Genèses 2001/1 no42

Couverture de GEN_042

Article de revue

Les dockers

Retour sur le long processus de construction d'une identité collective en France, xixe-xxe siècles

Pages 5 à 25

Notes

  • [1]
    Sur les débats qui ont traversé l’histoire sociale on se reportera, entre autres, à Christophe Charle (éd.), Histoire sociale ; histoire globale ? Actes du colloque des 27-28 janvier 1989, Paris, Éd. de la MSH, 1993 ; Bernard Lepetit (éd.), Les formes de l’expérience. Une autre histoire sociale, Paris, Albin Michel, 1995, Gérard Noiriel, Sur la « crise » de l’histoire, Paris, Belin, 1996 et Antoine Prost, Douze leçons sur l’histoire, Paris, Seuil, 1996.
  • [2]
    A. Prost, « L’histoire ouvrière en France aujourd’hui », Historiens et Géographes, n° spécial « Histoire ouvrière », Michel Pigenet, Jean-Louis Robert (éd.), n° 350, octobre 1995, p. 208.
  • [3]
    Voir Y. Schwartz (éd.), Reconnaissance du travail. Pour une approche ergologique, Paris, Puf, 1997.
  • [4]
    À l’exemple, dans un autre contexte, des bûcherons qui avaient précédemment retenu notre attention. Voir M. Pigenet, « Ouvriers, paysans nous sommes… ». Les bûcherons du Centre de la France au tournant du siècle, Paris, L’Harmattan, 1993.
  • [5]
    On sait comment, en réplique au film d’Elia Kazan, Sur les quais, dont la dénonciation, en 1954, du contrôle exercé par la pègre sur les organisations de dockers de la côte est des États-Unis tendait à confondre syndicalisme et pègre, Sydney Lumet proposa, avec Vu du pont, réalisé en 1962, une autre vision des travailleurs portuaires.
  • [6]
    Voir René Borruey, Jean-Lucien Bonillo, Fluidité et architecture ; les logiques de l’espace portuaire, Paris, Caisse nationale des Monuments historiques, 1993 ; M. Croguennec, « L’aménagement du port de Rouen de 1800 à 1940 ; contraintes techniques et stratégies », thèse d’histoire, université de Rouen, 1999 et Claude Mignot, L’architecture au xixe siècle, Fribourg, Office du livre, 1983.
  • [7]
    Voir John Lovell, Stevedores and Dockers. A Study of Trade Unionism in the Port of London 1870-1914, London, Mac Millan & Co ltd, 1969 et Eric L. Taplin, The Dockers’ Union ; A Study of the National Union of Dock Labourers, 1889-1922, Leicester, Leicester University Press, 1986.
  • [8]
    E. Nijhof, « Des journaliers respectables. Les dockers de Rotterdam et leurs syndicats, 1880-1965 » in Dockers de la Méditerranée à la mer du Nord. Des quais et des hommes dans l’Histoire, Aix-en-Provence, Édisud, 1999, pp. 115-125.
  • [9]
    M. Pigenet, « Dimensions et perspectives internationales du syndicalisme docker en France dans la première moitié du xxe siècle » in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 215-223.
  • [10]
    Congrès international des Unions de travailleurs des transports, 19-21 septembre 1900, Bourse du Travail de Paris, Paris, Imprimerie économique, 1900.
  • [11]
    Archives nationales (AN), F7 13699. Dockers, historique, organisation. Congrès des 13 et 14 avril 1901.
  • [12]
    Compte rendu des travaux. XIe congrès de la Confédération, Toulouse, 3-10 octobre 1910, Toulouse, Imprimerie ouvrière, 1911, p. 365. Allant au plus court, les rédacteurs du compte rendu ne s’embarrassent pas de subtilités et réunissent l’ensemble des organisations des Ports et Docks sous la rubrique « Fédération des Dockers ».
  • [13]
    Congrès fédéral, 27-29 janvier 1938, Nantes, Paris, L’Émancipatrice, 1938.
  • [14]
    Journal officiel du 20 août 1947. Exposé des motifs du projet de loi.
  • [15]
    Intervention de Gérard Leclercq, Congrès fédéral national, 18-19 mai 1960, Paris, Imprimerie de la Fédération, s. d.
  • [16]
    Si la plupart insistent à ce propos sur son passé de « magasinier », les moins aimables parlent de « docker de péniches ».
  • [17]
    L’Avenir des Ports, février 1962.
  • [18]
    Expression appliquée aux terrassiers parisiens empruntée à Georges Navel. Voir G. Navel, Travaux, Paris, Gallimard, 1979 (1re éd., Paris, Stock, 1945), p. 186.
  • [19]
    T. Perron, « Légende noire et icônes rouges ou l’image des dockers au cœur de la guerre froide » in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 193-204.
  • [20]
    J.-P. Avenel, « Les dockers du Havre. Aspects psycho-sociologiques et médicaux de la vie du groupe », thèse de médecine, Paris, 1960.
  • [21]
    Alain Cabantous, Les citoyens du large. Les identités maritimes en France. xviie-xixe siècles, Paris, Aubier, 1995, p. 193, signale, d’un point de vue plus général, la place du danger et du risque, « plus que du travail lui-même », dans l’émergence d’une « identité commune aux populations maritimes des temps modernes ».
  • [22]
    L’Avenir des Ports, juin 1948.
  • [23]
    Loic Hislaire, Dockers, corporatisme et changement, Transport Actualités-GEP Communication, 1993, pp. 14 et 104.
  • [24]
    G. Denigot, « Docker à Saint-Nazaire », in ADRET, Travailler deux heures par jour, Paris, Seuil, 1977, p. 53.
  • [25]
    Témoignage de Louis Vaubaillon cité par P. Veyron, « Les dockers du port de Rouen (1919-1947) », maîtrise, université de Rouen, 1979, annexes.
  • [26]
    Témoignage recueilli par S. Béroud, « Représentations individuelles au sein d’un système corporatif en crise : l’exemple des dockers de Fos », Paris, mémoire IEP, 1992, p. 81.
  • [27]
    M. Pigenet, « La solidarité syndicaliste entre vertu et nécessité. L’exemple des dockers (xixe-xxe siècles) », contribution au colloque « Les Solidarités », Bordeaux, 16-17 juin 2000, actes à paraître.
  • [28]
    À la suite de Selig Perlman, Denis Segrestin conteste, notamment à propos des dockers, l’équivalence trop rapidement établie entre corporatisme syndical d’une part et conservatisme ou absence de conscience de classe d’autre part. Voir D. Segrestin, « Du syndicalisme de métier au syndicalisme de classe : pour une sociologie de la CGT », Sociologie du travail, n° 2, 1975, pp. 152-173.
  • [29]
    C. Kerr, A. Siegel, « The Inter-Industry Propensity to Strike : an International Comparison », in A. Kernhauser, R. Dublin, A. M. Ross (éd.), Industrial Conflict, New York, Mac Graw Hill, 1954.
  • [30]
    Voir notamment E. Nijhof, « Le syndicalisme militant et pragmatique : les dockers de Rotterdam, 1945-1965 » in M. Pigenet (éd.), « Le syndicalisme docker depuis 1945 », Cahiers du Grhis, n° 7, 1997, p. 109.
  • [31]
    Voir M. Pigenet, « La liqueur et le fiel ou le difficile cheminement des dockers vers l’unité » in La CGT et le Front populaire, Montreuil, Institut CGT d’Histoire sociale, 1997, pp. 77-109.
  • [32]
    M. Pigenet, « Les dockers français, “garde-côtes de la paix” », in Images et mouvements du siècle. Chronique sociale, t. II, Paris, ICGTHS-Édition France-Progrès, 1999, pp. 409-416. L’option internationaliste du syndicalisme docker s’affiche dès la création de la Fédération nationale en 1901, année où se constitue à Marseille un « syndicat international », ouvert à tous les travailleurs du port sans distinction d’origine. Précisons qu’à l’échelon national comme au niveau local, ce choix idéologique procède aussi de considérations tactiques.
  • [33]
    Déclaration de la Commission de la Défense nationale de l’assemblée, le 22 février 1950.
  • [34]
    François De Closets, Tous ensemble. Pour en finir avec la syndicratie, Paris, Seuil, 1985. Au sujet des dockers, l’auteur évoque un « paroxysme du pouvoir syndical ».
  • [35]
    F. Grosrichard, « La corpo des dockers », Le Monde du 14 mai 1992.
  • [36]
    L’Express du 25 mai 1992.
  • [37]
    A. Le Marchand, « Le syndicalisme docker au Havre depuis 1947 ; de l’action structurante à la double contrainte », Cahiers du Grhis, n° 7, 1997, p. 93. À Marseille, au milieu des années 1990, « un docker ordinaire travaillant sur les conteneurs gagne 170 000 francs par an ». Alfred Pacini, Daniel Pons, Dockers à Marseille, Paris, Payot, 1996, pp. 306.
  • [38]
    Le 24 juillet 1947, à la veille du vote du statut des dockers, la Chambre de commerce du Havre se prononce contre l’allocation « d’avantages supplémentaires » à une « corporation privilégiée ». Journal de la marine marchande du 21 août 1947.
  • [39]
    J. Dupuydauby, La filière portuaire française. Mission de réflexion et de proposition. Rapport au ministre des Transports et au secrétariat à la mer, Paris, décembre 1986.
  • [40]
    F. Grosrichard, « La corpo des dockers », Le Monde du 14 mai 1992.
  • [41]
    Bernard Lecuyer, F. Millequant, « Les dockers : quelques traits d’une corporation charnière dans la chaîne des transports », in Georges Ribeill (éd.), Les frontières et identités professionnelles dans les métiers des transports, Actes de la journée d’études du 16 novembre 1984, Paris, Greco 55, p. 4.
  • [42]
    J.-P. Avenel, Les dockers du Havre…, op. cit.
  • [43]
    C. Kerr, A. Siegel, « The Inter-Industry… », op. cit.
  • [44]
    L’Avenir des Ports, novembre 1964.
  • [45]
    Le Petit Parisien, 2 octobre 1893.
  • [46]
    Archives de la Préfecture de police (APP), BA 1371, rapport sur la grève des débardeurs du quai Henri IV du 9 au 12 mai 1895.
  • [47]
    Marcel-Adolphe Hérubel, La France au travail. En suivant les côtes. De Dunkerque à Saint-Nazaire, Paris, Pierre Roger et Compagnie, 1912, pp. 139-140.
  • [48]
    Albert Londres, Marseille, porte du Sud, Marseille, Laffitte Reprints, 1980 (1re éd. 1927), p. 74.
  • [49]
    Jean-Pierre Castelain, Manières de vivre, manières de boire. Alcool et sociabilité sur le port, Paris, Imago, 1989, p. 55.
  • [50]
    Jacques Loew, En mission prolétarienne, Paris, Économie et humanisme, 1946, pp. 19-20.
  • [51]
    J. Loew ; Les dockers de Marseille, analyse type d’un complexe, L’Arbresle, Économie et humanisme, 1945. L’analyse, menée à une période de chômage intense, souffre de reposer sur la seule expérience du père, docker novice, relégué vers les tâches les plus ingrates. Les solutions proposées, imprégnées de catholicisme social, trouvent par ailleurs leur inspiration dans l’ancien système corporatif présenté sous son meilleur jour.
  • [52]
    R. Cornu, « Du portefaix au docker : des mythes indestructibles ? », in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 171-178.
  • [53]
    J.-P. Castelain, Manières de vivre…, op. cit., p. 19.
  • [54]
    L’expression sert toujours d’insulte d’un quartier à l’autre de Marseille. Voir M. Lemoine, « Vue en coupe d’un volcan », in Marseille, Histoires de famille, Paris, Autrement, 1989, p. 98.
  • [55]
    Joël Zattara, responsable de la sécurité sur le port de Marseille, distingue nettement le grappillage des vols de conteneurs par des bandes organisées capables « d’intégrer toute une série de maillons » portuaires. Voir A. Pacini, D. Pons, Dockers à Marseille, op. cit., pp. 304-308.
  • [56]
    Intervention de Pesce, 3e congrès national de la CGTU, Paris, 26-31 août 1927, p. 161.
  • [57]
    M. Quoist, La ville et l’homme. Rouen. Étude sociologique d’un secteur prolétarien, Éd. Ouvrières-Économie et humanisme, 1952, p. 50. Voir également les nombreux entretiens consignés par S. Coutant, « Le docker du port de Rouen. La pratique du métier du statut de 1947 au début des années 1960 », maîtrise, université de Rouen, 1996, Annexes.
  • [58]
    M. Quoist, La ville et l’homme…, op. cit., p. 181.
  • [59]
    AN, F7 13705.
  • [60]
    L’Avenir des Ports, juin 1950.
  • [61]
    19e Congrès fédéral national, 12-13 juin 1980, Paris, supplément à L’Avenir des Ports d’octobre 1980, p. 26.
  • [62]
    Congrès fédéral national, 15-16 juin 1972, Paris, Imprimerie de la Fédération, s. d., p. 45.
  • [63]
    Intervention de Jacques Delahaye, ibid., p. 43.
  • [64]
    Voir F. Baconnier, Le Salut par la corporation, Paris, Les Œuvres françaises, 1935. Notons que Paul Chanson, partisan résolu du corporatisme et auteur d’ouvrages sur la question, préside à la même époque le syndicat des employeurs maritimes de Calais.
  • [65]
    Voir les deux longs articles de C. Jannet, « Exposé des mœurs des Portefaix », et C. de Ribbes, « La Société des Portefaix de Marseille, son histoire et sa constitution actuelle », parus en 1865 dans le Bulletin de la Société internationale des Études pratiques d’Économie sociale.
  • [66]
    Pour une analyse critique de ces structures et de leur historiographie, on se reportera notamment à R. Cornu, J. Duplex, B. Picon, Les industries portuaires à Marseille. Analyse contextuelle de la mobilité, Aix-Marseille, LEST, 1973 ; R. Cornu, « Du portefaix au docker : des mythes indestructibles ? », in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 171-178 ; C. Gontier, Docks en stock. La manutention portuaire marseillaise : hommes, territoires et techniques, xixe-xxe siècles, CERFISE, 1988 ; E. Claverie, « Les dockers à Marseille de 1864 à 1941. De leur apparition au statut de 1941 », thèse d’histoire, université d’Aix-Marseille, 1996.
  • [67]
    À Dunkerque. Voir J.-P. Hernandez, Alors, au port t’en souviens-tu ?, chez l’auteur, 1987.
  • [68]
    M. Maillard, « Les ouvriers du port de Rouen, 1815-1860 », mémoire de maîtrise, université de Rouen, s. d.
  • [69]
    Au Havre. Voir J.-N. Chopart, Le fil rouge du corporatisme. Solidarité et corporations ouvrières havraises au xixe siècle, Racines mutualistes, 1991 ; C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires du Havre, 1815-1852 », mémoire de DEA, université de Rouen, 1995 ; J. Barzman, « Les dockers du Havre, de la brouette au portique (xixe-xxe siècles) », mémoire d’habilitation, université Paris I, 2000.
  • [70]
    S’agissant des portefaix stricto sensu, les travaux de W. H. Sewell confirment que, natifs de la grande ville dans 90 % des cas, ils sont, au milieu du xixe siècle, « les ouvriers les plus privilégiés de Marseille ». Ajoutons que près de 85 % d’entre eux savent lire et écrire. W. H. Sewell, « La classe ouvrière de Marseille sous la Seconde République : structure sociale et comportement politique », Le Mouvement social, n° 76, juillet-septembre 1971, pp. 27-65.
  • [71]
    À Marseille, le règlement de 1814 accorde un abattement de 90 % sur les droits d’entrée dans la société des portefaix. En 1841, ce montant atteint 1 000 F, mais seulement 8 F pour les enfants de sociétaires. C. Gontier, Docks en stock…, op. cit., pp. 10-21. Au Havre, le droit d’entrée chez les Brouettiers s’élève à 2 000 F contre 5 000 à 7 000 F pour être admis parmi les « Tiens bon » de Dunkerque. C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit. ; J.-P. Hernandez, Alors, au port…, op. cit., p. 63.
  • [72]
    Voir le long développement historique présenté par Daniel Hamel, un délégué havrais lors du 20e Congrès fédéral national, 13-14 mai 1982, Paris, Imprimerie de la Fédération, s.d., pp. 69-70.
  • [73]
    R. Cornu, J. Duplex, B. Picon, Les industries portuaires…, op. cit., p. 77.
  • [74]
    W. H. Sewell, Gens de métier et révolutions. Le langage du travail de l’Ancien Régime à 1848, Paris, Aubier, 1983.
  • [75]
    Pour Le Havre, voir C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., pp. 93-94.
  • [76]
    Charles Noiret, Projet de syndicat et de caisse d’échange (pour les ouvriers du port) et d’amélioration morale dans notre population, Le Havre, Imprimerie Maudot, Godfroy et Compagnie, 1876.
  • [77]
    Propos rapportés dans La Révolution prolétarienne du 10 décembre 1935.
  • [78]
    D. Segrestin, « Du syndicalisme de métier… », op. cit.
  • [79]
    J. Dupuydauby, « La filière portuaire française… », op. cit.
  • [80]
    L. Hislaire, Dockers, corporatisme, op. cit., p. 86.
  • [81]
    Le maire du Havre est ainsi en relation épistolaire avec ses collègues de Dieppe, Harfleur, Marseille et Nantes. C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., p. 85.
  • [82]
    Position que soutiennent, en 1841, le maire du Havre et le premier adjoint de son collègue marseillais. En 1848, la municipalité havraise franchit le pas en bloc et retire son agrément au monopole de fait détenu par les sociétés corporatives. C. Gontier, Docks en stock…, op. cit., p. 52 ; C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., p. 86.
  • [83]
    Selon Mazuy, cité par. C. Gontier, Docks en stock…, op. cit., p. 4.
  • [84]
    À l’exemple des brouettiers havrais. C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., p. 86.
  • [85]
    Initialement, seuls des « parents proches » pouvaient les remplacer.
  • [86]
    H. Reynaud, « De l’application de la loi sur les congés payés aux entreprises de manutention dans les ports », thèse de droit, Paris, 1937, p. 77.
  • [87]
    La Petite Gironde du 9 février 1914.
  • [88]
    AN, F7 13700, rapport du commissaire central suppléant, le 1er décembre 1913.
  • [89]
    AN, F7 13701, article 5 des statuts de l’Office.
  • [90]
    Le Journal du 4 mars 1901.
  • [91]
    Centre des archives contemporaines (CAC), 920251, art. 16. Rapport sur les frais de manutention, ministère des Finances et des Affaires économiques, juin 1949.
  • [92]
    CAC, 920251, art. 14. Avis de l’UNIM, le 19 mars 1954.
  • [93]
    H. Grellet, Entre dockers et technocrates. La vie profonde des ports marchands, SOS Manuscrits éd., 1981, p. 49.
  • [94]
    En 1951, un praticien la tient encore pour « malaisée ». G. Bérard, Les entreprises de manutention dans les ports maritimes, Marseille, 1951, p. 7.
  • [95]
    H. Grellet, Entre dockers…, op. cit., p. 33.
  • [96]
    Ibid., pp. 90-91.
  • [97]
    C. Noiret, Projet de syndicat…, op. cit. L’auteur explique au passage comment les ouvriers, tenus d’offrir à boire aux contremaîtres, paient, en outre, sous forme de consommations, l’intérêt des avances consenties aux recruteurs par les débitants habituellement chargés d’échanger contre de l’argent les cartons ou les jetons remis aux dockers après chaque vacation.
  • [98]
    AN, F7 13705. Affiche du syndicat, mai 1927.
  • [99]
    À l’exemple de ce « bourreau de la Bastille » épinglé par l’Humanité du 17 octobre 1907.
  • [100]
    L’Avenir des Ports, mai 1947.
  • [101]
    Ibid., mars 1954.
  • [102]
    APP, BA/1371. Grève de débardeurs parisiens, mai 1895.
  • [103]
    Témoignage d’Honoré Charrière, Port-Saint-Louis-du-Rhône, le 9 avril 1999.
  • [104]
    E. Coppin, « Les dockers au commerce à Boulogne-sur-Mer », maîtrise, université Paris I, 1993, p. 13.
  • [105]
    Propos rapporté par S. Coutant, « Le docker du port de Rouen… », op. cit., p. 156.
  • [106]
    La question est débattue à partir de 1925. Des propositions de loi, déposées en 1928 et 1929, sont enterrées en commission.
  • [107]
    Le Prolétaire normand du 28 mai 1937. À Rouen, cette réticence se prolonge après la réunification de 1935 et pendant le Front populaire.
  • [108]
    Voir M. Pigenet, « Le statut des dockers de 1947 : acquis législatif et pratiques sociales », contribution au colloque « Construction d’une histoire du droit du travail », Aix-en-Provence, 20-21 septembre 2000, actes à paraître.
  • [109]
    A. Le Marchand, « Le syndicalisme docker… », op. cit., p. 84.
  • [110]
    Conférence du président de l’UNIM, le 5 février 1948, devant l’Association des grands ports français. Journal de la marine marchande du 12 février 1948.
  • [111]
    CAC, 920251, art. 14. Note du sous-directeur de l’emploi, s. d. (vraisemblablement 1947, mais antérieure au vote de la loi).
  • [112]
    Intervention de Gabas. Congrès fédéral national, Paris, 10-11 juin 1976, Paris, supplément à L’Avenir des Ports de septembre-octobre 1976, p. 70.
  • [113]
    À Dunkerque, explique le secrétaire du syndicat local, celui-ci parle au nom des dockers, des contremaîtres, des conducteurs et des pointeurs, mais encore des menuisiers, gréeurs, magasiniers, mécaniciens… du port ainsi que des portiqueurs d’Usinor. Congrès fédéral national, Paris, 13-14 juin 1974, Paris, s. d.
  • [114]
    Propos recueilli par E. Guillaud, « Dockers et syndicalisme à Rouen, 1947-1962 », vol. 2, maîtrise, université de Rouen, 1994, p. 205.
  • [115]
    CAC, 870150, art. 168. Note de la direction des ports maritimes, le 27 juin 1979.
  • [116]
    CAC, 870150, art. 12. Note du directeur des ports maritimes, le 19 juillet 1967.
  • [117]
    CAC, 870150, art. 161. Note du 22 mars 1971.
  • [118]
    Quand bien même la réforme participe aussi d’un mouvement global de désengagement de l’État.
  • [119]
    De l’automne 1991 à l’été 1992, les dockers participeront, en plus des actions locales, à 92 grèves nationales de 24 heures.
  • [120]
    À laquelle le secrétaire général de la Fédération des ports et docks compare la carte professionnelle. L’Avenir des Ports, avril 1967.
  • [121]
    L. Hislaire, Dockers, corporatisme…, op. cit., p. 9.
  • [122]
    Daniel Lefebvre, 25e congrès fédéral, Montreuil, 19-21 juin 1996, supplément à L’Avenir des Ports, p. 9.

