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Article de revue

Catherine Millot : La vie parfaite

Pages 225 à 230

Notes

  • [*]
    Catherine Millot, La vie parfaite. Jeanne Guyon, Simone Weil, Etty Hillesum, Paris, Gallimard, coll. « Histoire et actualité », 2006,259 p.
  • [1]
    Madame Guyon, rencontres autour de la vie et l’œuvre, ouvrage coll., Éd. Jérôme Million.
  • [2]
    S.Weil, La pesanteur et la grâce, Paris, Plon Pocket, p. 130.
  • [3]
    E.Hillesum, Une vie bouleversée, suivi de Lettres de Westerbork, Paris, Le Seuil, p. 43.
English version

1Catherine Millot nous offre une fois encore, une fois de plus, ce que nous offrent si rarement, pour ne pas dire jamais, les livres écrits par des psychanalystes, et que seuls savent nous offrir les écrivains que nous aimons, un rendez-vous à chaque fois renouvelé avec le plaisir de la lecture.

2Ce rendez-vous avec ce livre n’allait pas de soi, n’allait pas sans une certaine appréhension, tant le livre précédent de Catherine Millot, Les abîmes ordinaires, avait figure de perfection, non pas celle de la vie parfaite qui nous occupe ici, mais une écriture parfaite, un style magnifique pour écrire sa quête des abîmes ordinaires, le sien d’abord, qui l’avait menée sur le divan de Lacan, et ceux rencontrés chez certains écrivains qui l’accompagnent depuis longtemps, Rilke, Michaux, Blanchot ou Tolstoï, qui tous avaient témoigné de ce retournement par elle éprouvé, de la déréliction en Gelassenheit extatique.

3J’avais un attachement particulier pour ce livre, sa composition, sa construction que l’on pourrait dire en ellipse, comme autant de tours de boucle successifs, que Catherine Millot avait suivis pour se tenir au bord de l’abîme, au plus près de ce tourbillon et faire le pas du franchissement.

4Mais l’appréhension n’a pas duré longtemps. À peine lue la première page, la magie a opéré de nouveau. La vie parfaiteest une fois encore un livre magnifiquement, lumineusement écrit. Comme seuls en sont capables les grands écrivains, Catherine Millot a l’art du commencement. Il suffit de lire les premières lignes pour s’en convaincre. Son écriture est une écriture sans entrave. Musicale à plus d’un titre, elle emporte le lecteur.

5Mais cette fois, avec La vie parfaite, finis les ellipses, les tours de boucle, l’écriture à la première personne. Il s’agit pour Catherine Millot de nous accompagner auprès de celles qu’elle appelle ses « sœurs » et que Marguerite Porete appelait, dans les années 1300, les « âmes anéanties ».

6Pour qui n’a pas lu les ouvrages des mystiques, il est difficile d’avoir une idée du travail accompli ici par Catherine Millot pour nous faciliter l’accès à ces expériences. Ce sont des contrées qu’elle connaît bien, pour les avoir sillonnées longuement, depuis longtemps, en tout cas en ce qui concerne Maître Eckart, déjà au rendez-vous avec Lacan, mais aussi bien des autres, Saint Jean de la Croix, Thérèse d’Avila, Marie de l’Incarnation, et Madame Guyon, en compagnie de son ami Jean-Noël Vuarnet, qui l’a précédée dans cette quête contemporaine du dieu des femmes.

7La fréquentation assidue par Catherine Millot des textes mystiques, de ces récits d’ascèses répétées au fil des siècles, selon un art complexe dont on a aujourd’hui perdu la clef, comme elle le dit, depuis l’avènement d’une rationalité scientifique, mais aussi depuis que Paul Janet a refermé sur elles les portes de l’asile psychiatrique, cette fréquentation lui permet de nous transmettre avec aisance ces expériences dont on aurait perdu la langue.

8Mais si Catherine Millot a cette familiarité avec la langue mystique, ce n’est pas seulement la conséquence d’un travail d’érudit, mais bien parce que ces expériences ne lui sont pas étrangères. Rappe-lons-nous cette phrase magnifique des Abîmes ordinaires: « Avoir été un jour au monde sans défense et sans réserve, tout abri renoncé, aussi vide que le vide où se tiennent toutes choses, libre et sans frontières, est une expérience inoubliable.

