Il en va de la Magna Carta comme de la bataille de Bouvines qui a lieu un an plus tôt : dans les deux cas, elles sont censées marquer le commencement d’une ère nouvelle. La bataille de Bouvines marquerait la naissance de la nation française et la Magna Carta celle du consentement à l’impôt. Il n’y a rien de faux dans ces affirmations.
Il est bien sûr possible d’affirmer que la France naît avec Bouvines. Mais on peut aussi la faire remonter, par exemple, au baptême de Clovis, le 25 décembre de l’année 496.
Une forme de consentement à l’impôt a déjà existé avant la Magna Carta. La fiscalité de la Grèce antique est principalement indirecte. Dans certaines cités, elle se fait par le système de la ferme. Les plus riches doivent s’acquitter de la liturgie, c’est-à-dire de l’entretien d’un service public. Le liturge est désigné par les magistrats sur la base du volontariat. Le consentement n’est donc pas totalement absent.
La doctrine, parce que cela correspond à une réalité, mais aussi pour des raisons de commodité, a choisi de retenir exclusivement la Magna Carta.
Le 12 juin 1215, après une courte guerre civile, un groupe de barons anglais parvient à imposer au roi d’Angleterre la Magna Carta. Pour certains interprètes, ce document constituerait la première affirmation du consentement à l’impôt. Le roi, pour augmenter certains prélèvements, doit désormais obtenir le consentement d’un Commun conseil. L’étude de la naissance de la Magna Carta, de son contenu ainsi que le débat relatif au sens qu’il convient de lui donner, montrent que la « Grande Charte » n’échappe pas à la règle…
Mots-clés éditeurs : Henri II, liturgie, Plantagenet, écuage, Magna Carta, commun conseil, bouvines, Philippe Auguste, parlementarisme, Runnymede, échiquier, consentement à l’impôt, Jean sans Terre, amercement, Édouard le confesseur, rebellion, charte des libertés
Mise en ligne 02/03/2021
https://doi.org/10.3166/gfp.2021.1.004