Notes
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[1]
Centre Pierre Janet, Hôpital de secteur psychiatrique Ste Marie à Clermont-Ferrand. Équipe pluridisciplinaire, dont trois Gestaltistes. La co-thérapeute des groupes TCA est Marie-Thérèse ANDRIEU.
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[2]
Nous choisissons de parler de « personnes en souffrance » plutôt que de « boulimiques ». Cela permet de désigner aussi bien un homme (4 % de notre population) qu’une femme.
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[3]
Il nous est quelquefois difficile de faire la distinction entre boulimie et ce type d’anorexie lors des premiers entretiens. Les formes atypiques de symptôme sont assez fréquentes. Il arrive que la personne décompense sur le plan anorexique en cours de thérapie. Pour les problèmes d’anorexie de type restrictif c’est-à-dire avec refus de s’alimenter, cela demande un travail de thérapie approprié car, à la différence des précédentes, elles contrôlent la nourriture ce qui développe chez elle un sentiment de toute-puissance.
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[4]
Thérapie cognitivocomportementale.
1Ce travail est fondé sur neuf années d’expérience dans uncentre hospitalier de psychothérapie [1] sous la responsabilité d’un psychiatre. Nous souhaitons montrer la spécificité du travail psychothérapeutique avec des personnes présentant des troubles du comportement alimentaire (TCA) de type boulimique. Il s’agit d’une prise en charge en groupe assurée par deux psychothérapeutes. Elle se fait au sein d’un réseau d’intervenants comprenant le psychiatre du « patient », son médecin généraliste ou nutritionniste et ponctuellement une assistante sociale.
2Une partie de cet article va être consacrée à mieux comprendre qui sont ces personnes présentant un symptôme boulimique [2] et pourquoi cela nécessite une thérapie spécifique. Une autre partie décrit cette spécificité.
MIEUX COMPRENDRE LES PERSONNES PRÉSENTANT DES TROUBLES DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE.
3La boulimie est considérée comme une addiction signant un trouble de la dépendance. « La dépendance s’installe pour compenser une fracture psychique cachée, une faille structurelle témoignant d’une blessure fondamentale non résolue » (Schasseur, 2002).
4La symtomatologie montre plusieurs formes (selon l’axe I du DSM4) :
- La boulimie, avec vomissements ou prise de purgatifs (laxatifs et diurétiques) et la boulimie sans vomissements ni prise de purgatifs mais dans ce cas avec des comportements compensatoires tels le jeûne et l’exercice physique excessif.
- L’hyperphagie boulimique, sans comportements visant à perdre du poids.
- L’anorexie mentale [3], « type avec crises de boulimie/vomissements (binge-eating) » qui concerne principalement les femmes. À la différence des personnes boulimiques, il n’y a pas maintien d’un poids stable, la peur de devenir obèse persiste alors même que le poids est inférieur à la normale. Il y a altération de la perception du corps et souvent déni de la maigreur. Un problème d’aménorrhée y est associé.
5Ces symptômes sont généralement associés à un trouble de la personnalité. On retrouve à la fois des critères de la personnalité borderline, de la personnalité évitante et la personnalité dépendante (selon l’axe II du DSM4). On remarque aussi des traits de personnalité qui seraient plutôt des défenses de type hystérique, paranoïde, schizoïde et obsessionnelle. On pourra compléter l’étude en se référant aux caractères oral-fusionnel, narcissique primaire et masochiste décrits par Noël Salathé.
6Finalement, « plus qu’une organisation stable de la personnalité, et plus encore qu’une structure définie, la boulimie nous a semblé réaliser un aménagement pervers d’une vulnérabilité liée au maintien d’une dépendance excessive aux objets externes par échec partiel des intériorisations »(Jeammet,1991)
7On peut observer chez les personnes boulimiques une dynamique de suradaptation à l’environnement. Les besoins et les désirs de l’environnement sont prioritaires (soumission), les leurs sont réprimés, vécus comme dangereux car elles ont peur de perdre l’amour de l’autre.
8C’est pour cela qu’il y a incapacité à savoir opposer un refus sinon par la fuite, une peur de la confrontation, une trop grande sensibilité au regard de l’autre. Elles développent ainsi une fausse personnalité, un « faux-self ». En conséquence, elles sont souvent dans l’ignorance de ce qu’elles veulent, indépendamment de leur besoin d’être aimées. Il s’en suit une fuite d’elles-mêmes, une absence d’intériorité. « La pathologie liée à l’image de soi et au besoin de reconnaissance ne fait que témoigner d’une impossible relation à l’élan vital, d’une désorganisation de la perception et d’une absence à soi-même ». (Schasseur 2004 p.15).
9Comme les nomme le professeur Jeammet à propos des adolescentes, de nombreux paradoxes sont également observables chez elles. Il y a à la fois désir de fusion à l’autre et peur du contact, envie de recevoir et volonté de se suffire à soi-même, besoin de s’affirmer et peur de la confrontation… C’est le paradoxe de la dépendance : « j’ai besoin de l’autre et en même temps, il est hors de question que je devienne dépendant de lui, je préfère être dépendant de la nourriture (ou d’un produit) que je peux maîtriser ».
