Couverture de GS_HS01

Article de revue

La prévention des risques liés au vieillissement : un nouveau pacte social ?

Pages 81 à 91

Notes

  • [1]
    Conference on healthy and dignified ageing, Stockholm, 15-16 september 2009.
  • [2]
    www.solidarite.gouv.fr/vieillissement-actif
  • [3]
    www.plan-alzheimer.gouv.fr
  • [4]
    http://www.travail-solidarite.gouv.fr.personnes âgées
  • [5]
    Le Monde Économie (2010). Le financement de la dépendance, 4-5, 20237, mardi 16 février 2010.
  • [6]
    « Des méthodes dites d’instrumentation prouvent qu’il y a une relation de causalité entre baisse de la mortalité et augmentation de la croissance », Le Monde, 20 mai 2009.
  • [7]
    http://www.health-inequalities.eu
  • [8]
    Améliorer l’équité en santé par le biais des déterminants sociaux de la santé dans l’Union européenne.

1 L’idée de prévention appliquée aux problèmes du vieillissement n’est pas nouvelle puisque le rapport Laroque en 1962 prévoyait de préserver le maintien à domicile des personnes âgées par « une stratégie globale préventive qui est substituée à une action sociale qui s’exerçait à la marge des politiques de retraite en opérant des prises en charge individuelles, partielles et curatives » (Guillemard, 1983). Cette politique de la vieillesse s’inscrivait aussi dans une politique de santé de désinstitutionalisation qui a transformé les hospices, en 1980, accueillant un nombre croissant de personnes âgées par déficit de solutions extrahospitalières.

2 Depuis, les différentes politiques de la vieillesse ont permis le développement de structures sanitaires et sociales favorisant le maintien à domicile et retardant ainsi pour le plus grand nombre l’entrée en institution.

3 Toutes les sociétés occidentales ont soutenu l’amélioration de l’espérance de vie, la lutte contre la mortalité et la morbidité. Les indicateurs de santé ont évolué favorablement en raison des progrès réalisés sur les conditions de vie et des progrès de la médecine. Le phénomène de vieillissement de la population est observable en Europe puisque 20 % de la population a plus de 60 ans et pourrait atteindre 35% en 2050 (Barangé, Eudier & Sirven, 2008). Il convient de distinguer le vieillissement de la population (proportion croissante de plus de 60 ans dans la population) du vieillissement individuel.

4 La généralisation des retraites en France a sorti la population âgée d’une grande précarité et a contribué à l’augmentation de l’espérance de vie et l’on commence à se demander si ce gain réalisé en termes de mois de vie est avec ou sans incapacité. La santé des personnes âgées est devenue un enjeu social majeur pour les sociétés occidentales en termes de dépenses de santé et de risque de fragilisation d’une partie croissante de la population.

5 Depuis une décennie, il est observé, au niveau des politiques publiques, un changement de paradigme qui est le reflet d’une volonté de maîtrise des risques démographiques, sociaux et économiques par la prévision et par la prévention des problèmes de santé d’une population perçue négativement comme consommatrice de soins et de services. On est passé de la gestion des risques liés à la vieillesse à la prévention de ces risques.

6 Les pays de l’OCDE confrontés à cette nouvelle réalité sociale mettent en place des programmes dont l’objectif est de promouvoir un vieillissement actif et sain. On peut citer des projets tels que Healthy ageing (2004-2007) et de Active ageing (WHO, 2002).Le projet Vieillir en bonne santé implique dix pays européens, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Plateforme européenne pour les personnes âgées (Âge Europe). Le programme Healthy and dignified ageing [1], sous la présidence suédoise de l’Union européenne, a pour objectif l’amélioration de la qualité des soins aux plus âgés. Le plan Vieillir actif et en parfaite santé en Europe est une initiative lancée par la commission européenne en mai 2011. Enfin, 2012 est « l’année du vieillissement actif et de la solidarité intergénérationnelle en Europe » (Sève, 2010) [2]. Le bien vieillir est une nouvelle philosophie sociale dont l’objectif serait une redéfinition du pacte social qui lie les générations et les âges sociaux dans leur rapport au travail. Il serait générateur de bonheur humain et d’efficacité sociale (ibid., p. 3). Dans ce texte, nous questionnerons la réalité de ce pacte social à l’épreuve des politiques et des pratiques de prévention des risques liés au vieillissement.