1 Processus complexe, réversible et, pour tout dire, sans fin, la construction d’identités collectives demeure une des grandes questions posées à l’histoire sociale. Avec la contestation du « paradigme labroussien » et des engagements d’un autre ordre qui, souvent, l’accompagnaient, les historiens ont commencé à se défier des catégories trop larges [1]. Ainsi mise à découvert, l’histoire ouvrière, longtemps pionnière en la matière, résista mal aux coups de boutoir d’indéniables avancées historiographiques. Sa dénomination globalisante et une problématique fleurant le « réalisme naïf » et le « préconstruit » amenèrent à se demander si « cela aur[ait] encore un sens, dans vingt ans, de parler d’histoire ouvrière » [2]. Les questions « iconoclastes » sont généralement stimulantes, mais sans prétendre discerner ce qui, demain, sera et ne sera pas justifié ou légitime, il ne semble pas que les interrogations sur la « classe ouvrière », fût-elle pure abstraction, mythe ou projet, aient perdu tout intérêt heuristique. Au vu des masses et des mouvements qui s’en réclamèrent, beaucoup reste à faire pour quiconque souhaite comprendre les modalités historiques d’élaboration, de diffusion et de réception d’une notion polysémique, sa combinaison avec d’autres formes, principes et critères d’appartenance ou, à l’inverse, d’individuation. Que dire encore du remarquable terrain d’analyse qu’offrent les ouvriers à l’histoire de cette « énigme [3] » que reste le travail ? À l’évidence, nous sommes ainsi loin du compte pour ce qui touche à la connaissance de ce qui se joue autour des savoir-faire, affects, habitus, rapports interpersonnels, systèmes de valeurs et de représentations requis et forgés durant son exercice. Qui ne voit quelles perspectives de telles entrées, renouvelées au contact d’autres champs historiographiques et disciplinaires, ouvrent à la compréhension du non et du hors travail ?

