Notes
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[1]
Les processus de management sont : Manager par la qualité, Gérer les projets et Réaliser le contrôle et l’évaluation. Les processus de réalisations sont Réaliser les consultations médicales, Réaliser les explorations médicales, Réaliser les analyses biologiques, Assurer la dispensation des produits pharmaceutiques, Assurer les urgences cardiologiques, Réaliser les interventions chirurgicales en chirurgie cardiaque, Réaliser les interventions chirurgicales en chirurgie thoracique, Assurer les hospitalisations en Cardiopédiatrie, Assurer les hospitalisations en Médecine, Assurer les hospitalisations aux soins intensifs médicaux, Assurer les hospitalisations aux soins intensifs chirurgicaux. Les processus supports sont : Gérer les dossiers médicaux, Assurer la formation continue, Gérer les achats, Pourvoir aux besoins en personnel, Assurer la maintenance des infrastructures et des équipements, Gérer l’informatique, Assurer l’hygiène hospitalière. Les processus externalisés sont : la Restauration, L’Hygiène et l’entretien des locaux, La Main-d’œuvre contractuelle, La Buanderie et la Sécurité des locaux.
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[2]
Journal officiel de la république de Côte d’Ivoire, Fraternité Matin du vendredi 3 février 2006.
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[3]
655 F CFA ≈ 1 €.
Introduction
1Le contexte de l’action publique change, orienté de façon exogène sur les rôles des parties intéressées enclines aux processus politiques (Mazouz et al., 2015), et de façon endogène sur les modalités entrepreneuriales d’amélioration par les marges de manœuvre (Alford et Yates, 2014). Or suivant Osborne (2018, p. 5), la tâche des organisations de services publics est d’établir l’offre de service et de faciliter le processus de création de valeur. Ce qui représente une discontinuité avec le passé puisque conduisant à l’introduction de nouvelles connaissances, d’une nouvelle organisation et de nouvelles compétences, donc plus généralement à l’innovation (Pupion, 2018). Le défi en interne pour les acteurs est d’organiser ces processus déclinaisons du service public, de manière à ce que les utilisateurs du service perçoivent bien que leurs objectifs sont atteints (Grönroos, 2018) et que la valeur émerge pour eux (Grönroos, 2018 ; Osborne, 2018). En effet, l’innovation dépasse largement le service ou le processus pour s’étendre aussi à l’architecture des revenus. Ce besoin d’innovation implique l’existence d’un modèle d’affaires dont l’enjeu stratégique est la capacité à dépasser ses frontières et à appuyer sa proposition de valeur sur ses interactions avec un environnement de marché qu’elle contribue à configurer (Johnsen, 2015). L’analyse des modèles d’affaires dans cette situation d’innovation par Cavalcante et al. (2011), démontre que des tensions émergent de façon incrémentale ou radicale. Les premiers éléments clés de cet environnement sont les clients, avec lesquels elle cherche à développer une relation la plus intime possible et dont le rôle peut aller jusqu’à la coproduction de valeur avec l’organisation (participation à la conception de produits/services, à l’information des autres clients, etc.) (Dahan et al., 2010). La seconde composante comprend les partenaires, dont la nature (fournisseurs, concurrents, indépendants, prestataires, distributeurs, clients…) et le rôle (apport de ressources, compétences, complémentarité de l’offre, accès au client, contribution à l’effet de réseau…) peuvent être en permanence réinventés pour améliorer la proposition de valeur. En ce sens, la stratégie des modèles d’affaires s’appuie sur la gestion continue de l’écosystème de marché et la coproduction de valeur au sein de cet écosystème (Attour et Burger-Helmchen, 2014).
2La littérature sur la configuration du modèle d’affaires s’attache (1) à décrire les relations dyadiques entre les composants du modèle d’entreprise (Ranerup et al. 2016 ; Spieth et al. 2014) ; (2) à l’incarner comme élément central de mise en œuvre opérationnelle (Yunus et al., 2010 ; Zott et Amit, 2007) ; (3) à représenter dans les typologies et les taxonomies des modèles d’exploitation (Baden-Fuller et Morgan, 2010) ; (4) à révéler l’émergence et la génération de modèles d’exploitation (Chesbrough et Rosenbloom, 2002 ; Johnson et al., 2008) ; et enfin (5) à montrer leurs implications pour la performance de l’entreprise (Casadesus-Masanell et Ricart, 2010 ; Teece, 2010). Cette dernière configuration permet de combiner des ressources publiques à la lumière et parfois de concert avec des ressources privées pour atteindre des objectifs publics et sociaux (Ranerup et al., 2016). En particulier pour les organisations publiques de santé, Nobre (2013) perçoit la transformation de leurs pratiques managériales suivant une dynamique institutionnelle et une dynamique d’établissement. L’observation de certaines organisations publiques de santé montre qu’en marge des injonctions des autorités de tutelles, d’autres démarches d’innovations comme la gestion par processus (Dagou, 2019 ; Pascal, 2003 ; Poister et Harris, 1996) sont entreprises. En l’occurrence, ce sont des acteurs clés (des directeurs d’établissements, des directeurs fonctionnels, des membres du corps médical) qui sont à l’origine de ces initiatives. Ils fondent leur action sur leur conviction profonde de la nécessité d’introduire de nouvelles approches et méthodes pour transformer le fonctionnement des organisations publiques de santé (Dagou, 2019). Dans ce cas, le modèle d’affaires véhicule l’innovation tout en interagissant avec lui, puisque la logique de création de valeur n’est pas nouvelle mais ne doit pas négliger la logique de réinvention de cette dernière. L’enjeu consiste alors à trouver un modèle d’affaires pertinent, qui peut impliquer de dessiner un nouveau système d’activités, pour assurer le succès de l’innovation. Le défi pour les organisations publiques consiste à explorer les composantes du nouveau modèle d’affaires tout en exploitant l’actuel, puis de conduire la transformation une fois que l’exploration aurait abouti à la reconfiguration souhaitée. À cet effet, la nature des interactions entre les composantes est à clarifier surtout dans une sorte de hiérarchie pour un modèle d’affaires compétitif et durable (Casadesus-Masanell et Ricart, 2010 ; Spieth et al., 2014 ; Teece, 2010).
3Cette situation conforte Teece (2010), trouvant que l’essence d’un modèle d’affaires consiste à définir la manière dont la valeur est délivrée aux clients, convainc ceux-ci de payer la valeur produite et convertit celle-ci en profits. Il met en lumière d’une part les points clés de la ressource, de l’organisation et d’autre part celui de la valeur pour leur cible, le client contrairement à ce que propose Grönroos (2018) et Osborne (2018, p. 5). Les nouvelles approches de Lecocq et al. (2006) et Al-Debei et Avison (2010) mettent davantage l’accent sur les problèmes collectifs et leur traitement public (Bernier et al., 2013). Dans ces conditions, une vision forte de la part de l’administrateur (Chappoz et Pupion, 2013), initiateur de cette approche est primordiale. L’approche par les structures du modèle d’affaires dans l’action publique permet de mettre en évidence cette ambiguïté du lieu de création de la valeur liée au premier groupe. Pour le second groupe, la focalisation sur le client est l’ultime but exprimé. Zott et Amit (2007) montrent que le modèle d’affaires centré sur le client a un effet positif sur la performance, alors qu’un mélange des composantes du modèle est préjudiciable. Chesbrough et Rosenbloom (2002), Yunus et al. (2010) et Johnson et al. (2008) considèrent la composante proposition de valeur de la direction comme la première étape, tandis que Panagiotopoulos et al. (2012) considèrent la composante du réseau. Ces exemples mettent en exergue l’une des ambiguïtés, à savoir la hiérarchie des étapes de configuration d’un modèle d’affaires. Cette recherche veut contribuer à la littérature sur l’ordre d’importance des composantes du modèle d’affaires mêlant contrainte bureaucratique et contrainte managériale, en scrutant la reconfiguration apportée par la certification au système de management de la qualité de la norme ISO 9001. Si ce système permet d’anticiper le comportement d’un modèle d’affaires en raison des processus, il peut également conduire le modèle d’affaires à adopter des trajectoires, se révélant contraire aux principes qui l’ont initialement fondé. En partant d’un cas illustratif d’un modèle d’affaires, la recherche objective de qualifier les recompositions intervenues dans sa trajectoire dont l’origine était la structure du système de management de la qualité. La question à laquelle cette recherche tente de répondre est : quelles sont les configurations des composantes d’un modèle d’affaires dans une organisation publique ayant mis en œuvre un système de management de la qualité ? La recherche se structure en quatre parties. La première fait un état du modèle d’affaires en organisations publiques en mobilisant la théorie de l’activité. La seconde expose le cas du modèle d’affaires et utilise l’analyse procustéenne pour traiter les données. La troisième partie explicite et analyse les différentes reconfigurations du modèle d’affaires formulées. La dernière partie fait des propositions sur les leviers d’actions pour chaque niveau hiérarchique.
