Notes
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Auteur correspondant : sbourdin@em-normandie.fr
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[1]
Avec des instruments financiers mobilisés par les villes tels que les Fonds FEDER ou encore les Fonds d’Initiative URBAN
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[2]
La mobilité sociale peut être considérée comme un moyen qu’a un individu pour améliorer ses conditions de vie et pour mieux exploiter les ressources que l’environnement lui met à sa disposition.
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[3]
Encore absente des discours à la fin des années 1980, la problématique de l’attractivité s’est imposée au cours des années 1990 (Hatem, 2004). Depuis, l’attractivité est devenue une problématique majeure des politiques urbaines. Houllier-Guibert (2012) relève que « depuis les années 2000, la recension de ce terme explose dans la littérature scientifique et journalistique ce qui explique que les services de développement économique des villes s’emparent si vivement de cette thématique ». Nous reprenons ici l’acception de Gérardin et Poirot (2010) qui appréhendent l’attractivité comme étant « la capacité d’un territoire à être choisi par un acteur comme zone de localisation - temporaire ou durable - pour tout ou partie de ses activités ». La notion d’attractivité est donc un construit relatif. Elle a transformé la ville en objet stratégique qui doit développer une politique d’image, une stratégie de différentiation/spécialisation et valoriser ses qualités.
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[4]
Perçues comme un ensemble de biens demandés par les « consommateurs » de l’espace urbain.
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[5]
Un « talent » est un travailleur au salaire élevé, (hautement) qualifié qui met sa créativité et son imagination au service de la production et de l’innovation.
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[6]
Voir http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/cities - Les principaux champs de cet Audit Urbain sont les suivants : la démographie, les aspects sociaux et économiques, la formation et l’éducation, l’environnement, les transports, la société de l’information, la participation citoyenne, la culture et des loisirs.
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[7]
qui propose uniquement la construction d’un indice synthétique qui est ensuite comparé à l’indice produit par Mercer
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[8]
Co-réalisé et co-financé par la Commission Européenne (et plus spécifiquement la DG Politique Régionale et Urbaine) et Eurostat.
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[9]
La procédure de Z-score transforme les valeurs de la série avec une distribution de moyenne nulle et un écart-type égale à 1. On a alors
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[10]
Joint European Support for Sustainable Investment in City Areas – Soutien européen conjoint à l’investissement durable dans les zones urbaines
Introduction
1 Les citadins sont de plus en plus concernés par leur qualité de vie et se posent la question « suis-je satisfait de vivre en ville et vis-je mieux, au regard des standards que j’ai choisis ? ». L’émergence du champ de l’économie du bonheur (voir Guillen-Royo et Velasco, 2009) témoigne de l’intérêt croissant de cette thématique en particulier pour les villes et leurs résidents. Aussi, dans un contexte de concurrence accrue entre les territoires, ces derniers doivent offrir des emplois et une qualité de vie qui puissent répondre aux attentes des habitants (Roy-Valex, 2006). De fait, les espaces urbains doivent continuellement stimuler leur compétitivité et leur attractivité pour survivre (Camagni, 2005). Dans ce cadre concurrentiel entre les espaces urbains, le rôle des pouvoirs publics est transformé (Lamarche, 2003). Ils appréhendent les territoires en termes de rivalité et doivent renforcer leurs avantages concurrentiels pour attirer les capitaux. Parmi ces avantages concurrentiels, la question du bien-être en ville a toute sa place et constitue un argument de plus en plus récurrent. Bourdeau-Lepage (2015) défend ainsi l’idée qu’il est essentiel d’envisager l’attractivité des territoires à travers la qualité de vie et les aménités qu’ils offrent.
2 L’Union européenne prête de plus en plus d’importance à la qualité de vie. Ainsi, le 6 juin 2015, dans un communiqué de presse de la DG Politique Régionale et Urbaine, la Commissaire européenne Corina Creţu annonçait « nous voulons améliorer durablement la situation économique et la qualité de vie de tous ses habitants, où qu’ils vivent ». L’émergence d’une politique urbaine à l’échelle européenne [1] a donné un nouvel élan sur la nécessité de surveiller le développement et la mise en œuvre de cette politique via notamment des indicateurs comparables sur la qualité de vie. C’est dans ce cadre que la Commission européenne a porté le projet de la création d’un Audit Urbain dont l’objectif est d’évaluer les perceptions de la qualité de vie en ville par les habitants. Cette enquête aborde plusieurs domaines tels que l’emploi, le logement, l’environnement, les transports, la culture et les services urbains. Les variables choisies rejoignent en partie les travaux de Sen (1993) selon lesquels un territoire doit être en mesure d’offrir à la fois une « capacité d’être » (la liberté de se loger aisément, de se maintenir en bonne santé, de bénéficier de la sécurité et d’un cadre de vie agréable) et une « capacité d’agir » (la liberté de se déplacer, d’accéder à l’éducation, au marché du travail et à des loisirs variés).
3 Beaucoup d’études sur les questions de la qualité de vie utilisent indépendamment les termes de bien-être et de qualité de vie, menant alors à des ambiguïtés. Pourtant, les travaux séminaux de Smith (1973) proposaient une distinction de ceux-ci. Alors que le bien-être fait référence à des conditions de vie objectives applicables à une population, la qualité de vie doit être plus correctement limitée à l’évaluation subjective par les individus de leur vie. L’objet de notre article est justement de partir de cette distinction, afin de se concentrer sur la mesure de la qualité de vie à l’échelle de plusieurs villes européennes. Il s’agit alors de prendre en compte les expériences et les aspirations des habitants en termes de qualité de vie plutôt que de s’intéresser à la mesure objective des besoins des individus et des ressources qu’ils ont à leur disposition.
4 Par ailleurs, de nombreux travaux scientifiques ont traité de cette problématique au sein d’une ville ou à l’échelle d’un pays mais on ne retrouve pas dans la littérature d’étude comparative à l’échelle des villes de l’UE proposant une étude de leurs profils. Aussi, grâce aux données issues de l’Audit Urbain, l’objectif de cet article est de fournir un cadre d’analyse de la perception de la qualité de vie des villes à l’échelle européenne. Au-delà, nous souhaitons également nous interroger sur l’existence d’une différenciation spatiale de la qualité de vie perçue par les habitants. Afin de répondre à ces questions, dans un premier temps, nous construirons un indice synthétique puis, nous procèderons à une analyse typologique des villes européennes à partir des données de l’enquête de l’Audit Urbain pour 2006 et 2012.
5 L’article est organisé comme suit : dans la section 2, nous présenterons le cadre théorique et conceptuel de notre analyse ; la troisième section exposera les questionnements méthodologiques, les choix effectués ainsi que les données ; enfin, la quatrième section s’attachera à mettre en lumière et analyser les principaux résultats.
1 – Qualité de vie et perception des habitants : une approche par la science régionale
1.1 – Définir et mesurer la qualité de vie en milieu urbain : de la nécessité d’une approche territorialisée
6 Dans la littérature scientifique, on retrouve de nombreux classements des villes traitant de la qualité de vie. Des études ont également été menées par diverses organisations nationales et internationales qui publient des classements de villes en fonction d’indicateurs de qualité de vie plus ou moins pondérés, notamment autour de thématiques générales liées à l’environnement ou au développement durable. On retrouve une large production d’indices et classements effectués par les ONG et les revues anglophones, l’objectif étant souvent de faire du marketing territorial. Aussi, les premières places obtenues dans ces classements sont révélatrices d’une certaine attractivité territoriale et restent un atout considérable qu’elles tentent de valoriser auprès des investisseurs, des médias mais aussi du grand public.
