Notes
-
[1]
J.-F. Grevet, « Le rôle de l’armée dans le développement du poids lourd en France avant 1914 », Cahiers du centre d’études d’histoire de la Défense, 2000, n° 14, pp. 85-126 ; A. Moutet, « La rencontre des traditions militaires et civiles de rationalisation industrielle à l’occasion de la Première Guerre mondiale et ses conséquences », in D. Pestre (dir.), Deux siècles d’histoire de l’armement en France, De Gribeauval à la force de frappe, Paris, CNRS Éditions, 2005, pp. 241-259 ; Y. Cohen, Organiser à l’aube du taylorisme. La pratique d’Ernest Mattern chez Peugeot, 1906-1919, Besançon, Presses universitaires franc-comtoises, 2001.
-
[2]
Archives départementales du Rhône (ADR), 10M426, dossier grève Berliet, mai 1905 ; 10M438, dossier grève Berliet, juin-juillet 1912.
-
[3]
« Les camions de la victoire, retour sur la mobilisation industrielle du monde automobile », actes du colloque L’industrie française dans la grande Guerre, Paris, ministère des Finances, novembre 1916, à paraître.
-
[4]
G. Deglas, « Recherches sur les Usines Berliet (1914-1949) », mémoire de maîtrise d’histoire (dir. Jean Bouvier), université Paris-I, 1977 ; A. Pinol, « Travail, travailleurs et production aux usines Berliet (1912-1947) », mémoire de maîtrise d’histoire (dir. Yves Lequin, Jean Métral), université Lyon-II, 1980 ; P. Fridenson, « Un tournant taylorien de la société française (1904-1918) », Annales ESC, septembre-octobre 1987, n° 5, pp. 1031-1060 ; I. Lisowski, « Portrait d’un patron et d’une entreprise lyonnais : Marius Berliet et la société des automobiles Berliet des origines à 1939 », mémoire de maîtrise d’histoire (dir. Jean-Dominique Durand et Bernard Delpal), 1991, université Lyon-III.
-
[5]
L. d’Albis (dir.), Usines de guerres, Antony, ETAI, 2015.
-
[6]
H. Bonin, Y. Lung, S. Tolliday (dir.), Ford 1903-2003: the European History, Paris, PLAGE, 2003 ; R. Boyer, E. Charron, U. Jürgens, S. Tolliday (dir.), Between Imitation and Innovation, the Transfer and Hybridization of Productive Models, in the International Automobile Industry, Oxford/New-York, Oxford University Press, 1998.
-
[7]
Archives de la Fondation Berliet (AFB), Bulletin de guerre des usines Berliet, Lyon, juillet 1915, p. 3.
-
[8]
Ibidem, 1915-1919.
-
[9]
Ibidem, juillet 1915, p. 7.
-
[10]
Bulletin de guerre du personnel de l’usine Gillet & fils, Villeurbanne/Lyon, 1914-1918.
-
[11]
AFB, Bulletin de guerre des usines Berliet, septembre 1915, p. 2.
-
[12]
Ibidem, pp. 2-3.
-
[13]
Ibidem, juillet, septembre 1915, février 1916.
-
[14]
Base Léonore des Archives nationales, 19800035/894/4684, dossier de Légion d’honneur de Paul Joseph (1884-1967), consultable en ligne www.culture.gouv.fr/documentation/leonore/recherche.htm
-
[15]
AFB, fonds OST, rapport d’organisation intérieure, séances des 6 mars, 3 juillet 1917.
-
[16]
Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine (AN), F7 13365, préfecture du Rhône, service de la Sûreté, état statistique des principaux établissements surveillés, 7 juin 1917.
-
[17]
« Accidents du travail. Les résultats obtenus », L’Effort, 24 mars 1918, p. 363.
-
[18]
Y. Cohen, Le Siècle des chefs. Une histoire transnationale du commandement et de l’autorité (1891-1940), Paris, Éditions Amsterdam, 2013 ; E. De Saint-Fuscien, À vos ordres ? La relation d’autorité dans l’armée française de la Grande Guerre, Paris, EHESS, 2011.
-
[19]
Passage signalé de l’ouvrage de Gantt, Travail, salaires, bénéfices, dans AFB, Organisation intérieure, quinzième réunion, 27 mars 1917.
-
[20]
AFB, « Notre enseignement professionnel », L’Effort, 10 février 1918.
-
[21]
AFB, L. Monnier, « Notes sur l’École d’Apprentissage Berliet », avril 1913, adressées à Marius Berliet le 13 août 1913.
-
[22]
AFB, L’Effort, « Le dimanche de l’USB », 13 janvier 1918.
-
[23]
AFB, plan annexé à la demande d’embranchement particulier auprès du PLM, par la société des Ets Trible, approuvé le 12 juillet 1917.
-
[24]
AFB, L’Effort, numéros des 3 mars 1918, 10 mars 1918 et 17 mars 1918.
-
[25]
AFB, Rapport sur le progrès réalisé dans l’organisation de l’usine en 1916, envoyé à M. Berliet le 6 février 1917.
-
[26]
AFB, Rubrique « Tableau d’honneur des usines Berliet », L’Effort, 23 décembre 1917.
-
[27]
C. Olmo (dir.), Il Lingotto (1915-1939), L’archittetura, l’immagine, il lavore, Turin, Umberto Allemandi, 1994, en particulier D. Bigazzi, « Strutture della produzione, Il Lingotto, l’America, L’Europa », pp. 281-336, qui mentionne Berliet et évoque à juste titre la discipline quasi-militaire nécessaire à l’OST.