LA PLACE DE LA PRÉVENTION DANS LA SANTÉ PUBLIQUE

7 Si l’idée de prévention n’est pas nouvelle en santé, elle est marginale dans les faits. Tous les systèmes de santé ont jusqu’à présent privilégié le curatif au détriment du préventif. Le secteur de la prévention est vaste et complexe, il déborde sur les conditions environnementales, de travail et de vie. Cependant il ne représente que 2,3 % de la dépense nationale de santé (Déchamp-Le Roux, 2002). Le domaine de la prévention ou médecine préventive et sociale a longtemps été cantonné à la lutte contre des fléaux sociaux et à la surveillance sanitaire (protection maternelle et infantile, santé scolaire, médecine du travail et dispensaires de lutte contre les fléaux sociaux). L’État a la mission de protéger la société par la prévention des risques menaçant la santé de la population (Bouquet, 2005). En France, le Centre d’analyse stratégique (2010) précise que si la prévention est présentée comme une solution au problème de l’accroissement des dépenses de santé, elle n’entraine pas forcément d’économies car elle a aussi un coût. Il est préconisé de développer des politiques ciblées car « modifier les comportements passe par le développement d’actions ciblées innovantes » et il est observé que les actions de prévention risquent de ne bénéficier qu’aux populations déjà sensibilisées « aux bonnes pratiques sanitaires ». L’objectif est de maîtriser les dépenses de santé tout en maximisant le bien-être de la population.

8 Jusqu’à une période récente, la prise en charge des déficits et des handicaps liés au vieillissement était assez fataliste : la vieillesse étant associée à invalidité. On observait la lente progression des incapacités, du fait de l’accroissement de cette tranche d’âge, et on mettait en place un système médico-social de prise en charge de la dépendance pour permettre au plus grand nombre de vieillir à domicile. La poussée démographique sur fond de crise de nos systèmes de protection sociale et de santé est un des paramètres qui a contribué à entrevoir autrement le processus du vieillissement.

9 L’autre paramètre est celui de la médecine curative en crise depuis la transition épidémiologique (Drulhe, 1996) amorcée il y a maintenant 40 ans. En effet les maladies aiguës ont cédé le pas aux maladies chroniques qui deviennent un enjeu majeur de santé publique pour les pays occidentaux L’enjeu est important car il s’agit d’améliorer les indicateurs de santé et de réduire les dépenses de santé qui ne cessent d’augmenter dans les pays occidentaux. La prise en charge des maladies chroniques est plus complexe et repose sur une participation du patient à son traitement et les personnes âgées ont plus de risques de développer des maladies chroniques.

10 L’approche critique de la médecine curative initiée par Powles (1973) répondait à l’inquiétude exprimée au sujet de la stagnation des indicateurs de santé et laissait entrevoir que la prévention pouvait avoir une plus grande efficacité dans la réduction de la morbidité et de la mortalité. Powles défend une approche écologique des problèmes de santé contemporains arguant, entre autres, que le fardeau de la maladie est fabriqué par l’homme et que les réponses ne sont pas que techniques. Cette approche minoritaire a cependant fait son chemin en santé publique. Quelques années plus tard, Knowles (1977) reprend la thèse de l’amélioration des conditions de vie comme étant un des facteurs importants de réduction de la mortalité et de la morbidité et il développe l’idée d’une responsabilisation de l’individu, en première instance, pour son état de santé stigmatisant ainsi les comportements et les modes de vie. La prévention est centrale dans la démarche et l’individu a le devoir moral de préserver sa santé en suivant certains principes de base tels qu’ils ont été définis par Breslow et Belloc (1973) en s’appuyant sur une recherche qui établit un lien significatif entre espérance de vie, santé et hygiène de vie. La prévention individuelle est ainsi privilégiée au détriment d’une prévention collective qui toucherait un plus grand nombre d’individus et en particulier ceux qui en ont le plus besoin comme l’explique Henrard (2009). Les institutions non-sanitaires (sociales, culturelles, politiques et économiques) jouent un rôle dans la prévention et dans la prise en charge de la maladie (Déchamp-Le Roux, 1997) mais comment inverser l’ordre des priorités lorsque l’on sait que les technologies curatives sont potentiellement plus lucratives que les interventions préventives (Mustard, 1996) ?