7 La qualité de vie est au croisement de plusieurs disciplines dont la santé, le bien-être au travail, l’environnement ou les sciences humaines et sociales (Ruzevicius, 2013). En économie, la qualité de vie en ville – et de manière non distinctive le bien-être – a commencé à être abordée au cours des années 1960-1970 avec des mesures quantitatives liées au PIB, PNB et au taux de chômage (Liu, 1976). En réponse à cette approche quantitative, des chercheurs ont commencé à s’intéresser aux expériences individuelles et par nature subjectives des habitants en associant des facteurs monétaires tels que le PIB, le niveau des prix et le coût de la vie à la notion de bien-être social (Lambiri et al., 2007). Cependant, la pensée économique s’est peu à peu éloignée de cette vision de la qualité de vie qui était encore trop simpliste vers des définitions plus complexes et multidimensionnelles. À cet effet, une contribution majeure provient des travaux du prix Nobel Amartya Sen (1987, 1993, 1997). Il reconnaît le revenu et la consommation en tant que composants de la qualité de vie, mais place au centre du concept la possibilité et la liberté (ce qu’il appelle « capabilité ») des individus à mobiliser les opportunités qui s’offrent à eux concernant la vie qu’ils souhaitent mener. Au début des années 2000, en élaborant des mesures de la qualité de vie, Dasgupta (2001) accorde une attention particulière à l’environnement naturel, illustrant la façon dont il peut être incorporé plus généralement dans le raisonnement économique. Une autre contribution importante et plus récente (Stiglitz et al., 2009) renforce cette nouvelle tendance dans les sciences sociales, prônant la nécessité de nouveaux indicateurs pour mesurer la richesse autrement que par le PIB.
8 C’est ainsi qu’aujourd’hui, des chercheurs s’intéressent davantage au bien-être à partir des travaux « séniens » (tels que Slottje, 1991 ; Chiappero Martinetti, 2000 ; Bourdeau-Lepage et Tovar, 2011 et 2013 ; Benjamin et al., 2014 ; Bourdeau-Lepage et Carré, 2016). Ils y incluent une approche territoriale et davantage multidimensionnelle du bien-être et tentent de l’opérationnaliser par l’utilisation d’indicateurs et la construction d’indices composites (Jany-Catrice, 2016). Loubet et al. (2011) introduisent la notion de capacités territoriales comme des « opportunités individuelles liées à l’inscription des individus dans le territoire ». Bourdeau-Lepage et al. (2015) vont plus loin en produisant un indice de bien-être subjectif qui prend en compte les éléments territoriaux constitutifs du bien-être des individus (liés à l’environnement, aux services disponibles, à l’activité économique, à l’emploi, à la sécurité, à la vie sociale, etc.), à partir des déclarations des individus. Ainsi, ils sont capables de déterminer les préférences des individus (pour atteindre le niveau de bien-être optimal) et d’évaluer la capacité d’adaptation des individus en matière de préférences. Plus récemment, la production par l’OCDE d’un indicateur de qualité de vie à l’échelle des États (2011) et des régions (2014) constitue un nouveau pas vers les mesures territorialisées et objectives de la qualité de vie.
9 D’autres études scientifiques ont inclus la dimension environnementale dans la qualité de vie. On pense notamment aux travaux séminaux de Dasgupta (2001) qui introduisent la notion de capital naturel dans le concept de qualité de vie. Dans le modèle conceptuel développé par Mitchell (2000), la qualité de vie renvoie à la santé, à l’environnement, aux ressources naturelles, au développement personnel et à la sécurité. Il faut noter que dans son approche, la dimension économique est complètement exclue alors qu’elle peut être considérée comme l’un des trois principaux piliers si l’on reprend les travaux de Shafer et al. (2000).
10 Malgré le consensus académique sur le fait que la qualité de vie doit être appréhendée sous différents angles thématiques, les indicateurs et variables utilisées dépendent beaucoup de l’échelle d’analyse, de la méthodologie, de la disponibilité des données. Les études mesurant la qualité de vie urbaine, existent en grande quantité et il serait vain d’en avoir une vision synoptique. Néanmoins, il ressort de ces analyses que les variables de qualité de vie sont ajoutées aux variables économiques comme facteurs influant sur les décisions d’implantation du capital mobile et sur la croissance urbaine. Il est possible de regrouper les différents indicateurs identifiés en six catégories principales : (i) l’environnement naturel (climat, état de l›environnement naturel, etc.), (ii) l’environnement bâti (type et état du bâtiment, etc.), (iii) l’environnement socio-politique (vie communautaire, participation citoyenne, etc.), (iv) l’environnement économique local (revenu, chômage, etc.), (v) l’environnement culturel et des loisirs (musées, restaurants, etc.), (vi) l’environnement des politiques publiques (sécurité, santé, éducation, etc.).
11 Aussi, notre proposition s’inscrit dans des préoccupations qui ont commencé à faire leur apparition au sein de la littérature en science régionale. Ces dernières mettent en évidence la nécessité d’une approche multidisciplinaire, multidimensionnelle et territorialisée de la réflexion actuelle sur le concept de qualité de vie. Ce dernier inclus des composantes environnementales et la qualité des lieux d’une part, la prise en compte du capital économique et social des individus d’autre part (Figure 1). L’approche de la qualité de vie en science régionale a la particularité d’intégrer à la fois les aspirations et les expériences (sphère subjective), et les besoins et les ressources (sphère objective) dans une perspective territoriale. Aussi, nous définissons la qualité de vie comme la congruence entre des ressources offertes par l’environnement d’un individu et les besoins exprimés par celui-ci. Cette congruence est conditionnée par les capacités et les libertés qu’ont les individus de mobiliser les ressources disponibles et par les expériences qu’ils ont de leur environnement. Dans ce cadre, cette approche peut consister à évaluer la perception de la qualité de vie et à s’interroger sur sa dimension territoriale, c’est l’objet même de cet article.
Modèle conceptuel de la qualité de vie : une approche par la science régionale
Modèle conceptuel de la qualité de vie : une approche par la science régionale
12 Dans notre approche, nous nous intéresserons aux mobilités géographiques et non aux mobilités sociales [2]. Les mobilités géographiques font référence à des trajectoires d’individus qui sont conditionnées par leur capital social et économique. Ainsi, si la capabilité d’un habitant lui permet de changer de ville et qu’il estime par ailleurs que sa qualité de vie pourrait-être meilleure dans une autre ville – autrement dit dans un autre milieu dans lequel la qualité des lieux serait supérieure –, alors il va activer son capital en vue d’améliorer sa satisfaction personnelle. Un individu peut décider du style de vie qu’il veut vivre (Dreze et Sen, 1995) et donc de là où il veut vivre. Ceci renforce l’idée de l’importance pour les pouvoirs publics de mettre en œuvre des politiques visant à maintenir voire attirer sur leurs territoires les individus en jouant sur leur perception.