-
[28]
O. Cinqualbre, notice « Logement pour habitation de contremaîtres de l’usine Berliet », et reproduction du plan du 9 décembre 1917, in A. Guiheux, O. Cinqualbre, Tony Garnier : l’œuvre complète, Paris, Centre Georges Pompidou, 1990, p. 89.
-
[29]
T. Garnier, Une cité industrielle, Étude pour la construction des villes, Paris, Vincent, 1917.
-
[30]
ADR, 10M445, rapports du 3 et 24 décembre 1917 suite aux réunions du personnel des usines Berliet à la Bourse du Travail.
-
[31]
ADR 10M445, préfecture du Rhône, rapport du 4 janvier 1917.
-
[32]
ADR, 10M445, rapport du 24 décembre 1917.
-
[33]
ADR, 10M445, tract de Marius Berliet à son personnel, 12 janvier 1918, reproduit dans Deglas, op. cit., annexe XIV.
-
[34]
Bulletin de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, 1er semestre, mars-avril 1918, pp. 242-254.
-
[35]
Base Léonore, 19800035/1393/61032, dossier de Légion d’honneur de Georges Rozet ; AFB, chronologie Charles Gruyer d’après son journal.
-
[36]
American industrial commission to France, Report to the American manufacturers export association, septembre-octobre 1916, New-York, Press of Redfield-Kendrick-Odell Co, 1917, p. 61, 67, consulté sur HaltiTrust Digital Library, New YorkLibrary. Pour une mise en perspective, C. Druelle-Korn, « La mission prospective des industriels américains en France en 1916 », in F. Berger, M. Rapoport, P. Tilly, B. Touchelay (dir.), Industries, territoires et Cultures en Europe du Nord-Ouest, xix e-xx e siècles, Mélanges en l’honneur de Jean-François Eck, Roubaix, Archives nationales du monde du travail, 2015, pp. 235-243.
-
[37]
AFB, Ernest Mattern, visite des usines Berliet, compte rendu du 11 mars 1919.
-
[38]
J.-F. Grevet, « “C’est la machine qui commande.” De la rationalité des choix techniques : le cas Berliet, des tours Potter à la machine-transfert », in S. Benoit, A.P. Michel (dir.), Le monde du génie industriel au xx e siècle : autour de Pierre Bézier et des machines-outils, Belfort, université de technologie de Belfort-Montbéliard, 2016, pp. 173-195.
1 Fondée en 1899, l’entreprise Berliet connaît une croissance rapide reposant sur un pragmatisme technologique, un investissement soutenu nourri essentiellement par diverses formes de crédits inter-entreprises et par la maîtrise des différents marchés automobiles et utilitaires [1]. Devenue le premier constructeur lyonnais dès 1905, elle se hisse en 1914 parmi les cinq leaders d’une industrie française distancée par l’industrie américaine et par le modèle fordien. La firme, qui a connu son premier mouvement social en mai-juin 1905, passe à la postérité en juin 1912 avec la première grève menée en France contre le taylorisme [2]. Marius Berliet consolide une image de patron autoritaire mais respecté par une gestion ferme du conflit, en renvoyant les grévistes et en refusant toute forme d’arbitrage. À l’issue de la Grande Guerre, il se hisse à la quatrième place de la branche automobile avec près de 398 millions de francs en marchés de guerre, répartis entre les obus et les chars d’assaut pour 15 % chacun, et le reste essentiellement les camions d’un modèle standardisé (CBA et ses dérivés) [3]. Cette croissance spectaculaire se conjugue avec la mise en place d’une nouvelle référence gestionnaire, d’un nouveau mode de production et des investissements dans une nouvelle usine, à Vénissieux. Mais la trajectoire ascendante interrompue par la crise de 1920-1921, puis le trauma de la Seconde Guerre mondiale et de l’épuration relèguent au second plan la Première Guerre chez les historiens, alors que, au sein de la firme, l’épisode revêt progressivement un caractère d’âge d’or, occultant ou, plus exactement, se surimposant à la période de la Seconde. Lorsque les historiens se sont emparés des questions sociales dans un tournant de l’histoire de la Grande Guerre, Berliet est revenu au premier plan, grâce à des mémoires de maîtrise d’histoire réalisés [4] dans le sillage des recherches de Patrick Fridenson, d’Aimée Moutet, d’Yves Cohen et de Sylvie Schweitzer. Mais ces travaux de qualité n’ont pu mobiliser que des sources imprimées, en particulier le journal interne L’Effort, ou des témoignages, essentiellement ouvriers. Ceci explique partiellement que le cas Berliet, connu des historiens, présente un caractère secondaire dans l’ouvrage récent consacré aux usines de guerre [5]. L’exploitation des archives de la Fondation de l’Automobile Marius Berliet permet aujourd’hui de revenir sur la compréhension des ressorts de la première greffe américaine, à grande échelle, en France, pour dépasser la vision d’une simple démarque des pratiques tayloriennes et étudier une communauté de travail à l’épreuve de la guerre [6].
Une communauté de travail à l’épreuve de la guerre
2 L’effort de guerre provoque une gestion du personnel tant par les quantités que par la qualité. Cette gestion forme un consensus qui se construit progressivement et qui, dans le contexte, permet l’expérimentation d’œuvres collectives sociales, l’une née des besoins militaires, les autres à la faveur de la guerre et qui ont ensuite avoir vocation à s’installer dans la durée.
