Couverture de GMCC_219

Article de revue

La grande guerre et les conserveurs de sardines

Pages 71 à 86

Notes

  • [1]
    L’Humanité, le 2 août 1914, « La crise des denrées », cité dans Capatti Alberto ; Le goût du nouveau, Paris, Albin Michel, 1989, p. 139.
  • [2]
    Pierre Darmon, Vivre à Paris pendant la Grande Guerre, Paris, Fayard, 2002, p. 166.
  • [3]
    Ad Finistère, 4 S 369, Bordeaux, le 19 septembre 1914, le ministre de la Marine au préfet du Finistère.
  • [4]
    Ad Finistère, 1 R 777, Douarnenez, le 23 octobre 1915, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [5]
    Industrie française de la conserve, no 3, mai 1915, p. 136. Cité dans Bruegel Martin, « Un sacrifice de plus à demander aux soldats : l’armée et l’introduction de la boîte de conserve dans l’alimentation française, 1872-1920 », Revue historique, no 596, juin 1996, p. 280.
  • [6]
    Ad Finistère, 1 R 760, Quimper, le 10 août 1915, le préfet.
  • [7]
    Ad Finistère, 1 M 142, Concarneau, le 20 mai 1918, le commissaire au préfet.
  • [8]
    Ad Finistère, 1 R 777, Douarnenez, le 24 mai 1915, Henri de Penanros et Cie.
  • [9]
    S. Berstein et P. Milza, Histoire de la France au XXe siècle, 1900-1930, Bruxelles, Complexe, 1999, p. 269.
  • [10]
    Ad Finistère, 1 R 777. Quimper, le 25 avril 1915, le préfet aux directeurs d’usines.
  • [11]
    Ibid., Quimper, le 22 mai 1915 ; le préfet au sous-secrétaire d’État à la Marine marchande.
  • [12]
    Ibid., Douarnenez, le 22 octobre 1915, Charles Chancerelle.
  • [13]
    Ibid., Nantes, le 26 mai 1915, Alfred Morio au préfet.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    Ibid., Nantes, le 2 octobre 1915, le général Ruffey.
  • [16]
    Ibid., Audierne, le 24 juin 1915.
  • [17]
    Ibid., Paris, le 23 novembre 1915, le ministre de la Guerre au sous-secrétaire à la Marine.
  • [18]
    Ibid., Concarneau, le 29 novembre 1915.
  • [19]
    Ad Finistère, 10 M 47, Quimper, le 10 mars 1915, le commissaire au préfet.
  • [20]
    Ad Finistère, 4 S 362, Quimper, le 21 mai 1915, l’administrateur Bronkhorst.
  • [21]
    Ibid., Quimper, le 22 juin 1915, l’administrateur Bronkhorst au préfet.
  • [22]
    SHM Brest, 3 P 2-14, Saint-Guénolé, le 3 octobre 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [23]
    Ad Finistère, 10 M 47, Quimper, le 8 juillet 1917, le commissaire spécial au préfet.
  • [24]
    Ad Vendée, 10 M 58, Les Sables, le 6 juin 1919, le commissaire.
  • [25]
    Ad Finistère, 10 M 47, Douarnenez, le 12 juillet 1917, le maréchal des logis Landreau.
  • [26]
    Ad Finistère, 1 M 149, Douarnenez, le 21 juillet 1917, le commissaire au préfet.
  • [27]
    Ad Finistère, 1 M 141, Concarneau, le 24 juillet 1917, le commissaire au préfet.
  • [28]
    Ad Finistère, 1 M 133, Quimper, le 30 septembre 1917, le préfet.
  • [29]
    Amieux frères, Origine et développement de la maison Amieux frères, plaquette commerciale, 1923.
  • [30]
    Industrie française de la conserve, no 3, mai 1915, p. 100. Cité dans Bruegel Martin, « Un sacrifice de plus à demander aux soldats : ... », article cité, Revue historique, no 596, juin 1996, p. 280.
  • [31]
    Archives Fédération de l’industrie d’aliments conservés, Paris, note de décembre 1918 de l’Union des syndicats de conserves de poissons.
  • [32]
    Service historique de la Marine, Brest, 3 P 2-15, Quimper, le 3 mai 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [33]
    Direction du service des pêches, sous-secrétariat d’État de la Marine marchande, avril 1923.
  • [34]
    Auxiliaires et territoriaux, les « pépères » selon Jacques Meyer, La vie quotidienne des soldats pendant la Grande Guerre, Paris, Hachette, 1966, p. 25.
  • [35]
    Ad Finistère, 1 R 778, Nantes, le 3 juillet 1916, l’officier supérieur chargé des sursis d’appel.
  • [36]
    Ad Finistère, 1 R 778, Paris, le 24 mars 1916, le sous-secrétaire d’État à la Marine marchande.
  • [37]
    Ad Finistère, 1 N 126, séance du Conseil général du Finistère, 1916.
  • [38]
    SHM Brest, 3 P 2-14, Quimper, le 15 mai 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [39]
    Ibid., Quimper le 19 mars 1917.
  • [40]
    Ad Finistère, 1 M 141, Concarneau, le 24 octobre 1917, le commissaire au préfet.
  • [41]
    Archives de l’Écomusée Lochrist-Inzinzac, Assemblée générale des actionnaires des Forges d’Hennebont, le 9 juin 1916.
  • [42]
    Archives du Service maritime de l’Équipement, Concarneau. Quimper, le 28 juillet 1917, l’ingénieur Leroux au directeur des Domaines.
  • [43]
    Ad Finistère, 1 R 778, Brest, le 20 février 1917, Le Gall au préfet du Finistère.
  • [44]
    Ibid., factures des 12 et 18 août 1916.
  • [45]
    Ad Morbihan, 4 S 792, Hennebont, le 13 janvier 1917, la direction des Forges d’Hennebont.
  • [46]
    Le procédé semble plus ancien puisque Brévans le mentionne dès 1906, époque à laquelle la Société brestoise prépare des sardines au naturel. Le poisson est préparé comme à l’habitude, étêté, étripé, salé puis placé cru dans les boîtes soumises à l’appertisation. Dans J. de Brévans, op. cit., Les conserves alimentaires, p. 201.
  • [47]
    Balland, Bulletin de l’Académie des sciences, 2e semestre 1914, note p. 641.
  • [48]
    J. Pérard, « Comment l’on prépare et l’on assure la conservation de la sardine », Bulletin de l’Instruction professionnelle et technique des pêches maritimes, 1913, p. 261. Cette méthode est toujours en usage au Maroc, et ce type de conserves, pour les avoir goûtées, est délicieux pour les harengs, ou les sardines, précédemment frits.
  • [49]
    Charles Raynouard, « Comment sont préparées les conserves de nos soldats », La Science et la vie, mai 1916.
  • [50]
    Appert, inventeur des conserves alimentaires, Paris, La Maison Appert, 1919, p. 20.
  • [51]
    Archives CCI Quimper, Quimper, août 1917.
  • [52]
    Ad Finistère, 4 S 362, Quimper, le 6 septembre 1918, le commissaire spécial au préfet.
  • [53]
    Ibid., Douarnenez, le 24 août 1915, l’administrateur Calen au préfet.
  • [54]
    Ad Finistère, 10 R 164. Marseille, le 2 mai 1917, réquisitions des huiles destinées aux conserveurs du Sud Finistère.
  • [55]
    Paris, le 2 mars 1917, Circulaire du ministère du Ravitaillement. Citée dans J.-B. Duroselle, La Grande Guerre des Français, 1914-1918, Paris, Perrin, 1994, p. 244.
  • [56]
    Archives FIAC, rapport du Syndicat national des conserveurs de poissons, Paris, le 5 mai 1938.
  • [57]
    La pêche maritime, 1934, p. 52.
  • [58]
    Archives CCI Quimper, séance du 27 juillet 1918.
  • [59]
    Ouizille Hubert, Les conditions économiques actuelles des industries sardinières françaises et portugaises, Paris, 1926, p. 21.
  • [60]
    Ad Finistère, 10 M 47, Quimper, le 6 juin 1918, le commissaire spécial au préfet.
  • [61]
    Ad Finistère, 1 M 141, Concarneau, le 6 juillet 1918, un citoyen de Concarneau à M. le préfet.
  • [62]
    SHM Brest, 3 P 2-15, Le Guilvinec, le 19 décembre 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [63]
    A. Dupouy, Pêcheurs bretons, Paris, de Boccard, 1920, p. 228.
  • [64]
    R. Legendre, Alimentation et ravitaillement, Paris, 1920, p. 306. Cité dans Martin Bruegel, « Un sacrifice de plus à demander aux soldats... », art. cité, Revue historique, no 596, juin 1996, p. 283.