1.2 – Le contexte socio-économique et le territoire comptent dans l’évaluation de la qualité de vie
13 La plupart des études empiriques sur la qualité de vie utilisent deux types d’indicateurs (qualitatifs et/ou quantitatifs) pour l’évaluer (Pacione, 2003 ; Santos et Martins, 2007). Plusieurs approches ont été développées et dépendent bien souvent des champs disciplinaires des auteurs ayant produit des indices et/ou modèles sur la qualité de vie. L’approche méthodologique la plus commune pour mesurer la qualité de vie est l’approche sociale des indicateurs (Allardt, 1976 ; Erikson, 1987 ; Noll, 2004 ; Andrews et Withey, 2012). Dans ce type de travaux, plusieurs indicateurs sont identifiés afin d’englober les multiples dimensions de la qualité de vie. Ces différents indicateurs sont ensuite agrégés en un indice unique de qualité de vie. Les économistes quant à eux utilisent une approche selon la méthode des prix hédoniques (Van Praag et Ferrer-i-Carbonel, 2008 ; Andreoli et Michelangeli, 2015). Ils cherchent alors à identifier quelles sont les préférences des agents économiques – pour un ensemble d’attributs et de ressources disponibles caractérisant une zone urbaine – qui prévalent à la décision d’implantation. La principale hypothèse est que les ménages sont en compétition pour se localiser dans des zones dotées d’un certain nombre d’aménités et sont prêts à payer plus cher pour habiter dans des villes où la qualité de vie est meilleure. Une approche alternative, plus communément adoptée par les psychologues, est basée sur une évaluation subjective de la qualité de vie (Argyle, 1996 ; Diener et al., 2015). Il s’agit alors de demander directement aux habitants de noter leur propre qualité de vie au regard des domaines privilégiés qui la composent. Dans notre étude, nous avons prêté attention non pas aux attributs des lieux (données locales quantifiables – variables objectives rattachées au concept de bien-être) mais à la conception individuelle de la qualité de lieux par les habitants (données à partir d’une enquête – variables subjectives rattachées au concept de qualité de vie). Comme l’ont démontré Diener et Suh (1999), les indicateurs subjectifs constituent des mesures valides de ce que les habitants perçoivent comme important pour leur bonheur et leur bien-être.
14 La qualité de vie est un concept normatif. Elle peut être vue comme bonne ou mauvaise, s’améliorant ou se détériorant, devenir meilleure dans certains cas que dans d’autres (Wingo et Evans, 2013). On ne trouve pas dans la littérature académique d’accord sur la définition de variables représentant la qualité de vie (Mitchell et al., 2001 ; Pacione, 2005). La plupart des études l’évaluant adoptent un grand nombre d’indicateurs sur des questions telles que la santé, le logement, le travail, les loisirs ou encore la sécurité. Mais, ces recherches révèlent bien souvent que la qualité de vie est difficilement objectivable et que le choix des indicateurs, leur traitement et leur interprétation impliquent une forme de jugement puisqu’elles font référence à des perceptions.
15 De même, plusieurs travaux (Allardt, 1976 ; Diener et Suh, 1997 ; Andrews et Withey, 2012) ont montré comment la qualité de vie pouvait être à la fois objective et subjective pour les citoyens et dépendait beaucoup du contexte. Par exemple, une personne peut vivre dans de bonnes conditions objectives, mais percevoir subjectivement sa qualité de vie comme mauvaise. À l’inverse, une personne peut considérer sa qualité de vie bonne d’un point de vue subjectif, en dépit de mauvaises conditions de vie objectives. C’est le cas notamment des personnes vivant dans un environnement social défavorable qui ont tendance à être moins exigeantes en termes de préférences et d’objectifs (Hagerty, 1999 ; Bourdeau-Lepage et Tovar, 2011). Lorsque les conditions objectives et le sentiment subjectif sont bons, on peut parler de bien-être. Ainsi, la qualité de vie est dépendante du contexte, qu’il soit social ou culturel, et sa perception varie dans le temps (Mitchell, 2000). Elle est le produit d’une comparaison de situations, une comparaison entre le réel et la situation désirée et une comparaison avec la situation des autres.
16 Bien que les besoins exprimés en termes de qualité de vie soient relativement similaires – au moins dans les pays développés à économie de marché –, chaque contexte territorial influe sur la manière de les prioriser. Ainsi, au-delà des variations dans les conceptions individuelles de la qualité de vie en fonction du contexte socio-économique (abordées dans le précédant paragraphe), la conception de la qualité de vie varie également dans l’espace. D’une part, on relève des variations d’ordre géographique comme l’ont notamment montré Pittau et al. (2010) sur le cas de l’UE. Les auteurs expliquent que la satisfaction de la vie est davantage conditionnée par des facteurs économiques dans les régions moins développées alors que dans les régions riches les habitants se focalisent davantage sur les facteurs culturels. D’autre part, deux études récentes (Berry et Okulicz-Kozaryn, 2009 et 2011 ; Lenzi et Perucca, 2016) montrent que les disparités en termes de satisfaction que les habitants tirent de leur vie varient selon que l’on habite en (i) ville ou à la campagne ou (ii) dans une plus ou moins grande ville. Enfin, Rodríguez-Pose et Maslauskaite (2012) montrent quant à eux que les facteurs contribuant au niveau de bonheur varient peu entre les pays de l’Europe de l’Ouest et de l’Est malgré quelques infimes différences.
1.3 – De la justification de la prise en compte de la qualité de vie : entre aspirations individuelles des habitants, attractivité territoriale et considérations politiques
17 La mondialisation – et la libéralisation du commerce international qui y est associée – a intensifié la concurrence entre les villes (Taylor, 1997 ; Ewers, 2007 ; Sassen, 2011). Cependant, comme le montrent les travaux de Gibbs (1997) sur une centaine de villes au Royaume-Uni, cette concurrence interurbaine s’est souvent réalisée sous l’angle de la recherche d’une plus grande compétitivité économique au détriment de la promotion de facteurs liés à la qualité de vie, qu’elle soit considérée d’un point de vue environnemental ou social. Dans un contexte de mobilité accrue du capital, Rogerson (1999) a montré comment la qualité de vie avait été trop souvent réduite à un outil de marketing urbain au service de la compétitivité économique. La qualité de vie est alors perçue comme un élément favorisant l’attractivité [3] des villes. Les investissements de plus en plus conséquents aujourd’hui consentis par les villes au service du marketing urbain (Tremblay et Tremblay, 2006 ; Cusin et Damon, 2010 ; Bourdeau-Lepage et Gollain, 2015) témoignent de l’intérêt des villes dans les classements et palmarès qui dominent les médias (Hall, 1998). Ceci renforce l’hypothèse que les facteurs concourant à la qualité de vie font partie intégrante des déterminants des choix de localisation du capital mobile. Ainsi, de nombreuses études ont montré comment la qualité de vie et le niveau de durabilité d’une ville influençaient en partie la décision de localisation dans une ville plutôt qu’une autre. Plusieurs chercheurs (Olszak, 2010 ; Deisting et Paumard, 2012 ; Musson, 2015) expliquent ainsi que les politiques de développement durable qui touchent à la qualité des territoires peuvent influencer les facteurs de d’implantation et l’attractivité territoriale. En conséquence, augmenter le niveau de satisfaction des habitants constitue une vraie stratégie pour attirer de nouveaux investissements et de nouvelles personnes. Glaeser et al. (2001) ont mis en exergue le rôle joué par les « forces hors du marché » telles que les aménités urbaines [4] pour expliquer la croissance urbaine. De son côté, Florida (2002) explique quant à lui l’importance pour une ville d’offrir de nombreux services et biens de qualité pour faire venir une main-d’œuvre hautement qualifiée. Dans un contexte actuel d’économie mondialisée, attirer de nouveaux « talents » [5] (Florida, 2000) est déterminant pour développer une économie à forte valeur ajoutée. Or, ces « talents » ont des capabilités importantes. Il s’agit de personnes particulièrement mobiles et attirées par les villes qui offrent un environnement urbain et des opportunités économiques en conséquence (Florida, 2002). Les travaux de Richard Florida ont néanmoins été critiqués (Trembay et Chicoine, 2008) notamment sur le fait qu’il n’y ait pas forcément de distinction de classes (créative ou autres) dans la recherche de quartiers/de villes où la qualité de vie est élevée.