11 En 1986, la charte d’Ottawa a proposé le concept de promotion de la santé « qui est le processus qui confère aux populations les moyens d’assurer un plus grand contrôle sur leur propre santé et d’améliorer celle-ci ». Il s’agit de mettre en place des politiques publiques susceptibles de préserver et d’améliorer la santé des populations. La promotion de la santé a été diversement mise en œuvre selon les pays et l’essor de la prévention a suscité et suscite encore l’espoir d’une amélioration des indicateurs de santé. La promotion de la santé a été développée dans un contexte de responsabilisation de l’individu pour sa santé et de préoccupations relatives aux risques industriels et technologiques. C’est la société du risque conceptualisée par Beck (1992) car l’on prend conscience que les risques liés à la science et à la radicalisation de la modernité ne connaissent ni frontière, ni limite dans le temps. Dans un contexte d’incertitude sociale, toute activité susceptible de proposer des éléments de maîtrise de l’existence est bienvenue.

PRÉVENTION ET VIEILLESSE

12 Dans le domaine de la vieillesse, on peut distinguer différentes étapes significatives de changements de paradigmes dans la gestion des risques sociaux (Guillemard, 1980 ; 1986) liés au vieillissement dans le contexte de la France.

13 Première phase : les politiques de la vieillesse visent à assurer un minimum de ressources jusqu’à la mise en place progressive d’un système de retraites et l’on commence à se préoccuper d’une politique de maintien à domicile des personnes âgées.

14 Deuxième phase : les politiques de la dépendance émergent dans les années 1980 avec l’augmentation de l’espérance de vie et le vieillissement de la population. Il y a création d’institutions, de services, de métiers et de professions dans le domaine de l’aide à la personne âgée.

15 Troisième phase : les politiques de prévention des risques sociaux tels que la dépendance avec une mise en place d’une allocation spécifique, des assurances privées, des services privés et institutionnels du risque de dépendance (Ennuyer, 2002). Citons le programme de prévention de la maladie d’Alzheimer (plan Alzheimer 2008-2012) [3], conséquence de l’augmentation de personnes âgées de plus de 80 ans car la prévalence y est croissante, ou le programme d’action sociale de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) (Périnel, 2008) dans le domaine de la prévention de la perte d’autonomie et d’aide au maintien à domicile des personnes âgées qui bénéficient d’une allocation personnalisée d’autonomie (Apa). Il s’agit de mettre en œuvre des actions de prévention, d’information et de dépistage dans le cadre d’une politique du mieux vieillir afin d’éviter l’institutionnalisation des personnes âgées (ibid., p.5).

16 Quatrième phase : les politiques de prévention du vieillissement sont une des réponses sociales au coût croissant des dépenses de santé des personnes âgées ; la consommation des soins des plus de 65 ans est quatre fois plus importante que le reste de la population. La question de la productivité sociale des seniors est posée et la préservation de la santé à un âge élevé devient un enjeu social. Le vieillissement biologique pathologique est perçu comme un processus maîtrisable. En France, différents programmes ont vu le jour tels que le plan Bien vieillir 2007-2009 sous la responsabilité de J.-P. Aquino [4]. L’enjeu est de promouvoir l’autonomie, la longévité et la qualité de vie de la personne. Il n’est plus question d’augmenter l’espérance de vie et/ou de gérer la dépendance des personnes âgées mais de préserver leur qualité de vie associée à l’autonomie et à l’intégration sociale. Il est proposé de prévenir les risques d’isolement, de promouvoir une alimentation saine et de favoriser une activité physique. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), mise en place en 2004, a soutenu 187 projets sur ces questions. Il est prévu une augmentation de la prise en charge des soins médicaux et de la perte d’autonomie des plus de 75 ans et dont le coût risque de doubler dans trente ans [5]. Promouvoir la santé des personnes âgées (Barthélémy, Imbert & Le Pin Corre, 2009) est un enjeu social et même économique puisque selon les économistes (Aghion, 2009) [6] de la Silver economy, l’amélioration de l’espérance de vie sans incapacité augmenterait le potentiel de croissance à long terme d’un pays.

