Introduction
1Selon le rapport révisé des Nations Unies (2009) sur l’urbanisation mondiale, en 2009 et pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la moitié de la population du globe vit et travaille en zone urbaine. En 1960, la population urbaine ne représentait qu’un tiers de la population mondiale, ce qui montre l’importance et la rapidité du processus d’urbanisation durant ce dernier demi-siècle.
2Plusieurs chercheurs ont examiné l’hypothèse d’un lien entre les dynamiques d’urbanisation et le développement économique. Un premier ensemble de travaux considère que la relation entre ces deux processus n’est pas empiriquement établi, ce qui se vérifie par une stabilité des hiérarchies urbaines nationales dans le temps, c’est-à-dire par une certaine immuabilité dans la distribution des villes d’un pays selon leur taille démographique. Un second ensemble de travaux admet, au contraire, qu’un tel lien existe et, dans ce cas, il reste à déterminer sa nature : est-ce que le développement économique d’un pays conduit à un processus d’urbanisation marqué par une concentration croissante de la population dans les plus grandes villes, en renforçant par-là les effets de primatie ? Est-ce que, à l’inverse, le développement économique est accompagné par un processus d’urbanisation plus diffus, permettant l’avènement d’un ensemble de villes de taille moyenne ?
3Ces questions sont appréhendées à travers l’étude de l’évolution des hiérarchies urbaines de six pays (France, Espagne, Italie, Turquie, Maroc, Égypte) qui représentent, à l’aube du XXIe siècle, 76,6 % de la population globale du pourtour méditerranéen. En 1960, les trois pays européens occupaient les premiers rangs dans la démographie méditerranéenne, l’Italie étant le pays le plus peuplé avec 50,2 millions d’habitants. Quarante ans plus tard, la Turquie et l’Égypte les ont dépassés, avec respectivement 67,3 et 65,2 millions d’habitants. En matière de développement économique, l’Espagne a enregistré les meilleures performances (avec un taux de croissance annuelle moyen du PIB par habitant de l’ordre de 3,4 %) et le Maroc les plus mauvaises (avec un taux égal à 1,7 %). Ces processus ne furent ni linéaires ni identiques pour tous les pays, mais certains écarts de développement semblent subsister entre le début et la fin de la période de référence : ainsi, le rapport entre le PIB par habitant le plus élevé et le PIB par habitant le plus faible reste inchangé (de l’ordre de 17) entre 1960 (France : 7 482 $ ; Égypte : 431 $) et 2 000 (France : 21 914 $ ; Maroc 1 270 $).
4Par leur poids démographique important, mais aussi par la différenciation de leurs processus de développement économique, ces pays forment un panel significatif pour comparer les dynamiques urbaines en Méditerranée entre 1960 et 2000. Les dynamiques urbaines sont analysées dans cet article à travers l’utilisation de modèles rang-taille. Ces modèles permettent d’étudier un système urbain par le classement des villes selon la taille de leur population. Ils réduisent, ainsi, l’identité d’une ville à sa seule taille démographique, mais celle-ci est révélatrice d’un certain nombre de caractéristiques économiques (Pumain, 1982), telles que la présence d’externalités d’agglomération, le potentiel de capital humain localisé ou les effets d’attractivité exercés sur un plan régional ou national.
5Cet article cherche à expliciter le lien entre le développement économique et les dynamiques urbaines. En considérant les villes de plus de 100 000 habitants, il montre que les pays avec un niveau de développement plus élevé se caractérisent par une structuration de leurs systèmes urbains moins hiérarchisée où les villes moyennes occupent une place importante dans la distribution rang-taille des villes. À l’inverse, les pays émergents à revenu intermédiaire connaissent des processus de concentration démographique plus marqués, avec un surdimensionnement des plus grandes villes dans leur système urbain. Un tel constat semble confirmer l’hypothèse d’une évolution en cloche des hiérarchies urbaines d’un pays, avec une phase de concentration de la population dans les grandes villes durant les phases de croissance économique rapide, suivie d’une diffusion de la croissance démographique en faveur des villes moyennes, au-delà d’un certain niveau de développement.