2 Dans cette optique, nos recherches, tournées vers l’analyse des identités ouvrières, nous ont conduit à privilégier l’étude de groupes chez lesquels, à l’instar des dockers [4], la solide armature syndicale fournit, à travers d’abondantes sources, de précieuses informations sur les cohésions corporatives et qui, simultanément, se situent aux marges de la « classe ». Là où, précisément, loin des situations « exemplaires » et « représentatives », l’ambivalence des repères territoriaux, sociaux et culturels bannit les grilles de lecture réductrices au profit d’une approche dialectique des fondements et de la dynamique des phénomènes identitaires.

Représentations : « sur les quais » et « vu du pont » [5]

Docker, les sens d’un mot

3 Les dockers ? Étymologiquement, le vocable d’origine anglaise, s’applique aux travailleurs des docks. Ce dernier terme pose toutefois problème. Si, dans sa plus ancienne acception, il désigne des bassins artificiels, l’habitude s’installe, après la construction des équipements qui, sous le nom de docks-entrepôts, réunissent des bassins et des magasins bord-à-quai, de réserver à ces derniers le terme de docks [6]. C’est sous ce nom que, venus d’outre-Manche, ils apparaissent au Havre, en 1844, puis à Paris et à Marseille. À ce moment, on serait en droit de qualifier indifféremment de dockers les ouvriers des quais et leurs collègues des entrepôts. De fait, l’absence de mention dans les documents d’archives du xixe siècle semble indiquer que le mot n’appartient pas, alors, au vocabulaire portuaire français de l’époque. Selon la période et les lieux, d’autres expressions se bousculent aux lisières du français et des jargons de métiers. Les plus répandus, après l’approximatif « journalier », renvoient à l’activité – portefaix, brouettiers, débardeurs, arrimeurs, chargeurs et déchargeurs, etc. – avant que n’entrent en ligne de compte les marchandises manutentionnées – charbonniers, piquetiers, morutiers, primeuristes… En Angleterre même, le cloisonnement des tâches et des spécialités retarde pareillement l’adoption d’un vocable unique. Certains syndicats se réclament des Docks labourers, mais c’est au lendemain de la création, à Londres, de la Dock, Wharf, River and General Labourers’ Union, en 1889, que s’en répand la version raccourcie de Dockers’ Union[7]. Cette année-là, les travailleurs de Rotterdam contribuent à sa diffusion sur le continent lorsqu’ils affublent leur jeune syndicat d’un titre très britannique : The Rotterdam Branch of the Dockers’ Union[8].

4 Une nouvelle impulsion suit la formation, en juillet 1896, d’une Fédération internationale [9]. Les interventions des délégués au congrès des organisations de travailleurs européens des transports tenu à Paris, en septembre 1900, témoignent des progrès de l’usage généraliste du terme [10]. Dans son titre, la Fédération nationale des ports, docks et fleuves de France et d’Algérie, fondée au Havre l’année suivante, distingue encore le domaine des quais de celui des entrepôts, mais les dockers dont parlent les militants relèvent de l’ensemble des activités de manutention [11]. À cette date, nombre de syndicats affichent toujours une identité de métier ou valorisent une spécialité – voiliers, portefaix, camionneurs, ouvriers en bois du Nord, charbonniers. D’autres s’inscrivent déjà, en revanche, dans une logique « industrielle », plus rassembleuse et centrée sur le site : « travailleurs réunis du port », « ouvriers du port », « des ports, docks et magasins », « journaliers des docks et entrepôts »… Le mot docker franchit bientôt le seuil symbolique des dénominations. En 1910, il figure dans celle des syndicats de La Rochelle, La Pallice, Philippeville, Saint-Malo et Toulon [12]. Malgré la persistance des références catégorielles, le phénomène s’amplifie après la guerre tant au sein de la fédération CGT qu’à l’intérieur de sa rivale « unitaire ». Trois ans après leur réunification, soixante-sept syndicats affichent ainsi leur identité docker [13]. La loi s’en mêle qui, après un premier essai six ans plus tôt, en officialise l’usage en 1947 travers un texte qui, consacré à « l’organisation du travail de manutention dans les ports », a valeur, dit-on, de « statut de l’ouvrier docker » [14]. Le centre de gravité de la corporation a définitivement basculé vers les quais et les cales. Ceux du « commerce » en premier lieu, dont les travailleurs donnent le ton. Un déchargeur de poissons, futur secrétaire général de la Fédération des ports et docks, exprimera ainsi la fierté de ses camarades boulonnais devenus, à l’issue d’un conflit difficile, des « dockers à part entière » [15]. Au terme d’un curieux retournement linguistique, les magasiniers, maintenus à la périphérie du noyau dur de la profession, n’en sont pas là. Interrogés deux décennies plus tard sur le secrétaire général de la Fédération des ports et docks des années 1970, des « vrais dockers », salueront sa mémoire et ses qualités, mais ne manqueront pas d’ajouter que cet ancien salarié des Magasins généraux de Paris n’était pas complètement des leurs [16]. Au Havre, les « dockers-quais » battent froid aux « dockers-magasins » que la régression des activités d’entrepôt amène à souhaiter prendre part au chargement et au déchargement des navires. En tout état de cause, rappellent sans précaution excessive les premiers, il ne saurait être question d’autre chose que d’une embauche en « deuxième priorité ». Quelques-uns vont plus loin et rejettent cette maigre concession [17].

5 De tels incidents en disent long sur la portée de mots au moyen desquels s’opère désormais le traçage de frontières professionnelles dont l’étanchéité conditionne l’aptitude du collectif à préserver le contrôle, acquis de haute lutte, du plus instable des marchés du travail. Peu importe, dès lors, si la vigilance qui en résulte s’accorde mal avec la renommée des « hommes camarades [18] ».

Superposition et récurrence d’images contradictoires

6 Entre « icônes rouges » et « légendes noires » [19], les images contradictoires associées aux travailleurs des ports ignorent la demi-teinte. Tutoiement de rigueur, emploi systématique de surnoms, visites aux malades et blessés, collectes au profit de collègues dans le besoin, attribution de tâches légères aux ouvriers handicapés ou âgés, voire répartition équitable du travail à tour de rôle, le docker passe pour le plus fraternel des hommes [20]. La pénibilité et la dangerosité [21] de tâches peu propices aux exploits individuels imposent une coopération de tous les instants au sein de groupes élémentaires aux noms – bordée et main – significatifs. « L’équipe, affirme l’un d’eux, c’est la cohésion, la camaraderie, la distribution du travail selon les capacités […]. On se connaît, on sait que demain on travaillera ensemble, on s’aide facilement, on aide les vieux, on conseille les jeunes… [22] ». « Tout est collectif, rien n’est individuel » chez ces ouvriers résolus à faire du port « un lieu de justice entre égaux », corrobore le délégué général de l’organisation patronale, l’UNIM [23]. « On a un cœur gros comme ça, […], on est soudés », résume un ouvrier nazairien [24]. Au risque du repli, concède-t-on parfois. « Les dockers vivaient en tribu, ce n’étaient pas une secte, mais enfin… », admet un militant rouennais [25]. Sur cette pente, les états de service prolétarien concourent, eux-mêmes, à l’exaltation de l’altérité. « Le métier de docker comme le métier de mineur, […] c’est un exemple pour le monde ouvrier », assure un travailleur de Port-Saint-Louis-du-Rhône [26]. Aussi fréquents, amples et variés qu’aient été les sacrifices consentis en faveur de la classe, les manifestations de solidarité ne sont pas moins fonction de la plus ou moins grande proximité professionnelle et géographique des bénéficiaires [27]. Avec la fermeture de l’accès aux quais, les critères, avoués ou non, d’embauche, la prégnance des logiques de site et les hiérarchies de fait en vigueur sur les chantiers dévoilent les zones d’ombre ignorées des discours trop lisses. D’aucuns stigmatisent les égoïsmes [28] d’un « corporatisme » synonyme d’archaïsme et propre à entacher la réputation du groupe.

7 Qu’on la déplore ou la dénonce, la combativité n’est pas le moindre des traits prêtés à la profession. L’édition 1977 du Dictionnaire Robert s’en fait l’écho qui, concluant par un exemple la courte définition des dockers, les associe à la grève. Sans doute l’actualité sociale de l’époque donne-t-elle quelque pertinence au stéréotype. Plus de vingt ans auparavant, une étude sur la propension à la grève dans onze pays, classait déjà les dockers au premier rang des catégories ouvrières en compagnie des mineurs et des marins [29]. Sans nier la conflictualité portuaire, l’historiographie récente nuance sérieusement la thèse de sa permanence. Surtout, elle lie l’aspect spectaculaire des luttes recensées au caractère imprévisible d’une main-d’œuvre peu canalisable et rétive à l’organisation durable [30]. Ce que l’on sait des hauts et des bas de la syndicalisation dans les ports français n’infirme pas les conclusions néerlandaises et britanniques [31]. Du moins jusqu’en 1936, date à laquelle s’instaure, à l’échelon national, un rapport de forces que seuls les Dunkerquois et les Havrais étaient parvenus à édifier localement.

8 Sa confirmation, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, nourrit le mythe d’un inexpugnable « bastion » qui, épargné par la scission de 1947-1948, exhibe des taux de syndicalisation proche de 90 %. Magnifiée par la presse, les écrivains, les poètes, les peintres et les cinéastes communistes, leur lutte solitaire contre la manutention du matériel de guerre de l’Otan ou destiné à l’Indochine fait des dockers les « champions » de la classe ouvrière [32]. « Garde-côtes de la paix », figures emblématiques de l’« internationalisme prolétarien en actes » pour les uns, ils provoquent l’ire de détracteurs que scandalise la « tyrannie » des délégués, l’inféodation aux objectifs soviétiques et les « atteintes criminelles » au potentiel des forces armées comme au moral de la nation [33]. Outre des milliers de jours de grève, les dockers paient cher leur montée aux avant-postes de la guerre froide. À Marseille, des dizaines d’arrestations et des centaines de retraits de cartes professionnelles décapitent l’organisation cégétiste. Aidés par l’administration et le patronat, FO, la CFTC et les Indépendants tentent de s’implanter sur le port où la syndicalisation s’effondre pour une quinzaine d’années. La situation n’est pas meilleure à Sète et à Cherbourg, cependant que les syndicats CGT des autres sites échappent à la concurrence, mais sortent affaiblis de l’épreuve.

9 Si l’histoire infirme l’idée d’une fatalité syndicale portuaire et invite à rectifier la légende d’une suprématie cégétiste inentamée depuis plus d’un demi-siècle, les indéniables réussites observées ne tranchent pas moins avec l’ordinaire hexagonal. Cela suffit aux publicistes des années 1980 qui, à l’exemple de François De Closets, critique prolixe de la « syndicratie » [34], se désolent de ce que, dans les ports, « tout le pouvoir [soit] entre les mains d’une seule communauté soudée, les dockers, et d’un seul syndicat accroché à la forteresse chancelante, la CGT [35] ». Sur cette pente, les auteurs croquent « les gros bras », faux prolétaires aux puissantes cylindrées alignées sur les parkings des quais [36]. Rendu public, le niveau des salaires suscite des réactions mitigées dans l’opinion, surprise d’apprendre qu’au Havre leur moyenne dépasse 196 000 F en 1989 [37]. L’envie s’en mêle qu’attisent les allusions aux « privilèges » du groupe que protège son statut [38], « régime anachronique, socialement dérogatoire et économiquement suicidaire » [39], payé « d’un prix exorbitant : celui de la compétitivité » [40].