10Regardons le cycle de contact chez une personne en crise de boulimie. Tout d’abord, « elle contacte une sensation urgente, irrésistible, impérative, envahissante. Son self est alors en mode ça, très intense. » (Kath Habert, 1998). Le ça est à la fois prépondérant et pauvre, réduit à une sensation et à un sentiment d’urgence. Peu d’émotions émergent hormis le dégoût de soi. Elle identifie cette sensation comme un besoin urgent de manger tout en sachant qu’elle n’a pas faim. « Je décide » est scotomisé. La fonction-moi est au service de ce besoin impérieux sans possibilité de choix : elle ne peut résister à la crise. L’action va consister à trouver dans l’urgence des aliments, puis de les engloutir. Il y a absence de satisfaction, la personne s’arrêtant de manger uniquement parce qu’elle ne peut plus rien avaler. « La fin de la crise est souvent suivie d’un état de torpeur, de flottement interne… » (Jeammet, 2005). Les étapes du cycle du contact se font au service de la crise impérative et absurde. Le déroulement est rapide; le self est actif mais pauvre, inadapté et le mode ça domine.
11Observons un cycle de contact chez une personne boulimique en dehors de la crise, dans le « faux self » : La fonc-tion-moi sélectionne et agit à partir des « il faut », « je dois » introjectifs. Le seul besoin pris en compte, est celui d’être aimée et reconnue.
12Alors que toute la famille fait la sieste au plus fort de la chaleur, Monique (9-10 ans) va vite « tourner le foin » pour faire plaisir à son père qui lui dit simplement : « tu n’aurais pas dû ». Quand sa mère va au marché, elle se dépêche de faire tout le ménage, il n’y a aucun compliment et commentaire en retour. Adulte, elle va garder cette façon d’agir, en attente de cette reconnaissance, incapable d’être dans le retrait.
13Regardons encore un cycle de contact à partir du sentiment
de rage :
Marie, 50 ans, décrit une scène de conflit conjugale : « Lors de
nos vacances en Egypte, mon mari me demande ce que je préfère pour le programme de loisirs du lendemain puis il choisit de
faire autre chose sans me consulter; ça m’a mise en rage, j’ai hurlé
de colère et puis après mon éclat, je me suis sentie affreusement
honteuse. J’ai fait des excuses à mon mari et à nos amis ». Elle
va mettre de côté son sentiment d’être blessée qui avait précédé
le déclenchement de sa rage.
14Le cycle de contact se déroule mal. Une partie de l’émergence du ça passe inaperçue alors que la rage envahit tout. La fonc-tion-moi perd tout pouvoir, Marie se confond en excuses, ce n’est pas inadapté mais cela ne tient pas compte de toute l’expérience. La perception d’une image de soi négative va en s’aggravant avec le double sentiment d’être mauvaise et de ne pas exister.
15Dans les émergences du ça, on retrouve un sentiment constant de vide et d’ennui, la terreur de décevoir l’autre, l’angoisse d’abandon, le sentiment d’être transparente, la solitude, la nullité et la honte, la rage quand elle déborde et bien sûr la culpabilité. Le ça est finalement à la fois actif et pauvre puisque la personne se coupe de beaucoup de ses émotions.
16Dans les cycles de contact décrits, il y a incapacité de retrait, ce qui explique la déficience de la fonction-personnalité (allant jusqu’à la dépersonnalisation) qui n’assimile que l’échec, l’incompétence et la culpabilité, rendant encore plus impossible un contact avec l’environnement. Le peu d’assimilation positive vient accentuer la perte d’estime de soi. Dans les domaines de la vie où il y a compétence et réussite, le positif est invalidé : « C’était facile, je n’y ai aucun mérite ».
17La fonction-moi semble inaboutie, quasi inexistante, au service des introjections car il y a peu conscience des besoins. Le Moi a aussi des difficultés à sélectionner compte tenu des besoins et des désirs contradictoires.
18Qu’est-ce qui fait que cette pathologie-là s’est installée ?
19Dès la naissance, nous avons à « franchir un parcours à obstacles, fait d’un certain nombre de chantiers développementaux. Nous allons devoir rencontrer de grandes questions autour de la sécurité, de l’attachement, de la séparation, de l’individuation, de la construction de l’estime de soi, de notre capacité à la liberté et l’engagement, de notre capacité à aimer et à nous déployer sur le plan érotique. » (Delisle, le 25 octobre 2001).
20La pathologie boulimique résulterait de l’échec de la métabolisation des enjeux d’attachement et d’estime de soi en premier lieu. Ces femmes qui s’envahissent de nourriture semblent avoir été envahies psychiquement à un âge où la maturité n’était pas suffisante pour en avoir conscience et se défendre.
21L’abandon, l’abus sexuel, l’inceste, la violence physique, le fait de ne pas être considéré comme un enfant ou ne pas être vu, de ne pas avoir de place, telles sont les situations réelles auxquelles il a fallu faire face. L’insupportable est souvent d’« avaler » la violence, la maltraitance et les humiliations, apprendre à éviter, se taire, fuir le rejet et la critique, amadouer l’un des parents, obéir au désir de l’autre.