6Ce travail est construit en trois temps. Dans un premier temps, il propose un rappel sélectif de la littérature sur les modèles rang-taille des villes. Dans un deuxième temps, ces modèles sont appliqués sur les distributions des villes des six pays sélectionnés, afin d’étudier les évolutions de leurs hiérarchies urbaines entre 1960 et 2000. Enfin, dans un troisième temps, les résultats obtenus sont mis en relation avec les évolutions du PIB par habitant afin de tester le lien entre développement économique et dynamique urbaine en Méditerranée.
1 – Les modèles rang-taille
1.1 – Les origines – la loi de Zipf
7En s’inspirant des travaux de Pareto, Auerbach (1913) a fait remarquer, le premier, la constance singulière de la valeur du produit de la population d’une ville multipliée par son rang, au sein d’un système urbain donné. Il établit, ainsi, un premier modèle de hiérarchies urbaines où le nombre des villes est en relation inverse avec leur taille respective. Repris par Lotka (1926) et Singer (1936), ce travail fut théorisé par Zipf (1949) qui mit en évidence une représentation des hiérarchies urbaines, selon laquelle la distribution des tailles T des grandes villes suit une loi de Pareto :
9avec ? une constante positive et ? le coefficient de Pareto. Cette loi annonce une relation entre la taille Tj d’une ville j et son rang Rj telle que :
11Lorsque le coefficient de Pareto est faible (? inférieur à 1), un système urbain est caractérisé par le poids démographique prépondérant des plus grandes villes (voire d’une seule ville). À l’inverse, lorsque ? est élevé (supérieur à 1), on est en présence d’un système où la population est distribuée de façon plus égalitaire entre de nombreuses villes. Enfin, lorsque ? est égal à 1, on a une distribution très proche de celle initialement observée par Auerbach, où la population de la deuxième plus grande ville représente à peu près la moitié de la population de la première, celle de la troisième ville un tiers de la première et, de façon plus générale, la population de la ville de rang n, une proportion 1/n de la population de la plus grande ville. Cette distribution spécifique désigne la loi de Zipf.
12Par la suite, de nombreuses études ont proposé une comparaison des coefficients de Pareto de différents pays et régions. Dès 1936, Singer examine l’application d’une relation rang-taille sur la distribution des villes de plus de 2 000 habitants de 7 pays. Allen (1954) entame une démarche identique sur un échantillon de 58 pays. Rosen et Resnick (1980) s’appuient, eux, sur des échantillons de villes de plus de 100 000 habitants de 44 pays différents et obtiennent des coefficients dans un intervalle [0,81 ; 1,96], avec 75 % des pays affichant une valeur absolue de l’exposant supérieure à 1 (la moyenne des ? est égale à 1,13, les deux valeurs extrêmes étant celles du Maroc, 0,809, et de l’Australie, 1,963).
13Dans sa revue de la littérature empirique sur les modèles rang-taille, de 1913 à 1980, Carroll (1982) montre que les distributions dont le coefficient de Pareto est égal à 1 ne représentent qu’un cas parmi d’autres hiérarchies urbaines existantes. Comme le soulignent Gabaix et Ioannides (2004), l’étude des pentes des différentes distributions rang-taille doit permettre la comparaison de l’organisation des différents systèmes urbains dans un continuum entre deux configurations extrêmes, la primatie absolue d’une part, l’égalité parfaite des tailles des villes d’autre part. Cette démarche renvoie au besoin d’identifier une relation entre les formes de la distribution des tailles des villes et les processus qui les engendrent, à l’instar de l’étude pionnière de Pumain (1982) sur l’évolution des hiérarchies urbaines en France durant les XIXe et XXe siècles.
1.2 – Hiérarchies urbaines : des interprétations historiques
14Différentes tentatives d’interprétation des variations des coefficients de Pareto ont été avancées dans la littérature. Certains chercheurs avancent des facteurs historiques de différenciation des espaces géographiques, à l’origine de la formation ou pas de grandes métropoles ou de l’apparition d’un maillage urbain plus ou moins dense.