9C’est aussi une expérience humaine fondamentale qui enseigne à trouver son sol dans l’absence de sol, à prendre appui dans le défaut de tout appui, à ressaisir son être à la pointe de son annihilation. »

10Madame Guyon ne dit pas autre chose quand, dans sa lettre à Fénelon, elle écrit :
« Le vrai abandonné ne veut rien savoir, rien connaître, il ne veut même pas être assuré ni de sa voie, ni de son salut, il s’abandonne sans vue, ni raison, faisant sa voie de n’avoir point de voie [1]. »

11Lors d’une présentation de l’ouvrage Les abîmes ordinaires, un des intervenants s’était réjoui à la fin de sa présentation du fait que la psychanalyse avait permis à Catherine Millot de ne pas tomber dans le mysticisme. Je crains qu’il ne lui faille déchanter : elle n’est peut-être pas tombée dedans, certes, mais sur les mystiques, sans aucun doute !

12Cette crainte qu’il exprimait là n’est pas si éloignée de celle de Freud, pour qui, comme il le disait dans une lettre à Romain Rolland, « la mystique lui était aussi fermée que la musique ». Il y soulignait aussi « à quel point sa sophrosunè, son amour grec de la mesure, sa modération juive et une certaine anxiété philistine l’éloignent des questions mystiques ». Et pourtant, poursuivait-il, « il aurait dû s’y aventurer plus tôt (il écrit cela en 1930), car les produits de ce sol ne devraient pas lui être étrangers. Mais il n’est pas si facile de franchir ses propres limites ».

13Lacan était quant à lui bien plus disposé à le faire, et a su reconnaître, comme il le dit dans le Séminaire Encore, « que ces jaculations mystiques, ce ne sont ni du bavardage ni du verbiage, mais ce qu’on peut lire de mieux, tout à fait en bas de page, note : y ajouter les Écrits de J. L., parce que c’est du même ordre ».

14C’est en effet « ce franchissement de ses propres limites », pour reprendre l’expression de Freud, cette annihilation du Moi qui nous tient étriqué, sur la défensive, dont témoignaient déjà les Abîmes ordinaires, et qui se trouvent ici repris à partir de ces expériences de franchissement du vide béatifique, comme l’appelle Michaux, qui témoignent de cette liberté, de cet élargissement, à quoi aboutit l’expérience mystique et qui retient toute l’attention de Catherine Millot.

15En effet, ce qui fait l’originalité de son travail sur les mystiques, c’est le choix – pour ne pas dire le parti pris – qu’elle a fait de ne s’intéresser qu’à la phase ultime du parcours mystique, celle que Thérèse d’Avila désignait comme la septième demeure. Après une succession de demeures, d’un gradus dans l’union avec Dieu jusqu’à la sixième demeure où s’éprouvent le ravissement, l’extase et le rapt de l’esprit (ce qui est ce que l’on retient en général des mystiques), il reste encore à parcourir une ultime demeure, celle où s’éprouve le détachement radical, où, comme elle le dit, « elle se détache des régals de l’âme pour n’être rien en rien ».

16Ce n’être rien en rien qui intéresse ici Catherine Millot n’est pas la quête d’un rien positivé, inassouvissable, d’un rienobjet d’une demande illimitée, commandée par une Jouissance insatiable, à quoi sont rivés, appendus, certains sujets, comme certaines anorexiques, par exemple, mais la quête d’un rien qui a trait au désir, à sa structure même, tributaire, déterminé par la faille dans l’Autre.

17L’autre originalité du travail de Catherine Millot est que cette phase ultime du parcours mystique, cette expérience de néantisation, qui s’ouvre sur un espace infini, débarrassé de toute attente, de tout manque, elle la retrouve, assez naturellement, pour-rions-nous dire, chez la classique Madame Guyon, la magistrale directrice spirituelle de Fénelon, mais aussi – et cela est plus inattendu – chez deux femmes bien plus proches de nous dans le temps, qui nous sont contemporaines, deux femmes aux prises avec le chaos de l’histoire, engendré par le nazisme, et qui témoignent chacune à sa manière de ce que peut être le Pur Amour (pour reprendre le titre de l’ouvrage de Jacques Lebrun) face au Mal Absolu.

18Lacan déjà, dans Le transfert, à propos de Sygne de Coûfontaine, entrevoyait la particularité, dans notre modernité, de cette position sacrificielle, de martyr – au sens étymologique du terme, de témoin, de témoin de l’Absence de Dieu, disait-il.

19Ces deux femmes ce sont la philosophe Simone Weil et Etty Hillesum.

20Pour autant, on ne peut pas dire que Madame Guyon soit hors temps, hors histoire. Car elle a été elle aussi en butte à l’absolu, pas le mal absolu bien sûr, mais le pouvoir absolu, celui de Louis XIV, en l’occurrence, qui l’a longuement embastillée dans la mesure où la Vie Parfaite, « son moyen court », menaçait l’autorité royale du fait que le dieu qu’elle servait était un dieu dont elle n’attendait rien, un dieu dont elle pouvait se passer, un dieu qui pouvait tout aussi bien ne pas être.