22Quelquefois ce sera plus subtil ou plus caché, victimes d’incompréhension sans cesse renouvelée, elles ont toujours l’impression d’être celles qui dérangent. L’enfant ne peut pas évoluer avec insouciance dans un environnement sécurisant avec des parents capables de gérer leurs affects.
23Il y a eu introjection toxique, Smith la décrit avec deux composantes : « La première est son contenu, l’interdiction spécifique. » – ne pas exprimer ses sentiments par exemple – « La seconde est la menace de retrait d’amour en cas de désobéissance à l’introjection toxique. » (…) « Il en résulte un conflit interne durant l’existence entière entre la pulsion naturelle vers la vie et la poussée mortifère du message toxique introjeté » (Smith, 1997). On est là très proche du dilemme de contact, selon G. Delisle (1998) « une configuration du champ telle qu’un élément de l’environnement est vécu comme à la fois indispensable à la survie et intolérable pour la survie… » Pour survivre, il va être indispensable de garder l’illusion d’avoir de bons parents, au prix du refoulement du passé, du déni et du clivage.
24Pour Fairbairn, l’enfant naît avec un self unitaire. C’est sous la contrainte, sous la pression des événements, quand il y a de l’indispensable et de l’intolérable, que le selfet le Moi se fragmentent. Le Moi ne peut maintenir sa cohésion et pour pouvoir garder l’indispensable, il clive « le mauvais » du parent. Si l’appareil psychique était plus mature, la capacité à trier le bon et le mauvais serait plus développée, il n’y aurait sans doute pas besoin de cliver. Fairbairn développe aussi l’idée que, pour l’enfant, il vaut mieux mettre l’enfer à l’intérieur de lui pour réduire l’insupportable du champ et le contrôler. Il se constitue ainsi comme mauvais et épargne le parent.
25Selon Winnicott et Klein, il est important que la mère ne soit pas psychiquement détruite par les attaques de l’enfant. Dans la situation où un enfant refuserait de manger de façon impérieuse, si la mère s’effondre psychiquement ou si elle a envie de jeter le bébé par la fenêtre, il aura le vécu de pouvoir détruire la mère ou d’être détruit par elle ou de se détruire lui-même.
26Claire dit que, depuis des années, elle a peur que ses parents meurent (rétroflexion). Cela la hante chaque week-end en repartant de chez eux. Récemment, dans une séance, elle évoque sa rage envers eux avec la peur de les détruire. Elle commence à voir comment ce conflit se joue chez elle.
27La rage, selon M. Klein est une réponse émotionnelle de haute intensité à une haute frustration qui développe un trop grand sentiment d’impuissance. Chez le bébé, la non-satisfaction du besoin peut entraîner la rage et l’avidité. L’émergence de ces deux sentiments engendre la peur de détruire l’autre ou de se détruire. En découle la peur d’éclatement ou de l’effondrement du self et du Moi. Si on regarde la boulimie à la lumière de ces éléments, le symptôme serait une tentative d’avaler et de vomir la mère comme si cela rejouait la réponse du bébé qui vit une frustration impossible à digérer. Elle prend sens si on la voit aussi comme une rétroflexion de la rage et de l’avidité.
28Dalila a des peurs terribles de mourir en se faisant exploser l’estomac lors d’une crise de boulimie.
29Anouchka, bouddhiste, nous décrit ce qui s’est passé lors d’une retraite avec des lamas de grande réputation : « Je me sentais avide, je me voyais avec des bras tentaculaires, happant les deux maîtres pour me les incorporer à la place du vide affreux que je ressentais, c’était horrible, je voulais les aspirer.
L’ABORD THÉRAPEUTIQUE SPÉCIFIQUE AUX TCA
30L’approche thérapeutique se heurte à beaucoup de résistances sachant que les personnes souffrant de dépendance ont à la fois besoin et peur d’être rejointes.
31Le travail de « déclivage » va permettre à la personne d’enrichir la fonction-ça. Le travail sur l’awareness va être essentiel pour la construction d’un réflexe de se « brancher sur soi » plutôt que sur l’environnement et pour la prise de conscience des besoins et des désirs. Le déclivage va également modifier la fonctionpersonnalité. La personne pourra changer l’image qu’elle a d’elle-même grâce à la construction d’une représentation du sens de son expérience.
32Le travail conjugué sur la fonction-ça et la fonctionpersonnalité va dynamiser la fonction-moi qui va pouvoir jouer son rôle de décideur et de mobilisateur des ressources pour la satisfaction des besoins et des désirs. Mais ce travail de thérapie va demander du temps alors que, paradoxalement, quand nous recevons les personnes souffrant de boulimie, elles sont dans l’urgence d’être « soignées » et guéries.
33Nous avons défini 6 axes de travail fondés sur la nécessité d’un moi-auxiliaire ou substitut de la fonction-moi. Cela tient compte de l’immaturité et de la difficulté de ces patientes à faire face aux attaques d’une partie d’elles-mêmes.