Les premiers mois de guerre

1Durant les trois jours qui séparent le samedi 31 juillet, date de l’assassinat de Jaurès, et le mardi 3 août, jour de la déclaration de guerre de l’Allemagne à la France, « la population se rue littéralement aux magasins d’alimentation. Elle achète le maximum de ce qui peut se conserver pour faire des réserves » [1]. Les épiceries sont vidées de leurs boîtes de sardines et les commandes affluent. Pour les satisfaire, les conserveurs travaillent d’arrache-pied comme tout le secteur de l’agro-alimentaire d’ailleurs qui « s’épanouit sous la houlette des industries travaillant pour l’armée » [2]. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, les fabricants constatent avec joie la volonté des autorités d’imposer l’interdiction aux pêcheurs du blocage de leurs ventes de poissons. Ainsi, à Concarneau, en septembre 1914, les pêcheurs du crû refusent le débarquement de thons apportés par des bâtiments de La Rochelle. De ce fait, d’importantes quantités de poissons sont perdues pour la consommation en frais et surtout la mise en conserve « au préjudice du ravitaillement du pays ». Les armateurs et capitaines rochelais se plaignent immédiatement d’une telle attitude auprès du ministre de la Marine qui intervient pour que cessent de telles conduites :

« Si des mesures locales ont été prises en temps de paix pour répondre à l’ostracisme des uns par l’exclusion des autres, le gouvernement s’étonne qu’au jour des hostilités, alors que les Français sans distinction de région prodiguent leurs efforts et leur sang sur les champs de bataille, ceux que la mobilisation n’a pas atteints entendent tirer de leur situation particulière des droits à une sorte de monopole. » [3]

2Enfin, la pêche de la sardine au cours des cinq années de guerre est généralement bonne sur les côtes bretonnes et vendéennes. Le filet droit suffit à rapporter à terre les poissons nécessaires aux conserveurs. Les sites abandonnés pendant la longue crise d’avant-guerre retrouvent la vie ; ainsi l’usine Frochen de Saint-Guénolé, fermée depuis plusieurs années, recommence à travailler en 1915. Charles Chancerelle appelle son frère Henri à la rescousse ; ce dernier réside au Portugal mais revient à Douarnenez en 1915 pour diriger une usine désaffectée, rachetée par son cadet. Les besoins de l’Intendance et de la population civile sont tels que les quatre cinquièmes de la fabrication de 1915 sont écoulés avant même d’avoir été stockés. Charles Chancerelle le constate :

« Il me reste 800 caisses disponibles actuellement (usine de Saint-Guénolé) qui ne le seront plus sous peu ; ce qui est vrai pour une de mes usines l’est aussi pour les six autres et pour tous mes confrères en général [...]. La plupart livrent leurs produits aussitôt fabriqués. Il faut tenir compte que cette année les moyens de production sont bien moindres qu’en temps ordinaire. Nous ne produisons que le demi de ce que nous aurions fabriqué d’habitude. » [4]

3Les questions primordiales de la Défense nationale sont aussi liées « dans une large mesure, à celles des conserves alimentaires » [5]. Les services français du contre-espionnage s’inquiètent même un moment de savoir s’il convient ou non de protéger ces établissements travaillant pour l’Armée et qui ont prouvé leur nécessité. Très vite cependant, on conclut en haut lieu que les conserveries ne demandent pas une surveillance particulière, car « le matériel et l’outillage de la fabrique n’ont pas une importance qui rende probables des tentatives de sabotage ou d’attentats » [6].

Des sursis pour les cadres

4Cependant les fabricants se plaignent car leurs usines ne fonctionnent pas à plein rendement comme ils le souhaiteraient, et il n’est pas besoin de forcer les captures pour les marins qui vendent tout leur poisson à très bon prix. Au début de la guerre, les usiniers ne sont même pas prioritaires comme établissements travaillant pour l’effort de guerre ; ils sont rationnés en huiles, en fer blanc, en étain, en sel et en charbon : « Les conserveurs ont des difficultés d’approvisionnement. Les uns obtiennent assez facilement les quantités nécessaires à leur industrie d’autres au contraire sont à commencer leur fabrication de boîtes vides pour la campagne prochaine. » [7] De plus, les conserveries fonctionnent avec un personnel restreint car les ouvriers soudeurs, les chauffeurs et les mécaniciens sont alors réquisitionnés pour travailler dans les usines d’armement dans le meilleur des cas sinon ils sont au front. Comme nous le rappelle le conserveur douarneniste Henri de Penanros, les absences sont nombreuses et parfois définitives :

« J’ai l’honneur de porter à votre connaissance que mon personnel a été très éprouvé par la guerre :
— Lucas Jacques, mort au champ d’honneur,
— Lebot Noël, mort au champ d’honneur,
— Joncour Yves, bras droit arraché par un obus,
— Colin Yves, enfoncement des cotes par un éclat d’obus,
— Leslay, Le Bert, Guéguen, Griffon, Guellec, Gall, Jupin... mobilisés. » [8]

5Cependant aucune usine n’est obligée d’interrompre totalement la fabrication, et l’on reste très loin du chiffre national de 47 % d’entreprises françaises condamnées à fermer leurs portes [9]. De plus le gouvernement comprend vite que les conserveries participent à leur façon à l’effort de guerre, surtout depuis le début de la guerre de tranchées et l’évidence de l’enlisement du conflit. Comme les importations de sardines à l’huile espagnoles et portugaises s’accroissent de mois en mois, grevant le budget national déjà mis à mal, il convient de tout faire pour favoriser la production française, et il faut mobiliser le plus grand nombre de bonnes volontés pour obtenir les meilleurs rendements possibles. Dans un premier temps, le gouvernement reconnaît que les directeurs d’usine forment un personnel irremplaçable sans doute plus utile dans leurs ateliers que dans un bureau.