3 La création d’une caisse de secours pour les familles des appelés par la mobilisation est une pratique commune à la métallurgie et à l’industrie automobile parisienne et lyonnaise. Chez Berliet, en septembre 1914, des cadres décident de créer un fonds de guerre, dont le modèle reprend la caisse de secours créée en 1910, mais dont la gestion, distincte, est assurée par une commission de dix membres, composée pour moitié d’ouvriers, pour moitié d’employés et qui se réunit deux fois par mois. Cette gestion a priori paritaire de cette œuvre de guerre vise « à réunir en une seule famille et sans aucune distinction, toutes les familles de nos camarades [7] ». Son financement est assuré par des prélèvements volontaires sur les salaires, selon une règle de proportionnalité, entre 3 % pour les salaires les plus faibles et 10 % pour les employés et 15 % pour le personnel mis en sursis d’appel ; Marius Berliet l’abonde, par ailleurs, à hauteur de la moitié. Œuvre circonstancielle née pour apporter des secours immédiats aux familles des mobilisés d’un conflit qui devait être court, le fonds s’adapte à sa durée imprévue. Au cours de 1915, les excédents alimentent un fonds de réserve pour secourir dans l’après-guerre les veuves, les orphelins, femmes de disparus, mutilés et blessés et envoyer des colis aux prisonniers et aux mobilisés. Mais la générosité dépasse le seul cadre de la communauté de travail. La caisse sollicitée par les directions des hôpitaux finance l’œuvre du tabac du soldat, en achetant hebdomadairement un kilogramme de tabac pour le bureau militaire de l’hospice de la Charité, prend en charge cinq lits de blessés de l’hôpital Saint-Joseph, à raison de 300 francs par mois et attribue 100 francs par mois à l’hôpital de la Chanson [8].
4 La création en 1915 d’un Bulletin de guerre des usines « Berliet » vise à montrer des preuves de solidarité de l’Usine envers ses mobilisés « pour aider à supporter les fatigues du front, et à les encourager à persister dans la lutte dont dépendent la victoire et l’existence de notre patrie [9] ». Cette initiative s’inspire sans doute du bulletin des usines de guerre de la grande entreprise de teinturerie textile lyonnaise Gillet & Fils [10]. Ces publications sont antérieures au bulletin des usines de guerre du ministère de l’Armement et aux initiatives du monde automobile, Renault, Michelin, ou Peugeot. Celle de Berliet veut donner « un aperçu de la solidarité qui existe entre vous, qui vaillamment accomplissez au front votre devoir de soldat et nous qui moins glorieusement sans doute, mais utilement quand même accomplissons le notre à l’usine [11] ». Le bulletin reprend les extraits du célèbre discours d’Albert Thomas lors de sa visite aux usines Schneider le 23 août 1915 : « Nous aussi comme au front, nous sommes en guerre. Nous aussi avons le devoir de peiner jusqu’au bout, jusqu’à la maladie, jusqu’à la mort », pour l’adapter à l’Usine Berliet et assurer que tous « sans exception depuis nos modestes manœuvres jusqu’à nos contremaîtres et chefs des plus importants services notre devoir est tracé : “Nous peinerons jusqu’au bout” » [12]. Ce lien organique entre l’avant et l’arrière est constamment réaffirmé. À partir de juillet 1915, les tableaux d’affichage de l’usine reproduisent les citations, les décorations obtenues sur le front pour montrer que les « Berliet » suivent tous [13] leurs efforts. Un tableau d’honneur est publié au cours de l’hiver 1915, suivi de quatre autres à parution irrégulière, en juin 1916, juillet 1917, février 1919 et décembre 1919. En février 1916, au moment où se déclenche la bataille de Verdun, un numéro spécial honore « nos morts » en un véritable mémorial, énumérant les noms, les citations des cinquante tués et dix disparus. Ce bilan provisoire et incomplet relativise l’image de communauté usinière épargnée.
5 Charles Gruyer, en charge de ce bulletin, est aussi responsable du journal interne L’Effort lancé en octobre 1916, qui traduit l’engagement de Berliet dans un autre front, celui de l’organisation scientifique du travail et de la construction d’une usine d’un genre nouveau.
Berliet, traduction littérale de Taylor ou creolisation lyonnaise ?
6 La guerre produit incontestablement un accélérateur des dynamiques déjà à l’œuvre avant la guerre. La résolution de la question sociale a alimenté les réflexions antérieures. Il s’agit désormais de créer une œuvre, une cité industrielle qui résoudrait toutes les questions en débat depuis la fin du xix esiècle, celle des productions et des flux, celle de la gestion des hommes, dans l’usine et au dehors.
7 L’échelle des réalisations est sans précédent à Lyon et en France, et transforme la firme en une sorte de phalanstère taylorien. Mais, à rebours des autres cas, le rôle de l’industriel premier se combine avec un appel à des compétences diverses, anglaises et américaines, couplées… aux ressources familiales. Des proches de Berliet occupent des postes clefs dans les départements, avec ses trois frères, Benoît, Léon et Robert, ainsi que des amis Marius Damiron et Louis Étienne Revoin. Déjà parti aux États-Unis en 1911, l’ingénieur directeur des ateliers Paul Joseph, Arts et métiers de Châlons, y retourne en 1916 et en 1920 [14], lors d’une mission au titre des fabrications d’armement. Il visite les hauts lieux de l’expérimentation du taylorisme, comme la maison Tabor. La guerre permet aussi l’arrivée de nouveaux ingénieurs, avec un groupe d’Américains en 1918, et surtout, dès 1915, le plus important, Samuel James Eggerton Banks. Cet ingénieur électromécanicien anglais, fils de pasteur, a fait ses classes outre-Atlantique chez Westinghouse. La guerre l’a surpris comme directeur commercial de la branche européenne de la multinationale américaine. Membre de l’American Society of Mechanical Engineers, il connaît les travaux de l’école taylorienne. À son arrivée en décembre 1915 comme stagiaire, Berliet le charge de mettre en place une nouvelle organisation taylorienne et notamment les quatre divisions fonctionnelles. Il redéfinit la fonction du contremaître, désormais cantonné à un rôle technique, et crée le manutentionnaire, un nouvel agent en charge du travail administratif. La prime à la production, anciennement fondée sur le nombre de châssis fabriqués, est remplacée en 1916 par un système différentiel, et individualisée par atelier. Pourtant, l’implantation de l’organisation du travail prend un tour différent à partir de 1916.