10 De vieux clivages rejouent et donnent libre cours aux préjugés à l’encontre d’ouvriers pris pour « cibles de tous les réquisitoires » [41]. À l’heure des conteneurs et des portiques, beaucoup, loin des quais, tardent à s’émanciper des images fortes et pittoresques héritées de « l’ère du muscle ». Prêts à convenir de la pénibilité du métier, ils n’estiment pas moins excessifs les acquis de simples « hommes de peine ». Au pire, un certain exotisme social frise parfois le racisme social. Les auteurs les mieux intentionnés ne résistent pas toujours aux formules suggestives, mais malencontreuses. Tel médecin compare la position des dockers à celle d’une « minorité ethnique ou religieuse » [42]. Des sociologues font état d’une « presque race à part » [43]. La réalité des filières ethniques, parfois, et familiales, systématiques, de recrutement incitent à ces analyses que les intéressés, à l’occasion, paraissent cautionner. « Que voulez-vous, c’est dans le sang, on est docker avant tout », s’exclame l’un d’eux pour témoigner de son attachement « viscéral » à la profession [44].

11 L’insinuation de correspondances entre particularités physiques et morales constitue le filon inépuisable d’une abondante littérature. Explorateur parti à la recherche, en 1893, des débardeurs de la capitale qu’un récent conflit a projetés sur le devant de l’actualité, un journaliste découvre enfin « ces sauvages de Paris ». Le portrait détaillé qu’il en brosse s’attarde sur les « larges épaules », les « muscles bien saillants », les « pieds nus » et les « bras velus » ornés, l’hiver, de « chapelets de givre » [45].

12 Monde de brutes échouées sur les berges de la Seine et issues de « toutes sortes de métiers pénibles », « l’agglomération » comporte son lot de déclassés qui, dans un passé trouble, « ont occupé des situations libérales et sont des bacheliers ès lettres ». Plus abrupt, un commissaire de police décrit, en 1895, des travailleurs « sans aveu » recrutés parmi les « flâneurs » [46] des quais. Une vingtaine d’années plus tard, le professeur Marcel-Adolphe Hérubel, en visite au Havre, retient le spectacle de « l’innombrable cohorte des débardeurs », « pauvres hères aux joues creuses caves, à l’œil torve, mal habillés, mal peignés […] loqueteux, fils de loqueteux, […] Bretons émigrés […] qui traînent l’ennui de leur exil, […] repris de justice […], ratés, notaires, commerçants, médecins, nobles à particule, hommes finis, vaincus, brisés [47] ». À Marseille, en 1927, Albert Londres évoque la « légion étrangère sociale » [48]. « On n’est pas ouvrier en étant docker […] » écrit-il avant de spécifier que si l’on « rencontre des ouvriers parmi les dockers, ce sont justement des ouvriers sans travail. » À la même époque, la représentation allégorique de leurs collègues havrais sortis victorieux d’une grève d’envergure se fige pour longtemps dans celle de l’ouvrier « croc dans une main, la bouteille de l’autre, insoumis, violent et anarchiste… [49] ». En mission prolétarienne, le père Jacques Loew choisit délibérément, pour sa part, d’aller s’embaucher, en 1941, parmi ceux qu’on lui présente comme « les gens les plus durs », qui plus est, à Marseille, fief, le prévient-on, « des dockers à la énième puissance, […] ce qu’il y a de plus mauvais, de plus terrible » [50]. Première enquête portuaire menée sur le modèle de l’observation participante, le texte qu’il publie à la Libération doit à sa double dimension de témoignage et d’étude une force qui en gomme les présupposés idéologiques et les biais méthodologiques [51]. En foi de quoi, l’ouvrage « fera le tour du monde et servira de référence dès qu’il s’agira de la France [52] ».

13 La presse n’est pas la dernière, on l’a vu, à propager les clichés inquiétants d’un sous-prolétariat instable et en marge dont l’ancrage portuaire accentue l’inquiétant côté interlope et cosmopolite. « Si dans un fait divers, un docker a le mauvais rôle, sa profession sera mentionnée, dans le cas inverse, elle sera omise », note un observateur [53]. Bien que les techniques modernes de transport réduisent les possibilités de grappillage, tolérance par ailleurs admise dans certaines limites, la rumeur locale, ignorante de la logistique nécessaire pour entreprendre ce genre d’opération, a tôt fait de soupçonner les « chiens des quais » [54] dès qu’un conteneur disparaît [55].

14 Les ouvriers ont conscience des jugements partagés qu’ils inspirent. Lors des rudes batailles pour l’hégémonie sur les docks, les militants s’en servent afin de disqualifier leurs rivaux. En 1927, un « unitaire » marseillais blâme ainsi « les bas intérêts personnels, comme il en reste dans ce grand port méditerranéen renommé pour la corruption et le maquereautage syndicaux [56] ». Beaucoup de travailleurs portuaires ont l’expérience de crédits ou de locations refusés, de belles-familles réticentes, d’embauches ajournées… à l’énoncé de leur profession d’origine [57]. Pendant des décennies, les dockers ont vécu à l’écart de la cité, dans les quartiers dégradés proches des quais. La ségrégation se prolonge quand, au cours de déplacements quotidiens, ils croisent leurs concitoyens. À Rouen, de retour du travail, sales, fatigués, imprégnés d’odeurs tenaces, bruyants et regroupés à l’arrière des tramways, « ils restent entre eux. Ils se sentent plus forts » [58].

15 Les militants intègrent ces réflexes constitutifs d’une culture de ghetto social. À l’issue d’un cheminement dont l’histoire offre maints exemples, la dénégation se métamorphose, par défi, en revendication. Les dockers communistes havrais des années 1920 dénomment ainsi « Carabot » la feuille ronéotypée qu’ils distribuent sur les quais [59]. Dans le vocabulaire local, l’expression désigne, sur le mode péjoratif, les travailleurs du port. En 1950, elle revient dans la bouche de Charles Marck. Au soir de sa vie, l’ancien secrétaire de la Bourse du Travail du Havre et fondateur, en 1901, de la Fédération des ports et docks [60], salue les progrès réalisés depuis le début du siècle, quand les « débardeurs » passaient pour « un ramassis de gens sans aveu ». Dans les congrès, les délégués havrais se plaisent à rappeler les temps de la misère noire. Leur secrétaire, Lucien Nolent, se remémore publiquement « les chambres à rats » de son enfance, lorsque, plus souvent qu’à son tour, il allait à l’école le ventre creux [61].

« Pour les trois-quarts, ne craint-il pas de généraliser, ce sont les clochards qui ont fait les ports ; ce sont eux qui ont fait les syndicats portuaires avec des garçons qui se sont battus pour eux, pour le sous-prolétariat qui existait en France et que l’on trouvait dans les ports [62]. »
Les dirigeants de la Fédération des ports et docks n’entendent pas davantage faire une croix sur un passé dont la douloureuse mémoire collective aide à se prémunir contre de possibles retours en arrière. Le sort réservé aux ouvriers des petits ports montre aux amnésiques et aux inconscients à quel prix se paient la non-application de la loi et l’absence de base syndicale. Désigné pour « parrainer » les travailleurs d’un site secondaire, le secrétaire de l’organisation rouennaise peint le tableau affligeant de malheureux « à la merci » des employeurs, soumis à des « horaires élastiques » et mal payés.
« Les cols élimés, assène-t-il, les savates trouées et les pantalons qui tiennent par raccommodage, c’est monnaie courante à Honfleur [63]. »
N’en concluons pas que l’évocation du passé ait exclusivement servi de repoussoir. Il est arrivé, en effet, qu’on l’invoque comme alternative au présent. Dans les années 1940, le père J. Loew apprécie ainsi la situation des dockers-charbonniers marseillais à l’aune de la condition des portefaix de la première moitié du xixe siècle. Dix ans plus tôt, les artisans du regain corporatiste s’étaient penchés sur ce régime [64]. Contemporaine de l’émergence du corporatisme doctrinal, l’entreprise de réhabilitation historique des « corporations » portuaires remonte, en fait, au Second Empire. À Marseille, la Société internationale des études pratiques d’économie sociale, animée par des disciples de Frédéric Le Play et René de La Tour du Pin, relisent au prisme de leurs certitudes l’ample information qu’ils ont tirée des archives [65]. Par contraste avec les désordres et la paupérisation qu’engendre l’individualisme libéral triomphant, contre la tyrannie redoutée du collectivisme, leurs publications font revivre l’âge d’or du travail réglé. De citations imprudentes en pillages paresseux, le manque d’esprit critique de nombre d’auteurs ultérieurs sera à l’origine du tableau idyllique de l’ère, ici, des portefaix [66], là, des « tiens bon » [67] ou de la « Grande Carue » [68], ailleurs des « brémens » et autres « brouettiers du grand corps » [69]… monde clos de travailleurs bien payés, figures respectées et respectables de la cité [70] ayant à cœur une répartition équitable de tâches accomplies en conscience. Bien peu se soucient alors de déceler, sous l’apologie, les indices d’une réalité moins univoque. Nul ne se préoccupe ainsi des conséquences pratiques des hiérarchies qui structurent le marché du travail au profit des maîtres, mais au détriment de la foule des « crocheteurs », « gagne-deniers », « carabots » et autres « robeirols », obscurs fantassins d’une main-d’œuvre d’appoint exclue des protections accordées aux ouvriers immatriculés [71].

16 Davantage portés à dénoncer les malheurs d’antan, les militants cégétistes ne craignent pas, parfois, d’instrumentaliser la mémoire enjolivée des corporations en vue de justifier le monopole qu’ils réclament sur les opérations de chargement et de déchargement des navires [72]. Au reste, il s’agit moins, au xxe siècle, de cultiver une quelconque nostalgie, que de certifier par l’histoire l’honorabilité de la profession et de ses revendications. Il en va autrement au siècle précédent où la question des « corporations » est encore d’actualité. Les associations de portefaix ou d’autres travailleurs des ports ont pignon sur rue et se battent becs et ongles contre le brutal transfert de leurs « privilèges » aux grandes compagnies capitalistes. Dans ce combat, elles bénéficient du soutien de la majeure partie des négociants déstabilisés, mais aussi des effets de la réhabilitation leplaysienne du vieil ordre corporatif. À Marseille, ses initiateurs ne prétendent d’ailleurs pas à la neutralité et appuient ouvertement la société des portefaix contre la Compagnie des docks [73].

17 Chez les compagnons en voie de prolétarisation, exposés à la concurrence de la main-d’œuvre « étrangère », la tentation protectionniste affleure dans les pétitions présentées sous la Deuxième République. Si « l’idiome corporatif » [74] sous-tend les projets exposés en ces circonstances, aucun ne prône une restauration pure et simple. Favorables à la liberté d’association distinguée de celle du commerce, les ouvriers fondent leurs espoirs sur un corporatisme démocratique, alliant la fermeture du marché du travail, avec monopole, médailles d’identification et tour de rôle, à la suppression du marchandage et des intermédiaires patronaux, en bref, à l’abolition de l’exploitation [75]. Il n’est pas indifférent de noter que, dans ses grandes lignes, le système ainsi imaginé se retrouve, en 1876, dans la brochure que signe Charles Noiret, ancien tisserand rouennais et sous-commissaire de la République en 1848, recruté au titre d’inspecteur de la voirie par la municipalité républicaine du Havre [76]. Si l’on rappelle que les premières expériences locales de chambres syndicales datent, pour le port, de 1879, force est de constater la remarquable filiation des ambitions du dernier quart du siècle avec celles des années 1840. À des décennies de distance, le contrôle de l’embauche apparaît toujours comme la condition préalable à la réalisation du même objectif ultime : l’indépendance ouvrière. Sur ce point, les travailleurs du xxe siècle ne contredisent pas leurs aînés. Dans l’entre-deux guerres, Victor Engler, important dirigeant de la Fédération des ports et docks, estime que le docker « veut avoir sa liberté absolue et c’est comme cela [qu’il] manifeste sa haine de classe ». En aparté, il confie : « c’était pour moi une véritable réjouissance de pouvoir laisser un bateau en panne […], il me plaît de travailler seulement deux jours par semaine [77]. » Élevé au rang de composante majeure de l’identité du groupe, ce rapport à la liberté intrigue les sociologues qui voient en lui le signe fort d’une fidélité à la culture socialiste et communautaire de la profession posée en alternative à la rationalité capitaliste de l’entreprise [78]. Les employeurs et l’administration n’en doutent pas. « Il faut aux dockers […] un patron qui les paye et dont ils dépendent » [79], insistent-ils, exaspérés par la situation dans les ports des années 1980. Tous savent, cependant, combien l’affaire est délicate au regard, précisément, des particularités de la branche.