17 C’est entre la troisième et la quatrième phase que l’on passe de la gestion des risques à une politique de prévention des risques sociaux et sanitaires liés au vieillissement de la population comme en témoigne la mise en place du plan national Bien vieillir. La revue Gérontologie et société de la Fondation nationale de gérontologie (FNG) consacre, en 2008, un numéro spécial à la question de la prévention et de la promotion de la santé (Cassou, 2008). Puis, en 2009, c’est la revue La santé de l’homme de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) qui réalise un numéro spécial, Promouvoir la santé des personnes âgées, dans lequel on trouve une présentation des pratiques et des politiques de promotion de la santé des personnes âgées. Puis, en 2011, un numéro est centré sur « les déterminants socio-environnementaux de la santé des aînés » répondant ainsi à la critique de la non prise en compte des déterminants sociaux dans les programmes de prévention des risques liés au vieillissement. Faire de la prévention, c’est travailler en amont mais quelle prise a-t-on, par exemple, sur les inégalités sociales et économiques ? Dès lors, tout semble s’accélérer avec le colloque organisé par la FNG en février 2012 sur Prévention et vieillissement qui permet un premier bilan des divers programmes de prévention.

LA PRÉVENTION, AXE NOVATEUR DES CAISSES DE RETRAITE ?

18 C’est un axe novateur puisque les caisses de retraite distinguaient clairement l’action sociale (aide économique individualisée aux retraités en difficulté) et la santé qui devait strictement relever des compétences des caisses maladies. Les caisses de retraite de l’Association générale des institutions de retraite des cadres (Agirc) et de l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (Arrco) ont, il y a maintenant 30 ans, innové en créant des centres de prévention en réponse à un manque constaté au niveau du suivi médical des retraités. D’autres caisses de retraite ont suivi en proposant des examens de santé visant à dépister les déficits pouvant conduire à une perte d’autonomie. Le président du comité de suivi du plan national Bien vieillir, J-P Aquino a travaillé sur l’uniformisation des bilans de santé. La Cnav (Blanckært, 2012) en partenariat avec la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts) s’est engagée dans une offre de services en matière de prévention sur des populations ciblées dont l’objectif est la préservation de l’autonomie des personnes âgées. La Cnav est d’autre part engagée dans une politique d’amélioration de l’habitat individuel ou collectif.

19 Les départements d’action sociale ont réorienté leur politique sociale en tenant le discours de prévention suivant aux bénéficiaires des caisses de retraite complémentaire : « Vous devez vous prendre en charge ». La préservation de la santé des seniors est de plus en plus présentée comme un investissement social et économique. Les actions proposées reflètent la diversité des publics auxquels s’adressent les caisses de retraite qui tentent au mieux de répondre aux besoins tels qu’ils sont évalués et définis par le cadrage du plan national Bien vieillir : promouvoir l’exercice physique, une meilleure alimentation et favoriser le lien social. Elles sont proposées au moment de la péri-retraite. Les départements d’action sociale des caisses de retraite ont innové en valorisant la prévention tout en poursuivant la traditionnelle mission d’aide. On peut distinguer un pôle réparation et un pôle prévention. Notons que la participation des usagers à la définition des besoins n’est pas encore acquise.

20 Le concept de bien vieillir (Rowe & Kahn, 1997) intègre trois composantes indispensables à un vieillissement sans incapacité : une bonne santé associée à des capacités intellectuelles préservées et une intégration sociale. Ce concept responsabilise l’individu et accorde une grande importance aux styles de vie (Déchamp-Le Roux, 2002). Il développe la thèse, en prenant appui sur plusieurs recherches, selon laquelle il est possible de maîtriser son vieillissement en adoptant certaines règles d’hygiène de vie ; c’est la culture contre la nature. Il est défendu une conception positive du vieillissement faisant appel aux ressources disponibles mais qui ne laisse aucune place à une approche collective de la prévention. Les initiateurs du concept militent pour promouvoir toutes les actions permettant de bien vieillir avec la mise en place d’un réseau de recherches pluridisciplinaires sur le Successful aging ; les recherches-actions se multiplient et confortent la thèse d’un vieillissement positif.

21 Le plan national français est un compromis entre une prévention centrée sur l’individu et une prévention collective puisque des objectifs de santé publique sont définis nationalement et complètent ainsi les nombreuses initiatives de mutuelles, de caisses de retraite, des collectivités locales et des programmes OMS Villes, amies des aînés.