15Dans son étude de la distribution des villes de plus de 10 000 habitants dans 78 pays, allant des pays industrialisés aux pays en développement, entre 1950 et 1980, Moriconi-Ebrard (1993) confirme la validité de la loi de Zipf à l’échelle mondiale. L’écart des coefficients nationaux, qui se situent entre 0,73 et 1,38, montre cependant une certaine différenciation des pays, bien que le niveau de développement ne soit pas un critère significatif. Moriconi-Ebrard trouve ainsi des coefficients très proches pour le groupe des pays développés et celui des pays en développement. Un véritable clivage apparaît, à l’inverse, entre l’Ancien (Europe, Asie, Afrique) et le Nouveau (Amérique, Océanie) Monde, ce qui conduit à émettre l’hypothèse que les différences dans la distribution rang-taille des villes reposent sur des facteurs historiques.
16L’hypothèse d’une différenciation des hiérarchies urbaines par des facteurs historiques est également explorée par Bretagnolle et al. (2009) et Bretagnolle et Pumain (2010), selon lesquelles les pays anciennement industrialisés disposent d’un semis urbain plus dense, mis en place par un développement lent et progressif des moyens de locomotion, contrairement aux pays récemment industrialisés où le système des villes s’est mis en place à l’époque des chemins de fer, permettant un écartement plus important entre les villes et une concentration plus facile dans un nombre de nœuds plus limité. Les premiers affichent, dès lors, un coefficient élevé par rapport aux seconds.
17Nitsch (2005) propose la comparaison la plus complète des différentes estimations du coefficient de Pareto, par le biais d’une méta-analyse qui porte sur 29 études et 515 estimations. Selon Nitsch (2005), l’ensemble des estimations du coefficient varie dans un intervalle [0,49 ; 1,96], avec une moyenne de 1,09. La majorité des estimations (62 %) dépasse l’unité, tandis qu’un tiers se trouve en dehors de l’intervalle [0,8 ; 1,2]. Nitsch montre, dans un premier temps, que la définition de la ville joue un rôle fondamental dans la valeur estimée du coefficient de Pareto. Il étudie, dans un deuxième temps, la valeur des différentes estimations du coefficient de Pareto en Europe, selon la chronologie des échantillons. Il montre, alors, que la moyenne des estimations baisse de façon conséquente jusqu’au milieu du XXe siècle puis se stabilise, voire remonte légèrement, après 1950. Il arrive, par-là, à détecter un ensemble de facteurs historiques communs pour les pays européens, lui permettant de supposer que la concentration urbaine s’intensifie, lors des phases d’industrialisation accélérée.
18Ces travaux permettent d’apporter un éclairage intéressant sur les différences des hiérarchies urbaines dans le monde, en mettant en évidence le rôle de facteurs historiques, spécifiques à chaque pays ou région. Or, une autre série de travaux empiriques, complémentaire à cette première, tente d’avancer une interprétation plus globale de l’évolution des hiérarchies urbaines, où les mutations des systèmes de villes correspondent à différentes étapes de développement économique.
1.3 – Hiérarchies urbaines et niveau de développement économique
19En actualisant l’étude de Berry (1961) qui, dans une comparaison de 37 pays, trouvait une corrélation entre le coefficient de Pareto et le niveau de développement, Parr (1985) initie l’hypothèse que ce coefficient suit, dans le temps, une courbe en cloche, ce qui implique la succession d’une phase de concentration puis de déconcentration urbaine (Duranton, 2006, Catin et Van Huffel, 2004). À partir de la comparaison des hiérarchies urbaines de différents pays, Parr intègre les variations du coefficient de Pareto dans un schéma d’évolution de la concentration urbaine en cinq étapes (Catin et Van Huffel, 2004) : une étape pré-urbaine, caractérisée par la faiblesse des infrastructures de transport et l’absence d’économies d’agglomération ; une étape de spécialisation urbaine où les infrastructures publiques se développent et certaines villes se spécialisent dans des secteurs productifs particuliers, d’où l’apparition de certaines économies d’échelle ; une étape de consolidation urbaine, durant laquelle les mécanismes précédents s’accentuent et la concentration urbaine augmente ; une étape de transformation urbaine qui correspond au seuil de retournement de la courbe, sous l’effet de l’apparition de déséconomies d’agglomération; puis, enfin, une étape de dispersion urbaine où l’amélioration des infrastructures de transport interrégional permet une relocalisation des activités de production dans les régions et villes périphériques.