18 Une autre raison à l’origine de l’intérêt croissant pour la question de la qualité de vie en ville est liée à des considérations politiques. En effet, les décideurs et les aménageurs sont bien souvent confrontés à des problèmes relatifs à la conciliation entre les activités économiques, l’environnement et la cohésion sociale (Dissart et Deller, 2000 ; Massam, 2002 ; Higgins et Campanera, 2011 ; Khalil, 2012). De ce point de vue, la possibilité de mesurer la qualité de vie et de réaliser des comparaisons de villes à différentes échelles – locales, nationales, européennes, mondiales – est perçue comme un outil politique. Parmi les objectifs poursuivis par l’UE, on retrouve dès 1997 une publication de la Commission « Vers une stratégie urbaine intégrée dans l’UE » qui rappelait l’intérêt de prendre en compte la qualité de vie des citoyens. Deux ans plus tard, le Comité des Régions publiait un rapport soulignant la nécessité de mettre en place un système d’indicateurs locaux et régionaux de la qualité de vie destinés à informer les décideurs politiques. Dans la même perspective, l’objectif de la stratégie de l’UE pour le développement durable, adoptée en 2001, était d’améliorer la qualité de vie des générations actuelles et futures. En particulier, elle visait à assurer que la croissance économique, la protection de l’environnement et l’intégration sociale allaient de pair. Cette stratégie ajoutait la dimension environnementale à la Stratégie de Lisbonne. Il s’en est suivi des politiques européennes spécifiques pour les villes avec les programmes URBAN I (1994-1999), URBAN II (2000-2006), URBAN III (2007-2013) et la politique urbaine pour des villes intelligentes, durables et inclusives (2014-2020). Ces programmes sont liés à des Fonds structurels européens, et visent à résoudre non seulement les problèmes économiques, sociaux et environnementaux. C’est dans ce cadre qu’a été produit le programme de l’Audit urbain [6] visant à collecter des données comparables sur la qualité de vie.
2 – Choix méthodologiques et données
2.1 – Une approche méthodologique en deux temps : construction d’un indice synthétique et réalisation d’une analyse typologique
19 Comme nous l’avons déjà souligné, la qualité de vie est un concept qui peut être mesuré par la synthèse de plusieurs indicateurs qui sont bien souvent fortement corrélés entre eux. Nous reprenons l’acception de Wingo et al. (1979) selon laquelle la qualité de vie à un niveau individuel est le niveau de satisfaction d’un individu atteint à la suite de la consommation de produits du marché, de loisirs, de biens publics et d’autres caractéristiques (physiques et sociales) de l’environnement dans lequel il se trouve. La mise en place d’une enquête sur la qualité de vie en milieu urbain trouve un intérêt pour les décideurs politiques dans le sens où elle permet de recueillir des retours/réactions des citoyens sur les politiques publiques déployées en faveur de l’amélioration de la qualité de vie en ville (Santos et Martins, 2007). Elles facilitent également la définition des politiques et l’établissement d’objectifs à long terme partagée par la communauté. Outre ce type de valeur ajoutée, il est important de mettre en évidence la pertinence d’utiliser des mesures subjectives dans les cas où les indicateurs objectifs sont limités dans leur capacité à capter les réalités. Par exemple, lorsque l’on s’intéresse à la qualité du logement, il semble plus facile de mesurer le degré de satisfaction exprimé par les habitants que de tenter de la mesurer par l’intermédiaire d’un ou plusieurs paramètres liés à l’habitat.
20 À partir des données récoltées (cf. partie II.2.), nous avons développé une méthodologie en deux temps. Premièrement, nous avons construit un indicateur synthétique de qualité de vie avec les données disponibles aux deux dates (2006 et 2012). Deuxièmement, une analyse typologique a été menée afin de caractériser les différentes villes européennes.
21 Tout d’abord, une cartographie de l’indice synthétique a été réalisée et a permis de déterminer s’il existait une configuration spatiale particulière de la qualité de vie dans les villes européennes. L’indicateur composite est un outil utile lorsque l’objectif est d’examiner la qualité de vie des villes dans une démarche comparative. Par exemple, dans la perspective de l’Union européenne, cet indicateur composite peut être utile pour identifier là où une intervention en termes de politiques publiques européennes (ou locales) semble la plus nécessaire pour augmenter la qualité de vie des villes concernées (Hagerty, 2001). Enfin, la comparaison à deux dates a permis d’identifier des trajectoires de villes (déclin relatif, stabilité, progression).
22 Néanmoins, même si un indicateur composite a le mérite de fournir une représentation simplifiée et donc plus facilement communicable, Reynard (2016) rappelle qu’il comporte des limites. Premièrement, le risque est de considérer que les composantes de l’indicateur sont interchangeables, autrement dit, qu’une dimension peut compenser une autre. Or, la dimension territoriale compte ; de nombreuses villes peuvent être en retard sur certaines thématiques et très en avance sur d’autres. Deuxièmement, une autre limite est d’interpréter l’indicateur composite comme une forme de classement au risque de masquer des réalités complexes et une diversité des situations entre les villes. Enfin, l’indicateur synthétique ne nous dit rien sur les mécanismes qui participent à la formation d’un sentiment de bien-être ou de mal-être des habitants. C’est pour cela que, dans un second temps, nous avons procédé à une analyse typologique constituée d’une ACP (Analyse en Composantes Principales) suivie par une CAH (Classification à Ascendante Hiérarchique) pour l’année 2012. La disponibilité de données supplémentaires pour 2012 (Tableau 2) nous a permis d’enrichir l’étude. En effet, de nouvelles questions de l’enquête portaient spécifiquement sur le degré de satisfaction quant aux aménités proposées. Or, comme le souligne Bourdeau-Lepage (2015), l’attractivité des territoires doit être appréhendée à travers la qualité de vie et les aménités qu’ils offrent. Pour notre analyse typologique, nous avons retenu les modalités de réponse concernant un degré de satisfaction très élevé (tout à fait d’accord ou très satisfait). Nous avons donc pu proposer une géographie de l’attractivité des villes européennes par rapport à leur qualité de vie.
2.2 – Les données : les dimensions de la qualité de vie choisies et les villes européennes concernées
23 Plusieurs études comparatives existent sur la qualité de vie et ce à différentes échelles. On citera pour les plus récentes par exemple celles concernant les bassins de vie français (Reynard, 2016), les régions ou les États (cf. OCDE, 2011 et 2014), les villes américaines (Portney, 2013) ou bien encore les grandes métropoles mondiales (le classement annuel de Mercer). Néanmoins, à notre connaissance, une seule étude (Morais et al., 2013) propose une telle perspective comparative pour les villes européennes. Nous allons d’ailleurs plus loin que les travaux de Morais et al., (ibid.) [7] en proposant une analyse typologique et territorialisée de la qualité de vie dans les villes européennes.