341e axe, le travail de réhabilitation du symptôme :
Au départ, le symptôme, « la crise » prend toute la place. Il y a
déni de toute autre souffrance, ce qui n’a pas de sens pour la
personne. L’émergence de sentiments de folie, de culpabilité et de
honte qui en découlent conduisent à l’augmentation du seuil d’angoisse. C’est pour cela que les thérapeutes feront les premières
hypothèses de sens :
« Et si votre boulimie était la seule façon que vous ayez trouvée pour vous en sortir ? »
« Et si c’était la boulimie qui vous montre que vous n’allez pas
bien et qui vous pousse à vous soigner ? »
35Malgré cela, Dalila continue de se culpabiliser violemment, en proie à de véritables états de panique : « Si c’était ton petit garçon qui avait vécu ce que tu as vécu, comment tu penses qu’il s’en sortirait ? ».
36« Il se suiciderait à 15 ans » furent les mots qui ont jailli et c’est ce qui lui a permis de contacter ce jour-là l’intensité de sa souffrance. Le soir, elle ne fera pas de crise.
37On voit bien à travers cet exemple que l’insistance des thérapeutes a pour but de faciliter l’acceptation du symptôme en attendant qu’il diminue et qu’il cesse, de commencer le travail de construction du sens de l’expérience, d’humaniser l’image que ces personnes ont d’elles-mêmes. Pour ce faire, les thérapeutes doivent eux aussi « lâcher le symptôme » et remettre en question leurs propres croyances et relations à la nourriture (« il faut manger équilibré, ne pas sauter de repas… »). Ils doivent vivre avec leur inquiétude liée aux risques encourus « sans se défaire ».
382e axe, le travail sur l’image de soi et la fonction personnalité :
L’image que les personnes boulimiques ont d’elles-mêmes est
déplorable. Elles se maltraitent en se critiquant constamment et
mettent toute leur énergie à nous prouver qu’elles ont raison de
se voir ainsi. Les thérapeutes leur demandent de ne plus se dénigrer comme on dit à un enfant qui approche d’un four « ça, ça brûle ».
Le but est vraiment d’initier une nouvelle image d’elles-mêmes en
donnant des repères afin de contenir, rassurer et leur faire prendre conscience qu’il y a une distorsion de la perception qu’elles
ont d’elles-mêmes. Cela aura un impact positif sur la dépression.
39De plus, le clivage produit des identifications projectives. Dans la position schizo-paranoïde décrite par M. Klein, le Moi expulse hors de lui les expériences intolérables en se clivant lui-même et en projetant ces parties clivées dans les objets extérieurs, c’est l’identification projective. Ainsi, en thérapie, la personne, sans en avoir conscience va faire porter au thérapeute quelque chose qui lui appartient à elle. Le thérapeute va être dans un état inhabituel et se demander ce qu’il est en train de vivre. Il ne doit pas se défendre, ni « être pris dedans » trop longtemps afin d’avoir accès à la partie clivée chez le client. Il pourra ainsi essayer de restituer à la personne quelque chose de ce dont il vient de prendre conscience mais de façon recevable, à « petites doses », pour ne pas reproduire les risques de clivage. On pourra comme J. M. Robine utiliser le « ça de la situation », en nommant une émotion par exemple et chacun dans le champ se réappropriera la part d’émotion qui lui appartient.
40Le travail sur les polarités agira sur le clivage et consistera aussi à soutenir chez la personne les différents aspects de la personnalité, les ressentis pouvant paraître contradictoires. Comme nous l’avons vu, nos patientes se sentent souvent frustrées, mauvaises, nulles. Il leur arrive de se sentir bonnes et compétentes, mais quand l’environnement est identifié comme mauvais ou en souffrance, elles deviennent alors sauveuses. Elles sont ou bonnes ou mauvaises, comme leur environnement qui est aussi perçu comme binaire. Tout est clivé.
41Quand elle n’est pas bien, Dalila vit la dureté et l’intransigeance.
42Elle s’apaise quand on lui fait expérimenter sa douceur et sa féminité. Ce sera long avant qu’elle puisse réconcilier et intégrer ses deux aspects d’elle-même. Nous allons reconnaître et soutenir l’ambivalence, Dalila la dure et Dalila la douce.
43Les thérapeutes pourront aussi souligner, si cela semble opportun, leur propre ambivalence, surtout s’il y a eu une maladresse de leur part.
443e axe, le travail d’étayage :
Les personnes souffrant de boulimie évoquent leur sensation de
vide, comme « un puits sans fond ». Pour rendre le vide abordable, les thérapeutes vont continuer d’être directifs en étayant ailleurs, en les ramenant au concret de leur vie, en les aidant à
repérer et à mobiliser leurs ressources.
45« Etayer », c’est par exemple aider Marine à se réinvestir dans une vie professionnelle. Femme au foyer, elle se dévalorise et se sent vide et nulle. Nous insistons pour qu’elle se laisse imaginer ce qu’elle aimerait faire. Elle va réaliser son projet d’être auxiliaire de puériculture. Elle s’étonne encore de sa réussite.
46Ce travail permet de stimuler la fonction-moi. La personne va prendre une décision et prendre les mesures qui s’imposent pour la réussite de son projet, ainsi la fonction-personnalité sera enrichie de l’expérience positive. Un jour, quandle lien sera plus solide, il sera possible de les accompagner visiter ce vide et tout ce travail d’étayage sera autant de cordes de rappel, de filets de trapézistes et surtout la personne saura à ce moment-là du travail qu’elle peut compter sur la main du thérapeute qui ne la lâchera pas.