« Il se peut que par suite de la mobilisation générale le personnel, soit technique, soit administratif fasse en partie défaut pour que votre usine puisse travailler à plein rendement. Dans ce cas je serais tout disposé à intercéder pour seconder vos efforts en sollicitant des mises en sursis d’appel. Je vous serais obligé en conséquence de vouloir bien me faire connaître le plus tôt possible quelles sont vos intentions pour la prochaine campagne de pêche et de m’indiquer le cas échéant les spécialistes qui vous seraient strictement indispensables pour le bon fonctionnement de votre établissement. » [10]

6Immédiatement les demandes arrivent sur le bureau préfectoral et pratiquement tous les fabricants réclament les fameux sursis d’appel pour les ouvriers soudeurs jugés indispensables. Amieux, Cassegrain, Wanceslas Chancerelle, Fröchen... estiment qu’ils ne pourront pas travailler correctement sans l’aide de ces ouvriers qualifiés. Mais l’Armée ne libère pas facilement ses mobilisés, et seuls les réservistes et auxiliaires obtiennent le droit de revenir sur le littoral fermer les précieuses boîtes. Les cadres des usines aussi profitent de l’aubaine pour demander leur retour ; ils sont d’ailleurs les plus nombreux et font jouer leurs relations. Le préfet du Finistère s’adresse au secrétaire d’État à la Marine Marchande pour appeler sa bienveillante attention

« sur deux cas particulièrement intéressants ; il s’agit de directeurs d’usines très importantes appartenant à la réserve de l’armée active. M. Hyacinthe Parmentier fils, de Douarnenez, et Pierre de Penanros, de Concarneau (caporal au 148e RI à Vannes). M. Parmentier a des marchés en cours pour la fourniture de conserves de poissons avec les Intendances de Clermont-Ferrand et Langres ; ces deux directeurs sont absolument indispensables au fonctionnement de leurs usines qu’ils n’ouvriront pas si le sursis qu’ils sollicitent ne leur est pas accordé » [11].

7L’intervention préfectorale est d’ailleurs couronnée de succès. De même, quelques jours plus tard, il obtient le retour de M. Esun, directeur de l’usine Saupiquet de Quimper. La Compagnie de conserves et produits alimentaires quant à elle sollicite et obtient un sursis pour Paul Abric, administrateur délégué et directeur technique des usines des Sables d’Olonne, de Concarneau et de Douarnenez. Charles Chancerelle, de son côté, ne s’embarrasse pas de fioritures pour demander au préfet d’insister auprès des autorités militaires afin que l’on accorde au moins un mois de congé à M. Coulloch, alors au 3e Régiment d’Artillerie de Belfort : « Si cet artilleur était indispensable, nous nous inclinerions devant la force majeure mais, comme il est prosaïquement employé à un téléphone, nous persistons à croire qu’il serait mieux à Douarnenez à la tête de son usine privée de direction actuellement. » [12]

8Et si les sursis ne sont pas accordés, ou tardent trop, les propriétaires immédiatement menacent de fermer leurs usines. La maison Carnaud, n’ayant pas obtenu le sursis pour son ouvrier sertisseur en chef, ne peut assurer la fermeture des boîtes de l’usine Caillé. Le directeur de cette dernière s’enquiert auprès du préfet pour savoir si la décision est ferme afin qu’il puisse licencier son personnel et prévenir les pêcheurs de la fermeture définitive. De même, la maison Morio se plaint toujours au préfet : « Nous voyons avec regret que notre directeur technique, monsieur Courtois Jules, n’est pas encore mis à notre disposition. L’absence de notre directeur ne nous permettra donc pas d’ouvrir notre usine car, par le manque de personnel sérieux, nous ne pourrons faire une fabrication importante. » [13]

9Et la liste des sursis obtenus en 1915 pour les directeurs d’usines du Finistère [14] et du Morbihan ne cesse de s’allonger bien qu’il soit extrêmement difficile d’obtenir ces dérogations dans une France où tous les hommes valides sont au combat. Au moins 26 noms de directeurs, de la classe 1888 à la classe 1911, nous sont parvenus.

10Tous, cependant, n’obtiennent pas le viatique tant désiré. Les conserveurs Azema et Farnan demandent le sursis pour leur directeur des usines de Douarnenez et Concarneau, un certain Adolphe Rozais. Mais, après enquête, il apparaît que le sieur Rozais ne dirige aucune conserverie sur place. En fait il est employé dans les bureaux du siège de la maison, rue de La Boétie à Paris, et ne participe en rien au bon fonctionnement des usines du groupe. Son sursis est immédiatement annulé [15] et le cadre parisien est même passible d’une sanction. Et puis, certains usiniers se sentent lésés car leurs demandes ne sont pas acceptées. Ainsi, la veuve Legall se plaint car elle ne parvient pas à obtenir le précieux sursis d’appel pour son employé Yves Sergent, 47 ans, soldat à la pointe du Raz, alors que certains conserveurs l’ont obtenu et qu’elle voit « de tous côtés et, en face moi, Paul Audigan qui obtient toutes les permissions quand les hommes de son âge sont depuis longtemps au front. Ces injustices sont écœurantes » [16].

11Sinon la saison se prolonge plus tardivement que prévu si bien que les autorités militaires sont obligées de maintenir les sursis déjà accordés :

« J’ai l’honneur de vous faire connaître que j’ai autorisé M. le Général commandant la 11e Région à prolonger jusqu’au 30 novembre courant les sursis qui expiraient le 15 du même mois, la production sardinière pouvant être considérée comme terminée à cette date. En outre une prolongation du sursis d’appel valable jusqu’au 31 janvier 1916 pourra être accordée aux employés des usines s’occupant du sprat et des usines fabriquant les boîtes et les caisses pour les conserves. » [17]

12Prolongation de sursis immédiatement demandée dans les mêmes conditions que quelques mois auparavant et toujours pour le même type de personnel, les directeurs et les ouvriers soudeurs. La maison Billette de Concarneau sollicite la bienveillance du préfet pour « l’obtention d’un sursis en faveur de notre ouvrier soudeur M. Diraison François Marie, classe 1892... Avant la guerre notre atelier était de 22 ouvriers soudeurs. Présentement il ne comprend que 9 ouvriers : deux pères de six enfants, quatre non mobilisables, deux sursis et celui dont fait l’objet notre présente demande » [18].