1 – L’activité du modèle d’affaires en organisations publiques
1.1 – Le modèle d’affaires en organisations publiques
4Le modèle d’affaires est défini par Amit et Zott (2001) comme la façon de concevoir le contenu, la structure et la gouvernance de la transaction afin de créer de la valeur par l’exploitation des opportunités d’affaires. Le contenu d’une transaction se réfère aux biens ou aux informations échangées, ainsi qu’aux ressources et capacités requises. La structure se réfère aux parties qui participent, à leurs liens et à la façon dont ils choisissent d’opérer. La gouvernance enfin, se réfère à la façon dont les flux d’information, de ressources et de biens sont contrôlés par les parties concernées, à la forme juridique de l’organisation et aux incitations des participants. Plus tard, Zott et Amit (2010) définissent le modèle d’affaires comme un système d’activités interdépendantes qui transcende l’organisation et s’étend sur ses frontières. De son côté, Teece (2010) juge que chaque fois qu’une organisation est établie, elle utilise explicitement ou implicitement un modèle d’affaires particulier qui décrit l’architecture des mécanismes de création de valeur, de livraison et de capture qu’elle emploie. Bien qu’il y ait peu de consensus entre les différents chercheurs sur la définition précise du modèle d’affaires, on s’entend pour dire qu’il couvre à la fois le fonctionnement interne et les interfaces externes (Schneider et Spieth, 2013) et doit tenir compte à la fois des aspects de la création et de la capture de valeur (Baden-Fuller et Haefliger, 2013 ; Baden-Fuller et Mangematin, 2013). Par la suite, les tendances telles que l’orientation de service (Ranerup et al., 2016), l’ancrage du client (Teece, 2010) et l’innovation ouverte (Chesbrough, 2007) ont conduit à intégrer, l’innovation dans les modèles d’affaires. Il est défini comme le processus pour concevoir un nouveau, ou modifier le système existant d’activité (Zott et Amit, 2010) de façon fondamentalement différente. Il vise ainsi à renouveler consciencieusement et de manière non limitée la logique non marchande pour le public ou marchande pour le privé du modèle d’affaires (Janssen et Zuiderwijk, 2014). On peut retenir qu’un modèle d’affaires est une logique d’activités de valeur client interne et externe, avec intégration de l’innovation et une organisation viable sur le marché.
5Bien que le terme modèle d’affaires soit traditionnellement associé au monde des affaires, l’utilisation de celui-ci dans le contexte du secteur public n’implique pas d’idées plus larges de transfert de pratiques commerciales (Ranerup et al., 2016). Soumis aux nécessités de la culture du résultat et incité à utiliser les outils du secteur privé, le secteur public explore de nouvelles voies. Ainsi, l’utilité du concept modèle d’affaires dans la recherche sur le secteur est plus orientée vers les plates-formes électroniques (Janssen et Kuk, 2007 ; Janssen et al., 2008 ; Janssen et Zuiderwijk, 2014) et secondairement dans les ONG (Dahan et al., 2010). Ce concept peut être utile dans le secteur public pour décrire les dispositions relatives aux services et identifier des éléments pour les améliorations futures. En effet comme dans le secteur privé, le modèle d’affaires du secteur public implique la définition d’offres de services, de fonctions internes et de collaborations externes. Le modèle d’affaires du secteur public tente donc à sa manière de décrire les moyens d’offrir une valeur ajoutée aux citoyens, de la prestation de services à la participation politique. À cet effet, la nécessité d’améliorer les services publics et de favoriser de nouvelles idées et collaborations est particulièrement pertinente (Chappoz et Pupion, 2013). Grönroos (2018) affirme que la valeur ne peut être créée que par l’utilisateur du service, l’organisation de services ne pouvant qu’offrir une proposition de valeur pour l’utilisateur. C’est le mode d’utilisation de cette offre et la manière dont elle interagit avec les expériences de vie du client qui créent de la valeur. Ainsi, la logique de service public part de l’utilisateur de service comme unité d’analyse de base et explore la manière dont leurs organisations pourraient être conçues pour faciliter la création de valeur par les clients, et non l’inverse (Osborne, 2018, p. 5). Ce raisonnement, source d’inspiration pour la norme ISO 9001 portée par les services publics selon Boyne et Walker (2010), illustre la manière de fonctionner du système de management de la qualité.
6Le système de management de la qualité, au sens d’un modèle d’affaires, est une démarche qui mobilise et implique l’ensemble des acteurs d’une organisation pour améliorer de façon continue la valeur pour l’ensemble des parties intéressées (partenaires, fournisseurs, clients finaux, investisseurs, employés, État et société civile…) en réduisant les gaspillages et en prenant en compte les risques (Poister et Harris, 1996, p. 85). Il a pour point focal le processus qui l’inscrit dans une approche collaborative et transversale du fonctionnement de l’organisation (Pimentel et Major, 2015). Un processus suivant Lorino et Tarondeau (2006), est un ensemble d’activités organisées en réseau, de manière séquentielle ou parallèle, combinant et mettant en œuvre de multiples ressources, des capacités et des compétences, pour produire un résultat ayant de la valeur pour le client. La représentation du service public comme ensemble de processus permet alors de déployer de façon cohérente les indicateurs sur les différentes activités du modèle d’affaires. En effet, l’optimisation des processus signifie l’optimisation des interfaces et donc une vision d’ensemble de la prestation fournie (Yu et al., 2012). Les processus identifient donc les éléments d’entrée et les ressources nécessaires puis s’assurent de leur disponibilité ainsi que les éléments de sortie attendus (valeur). Par la suite, ils déterminent les séquences et les interactions des activités (organisation). Ensuite, les processus appliquent les critères et les méthodes nécessaires pour assurer le fonctionnement et la maîtrise de l’activité (réseau). Enfin, ils évaluent ces activités de services en mettant en œuvre les modifications et améliorations requises pour s’assurer de produire les résultats attendus (retombées).
1.2 – Les perspectives du modèle d’affaires
7Panagiotopoulos et al. (2012) et Al-Debei et Avison (2010) proposent une ontologie qui essaie d’unifier les concepts de modèle d’affaires tant dans le public que dans le privé. Elle illustre que cela n’est ni un simple transfert d’un modèle privé, ni une recréation du modèle public mais une question de croisement de pratiques hétérogènes, articulant différents enjeux du cycle des politiques publiques. Perçu sous cet angle, le système de management de la qualité de la norme ISO 9001 décompose son modèle d’affaires en quatre perspectives. Ce sont la responsabilité de la direction pour la proposition de valeur, la mise à disposition des ressources pour structurer cette valeur, la réalisation du service par les retombées de la valeur et enfin la surveillance, la mesure, l’analyse et l’amélioration à l’effet de maintenir le réseau de valeur. Ces perspectives, déclinées en processus dont les pierres angulaires sont les indicateurs retenus, encapsulent la pertinence et la fiabilité du système de management de la qualité. Ces derniers fondent la boîte noire du modèle d’affaires du secteur public, entendu comme l’ensemble des logiques d’activités de valeur qui confère l’aptitude à remplir les exigences légales, techniques et politiques afin de satisfaire les besoins exprimés et implicites du client, voire de la collectivité.