8 Des réunions bimensuelles de l’organisation intérieure rassemblent l’ensemble du haut encadrement de Berliet entre octobre 1916 et jusqu’à l’été 1917. Au programme, l’imprégnation par la lecture in extenso de la littérature taylorienne dont Marius Berliet prend soin de souligner directement à ses cadres les paragraphes essentiels, en réalité pratiquement l’intégralité de l’œuvre. Sont ainsi lus entre octobre 1916 et juillet 1917 intégralement et littéralement Shop Management, la publication maîtresse de Taylor, puis le résumé de l’ouvrage de Henry L. Gantt, Travail, salaires et bénéfices et le mémoire d’Henri Le Châtelier consacré à Taylor, parus tous les deux dans la Revue de métallurgie, « l’organe central du taylorisme français [15] ». Progressivement, la vingtaine de cadres discute de leurs expériences d’atelier, de système de pointage, de modes de rémunérations différenciées. La réunion se transforme progressivement en lieu de débats et d’affrontements feutrés où sont discutés les problèmes rencontrés dans l’application des nouvelles méthodes. Le mode de discussion se veut collégial, mais sous l’arbitrage de Marius Berliet. Si Banks revendique le premier rôle, en réalité, d’autres techniciens sont fortement impliqués, Paul Joseph, Léon Monnier et évidemment Marius Berliet. Le parachèvement de l’organisation est l’adoption en novembre 1918 du nouveau système de direction administrative des usines Winchester décrit dans la revue Iron Age de janvier et février 1918. Cette polyphonie taylorienne contraste avec le process de Peugeot mis en valeur par Yves Cohen, qui procède essentiellement du seul ingénieur Ernest Mattern.
Berliet, ou la didactique taylorienne démultipliée
9 L’accent est porté sur l’éducation du personnel et la volonté d’une pédagogie qui passe par plusieurs voies. Cette démarche correspond à une nécessité liée à l’introduction d’une nouvelle main-d’œuvre qu’il faut former. Berliet devient le principal employeur privé, devant tous les établissements de la métallurgie, de la chimie (établissements en moyenne autour de mille ouvriers) et de l’aéronautique (en moyenne entre trois à six cents ouvriers) mais après les fabriques et arsenaux de l’État, et l’usine de matériel de guerre de l’Éclairage électrique, située dans la halle de la Mouche construite par l’architecte Tony Garnier, inaugurée en 1914 lors l’exposition internationale urbaine et destinée à servir aux abattoirs. Le détail de la main-d’œuvre employée en 1917 est éclairant, alors que la production journalière atteint une vingtaine de camions, deux mille obus de 75 et mille cinq cents obus de 95. Véritable tour de Babel, les usines Berliet emploient en effet alors 210 Italiens, 99 Espagnols, 57 Suisses, 50 Algériens, 32 Belges, 20 Alsaciens, 15 Anglais, 13 Serbes, 12 Russes, etc. ; en tout, vingt-quatre nationalités sont représentées, ce qui est le record des établissements du Rhône recensés. Près d’un dixième (542) des 5 882 salariés sont des étrangers, un cinquième (1 220) étant des femmes et un treizième (450) des enfants [16]. En 1918, un cantonnement est construit pour les ouvriers marocains effectuant les travaux de terrassement de Vénissieux. Les femmes sont affectées principalement, mais non exclusivement, à la production des obus. Les catalogues publicitaires révèlent que, avant la guerre, elles sont déjà présentes au laboratoire. En décembre 1917, les effectifs atteignent 7 800 personnes, dont 2 473 mobilisés, et 1 200 étrangers, dont la provenance n’est pas précisée. Cette diversification de la main-d’œuvre non spécialisée reflète en réalité, au-delà des seules pénuries, une transformation des process productifs et une nouvelle organisation du travail au sein de l’espace usinier.
10 L’ambition éducative mêlée de considérations morales sur l’alcoolisme rencontre des préoccupations plus prosaïques liées à la baisse de production en période de guerre. Le contrôle de l’ouvrier se veut total pour éviter les flâneries, la limitation volontaire de la production, ou encore l’alcoolisme. En vue de diffuser les nouveaux préceptes à l’usine et en dehors, l’entreprise publie en octobre 1916 L’Effort, l’un des premiers journaux d’entreprise en France, conjointement au lancement des réunions d’organisation citées plus haut. Le contenu éditorial traduit des aspirations antagonistes, entre les ingénieurs désireux d’intégrer des éléments de contenu touristique et sportif et Marius Berliet qui impose une dominante de traductions de revues techniques et de textes américains sur l’organisation scientifique du travail (OST).
11 Face à la multiplication des accidents, liée à l’augmentation des cadences et au recrutement d’une main-d’œuvre inhabituelle, le Service-Accidents [17] créé met en place des dispositifs de sécurité sur les machines et d’éducation par des affiches, écriteaux et slogans dont L’Effort se fait le relais. Cette préoccupation passe par l’argument financier à travers une diminution des primes des contremaîtres et manutentionnaires s’ils ne préviennent pas suffisamment les accidents qui arrivent aux débutants et… aux débutantes !