24 Les traitements ont été réalisés à partir des données de l’Audit Urbain [8] pour deux dates (2006 et 2012), et plus spécifiquement de l’enquête de perception des citoyens. Environ 500 citoyens ont été interrogés dans chaque ville. L’enquête a été menée dans toutes les capitales de l’Union Européenne ainsi que dans une à six autres villes. Le nombre de ces villes est proportionnel à la taille du pays afin que cette enquête soit la plus représentative possible. Le choix de ces villes est lié à trois variables, à savoir le poids de cette ville au sein de l’État concerné, la répartition homogène sur le territoire mais également le taux de retour sur les différents questionnaires. Les individus interrogés sont les citoyens résidents de ces villes et ayant une maîtrise suffisante de la langue nationale pour répondre au questionnaire. Le principe d’échantillonnage appliqué dans toutes les villes est probabiliste. Dans chaque ménage, le répondant était une personne âgée de 18 ans et plus, choisie aléatoirement selon la méthode de la date d’anniversaire la plus récente. L’institut de production de l’enquête (TNS) a développé ses propres capacités de production d’échantillon basée sur la génération aléatoire de numéros de téléphone.
25 Au regard des données disponibles et complètes, notre échantillon porte sur 70 villes européennes (Tableau 1). Au travers des questions posées, il s’agissait de proposer des indicateurs qui tentent de mesurer la qualité de vie – et par là l’attractivité des villes – en dehors des paramètres habituels économiques et démographiques, en particulier parce que les statistiques macro-économiques ne représentent pas toujours ce que les personnes perçoivent vraiment de l’état de leur situation/vie.
Échantillon des villes européennes
Échantillon des villes européennes
26 Les variables utilisées dans l’enquête de perception de la qualité de vie sont décrites dans le tableau 2. Nous les avons regroupées en cinq grandes dimensions résultant des six catégories évoquées dans la partie I.1. Elles font référence aux « capacités d’être » et/ou « d’agir » (Sen, 1993). Pour certaines de ces variables, il s’agit de ressources mises à disposition de chaque habitant qu’il va pouvoir ensuite actionner en fonction de ses propres capabilités (commerce de proximités, espaces verts, aménités sportives ou culturelles). Par référence aux mobilités géographiques et à l’accessibilité (Figure 1), lorsqu’il en a les capacités et la liberté, un individu va pouvoir parcourir une plus ou moins grande distance pour y parvenir. Pour d’autres variables, il s’agit davantage de perceptions que les habitants ont vis-à-vis de leur environnement, autrement dit faisant référence à leur vécu (beauté des rues, état des rues et des bâtiments, qualité de l’air, niveau de bruit) et leurs pratiques socio-spatiales (utilisation des transports publics). D’autres variables font davantage référence au capital social et économique (logement, emploi, éducation, santé) et sont déterminants pour les habitants pour actionner leurs capacités. Enfin, d’autres variables relèvent du niveau de satisfaction des habitants face aux actions des politiques publiques (sécurité, santé, éducation, engagement dans le développement durable, transports). Ces dernières sont particulièrement importantes car elles révèlent la capacité qu’ont les politiques publiques et urbaines mises en place à satisfaire les besoins exprimés par les habitants (principe de congruence). Elles sont à mettre en lien avec l’évaluation de l’administration publique par les habitants (service administratifs, confiance). À ce sujet, Rodríguez-Pose et Maslauskaite (2012) ont montré que pour les régions d’Europe centrale et orientale, le niveau de bonheur dépendait de facteurs institutionnels tels que le degré de corruption des institutions.
Variables de l’analyse
Variables de l’analyse
3 – Une différenciation spatiale de la qualité de vie dans les villes européennes
3.1 – Une meilleure perception de la qualité de vie dans les villes du Nord et de l’Ouest de l’Europe
27 Les premières recherches produisant un classement statistique de villes sur des facteurs liés à la qualité de vie et définissant l’« habitabilité d’un lieu » remontent aux travaux de Smith (1973) et Liu (1976) sur les aires métropolitaines américaines. Ces classements sont à l’origine d’une compétition accrue entre les villes. Cette dernière reflète non seulement leur capacité actuelle à s’engager dans un monde globalisé, mais est également une fonction de leur héritage, produisant ainsi un modèle spatialement différencié de la compétitivité et de l’attractivité (Rogerson, 1999). La construction d’un indicateur composite synthétique s’explique par le besoin de disposer d’une information simple, facile à retenir ou à communiquer et qui permet de faire des comparaisons ou d’établir des palmarès entre les pays et les villes (Gadrey et Jany-Catrice, 2005).
28 Afin de rendre compte d’un indice de qualité de vie robuste et significatif, il est indispensable de procéder en trois étapes (Parris et Kates, 2003). D’abord, la normalisation est classiquement utilisée afin de rendre les variables comparables. Ensuite, les indicateurs normalisés sont ensuite agrégés à l’aide de formules spécifiques (moyenne arithmétique par exemple). Enfin, ils sont éventuellement pondérés si l’on estime que certains d’entre eux doivent avoir un poids plus important que d’autres. Pour notre étude, nous avons normalisé chaque indicateur en transformant les valeurs des variables sur une nouvelle échelle unique (de 0 = pire à 100 = meilleur) à partir d’une procédure de normalisation min-max. Nous avons préféré cette procédure à celle du Z-score [9] dans le sens où elle constitue une approche normative, autrement dit les valeurs maximales correspondent à des objectifs à atteindre en termes de qualité de vie.
29 Soit xi la valeur d’un indicateur pour une ville x□ ; xmin la valeur la plus faible pour un indicateur x□ ; xmax la valeur maximale pour un indicateur x□ et xi norm le score obtenu par une ville pour un indicateur x□ .
31 Une autre interrogation méthodologique souvent soulevée lors de la construction d’un indice synthétique concerne l’importance à accorder aux différentes dimensions qui le composent. De sorte que le choix ne soit pas arbitraire, une possibilité qui aurait pu s’offrir à nous aurait été de considérer l’avis des enquêtés sur l’importance qu’ils accordent aux différentes dimensions (Afsa et Marcus, 2008). Mais cette technique peut se révéler également instable dans le sens où les perceptions des individus changent dans le temps et selon les situations/contextes. Nous avons fait le choix d’une équipondération. Pour agréger les données, nous avons réalisé une moyenne arithmétique simple des indicateurs normalisés. Les composantes étant comprises sur une échelle de 0 à 100 et la pondération étant égale à 1 par défaut, l’indice synthétique de qualité de vie est centré-réduit de sorte à ce qu’il soit compris entre 0 et 100 et qu’il soit comparable aux deux dates ; un score élevé de cet indice correspond à une ville où les habitants sont en situation de bien-être.
32 Le tableau 3 représente le classement des dix premières et dix dernières villes du classement réalisé à deux dates. Au-delà des similitudes entre la première et dernière partie du classement entre 2006 et 2012, la cartographie (Figure 2) de l’indice composite corrobore l’idée de l’existence d’une différenciation spatiale de la perception de la qualité de vie en Europe. On retrouve en tête des villes plutôt localisées dans l’Europe du Nord-Ouest. Ceci s’explique en partie par leur antériorité dans leur investissement sur les questions de durabilité urbaine et de prise en compte de la qualité de vie des citoyens.