8La première composante des logiques d’activités de la perspective du modèle d’affaires est la proposition de valeur. Elle est une description des services que l’organisation offre, les éléments qui ont l’intention d’ajouter de la valeur à celui-ci, et les besoins des individus cibles et de l’organisation. Cela aide les concepteurs du modèle d’affaires à comprendre les services et leurs besoins, afin de les communiquer et de les livrer aux segments cibles. L’organisation publique conçue pendant longtemps comme un système fermé et auto référencée s’est progressivement ouverte sur ses clients (Emery, 2009). De plus, le modèle d’affaires a eu tendance à décrire les éléments de valeur incorporés dans l’offre, ainsi que la nature des segments de collectivité visée ainsi que leurs préférences (Osborne, 2018). Cette ouverture a conduit à une forme de confrontation entre les exigences internes (techniques, vues des agents publics) et externes besoins et perceptions des clients (Tomaževič et al., 2016). Cette orientation client est une tendance qui a amené les organisations publiques à mieux identifier leurs bénéficiaires, puis à réaliser des enquêtes de satisfaction auprès de ces bénéficiaires, en utilisant des méthodes validées dans les organisations privées, comme le SERVQUAL. Ces stratégies sont bien connues des normes ISO 9001 en termes d’avantage concurrentiel par les coûts (Yu et al., 2012) et différenciation par le déploiement des nouvelles technologies (Panagiotopoulos et al., 2012).
9La seconde composante de la perspective du modèle d’affaires est l’organisation de la valeur. C’est un plan général qui spécifie les dispositions technologiques et organisationnelles nécessaires en termes de ressources et leurs configurations, ainsi que les compétences disponibles (Attour et Burger-Helmchen, 2014). Dans cette logique, les concepts pertinents sont les ressources, les configurations et les compétences. Les ressources peuvent déjà être disponibles au sein de l’organisation ou acquises par les acteurs. Elles peuvent également couvrir les aspects réglementaires, financiers, liés aux compétences, qu’elles soient tangibles ou intangibles (Stephen et Mohamad, 2015). À cet effet, Lorino (1999) signalait déjà qu’on passait d’un pilotage fondé sur le binôme pouvoir hiérarchique – dotation en ressources à un pilotage fondé sur le binôme « compétence – pilotage de chaînes de valeur et de processus d’action » de l’organisation publique. Selon Alford et Yates (2014), le pilotage par processus devient ainsi un outil de changement pour représenter les ressources d’une organisation, leurs configurations et les compétences de base. Dans ce contexte, Chesbrough (2010) indique que pour servir efficacement le marché, l’organisation a besoin de ressources et d’intrants qui pourraient prendre des formes humaines, physiques et organisationnelles. Ils soutiennent également que ces ressources doivent être structurées de manière à faciliter une proposition de valeur concurrentielle sur le marché. Ce management des ressources selon la norme ISO 9001 se décline en termes de satisfaction au travail et de respect des cahiers des charges (Tomaževič et al., 2016) et des règles éthiques pour les médicaux, les médicotechniques ou les administratifs (Dagou, 2019).
10La troisième composante des logiques d’activités du modèle d’affaires est le réseau de valeur. Il est une description des collaborations qu’une organisation effectue et maintient, ainsi qu’une description des acteurs et de leurs flux de communication. Désormais, la demande sociale adressée aux organisations publiques est à la fois fortement différenciée (personnalisation) et rapidement évolutive (Lorino, 1999). Dans ces conditions, les modes de pilotage traditionnels ne fournissent pas de prestations totalement pertinentes par rapport aux besoins et n’assurent pas une économie de ressources satisfaisante. La logique de l’autorité (administrative) et du marché s’étant révélée toutes deux insuffisantes, la bureaucratie s’oriente vers celle des réseaux (Emery, 2009). Le réseau permet trois types de relations qui marquent le passage d’une approche « produit » à une approche processus à savoir l’influence de l’environnement sur la performance des activités (Schneider et Spieth, 2013), l’interaction entre les activités impliquant des relations de cause à effet (Disle et al., 2016) et la canalisation des flux de valeurs vers les parties intéressées (Bernier et al., 2013). Les concepts identifiés dans cette dimension par Ranerup et al. (2016) sont les machines, le réseau, les bases de données, l’espace, le temps de travail des individus, leur énergie et leurs efforts, la communication, et la gouvernance. Au regard de la norme ISO 9001, les dimensions socioéconomiques sont le contrôle des coûts pour l’État, les collectivités locales et les agences de santé.
11La dernière composante de la perspective du modèle d’affaires est la retombée de valeur. Elle décrit la façon dont les retombées sont captées et réparties entre les différentes parties intéressées. Ces retombées dans le public peuvent être une description des dispositions relatives à la gestion axées sur les résultats (Mazouz et al., 2015). Au sens du système de management de la qualité, l’organisation publique planifie et met en œuvre les processus de surveillance, de mesure, d’analyse et d’amélioration nécessaires. Quatre types de retombées sont donc couverts. Une meilleure surveillance des forces de l’organisation aide à orienter l’action dans le service. Celle-ci assure la compréhension du contexte, des changements dans l’organisation, de la production et de l’amélioration du service (renforcement de l’acquis, redressement des carences et élargissement des engagements). La diversité des résultats de la valeur de l’organisation publique est à considérer comme une richesse qui donne à celle-ci son caractère citoyen, marqué par la diversité des parties intéressées à son fonctionnement (Johnsen, 2015). La maîtrise des stratégies pour sa part, donne la souplesse requise qui permet in fine d’offrir un service satisfaisant. La pratique du management fait qu’on peut livrer le service et, ce faisant, servir la fin de l’organisation. Quant à l’apprentissage continu, en particulier en termes d’amélioration continue pour des structures de soins et de la continuité de la prise en charge, il permet la progression du système vers la performance globale (Alford et Yates, 2014).
1.3 – L’activité du modèle d’affaires
12D’une manière générale, on peut distinguer deux perspectives dans la recherche sur les modèles d’affaires. Une perspective axée sur l’activité, conceptualisant le modèle d’affaires comme un système d’activités que les entreprises utilisent pour créer et saisir la valeur (Casadesus-Masanell et Ricart, 2010 ; Zott et Amit, 2010) et une perspective cognitive, la conceptualisant comme un instrument cognitif qui représente ces activités (Baden-Fuller et Haefliger, 2013 ; Furnari, 2015). Inscrite dans la première, la théorie de l’activité s’intéresse à l’activité humaine, envisagée comme une activité socialement située. Pour Engeström (1999), le travail humain est essentiellement coopératif et le sens donné à l’activité devient partagé par les actants qui poursuivent le même but. Analyser l’activité du modèle d’affaires, c’est considérer un système qui inclut l’individu, les outils matériels ou conceptuels qu’il utilise, ses relations avec la communauté qui l’entoure et le produit qu’il se propose de réaliser, les interactions qui s’y produisent, les transformations qui s’y opèrent, tout en conservant une vision globale du système. La médiatisation se caractérise par la division du travail et l’instauration de règles qui encadrent les interactions entre les individus faisant partie du système d’activité et partageant le même objet. Les entités nécessaires pour représenter l’activité humaine dans un modèle systémique occupent des fonctions différentes. Les actants principaux sont le sujet, la communauté et l’objet donnent la motricité à un pôle du système d’activité. Les actants intermédiaires que sont l’instrument, la division du travail et les règles connectent un pôle d’activité avec un actant principal. Les pôles du système d’activité sont mis en relation les uns avec les autres pour illustrer que l’activité est socialement motivée et que différentes catégories d’actants y sont engagées. Toutefois, Schirmer et Silke (2018) ajoutent que les actants et les activités sont en relation par des expériences d’apprentissage et la résolution de contradictions. Ce qui contribue à la dynamique du système pour tendre vers le résultat. En transposant cette décomposition à l’activité du système de management de la qualité aux organisations publiques, on trouve l’écoute du patient (objet) pour information et une prise de décision fondée sur la preuve (instrument), l’implication des professionnels de soins (communauté) avec une autonomie renforcée, le parcours du patient comme processus (règles), le principe d’amélioration continue (sujet) et les relations mutuellement bénéfiques (division) avec les parties intéressées par un dialogue entre professionnels, établissements et autorités publiques. Le tableau 1 donne une définition de chacune des entités du modèle de base de la théorie de l’activité.