20Plusieurs auteurs ont testé l’hypothèse de la courbe en cloche inversée. Lepetit (1990) évalue l’évolution du coefficient de hiérarchisation en France entre le XVIIIe et le XIXe siècle, mais trouve une faible évolution de la distribution rang-taille marquée surtout par la faiblesse du nombre des grandes villes. En utilisant un échantillon qui contient toutes les unités urbaines françaises de plus de 2 000 habitants, entre 1831 et 1982, Guérin-Pace (1995) confirme, quant à elle, l’hypothèse d’une concentration croissante de la population urbaine dans les plus grandes agglomérations, mais pas celle d’une décongestion.
21De leur côté, Brakman et al. (1999) étudient l’évolution des hiérarchies urbaines aux Pays-Bas. Ils trouvent que le coefficient de Lotka (inverse du coefficient de Pareto) augmente entre 1600 et 1990, puis baisse à partir de cette date, ce qui semble conforter l’hypothèse de Parr. Bosker et al. (2008) entreprennent ce même travail pour les villes italiennes entre 1300 et 1861, soit à la veille de la réunification de la péninsule. Leurs résultats vont également dans le sens de l’hypothèse d’une courbe en cloche, même si les auteurs trouvent une différenciation entre le Nord et le Sud.
22Plusieurs travaux examinent l’évolution de différentes distributions rang-taille nationales, sans dégager une tendance claire. Ainsi, en considérant les villes de plus de 10 000 habitants, Kundak et Dökmeci (2000) montrent que la distribution rang-taille des villes turques passe d’une relation initialement convexe en 1927 à une relation linéaire en 1990, sous l’impulsion de la croissance des villes moyennes de plus de 50 000 habitants. Cori (1984) montre une évolution inverse pour l’Italie entre 1921 et 1971, avec un coefficient de Pareto qui baisse systématiquement, traduisant un mouvement de concentration vers les grands centres urbains. En considérant les villes grecques de plus de 5 000 habitants, sur la période d’après-guerre (1951-1991), Petrakos et al. (2003) trouvent, quant à eux, une stabilité du coefficient, proche de 1, durant toute cette période. Le Gallo et Chasco (2008) étudient l’évolution des hiérarchies urbaines en Espagne entre 1900 et 2001 et montrent que le coefficient de Pareto baisse jusqu’en 1980, puis augmente, à nouveau, à partir de cette date, sous les effets de la péri-urbanisation et de la décongestion urbaine, ce qui pourrait confirmer l’hypothèse de Parr.
23Dimou et Schaffar (2009) trouvent une relative stabilité dans la distribution des villes des pays balkaniques, entre 1981 et 2001, malgré les chocs importants que cette région a subis durant cette période. Le travail de Schaffar et Dimou (2010) sur le système des villes chinoises entre 1984 et 2004 affiche des résultats plus contrastés, compatibles avec l’hypothèse de la courbe en cloche, tandis que Schaffar (2010) admet que la baisse du coefficient pour l’Inde durant ces vingt dernières années traduit davantage une fracture dans la distribution rang-taille entre petites villes et grandes métropoles, plutôt qu’un processus de hiérarchisation progressive.
24Dans une large étude comparative, basée sur des échantillons de villes de 73 pays, Soo (2005) rejette la validité empirique de la loi de Zipf dans 73 % des cas. Il trouve un coefficient de Pareto plus élevé pour les pays à revenu élevé (Amérique du Nord, Europe, Océanie) que pour les pays à revenu faible ou intermédiaire (Asie, Amérique du Sud, Afrique), ce qui signifie que ces derniers sont caractérisés par une structure plus hiérarchique que les premiers. Il conclut, alors, que le niveau du développement économique a une influence déterminante sur les hiérarchies urbaines.