474e axe, le travail sur les émotions :
Le fait même d’être dans le désir de l’autre entraîne la négligence
de leur propre ressenti. Il y a anesthésie des émotions y compris
de la souffrance. À la question « qu’est-ce que vous ressentez ?»,
elles vont répondre par « je pense que » ou continuer à raconter
comme si elles n’avaient pas entendu. Dans le travail d’awareness,
la personne devra se sentir accompagnée par le thérapeute, suffisamment rassurant et ferme pour qu’elle accepte de ralentir le
débit verbal et prendre le temps de sentir. À chaque séance, c’est
aussi un vrai travail de détective. Souvent ce sont les autres membres du groupe qui repèrent les événements porteurs de souffrance.
48Barbara, après effondrement de son projet en libéral à cause d’une escroquerie, parle uniquement de « ses boulimies » qui ont redoublé. Mais les sentiments de déception, de colère, de tristesse et de découragement auxquels on pourrait s’attendre n’émergeront qu’après beaucoup d’insistance.
49Il va être important d’être attentif à l’absence d’émotions qui paraîtraient légitimes, d’autant plus si les thérapeutes et le groupe les ressentent. Ils « portent » l’émotion que la personne serait sensée ressentir. Il faudra du temps avant que la personne retrouve la mémoire de certains vécus douloureux, d’où la non-conscience de certaines émotions et sentiments.
50Quand Delphine nous consulte, elle est très endettée avec deux enfants à charge et son compagnon qui s’alcoolise lui dit que c’est son problème à elle. Paradoxalement, elle affiche avec nous un sourire qui laisse penser que tout va bien, elle dit qu’elle n’a rien à dire. Elle fait inconsciemment quelque chose pour qu’on la délaisse. Elle raconte qu’à dix sept ans, après quinze jours de mariage, son mari meurt d’un accident. Il n’y aura personne pour l’accueillir, elle va se retrouver « à vivre dans la rue ».
51Les thérapeutes repèrent la reproduction du vécu abandonnique dans sa vie et «… ce microclimat qu’elle porte avec elle, pour nous, est le reflet, à la surface des choses, d’enjeux fondamentaux et développementaux qui sont inachevés et qui sont encore dans une complexité de sens :la personne doit remettre en place cette espèce de labyrinthe, pour enfin trouver une façon de compléter et de dénouer… » (Delisle 2001).
52On interroge son passé développemental même si Delphine répète souvent combien elle a été choyée par sa maman. Elle se remémore la période où ses parents ont divorcé. Sa mère acheta un bar, prit des amants, se mit à boire et délaissa ses deux enfants de cinq et sept ans montrés du doigt à l’école à cause du manque d’hygiène. Elle prend là conscience de son sentiment d’abandon. Retrouver la souffrance de l’enfant a été dure. Cela survient au moment où Delphine peut s’appuyer sur les thérapeutes et le groupe. À partir de là, elle peut se faire aider par une assistante sociale pour un dossier de surendettement, prend la décision de se séparer momentanément de son compagnon le temps d’assainir sa situation, réinvestit sa vie professionnelle et trouve un poste d’informaticienne.
53La confiance s’installera lentement avec les thérapeutes (enjeu de sécurité). On pourrait avoir l’illusion avec certaines patientes qu’elle est vite acquise. Ce n’est pas le cas. Derrière une apparente facilité de contact, la personne reste lointaine.
54La peur d’être débordées par les émotions est fréquente car les sentiments de rage et d’avidité qui l’accompagnent sont extrêmement difficiles à vivre. Les thérapeutes dédramatiseront dans une volonté de « mettre du sens », afin d’abaisser le seuil d’angoisse, expliqueront à la personne que ce sentiment-là s’est construit très tôt, parce que quelque chose a été trop frustrant et insupportable :« on n’est pas coupable de ressentir de la rage, on est responsable de ce que l’on en fait ».
55Ils proposent ce qu’on pourrait appeler l’apprentissage de la gestion de la rage. Un dispositif de sécurité est nécessaire pour faire ce travail. Pour cela, les « mises en acte » en tapant sur des coussins ou des matelas sont rarement utilisées et risquent, à notre avis, de renforcer la peur d’être engloutie par la rage ou la peur qu’elles ont d’elles-mêmes.
56Des exercices de sophrologie seront proposés, par exemple l’exercice de la cible qui consiste à propulser le poing sur une cible imaginaire. D’autres exercices seront proposés dans le même esprit.
57Puis, on va demander à la personne si elle a conscience de ce qui a déclenché la rage ? La recherche va se faire tout d’abord dans les relations actuelles avec son entourage. Suivant l’exemple du cycle de contact de la rage, la personne oublie ce qui l’a frustrée, envahie par la culpabilité et la honte d’avoir manifesté une colère aussi démesurée. Il va falloir lui restituer la part qu’elle oublie et ainsi la soutenir pour qu’elle décide ce qu’elle en fait. Est-ce que Marie va reparler à son mari de ce qui l’a blessée lors de leurs vacances en Egypte et lui signifier qu’elle ne veut plus qu’il ait cette attitude ?