21Le livre La vie parfaite reprend, l’une après l’autre, chacune de ces vies et montre comment toutes trois se font prendre par Dieu, pour reprendre une expression de Simone Weil, mais un Dieu qui n’est d’aucune religion, un dieu multiple, et rien à la fois.

22Faut-il dire un dieu vide ? C’est une question. Car il y a dans les expériences qui nous sont rapportées un passage du Nom de Dieu au singulier aux noms au pluriel de Dieu avec cette prolifération de nominations que Catherine Millot donne dans le finale : Dieuquivousprenddanssesbras, Dieulesespacesinfinis, Dieu-torrent, mais aussi Dieudésert, Dieu-abîme, Dieu-tout-et-son contraire.

23Comment comprendre cette prolifération ? S’agit-il des multiples visages de sa consistance ou au contraire, de l’impossible à dire de son inconsistance ?

24Il faudrait pour être précis reprendre dans le détail chacune de ces trois vies afin de préciser la singularité de leur parcours. Mais quelle qu’ait été celle-ci, Catherine Millot souligne – c’est l’une des thèses principales de son livre –, que ces parcours mystiques supposent pour chacune d’elles, chacune à sa manière, un renoncement, un désistement, une« passiveté », un abandon, une « décréation ». Ce sont autant de termes que l’on retrouve dans leurs écrits et qui disent, comme elle l’appelle, l’effacement du Moi.

25Ce que mettent en œuvre ces expériences vécues entre les murs de la Bastille, le no man’s land de Westerbork ou les autoprivations, où qu’elle soit, de Simone Weil, c’est l’acquiescement absolu à la passiveté, à se défaire du Moi et de ses oripeaux, pour finir par se confondre sans résistance aucune avec un Autre en abyme.

26Le Moi, cette instance de maîtrise, est comme elle le dit, un système de défense au service du principe de plaisir, mais aussi une « organisation pour résister à la passivité essentielle du sujet à l’égard de l’Autre ».

27Peut-on dire qu’il s’agit pour ces trois femmes de rendre les armes, phalliques s’entend, de quitter en quelque sorte l’horizon phallique, la finitude phallique, en se laissant désarrimer et s’abolir, ou comme elle le dit, en prenant le large ?

28En effet, en n’offrant plus cette résistance propre au Moi, mais au contraire en accueillant dans l’indifférence tout ce qui se présente, même le plus insupportable, le plus intolérable, la Vie Parfaite débouche sur un nouvel espace, un espace aux lois paradoxales, où « l’on est d’autant plus fortement que l’on a plus radicalement rayé son être ».

29Cet espace où règnent les paradoxes, dans lequel la mystique se fait à la fois active et passive, libre et soumise, cet espace qu’illustre la figure rhétorique de l’oxymore, est un espace élargi à l’infini, celui d’un vide auquel elles consentent.

30En parcourant la vie de ces trois « oxymores vivants », comme elle les appelle, que sont Jeanne Guyon, Simone Weil et Etty Hillesum, il m’a semblé qu’il était possible de dégager trois modalités, trois moyens – pour reprendre un terme de Jeanne Guyon – qu’elles ont employés pour parvenir à ce point de retournement qui consiste à abandonner tout souci de soi pour acquiescer au Réel.

31Ces trois modalités sont pour Madame Guyon celle de l’écriture, du mal pour Simone Weil et de l’amour pour Etty Hillesum.

32En effet, en ce qui concerne Jeanne Guyon, c’est par l’écriture qu’elle opère ce retournement. Madame Guyon est, à n’en pas douter, un écrivain. Mais son expérience de l’écriture va finir par se confondre avec son expérience mystique. Ce qui est ici déterminant, c’est qu’elle opère au cœur même de l’écriture ce même mouvement de désistement.

33Madame Guyon dés-habite l’écriture ; c’est sa main qui écrit ce qu’elle ne saurait dire, dans des torrents d’écriture qui donnent corps, donnent une consistance scripturale en quelque sorte à ce projet oxymorique.

34Simone Weil, quant à elle, emprunte le biais du mal, du malheur de la condition ouvrière, qui suppose la douleur du corps, qu’elle s’efforce d’épuiser. C’est la raison pour laquelle elle ne pourra pas mener à son terme, réellement, ce parcours mystique dans la mesure où le corps sans doute est ce qui se prête le plus mal à l’infini.

35Le corps est un obstacle autrement plus résistant, il n’offre pas la facilité que donne l’écriture à Madame Guyon. Briser le carcan du Moi est une chose, briser celui du corps en est une autre. Les conséquences ne sont pas les mêmes.

36Cette mystique au pays de Marx ne peut se contenter d’une expérience intérieure, elle doit encore faire l’épreuve de la loi de la schlage du capitalisme, du pas cadencé du travail à la chaîne, sans compter celle de la jouissance du meurtre des peuples en guerre.