25La relation entre le niveau de développement économique et la structuration du système urbain, compatible avec l’hypothèse d’une courbe en cloche, est testée dans les six plus grands pays de la Méditerranée.
2 – Les hiérarchies urbaines dans le Bassin méditerranéen
2.1 – Méthodologie et base de données
26L’intérêt des modèles rang-taille repose sur la possibilité de mener une analyse des hiérarchies urbaines d’un pays ou d’une région à travers la lecture d’une seule information, la valeur du coefficient de Pareto. Le mode de calcul du coefficient revêt, à cet égard, une importance capitale. À travers une simulation de type Monte-Carlo sur vingt mille échantillons de distributions rang-taille, tirés de façon aléatoire et comportant un nombre d’observations différent, Schaffar (2009) étudie le biais de chaque mode de calcul de l’estimateur du coefficient, en montrant que pour les petits échantillons, il convient d’utiliser l’estimateur de Gabaix et Ibragimov (2009).
27Selon Gabaix et Ibragimov (2009), la relation rang-taille des villes, pour laquelle le biais de l’estimation du coefficient pour des petits échantillons est minime, prend la forme :
29tandis que l’écart-type du coefficient peut être estimé par :
31Cet estimateur met un terme à une série de doutes méthodologiques quant à la pertinence des différents modes de calcul utilisés, en présence de petits échantillons.
32Une deuxième série de controverses méthodologiques concerne la taille minimale des villes retenues (Cheshire, 1999). En prenant en considération l’ensemble des localités habitées américaines et non pas seulement les unités urbaines en dessus d’une certaine taille, Eeckhout (2004) montre que la distribution des villes ne suit pas une loi de Pareto mais plutôt une lognormale. Néanmoins, dans le travail d’Eeckhout, la définition de la ville est très controversée puisque la plus petite localité considérée ne compte que 67 habitants (Schaffar, 2009) ! Dans ce travail, nous retenons une taille urbaine minimale relativement élevée (100 000 habitants), essentiellement pour deux raisons : en premier lieu, elle permet d’obtenir des séries statistiques longues fiables pour tous les pays considérés ; en second lieu, une taille minimale trop faible aurait « gommé » artificiellement des éventuels processus de concentration de la population dans les plus grandes villes. L’analyse de l’évolution des hiérarchies urbaines des différents pays est ainsi biaisée par le bas, dans le sens où il y a un seuil d’entrée, fixé de façon arbitraire, dans la population des villes étudiées.
33Enfin, une troisième série de controverses méthodologiques concerne la définition même de la ville. Black et Henderson (1999, 2003) trouvent des résultats contrastés quant à l’évolution rang-taille des villes américaines, selon qu’ils utilisent un échantillon de villes définies du point de vue administratif ou des agglomérations définies sur la base de critères géographiques et économiques. Bretagnolle et Pumain (2010) insistent également sur les résultats contradictoires que l’on obtient sur l’évolution du système américain, selon la définition des villes retenue.
34Par sa nature comparative, ce travail doit utiliser des séries statistiques avec la même définition de la ville dans différents pays, ce qui est rarement le cas lorsque ces données proviennent des services statistiques nationaux qui privilégient les villes « administratives ». Notre base de données est celle utilisée par Davis et Henderson (2003) dans leur étude des processus d’urbanisation dans le monde. Son intérêt réside sur le fait que des corrections ont été apportées afin d’homogénéiser les données sur les tailles démographiques des villes, définies différemment selon les services statistiques de chaque pays.
2.2 – Une différenciation des hiérarchies urbaines en Méditerranée
35Parmi les six pays considérés, l’Égypte, la Turquie et le Maroc ont enregistré des migrations campagne-ville accélérées entre 1960 et 2000, sans néanmoins atteindre les taux d’urbanisation des pays européens. Ainsi le taux d’urbanisation entre ces deux dates passe de 37,8 à 43,6 % en Égypte, de 29,3 à 48,9 % au Maroc et de 31,5 à 54,4 % en Turquie. À l’aube du vingt-et-unième siècle, les taux d’urbanisation des trois pays européens se situent autour du seuil de 70 % (France : 76,9 % ; Espagne : 76,2 %, Italie 67,2 %).