Classement des villes de l’UE en fonction de la qualité de vie perçue par les habitants
Classement des villes de l’UE en fonction de la qualité de vie perçue par les habitants
Cartographie de l’indice synthétique de la perception individuelle de la qualité de vie
Cartographie de l’indice synthétique de la perception individuelle de la qualité de vie
33 À l’inverse, en fin de classement, on retrouve les villes d’Europe centrale et orientale et de l’Europe du Sud. Les villes de l’Est en pleine reconversion industrielle et en r(é)aménagement urbain post-chute du mur de Berlin n’ont jamais mis au cœur de leurs préoccupations politiques la qualité de vie urbaine. Néanmoins, aujourd’hui, des politiques embryonnaires mais ambitieuses se dessinent. Elles sont souvent abondées par des Fonds européens de type URBAN ou JESSICA [10]. Par exemple, dans son projet de revitalisation et de développement urbain déposé en 2014, Budapest touchera 200 millions d’euros sur un budget d’un milliard d’euros. L’amélioration et la modernisation des infrastructures municipales sont des conditions préalables à la poursuite du développement économique de la ville et une condition préalable pour augmenter son attractivité pour les investisseurs. Le projet devrait à la fois améliorer la qualité de vie de ses citoyens, améliorer l’environnement urbain et aider à valoriser les ressources existantes telles que les sites culturels et historiques. On peut cependant souligner qu’au-delà de ces « effets vitrines », les villes des pays d’Europe Centrale et Orientale (PECO) ont encore du chemin à faire, surtout dans la gestion des déchets, la qualité de l’air et les aménagements urbains verts. Une des difficultés également souvent rencontrée pour ces villes est le manque d’infrastructures sanitaires et un sentiment d’insécurité élevé. Les villes situées en fin de classement sont aussi celles où les habitants ont été particulièrement touchés par la crise économique en Europe ; on soulignera par exemple l’entrée en 2012 dans le bas du classement d’Athènes.
34 Il est également possible de conclure à une géographie de l’évolution de la qualité de vie lorsque l’on compare les évolutions positives ou négatives dans le classement des villes (Tableau 4). En effet, les villes ayant connu la plus forte dégradation en termes de qualité de vie sont celles situées dans les pays ayant été le plus sévèrement touchés par la crise. Ceci rejoint ainsi les travaux identifiés dans la littérature mettant en avant l’influence de la perception de leur environnement extérieur sur la situation personnelle des individus. À cet effet, le Prix Nobel d’économie Angus Deaton a également expliqué comment la qualité de vie des Américains a été affectée par la crise économique (Deaton, 2012).
Évolution du classement des villes en fonction de la qualité de vie perçue par les habitants entre 2006 et 2012
Évolution du classement des villes en fonction de la qualité de vie perçue par les habitants entre 2006 et 2012
35 L’interprétation de l’indice synthétique peut être envisagée de manière plus fine et décomposée de celui-ci. Il s’agit là de tester l’hypothèse selon laquelle les villes enregistrant des scores similaires ont des profils similaires et si l’effet territorial compte. Pour cela, nous avons décomposé l’indice synthétique en fonction des différentes variables pour deux villes situées dans le haut du classement d’Europe de l’Ouest, d’Europe centrale et orientale et d’Europe méditerranéenne (Figure 3). Il semblerait tout d’abord que les profils sont globalement similaires et que les mêmes facteurs influencent le score élevé enregistré des six villes. On retrouve ainsi que l’environnement culturel et de loisirs, la qualité des transports, le niveau d’offre de santé, le sentiment de sécurité et la présence d’espaces verts jouent un rôle important. Pour ce dernier facteur, Burls (2007) et Bourdeau-Lepage (2013) ont notamment montré comment l’accès à des espaces verts était un élément déterminant du bien-être et de la santé des habitants. À ce stade de l’analyse, il semble difficile d’en tirer des généralités et ces remarques sont à prendre avec précaution. Pour cela, il aurait fallu systématiser la méthode (sous forme d’une régression linéaire par exemple).
Quelques profils de villes concernant leur qualité de vie
Quelques profils de villes concernant leur qualité de vie
3.2 – Des profils des villes européennes qui varient dans l’espace
36 Une des limites de l’indice synthétique (en plus de celles évoquées dans la partie II.1.) est qu’il ne prend pas en compte les corrélations entre les différentes dimensions de la qualité de vie. Une analyse en termes de profils de villes permettrait donc d’apporter des éclairages supplémentaires en mettant en évidence la ou les dimension(s) de la qualité de vie dans lesquelles la ville enregistre une bonne performance, distinguant ainsi les possibles axes d’amélioration pour chaque ville. Pour cela, nous proposons une analyse typologique de la qualité de vie dans les villes européennes. Elle porte sur un ensemble de variables (Tableau 2) pour l’année 2012 et permet à la fois de mettre en évidence les dimensions qui structurent la différenciation de la qualité de vie dans les villes. Aussi, l’ACP normée est une première étape qui permet d’identifier des ressemblances/proximités entre villes selon plusieurs axes factoriels qui ne sont pas corrélés. Au final, l’ACP nous permet de systématiser les principales tendances explicatives de la distribution spatiale de la perception de la qualité de vie observée via notre indice synthétique. La seconde étape de notre analyse typologique consiste en la réalisation d’une CAH dont l’objectif est de réaliser une taxonomie des villes européennes en fonction de leurs coordonnées sur les principaux axes factoriels identifiés.
3.2.1 – Les facteurs structurant les différents profils des villes européennes
37 L’ACP menée sur les 70 villes et les 22 variables qui les caractérisent révèle une structuration selon deux facteurs principaux. Les deux axes principaux qui ressortent de l’analyse expliquent 44 % de la variance totale. La quantité d’information récupérée dans l’axe décroît lentement (Tableau 1 et 2 en Annexes) laissant signifier qu’il n’y a pas d’angle de vue privilégié qui permette de saisir la qualité de vie dans les villes de manière satisfaisante.
38 Le premier facteur (variance expliquée = 25 %) est unipolaire et révèle les villes où les habitants sont satisfaits des politiques urbaines locales en faveur de la qualité de vie. On retrouve un niveau de satisfaction élevé quant à la qualité des infrastructures scolaires, de santé et de transports. Le sentiment de sécurité y est plus élevé que la moyenne. Il s’agit également de villes dans lesquelles les habitants sont très satisfaits de l’offre en aménités (sportives, culturelles et de loisirs). Ces villes sont également caractérisées par une surreprésentation des personnes ne se plaignant pas des nuisances (bruit, pollution de l’air).
39 Le deuxième facteur (variance expliquée = 19 %) est bipolaire. Il permet de différencier les villes qui sont engagées dans le développement durable à celles dont ce n’est pas la priorité. Dans les villes perçues comme plus durables, les habitants ont confiance en l’administration publique, sont satisfaits de la propreté de leur ville, sont conscients de l’engagement de la ville pour lutter contre le changement climatique et dans la gestion de ses ressources. Dans ce type de villes, les habitants apprécient également la beauté et la qualité des rues, des édifices et des espaces publics tels que les squares ou les zones piétonnières. Plusieurs chercheurs ont déjà démontré l’incidence de ces considérations sur le caractère durable des villes (Gehl, 2013) et le désir de nature croissant des habitants (Bourdeau-Lepage et Vidal, 2014). À l’opposé, on retrouve des villes qui ne consacrent pas leurs ressources de manière responsable selon les habitants.
40 Le troisième facteur (variance expliquée = 9 %) est bipolaire et a trait à l’environnement économique local. Il oppose les villes où il est facile de trouver du travail à celles où il est plutôt plus facile que la moyenne de trouver un bon logement à prix raisonnable.