58Enfin, dans la relation avec le thérapeute, il y aura place pour éprouver ce sentiment, car l’imperfection des thérapeutes leur apparaît tôt ou tard. Là encore ils vont devoir encourager l’expression de la rage sans être trop défensifs, tenir le lien, être contenants, ne pas se laisser détruire, ni devenir attaquants sinon le vécu parental se reproduirait. L’avidité est peu exprimée, la personne peut l’ignorer en dehors des crises de boulimie, alors qu’elle reste présente dans la relation à l’autre.
59Béatrice est actuellement en thérapie individuelle après trois ans de groupe. Durant de longues semaines elle reprend tous mes mots, comme si elle ne pouvait ou ne voulait rien de moi. Elle me transperce de son regard suspicieux et plein de colère. Par ailleurs, elle me parle depuis longtemps de son désir de mourir. « À l’interne », je suis très inquiète et je remets en question mon travail. Avec elle, le plus souvent je me contente de nommer ce qui se passe « c’est comme si je ne trouve jamais les bons mots et ça te met très en colère » ou bien « c’est pas facile à vivre ce qui se passe entre nous mais nous savons toutes deux que nous avons de l’importance l’une pour l’autre, un jour nous y verrons plus clair ». Je me concentre sur un seul objectif, tenir. Le soutien de son psychiatre et mon travail en supervision m’ont permis de ne pas céder à l’envie de stopper la thérapie sous la pression de la rage et de la méfiance extrême de Béatrice… Elle a testé le lien, installer la sécurité a été à ce prix. Cela montre aussi la difficulté de la relation duelle chez certaines patientes particulièrement sensitives.
605e axe, le travail sur les limites :
Mettre des limites s’impose, ce sont d’indispensables repères
entre le débordement de panique qui les anéantit et le total dévouement à l’autre. N’oublions pas que « Les dangers de l’introjection
sont doubles. Tout d’abord, l’introjecteur est incapable de développer sa personnalité, car il est tout occupé à maintenir en place
les corps étrangers logés dans son organisme. Plus il est surchargé
d’introjects encombrants, moins il a de place pour s’exprimer et
découvrir qui il est… L’introjection désintègre le personnalité. » (…)
« La frontière entre soi-même et le reste du monde s’est tellement incurvée vers l’intérieur qu’il ne reste presque plus rien de
soi… » (Perls, 1969).
61L’introjection va aller de pair avec la confluence. Nous observons chez ces personnes différentes façons de l’exprimer, elles vont privilégier le « on », elles finissent souvent la phrase de l’autre, certaines peuvent prononcer les mêmes mots que la personne qui est entrain de parler comme si elles étaient « dans l’autre », elles ne savent pas dire « non », ce qui veut dire qu’elles disent presque toujours « oui ». Brigitte nous explique que dans la même journée, elle s’apprête à aller à Auchan pour la troisème fois sur la demande de trois amies différentes.
62Les thérapeutes vont axer leur travail sur le comportement en agissant en auxiliaire du moi. Ils font expérimenter le « je » au lieu du « on », et soutiennent les personnes dans l’apprentissage du « non ». Elles prennent conscience de leur fonctionnement. On débutera par des exercices simples, sans enjeu important. Ce sera par exemple d’expérimenter des refus dans un contexte où il y a peu d’affectif ou bien pour de petits motifs. Mais cela va se faire dans la relation et le lien avec les thérapeutes. La résurgence des traumatismes s’appuiera sur leur fonction « contenant ».
63Quand Marie-Pierre s’essaie au « non » sur notre invitation, elle va s’effondrer, en larmes. À 8 ans, elle se souvient d’avoir dit « non » à sa mère et à la suite celle-ci a fait une tentative de suicide. Le meilleur ami des parents de Claire a l’habitude de masser les enfants de la famille. Il va avoir avec elle des gestes « déplacés » qu’elle ne saura pas identifier comme tels jusqu’à ce qu’ils soient plus explicites. Elle pense que c’est peut-être son attitude àelle qui l’a induit. Elle aimerait le confier à ses parents mais elle sait que comme pour d’autres problèmes, elle ne sera ni crue ni défendue, son père va éclater de rire et sa mère va banaliser. Alors elle va se laisser happer par la culpabilité et l’impuissance. Quand elle va pouvoir le confier en thérapie, se sentir entendue et reconnue dans sa douleur, elle va se redresser, oser des jugements et des colères, en parler à sa mère. Elle devient « consistante » et peut affronter l’autre. La frontière-contact se déplace et la fonction « Je » se réactive.
64« Dans le développement émotionnel de l’individu, le précurseur du miroir, c’est le visage de la mère… Que voit le bébé quand il tourne son regard vers le visage de la mère ? Généralement, ce qu’il voit, c’est lui-même. En d’autres termes, la mère regarde le bébé et ce que son visage exprime est en relation directe avec ce qu’elle voit. » (Winnicott,1971 p. 203 et 205). Si la mère est absorbée ou bien dépressive, que rencontre l’enfant dans ses yeux ? Le vide, l’angoisse ? Peut-il avoir conscience de lui ? Les thérapeutes vont servir de miroir et peu à peu la personne pourra se sentir exister, le « je » deviendra plus spontané.