12 La période est aussi marquée par un renouvellement des formes d’autorité au sein de l’espace usinier, à l’image de ce qui se joue à l’avant [18]. « Dans l’armée industrielle, l’ouvrier qui a pris confiance en ses supérieurs, arrive à suivre leurs instructions aussi aveuglément que le soldat suit les ordres de son officier, bien qu’il ne voie pas toujours où ces ordres le conduiront [19]. » La référence militaire est pourtant ambivalente. Si l’influence du rôle social de l’officier de Lyautey a été fortement commentée, dans l’esprit des ingénieurs de Berliet, il s’agit d’éviter le modèle autoritaire reposant sur les cris, vraisemblablement lié aux souvenirs de leur service militaire pour lui préférer le modèle administratif et scientifique et l’image de l’entraîneur d’homme, dont Marius Berliet apparaît comme le prototype. Le chef du personnel recruté à la sortie de la guerre en octobre 1919, qui reste en poste jusqu’en 1942, n’est rien moins que le général Louis Valantin, ancien commandant de la place de Verdun.
13 Dans ces conditions, la réforme de l’enseignement technique est au cœur des préoccupations [20]. Dépassant les premières initiatives de l’avant-guerre et les imperfections constatées dans le fonctionnement de l’école d’apprentissage installée en 1906, la création de l’école des stagiaires en 1916 pour former l’encadrement répond aussi à l’insatisfaction devant l’offre de l’enseignement public. Déjà, en 1913, Léon Monier souhaitait « l’union réfléchie et cordiale du capital et du travail », en vue de former des « ouvriers spécialistes collaborateurs des bureaux suivant les méthodes “Taylor”, (nous employons ce mot parce qu’il est court et dit tout un programme) » [21]. Des jeunes gens sont recrutés au sortir, entre 15 et 18 ans, des écoles primaires supérieures et des écoles professionnelles, ainsi que de l’École centrale de Lyon. Un lieutenant aveugle s’occupe de l’encadrement des stagiaires tandis que Charles Gruyer donne à partir de décembre 1916 des leçons d’anglais. Les innovations portent tant sur le fond (l’OST et les connaissances techniques) que sur les méthodes d’apprentissage : projections cinématographiques, auto-conférences réalisées par les « stagiaires » – terme suffisamment neuf pour qu’il soit mis entre guillemets dans les comptes rendus des visiteurs. L’école fournit ainsi une partie de l’encadrement de l’entreprise jusqu’aux années 1960.
14 À ces œuvres s’ajoute la création de l’Union sportive Berliet (USB) en 1916, centrale dans le projet de fabrique d’un homme nouveau, l’homo faber automobile. « Une usine bien organisée, répète sans cesse Gantt, doit être comme une équipe de football ou comme un orchestre, où chacun se met de lui-même à la place qui lui convient le mieux, et où il remplit son rôle, avec orgueil, avec joie, de tout son cœur » (17e réunion, 10 avril 1917). Les sports collectifs ou ceux développant l’hygiène musculaire sont privilégiés. Le tennis, considéré comme un jeu de salon, est insuffisamment viril. Mais les pratiques sont plus diversifiées que chez leurs homologues automobiles : escrime, jiu-jitsu, boxe, gymnastique avec agrès et sans agrès, poids et haltère, cyclisme [22]. Les matchs de « football-association » et de « football-rugby » opposent l’USB à une homologue industrielle comme l’Union sportive des Aciéries de Firminy, ou au Football-Club de Lyon issu du lycée Ampère. Le club inaugure en mars 1917 officiellement ses locaux d’entraînement et de culture physique de près de 500 mètres carrés, à Lyon-Perrache. De manière symbolique, une demi-journée de congé est donnée pour la fête nationale américaine le 4 juillet 1918. À partir de 1917, et à l’initiative de Gruyer, l’USB s’adjoint un centre de préparation militaire, agréé par le ministère de la Guerre. Un sergent du 3e Zouaves dispense des cours de préparation militaire, avec démonstration du fusil Lebel en mars 1918 aux classes 1919, 1920 et 1921, exercices de course à pied, lancers de grenade et instruction militaire et morale [23]. Le club s’abonne au Sporting et à l’Écho des Sports et met à disposition des membres Tous les sports. Gruyer loue la contribution de Marius Berliet à l’œuvre de « la renaissance du culte du muscle [24] ».
15 Performance sur le terrain de sport et performance au travail s’épaulent et sont récompensées sur le mode militaire. La seconde est encouragée par des manifestations inspirées directement des tableaux d’honneurs des mobilisés sur le front. « Pour vaincre les ouvriers qui tentent de se régler à un prix horaire fixe, limitant ainsi la production », Banks inaugure en janvier 1917 un tableau d’honneur du front de la production, qui récompense chaque mois des équipes [25]. En novembre 1917, trois sont ainsi primées et reçoivent les félicitations de Marius Berliet [26]. À ce moment, la production de camions atteint des records (près de mille par mois) avant que le montage des chars Renault FT 17 imposés par Louis Loucheur ne désaxe l’effort de l’entreprise en 1918.