3.2.2 – Une géographie de la qualité de vie dans les villes européennes
41 À partir de cette première analyse, il est possible de dresser une typologie des villes européennes à l’aide d’une CAH (selon la méthode de Ward). Nous avons pu ainsi produire un dendrogramme (voir annexes) grâce à cette technique réalisée sur les coordonnées factorielles des villes. Quatre axes se sont dégagés à l’issue de cette classification.
a – Les villes offrant de nombreuses aménités et proposant des services répondant aux besoins de leurs habitants
42 Nous aurions pu nommer les villes de ce groupe les « villes de l’homo qualitus » pour reprendre l’expression développée par Bailly et Bourdeau-Lepage (2011) pour désigner les villes dans lesquelles les habitants ne cherchent pas uniquement à maximiser leur niveau de satisfaction matérielle, mais aussi leur niveau de bien-être immatériel. Dans ces villes, l’accessibilité élevée aux aménités (espaces verts, infrastructures sportives, théâtres, cinémas, musées, bibliothèques, etc.) influence de manière importante le ressenti des habitants concernant leur qualité de vie. Ceci rejoint les travaux antérieurs de Moro et al. (2008) sur l’Irlande ou encore ceux de Rappaport (2009) sur les États-Unis sur l’importance de la qualité des aménités. Par ailleurs, l’environnement des politiques publiques est très apprécié dans ces villes. On y retrouve une offre de soins (médecins et hôpitaux) correspondant aux attentes de la population. Les habitants sont plus satisfaits que la moyenne des infrastructures scolaires. La politique de transports publics de la ville (développement des transports collectifs tels que le tram, le métro ou les réseaux de bus) répond également à leurs besoins. Il en résulte une utilisation des transports publics par les habitants plus intensive que la moyenne. Les citoyens semblent également satisfaits de leurs expériences concernant l’environnement naturel et l’environnement bâti. La population se réjouit d’habiter dans des villes à l’architecture plaisante. Cette classe est composée de capitales d’Europe septentrionale (Stockholm, Helsinki, Londres) et centrale (Vienne, Budapest) mais aussi de métropoles fortement engagées dans le développement urbain durable (Groningen, Malmö, Graz). Notons qu’aucune ville de l’Europe méditerranéenne n’est présente dans ce groupe de villes confirmant les travaux de Deaton (2012) sur l’influence de la crise économique sur la perception de la qualité de vie par les habitants.
b – Les villes bien équipées mais chères, où il est difficile de se loger et offrant de nombreuses opportunités d’emploi
43 Les villes concernées par cette classe sont globalement en avance en termes de qualité de vie. Néanmoins, ce qui les caractérise le plus concerne l’environnement économique local. Il s’agit de villes attractives en termes d’emploi mais où il est difficile de trouver un logement à prix raisonnable. Sur les 27 capitales présentes dans notre échantillon, 7 se retrouvent dans ce groupe. On retrouve là souvent l’effet de taille des villes comme l’a montré Albouy (2008). Par exemple, dans une capitale telle que Paris, il est plutôt plus facile d’avoir un emploi mais en revanche beaucoup plus difficile de se loger à bon prix (Trannoy et Wasmer, 2013). À l’inverse, dans les villes de moins grande taille le marché de l’immobilier sera plus favorable mais les opportunités d’embauche seront moindres. Il en découle un processus de gentrification comme on peut l’observer dans des villes comme Barcelone (Minassian, 2009), Prague (Sýkora, 2005), Bruxelles (Van Criekingen et Fleury, 2006 ; Van Criekingen, 2013) ou encore Belfast (Murtagh, 2010). Ces villes sont souvent très attractives et les habitants, lorsqu’ils n’étaient pas originaires de celles-ci, ont choisi d’activer leur capital socio-économique pour s’y installer. Dans ce cadre, les perspectives d’emplois influencent plus que les autres facteurs la qualité de vie, quitte à habiter un logement de taille plus modeste étant donné les prix élevés de l’immobilier.
c – Les villes à la qualité de vie hétérogène
44 Ce groupe de villes est hétéroclite tant les facteurs influant sur le ressenti des habitants sont très diversifiés. Les villes de ce groupe ont une qualité de vie qui reste perfectible. En d’autres termes, les habitants y perçoivent très bien certains aspects de leur qualité de vie, tandis qu’ils la déplorent dans d’autres domaines. Pour autant, le contexte socio-économique et territorial semble jouer dans l’influence des différentes variables concourant le plus à la qualité de vie des villes de ce groupe. C’est le cas notamment de Berlin où les habitants sont satisfaits de l’offre de transports publics, où les infrastructures de santé sont très appréciées et où l’offre culturelle et de loisirs correspond aux attentes. En revanche, les Berlinois ne s’y sentent pas forcément en sécurité et trouvent que les prix du logement sont excessifs. L’effet « capitale » semble ici jouer puisque dans la ville d’Essen (pourtant située aussi en Allemagne et ayant un score similaire à Berlin) les habitants ne sont pas satisfaits de l’offre de santé et des espaces culturels (théâtres, salles de concert) alors que les Berlinois en sont contents. À l’inverse, les Essenois trouvent qu’il est plus facile de trouver un logement à prix abordable. Nous rejoignons ainsi les travaux d’autres auteurs indiquant que la taille des villes et le contexte territorial influent sur la satisfaction des habitants.
45 D’une manière générale, les habitants de nombreuses villes de ce groupe semblent très satisfaits de l’environnement culturel et de loisirs qui les entoure. Des villes comme Amsterdam, Anvers, Bologne ou encore Berlin accueillent de manière régulière des évènements culturels majeurs (festivals, concerts, opéras, expositions). Enfin, dans cet échantillon de villes, l’environnement naturel y est agréable, certaines d’entre elles sont bien pourvues en parcs, jardins et autres espaces verts ce qui explique le degré élevé de satisfaction des habitants des villes, à l’instar d’Amsterdam, Dortmund, Bologne et surtout Oviedo, qui se démarque sur ce point en Espagne par rapport aux autres villes ibériques.
d – Les villes peu attractives avec des conditions de vie détériorées et proposant peu d’aménités
46 Dans les villes de ce groupe, l’accessibilité des habitants aux ressources qui leur sont proposées est faible. Ces dernières sont par ailleurs en faible disponibilité. Dans ces villes, les habitants vivent mal (au sens de l’espace vécu) le fait d’habiter dans ces villes. Ils ne sont pas satisfaits de leur environnement naturel et critiquent le manque d’engagement de leur ville dans la lutte contre le changement climatique. Les habitants trouvent leur ville polluée, sont mécontents de la propreté des rues et jugent négativement l’état des rues et des bâtiments. De plus, les personnes résidant dans ces villes considèrent mal l’environnement des politiques publiques. Ils déprécient l’administration locale, son efficacité et les services qui leur sont proposés pour les aider. Enfin, le sentiment d’insécurité est prévalant dans ces agglomérations. Il s’agit essentiellement de villes du Sud de l’Europe (Rome, Athènes, Naples, Palerme, Zagreb, Braga) ou de l’Est (Bucarest, Sofia, Riga, Tallinn, Vilnius, Ostrava). Les revenus relativement plus faibles des habitants de ces villes les empêchent de déménager dans des métropoles à la qualité de vie meilleure, leur potentiel de mobilité géographique étant de facto peu élevé. Il s’agit également de villes dont les pays ont été les plus durement touchés par la crise. Ce contexte socio-économique défavorable a pour conséquence une dépréciation de la satisfaction de leurs habitants comme Deaton (2012) l’a déjà expliqué dans le contexte étatsunien.