La description des entités du modèle de base de la théorie de l’activité
Entités du modèle | Description |
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Sujet | Entité individuelle ou collective avec une intention consciente sur un objet particulier grâce à des instruments précis pour un résultat souhaité. |
Instrument | Entité matérielle ou symbolique vue comme opérations ou des actions, utilisées pour transformer un objet en un résultat. |
Objet | Matériel brut ou espace problème vers où l’action est dirigée afin de modeler ou transformer l’objet tangible ou intangible. |
Division | Partage horizontal des tâches dans une communauté en tenant compte de la hiérarchie verticale des statuts et des pouvoirs entre les membres. |
Communauté | Ensemble d’individus ou de groupes d’individus qui partage un objectif commun, motivant l’action de ses membres. |
Règle | Ensemble de régulations, d’habitudes et de conventions implicites ou explicites, qui coordonne l’interaction entre les entités du système. |
La description des entités du modèle de base de la théorie de l’activité
13Un système d’activité est donc l’interrelation dynamique et réciproque de différentes entités interdépendantes centrées sur un résultat. Disle et al. (2016) sont d’avis que les composantes d’un modèle d’affaires ont des interrelations de type cause à effet, dans une dynamique de création-appropriation de la valeur. Le pôle Sujet-Communauté-Objet transforme la relation que le sujet entretient avec l’objet, par l’instrument. Le sujet se sert de la communauté pour réaliser afin d’atteindre le résultat souhaité, l’objet. Dans le modèle d’activité de la qualité, l’engagement envers le client englobe les façons dont la direction interagit avec leurs clients pour mettre en place une forme de valeur pour répondre à leurs besoins. La direction définit également comment les agents créent de la valeur. Dans ce cas la responsabilité de la direction, comme perspective de la norme ISO 9001, aboutit à la cohérence de la coordination du parcours des patients et une coopération entre les professionnels. Ainsi par identification, le sujet, la communauté et l’objet sont respectivement la direction, l’agent, et le client. Le pôle Communauté-Division-Objet réalise un objet en divisant les tâches pour une organisation sociale de la communauté. La division du travail détermine les rôles possibles dans la servuction à l’objet. Les membres de la communauté peuvent choisir de jouer un rôle déjà existant, déterminer une nouvelle division des tâches ou encore se faire imposer une division des rôles. Les agents organisent la distribution du service grâce aux fiches de processus qui définissent la division du travail. Cette perspective de la norme ISO 9001, à savoir le management des ressources, permet une maîtrise des coûts, des ressources et un ajustement de la prise en charge des patients. Le pôle Sujet-Instrument-Objet permet au sujet, empreint d’intentionnalités de transformer l’objet en utilisant des instruments. Le sujet tend vers la réalisation de l’objet en utilisant la communauté, mais l’instrument comme vecteur de médiation. Lorsque l’instrument ne permet pas d’atteindre l’objet, donc de capter la valeur, le sujet se doit d’influencer l’instrument. La direction dans la satisfaction des clients met en place les fiches de processus pour chaque service. Celles-ci sont revues selon que les indicateurs sont inopérants ou au-delà du seuil réalisable. Ce qui sur le plan de la réalisation du service, comme perspective de la norme ISO 9001, donne les impacts sanitaires et de satisfaction des besoins des clients. Le dernier pôle de Sujet-Communauté-Règles présente la relation entre le sujet et la communauté médiatisée par les règles. Ainsi, les règles influencent et régissent l’activité humaine entre le sujet et sa communauté. D’une part, le sujet peut influencer les règles dont la communauté s’est dotée. D’autre part, ces règles peuvent également avoir une incidence sur l’activité du sujet. La direction régule les relations avec les agents par le pilotage des processus, mais des brèches dans les processus peuvent faire dévier les agents des objectifs. Ce qui sur le plan de la dernière perspective de la norme ISO 9001 permet d’évaluer les bénéfices partagés en termes de coûts économiques et de mutualisation des ressources.
2 – La méthodologie du cas du modèle d’affaires dans l’organisation publique
2.1 – La présentation du modèle d’affaires du cas
14Établissement Public National, l’Institut de Cardiologie d’Abidjan est chargé d’assurer des soins et des examens, de participer aux actions préventives de santé, de mener des formations et de la recherche. Les raisons qui conduisent à retenir ce cas sont présentées suivant le rôle des trois variables principales de Kimberly et Evanisko (1981) à savoir, le profil et le comportement du dirigeant, puis la taille de l’établissement et enfin la présence d’un contexte concurrentiel. Le directeur, initiateur de cette innovation, est un professeur de médecine avec une solide formation en gestion hospitalière, deux fois décoré pour l’atteinte des objectifs de mobilisation des ressources financières de son institution. De plus, avec le changement de régime politique, les agents ont manifesté pour son maintien au poste de directeur, tant il inspire par son exemplarité. Concernant la taille de l’établissement, c’est l’un des trois centres publics spécialisés en cardiologie en Afrique de l’Ouest avec rang de centre hospitalier universitaire pour 90 lits. Ne recevant que sur référencement ou en urgence, l’Institut de Cardiologie d’Abidjan a un effectif de 387 agents au moment de l’étude pour 13 services médicaux, médicaux-techniques et administratifs confondus. À la tête de chacun des 13 services se trouve un responsable dont 8 d’entre eux ont bien voulu participer à cette étude. Son modèle d’affaires, basé sur la certification au système de management de la qualité compte 3 processus de management, 11 processus de réalisation, 7 processus supports et des processus externalisés [1]. La présence du contexte concurrentiel rappelle la transformation des pratiques managériales (Nobre, 2013). Si l’on se réfère à leur extrême variabilité par les ressources disponibles, les compétences et l’humeur des acteurs, la production de soins confinent à des processus dont le résultat n’est pas répétitif et qui utilisent une méthodologie variable (Angelé-Halgand et Garrot, 2014 ; Pascal, 2003). Ainsi, en optant pour une innovation de processus axée sur le cœur technologique ou administratif (Pupion, 2018), pour conduire son modèle d’affaires avec une normalisation est un défi que cette institution a relevé. Elle devient le premier voire le seul centre hospitalier public à obtenir la certification ISO 9001 en 2005 après s’être engagée dans un système de management de la qualité [2], avec renouvellement en 2008, 2012, 2015 et 2018.