Des revendications salariales étouffées

13Mais la sérénité retrouvée des conserveurs n’a qu’un temps : la demande de la consommation reste toujours très supérieure à l’offre et les prix de vente montent très haut pour leur plus grande joie mais parallèlement les prix d’achat de la sardine suivent la même courbe ascendante. Les bénéfices réalisés par les conserveurs sont importants si bien que pêcheurs et ouvrières souhaitent bénéficier eux aussi des fruits de leur travail. Après une journée de concertation qui ne donne rien, les 80 ouvrières pareuses de l’usine Saupiquet de Quimper se mettent en grève le 9 mars 1915 pour obtenir 5 centimes supplémentaires de salaire horaire, alors qu’elles travaillent de huit à dix-sept heures par jour. Elles obtiennent très facilement satisfaction, et le travail reprend le lendemain. « Les revendications étaient justifiées par le renchérissement des denrées de première nécessité et l’administration de l’usine Saupiquet actuellement adjudicataire de la fourniture de conserves à l’armée aurait dû y faire droit depuis le commencement de la mobilisation. Le cahier des charges prévoyait vingt centimes de l’heure. » [19]

14Les pêcheurs, moins nombreux, ne limitent plus leurs apports, deviennent les maîtres du jeu et imposent leurs conditions. Le 21 juin 1915 une grève est lancée à Loctudy et l’Île-Tudy par les pêcheurs qui exigent un prix minimum pour la campagne. Le gérant de l’usine Benoit accepte leurs desiderata et le travail reprend le même jour à 20 heures [20]. Le 22 juin, ce sont les femmes des usines Laurent, Billette, Roulland et Rödel qui entament un mouvement de grève pour obtenir 25 centimes de l’heure en plus mais seules les deux dernières conserveries citées acceptent alors que dans « les usines Billette et Laurent-Pennaros quelques meneuses seront sans doute renvoyées » [21]. En fait la main-d’œuvre est rare, et toutes les ouvrières sont reprises avec 10 centimes de hausse de salaire horaire. Les années suivantes, de la même manière, de nombreux conflits sporadiques et locaux sont déclenchés, et, dans la grande majorité des cas, les revendications sont satisfaites très rapidement. On note par exemple une tentative de grève des ouvrières des usines le 2 octobre 1916 à Loctudy et le lendemain au Guilvinec, mais très vite la situation reprend son cours normal ; « après de courts pourparlers les usiniers ont accordé l’augmentation de 0,05 par heure réclamée par les grévistes, et le travail a repris aussitôt » [22].

15En effet, les femmes et filles de marins acceptent de plus en plus difficilement de travailler en usine pour des salaires de misère car leurs maris ou pères vendent très bien leurs sardines : en juillet 1916, de 50 à 90 F le quintal de sardine à l’île d’Yeu, 125 F à Saint-Gilles ; de 60 à 85 F le quintal de sardines et de 38 à 53 F celui de maquereaux à Douarnenez en juillet 1917. Alors dans ces conditions pourquoi suer sang et eau dans les ateliers des conserveurs ? « Les femmes de marins pêcheurs [...] ne se livrent à aucun travail, ne se privent de rien, dépensent sans compter et cela aux yeux et au nez de leurs voisines plus malheureuses qui les regardent d’un œil jaloux et avec rancune peut-être. » [23] Par contre, celles qui travaillent, les ouvrières, souvent femmes de mobilisés, ne veulent toujours pas se soumettre. Le 6 juin, 1069 ouvrières des Sables décrètent la grève et réclament cinq centimes d’augmentation par heure qu’elles obtiennent le lendemain sans aucune difficulté [24]. Le 23 juin, ce sont les 400 ouvrières des conserveries de Croix-de-Vie qui réclament la même hausse obtenue le 2 juillet après une semaine de grève. Le 11 juillet 1917, les ouvrières douarnenistes des Établissements métallurgistes Carnaud cessent le travail à 13 heures 30 parce que la direction refuse de leur octroyer les dix centimes horaires réclamés ; dès 18 heures le travail reprend après que les grévistes ont obtenu satisfaction [25]. Les ouvrières des conserveries décident à leur tour de demander une augmentation, mais les patrons refusent si bien que la grève générale est décidée.

16Le 20 juillet le commissaire de police réunit les directeurs et les gérants des usines douarnenistes et les contraint à trouver une solution : « Je savais que deux d’entre eux devaient céder pour 0,40 F et entraîner les autres, sauf toutefois M. M. Demolon et Béziers, qui n’auraient sans doute pas consenti. » [26] Pourtant le travail reprend après que les usiniers ont cédé et accordé des augmentations de salaire de quarante centimes. De même, une semaine plus tard à Concarneau, la réussite est au rendez-vous pour les ouvrières pareuses qui, après trois jours de grève, obtiennent les cinquante centimes horaires réclamés [27]. De même aussi à Plouhinec et Audierne où les ouvrières repartent avec les quarante centimes exigés. Dans l’ensemble pourtant la population sardinière est calme et satisfaite de son sort ; paradoxalement il faut souligner que la guerre atténue leur misère, tout du moins financière :

« Les conditions de vie avantageuses dont jouissent plusieurs classes sociales malgré les difficultés grandissantes de notre situation économique, sont une des causes et la plus importante de cette situation satisfaisante au trente septième mois de la guerre [...]. Les marins pêcheurs perçoivent des salaires journaliers allant jusqu’à 80 F ; [...] ; les ouvriers employés dans les établissements de la défense nationale ou des industries privées de la conserverie ont obtenu également des avantages pécuniaires appréciables. » [28]

17Parallèlement il faut aussi souligner les immenses fortunes réalisées au cours du conflit, et ils sont très rares les usiniers patriotes tel Maurice Amieux qui annonce peu de temps après le conflit que les « fournitures ne furent faites au ministère de la Guerre et aux comités d’assistance aux prisonniers de guerre qu’avec l’abandon intégral du bénéfice à des œuvres de bienfaisance créées en faveur des victimes de guerre » [29]. La guerre se prolonge et crée d’immenses besoins toujours renouvelés ; l’Intendance militaire est devenue un gros consommateur qui ne lésine pas sur les prix. De leur côté, les syndicats professionnels ne chôment pas non plus et encouragent chaque famille à rajouter quelques boîtes de conserve de poisson dans chaque colis envoyé au front [30]. En effet les soldats n’apprécient pas les conserves de viandes fournies par l’armée :

« Par malheur l’Administration militaire a fixé des conditions qui ne permettent de préparer qu’un bouilli peu appétissant et indigeste que les troupiers ont qualifié de singe. Cette conserve légèrement cuite dans le vide produit un bouillon que l’on concentre et qu’on y adjoint sous forme de gelée. Son mode de préparation, sa cuisson modérée, l’absence de sel et de tous aromates sont certainement des causes de désorganisation de cette conserve, surtout quand, par cas fortuit et malgré toutes les précautions prises, la viande mise en œuvre n’est pas parfaitement saine... » [31]

Des problèmes de production

18Tout semblait enfin sourire aux pêcheurs côtiers et aux conserveurs ; hélas, après les usines, ce sont les pêcheurs qui manquent de bras et les bateaux restent désarmés au port. Dans le quartier de Quimper, plus de 300 d’entre eux sont inutilisés en 1916 par « défaut d’équipage ». Il faut trouver 1 300 hommes pour les remettre en état de pêcher si bien que seulement 115 prennent la mer [32]. Pendant toute la durée des hostilités la pêche maritime est particulièrement atteinte. Beaucoup d’inscrits mobilisés ne peuvent plus exercer leur profession ; la plupart des chalutiers et des grands voiliers sont réquisitionnés pour assurer la défense ou la surveillance des côtes ; enfin la pêche devient de plus en plus dangereuse en raison de l’intensité de la guerre sous-marine et des mines. Les résultats des campagnes décroissent rapidement [33], surtout après 1916 :

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19Cependant il convient de nuancer ces statistiques alarmistes. S’il est vrai que la diminution des apports est nette, il faut souligner que la pêche côtière est moins touchée et plus particulièrement la pêche sardinière. Les cinq campagnes nationales effectuées durant la guerre sont bonnes, et les sommes versées aux pêcheurs, notamment en 1917 et 1918, sans tenir compte de l’inflation, n’ont jamais été aussi élevées depuis 1866, date de la publication des premières statistiques fiables :