Contraintes techniques et pratiques sociales ou les trois âges de la manutention portuaire

Autour de l’intermittence : travail libre et travail réglé

18 Depuis des siècles, l’intermittence régit la manutention portuaire. Tributaire des incertitudes météorologiques, des rythmes saisonniers et des aléas spéculatifs du commerce, l’activité en exacerbe les caprices. Tandis que les périodes creuses succèdent aux temps de « presse », les armateurs exigent une réduction maximale des onéreuses durées d’immobilisation. Ainsi la bonne marche et la réputation d’un port sont-elles fonction de sa capacité à répondre, sans retard, à toutes les tâches qui se présentent. Cela suppose l’existence d’un excédent de main-d’œuvre immédiatement disponible. Malgré les progrès réalisés dans le sens d’une meilleure gestion des flux maritimes, le mode de fonctionnement des ports ne saurait être assimilé aux régularités usinières. Ces contraintes identifiées, toute la question, éminemment sociale, est alors de déterminer sur qui doit reposer le coût d’entretien de la force de travail tenue en réserve. Sur le fond, l’intermittence, avec ses embauches répétées et fractionnées, limite singulièrement les frais permanents des employeurs. « Les dockers ne coûtent à leur patron que lorsqu’ils lui rapportent », concède le délégué général de l’UNIM [80]. Il est toutefois plus d’une manière de gérer l’intermittence. Sur les quais, l’histoire de la profession se résume, à grands traits, dans l’alternance du travail « libre » et du travail « réglé » par lequel se signale l’intervention des pouvoirs publics.

19 Les autorités ne sauraient se désintéresser des ports, points d’appui stratégiques des flottes de guerre et de commerce en charge des liaisons avec l’empire et l’étranger, portes d’entrée et de sortie des hommes comme des marchandises. Les notions d’intérêt général, de domaine maritime et de service public légitiment la tutelle administrative. Ses pouvoirs établis et confirmés au fil des trois derniers siècles, l’État s’est réservé la possibilité de les déléguer à des instances locales, représentatives des populations et du négoce. Parfois, il en étend le bénéfice à des compagnies privées sous la forme du « privilège » et de l’« exclusif ». Ces procédures valent, notamment, pour la construction d’infrastructures dont la puissance publique n’a pas toujours les moyens ou la volonté d’en assumer seul le financement. Ainsi les ports, lieu par excellence du capitalisme marchand le plus fluide et ouvert sur l’extérieur, sont-ils aussi le monde de l’exception, du monopole et du règlement.

20 La sécurité des approvisionnements et le contrôle des centaines d’hommes rassemblés sur les quais des principaux sites figurent en bonne place parmi les préoccupations des autorités garantes de l’ordre public. Les municipalités se montrent particulièrement attentives à ces problèmes, jadis résolus par la création de « métiers réglés ». Sitôt passée la tourmente révolutionnaire, les plaintes du négoce contre « l’anarchie » sévissant dans les ports entraînent la reconstitution, avec la bénédiction des pouvoirs locaux, d’associations professionnelles. À l’instar de leurs ancêtres dont elles reprennent souvent le titre, les nouvelles « sociétés » veillent au respect des modalités d’embauche et à la répartition du travail. Leurs membres, bénéficiaires de divers services et secours, sont reçus sur des critères de nationalité et de moralité. Les statuts énoncent l’échelle des sanctions qui, des amendes à l’exclusion, menacent les sociétaires surpris à contrevenir aux normes du métier ou, pire, coupables de « bassesses » et de vols. L’administration et le commerce trouvent leur compte dans cette autodiscipline à une époque où, par exemple, les portefaix exécutent, en plus des manutentions, la vérification de la quantité et de la qualité des marchandises, leur entreposage. Si la gamme des tâches et les garanties financières collectivement assumées par ces corps « d’hommes de confiance » dûment enregistrés se paient, ce renchérissement semble préférable à la mobilité bon marché du « tout venant » irresponsable et anonyme. Sans illusion sur la légalité de la bienveillance qu’ils leur témoignent, les maires se concertent [81], consultent les préfets qui, sensibles aux arguments de leurs administrés, hésitent et sollicitent l’avis des bureaux parisiens. Les thèses libérales gagnent cependant du terrain. Elles triomphent dans la capitale où les fermes rappels à l’ordre des années 1830 rompent avec les tolérances de la Restauration. Sur place, une fraction des notables opte à son tour pour la déréglementation [82].

21 Ces notes discordantes accélèrent l’entrée en crise de l’ancienne organisation du travail. L’essor du trafic maritime, facilité par l’augmentation de la taille des navires, la modernisation des équipements portuaires et des techniques de manutention, ouvre la voie des littoraux au grand capitalisme dans le sillage des Talabot et des Pereire. En contrepartie de leurs investissements, les milieux d’affaires obtiennent, dans les années 1850, des concessions d’entrepôt réel, promesse de fructueuses opérations, de manutention et autres, sur les échanges internationaux. Dépossédés de leurs prérogatives ou relégués au rang de sous-traitants des compagnies de docks-entrepôts, les portefaix et leurs homologues tentent de mobiliser des communautés portuaires en cours de désagrégation. Les analystes lucides regardent les sociétés corporatives marseillaises comme autant de « débris des vieux privilèges » [83]. Dès avant la construction des docks, l’apparente suprématie du « travail réglé » masque une réalité plus complexe. Avec l’arrivée massive de milliers de journaliers stimulée par le développement des activités, les sociétaires se métamorphosent en tâcherons ou entrepreneurs. Beaucoup s’écartent ainsi des clauses statutaires qui leur faisaient obligation de « travailler de [leur] personne » [84]. À Marseille, les compagnons « commandés » ou « de la Muse », admis au tour de rôle, profitent, quant à eux, de leur droit à un remplaçant [85]. Nouveaux intermédiaires, ils prélèvent leur dîme sur les salaires versés aux manœuvres choisis selon les normes constamment ravivées du clientélisme.

22 Dans les années 1870-1880, le « travail libre » a pris le dessus. Ouverte à tous, la manutention portuaire draine désormais la cohue des sans travail dont la présence généralise la précarité. Le salaire au forfait et à la tâche ne disparaît pas, mais la rémunération au temps s’impose. La durée des périodes d’embauche s’ajuste sur la demande des employeurs : la journée pour les plus chanceux, mais plus souvent la vacation – une demi-journée – voire l’heure… L’interchangeabilité des hommes a cependant des limites. Dans les cales et les docks, tous les ouvriers, en effet, ne se valent pas.

« Si les dockers n’existaient pas, explique un spécialiste, il faudrait les inventer car les machines les plus perfectionnées n’arriveraient certainement pas à effectuer la totalité des opérations de manutention [86]. »
Les compagnies d’entrepôt et de navigation ne l’ignorent pas qui s’efforcent de stabiliser une partie de leur main-d’œuvre. En échange de gains journaliers plus modiques, les dockers « classés » ou « abonnés » jouissent ainsi d’un emploi permanent tandis que les « auxiliaires » intermittents disposent d’une priorité d’embauche. Au total, plusieurs marchés du travail emboîtés restructurent l’activité et les rapports sociaux portuaires. Amorcé sous le Second Empire, le mouvement est relancé au début du xxe siècle. À Bordeaux, la Fédération maritime locale, institue une nouvelle catégorie de dockers : les « attitrés » [87]. Il importe, dit-on, de substituer à « l’homme de peine, qu’on ignore et qui passe », « l’auxiliaire attitré d’une entreprise considérable […], où, connu de tous, son nom d’honnête homme restera inscrit et récompensé pendant 15 ou 20 ans ». Au même moment, l’Union des employeurs du Havre entreprend de distinguer le « noyau » des dockers de « longue date », « indépendants et fidèles » [88], réunis au sein d’un Office du travail fermé aux ouvriers d’appoint et « occasionnels » [89]. Dans les deux cas, les initiatives patronales interviennent au lendemain de conflits sociaux. Pour ne pas être absolument inédite, la reconnaissance patronale de la professionnalité des tâches de manutention n’est pas étrangère, en effet, au défi lancé par les syndicats.

La reconnaissance de l’identité professionnelle : une conquête syndicale

23 « Vous avez de l’or, nous avons la patience, le nombre et l’énergie », résume, en 1901, l’affiche du comité de grève des ouvriers du port de Marseille à l’adresse des acconiers [90]. En ces années d’implantation syndicale, l’efficacité de l’action semble conditionnée par la capacité des travailleurs à se mobiliser en bloc. Choix tactique avant d’être option stratégique, la grève générale s’apparente d’abord à une démonstration de force, l’occasion exceptionnelle de donner à voir la puissance de la foule, de rendre palpable, aussi, une communauté de destin que brouillent les concurrences ordinaires pour l’accès au travail. Les procédures et les critères qui, deux fois par jour, président à l’embauche des hommes constituent, indubitablement, le principal obstacle à la cohésion ouvrière. De là découle l’ambition syndicale de disputer aux employeurs le contrôle du marché et de l’organisation du travail. L’objectif ne va pas de soi s’agissant d’une activité aux antipodes de celle, protégée par la rareté des qualifications, des métiers traditionnels, foyers habituels de ce genre de projet. À ce stade, un retour sur certains traits du patronat de la manutention s’avère indispensable.

24 Pendant des décennies, les entreprises ont pu fonctionner avec un minimum de capital fixe. Autant que la lenteur des innovations techniques, le financement public des outillages les plus coûteux dispensèrent longtemps les manutentionnaires de se doter d’équipements loués dans la stricte limite de leurs besoins. Cette situation, peu propice à la concentration, explique l’hétérogénéité de la branche. Parmi les neuf cent neuf entreprises recensées en 1949, seule une minorité, spécialisée dans le vrac et les pondéreux, possède des grues flottantes, des silos, d’aspirateurs, des chariots-élévateurs et des tapis-roulants [91]. Le gros des établissements se contente, quant à lui, de fournir des brouettes, des diables, des filets, des plateaux et leurs élingues. Perceptibles à compter du milieu des années 1950, les premiers changements accompagnent l’emploi de clarks et de chouleurs. Sélectif, le prix de ces engins encourage les employeurs à recruter une main-d’œuvre permanente apte à les conduire et soucieuse de leur entretien [92]. Parce qu’elle n’a rien d’un raz-de-marée, l’évolution exacerbe plus qu’elle n’atténue les divisions internes d’un patronat tiraillé entre les intérêts contradictoires de ses composantes et adepte de cette « indiscipline viscérale » que déplorent les responsables de l’UNIM [93].

25 S’ils en subissent les aléas, les manutentionnaires calquent leurs valeurs et leurs comportements sur ceux des transporteurs et des négociants à la charnière desquels leur branche s’insère sans toujours parvenir à s’en différencier. Les plus grandes compagnies de navigation, les principaux réceptionnaires et chargeurs de vrac, pour ne rien dire de nombre d’usines, disposent, en tout état de cause, de services ou de filiales de manutention. La diversité des tâches dont l’énumération et la nature exacte varient d’un contrat à l’autre ne simplifie ni le règlement des contentieux ni le repérage des contours de la profession [94]. Occupés, chaque jour, à devoir « frapper à toutes les portes […] pour décrocher un contrat » [95], les entrepreneurs recourent systématiquement aux ristournes, parfois agrémentées de confortables « pots de vin » [96].