36Le tableau 1 permet de comparer les évolutions des hiérarchies urbaines des six pays, durant cette période, à travers les valeurs estimées des coefficients de Pareto pour les années 1960, 1970, 1980, 1990 et 2000. Les densités de kernel (Figure 1) permettent une visualisation graphique des distributions rang-taille des villes de ces pays.
37Trois constats s’imposent :
- En premier lieu, les trois pays européens affichent, sur l’ensemble de la période, des coefficients de Pareto élevés, signe de la présence de nombreuses villes de taille intermédiaire dans leur système urbain. À l’inverse, les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée (Maroc, Égypte, Turquie) affichent des ? plus faibles, ce qui dénote un degré de primatie urbaine plus fort.
- En second lieu, dans les trois pays européens, le coefficient de Pareto est légèrement croissant, ce qui montre une tendance vers une distribution plus équitable de la population urbaine entre les différentes villes. Ce processus peut être lié au « décongestionnement » des grandes agglomérations urbaines européennes. La forte concentration urbaine semble, à l’inverse, caractériser les évolutions marocaine et égyptienne, tandis que la Turquie se rapproche davantage des configurations européennes, notamment vers la fin du siècle.
- Enfin, en troisième lieu, l’étude des densités des kernels montre que les trois pays européens se caractérisent par un processus de convergence relative vers une taille moyenne (pour la France et de l’Espagne, accompagnée par une augmentation de la taille moyenne des villes de l’échantillon, à l’inverse de l’Italie qui connaît un processus de décongestion urbaine à partir des années soixante-dix, y compris pour les villes intermédiaires). Au Maroc et en Égypte, à l’inverse, les kernels s’aplatissent, signe d’un écart-type de tailles urbaines plus élevé, ce qui correspond à des hiérarchies urbaines marquées par une concentration de la population plus élevée dans les très grandes villes.
38Ces résultats sont confirmés par l’application du modèle quadratique de Rosen et Resnick (1980), permettant de tester l’hypothèse d’une déviation vis-à-vis de la stricte linéarité entre le logarithme du rang et le logarithme de la taille des villes. Dans ce modèle, un terme quadratique (ou même cubique) est ajouté à l’équation de Zipf :
Résultats du modèle quadratique
Résultats du modèle quadratique
39Le tableau 2 reproduit les résultats des régressions sur le modèle quadratique pour les six pays considérés. Les valeurs négatives du ? pour les régressions égyptiennes, marocaine et turque (sauf en 2000) indiquent la faible représentativité des villes moyennes de l’échantillon considéré ; à l’inverse, en France et en Espagne, la distribution rang-taille des villes est caractérisée par le nombre important de ces villes où se concentre une partie importante de la population urbaine.
40À travers les différents modèles rang-taille utilisés, on peut conclure que les évolutions des distributions des villes méditerranéennes se différencient, selon que l’on se situe au Nord ou au Sud du Bassin. Les pays européens affichent, en général, une distribution urbaine plus égalitaire où les villes moyennes occupent une place de plus en plus importante au fur et à mesure que l’on se rapproche des années 2000. À l’inverse, l’Égypte et le Maroc affichent une distribution rang-taille des villes clairement dominée par le poids des plus grandes métropoles, ce qui implique une croissance démographique de ces dernières supérieure aux autres villes, alimentée par les migrations internes. Enfin, la configuration turque évoque des évolutions plus mitigées, avec l’émergence d’un ensemble de villes moyennes durant la dernière décennie.
3 – Hiérarchies urbaines et développement économique
3.1 – Évolution des hiérarchies urbaines au cours du développement économique
41On cherche à tester, par la suite, l’hypothèse d’une relation entre les évolutions des hiérarchies urbaines et le niveau de développement économique. Chenery et Syrquin (1975) considèrent l’hypothèse d’une relation positive entre les dynamiques d’urbanisation et les premières étapes de développement économique d’un pays, tout en admettant qu’au-delà d’un certain seuil de croissance du PIB par habitant, cette relation devient moins déterministe. Nordham (1975) examine la relation entre la concentration urbaine et la croissance du PIB par habitant, en s’appuyant sur un panel de 56 pays. Il avance l’hypothèse d’un mouvement cyclique, avec une première phase où industrialisation et concentration urbaine vont de pair, puis une deuxième phase où le passage vers une économie de services conduit à un décongestionnement des grands centres urbains. Chang et Brada (2006) et Schaffar (2008) confirment cette hypothèse, en se focalisant sur les évolutions chinoises durant la période 1979-2004, marquées par la libéralisation des échanges et des migrations internes et l’ouverture du pays à l’échange international.