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20Il est vrai pourtant que les conserveurs rencontrent de réelles difficultés pour que leurs ateliers fonctionnent normalement. Sur l’eau, mais aussi dans les usines, le personnel est de plus en plus rare surtout s’il présente des qualifications techniques nécessaires pour maintenir en fonction les autoclaves et les fours :

« La mise en sursis d’un très grand nombre de RAT [34] du service auxiliaire de cultivateurs a diminué dans de fortes proportions les ressources de la région en hommes du service auxiliaire et il n’est plus possible de pourvoir au remplacement des hommes demandés en sursis quand ils ont une affectation spéciale. Pour ces raisons il ne peut être accordé de sursis que dans les cas d’absolue indispensabilité. » [35]

21Au moins, les conserveurs tentent d’obtenir les marins nécessaires à la pêche pour alimenter les usines si précieuses pour l’Intendance et tous les acteurs économiques et politiques concernés sont bien persuadés de l’intérêt fondamental des conserveries. Le ministère de tutelle est le premier à réagir :

« Il paraît nécessaire de se préoccuper dès maintenant de l’armement pour la prochaine campagne [...]. La pêche a été déficitaire l’an dernier et le serait sans doute encore plus cette année si on ne prenait pas des mesures pour donner un nombre suffisant de navires pour alimenter les usines. Le Ravitaillement de l’armée en conserves présentant un intérêt particulier, mon intention est de demander, s’il est nécessaire, au ministre de la Guerre, la mise en sursis, pour la prochaine campagne, de marins pêcheurs pris dans les services auxiliaires et les classes les plus anciennes RAT et exceptionnellement les AT. » [36]

22Le conseil général du Finistère n’est pas en reste et émet en mai aussi un vœu tendant à ce que des sursis d’appel soient accordés plus facilement pour la campagne 1916 aux pêcheurs sardiniers susceptibles d’être placés dans cette catégorie [37]. Les administrateurs de l’Inscription dressent en conséquence des listes de patrons et matelots pêcheurs sardiniers attendus dans les ports [38]. Finalement le gouvernement se range à leurs arguments et autorise en mars 1917 la mise en sursis des classes 88, 89, 90, et 91. Les bateaux sardiniers sont donc plus nombreux au début de la campagne [39], et la pêche est très rémunératrice, « les matelots ayant gagné des sommes variant entre 80 et 200 F par jour » [40] !

23Les conserveurs se plaignent aussi de l’importance de la poudrerie nationale de Pont-de-Buis qui drainent tous les ouvriers spécialisés de la région. On compte plus de 5 500 ouvriers et ouvrières dans leurs locaux en 1917 dont bon nombre des chauffeurs, mécaniciens ou soudeurs jusqu’alors employés dans les conserveries. Les Forges d’Hennebont, principal fournisseur des feuilles de fer blanc imprimées, ont toutes les peines du monde pour trouver du personnel de remplacement : « Les difficultés de recrutement de personnel dont nous vous avons entretenu l’an passé, loin de diminuer, n’ont fait que s’accroître dans le courant de l’exercice 1915, nous y avons paré, dans une très forte proportion, en recourant à l’emploi de la main-d’œuvre féminine partout où cela était possible. » [41]

24Mais personne ne se plaint des mauvaises conditions de travail, bien au contraire ; les affaires sont florissantes, comme le rappelle l’ingénieur en chef des Travaux publics du Finistère. En 1917, les industriels installés à Concarneau dénoncent la hausse jugée prohibitive de la redevance perçue par l’État pour l’installation de cabanes d’achat des sardines sur le domaine public. Les services administratifs s’indignent de leurs doléances et proposent même de porter cette taxe de 15 à 50 F : « Il s’agit d’une cabane servant à la réception du poisson pour une conserverie qui certainement retirera de cette installation des grandes facilités pour son commerce particulièrement prospère et rémunérateur en ce moment. » [42]

25Les usines désaffectées sont toutes reprises si les équipements ne sont pas trop anciens. Pierre Chancerelle, qui possède quatre usines en Espagne et au Portugal, revient en Bretagne, selon les conseils de son frère, et rachète une usine inutilisée à Douarnenez où il prépare pour la circonstance des sardines patriotiques aux appellations évocatrices : « France », « Duguesclin », « Jeanne Hachette », « Le Clairon Français ». Alphonse Le Roy, neveu du conserveur Bablot installé à Concarneau, reprend l’affaire familiale en 1917. La conserverie Veuve Vallière-Desfilière de Loctudy est rachetée en janvier 1917 par Alexis Le Gall, fabricant de conserves à Douarnenez. Son intention est de faire travailler l’usine le plus vite possible mais il manque lui aussi d’un gérant :

« Cette usine fermée depuis de longs mois est la seule qui existe dans le pays et il serait désirable à tout point de vue ; tant dans l’intérêt du ravitaillement national que dans celui de la population maritime de nos côtes, qu’elle puisse s’ouvrir et fonctionner normalement lors de la prochaine campagne de sardine. Pour que la chose soit possible, [...] j’ai l’honneur de solliciter la mise en sursis d’appel du nommé François Perhirin », déjà en sursis l’année précédente pour le compte de l’ancienne propriétaire [43].

26La situation se détériore tout de même en 1917 car les approvisionnements en fer blanc et en huiles s’effectuent chaotiquement. Mais encore une fois convient-il de signaler que si les Français exportent leurs sardines à l’huile de qualité vers la Grande-Bretagne, les Anglais de leur côté parviennent à approvisionner plus ou moins régulièrement les côtes bretonnes en fer blanc. Ainsi, la maison londonienne Walk fournit en 1916 aux usines concarnoises Provost-Barbe et Billette le matériau nécessaire pour la confection de 1,3 million de boîtes [44]. En France, la production de fer blanc est en forte augmentation. La direction des Forges d’Hennebont réclame à la préfecture du Morbihan des dragages plus fréquents du port pour que les importations et les exportations effectuées essentiellement par la voie maritime puissent se dérouler sans encombre : « Par la suite de l’agrandissement de nos usines et l’augmentation de production, le trafic de ce port devient tous les jours plus important, et il est facilement le premier port du Morbihan après Lorient. » [45]

27Les industriels bretons sont pourtant convoqués à la préfecture de Quimper par le directeur du Service des pêches pour leur demander de favoriser par tous les moyens l’effort de guerre ; la qualité des conserves n’est plus considérée comme le premier objectif à respecter, mais le fut-il jamais ? On ne peut même pas parler de fraudes alimentaires puisque les autorités compétentes non seulement couvrent les agissements des usiniers mais poussent à la fabrication. Toutes les sardines, quel que soit leur état ou leur grosseur, sont utilisées. Les pilchards, ces grosses sardines de dérive, sont mis en conserve pour la première fois en France sous forme de brisures. L’huile est remplacée par la sauce tomate, le vin blanc, les marinades ou... rien du tout. Dans ce dernier cas, on se fonde sur une expérience tentée en 1910 par l’intendant militaire Jasseron pour la fabrication des conserves de sardines destinées à l’alimentation de la troupe [46]. Cet officier préconisait de placer les poissons simplement vidés et lavés dans les boîtes et de les passer ensuite à l’autoclave sans autre préparation. Après une année de conservation, les boîtes furent ouvertes et la chair des sardines était ferme, rose, appétissante et agréable au goût [47]. « Il est évident que cette préparation constitue un moyen de fabriquer, pour nos troupes, un aliment sain et peu coûteux. C’est du moins l’opinion de MM. les pharmaciens-majors Maljean et Balland. Nous n’aurions garde de penser à ce sujet d’une manière différente. » [48]