26 Ces pratiques n’épargnent pas les relations salariales, perméables aux diverses variantes du marchandage, ses intermédiaires et ses rabais, son système d’exploitation en chaîne et de favoritisme. Personnage clé de l’embauche, le contremaître en incarne fréquemment les pires aspects. Pourvoyeur patenté de main-d’œuvre, il est l’entremetteur obligé d’employeurs d’un jour. D’un site à l’autre, les mêmes récits reviennent de contremaîtres liés à des tenanciers de café, sinon propriétaires eux-mêmes des cabarets où se forment les équipes et se paient les vacations… et dans lesquels il est recommandé de consommer. Dénoncé au Havre par C. Noiret [97], en 1876, le procédé est mentionné à Dunkerque un demi-siècle plus tard [98]. Par une affiche destinée aux « mères de famille », le syndicat local reproche aux stevedores d’aider leurs auxiliaires à acquérir des débits de boisson où « la moitié de votre semaine ira, comme par le passé ». En 1948, l’accusation revient sous la plume de militants sétois. Ailleurs, les témoignages évoquent des « cadeaux » en nature, des heures passées, loin du port, à la construction ou à l’aménagement intérieur de maisons…

27 Désignés pour leur aptitude supposée à diriger d’une poigne de fer la main-d’œuvre indocile des quais, les « chefs » en imposent souvent par un gabarit hors norme. La presse relate les « exploits » de « bourreaux » [99], « dompteurs » et « athlètes » [100], « bâtis comme le mur de l’Atlantique » [101]. Lors d’une grève de débardeurs parisiens, un commissaire de police note, en 1895, que « les ouvriers sont un peu brusqués et même insultés par les chefs d’équipes » [102]. Faisant de la brutalité une méthode de commandement, beaucoup rudoient les travailleurs à leur merci quand ils n’en viennent pas aux coups. Sans aller jusque-là, quelques-uns marquent leur distance et leur autorité par l’accentuation du caractère humiliant d’une embauche aux allures de « marché aux esclaves ». Ici, il est question de jetons d’embauche jetés à la volée vers les hommes qui se bousculent pour les ramasser [103]. À Boulogne, dans l’entre-deux-guerres, les contremaîtres ont l’habitude de lancer des pelles aux ouvriers qui doivent s’en emparer le plus vite possible et aller les planter, en guise de marquage territorial, aux meilleurs endroits du chantier [104].

28 Cette configuration sociale explique la séduction, précoce et durable, qu’exercent les projets d’élimination radicale d’employeurs « parasites », plus marchands d’hommes qu’authentiques chefs d’entreprise. Le vieux rêve de l’association, réactualisé sous la forme de coopératives suscite des expériences que ne décourage aucun échec. Néanmoins, le tour de rôle, nanti d’une légitimité historique, semble davantage à portée de main. Encore faut-il établir les critères d’accès aux divers travaux portuaires que les tactiques revendicatives, l’influence du modèle offert par le syndicalisme de métier et les cloisonnements renforcés par les premiers accords collectifs, tendent, on l’a vu, à transformer en spécialités distinctes. Les frontières ne sont toutefois pas intangibles. La mobilité des hommes, stimulée par l’intermittence et les solidarités vécues dans les luttes, prédispose aux structures « industrielles » préconisées par la Fédération des ports et docks et la CGT. Reste qu’au terme d’un long processus de différenciation-regroupement où les considérations administratives ont leur part, les syndicats d’« ouvriers portuaires » contribuent bel et bien à l’affirmation de la profession de docker.

29 À compter du tournant du siècle, les organisations ouvrières n’ont eu de cesse de construire un rapport de forces tel que la carte syndicale fasse office de sésame pour l’accès aux quais. Sur cette voie, il ne fera bientôt plus de doute qu’un « vrai docker, c’est un docker syndiqué » [105]. Investis de la délicate responsabilité de réguler le volume de la main-d’œuvre, les syndicats modulent en conséquence les droits d’entrée dans leurs rangs. En période de moindre activité, les clivages de spécialités se durcissent et chacun veille au respect absolu des priorités spécifiques d’embauche. Dans leur combat contre le chômage, les organisations n’hésitent pas à invoquer les us et coutumes pour justifier les « pratiques restrictives » qui pèsent sur les rendements. Les militants se montrent d’autre part intraitables envers les équipes incomplètes, la présence de non-syndiqués, les palanquées trop lourdes… Des amendes et jusqu’à des interdictions d’embauche pour plusieurs jours, sanctionnent les contrevenants.

30 Au sortir de la Première Guerre mondiale qui a vu l’État et les autorités militaires développer des instances consultatives et de concertation, l’administration ne repousse pas d’emblée la revendication des dockers « confédérés » relative à l’établissement d’une carte professionnelle. À tout prendre, ce mode de régulation paraît préférable à celui en vigueur dans les ports où la carte syndicale abandonne aux travailleurs organisés la sélection de la main-d’œuvre. Des discussions s’engagent [106]. Elles butent bientôt sur l’intransigeance des employeurs qui, s’ils admettent le principe d’une sorte de certificat d’aptitude professionnelle, récusent toute idée de priorité jugée attentatoire à leurs prérogatives. Hormis quelques applications locales, notamment à Bordeaux, retenons que la revendication ne mobilise guère les ouvriers qui, partout où cela est possible, restent fidèles au contrôle syndical tandis que les « unitaires » ont beau jeu de vitupérer « l’encartage » et le danger de « listes noires » [107]. Après bien des péripéties, les impératifs de la défense nationale amènent l’État à trancher. Au printemps 1939, un décret confie aux autorités portuaires le soin de délivrer des cartes de docker en fonction des besoins de chaque site. Circonstanciel, le texte est complété, le 28 juin 1941, par une loi qui réserve pour la première fois les travaux de manutention portuaire aux dockers titulaires d’une carte professionnelle et confie le contrôle de l’embauche à des bureaux centraux de la main-d’œuvre (BCMO). Dans sa double inspiration corporatiste et moderniste, le texte vise l’accroissement de l’efficacité des ports par une répartition rationnelle des travailleurs dont il souhaite « relever l’état moral et matériel » [108].

31 La question rebondit à la Libération, posée par la Fédération des ports et docks rétablie dans sa puissance. Ponctué d’actions ouvrières, le long travail d’élaboration de la loi du 6 septembre 1947 débouche sur un tour de force législatif : doter l’intermittence d’un statut. « Vrai scandale pour le sens commun [109] », le texte ne se limite pas, en effet, à démocratiser le fonctionnement des BCMO. Sur le fond, il prend acte de l’inéluctabilité du chômage portuaire, en circonscrit l’aire et prévoit et d’en compenser les conséquences sociales par l’indemnisation des dockers professionnels non embauchés au moyen d’une cotisation patronale gérée par un organisme paritaire national, la CAINAGOD. Par là, il dissocie l’intermittence de la précarité et conclut le laborieux processus de construction d’une identité docker dont la définition-reconnaissance trahit l’influence du syndicalisme sensible jusque dans les péripéties de son inscription législative.

32 La loi relève, certes, d’un compromis. Accroissement des rendements, acceptation des heures supplémentaires… l’exposé des motifs reflète les attentes des employeurs qui, par la voix de l’UNIM, réfutent l’idée d’un accord par « faiblesse » et parlent d’« un acte réfléchi » [110]. Surtout, à l’heure de la reconstruction et de la modernisation du pays, l’administration, consciente du risque de voir « la main-d’œuvre abandonn[er] les ports et cherch[er] ailleurs un emploi stable » [111], fait le pari de l’adhésion des dockers à l’effort de productivité en contrepartie de ce que l’on qualifie ouvertement de « statut ». Les ambiguïtés et les silences de celui-ci laissent, en outre, une large place à l’interprétation et ouvrent, par là même, un nouveau champ de conflictualité. Nul ne songe, pour autant à contester la réalité de l’avancée syndicale.

33 À Paris, la Fédération des ports et docks sort confortée dans sa fonction d’incarnation de la profession qu’il lui revient dorénavant de protéger contre d’éventuelles remises en cause législatives. Les tentatives de scission se briseront sur l’attachement identitaire des syndiqués à ce symbole de l’unité corporative. Dans les ports, placés, bon gré mal gré, sous le régime du tripartisme social, la médiation syndicale est permanente. À l’embauche, des contrôleurs ouvriers surveillent l’application des procédures. Sur les chantiers, les délégués interviennent quotidiennement dans la solution des litiges ordinaires et participent aux commissions convoquées pour l’examen des cas les plus sérieux. Plus que jamais, enfin, le site demeure, à l’exclusion de l’entreprise, l’entité privilégiée de détermination des salaires, des rendements, de la composition des équipes, de négociation des conditions du changement technique et le tremplin pour l’extension prometteuse de la représentativité du syndicat à la majeure partie des « cousins germains » [112] des activités connexes ou similaires [113].

34 Fermement rappelé et éprouvé à longueur de conflits, l’antagonisme capital/travail va de soi. Entre patrons et ouvriers, il s’agit « toujours de gagner l’un sur l’autre […], c’est un jeu », abrège et nuance un syndicaliste [114]. Sur la durée, les relations se teintent de compréhension, sinon de connivence, comme il se doit entre « gens de la partie » auxquels il arrive, dans le contexte d’une rude concurrence entre ports, de se retrouver autour de la promotion du site. La perception des choses est un peu différente à la base. Si les intermittents préfèrent travailler pour la même entreprise, la répétition des embauches empêche l’établissement de véritables liens avec les manutentionnaires. « On ne connaissait pas nos patrons », répètent les témoins. Beaucoup font du BCMO leur seul véritable employeur. L’institution d’un curieux « régime de libre entreprise avec main-d’œuvre obligatoire » [115] bat en brèche l’omnipotence des contremaîtres. Impuissants, des hauts fonctionnaires constatent que les dockers passent « sous la complète emprise du syndicat qui est en fait le seul organisme à caractère permanent que l’ouvrier connaît dans sa profession » [116]. « Autant dire qu’il n’a pas de patron », s’indigne le président de l’UNIM [117].

35 Gardons-nous de perdre de vue le troisième partenaire de la « triade infernale » que forment les dockers, leurs employeurs et l’État. La loi de 1947 accorde à ce dernier des responsabilités accrues par l’intermédiaire des directeurs de port et de ses représentants dans les organismes de concertation ou de gestion. Elle le charge également de décider de l’implantation des BCMO, de la nomination de leurs membres, du niveau des cotisations patronales, du montant de l’indemnité de garantie, etc. Au reste, c’est à son initiative que s’enclenche, en 1991, la procédure de révision du statut de 1947 réclamée depuis des décennies par les patronats de la chaîne maritime et portuaire, programmée par trois générations de hauts fonctionnaires, mais toujours reportée devant les réactions ouvrières [118]. Chacun sait que la détermination, l’autorité et la légitimité de l’État ne seront pas de trop pour venir à bout de la résistance prévisible des intéressés [119]. Assimilée à un combat d’arrière-garde, la longue lutte des « portuaires » n’est guère comprise d’une opinion qui, tentée de confondre intermittence et précarité, s’étonne de l’opposition manifestée envers la « permanentisation » – mensualisation – proposée. L’âpreté existentielle de la lutte dépasse la défense, économique et catégorielle, d’une « patente » [120] protectrice contre le chômage et gage de rémunérations confortables. L’identité collective à laquelle les dockers se réfèrent tout au long du conflit renvoie, par-delà une indéniable dimension communautaire, aux valeurs qui, chez des hommes convaincus d’être les « derniers ouvriers libres » [121] du pays, rendent insupportable la perspective d’une banalisation salariale synonyme de subordination directe.