Un projet d’une cité industrielle à Vénissieux « à l’américaine »
16 Les ingénieurs partagent le défi industriel de Marius Berliet, vouloir construire « la plus grande usine de France », à vocation universelle, spécialisée sur un modèle de voiture et un modèle de camion. Ce credo est en relation avec l’ambition de la cité lyonnaise, dont l’entreprise entend être une composante. Ce projet, lancé dès la fin 1915 par la constitution de deux sociétés immobilières, connaît ses premières réalisations avant la fin de la guerre. L’ensemble de Vénissieux s’inscrit dans un mouvement européen dont les piémonts alpins forment l’épicentre avec le Lingotto de Fiat à Turin [27] et, d’un peu plus loin, l’usine de Sochaux pour Peugeot. Les chronologies de décisions, des travaux et de mise en production sont similaires. Les premières esquisses du chef-d’œuvre de Giacomo Matté Trucco, à Turin, sont de 1915, les premiers plans définis et les terrains achetés en 1916 comme Berliet, mais l’usine n’est inaugurée qu’en 1923. Vénissieux n’est toutefois pas une simple démarque du modèle fordien, et doit aussi à l’expérimentation lyonnaise de Tony Garnier, comme en témoigne partiellement le projet de logement pour contremaîtres de décembre 1917. Les influences réciproques profondes dépassent pourtant cette esquisse conservée [28]. La cité industrielle de Garnier [29] et la cité industrielle Berliet de Vénissieux ont des convergences frappantes. Les plans conservés à la Fondation Berliet montrent que les choix arrêtés avant la publication de la Cité industrielle n’empêchent pas la consultation de l’architecte municipal. Ainsi, l’objet social de l’usine principale de Garnier correspond à celui de la société anonyme des automobiles Marius Berliet, constituée en décembre 1917. Les deux conceptions partagent l’horizontalité, la séparation des bâtiments par opération (fonderies, forges, emboutissage pour les bruts) et montage (voitures et camions). L’ensemble est relié aux voies de chemins de fer et aux quais qui permettent l’acheminement des matières. En raison de l’accent mis sur la construction de poids lourds, le pont roulant est le système de manutention privilégié dans les différentes parties de l’usine. Il permet la manutention des moteurs, des carrosseries ou du véhicule entier. L’installation d’une chaîne à avance commandée ne se fait qu’à la sortie de la guerre. La leçon industrielle de la nouvelle usine est bien celle des circulations, tandis que la place réservée aux grands bureaux, cerveau de l’usine, témoigne de la nouvelle organisation scientifique du travail à l’œuvre. Ces choix sont à rebours de la verticalité et de la concentration des opérations dans un seul ensemble effectué par Ford à Highland Park en 1913, et des réalisations européennes à Turin, Sochaux ou à Boulogne-Billancourt, avec l’usine Renault de l’île Seguin. Cette hétérodoxie fordiste, sévèrement critiquée par le directeur technique de Peugeot Mattern en 1919, ne peut se comprendre sans l’influence de Garnier et du précédent de l’abattoir de la Mouche. Enfin, proche de la cité et des logements ouvriers, un parc des sports avec une piste d’athlétisme figure dans les plans du complexe industriel de Vénissieux de 1917. Pour la réalisation, Berliet utilise la technique locale, qui repose sur le béton de gravier pour les fondations et sur le pisé banché pour les murs. Ces choix sont partiellement le fruit des contraintes de court terme, du contexte de guerre et de pénuries (de main-d’œuvre et de matériaux) et d’une taylorisation de la construction. Ils expliquent une rugosité des surfaces des murs, des formes de bâtiment plus simples et plus grossières. Les difficultés du conflit et le manque de fret maritime retardent l’arrivée des machines américaines. Les quatre usines de Lyon-Monplaisir assurent l’essentiel de l’effort de guerre, grâce à la création de deux usines C et D pour les obus et surtout à l’application des principes de l’OST. Les usines de Vénissieux n’ont qu’une production limitée, qui ne débute qu’à partir de 1917 et concerne les fonderies, le montage des carrosseries des camions et des chars en 1918.
17 Ces contraintes de gestion expliquent la faiblesse des mouvements revendicatifs, à la différence des homologues parisiennes et sochaliennes. Une grève des femmes se produit au décolletage le 5 juin 1917, dans la vague du mouvement national, mais aucun conflit d’ampleur ne se déclenche avant la grève du 12 au 15 janvier 1918. La firme rechigne à appliquer la nomination de délégués d’atelier. La syndicalisation peine à s’implanter, comme dans la métallurgie lyonnaise et parisienne [30], malgré des réunions d’information qui rassemblent plusieurs centaines d’ouvriers [31]. Le système de rémunération avec gain proportionnel à la production, mis en place par Banks, fait ses preuves. Les rapports de police soulignent le bon état d’esprit du personnel, alors qu’est redoutée la contagion des mouvements parisiens et stéphanois. L’application de la journée de huit heures et les nouvelles méthodes ont pour conséquence de baisser « le gain des ouvriers de 2/10e environ, sans porter atteinte à la production ». Les demandes d’augmentations de salaires sont refusées par « Bancks ». Le mécontentement porte moins sur le contenu de la taylorisation que sur le système de mutation, inter-usines Monplaisir-Vénissieux, sans indemnités de déplacement compensatoires des frais et temps supplémentaires occasionnés, alors que la mauvaise desserte en transports en commun de la nouvelle usine de Vénissieux se conjugue avec la volonté de l’Office des transports lyonnais d’utiliser une monnaie de nécessité [32]. Il est aussi reproché l’absence de contrôle ouvrier sur la cotisation imposée pour les œuvres de guerre. Marius Berliet dénonce « un coup d’État » fomenté par les organisateurs professionnels de conflits ; après avoir loué l’habileté professionnelle et la collaboration réciproque et loyale, mobilisé l’histoire de l’entreprise par le souvenir de la grève « très sérieuse » de 1905, il conclut par un appel « à continuer à travailler, en songeant à vos camarades, à vos frères et à vos maris qui n’admettraient pas, avec juste raison, que nous retardions, ne fût-ce que d’une minute, l’heure de la Victoire, pour laquelle ils consentent chaque jour, sans murmurer, de nouveaux et si admirables sacrifices ! » [33]. La culpabilisation est un ressort qui fonctionne tout comme la menace du retour au front pour les ouvriers militaires, mise à exécution après les mouvements de grèves dans la métallurgie du printemps 1918.