22 Si l’on fait un inventaire des actions de prévention, on constate une diversité de l’offre des actions de prévention destinées à sensibiliser les personnes âgées aux risques liés au vieillissement et sur les ressources à mobiliser pour bien vieillir. Ces actions s’inscrivent dans le projet européen Healthy ageing (OCDE, 2009) qui est « le processus d’optimisation des capacités physiques, sociales et mentales permettant aux personnes âgées de prendre une part active dans la société sans discrimination ». Ce projet est ambitieux puisqu’il vise l’intégration sociale des personnes âgées et l’on commence à avoir assez de recul pour en évaluer l’impact. Toutes ces actions sont justifiées par le postulat suivant : « Il n’est jamais trop tard pour prévenir ». Ce postulat est aussi confirmé par les acteurs de prévention que nous avons interviewés lors de notre recherche sur les pratiques de prévention en 2010 (Déchamp-Le Roux, 2010). En conclusion, les bilans réalisés montrent l’intérêt d’une prévention quel que soit l’âge malgré de nombreuses insuffisances qui en limitent l’impact.

23 Les acteurs de prévention sont nombreux à considérer que la prévention devrait se faire en amont, ce qui n’est pas le cas en raison d’un découpage des actions de prévention en fonction du cycle de vie. La prévention n’est jamais considérée comme un continuum tout au long de la vie. D’autre part, les actions sont ciblées en fonction d’une tranche d’âge, d’un problème de santé ou d’un problème social et sont le plus souvent ponctuelles. L’articulation entre les acteurs est difficile à mettre en place et l’approche globale de la personne vieillissante reste rare. Elle n’est réalisée que dans des approches territoriales ou écologiques si l’on reprend la formulation canadienne (Barthélémy & coll., 2012). Le spectre est celui de la dépendance dont il faut à tout prix repousser les limites et atténuer les conséquences. Cependant si l’espérance de vie moyenne sans incapacité a augmenté, les inégalités sociales de santé [7], que l’on observe dans tous les pays de l’Europe sociale depuis plusieurs décennies, se sont même aggravées sans que l’on puisse agir sur les déterminants sociaux, ce qui changera peut-être avec les préconisations du programme Determine [8] (2007-2010).

24 Les responsables de programmes de prévention sont nombreux à constater que les messages et les prestations de prévention ne touchent principalement que les plus concernés (Delcourt, 2012) et à observer que ces actions peuvent contribuer à accentuer des inégalités préexistantes au vieillissement comme dans le domaine de la nutrition (Bohic, 2012). La santé des plus fragiles est compromise par le contexte social et économique actuel. Ainsi, on observe depuis une décennie une stagnation des indicateurs de santé et même une dégradation de ces indicateurs pour les catégories sociales les plus défavorisées. C’est un constat qui est fait au niveau territorial dans les régions comme le Nord-Pas-de-Calais où une dégradation précoce de la santé de la population laisse entrevoir à court terme une population âgée doublement touchée par des problèmes sociaux et sanitaires (Defebvre, 2012).

25 Il est à craindre que la prévention centrée sur l’individu ne devienne la norme au détriment d’une prévention collective plus complexe à mettre en œuvre mais plus efficace sur les déterminants sociaux. Les actions sont à imaginer au niveau des politiques publiques. La prévention collective pourrait avoir une place plus importante dans les années à venir si un nouveau pacte social émergeait.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