36 Malgré la défaite et une réduction considérable des effectifs, il n’apparaît pas, à ce jour, que le syndicalisme ait cessé de marquer de son empreinte une identité corporative davantage en voie de recomposition que de dislocation. Si l’on perçoit les effets désagrégateurs, déjà ancien, des techniques de manutention sur les équipes à la base de la pyramide des solidarités ouvrières, il est plus difficile d’apprécier les conséquences de la disparition de ces moments privilégiés de visibilité du collectif que constituaient les rassemblements quotidiens dans les halls d’embauche. Pour l’heure, les syndicats maintiennent leur exigence d’une « identification » en bonne et due forme de dockers dotés de compétences élargies à l’ensemble des opérations couvertes par la manutention portuaire moderne. Si la convention collective nationale de 1993, nouveau « ciment » [122] de la profession, n’écarte pas le risque d’une dangereuse dualité à travers l’évocation de « la nature temporaire de certains emplois », elle invoque aussi la convention 137 de l’OIT qui affirme le principe d’un statut des dockers. Elle-même établit des critères précis de recrutement. Étendue, enfin, à l’ensemble des salariés de la branche, elle prépare le terrain à des rapprochements inédits avec les personnels administratifs et de maintenance, base d’une redéfinition ultérieure de la profession pour laquelle les syndicats disent avoir pris date.