18 Berliet consolide durant la Grande Guerre son statut d’entreprise-modèle. Il incarne le patronat d’avant-garde, dont le modèle apparaît généralisable à l’ensemble de l’industrie. Dans la série des « retours aux études techniques », le Bulletin de la SEIN publie une note du 16 janvier 1918, « L’enseignement professionnel des Usines Berliet » [34]. Marius Berliet y appelle à une réforme radicale contre « les cadres vermoulus de l’enseignement public » et fustige « les quarante années de discours des pontifes du rationalisme traditionnel ». Maurice Lacoin voit dans la formation de Berliet un modèle à mettre en œuvre pour les démobilisés. Le normalien Georges Rozet [35], introducteur du « Ballon aux armées », se rend à trois reprises entre mai 1917 et décembre 1919 à l’USB. Marcel Michelin, acteur-clef de l’introduction du taylorisme chez Michelin, visite Berliet en juillet 1918, et spécialement l’USB ; nul doute que cela ne conforte le manufacturier clermontois dans son programme rationalisateur de l’après-guerre. Retour des choses, l’entreprise française la plus américaine est aussi visitée par ses homologues américaines et admirée à l’égal de Schneider et de Renault [36], par la délégation française de Louis Loucheur, vraisemblablement à l’automne 1917, et par celles américaines en 1919, de la société des ingénieurs civils des États-Unis puis de la direction de General Motors, avec Walter Chrysler et Alfred Sloan. L’avance formidable de la maison Berliet, non seulement en termes d’investissements mais aussi d’éducation du personnel est soulignée par les visiteurs, comme Ernest Mattern, frappé lors de sa visite en 1919 [37] par la jeunesse de la main-d’œuvre employée, son éducation aux méthodes tayloriennes et à l’usage des machines-outils spécialisées.
19 La reconversion s’effectue au cours de 1919 qui voit s’accélérer la construction des différents ateliers de Vénissieux, et notamment l’aciérie. Dans une certaine euphorie, la firme retrouve en juin 1920 le record de production de 1917. Mais un retournement de conjoncture brutal lié partiellement à la liquidation des stocks de camions militaires précipite la firme dans une crise financière aiguë. Ironie du sort, le déclencheur est, en décembre 1920, une décision fiscale liée à l’imposition sur les bénéfices exceptionnels réalisés pendant le conflit. L’administration considère que Marius Berliet a fait un bénéfice lors de la constitution de la société anonyme en 1917 et opère une saisie sur l’entreprise, ce qui empêche le paiement des échéances. La firme, placée en règlement transactionnel, doit passer sous les fourches caudines des banques. Le fondateur perd en 1921 un contrôle qu’il ne retrouve qu’en 1929. La compression des coûts affecte les réalisations emblématiques de la guerre, supprimées (l’Harmonie, l’USB, L’Effort) ou réduites (l’école des stagiaires, celle d’apprentissage). D’autres industriels prennent la relève, comme Michelin, soit au sein des instances internationales, soit au sein de la profession automobile. Renault et Citroën se disputent le titre de French Ford, sous l’arbitrage de Peugeot. Au-delà de l’échec de 1920-1921 reste une usine, surdimensionnée, qui permet sa survie et sa spécialisation ultérieure dans le poids lourd. Les machines achetées, les process et le système organisationnel retenus définissent un modèle taylorien [38], parachevé dans l’entre-deux-guerres, dont les principes organisationnels contraignent dans les années 1960 la capacité d’adaptation à d’autres modes gestionnaires. Demeure la séduction américaine qui pousse Paul Berliet à chercher aussi aux États-Unis des formes et modèles organisationnels, voire des accords avec ses homologues.
Notes
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[1]
J.-F. Grevet, « Le rôle de l’armée dans le développement du poids lourd en France avant 1914 », Cahiers du centre d’études d’histoire de la Défense, 2000, n° 14, pp. 85-126 ; A. Moutet, « La rencontre des traditions militaires et civiles de rationalisation industrielle à l’occasion de la Première Guerre mondiale et ses conséquences », in D. Pestre (dir.), Deux siècles d’histoire de l’armement en France, De Gribeauval à la force de frappe, Paris, CNRS Éditions, 2005, pp. 241-259 ; Y. Cohen, Organiser à l’aube du taylorisme. La pratique d’Ernest Mattern chez Peugeot, 1906-1919, Besançon, Presses universitaires franc-comtoises, 2001.
-
[2]
Archives départementales du Rhône (ADR), 10M426, dossier grève Berliet, mai 1905 ; 10M438, dossier grève Berliet, juin-juillet 1912.
-
[3]
« Les camions de la victoire, retour sur la mobilisation industrielle du monde automobile », actes du colloque L’industrie française dans la grande Guerre, Paris, ministère des Finances, novembre 1916, à paraître.
-
[4]
G. Deglas, « Recherches sur les Usines Berliet (1914-1949) », mémoire de maîtrise d’histoire (dir. Jean Bouvier), université Paris-I, 1977 ; A. Pinol, « Travail, travailleurs et production aux usines Berliet (1912-1947) », mémoire de maîtrise d’histoire (dir. Yves Lequin, Jean Métral), université Lyon-II, 1980 ; P. Fridenson, « Un tournant taylorien de la société française (1904-1918) », Annales ESC, septembre-octobre 1987, n° 5, pp. 1031-1060 ; I. Lisowski, « Portrait d’un patron et d’une entreprise lyonnais : Marius Berliet et la société des automobiles Berliet des origines à 1939 », mémoire de maîtrise d’histoire (dir. Jean-Dominique Durand et Bernard Delpal), 1991, université Lyon-III.