15Ces certifications sont ponctuées par les réaménagements de la norme passant de la version ISO 9001 : 2000 à la version ISO 9001 : 2008 puis ISO 9001 : 2015, traduisant le dynamisme de son modèle d’affaires. Ce dynamisme peut s’illustrer grâce au service d’information médicale (SIM) et au service autonome du contrôle et de l’évaluation (SACE). Ils s’assurent de la remontée des données du système de management de la qualité, de leur qualité et contribuent de fait à une saisie optimale de l’activité. Les professionnels de santé sont appelés à concevoir un réseau de valeur obligeant chacun à envisager son intervention en étroite relation avec ses collègues, afin de viser une meilleure valeur rendue au patient. Solidairement responsables de la prestation et des résultats apportés à un type de patient, les acteurs de ce réseau de valeur seraient sollicités pour assumer la relation coût-valeur, non seulement du point de vue du patient concerné, mais aussi de celui de la collectivité (Angelé-Halgand et Garrot, 2014, p. 22). Lors des conseils de gestion ou des revues de direction, chaque pilote de processus justifie la planification de ces interventions, les ressources d’entrées dont il a besoin pour les actes médicaux, les sécurités et les risques dont il est assuré de la maîtrise et les résultats améliorables qu’il a obtenus. La présentation de ce cycle de soins rend possible l’évaluation pour la Direction Médicale et Scientifique, du personnel médical et pour la Direction Administrative et Financière, des ressources consommées, grâce aux indicateurs des fiches de processus. À une date convenue avec la direction, 8 chefs de service ont évalué le pilotage de leurs processus respectifs en fonction des critères regroupés dans le tableau 2.
Les thèmes de la fiche de notation avec les chefs de service
LIBELLÉS | CODAGE |
---|---|
1. La proposition (Sujet-Instrument-Objet) : La planification du modèle d’affaires | |
Le processus du service est-il planifié ? | Prop_Val1 |
Les étapes du processus, ainsi que les activités de revue et de validation sont-elles déterminées ? | Prop_Val2 |
Les responsabilités et les autorités d’interfaces sont-elles gérées ? | Prop_Val3 |
Les besoins en ressources internes et externes sont-ils déterminés ? | Prop_Val4 |
2. L’organisation (Communauté-Division-Objet) : Les entrées du modèle d’affaires | |
Les éléments d’entrées des exigences du service sont-ils déterminés et des enregistrements sont-ils conservés ? | Orga_Val1 |
Les exigences fonctionnelles et de performance sont-elles prises en compte ? | Orga_Val2 |
Les informations d’organisation similaires précédentes sont-elles intégrées ? | Orga_Val3 |
Les éléments d’entrées comprennent-ils des exigences légales, réglementaires, des normes applicables ou règles internes de l’art ? | Orga_Val4 |
3. Le réseau (Sujet-Communauté-Objet) : La maîtrise du modèle d’affaires | |
Les résultats attendus des activités du processus sont-ils maîtrisés et des revues sont menées pour évaluer l’aptitude à atteindre ces résultats ? | Reso_Val1 |
Vérifiez-vous la conformité et/ou mesurez-vous les écarts entre les éléments de sortie et les exigences d’entrée ? | Reso_Val2 |
Des activités de validation sont-elles mises en œuvre pour s’assurer que les services satisfont aux exigences prévues avant sa mise en œuvre ? | Reso_Val3 |
Lorsque les résultats ne sont pas atteints au moment des revues, des vérifications et des validations, des actions sont-elles mises en œuvre ? | Reso_Val4 |
4. Les retombées (Sujet-Règles-Communauté) : Les sorties du modèle d’affaires | |
Existe-t-il des enregistrements des exigences d’entrées et des conséquences d’une potentielle défaillance ? | Reto_Val1 |
Les informations documentées relatives au bon fonctionnement du processus sont-elles conservées ? | Reto_Val2 |
Les modifications sont-elles vérifiées et validées avant mise en œuvre ? | Reto_Val3 |
Les informations sur ces modifications sont-elles conservées ? | Reto_Val4 |
Les thèmes de la fiche de notation avec les chefs de service
16Les quatre pôles formés par chaque entité de la théorie de l’activité (Tableau 1) éclairent sur certains points qui ajoutent de la valeur au cycle de soins du tableau 2. Le premier pôle, Sujet-Instrument-Objet met en relation la manière dont les processus sont utilisés par la direction pour répondre aux besoins de clients (patients). Pour ce pôle, selon le rapport d’activité de 2016, un total de 37 plaintes ont été formulées par les patients, dont le long temps d’attente : 56 % (32 % en 2011) ; le mauvais accueil : 31 % (45 % en 2011) ; les actes non réalisés : 13 % (19 % en 2011). L’ensemble de ces plaintes (92 %) ont été traitées par la mise en place de mesures correctives, comme des contractuels uniquement pour l’accueil, la consultation en langue locale et la tarification à l’activité après 14 h 00. Le second pôle, Communauté-Division-Objet s’assure que les patients sont pris en charge dans les services par les agents à l’aide de toutes les exigences de la profession. Cette prise en charge peut être traduite par une fiche de demande de résolution de problèmes dont 79 ont été émises en 2016 contre 153 en 2016, soit presque 2 fois moins. 80 % d’entre elles ont été traités avec un niveau de satisfaction du personnel de 90 % après traitement. Parmi les demandes de résolution de problèmes, les problèmes d’interfaces (58 %) et les problèmes matériels (25 %) constituent les points critiques, représentant ensemble 83 % des problèmes rencontrés par le personnel. Le troisième pôle, Sujet-Communauté-Objet atteste que la direction a donné les ressources aux agents pour que les actes médicaux soient conformes à ce que le client est en droit d’attendre. En prenant uniquement l’exemple des intéressements pour ce pôle, là où les infirmiers des autres CHU ont perçu environ 40 000 F CFA [3] de prime annuelle, le montant minimum de la prime de 2016 est de 237 000 F CFA. De plus, le médecin avec un certificat de spécialité en cardiologie, qui n’a ni un matricule ni un bulletin de salaire, perçoit une prime d’intéressement de 497 822 F CFA. Le dernier pôle, Sujet-Communauté-Règles garantit que la direction, de par la satisfaction des patients obtenus, coordonne bien les relations entre les agents et elle. Ce pôle permet aux ressources propres de passer de 7 millions en 2000 à 54 millions de F CFA en 2006 puis 70 millions en 2013 avec une augmentation régulière à ce jour. Les agents, en plus de ce qui leur est dû, perçoivent des indemnités particulières et des primes d’incitation passant de 20 millions en 2000 à près de 100 millions en 2006.
17Les thèmes de la fiche de notation émanent en majorité des guides de réalisation des activités opérationnelles (chapitre viii de la norme ISO 9001 : 2015) et plus précisément de « la conception et le développement des services », utilisés par les chefs de service. Ces critères sont formulés sous forme de questions comme dans le tableau précédent et regroupés sous les quatre composantes du modèle d’affaires et de la théorie de l’activité. Pour chaque critère, le chef de service évalue le processus qu’il pilote selon les dix thématiques suivantes : les formalisations, les enregistrements, les indicateurs, les informations, la veille, les interfaces, les risques, les capitalisations, les compétences et les améliorations. Pour ces dix thématiques, ils attribuent une note allant de 1 à 10, selon que le processus qu’il pilote est en fonctionnement de base (1-2), défini (3-4), maîtrisé (5-6), optimisé (7-8) ou en amélioration (9-10). La fiche de notation a été pré testé avant d’être administré auprès des chefs de service. Elle est remise principalement au pilote du processus qui pouvait associer son copilote, pour la renseigner. Le tableau ci-après présente un extrait d’une fiche de notation.
Un extrait de la fiche de notation du Chefservice1
Un extrait de la fiche de notation du Chefservice1
18Le chiffre « 7 » dans la première colonne et première ligne signifie qu’en termes de formalisation, le niveau de planification du processus du service est optimisé. Le chiffre « 6 » dans la dernière colonne et dernière ligne signifie qu’en termes d’amélioration, le niveau des exigences fonctionnelles et de performance est maîtrisé. Le temps de remplissage était en moyenne de deux heures environ en fonction de la disponibilité du chef de service. Après cela la fiche de notation faisait l’objet d’un traitement de données.