28La presse est mise à contribution pour imposer cette idée, sans doute peu reconnue alors dans les milieux populaires, de la qualité nutritive et gustative des conserves, le seul procédé « qui donne des produits faciles à conserver pendant très longtemps et que les soldats peuvent consommer avec plaisir soit froids, soit réchauffés » [49]. Ainsi préparée, la conserve « plaît aux soldats, qui la consomment volontiers, au lieu de la jeter ou de la vendre comme autrefois » [50]. Mais encore faut-il disposer du poisson nécessaire et les pêcheurs sont rares alors que la rogue de Bergen a disparu des ports. Pour remplir les fameuses boîtes, dans les meilleures conditions possibles, les industriels bretons sont convoqués pour exposer les moyens d’y parvenir [51]. Bien sûr, pour ces derniers, il faut recourir à l’utilisation des sennes tournantes pour la pêche de la sardine, enfin autorisées par le décret du 14 août 1917 et sans aucune protestation des pêcheurs. Il est vrai que la balance commerciale est largement déficitaire à cette période et que les 11 200 t de conserves ibériques importées au cours du seul premier trimestre 1917 n’ont pas peu contribué à le creuser. Le gouvernement insiste donc pour obtenir des améliorations du change : il faut produire le maximum sur place, par tous les moyens. Les besoins urgents du ravitaillement militaire et civil imposent des décisions urgentes que quarante ans de lutte entre pêcheurs et usiniers n’avaient pu entraîner. Ainsi, le décret du 14 août autorise les filets tournants « dans le but d’intensifier les rendements ».

29Dans le domaine des rogues, resurgissent de nouveaux projets souvent peu convaincants [52]. La rogue « encornet ou la Briggs ont des effets nuls ». D’autres semblent plus perfectionnées comme celles de l’industriel Garnier qui propose un mélange de sa composition ; la rogue « Armor » connaît d’ailleurs une certaine réussite. Elle est présentée par le directeur de la Société bordelaise de conserves alimentaires :

« Je dois dire à la vérité que lorsque cette rogue sera plus connue des marins pêcheurs qui professent à son égard comme à l’égard de toute rogue artificielle et de toute innovation, l’apathie la plus profonde, les services qu’elle leur rendra seront immenses car si elle ne supplée pas entièrement à la rogue naturelle, elle fournira au moins par un mélange convenable une économie telle de cet appât que le cours en sera heureusement influencé pour le grand avantage du pêcheur, du consommateur et enfin de la nation entière. » [53]

30Depuis le début des hostilités, la France réclame pour ses troupes toujours plus de conserves de poissons mais les conserveurs français ne peuvent répondre aux attentes du ministère de la Guerre. En fait, assez étonnamment, les usiniers continuent d’exporter leurs produits de luxe vers le Royaume-Uni avec qui les échanges sont libres et relativement aisés, soit plus de 3 000 t entre 1914 et 1916. Paradoxalement, alors que le ravitaillement est de plus en plus difficile, les fabricants parviennent à confectionner des sardines à l’huile de très grande qualité avec de l’huile d’olive tunisienne. Celle-ci débarque à Marseille et plus de 2 000 t arrivent en Bretagne au cours de l’été 1917 après, il est vrai, des réquisitions des Service du Ravitaillement [54].

31Pour compenser ces manques le gouvernement achète de plus en plus à l’Espagne et au Portugal : en 1910, les importations ibériques de sardines à l’huile représentent environ 5 000 t mais elles atteignent 26 000 t en 1917. La situation économique de la France en guerre devient catastrophique. Le gouvernement Briand confie le ministère du Ravitaillement à Herriot, en décembre 1916, alors que la guerre sous-marine « à outrance » est sur le point de commencer. Le ministre doit prendre très vite des mesures de restriction pour réduire la facture en devises, et il décide l’interdiction totale d’exporter à la fin de janvier 1917 : « L’appoint doit être acheté à l’étranger et payé en or [...]. Perdre de l’or c’est perdre des cartouches. » [55] Toujours est-il que pour limiter les achats de conserves espagnoles et portugaises, l’interdiction des exportations des produits nationaux est maintenue pendant les années 1917-1918 et 1919 par les successeurs d’Herriot : Maurice Viollette, Maurice Long et Victor Boret. Cette prohibition fait effectivement tomber le chiffre des importations à 8 000 t en 1918 mais elles reprennent de plus belle l’année suivante. Le mal est grand pour les fabricants nationaux, puisque de cette manière ils continuent de perdre leurs débouchés spécifiques au bénéfice de leurs concurrents anciens qui continuent par ailleurs de vendre aussi en France. Le Portugal, en particulier, profite de l’aubaine : lui qui exportait 5 000 t de conserves de sardines en 1896 passe en 1918 à plus de 21 000 t. Les bénéfices de guerre permettent aux industriels espagnols et portugais de s’outiller largement et de produire toujours à meilleur prix à la faveur des circonstances [56]. Plus grave encore, l’abandon temporaire des marchés d’exportation traditionnels entraîne la création de nouveaux centres de fabrication, notamment aux États-Unis sur la côte californienne et en Norvège [57]. Qu’importe la médiocre qualité de leurs conserves, puisqu’elles sont de toute manière achetées par les belligérants.

32Et la situation ne s’améliore pas en 1918. Cet été-là, la rogue norvégienne est si rare que les pêcheurs n’essayent même pas de sortir. L’huile d’olive devient elle aussi introuvable d’autant plus que la récolte s’avère catastrophique en France. Les conserveurs s’adressent alors au ministre du Ravitaillement, Viollette, pour qu’il facilite les importations d’huile de Tunisie. Mais les approvisionnements restent difficiles et, condamnés au chômage technique faute de sardines, d’huile ou de fer blanc, les usines ferment les unes après les autres selon les propos des fabricants qui réclament à cor et à cri les moyens de continuer leurs activités [58]. Mais ce qu’oublient de signaler les conserveurs, c’est que les chaînes travaillent toujours le maquereau, la grosse sardine de dérive et le sprat. Leur consommation courante est entrée dans les mœurs, et, en ces temps de vaches maigres, les tables françaises se satisfont de ces poissons de seconde classe. Le Syndicat national des conserveurs lui-même reconnaît que la fabrication des conserves alimentaires a pris, depuis le début de la guerre, un essor considérable [59]. Les affaires ne doivent d’ailleurs pas être aussi terribles que les usiniers le laissent supposer. Les ouvrières de l’usine Riom du Guilvinec sont gratifiées, sans l’avoir demandée, d’une augmentation de dix centimes de l’heure le 1er juin 1918. Le jour même elles entament une grève car du moment que le patron accorde une augmentation sans revendication particulière, alors pourquoi ne pas demander plus ? Le gérant refuse, mais les ouvrières quittent l’usine pour s’occuper de leurs champs à la veille de la récolte des petits pois. Le gérant revient sur sa décision et c’est 15 centimes supplémentaires qui sont finalement accordés au personnel [60]. Un mois plus tard, le conflit éclate à Concarneau où, au bout de vingt-quatre heures, les ouvrières obtiennent aussi 10 centimes de plus par heure, mais la hausse du prix du pain est telle que l’augmentation obtenue ne la compense pas. « Nulle part en France on n’en manque [de pain] tandis qu’ici nous en manquons totalement pendant deux-trois et même quatre jours par semaine, et le peu qu’on nous en donne, et pour l’avoir il faut se battre à la porte des boulangeries. Et c’est pitié de voir les malheureuses familles, [...], qui véritablement souffrent de la faim. » [61]