65Adeline, 38 ans vit avec sa mère. Elle arrive dans le groupe terrorisée. Notre travail consiste essentiellement à lui renvoyer un reflet de ce que nous observons chez elle. Petit à petit, elle nous fait goûter son humour et nous devenons de plus en plus sensibles à son regard malicieux. Elle va se mettre à babiller comme une petite fille : quel âge as-tu, Adeline quand tu fais ça ? Deux ans nous répond-elle, amusée. Nous apprenons avec elle qu’il faut être vue pour exister. En même temps, dans sa vie, elle franchit un cap : elle est reçue à cinq concours administratifs, elle devient capable de s’éloigner et de mieux assumer sa vie d’adulte.
66Pour favoriser d’abord un travail identificatoire, il est bon de ne pas se hâter de nommer les différences de chacun. Avoir des choses en commun avec l’autre même si au début, c’est la boulimie et la honte, c’est ne plus se vivre comme une « extraterrestre », c’est développer un sentiment « d’appartenance ». Les expériences de vie, les valeurs se partagent, les regards s’échangent, chacune se familiarise avec l’histoire de l’autre. Des tensions se relâchent. Une saine confluence s’installe, nécessaire à ce moment-là, elle contribue à inscrire de la sécurité.
67Il sera important d’apprendre à ne plus supporter l’insupportable.
68La frontière-contact étant « déformée », les personnes « sentent » uniquement ce qui est insoutenable, d’où l’importance que leur perception évolue dans l’échelle du ressenti.
69Quand elles ont un peu plus conscience d’exister, chacune peut commencer à partager ses différences, puis ses désaccords sans se sentir trop vulnérable. C’est le moment où nous proposons le groupe d’affirmation de soi [4]. Dix séances pour apprendre à dire bonjour, faire une critique, en recevoir une, dire « non », recevoir un cadeau. Avec l’ambition dans cette étape d’être plus éducatif que thérapeutique, nous avons néanmoins constaté que la personne se sent légitimée dans son droit de s’affirmer.
70Ce sont « les mises en situation » qui vont mettre en évidence la confluence et l’introjection et leur permettre de voir que leur désir ne se différencie pas du désir de l’autre. Cela parle souvent de la relation fusionnelle à la mère.
71Anika fait les trajets avec sa mère, dans la voiture de celle-ci pour se rendre chaque jour au travail dans la même administration qu’elle. Elle écoute le flot de paroles de sa mère, elles savent tout l’une de l’autre, elles ont les mêmes lectures. Quand nous l’invitons à rejouer la scène de la voiture sur le trajet du travail, sa colère vis-à-vis de sa mère la prend à la gorge. Ce fut un véritable insight quand elle conscientise l’insupportable de la situation. À partir de là, elle va pouvoir dire qu’elle tait son poids à son beau-père sur demande impérative de la mère car celui-ci pourrait deviner le poids de sa femme. Elle réalise qu’elle se sent coupable de par sa conception, du départ de son père biologique, donc de la solitude de sa mère et celle-ci, de son côté se sent coupable des troubles d’Anika à cause des crises de violence qu’elle lui faisait subir.
72Les thérapeutes décideront du moment opportun pour nommer
la confluence même si elle est massive car elle est souvent sous-tendue par la peur. Sortir de la confluence, exister, se différencier
c’est aussi prendre conscience de l’intimité avec soi-même (l’intériorité). Nous avons demandé à Anika de taire une chose à sa
mère dans la semaine. Une des règles instituées dans le groupe,
c’est de ne pas tout dire car il y a chez elles une volonté de transparence, elles s’imaginent ainsi que la thérapie sera plus efficace.
6e axe, le travail d’anamnèse :
Habituellement plus centrés sur le processus que sur le contenu
du discours, les thérapeutes donnent néanmoins de l’importance
à l’enquête sur le réel car souvent les personnes entretiennent
du flou autour de leur histoire, de celle de la famille ou des dates
importantes pour elles. Cela a une action sur la culpabilité car le
lien n’est pas fait entre le dedans et le dehors. Nous observons
souvent qu’un événement marquant provoque l’augmentation des
crises d’où l’intérêt de le rechercher.
POUR CONCLURE
73L’intérêt du groupe réside, comme on l’a vu précédemment, dans les mouvements d’identification et de différenciation que le groupe permet. La souffrance est à la fois reconnue dans la similitude des situations et dans la singularité de ce qui les distingue. La réciprocité des rôles dans les échanges fournit à chacune la possibilité d’être celle qui exprime sa souffrance et celle qui participe à l’élaboration de la souffrance exprimée par une autre et donc à la sienne propre.
74Comme nous l’avons décrit, les personnes qui vivent l’enfer de la boulimie ont honte. Quand elles se retrouvent dans un groupe, la honte s’atténue, elle devient nommable. Le groupe est narcissisant. Il sert de réceptacle et de contenant. (À noter qu’un temps est donné à chacune pour ne pas reproduire sciemment une rivalité impossible à assumer, souvent présente dans leur histoire).
75Le groupe médiatise la relation, la rend moins dangereuse et permet un soutien que la personne peut accueillir. Dans le domaine plus transférentiel, il permet de ne pas trop raviver en début de thérapie l’agressivité vis à vis de la mère, en l’occurrence des thérapeutes, ce qui va permettre à la personne de « se nourrir » (introjections positives). Il y a une fratrie qui rassure. Le lien créé dans le groupe et par le groupe leur paraît moins dangereux. Le groupe facilite le travail de régression. Ce travail se rapproche du holding (tenir) et du handling (manier) de Winnicott.