2.2 – La méthode d’analyse des données
19La recherche veut mettre en évidence les évolutions relatives du modèle d’affaires, depuis la certification de 2005 jusqu’à celle de 2015, en gommant les certifications de 2008 et 2012. La méthode d’analyse doit donc permettre d’ajuster le modèle d’affaires de 2005 sur la configuration cible de 2015 pour déduire la trajectoire relative des variables les unes par rapport aux autres et de connaître la typologie de leur dynamique. L’insuffisance des analyses factorielles à prendre en compte le temps et l’inadéquation des données à l’analyse par séries temporelles ou par panel, conduit à utiliser l’analyse procustéenne. Elle est utilisée pour déformer afin de rendre autant que possible semblable à une référence, ne laissant apparaître de différences que les transformations autorisées comme la translation, la mise à l’échelle et la rotation (Morand, 2007 ; Tenenhaus et Vinzi, 2005). Cette référence est le modèle d’affaires consensus ou la configuration consensus. Elle débute par l’étude simultanée des fiches de notation des 8 chefs de service, considérant que chaque configuration représente la valeur du processus dont il a la charge (Gower, 1975). On construit ensuite des représentations superposées qui mettent en évidence les traits communs à ces différentes configurations : des modèles d’affaires partiels. La représentation superposée des configurations partielles initiales se fait grâce à, la translation, qui permettra de déplacer les variables jusqu’à la forme de référence ; la mise à l’échelle, qui changera la taille des variables pour qu’elles soient égales à la taille de la forme de référence et enfin la rotation, qui trouvera la position la plus confortable pour les variables. Enfin par itération, on réduit par une suite de transformations, la distance des modèles d’affaires partiels à la configuration consensus. Cette reconfiguration ou configuration consensus (modèle d’affaires de 2015) est la représentation de référence, barycentre des configurations partielles (modèle d’affaires de 2005 et leurs évolutions).
3 – La reconfiguration du modèle d’affaires public
20Les résultats montrent une reconfiguration de cette structure de base. Ils montrent l’évaluation de cette reconfiguration, la configuration consensus et sa reconfiguration.
3.1 – L’évaluation de la reconfiguration
21Le premier résultat des variances dues à la mise à l’échelle des configurations, à la rotation et à la translation donne l’efficacité relative des différentes transformations. Il montre que seule la mise à l’échelle n’est pas significative (ddl = 7 ; F = 1,1 678 ; Pr = 0,319 0). Elle n’a pas un impact prépondérant sur la réduction de la variabilité des configurations, contrairement à la rotation (ddl = 315 ; F = 3,2 812 ; Pr = 0,0001) et à la translation (ddl = 70 ; F = 3,3 563 ; Pr = 0,0 001). Ensuite vient la répartition de la variance résiduelle par objet (Tableau 4). On peut ainsi repérer les objets qui se démarquent de la configuration consensuelle. À cet effet, une analyse en composante principale aide à la visualisation optimale des deux ou trois dimensions des configurations après transformation et de la configuration consensuelle.
Les résidus par objet
Les résidus par objet
22Le second tableau donne les résidus par objet après les transformations. Les résidus les plus faibles concernent les responsabilités et autorités entre les interfaces (Prop_Val3), les besoins en ressources (Prop_Val4), la planification de la conception (Prop_Val1), la détermination et la conservation des exigences des éléments d’entrées (Orga_Val1) et les éléments attendus des activités du processus (Reso_Val1). Cela indique que la proposition de valeur fait plus l’objet d’un consensus et que la retombée s’en éloigne. Pour vérifier cela, un test de consensus est alors réalisé sur la configuration consensus, perçue comme la perception moyenne du modèle d’affaires. Il affiche après 500 permutations, une variance totale expliquée de 59,26 %. On peut conclure que la réduction de la variance est significative.
3.2 – Les configurations « consensus » du modèle d’affaires après initiative
23Les premières configurations consensus s’observent après une mise à l’échelle pour chaque configuration. Le tableau 5 donne la répartition de la variance résiduelle par configuration et les facteurs de mise à l’échelle pour les différentes configurations afin de repérer les configurations qui se démarquent les plus de la configuration consensuelle. Au total, on distingue trois regroupements possibles pour l’ensemble des configurations. Le premier (╦) comprend les chefs de service « Chefservice1 », « Chefservice4 » et « Chefservice8 » avec pour particularité une équipartition des variances sur tous les quatre facteurs et une mise à l’échelle plus petite que 1. Cela indique que ces chefs de service ont eu tendance à varier plus leurs notes à propos des composantes du modèle d’affaires que les autres chefs.
Les caractéristiques des résidus et les variances par configurations
Les caractéristiques des résidus et les variances par configurations
24Le second (╧) regroupe les chefs « Chefservice3 », « Chefservice5 » et « Chefservice7 » dont la variance est très forte sur F1 et dont les résidus sont les plus faibles. Le dernier groupe (╥) comprend les chefs « Chefservice2 » et « Chefservice6 » avec des résidus moyens et une importance des variances sur trois premiers facteurs.
3.3 – Les résultats pour la reconfiguration « consensus » du modèle d’affaires
25Les quatre axes retenus expliquent 69 % de la variance. Dans une optique exploratoire, la limite habituelle du test du coude est juste dépassée vu que l’arrondi du quatrième facteur vaut quasiment 1 et qu’après cet axe, les valeurs propres chutent brutalement. Ces résultats permettent d’observer la reconfiguration des items du modèle d’affaires de départ. Dans le tableau 6, tous les objets ont tous été projetés et sont significatifs sur un facteur.
Valeur propre et coordonnée des objets après l’ACP
F1 | F2 | F3 | F4 | |
---|---|---|---|---|
Valeur propre | 2,2431 | 1,3591 | 1,1987 | 0,9970 |
Variabilité (%) | 26,7539 | 16,2101 | 14,2974 | 11,8915 |
% cumulé | 26,7539 | 42,9639 | 57,2613 | 69,1528 |
Prop_Val1 | -3,1547 | -0,1536 | 1,2453 | -0,4144 |
Prop_Val2 | 1,1923 | -0,7621 | 0,4427 | -1,3418 |
Prop_Val3 | 0,7114 | 1,8130 | -0,4495 | 0,8402 |
Prop_Val4 | 0,2732 | -1,5060 | 1,2509 | 1,9102 |
Orga_Val1 | -1,6227 | 1,1472 | 0,8612 | 0,0011 |
Orga_Val2 | 0,5457 | -0,2147 | -0,1601 | -1,5525 |
Orga_Val3 | 1,1162 | 1,6648 | -0,1118 | 0,5859 |
Orga_Val4 | 0,1464 | 0,0238 | 1,4735 | 1,8810 |
Reso_Val1 | 1,6033 | -1,6817 | -1,5135 | 0,7761 |
Reso_Val2 | 2,0530 | 0,3020 | 0,8674 | -0,8431 |
Reso_Val3 | -1,7594 | 1,5950 | -1,0219 | -0,1078 |
Reso_Val4 | -2,0817 | -0,5433 | -0,9756 | -0,2649 |
Reto_Val1 | 0,7660 | 0,4989 | 2,1089 | -0,8395 |
Reto_Val2 | 0,2794 | 0,8310 | -1,9509 | 0,1711 |
Reto_Val3 | -0,7093 | -1,8314 | -1,5909 | 0,2637 |
Reto_Val4 | -0,7021 | -1,1828 | 0,8671 | -1,0651 |
Valeur propre et coordonnée des objets après l’ACP
Les valeurs en gras sont différentes de 0 à un niveau de signification alpha=0,0526Le facteur F1 se compose de cinq indicateurs, dont la planification de la conception du service (Prop_Val1), la détermination et la conservation des exigences des éléments d’entrées (Orga_Val1), la vérification des écarts entre les éléments de sortie et les exigences d’entrée de la conception (Reso_Val2), la pratique d’activités de validation des exigences prévues par services (Reso_Val3) et la mise en œuvre des actions quand les résultats ne sont pas atteints au moment des revues (Reso_Val4). Ce premier facteur part donc de la planification de la valeur à proposer aux clients puis s’assurer des éléments d’entrées et vérifie les écarts à la sortie et les spécifications de départ. Le second facteur F2 comprend la définition des responsabilités et des autorités aux interfaces (Prop_Val3), l’intégration des effets d’apprentissages à la conception (Orga_Val3), les éléments attendus des activités des processus (Reso_Val1), la conservation des informations sur les apprentissages (Reto_Val3) et la validation des modifications avant application (Reto_Val4). Ce second facteur identifie l’aire d’influence du pilote, les rendus de ces processus puis l’actualisation qu’il fait de son processus et leur conservation, et conclu par la validation de cette actualisation.