Notes

  • [1]
    Sur les débats qui ont traversé l’histoire sociale on se reportera, entre autres, à Christophe Charle (éd.), Histoire sociale ; histoire globale ? Actes du colloque des 27-28 janvier 1989, Paris, Éd. de la MSH, 1993 ; Bernard Lepetit (éd.), Les formes de l’expérience. Une autre histoire sociale, Paris, Albin Michel, 1995, Gérard Noiriel, Sur la « crise » de l’histoire, Paris, Belin, 1996 et Antoine Prost, Douze leçons sur l’histoire, Paris, Seuil, 1996.
  • [2]
    A. Prost, « L’histoire ouvrière en France aujourd’hui », Historiens et Géographes, n° spécial « Histoire ouvrière », Michel Pigenet, Jean-Louis Robert (éd.), n° 350, octobre 1995, p. 208.
  • [3]
    Voir Y. Schwartz (éd.), Reconnaissance du travail. Pour une approche ergologique, Paris, Puf, 1997.
  • [4]
    À l’exemple, dans un autre contexte, des bûcherons qui avaient précédemment retenu notre attention. Voir M. Pigenet, « Ouvriers, paysans nous sommes… ». Les bûcherons du Centre de la France au tournant du siècle, Paris, L’Harmattan, 1993.
  • [5]
    On sait comment, en réplique au film d’Elia Kazan, Sur les quais, dont la dénonciation, en 1954, du contrôle exercé par la pègre sur les organisations de dockers de la côte est des États-Unis tendait à confondre syndicalisme et pègre, Sydney Lumet proposa, avec Vu du pont, réalisé en 1962, une autre vision des travailleurs portuaires.
  • [6]
    Voir René Borruey, Jean-Lucien Bonillo, Fluidité et architecture ; les logiques de l’espace portuaire, Paris, Caisse nationale des Monuments historiques, 1993 ; M. Croguennec, « L’aménagement du port de Rouen de 1800 à 1940 ; contraintes techniques et stratégies », thèse d’histoire, université de Rouen, 1999 et Claude Mignot, L’architecture au xixe siècle, Fribourg, Office du livre, 1983.
  • [7]
    Voir John Lovell, Stevedores and Dockers. A Study of Trade Unionism in the Port of London 1870-1914, London, Mac Millan & Co ltd, 1969 et Eric L. Taplin, The Dockers’ Union ; A Study of the National Union of Dock Labourers, 1889-1922, Leicester, Leicester University Press, 1986.
  • [8]
    E. Nijhof, « Des journaliers respectables. Les dockers de Rotterdam et leurs syndicats, 1880-1965 » in Dockers de la Méditerranée à la mer du Nord. Des quais et des hommes dans l’Histoire, Aix-en-Provence, Édisud, 1999, pp. 115-125.
  • [9]
    M. Pigenet, « Dimensions et perspectives internationales du syndicalisme docker en France dans la première moitié du xxe siècle » in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 215-223.
  • [10]
    Congrès international des Unions de travailleurs des transports, 19-21 septembre 1900, Bourse du Travail de Paris, Paris, Imprimerie économique, 1900.
  • [11]
    Archives nationales (AN), F7 13699. Dockers, historique, organisation. Congrès des 13 et 14 avril 1901.
  • [12]
    Compte rendu des travaux. XIe congrès de la Confédération, Toulouse, 3-10 octobre 1910, Toulouse, Imprimerie ouvrière, 1911, p. 365. Allant au plus court, les rédacteurs du compte rendu ne s’embarrassent pas de subtilités et réunissent l’ensemble des organisations des Ports et Docks sous la rubrique « Fédération des Dockers ».
  • [13]
    Congrès fédéral, 27-29 janvier 1938, Nantes, Paris, L’Émancipatrice, 1938.
  • [14]
    Journal officiel du 20 août 1947. Exposé des motifs du projet de loi.
  • [15]
    Intervention de Gérard Leclercq, Congrès fédéral national, 18-19 mai 1960, Paris, Imprimerie de la Fédération, s. d.
  • [16]
    Si la plupart insistent à ce propos sur son passé de « magasinier », les moins aimables parlent de « docker de péniches ».
  • [17]
    L’Avenir des Ports, février 1962.
  • [18]
    Expression appliquée aux terrassiers parisiens empruntée à Georges Navel. Voir G. Navel, Travaux, Paris, Gallimard, 1979 (1re éd., Paris, Stock, 1945), p. 186.
  • [19]
    T. Perron, « Légende noire et icônes rouges ou l’image des dockers au cœur de la guerre froide » in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 193-204.
  • [20]
    J.-P. Avenel, « Les dockers du Havre. Aspects psycho-sociologiques et médicaux de la vie du groupe », thèse de médecine, Paris, 1960.
  • [21]
    Alain Cabantous, Les citoyens du large. Les identités maritimes en France. xviie-xixe siècles, Paris, Aubier, 1995, p. 193, signale, d’un point de vue plus général, la place du danger et du risque, « plus que du travail lui-même », dans l’émergence d’une « identité commune aux populations maritimes des temps modernes ».
  • [22]
    L’Avenir des Ports, juin 1948.
  • [23]
    Loic Hislaire, Dockers, corporatisme et changement, Transport Actualités-GEP Communication, 1993, pp. 14 et 104.
  • [24]
    G. Denigot, « Docker à Saint-Nazaire », in ADRET, Travailler deux heures par jour, Paris, Seuil, 1977, p. 53.
  • [25]
    Témoignage de Louis Vaubaillon cité par P. Veyron, « Les dockers du port de Rouen (1919-1947) », maîtrise, université de Rouen, 1979, annexes.
  • [26]
    Témoignage recueilli par S. Béroud, « Représentations individuelles au sein d’un système corporatif en crise : l’exemple des dockers de Fos », Paris, mémoire IEP, 1992, p. 81.
  • [27]
    M. Pigenet, « La solidarité syndicaliste entre vertu et nécessité. L’exemple des dockers (xixe-xxe siècles) », contribution au colloque « Les Solidarités », Bordeaux, 16-17 juin 2000, actes à paraître.
  • [28]
    À la suite de Selig Perlman, Denis Segrestin conteste, notamment à propos des dockers, l’équivalence trop rapidement établie entre corporatisme syndical d’une part et conservatisme ou absence de conscience de classe d’autre part. Voir D. Segrestin, « Du syndicalisme de métier au syndicalisme de classe : pour une sociologie de la CGT », Sociologie du travail, n° 2, 1975, pp. 152-173.
  • [29]
    C. Kerr, A. Siegel, « The Inter-Industry Propensity to Strike : an International Comparison », in A. Kernhauser, R. Dublin, A. M. Ross (éd.), Industrial Conflict, New York, Mac Graw Hill, 1954.
  • [30]
    Voir notamment E. Nijhof, « Le syndicalisme militant et pragmatique : les dockers de Rotterdam, 1945-1965 » in M. Pigenet (éd.), « Le syndicalisme docker depuis 1945 », Cahiers du Grhis, n° 7, 1997, p. 109.
  • [31]
    Voir M. Pigenet, « La liqueur et le fiel ou le difficile cheminement des dockers vers l’unité » in La CGT et le Front populaire, Montreuil, Institut CGT d’Histoire sociale, 1997, pp. 77-109.
  • [32]
    M. Pigenet, « Les dockers français, “garde-côtes de la paix” », in Images et mouvements du siècle. Chronique sociale, t. II, Paris, ICGTHS-Édition France-Progrès, 1999, pp. 409-416. L’option internationaliste du syndicalisme docker s’affiche dès la création de la Fédération nationale en 1901, année où se constitue à Marseille un « syndicat international », ouvert à tous les travailleurs du port sans distinction d’origine. Précisons qu’à l’échelon national comme au niveau local, ce choix idéologique procède aussi de considérations tactiques.
  • [33]
    Déclaration de la Commission de la Défense nationale de l’assemblée, le 22 février 1950.
  • [34]
    François De Closets, Tous ensemble. Pour en finir avec la syndicratie, Paris, Seuil, 1985. Au sujet des dockers, l’auteur évoque un « paroxysme du pouvoir syndical ».
  • [35]
    F. Grosrichard, « La corpo des dockers », Le Monde du 14 mai 1992.
  • [36]
    L’Express du 25 mai 1992.
  • [37]
    A. Le Marchand, « Le syndicalisme docker au Havre depuis 1947 ; de l’action structurante à la double contrainte », Cahiers du Grhis, n° 7, 1997, p. 93. À Marseille, au milieu des années 1990, « un docker ordinaire travaillant sur les conteneurs gagne 170 000 francs par an ». Alfred Pacini, Daniel Pons, Dockers à Marseille, Paris, Payot, 1996, pp. 306.
  • [38]
    Le 24 juillet 1947, à la veille du vote du statut des dockers, la Chambre de commerce du Havre se prononce contre l’allocation « d’avantages supplémentaires » à une « corporation privilégiée ». Journal de la marine marchande du 21 août 1947.
  • [39]
    J. Dupuydauby, La filière portuaire française. Mission de réflexion et de proposition. Rapport au ministre des Transports et au secrétariat à la mer, Paris, décembre 1986.
  • [40]
    F. Grosrichard, « La corpo des dockers », Le Monde du 14 mai 1992.
  • [41]
    Bernard Lecuyer, F. Millequant, « Les dockers : quelques traits d’une corporation charnière dans la chaîne des transports », in Georges Ribeill (éd.), Les frontières et identités professionnelles dans les métiers des transports, Actes de la journée d’études du 16 novembre 1984, Paris, Greco 55, p. 4.
  • [42]
    J.-P. Avenel, Les dockers du Havre…, op. cit.
  • [43]
    C. Kerr, A. Siegel, « The Inter-Industry… », op. cit.
  • [44]
    L’Avenir des Ports, novembre 1964.
  • [45]
    Le Petit Parisien, 2 octobre 1893.
  • [46]
    Archives de la Préfecture de police (APP), BA 1371, rapport sur la grève des débardeurs du quai Henri IV du 9 au 12 mai 1895.
  • [47]
    Marcel-Adolphe Hérubel, La France au travail. En suivant les côtes. De Dunkerque à Saint-Nazaire, Paris, Pierre Roger et Compagnie, 1912, pp. 139-140.
  • [48]
    Albert Londres, Marseille, porte du Sud, Marseille, Laffitte Reprints, 1980 (1re éd. 1927), p. 74.
  • [49]
    Jean-Pierre Castelain, Manières de vivre, manières de boire. Alcool et sociabilité sur le port, Paris, Imago, 1989, p. 55.
  • [50]
    Jacques Loew, En mission prolétarienne, Paris, Économie et humanisme, 1946, pp. 19-20.
  • [51]
    J. Loew ; Les dockers de Marseille, analyse type d’un complexe, L’Arbresle, Économie et humanisme, 1945. L’analyse, menée à une période de chômage intense, souffre de reposer sur la seule expérience du père, docker novice, relégué vers les tâches les plus ingrates. Les solutions proposées, imprégnées de catholicisme social, trouvent par ailleurs leur inspiration dans l’ancien système corporatif présenté sous son meilleur jour.
  • [52]
    R. Cornu, « Du portefaix au docker : des mythes indestructibles ? », in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 171-178.
  • [53]
    J.-P. Castelain, Manières de vivre…, op. cit., p. 19.
  • [54]
    L’expression sert toujours d’insulte d’un quartier à l’autre de Marseille. Voir M. Lemoine, « Vue en coupe d’un volcan », in Marseille, Histoires de famille, Paris, Autrement, 1989, p. 98.
  • [55]
    Joël Zattara, responsable de la sécurité sur le port de Marseille, distingue nettement le grappillage des vols de conteneurs par des bandes organisées capables « d’intégrer toute une série de maillons » portuaires. Voir A. Pacini, D. Pons, Dockers à Marseille, op. cit., pp. 304-308.
  • [56]
    Intervention de Pesce, 3e congrès national de la CGTU, Paris, 26-31 août 1927, p. 161.
  • [57]
    M. Quoist, La ville et l’homme. Rouen. Étude sociologique d’un secteur prolétarien, Éd. Ouvrières-Économie et humanisme, 1952, p. 50. Voir également les nombreux entretiens consignés par S. Coutant, « Le docker du port de Rouen. La pratique du métier du statut de 1947 au début des années 1960 », maîtrise, université de Rouen, 1996, Annexes.
  • [58]
    M. Quoist, La ville et l’homme…, op. cit., p. 181.
  • [59]
    AN, F7 13705.
  • [60]
    L’Avenir des Ports, juin 1950.
  • [61]
    19e Congrès fédéral national, 12-13 juin 1980, Paris, supplément à L’Avenir des Ports d’octobre 1980, p. 26.
  • [62]
    Congrès fédéral national, 15-16 juin 1972, Paris, Imprimerie de la Fédération, s. d., p. 45.
  • [63]
    Intervention de Jacques Delahaye, ibid., p. 43.
  • [64]
    Voir F. Baconnier, Le Salut par la corporation, Paris, Les Œuvres françaises, 1935. Notons que Paul Chanson, partisan résolu du corporatisme et auteur d’ouvrages sur la question, préside à la même époque le syndicat des employeurs maritimes de Calais.
  • [65]
    Voir les deux longs articles de C. Jannet, « Exposé des mœurs des Portefaix », et C. de Ribbes, « La Société des Portefaix de Marseille, son histoire et sa constitution actuelle », parus en 1865 dans le Bulletin de la Société internationale des Études pratiques d’Économie sociale.
  • [66]
    Pour une analyse critique de ces structures et de leur historiographie, on se reportera notamment à R. Cornu, J. Duplex, B. Picon, Les industries portuaires à Marseille. Analyse contextuelle de la mobilité, Aix-Marseille, LEST, 1973 ; R. Cornu, « Du portefaix au docker : des mythes indestructibles ? », in Dockers de la Méditerranée…, op. cit., pp. 171-178 ; C. Gontier, Docks en stock. La manutention portuaire marseillaise : hommes, territoires et techniques, xixe-xxe siècles, CERFISE, 1988 ; E. Claverie, « Les dockers à Marseille de 1864 à 1941. De leur apparition au statut de 1941 », thèse d’histoire, université d’Aix-Marseille, 1996.
  • [67]
    À Dunkerque. Voir J.-P. Hernandez, Alors, au port t’en souviens-tu ?, chez l’auteur, 1987.
  • [68]
    M. Maillard, « Les ouvriers du port de Rouen, 1815-1860 », mémoire de maîtrise, université de Rouen, s. d.
  • [69]
    Au Havre. Voir J.-N. Chopart, Le fil rouge du corporatisme. Solidarité et corporations ouvrières havraises au xixe siècle, Racines mutualistes, 1991 ; C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires du Havre, 1815-1852 », mémoire de DEA, université de Rouen, 1995 ; J. Barzman, « Les dockers du Havre, de la brouette au portique (xixe-xxe siècles) », mémoire d’habilitation, université Paris I, 2000.
  • [70]
    S’agissant des portefaix stricto sensu, les travaux de W. H. Sewell confirment que, natifs de la grande ville dans 90 % des cas, ils sont, au milieu du xixe siècle, « les ouvriers les plus privilégiés de Marseille ». Ajoutons que près de 85 % d’entre eux savent lire et écrire. W. H. Sewell, « La classe ouvrière de Marseille sous la Seconde République : structure sociale et comportement politique », Le Mouvement social, n° 76, juillet-septembre 1971, pp. 27-65.
  • [71]
    À Marseille, le règlement de 1814 accorde un abattement de 90 % sur les droits d’entrée dans la société des portefaix. En 1841, ce montant atteint 1 000 F, mais seulement 8 F pour les enfants de sociétaires. C. Gontier, Docks en stock…, op. cit., pp. 10-21. Au Havre, le droit d’entrée chez les Brouettiers s’élève à 2 000 F contre 5 000 à 7 000 F pour être admis parmi les « Tiens bon » de Dunkerque. C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit. ; J.-P. Hernandez, Alors, au port…, op. cit., p. 63.
  • [72]
    Voir le long développement historique présenté par Daniel Hamel, un délégué havrais lors du 20e Congrès fédéral national, 13-14 mai 1982, Paris, Imprimerie de la Fédération, s.d., pp. 69-70.
  • [73]
    R. Cornu, J. Duplex, B. Picon, Les industries portuaires…, op. cit., p. 77.
  • [74]
    W. H. Sewell, Gens de métier et révolutions. Le langage du travail de l’Ancien Régime à 1848, Paris, Aubier, 1983.
  • [75]
    Pour Le Havre, voir C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., pp. 93-94.
  • [76]
    Charles Noiret, Projet de syndicat et de caisse d’échange (pour les ouvriers du port) et d’amélioration morale dans notre population, Le Havre, Imprimerie Maudot, Godfroy et Compagnie, 1876.
  • [77]
    Propos rapportés dans La Révolution prolétarienne du 10 décembre 1935.
  • [78]
    D. Segrestin, « Du syndicalisme de métier… », op. cit.
  • [79]
    J. Dupuydauby, « La filière portuaire française… », op. cit.
  • [80]
    L. Hislaire, Dockers, corporatisme, op. cit., p. 86.
  • [81]
    Le maire du Havre est ainsi en relation épistolaire avec ses collègues de Dieppe, Harfleur, Marseille et Nantes. C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., p. 85.
  • [82]
    Position que soutiennent, en 1841, le maire du Havre et le premier adjoint de son collègue marseillais. En 1848, la municipalité havraise franchit le pas en bloc et retire son agrément au monopole de fait détenu par les sociétés corporatives. C. Gontier, Docks en stock…, op. cit., p. 52 ; C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., p. 86.
  • [83]
    Selon Mazuy, cité par. C. Gontier, Docks en stock…, op. cit., p. 4.
  • [84]
    À l’exemple des brouettiers havrais. C. Tetrel, « Les travailleurs portuaires… », op. cit., p. 86.
  • [85]
    Initialement, seuls des « parents proches » pouvaient les remplacer.
  • [86]
    H. Reynaud, « De l’application de la loi sur les congés payés aux entreprises de manutention dans les ports », thèse de droit, Paris, 1937, p. 77.
  • [87]
    La Petite Gironde du 9 février 1914.
  • [88]
    AN, F7 13700, rapport du commissaire central suppléant, le 1er décembre 1913.
  • [89]
    AN, F7 13701, article 5 des statuts de l’Office.
  • [90]
    Le Journal du 4 mars 1901.
  • [91]
    Centre des archives contemporaines (CAC), 920251, art. 16. Rapport sur les frais de manutention, ministère des Finances et des Affaires économiques, juin 1949.
  • [92]
    CAC, 920251, art. 14. Avis de l’UNIM, le 19 mars 1954.
  • [93]
    H. Grellet, Entre dockers et technocrates. La vie profonde des ports marchands, SOS Manuscrits éd., 1981, p. 49.
  • [94]
    En 1951, un praticien la tient encore pour « malaisée ». G. Bérard, Les entreprises de manutention dans les ports maritimes, Marseille, 1951, p. 7.
  • [95]
    H. Grellet, Entre dockers…, op. cit., p. 33.
  • [96]
    Ibid., pp. 90-91.
  • [97]
    C. Noiret, Projet de syndicat…, op. cit. L’auteur explique au passage comment les ouvriers, tenus d’offrir à boire aux contremaîtres, paient, en outre, sous forme de consommations, l’intérêt des avances consenties aux recruteurs par les débitants habituellement chargés d’échanger contre de l’argent les cartons ou les jetons remis aux dockers après chaque vacation.
  • [98]
    AN, F7 13705. Affiche du syndicat, mai 1927.
  • [99]
    À l’exemple de ce « bourreau de la Bastille » épinglé par l’Humanité du 17 octobre 1907.
  • [100]
    L’Avenir des Ports, mai 1947.
  • [101]
    Ibid., mars 1954.
  • [102]
    APP, BA/1371. Grève de débardeurs parisiens, mai 1895.
  • [103]
    Témoignage d’Honoré Charrière, Port-Saint-Louis-du-Rhône, le 9 avril 1999.
  • [104]
    E. Coppin, « Les dockers au commerce à Boulogne-sur-Mer », maîtrise, université Paris I, 1993, p. 13.
  • [105]
    Propos rapporté par S. Coutant, « Le docker du port de Rouen… », op. cit., p. 156.
  • [106]
    La question est débattue à partir de 1925. Des propositions de loi, déposées en 1928 et 1929, sont enterrées en commission.
  • [107]
    Le Prolétaire normand du 28 mai 1937. À Rouen, cette réticence se prolonge après la réunification de 1935 et pendant le Front populaire.
  • [108]
    Voir M. Pigenet, « Le statut des dockers de 1947 : acquis législatif et pratiques sociales », contribution au colloque « Construction d’une histoire du droit du travail », Aix-en-Provence, 20-21 septembre 2000, actes à paraître.
  • [109]
    A. Le Marchand, « Le syndicalisme docker… », op. cit., p. 84.
  • [110]
    Conférence du président de l’UNIM, le 5 février 1948, devant l’Association des grands ports français. Journal de la marine marchande du 12 février 1948.
  • [111]
    CAC, 920251, art. 14. Note du sous-directeur de l’emploi, s. d. (vraisemblablement 1947, mais antérieure au vote de la loi).
  • [112]
    Intervention de Gabas. Congrès fédéral national, Paris, 10-11 juin 1976, Paris, supplément à L’Avenir des Ports de septembre-octobre 1976, p. 70.
  • [113]
    À Dunkerque, explique le secrétaire du syndicat local, celui-ci parle au nom des dockers, des contremaîtres, des conducteurs et des pointeurs, mais encore des menuisiers, gréeurs, magasiniers, mécaniciens… du port ainsi que des portiqueurs d’Usinor. Congrès fédéral national, Paris, 13-14 juin 1974, Paris, s. d.
  • [114]
    Propos recueilli par E. Guillaud, « Dockers et syndicalisme à Rouen, 1947-1962 », vol. 2, maîtrise, université de Rouen, 1994, p. 205.
  • [115]
    CAC, 870150, art. 168. Note de la direction des ports maritimes, le 27 juin 1979.
  • [116]
    CAC, 870150, art. 12. Note du directeur des ports maritimes, le 19 juillet 1967.
  • [117]
    CAC, 870150, art. 161. Note du 22 mars 1971.
  • [118]
    Quand bien même la réforme participe aussi d’un mouvement global de désengagement de l’État.
  • [119]
    De l’automne 1991 à l’été 1992, les dockers participeront, en plus des actions locales, à 92 grèves nationales de 24 heures.
  • [120]
    À laquelle le secrétaire général de la Fédération des ports et docks compare la carte professionnelle. L’Avenir des Ports, avril 1967.
  • [121]
    L. Hislaire, Dockers, corporatisme…, op. cit., p. 9.
  • [122]
    Daniel Lefebvre, 25e congrès fédéral, Montreuil, 19-21 juin 1996, supplément à L’Avenir des Ports, p. 9.

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