14, 1994.
- Hermès, « La cohabitation culturelle en Europe », sous la dir. d’E. Dacheux, A. Daubenton, J.-R. Henry, P. Meyer-Bisch et D. Wolton, no 23-24, 1999.
- Hermès, « www.démocratielocale.fr », sous la dir. d’E. Maigret et L. Monnoyer-Smith, no 26-27, 2000.
- Hermès, « Amérique latine. Culture et communication », sous la dir. de G. Lochard et P. R. Schlesinger, no 28, 2000.
- Hermès, « L’opinion publique. Perspectives anglo-saxonnes », sous la dir. de L. Blondiaux et D. Reynié, no 31, 2001.
- Hermès, « L’espace, enjeux politiques », sous la dir. d’I. Sourbès-Verger, no 34, 2002.
- Hermès, « Économie solidaire et démocratie », sous la dir. d’E. Dacheux et J.-L. Laville, no 36, 2003.
- Hermès, « Francophonie et mondialisation », sous la dir. de T. Bambridge, H. Barraquand, A.-M. Laulan, G. Lochard et D. Oillo, no 40, 2004.
- Hermès, « Évènements mondiaux, regards nationaux », sous la dir. de J. Arquembourg, G. Lochard et A. Mercier, no 46, 2006.
- Hermès, « Paroles publiques. Communiquer dans la cité », sous la dir. de F. Massit-Folléa et C. Méadel, no 47, 2007.
- Hermès, « Traduction et mondialisation, vol. 1 », sous la dir. de J. Nowicki et M. Oustinoff, no 29, 2007.
- Hermès, « Société civile et Internet en Chine et en Asie orientale », sous la dir. d’O. Arifon, C. Liu et E. Sautedé, no 55, 2009.
- Hermès, « Traduction et mondialisation, vol. 2 », sous la dir. de M. Oustinoff, J. Nowicki et J. Machado da Silva, no 56, 2010.
- Hermès, « Les langues de bois », sous la dir. de J. Nowicki, M. Oustinoff et A.-M. Chartier, no 58, 2010.
- Hermès, « Le monde Pacifique dans la mondialisation », sous la dir. de R. Meltz et D. Barbe, no 65, 2013.
- Hermès, « Les langues romanes : un milliard de locuteurs », sous la dir. de L.-J. Calvet et M. Oustinoff, no 75, 2016.
- Hermès, « Les incommunications européennes », sous la dir. de J. Nowicki, L. Radut-Gaghi et G. Rouet, no 77, 2017.
- Hermès, « Les BRICS, un espace ignoré », sous la dir. d’O. Arifon, T. Dwyer et C. Liu, no 79, 2017.
- Lepastier, S., L’Incommunication, Paris, CNRS éditions, coll. « Les Essentiels d’Hermès », 2013.
- Mercier, A. (dir.), La Communication politique, Paris, CNRS éditions, coll. « Les Essentiels d’Hermès », 2008 [nouvelle édition, 2017].
Mots-clés éditeurs : communication politique, politique, espace public, communication, anthropologie politique
Date de mise en ligne : 25/05/2018
https://doi.org/10.3917/herm.080.0197Notes
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Colloque qui s’est déroulé le 29 et 30 novembre 2007 sous le titre « Économie sociale et solidaire, territoire et politique : regards croisés ».
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« Le Nouvel espace public » (no 4), « Espaces publics, traditions et communautés » (no 10), « Espaces publics en images » (no 13-14), « Économie solidaire et démocratie » (no 36) – dont le titre initial était « Économie solidaire et espace public » –, « L’opinion publique. Perspectives anglo-saxonnes » (no 31), « Paroles publiques, communiquer dans la cité » (no 47).
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À travers les textes de Pierre Livet (1988) et Plinio Walder Prado (1988).
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Date de publication d’un ouvrage collectif discutant des thèses d’Habermas (Calhoun, 1992).