27Le troisième facteur F3 regroupe l’enregistrement des exigences d’entrées et des conséquences d’une potentielle défaillance (Reto_Val1) et la conservation des informations relatives aux processus des services (Reto_Val2). Ce troisième facteur s’attarde sur la conservation des mesures de sécurités et de préventions. Le dernier facteur F4 prend en compte la détermination de la conception, des revues et des validations (Prop_Val2), la délimitation des besoins en ressources internes et externes (Prop_Val4), l’intégration des exigences fonctionnelle et de performance (Orga_Val2) et la prise en compte des diverses exigences institutionnelles dans les éléments d’entrées (Orga_Val4). Ce dernier facteur a trait aux étapes d’intégration dans le service des besoins en ressources, des exigences de toutes natures liées aux parties intéressées.
28La projection des objets définit quatre facteurs du modèle d’affaires consensus. Le tableau 7 précise les corrélations entre les dix critères de jugement des chefs de service et les facteurs. Ils correspondent aux corrélations entre les objets du modèle d’affaires initial et les critères après reconfiguration vers le nouveau consensus.
Corrélations entre la configuration consensus initial et les facteurs
F1 | F2 | F3 | F4 | |
---|---|---|---|---|
Formalisation | 0,368 1 | 0,395 6 | -0,048 2 | -0,557 9 |
Enregistrement | 0,915 2 | -0,087 4 | -0,044 8 | -0,244 0 |
Indicateur | 0,430 4 | 0,545 6 | -0,222 6 | 0,137 9 |
Information | 0,166 5 | 0,088 8 | 0,060 3 | -0,068 2 |
Veille | 0,532 6 | 0,130 4 | -0,599 8 | -0,049 1 |
Interface | 0,542 2 | 0,388 7 | 0,536 9 | -0,290 6 |
Risque | 0,336 3 | 0,541 9 | -0,012 0 | 0,111 4 |
Capitalisation | 0,066 1 | 0,358 7 | -0,087 7 | -0,229 9 |
Compétence | 0,631 4 | 0,081 6 | 0,101 0 | 0,269 7 |
Amélioration | 0,094 4 | -0,407 1 | 0,580 7 | 0,192 9 |
Corrélations entre la configuration consensus initial et les facteurs
Les valeurs en gras sont différentes de 0 à un niveau de signification alpha=0,0529Ces résultats montrent que dans l’ensemble les critères du modèle d’affaires de départ ne sont significatifs que sur un seul facteur. Le regroupement des critères indique la nouvelle attribution des quatre facteurs composant du modèle d’affaires.
30Le premier facteur F1, avec 26,76 % de variance, concerne les concepts d’enregistrement, d’information, d’interface et de compétence. Elle a trait aux relations entre la direction, les agents et les clients. Pour ce trio, l’enregistrement des traces des activités importe (0,915 2) même si la circulation de l’information relève de l’opacité (0,166 5). Les relations de front office entre les clients et les agents ainsi qu’entre les différents services sont moyens (0,542 2). Toutefois, les agents semblent qualifiés pour accomplir les services (0,631 4). Cette dimension tend à réguler la relation entre le sujet (la direction), la communauté (les agents des services) et l’objet (les clients). Elle peut se rapprocher du réseau au sens de Ranerup et al. (2016) avec les concepts de « création de valeur, modèle de revenu, commerce électronique, conception tacite et gestion des relations, de co-opétition ». Avec 16,21 % de variance, le facteur F2 renvoie aux indicateurs des processus, aux risques encourus et à la capitalisation des expériences. L’évolution des activités, mesurée par la consommation des ressources est moyenne (0,545 6) malgré les points de contrôle et les revues de direction. Le risque de mauvaise spécification est lui aussi moyen (0,541 9) avec des procédures établies par la direction pour les agents et les pilotes de processus et par voie de conséquence des services. La capitalisation de l’expérience des agents est nécessaire, mais faiblement mise à contribution (0,358 7) dans ce cas-ci. Cette dimension semble, selon Johnsen (2015) et Disle et al. (2016), distinguer le sujet de la communauté par des mécanismes régulateurs sous l’emblème des règles, elle peut alors se nommer les retombées. Le facteur F3 allie, avec 14,29 % d’information, veille et amélioration. Le premier ne paraît pas être contributif, car opposé à la conception des services (-0,557 9). Cela peut être dû à l’effet de standardisation des procédures publiques à besoin dynamique. Toutefois, une contribution moyenne positive (0,580 7) de l’amélioration contrebalance cet effet. Cette amélioration concerne les plans directeurs, les processus et les cibles des activités. Elle paraît mieux cerner la revue des stratégies de la direction (sujet), les courroies de transmission que sont les processus (instrument) et les clients internes et externes dont l’organisation est à l’écoute (objet). C’est pour Alford et Yates (2014) et Emery (2009), la proposition de la valeur. Avec 11,89 % de variance, le quatrième facteur F4 parle de formalisation des procédures et surtout de porter par écrit tout ce qui est fait et de faire tout ce qui est écrit. Tel est le credo de la qualité qui par la distinction des rôles et de responsabilité des concepteurs, des besoins en ressources et des exigences fonctionnelles, coordonne les relations de front office. Cette dimension établit la division du travail entre la communauté au sens large (pour l’ensemble des agents y compris la direction) et les clients internes et externes (les objets). Elle convient donc à l’organisation du modèle d’affaires pour Furnari (2015).
4 – Discussion et conclusion du modèle d’affaires public
31Les valeurs inhérentes à la rationalité des procédures des normes ISO 9001 ont conduit le modèle d’affaires, dont les efforts d’adaptation selon nos résultats doivent êtes dirigés vers quatre axes.
32La dimension F1, celle du réseau vise à réunir les mondes concurrents. La direction de l’organisation publique semble combler les demandes concurrentes dans la relation Sujet-Communauté-Objet. Le système de management de la qualité permet au directeur général d’exercer sa responsabilité en jetant le pont entre professionnel de santé et professionnel administratif. Le management public correspond selon Johnsen (2015), a un mélange d’idées et d’intérêts, constituant une hybridation (Dagou, 2019). Faire face à ces demandes concurrentes au sens de Schirmer et Silke (2018), a exigé du responsable de ce réseau de présenter les attributs de la marginalité comme la capacité d’intégrer des points de vue des médecins et médicotechniques puis celui des administratifs dans les décisions. Comme le confirme Panagiotopoulos et al. (2012), les rôles des différentes parties intéressées et la cohérence entre leurs intérêts et leurs motivations (même contradictoires) sont importants pour les collaborations du secteur public. C’est un développement de la participation tout en gardant une part de hiérarchisation qui permet de planifier l’exécution des activités. Ce réseau incarne le mouvement qui explore un antagonisme entre le sujet, ici la direction avec une ou plusieurs approches alternatives de la communauté, les agents (Gibert, 2008). L’idée est d’être ouvert d’esprit de facto et d’être en mesure d’analyser ainsi que de former des coalitions pour informer les agents de la stratégie pour combler les mondes concurrents (Alford et Yates, 2014 ; Furnari, 2015).