42Moomaw et Shatter (1996) trouvent une corrélation positive entre processus d’urbanisation et industrialisation dans les pays caractérisés par un taux d’ouverture élevé et un régime démocratique stable. Cette conclusion est confirmée par Davis et Henderson (2003) qui détectent une corrélation entre le degré de hiérarchisation d’un système urbain et un ensemble d’indices permettant de mesurer le degré de démocratie. Enfin, Catin et al. (2008) s’appuient sur un modèle en panel de 56 pays en développement, avec des variables instrumentales pour la période 1950-2000, afin de montrer que, jusqu’à un certain niveau de développement économique, la progression du taux d’urbanisation dépend davantage de la vitesse de l’exode rural que de la progression du revenu par tête.
43Nous testons, ici, la relation entre d’une part le coefficient de Pareto ou le degré de primatie d’un système urbain et d’autre part le PIB par habitant. Ce dernier semble être l’agrégat le plus adéquat pour une analyse comparative des niveaux de développement économique des différents pays et ne soulève aucune controverse quant à son calcul, comme c’est le cas d’autres agrégats tels que l’indice du développement humain. Les séries statistiques proviennent de la base de données de la Banque mondiale (2006) et affichent pour chaque année et chaque pays le PIB par habitant en prix constants 2000 (PPA).
3.2 – Modèles quadratiques et sigmoïdes
44Nous utilisons les deux modèles présents dans la littérature pour étudier la relation entre le degré des hiérarchies urbaines et le PIB par habitant, à savoir le modèle quadratique et le modèle sigmoïde.
45Rosen et Resnick (1980) s’appuient sur un modèle quadratique pour montrer que le degré de primatie urbaine diminue de façon monotone au fur et à mesure de l’élévation du PIB par tête. Ce sont donc les économies les plus riches qui ont les distributions urbaines les plus homogènes (Catin et al., 2008). L’intérêt d’un tel modèle réside dans le fait qu’il considère un point de retournement à partir duquel la relation entre concentration urbaine et développement économique s’inverse. Différents seuils de retournement sont estimés par Wheaton et Shishido (1981), Mac Kellar et Vining (1995), Junius (1999) ou Davis et Henderson (2003).
46Dans ce travail nous suivons la démarche méthodologique initiée par Catin et Kamal (2009 et 2010), qui s’inspirent des travaux de Moomaw et Alwosabi (2004) pour tester l’existence d’une courbe en cloche du degré de primatie dans les systèmes urbains turc et marocain, en fonction du PIB par habitant :
48avec ?it le coefficient de Pareto de chaque pays i et PIBh le PIB par habitant correspondant.
49Ces résultats peuvent être comparés avec ceux obtenus par l’application d’un modèle sigmoïde (modèle en S). Ce type de modèles, mis en place par Kuznets (1955), est utilisé afin de décrire l’évolution d’un processus de croissance non linéaire, caractérisé par des fluctuations cycliques, identifiées par des phases d’émergence (croissance accélérée), d’inflexion (croissance quasi-linéaire) et de saturation (croissance ralentie voire décroissance). Les deux grands domaines d’application des modèles en S sont le changement démographique et le changement technologique. À ce titre, nous utilisons un modèle logistique « penché », en suivant la démarche adoptée dans les travaux de Chang et Brada (2006) et de Schaffar (2008) :
51Où PRIMit est le taux de primatie d’un pays i à l’année t (0 < PRIMit < 1), à savoir le poids de la plus grande ville dans l’échantillon des villes considérées et PIBh son PIB par tête pour la même année, tandis que ?it comprend le vecteur des erreurs.