76À travers les identifications projectives, les thérapeutes vont se sentir bien des fois paralysées, « absorbées », comme si la personne leur faisait goûter leur mode de relation. Cela est beaucoup plus gérable en co-animation. Le groupe permet aussi de travailler sur la séparation quand il y a un départ. C’est une expérience pour celle qui part et celles qui restent. Comment se vit la séparation de part et d’autre ? Est-ce que le lien est suffisamment construit pour qu’elle l’ait intériorisé ? Les thérapeutes vont également exprimer leur propre ressenti.
77La fin de thérapie sera un moment privilégié pour travailler les introjections « thérapeutiques », les thérapeutes n’agissant plus en auxiliaire du moi.
78Ce n’est pas l’arrêt du symptôme qui signe l’arrêt du groupe.
79Certaines ne font plus de crises ou uniquement quand quelque chose d’inquiétant n’est pas identifié (voyant d’alerte). Pour les personnes souffrant d’hyperphagie boulimique, il y a assez souvent arrêt du symptôme avec ou sans diminution de poids. Elles auront quelquefois à faire le deuil du poids idéal.
80L’amélioration se manifeste aussi par une meilleure tolérance au bon et au mauvais, avec soi et avec l’environnement. Elles supportent mieux les frustrations de la vie, elles deviennent moins sensibles au regard d’autrui, elles ont plus d’humour sans être corrosives vis-à-vis d’elles-mêmes. Le contenu des émergences se modifie avec moins de honte et de mépris de soi. Il y a reprise des relations sociales, restauration d’une vie professionnelle. La disparition du déni et la diminution des phénomènes de clivage montrent qu’elles peuvent se confronter à la souffrance sans trop se désorganiser et sans cliver.
81C’est plutôt l’intégration d’une meilleure image de soi, la capacité de resituer le symptôme et de pouvoir lui donner un sens, en lien avec ce qui se passe dans leur vie, qui montrent qu’elles vont mieux. Alors sera possible une thérapie non spécifique. Ce sera souvent bénéfique pour elles de continuer avec un thérapeute masculin.
82Le moment de leur départ correspond à l’authentique rencontre du thérapeute et de la personne dans un « cœur à cœur » que permet ce long tissage du lien. L’environnement de la personne change, elle sent qu’elle n’est plus tout le temps seule, elle commence à se sentir aimée…
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
- DELISLE G. : Le dialogue herméneutique en psychothérapie, conférence le 25-10-2001 à l’Hôpital de Tourcoing, 20 p. – La relation d’objet en Gestalt thérapie, Les éditions du Reflet, Montréal 1998. D.S.M. IV (Mini), Critères diagnostiques, Masson, Paris 1997.
- HABERTK. : D’un « je » sans frontière à la faim de bœuf, Document EPG N° 12, 1998.
- JEAMMET P. : Anorexie, Boulimie, Les paradoxes de l’adolescence, Hachette Littératures, 2005.
- JEAMMET P., BRUSSET B., COUVREUR C., VINDREAU C., FINE A., McDOUGALJ. (1991), La Boulimie, Monographies de la revue française de psychanalyse, PUF, Vendôme, 5e édition, 2002.
- SALATHE N. K. (1992) : Psychothérapie Existentielle, perspective gestaltiste, l’Institut de Psychothérapie Gestalt-Existentielle, Genève 1995.
- PERLS F. (1969) : Manuel de Gestalt-thérapie, La Gestalt : un nouveau regard sur l’homme, ESF, Issy-les-Moulineaux 2003.
- SCHASSEUR B. : La boulimie, un suicide qui ne dit pas son nom, De Boeck, Bruxelles 2002.
- SMITH E. W. L. : Les auto-interruptions dans le rythme du contact et du retrait, in Revue Gestalt N° 11, 1988, p. 61-82.
- WINNICOTT D. W. (1971), Jeu et Réalité, Folio essais 2005.
Notes
-
[1]
Centre Pierre Janet, Hôpital de secteur psychiatrique Ste Marie à Clermont-Ferrand. Équipe pluridisciplinaire, dont trois Gestaltistes. La co-thérapeute des groupes TCA est Marie-Thérèse ANDRIEU.
-
[2]
Nous choisissons de parler de « personnes en souffrance » plutôt que de « boulimiques ». Cela permet de désigner aussi bien un homme (4 % de notre population) qu’une femme.
-
[3]
Il nous est quelquefois difficile de faire la distinction entre boulimie et ce type d’anorexie lors des premiers entretiens. Les formes atypiques de symptôme sont assez fréquentes. Il arrive que la personne décompense sur le plan anorexique en cours de thérapie. Pour les problèmes d’anorexie de type restrictif c’est-à-dire avec refus de s’alimenter, cela demande un travail de thérapie approprié car, à la différence des précédentes, elles contrôlent la nourriture ce qui développe chez elle un sentiment de toute-puissance.
-
[4]
Thérapie cognitivocomportementale.