33En second lieu, un développement de la performance individuelle tout en gardant une part de collectivisme pour mieux satisfaire les clients. La dimension F2, celle de la relation Sujet-Communauté-Règles permet d’exercer de l’influence par l’écoute client, l’audit interne, les revues de direction et les séances d’amélioration. En effet, le succès du modèle d’affaires public semble selon Tomaževič et al. (2016), dépendre de l’objet de la surveillance, la méthode de mesure, le moment de l’analyse et les voies d’amélioration. Cependant le réseautage entre la direction, le sujet et la communauté, les agents, a besoin de différents niveaux de régulation, car les avantages escomptés ne viennent toujours pas à bout des barrières (Chesbrough, 2010). L’ensemble de processus et les indicateurs associés, sonne comme un impératif de justifier sa conduite professionnelle pour les agents et l’obligation de rendre compte de la manière dont la direction s’est acquittée de sa responsabilité. Le choix de règles opératoires et incitatives entre le sujet et la communauté appartenant au même réseau améliore leurs propositions de valeurs et perçoit le management public comme une agilité (Baden-Fuller et Morgan, 2010).
34La dimension F3 met en jeu la relation Sujet-Instrument-Objet pour le développement des activités à forte valeur ajoutée avec une tolérance face à l’incertitude et à la polychromie du temps dans la prise de décision. Dans l’atteinte de la réalisation de la bonne santé des patients (l’objet), la direction et les processus s’influencent mutuellement dans la relation Sujet-Instrument-Objet. Le mode de légitimation pour l’organisation publique au sens de Boyne et Walker (2010) est la performance ou la réalisation des actes médicaux pour la norme ISO 9001. Une organisation est légitime selon Gibert (2008) parce qu’elle atteint ses objectifs avec une consommation de moyens relativement restreinte. Dans la mesure où les décisions politiques et les stratégies émergentes permettent aux organisations publiques de mieux répondre aux besoins des clients, elles sont vraisemblablement plus efficaces que les processus rigides (Cavalcante et al., 2011). L’influence du sujet, dans l’optique du management public est alors orientée vers l’obligation à rendre compte, promue par l’accountability, aux parties intéressées (Gueret-Talon, 2004 ; Mazouz et al., 2015). Cette orientation du sujet sur l’objet ou de la direction sur le client entrevoit le management public comme un mode de légitimation. Les 11 indicateurs du processus réalisation des interventions cardiaques étant des exemples factuels de cet accountability. La dimension F4 met en relation l’articulation de la relation Communauté-Division-Objet. Elle devra donc tendre à un changement progressif des mentalités tout en se rapprochant d’une culture de compétitivité qui instaure une remise en cause permanente des acquis. Il permet pour Lecocq et al. (2006), d’embrasser dans une même réflexion des éléments (agents, services et clients) qui sont généralement disjoints par les découpages fonctionnels opérés. Cette partie du modèle d’affaires identifie et fournit les ressources nécessaires, la mise en œuvre, la tenue à jour et l’amélioration continue du système de management de la qualité. Si le processus stratégique tend à être émergent et plus ouvert aux influences exogènes, la flexibilité et l’adaptabilité semblent être nécessaires aux gestionnaires publics (Chesbrough, 2007). Selon la vision de Gibert (2008), il s’agit d’une approche analytique mettant l’accent sur l’utilisation de la répartition du travail, par la communauté (les agents) à destination de l’objet. Cette orientation de la communauté conçoit le management public comme une science visant l’étude des problèmes rencontrés dans le fonctionnement des processus stratégiques (Lorino et Tarondeau, 2006).
35Dans quelle mesure la recherche peut-elle permettre de développer de nouveaux éléments de compréhension sur les modèles d’affaires en général, et en particulier dans le management public ? Tout d’abord, les connaissances existantes sur les relations entre les composantes du modèle d’affaires sont fragmentées. Cette recherche déconstruit les quatre perspectives du modèle d’affaires sous les entités de la théorie de l’activité. Elle représente ces perspectives à une échelle où la contribution de chaque entité (directeurs, agents, clients, processus…) à la performance (au management public) peut être perçue. Les quatre dimensions offrent ainsi une grille de lecture permettant de saisir quatre tensions managériales qui ouvrent la voie à des recherches futures quant à la gestion de l’antagonisme dans les réseaux public-privé (Bitar et Hafsi, 2007), individuel collectif (Grönroos, 2018) ; l’orientation client-procédure (Stephen et Mohamad, 2015) dans l’incertitude et les routines-flexibilité (Cavalcante et al., 2011 ; Chesbrough, 2007). Deuxièmement, les thèmes n’apparaissent pas simplement comme des notions déclarées, il existe une explication de leurs relations avec la configuration réelle du modèle d’affaires, d’autant que les thèmes doivent être connus pour les audits de renouvellement de la certification. Le système de management de la qualité, basé sur la normalisation ISO 9001 offre dans ce cas, un corpus cohérent solide pour la clarification des concepts utilisés par les 8 chefs de service. De même, la théorie de l’activité permet de structurer la cohérence des facteurs grâce à ces dimensions. Cela devrait réduire l’ambiguïté dans les typologies et les taxonomies rendent particulièrement facile la synthèse des idées. Troisièmement, les catégorisations existantes des modèles d’affaires opérationnels ne sont que partiellement complémentaires et manquent généralement d’une méthodologie claire, souvent développée ad hoc. En utilisant l’analyse Procruste, cette recherche fait le pari d’inférence en partant des expériences d’une innovation de processus (Pupion, 2018), comme le système de management de la qualité, pour déceler les reconfigurations du modèle d’affaires. Enfin, l’ordre chronologique des étapes pour générer un modèle d’affaires est clair. Il rejoint celle de Panagiotopoulos et al. (2012) et Janssen et Kuk (2007) qui, dans le cadre du système de management de la qualité, montrent que le leadership et l’attention portée au client sont beaucoup plus importants pour le modèle d’affaires. L’insistance sur les avantages tangibles et les améliorations pour le client de modèles d’affaires, comme le système de management de la qualité, sont accompagnées d’une charge normative et idéologique qui les fait paraître comme inévitables et incontestables. En déplaçant l’attention vers l’activité du front office, ces reconfigurations de modèle d’affaires favorisent une implication plus étroite des organisations du secteur privé, à injecter des innovations de processus aux organisations du secteur public, qu’il faut identifier et comprendre.
Bibliographie
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : configuration procustéenne, organisation publique, modèle d’affaires, système de management de la qualité
Mise en ligne 07/10/2021
https://doi.org/10.3917/gmp.091.0059Notes
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[1]
Les processus de management sont : Manager par la qualité, Gérer les projets et Réaliser le contrôle et l’évaluation. Les processus de réalisations sont Réaliser les consultations médicales, Réaliser les explorations médicales, Réaliser les analyses biologiques, Assurer la dispensation des produits pharmaceutiques, Assurer les urgences cardiologiques, Réaliser les interventions chirurgicales en chirurgie cardiaque, Réaliser les interventions chirurgicales en chirurgie thoracique, Assurer les hospitalisations en Cardiopédiatrie, Assurer les hospitalisations en Médecine, Assurer les hospitalisations aux soins intensifs médicaux, Assurer les hospitalisations aux soins intensifs chirurgicaux. Les processus supports sont : Gérer les dossiers médicaux, Assurer la formation continue, Gérer les achats, Pourvoir aux besoins en personnel, Assurer la maintenance des infrastructures et des équipements, Gérer l’informatique, Assurer l’hygiène hospitalière. Les processus externalisés sont : la Restauration, L’Hygiène et l’entretien des locaux, La Main-d’œuvre contractuelle, La Buanderie et la Sécurité des locaux.
-
[2]
Journal officiel de la république de Côte d’Ivoire, Fraternité Matin du vendredi 3 février 2006.
-
[3]
655 F CFA ≈ 1 €.