-
[5]
L. d’Albis (dir.), Usines de guerres, Antony, ETAI, 2015.
-
[6]
H. Bonin, Y. Lung, S. Tolliday (dir.), Ford 1903-2003: the European History, Paris, PLAGE, 2003 ; R. Boyer, E. Charron, U. Jürgens, S. Tolliday (dir.), Between Imitation and Innovation, the Transfer and Hybridization of Productive Models, in the International Automobile Industry, Oxford/New-York, Oxford University Press, 1998.
-
[7]
Archives de la Fondation Berliet (AFB), Bulletin de guerre des usines Berliet, Lyon, juillet 1915, p. 3.
-
[8]
Ibidem, 1915-1919.
-
[9]
Ibidem, juillet 1915, p. 7.
-
[10]
Bulletin de guerre du personnel de l’usine Gillet & fils, Villeurbanne/Lyon, 1914-1918.
-
[11]
AFB, Bulletin de guerre des usines Berliet, septembre 1915, p. 2.
-
[12]
Ibidem, pp. 2-3.
-
[13]
Ibidem, juillet, septembre 1915, février 1916.
-
[14]
Base Léonore des Archives nationales, 19800035/894/4684, dossier de Légion d’honneur de Paul Joseph (1884-1967), consultable en ligne www.culture.gouv.fr/documentation/leonore/recherche.htm
-
[15]
AFB, fonds OST, rapport d’organisation intérieure, séances des 6 mars, 3 juillet 1917.
-
[16]
Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine (AN), F7 13365, préfecture du Rhône, service de la Sûreté, état statistique des principaux établissements surveillés, 7 juin 1917.
-
[17]
« Accidents du travail. Les résultats obtenus », L’Effort, 24 mars 1918, p. 363.
-
[18]
Y. Cohen, Le Siècle des chefs. Une histoire transnationale du commandement et de l’autorité (1891-1940), Paris, Éditions Amsterdam, 2013 ; E. De Saint-Fuscien, À vos ordres ? La relation d’autorité dans l’armée française de la Grande Guerre, Paris, EHESS, 2011.
-
[19]
Passage signalé de l’ouvrage de Gantt, Travail, salaires, bénéfices, dans AFB, Organisation intérieure, quinzième réunion, 27 mars 1917.
-
[20]
AFB, « Notre enseignement professionnel », L’Effort, 10 février 1918.
-
[21]
AFB, L. Monnier, « Notes sur l’École d’Apprentissage Berliet », avril 1913, adressées à Marius Berliet le 13 août 1913.
-
[22]
AFB, L’Effort, « Le dimanche de l’USB », 13 janvier 1918.
-
[23]
AFB, plan annexé à la demande d’embranchement particulier auprès du PLM, par la société des Ets Trible, approuvé le 12 juillet 1917.
-
[24]
AFB, L’Effort, numéros des 3 mars 1918, 10 mars 1918 et 17 mars 1918.
-
[25]
AFB, Rapport sur le progrès réalisé dans l’organisation de l’usine en 1916, envoyé à M. Berliet le 6 février 1917.
-
[26]
AFB, Rubrique « Tableau d’honneur des usines Berliet », L’Effort, 23 décembre 1917.
-
[27]
C. Olmo (dir.), Il Lingotto (1915-1939), L’archittetura, l’immagine, il lavore, Turin, Umberto Allemandi, 1994, en particulier D. Bigazzi, « Strutture della produzione, Il Lingotto, l’America, L’Europa », pp. 281-336, qui mentionne Berliet et évoque à juste titre la discipline quasi-militaire nécessaire à l’OST.
-
[28]
O. Cinqualbre, notice « Logement pour habitation de contremaîtres de l’usine Berliet », et reproduction du plan du 9 décembre 1917, in A. Guiheux, O. Cinqualbre, Tony Garnier : l’œuvre complète, Paris, Centre Georges Pompidou, 1990, p. 89.
-
[29]
T. Garnier, Une cité industrielle, Étude pour la construction des villes, Paris, Vincent, 1917.
-
[30]
ADR, 10M445, rapports du 3 et 24 décembre 1917 suite aux réunions du personnel des usines Berliet à la Bourse du Travail.
-
[31]
ADR 10M445, préfecture du Rhône, rapport du 4 janvier 1917.
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[32]
ADR, 10M445, rapport du 24 décembre 1917.
-
[33]
ADR, 10M445, tract de Marius Berliet à son personnel, 12 janvier 1918, reproduit dans Deglas, op. cit., annexe XIV.
-
[34]
Bulletin de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, 1er semestre, mars-avril 1918, pp. 242-254.
-
[35]
Base Léonore, 19800035/1393/61032, dossier de Légion d’honneur de Georges Rozet ; AFB, chronologie Charles Gruyer d’après son journal.
-
[36]
American industrial commission to France, Report to the American manufacturers export association, septembre-octobre 1916, New-York, Press of Redfield-Kendrick-Odell Co, 1917, p. 61, 67, consulté sur HaltiTrust Digital Library, New YorkLibrary. Pour une mise en perspective, C. Druelle-Korn, « La mission prospective des industriels américains en France en 1916 », in F. Berger, M. Rapoport, P. Tilly, B. Touchelay (dir.), Industries, territoires et Cultures en Europe du Nord-Ouest, xix e-xx e siècles, Mélanges en l’honneur de Jean-François Eck, Roubaix, Archives nationales du monde du travail, 2015, pp. 235-243.
-
[37]
AFB, Ernest Mattern, visite des usines Berliet, compte rendu du 11 mars 1919.
-
[38]
J.-F. Grevet, « “C’est la machine qui commande.” De la rationalité des choix techniques : le cas Berliet, des tours Potter à la machine-transfert », in S. Benoit, A.P. Michel (dir.), Le monde du génie industriel au xx e siècle : autour de Pierre Bézier et des machines-outils, Belfort, université de technologie de Belfort-Montbéliard, 2016, pp. 173-195.