52Les résultats du modèle quadratique, dans le tableau 3, attestent une concavité légère mais significative de la courbe des valeurs du coefficient de hiérarchisation en fonction du PIB par habitant. Le point d’inflexion se situe en dessus des 4 000 $ aux prix de l’année 2000 (PPA). Lorsque l’on utilise le modèle en S, on trouve une corrélation positive entre le PIB par habitant et l’évolution du taux de primatie pour les pays à revenu intermédiaire, ce qui implique une concentration urbaine plus élevée et négative pour les pays à revenu élevé. Malgré des données limitées, ce changement de signe du coefficient ? confirme l’hypothèse d’une fluctuation cyclique du taux de primatie, c’est-à-dire du poids démographique de la plus grande ville, en fonction du niveau de développement économique d’un pays.
53Il convient de noter que la relation entre les deux agrégats est plus robuste pour les pays intermédiaires que pour les pays à revenu élevé, ce qui signifie que la phase de concentration urbaine qui accompagne les premières étapes de développement économique se dessine de façon plus claire que la phase de la décongestion et la diffusion de la croissance urbaine qui accompagne les étapes de développement plus avancées.
Conclusion
54Cet article cherche à mettre en évidence certaines caractéristiques des systèmes urbains méditerranéens et leurs évolutions entre 1960 et 2000. Il propose une comparaison des hiérarchies urbaines des six pays les plus peuplés du Bassin (France, Italie, Espagne, Turquie, Égypte, Maroc), en s’appuyant sur l’utilisation de modèles rang-taille. Trois séries de résultats peuvent être mises en avant :
55En premier lieu, les pays à revenu élevé affichent une structure urbaine moins hiérarchisée que les pays à revenu intermédiaire. Les premiers sont caractérisés par une présence de villes moyennes importante par rapport aux seconds où les grandes métropoles dominent la structure démographique urbaine.
56En second lieu, en matière de dynamiques urbaines, deux ensembles se distinguent : d’une part, les pays à revenu élevé – les trois pays européens – qui connaissent une augmentation du coefficient de hiérarchisation, synonyme d’une diffusion des processus de croissance urbaine et l’émergence de nombreuses villes de taille intermédiaire entre 1960 et 2000 ; d’autre part, dans les pays à revenu intermédiaire – Égypte et Maroc -, la croissance urbaine se concentre dans les grandes métropoles, renforçant, par-là, les effets de primatie urbaine. La Turquie affiche une structure urbaine fortement hiérarchisée en début de période mais qui évolue de façon semblable à celle des autres pays européens, notamment en fin de période.
57Enfin, en troisième lieu, lorsque l’on compare les hiérarchies urbaines et les niveaux de développement des six pays, l’hypothèse d’une relation en cloche, avancée par de nombreux chercheurs, ne peut pas être rejetée. Le coefficient de hiérarchisation tend à augmenter durant les premières étapes du développement économique, puis baisser par la suite, avec un seuil de retournement supérieur à 4 000 $ aux prix de l’année 2000 (PPA). Le taux de primatie suit un cheminement inverse. La phase ascendante semble plus marquée que la phase descendante.
58En cherchant à comparer différentes structures urbaines méditerranéennes et leur évolution en fonction des différentes étapes de développement économique, cet article rencontre deux limites. En premier lieu, les hiérarchies urbaines ne sont considérées que pour les villes de plus de 100 000 habitants, ce qui réduit notre analyse aux évolutions de la partie haute de la distribution rang-taille des villes et non pas dans son ensemble. En second lieu, cette étude ne prend pas en considération la spécificité des villes. Or, l’introduction des caractéristiques idiosyncratiques de chaque ville (spécialisation productive, avantages de « première nature », etc.) dans les processus de croissance urbaine apporterait un certain enrichissement des analyses menées. Néanmoins, un tel travail exige un ensemble de données statistiques par ville qui ne sont pas toujours disponibles.
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Mots-clés éditeurs : modèle rang-taille, hiérarchies urbaines, courbe en cloche, Méditerranée
Mise en ligne 12/03/2012