33Un autre problème, déjà évoqué et non des moindres, affecte les activités de pêche : la guerre sous-marine à outrance déclarée par la Marine allemande. Encore hésitante en 1915-1916, elle prend une tournure alarmante après le premier février 1917. Depuis cette date, les sous-marins allemands ont élu résidence au large de Belle-Île et canonnent tous les bâtiments qui s’approchent des côtes françaises par convoi mais aussi les bâtiments de pêche de grande taille. Les dégâts sont importants :

34— le 27 janvier 1917, le steamer norvégien Ymer, coulé au large de Belle-Île ;

35— en mars, le Rutenf-Zell, vapeur hollandais, torpillé devant Kerdonis ;

36— le 27 mars, le Thracia, vapeur anglais, coulé à un mille des Birvideaux ;

37— le 6 septembre, le Joseph-Peneau, bateau chasseur du conserveur du même nom ;

38— le bateau pilote no 3 de Saint-Nazaire coulé au sud de la pointe de Quiberon ;

39— le bateau-pilote no 3 de Belle-Île, coulé en plein jour au large de Goulfar ;

40— un vapeur norvégien coulé par une mine devant Kerdonis ;

41— le Cairnstrath, vapeur anglais torpillé devant le Pilier ;

42— plusieurs dundées de pêches canonnés et coulés devant les Grands Cardinaux ;

43— le Raymond-Esther et le Fils du Progrès, deux dundées de pêche coulés le 29 avril devant Groix ;

44— le thonier République coulé en octobre...

45L’Atlantique n’est plus sûr et les thoniers ne sont plus autorisés à sortir qu’en groupe de 30 à 50 bâtiments protégés par de petites unités de la marine militaire ou des bateaux de pêche armés de canons de 47 mm ; ainsi le Versailles et le Philomène en sont les premiers équipés. Mais, de l’avis même des intéressés, ces deux bateaux sont d’un trop faible tonnage pour supporter cet armement. Ils préfèrent voir leurs flottilles escortées et surveillées par des chalutiers ou des bateaux à vapeur armés [62]. La présence des sous-marins et des mines démontre l’insécurité des parages où s’effectuent la pêche mais aussi les travaux de construction du phare des Cardinaux. Le stationnement en plein été de deux bâtiments de travaux des Ponts et Chaussées est jugé trop dangereux par le commandant de la flottille de vedettes de Belle-Île. Deux cibles trop faciles pour les marins allemands si bien que par la décision ministérielle du 14 mai les travaux du phare sont suspendus « jusqu’à ce que les circonstances permettent de les reprendre avec plus de sécurité », et le chantier s’endort pour cinq ans. Mais la pêche sardinière se poursuit, les petites chaloupes ne sont que menu fretin sans intérêt pour les sous-marins allemands. Les marins armant pour les pêches plus lointaines, au thon, à la langouste ou au maquereau de dérive, abandonnent leurs lourds bateaux et en reprennent de plus petits. Les affrontements entre les pêcheurs et les usiniers ne sont pas pour autant interrompus mais simplement atténués. D’ailleurs une réunion de conciliation est tout de même nécessaire le 22 juillet 1917 dans les bureaux du préfet Second à Quimper entre les pêcheurs et les conserveurs pour fixer un prix minimum et s’entendre sur les apports. Mais dans l’ensemble les marins sardiniers sont très satisfaits des bénéfices réalisés, si bien que les activités de pêche sont intensifiées dans la mesure du possible. En effet, en 1918 les sous-marins rôdent toujours et seules les eaux littorales restent à peu près sûres ; et c’est ainsi que « par un singulier retour des choses [...] la petite pêche côtière est celle qui pendant cette guerre a prospéré le plus » [63]. Et les prix suivent : 50 F le mille en moyenne en 1916, 90 F en 1917. Les grands dundées thoniers ne s’aventurent plus en haute mer et se contentent de sillonner la zone côtière à la pêche de la sardine ou du maquereau.

46Pendant plus de quatre ans, les conserveurs de poissons travaillent beaucoup et dans les meilleures conditions possibles, en réalisant des bénéfices très importants. On assiste à une véritable ruée sur ce nouveau pactole que les consommateurs achètent avec frénésie. Les fabricants évoluent dans un contexte de paix sociale, de commandes massives et de protection commerciale inimaginable, alors que toute l’Europe se massacre aux frontières. Sur un tout autre plan, la Grande Guerre a aussi bouleversé les habitudes alimentaires des Français, des militaires essentiellement, mais aussi des civils. L’une des conséquences primordiales du conflit est que les « conserves de toutes sortes sont devenues familières à tous » [64]. Pour les fabricants de boîtes de sardines, cela signifie que dorénavant les ventes sont possibles sur un marché national jusque-là délaissé et alors que la concurrence ibérique a profité des années de guerre pour s’imposer sur les marchés extérieurs traditionnels d’où les usiniers français sont absents depuis 1917. Les fabricants se sont dorénavant résolument tournés vers la clientèle française parce que, d’une part, la demande est forte et, d’autre part, les exportations sont interdites depuis 1917. Concrètement, cela signifie que les fabricants ont appris en quatre ans à connaître, comprendre et pénétrer un nouveau marché. Ils s’appuient aussi pour la commercialisation et le transport de leurs produits sur le réseau ferré si peu emprunté avant la Grande Guerre : une nouvelle ère de fabrication et de commercialisation est inaugurée.