47 Il semble intéressant également de s’interroger sur la possibilité de pouvoir différencier spatialement les villes ainsi classées (Figure 4). Autrement dit, existe-t-il une géographie de la perception de la qualité de vie dans les villes européennes ? La cartographie des résultats de notre CAH permet de dégager quelques tendances. D’abord, comme nous l’avons relevé plus haut, aucune ville méditerranéenne et d’Europe centrale et orientale (à l’exception de Budapest) ne fait partie du groupe A. À l’inverse, parmi les villes les moins bien considérées par rapport à leur qualité de vie, on ne retrouve pas de villes de la moitié Nord de l’Europe et on retrouve beaucoup, à l’inverse, de villes d’Europe centrale et orientale (Riga, Vilnius, Zagreb, Ostrava) ou du Sud (Italie, Grèce).
Typologie cartographiée de la qualité de vie individuelle
Typologie cartographiée de la qualité de vie individuelle
48 Pour le reste, une très forte hétérogénéité caractérise les villes européennes sur l’ensemble des indicateurs. En dehors des villes du groupe A et des villes du groupe D au sein desquelles on retrouve une cohérence géographique et politico-culturelle avec des capabilités des habitants qui sont respectivement soit élevées, soit faibles, les deux autres classes révèlent une certaine discontinuité. Les villes du groupe B sont visibles dans toute l’Europe avec une surreprésentation de capitales (où le coût de la vie demeure souvent plus élevé que sur le reste du territoire). Il s’agit également de villes où le développement économique (Madrid, Barcelone, Prague, Varsovie), les bouleversements politiques (Belfast) mais aussi l’attractivité économique récente (Lille) ont participé à attirer de nouveaux habitants et des investisseurs. Cela a permis de créer des emplois mais en contrepartie a induit une augmentation du coût de la vie et notamment du logement. Le capital socio-économique des habitants de ces villes est élevé mais leurs aspirations en termes de logements ne sont pas satisfaites (car l’accessibilité à un logement est faible (disponibilité et prix très élevés). En revanche, pour les villes du groupe C, il ne nous est pas possible de distinguer une quelconque configuration géographique particulière.
Conclusion
49 L’objectif de cet article était d’interroger l’existence d’une différenciation spatiale de la perception de la qualité de vie des villes à l’échelle européenne. Il présentait un triple intérêt dans son approche (multidimensionnelle, basée sur la perception des habitants (critères qualitatifs) et territorialisée). Les résultats montrent très clairement une géographie des villes où la qualité de vie est mauvaise ou au contraire bonne. En effet, sur ces deux caractéristiques, les villes situées sur une dynamique plutôt négative sont localisées au Sud et à l’Est de l’Europe (de l’Italie à l’espace balte) alors qu’à l’inverse, les villes caractérisées par une haute qualité de vie sont situées davantage en Europe centrale ou septentrionale (Royaume-Uni, Allemagne, Scandinavie). Dans cette catégorie, nous retrouvons les villes réputées pour leur action positive dans le domaine du développement durable et du bien-être des citoyens, ce qui est en adéquation avec les résultats obtenus. En revanche, d’autres villes ont une qualité de vie plutôt intermédiaire dont il est difficile de déduire une configuration géographique à l’échelle européenne. À plusieurs égards cette recherche confirme ainsi des recherches antérieures sur l’influence du contexte socio-économique et territorial sur la perception de la qualité de vie par les habitants.
50 Layard (2005) recommandait que l’amélioration de la qualité de vie pour les générations présentes et futures soit un objectif premier des politiques urbaines et sociales. La prise en compte de la perception de la qualité de vie des habitants d’une ville est une question d’importance indéniable pour les décideurs locaux. Des améliorations dans ce domaine peuvent conduire à une attractivité plus importante de la ville considérée. Ainsi, l’analyse comparative et typologique réalisée ici est une opportunité pour les villes de pouvoir identifier leur positionnement dans le but d’améliorer la qualité de vie des citoyens.
51 La recherche menée dans cet article pourrait être approfondie en comparant des indicateurs quantitatifs mesurant le bien-être avec les données issues de la perception de la qualité de vie par les habitants utilisés dans cet article. Il serait alors possible de déterminer des décalages entre les politiques urbaines menées et leurs impacts sur la perception de la qualité de vie des citoyens. Par exemple, une ville peut disposer de nombreuses aménités sans qu’elles correspondent aux attentes des habitants, traduisant ainsi une inadéquation entre l’offre (les ressources) et la demande (les besoins). Cette approche pourrait être envisagée dans une perspective capabiliste où l’intérêt serait de voir dans quelle mesure ces décalages entre l’offre et la demande résultent des capabilités plus ou moins limitées dont disposent les habitants.
52 Enfin, notre étude porte sur un échantillon de 70 villes et 22 variables. On ne peut qu’encourager Eurostat à poursuivre ses efforts pour auditer un nombre plus large de villes européennes et d’enrichir la liste des variables disponibles de sorte de pouvoir affiner les analyses menées et d’interroger plus en détail les hypothèses soulevées sur l’influence du territoire sur la qualité de vie.
Tableau des valeurs propres
Tableau des valeurs propres
Histogramme des valeurs propres
Histogramme des valeurs propres
Plan factoriel 1-2
Plan factoriel 1-2
Arbre de classification des villes européennes
Arbre de classification des villes européennes
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : perception, villes européennes, qualité de vie, attractivité
Mise en ligne 08/03/2017
https://doi.org/10.3166/ges.19.2017.0001Notes
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[*]
Auteur correspondant : sbourdin@em-normandie.fr
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[1]
Avec des instruments financiers mobilisés par les villes tels que les Fonds FEDER ou encore les Fonds d’Initiative URBAN
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[2]
La mobilité sociale peut être considérée comme un moyen qu’a un individu pour améliorer ses conditions de vie et pour mieux exploiter les ressources que l’environnement lui met à sa disposition.
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[3]
Encore absente des discours à la fin des années 1980, la problématique de l’attractivité s’est imposée au cours des années 1990 (Hatem, 2004). Depuis, l’attractivité est devenue une problématique majeure des politiques urbaines. Houllier-Guibert (2012) relève que « depuis les années 2000, la recension de ce terme explose dans la littérature scientifique et journalistique ce qui explique que les services de développement économique des villes s’emparent si vivement de cette thématique ». Nous reprenons ici l’acception de Gérardin et Poirot (2010) qui appréhendent l’attractivité comme étant « la capacité d’un territoire à être choisi par un acteur comme zone de localisation - temporaire ou durable - pour tout ou partie de ses activités ». La notion d’attractivité est donc un construit relatif. Elle a transformé la ville en objet stratégique qui doit développer une politique d’image, une stratégie de différentiation/spécialisation et valoriser ses qualités.
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[4]
Perçues comme un ensemble de biens demandés par les « consommateurs » de l’espace urbain.
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[5]
Un « talent » est un travailleur au salaire élevé, (hautement) qualifié qui met sa créativité et son imagination au service de la production et de l’innovation.
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[6]
Voir http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/cities - Les principaux champs de cet Audit Urbain sont les suivants : la démographie, les aspects sociaux et économiques, la formation et l’éducation, l’environnement, les transports, la société de l’information, la participation citoyenne, la culture et des loisirs.
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[7]
qui propose uniquement la construction d’un indice synthétique qui est ensuite comparé à l’indice produit par Mercer
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[8]
Co-réalisé et co-financé par la Commission Européenne (et plus spécifiquement la DG Politique Régionale et Urbaine) et Eurostat.
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[9]
La procédure de Z-score transforme les valeurs de la série avec une distribution de moyenne nulle et un écart-type égale à 1. On a alors
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[10]
Joint European Support for Sustainable Investment in City Areas – Soutien européen conjoint à l’investissement durable dans les zones urbaines