37Si la pensée pour elle n’a de valeur qu’arrachée au Réel, il lui faut, pour penser le malheur, s’exposer au pire. Il lui faut, pour reprendre l’expression qu’utilise Catherine Millot, « faire mourir le corps pour que vive l’esprit ».

38Je dirais qu’il y a là la réelisation oxymorique, mais de ce fait intenable.

39Elle écrit, dans La Pesanteur et la grâce, cette phrase que ne reprend pas Catherine Millot dans son livre, mais que je trouve intéressante parce qu’elle résume tout l’enjeu de son parcours, « le mal est l’illimité, mais il n’est pas l’infini.

40Seul l’infini limitel’illimité [2] ». Mais, ajou-terais-je, le corps seul ne peut ouvrir à cet infini.

41Pour Etty Hillesum, l’enjeu est ailleurs, du côté de l’amour, me semble-t-il. Cette pratiquante du sexe – pour qui, comme elle le dit si bien, il est difficile de vivre en bonne intelligence avec Dieu et avec son bas-ventre – accomplit un parcours qui la mène de l’amour possessif, en quoi elle reconnaît la marque de sa féminité – être la seule, l’unique, pour l’homme aimé, quand bien même elle ne le voudrait pas dans la réalité –, à l’amour élargi sans frontières, universel, cosmique.

42Ce qui est intéressant dans son livre, Une vie bouleversée, c’est qu’il montre ce que son parcours doit à l’amour de transfert.

43Quelles qu’aient été les pratiques de son chirologue de psy (ou peut-être à cause d’elles, allez savoir !), il ne lui en aura pas moins permis de faire l’expérience de ce changement de régime de l’amour, du passage, comme le désigne Catherine Millot, de l’amour quémandeur, prédateur, à l’amour donateur, de la cupiditas augustinienne à la caritas, à l’amour du prochain quel qu’il soit, jusqu’au fonctionnaire qui distribue les billets pour Auschwitz.

44Etty Hillesum se demande comment elle a pu opérer cette transmutation et parvenir à cette liberté.

45Elle écrit ceci : « J’ai tiré de toutes mes forces psychiques sur une corde imaginaire, je me suis débattue comme un beau diable, je me suis défendue et soudain je me suis sentielibre [3]. »Tirer sur la corde de l’amour de transfert pour se libérer, n’est-ce pas là quelque chose qui s’apparente à la fin de l’analyse ?

46Elle note aussi que ce parcours a eu des effets sur son rapport à l’écriture. Si, pendant longtemps, elle rêve d’écrire, de devenir écrivain, elle n’y parvient pas dans la mesure où elle est trop occupée d’elle-même, qu’il lui manque la nécessité urgente de l’écriture. Mais elle sait qu’un jour prochain, l’horreur de l’histoire lui donnera l’occasion d’écrire la chronique de cette époque.

47Il lui faudra alors écrire sur fond de silence. « Je voudrais n’écrire que des mots insérés organiquement dans un grand silence et non des mots qui ne sont là que pour dominer et déchirer le silence. En réalité, les mots doivent accentuer le silence. » Là encore, régime oxymorique de l’écriture.

48Il y a dans le parcours mystique de Etty Hillesum le passage de l’amour confiné au corps à corps amoureux dans l’étroitesse du cabinet de S. à celui élargi à la vastitude de l’humanité du camp de Westerbork.

49L’amour à ce niveau ne se préoccupe plus de sa satisfaction, mais au contraire satisfait, satisfait à l’Autre, à S(A/ ).

50Ce parcours d’Etty Hillesum n’est pas sans évoquer pour moi une autre femme, qui elle aussi a disparu dans les tourments de l’histoire, quelque part en Russie, en 1937, après avoir apporté à la psychanalyse un de ses concepts les plus précieux, celui de la pulsion de mort, en témoignant de ce qu’il devait à l’amour de transfert et à la destruction comme cause du devenir. Sabina Spielrein avait trouvé, elle aussi, dans l’amour au féminin, au cœur même de cet amour narcissique, la pente qui mène vers un Autre radicalement autre.

Notes

  • [*]
    Catherine Millot, La vie parfaite. Jeanne Guyon, Simone Weil, Etty Hillesum, Paris, Gallimard, coll. « Histoire et actualité », 2006,259 p.
  • [1]
    Madame Guyon, rencontres autour de la vie et l’œuvre, ouvrage coll., Éd. Jérôme Million.
  • [2]
    S.Weil, La pesanteur et la grâce, Paris, Plon Pocket, p. 130.
  • [3]
    E.Hillesum, Une vie bouleversée, suivi de Lettres de Westerbork, Paris, Le Seuil, p. 43.
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