Date de mise en ligne : 01/12/2008

https://doi.org/10.3917/gmcc.219.0071

Notes

  • [1]
    L’Humanité, le 2 août 1914, « La crise des denrées », cité dans Capatti Alberto ; Le goût du nouveau, Paris, Albin Michel, 1989, p. 139.
  • [2]
    Pierre Darmon, Vivre à Paris pendant la Grande Guerre, Paris, Fayard, 2002, p. 166.
  • [3]
    Ad Finistère, 4 S 369, Bordeaux, le 19 septembre 1914, le ministre de la Marine au préfet du Finistère.
  • [4]
    Ad Finistère, 1 R 777, Douarnenez, le 23 octobre 1915, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [5]
    Industrie française de la conserve, no 3, mai 1915, p. 136. Cité dans Bruegel Martin, « Un sacrifice de plus à demander aux soldats : l’armée et l’introduction de la boîte de conserve dans l’alimentation française, 1872-1920 », Revue historique, no 596, juin 1996, p. 280.
  • [6]
    Ad Finistère, 1 R 760, Quimper, le 10 août 1915, le préfet.
  • [7]
    Ad Finistère, 1 M 142, Concarneau, le 20 mai 1918, le commissaire au préfet.
  • [8]
    Ad Finistère, 1 R 777, Douarnenez, le 24 mai 1915, Henri de Penanros et Cie.
  • [9]
    S. Berstein et P. Milza, Histoire de la France au XXe siècle, 1900-1930, Bruxelles, Complexe, 1999, p. 269.
  • [10]
    Ad Finistère, 1 R 777. Quimper, le 25 avril 1915, le préfet aux directeurs d’usines.
  • [11]
    Ibid., Quimper, le 22 mai 1915 ; le préfet au sous-secrétaire d’État à la Marine marchande.
  • [12]
    Ibid., Douarnenez, le 22 octobre 1915, Charles Chancerelle.
  • [13]
    Ibid., Nantes, le 26 mai 1915, Alfred Morio au préfet.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    Ibid., Nantes, le 2 octobre 1915, le général Ruffey.
  • [16]
    Ibid., Audierne, le 24 juin 1915.
  • [17]
    Ibid., Paris, le 23 novembre 1915, le ministre de la Guerre au sous-secrétaire à la Marine.
  • [18]
    Ibid., Concarneau, le 29 novembre 1915.
  • [19]
    Ad Finistère, 10 M 47, Quimper, le 10 mars 1915, le commissaire au préfet.
  • [20]
    Ad Finistère, 4 S 362, Quimper, le 21 mai 1915, l’administrateur Bronkhorst.
  • [21]
    Ibid., Quimper, le 22 juin 1915, l’administrateur Bronkhorst au préfet.
  • [22]
    SHM Brest, 3 P 2-14, Saint-Guénolé, le 3 octobre 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [23]
    Ad Finistère, 10 M 47, Quimper, le 8 juillet 1917, le commissaire spécial au préfet.
  • [24]
    Ad Vendée, 10 M 58, Les Sables, le 6 juin 1919, le commissaire.
  • [25]
    Ad Finistère, 10 M 47, Douarnenez, le 12 juillet 1917, le maréchal des logis Landreau.
  • [26]
    Ad Finistère, 1 M 149, Douarnenez, le 21 juillet 1917, le commissaire au préfet.
  • [27]
    Ad Finistère, 1 M 141, Concarneau, le 24 juillet 1917, le commissaire au préfet.
  • [28]
    Ad Finistère, 1 M 133, Quimper, le 30 septembre 1917, le préfet.
  • [29]
    Amieux frères, Origine et développement de la maison Amieux frères, plaquette commerciale, 1923.
  • [30]
    Industrie française de la conserve, no 3, mai 1915, p. 100. Cité dans Bruegel Martin, « Un sacrifice de plus à demander aux soldats : ... », article cité, Revue historique, no 596, juin 1996, p. 280.
  • [31]
    Archives Fédération de l’industrie d’aliments conservés, Paris, note de décembre 1918 de l’Union des syndicats de conserves de poissons.
  • [32]
    Service historique de la Marine, Brest, 3 P 2-15, Quimper, le 3 mai 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [33]
    Direction du service des pêches, sous-secrétariat d’État de la Marine marchande, avril 1923.
  • [34]
    Auxiliaires et territoriaux, les « pépères » selon Jacques Meyer, La vie quotidienne des soldats pendant la Grande Guerre, Paris, Hachette, 1966, p. 25.
  • [35]
    Ad Finistère, 1 R 778, Nantes, le 3 juillet 1916, l’officier supérieur chargé des sursis d’appel.
  • [36]
    Ad Finistère, 1 R 778, Paris, le 24 mars 1916, le sous-secrétaire d’État à la Marine marchande.
  • [37]
    Ad Finistère, 1 N 126, séance du Conseil général du Finistère, 1916.
  • [38]
    SHM Brest, 3 P 2-14, Quimper, le 15 mai 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [39]
    Ibid., Quimper le 19 mars 1917.
  • [40]
    Ad Finistère, 1 M 141, Concarneau, le 24 octobre 1917, le commissaire au préfet.
  • [41]
    Archives de l’Écomusée Lochrist-Inzinzac, Assemblée générale des actionnaires des Forges d’Hennebont, le 9 juin 1916.
  • [42]
    Archives du Service maritime de l’Équipement, Concarneau. Quimper, le 28 juillet 1917, l’ingénieur Leroux au directeur des Domaines.
  • [43]
    Ad Finistère, 1 R 778, Brest, le 20 février 1917, Le Gall au préfet du Finistère.
  • [44]
    Ibid., factures des 12 et 18 août 1916.
  • [45]
    Ad Morbihan, 4 S 792, Hennebont, le 13 janvier 1917, la direction des Forges d’Hennebont.
  • [46]
    Le procédé semble plus ancien puisque Brévans le mentionne dès 1906, époque à laquelle la Société brestoise prépare des sardines au naturel. Le poisson est préparé comme à l’habitude, étêté, étripé, salé puis placé cru dans les boîtes soumises à l’appertisation. Dans J. de Brévans, op. cit., Les conserves alimentaires, p. 201.
  • [47]
    Balland, Bulletin de l’Académie des sciences, 2e semestre 1914, note p. 641.
  • [48]
    J. Pérard, « Comment l’on prépare et l’on assure la conservation de la sardine », Bulletin de l’Instruction professionnelle et technique des pêches maritimes, 1913, p. 261. Cette méthode est toujours en usage au Maroc, et ce type de conserves, pour les avoir goûtées, est délicieux pour les harengs, ou les sardines, précédemment frits.
  • [49]
    Charles Raynouard, « Comment sont préparées les conserves de nos soldats », La Science et la vie, mai 1916.
  • [50]
    Appert, inventeur des conserves alimentaires, Paris, La Maison Appert, 1919, p. 20.
  • [51]
    Archives CCI Quimper, Quimper, août 1917.
  • [52]
    Ad Finistère, 4 S 362, Quimper, le 6 septembre 1918, le commissaire spécial au préfet.
  • [53]
    Ibid., Douarnenez, le 24 août 1915, l’administrateur Calen au préfet.
  • [54]
    Ad Finistère, 10 R 164. Marseille, le 2 mai 1917, réquisitions des huiles destinées aux conserveurs du Sud Finistère.
  • [55]
    Paris, le 2 mars 1917, Circulaire du ministère du Ravitaillement. Citée dans J.-B. Duroselle, La Grande Guerre des Français, 1914-1918, Paris, Perrin, 1994, p. 244.
  • [56]
    Archives FIAC, rapport du Syndicat national des conserveurs de poissons, Paris, le 5 mai 1938.
  • [57]
    La pêche maritime, 1934, p. 52.
  • [58]
    Archives CCI Quimper, séance du 27 juillet 1918.
  • [59]
    Ouizille Hubert, Les conditions économiques actuelles des industries sardinières françaises et portugaises, Paris, 1926, p. 21.
  • [60]
    Ad Finistère, 10 M 47, Quimper, le 6 juin 1918, le commissaire spécial au préfet.
  • [61]
    Ad Finistère, 1 M 141, Concarneau, le 6 juillet 1918, un citoyen de Concarneau à M. le préfet.
  • [62]
    SHM Brest, 3 P 2-15, Le Guilvinec, le 19 décembre 1916, l’administrateur de l’Inscription maritime.
  • [63]
    A. Dupouy, Pêcheurs bretons, Paris, de Boccard, 1920, p. 228.
  • [64]
    R. Legendre, Alimentation et ravitaillement, Paris, 1920, p. 306. Cité dans Martin Bruegel, « Un sacrifice de plus à demander aux soldats... », art. cité, Revue historique, no 596, juin 1996, p. 283.

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