  • AGHION P. (2009). Des méthodes dites d’instrumentation prouvent qu’il y a une relation de causalité entre baisse de la mortalité et augmentation de la croissance. Le Monde, 20 mai.
  • BARANGÉ C., EUDIER V. & SIRVEN N. (2008). L’enquête Share sur la santé et le vieillissement et la retraite en Europe devient longitudinale. Questions d’économie de la santé, n°137.
  • BARTHÉLÉMY L. & coll. (2012). L’approche écologique en action en France et au Québec : exemples d’intervention de prévention et de promotion de la santé pour les aînés, www.inpes.sante.fr.
  • BARTHÉLÉMY L., IMBERT G. & LE PIN CORRE S. (2009). Promouvoir la santé des personnes âgées. La santé de l’homme, n°401, 11-45, mai-juin.
  • BECK U. (1992). Risk society towards a new modernity, London : Sage.
  • BELLOC N. (1973). Relationship of health practices and mortality. Preventive Medicine, 2, 67-81.
  • BLANCKAERT A. (2012). La mise en place des observatoires des fragilités, Colloque Prévention et Vieillissement, FNG.
  • BOHIC N. (2012). Colloque Prévention et Vieillissement, FNG.
  • BOUQUET B. (2005). La prévention : concept, politiques, pratiques en débat, Paris : L’Harmattan.
  • CASSOU B. (dir) (2008). Prévenir les maladies et promouvoir la santé, Gérontologie et société, n°125.
  • CENTRE D’ANALYSE STRATÉGIQUE (2010). Vaut-il toujours mieux prévenir que guérir, La Note de veille, n°167, mars.
  • CONFERENCE ON HEALTHY AND DIGNIFIED AGEING (2009). Stockholm, 15-16 September.
  • DÉCHAMP-LE ROUX C. (1997). Impact des technologies médicales sur la qualité de vie. Prévenir, vol. 33, n°2, 105-112.
  • DÉCHAMP-LE ROUX C. (2002). L’emprise de la technologie médicale sur la qualité sociale, Paris : L’Harmattan.
  • DÉCHAMP-LE ROUX C. (2010). Les politiques et les pratiques de prévention. Propositions, DRV-Cnav, 31+11p.
  • DEFEBVRE M.-M. (2012). Le vieillissement dans le Nord-Pas-de-Calais. Colloque Prévention et Vieillissement, FNG.
  • DELCOURT J.-B. (2012). Réduire les inégalités de santé. Colloque Prévention et Vieillissement, FNG, p 24.
  • DRULHE M. (1996). Santé et Société. Paris : PUF.
  • ENNUYER B. (2002). Les malentendus de la dépendance. De l’incapacité au lien social, Paris : Dunod.
  • GUILLEMARD A.-M. (1980). La vieillesse et l’État, Paris : PUF.
  • GUILLEMARD A.-M. (1983). Les politiques de la vieillesse. Communications, V37, 105-123, p110.
  • GUILLEMARD A.-M. (1986). Le déclin du social, Paris : PUF.
  • RIVM (2005). Healthy Ageing : a longitudinal study in Europe, report 268053001, 55 p.
  • HENRARD J.-C. (2009). Promouvoir la santé des personnes âgées. La santé de l’Homme, n°401, 23-25.
  • KNOWLES J.H. (1977). The responsibility of the individual. Daedalus, V106, 57-80.
  • LE MONDE ÉCONOMIE (2010). Le financement de la dépendance. 4-5, 20237, mardi 16 février 2010.
  • MUSTARD C.-A. (1996). Est-il possible de décider d’un ordre de priorité dans nos investissements dans les technologies médicales et autres programmes de santé ? Sociologie et Sociétés, VXXVII, 2, 173-187.
  • OECD (2009). Policies for healthy ageing, Health working papers, 42, 32 p.
  • PÉRINEL C. (2008). L’action sociale de la Cnav, Gérontologie et Société, juin, n°125, 185-199.
  • PLAN ALZHEIMER (2008-2012). www.plan-alzheimer.gouv.fr.
  • PLAN NATIONAL BIEN VIEILLIR (2007-2009). www.travail-solidarite.gouv. fr.personnes âgées.
  • POWLES J. (1973). On the limitations of modern medicine. Science, Medicine and man, 1, 1-30.
  • ROWE J.W. & KAHN R.L. (1998). Successful aging. New York : Pantheon books.
  • SÈVE L. (2010). Reconsidérer le bien vieillir, Le Monde diplomatique, vol. 57, n°670.
  • WHO (2002). Active ageing, a policy framework, Madrid, Spain, 60 p.

Date de mise en ligne : 18/09/2012

https://doi.org/10.3917/gs.hs01.0081

Notes

  • [1]
    Conference on healthy and dignified ageing, Stockholm, 15-16 september 2009.
  • [2]
    www.solidarite.gouv.fr/vieillissement-actif
  • [3]
    www.plan-alzheimer.gouv.fr
  • [4]
    http://www.travail-solidarite.gouv.fr.personnes âgées
  • [5]
    Le Monde Économie (2010). Le financement de la dépendance, 4-5, 20237, mardi 16 février 2010.
  • [6]
    « Des méthodes dites d’instrumentation prouvent qu’il y a une relation de causalité entre baisse de la mortalité et augmentation de la croissance », Le Monde, 20 mai 2009.
  • [7]
    http://www.health-inequalities.eu
  • [8]
    Améliorer l’équité en santé par le biais des déterminants sociaux de la santé dans l’Union européenne.

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.9.173

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions