1« L’argent est le nerf de la guerre », dit-on souvent. Les entreprises insolvables soumises à une procédure de sauvetage ont également besoin de capitaux pour assurer leur survie. Cette préoccupation n’a laissé aucun législateur indifférent, d’autant que les entreprises tiennent une place importante dans la stabilité des grands ensembles économiques et sociaux. Le financement des entreprises constitue la toile de fonds du chapitre 11 du Bankruptcy Code américain. La Grande-Bretagne s’est doté en 2002 de l’Enterprise Act pour réduire les faillites d’entreprises. En janvier 2006, la nouvelle loi française de sauvegarde des entreprises entrera en vigueur. L’acuité du besoin n’a pas non plus échappé au législateur suisse. Dès 1994, il a procédé à un toilettage de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), principalement son onzième titre consacré au concordat judiciaire, dans le but de faciliter le refinancement des entreprises insolvables. Après plusieurs années d’application, la réforme a-t-elle permis d’atteindre les résultats escomptés ?
2Quelques chiffres statistiques donnent la primeur de la réponse. Le nombre de sociétés ayant fait faillite en 2005 avoisine déjà 4000 pour ainsi rivaliser avec les chiffres de ces dix dernières années. Les pertes consécutives aux faillites d’entreprises occupent une bonne part des 4,7 milliards de francs publiés par l’Office fédéral de la statistique (OFS). Des études économiques montrent que le financement est la principale cause de ces faillites (Dembinski, 2003, p.109).
Des dispositions à revisiter
3Au moment où, semble-t-il, de nouveaux choix sont à faire, il paraît opportun de revisiter les dispositions consacrées au financement des entreprises en difficulté sans oublier, dans un premier temps, que les actifs existants sont les premiers moyens dont disposent les entreprises pour se remettre sur pied.
4La protection des actifs existants est en effet indispensable pour garantir ou préparer le financement des entreprises. Cet objectif est souvent atteint par le gel des poursuites et des paiements. Mais certains créanciers, par des voies détournées, arrivent à ruiner l’efficacité de la mesure.
5L’arrêt des poursuites contre les entreprises en procédure de sauvetage est une constance des droits modernes sur l’insolvabilité. L’Espagne, la Belgique, la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne connaissent ce principe. En droit positif suisse, l’article 297 al.1 LP place également les entreprises sursitaires sous protection judiciaire pendant quatre à six mois, sans compter la durée du sursis provisoire. Les entreprises dont la faillite a été ajournée au titre de l’article 725a al. 1 du Code des Obligations (CO) bénéficient ex tunc du gel des poursuites, même si la mesure et sa durée ne sont pas prévues de façon expresse par le législateur. Cette interprétation est rendue possible par un arrêt du Tribunal fédéral et la doctrine majoritaire qui enseignent que le but de l’institution se justifierait mal si elle ne conduisait pas à un tel résultat. Le moratoire est donc indissociable de l’ajournement de la faillite.
Une actualité édifiante
6La suspension des poursuites semble justifiée d’autant que les créanciers ont coutume de se lancer dans une course-poursuite contre les entreprises débitrices dès qu’ils sont informés de leurs difficultés financières, menaçant ainsi leur sauvetage. C’est pour cette raison qu’en droit suisse, comme dans les droits nationaux européens ou américain, le gel des poursuites tend à suspendre les poursuites pendantes et à interdire aux créanciers antérieurs à l’ouverture de la procédure de redressement, toute nouvelle action qui aurait pour effet de provoquer la faillite de l’entreprise. A cet égard, l’actualité est édifiante. Deux compagnies américaines menacées par la faillite viennent d’être placées sous la protection des dispositions sur la réorganisation (La Tribune de Genève, 16 septembre 2005, p.8).
7A l’arrière-plan de ces interdictions se trouve la volonté des législateurs de garantir l’égalité de traitement des créanciers, mais aussi et surtout de mettre hors de portée des créanciers les actifs indispensables au redressement des entreprises insolvables. L’interdiction de poursuite et son corollaire qu’est l’interdiction de payer sont ainsi une sorte de parapluie destiné à fermer les portes d’accès au patrimoine des entreprises en redressement. Le contraire aboutirait au démantèlement prématuré de l’entreprise.
8L’existence de ces règles ne doit cependant pas cacher l’envers du décor, d’autant que certains créanciers trouvent les moyens de passer à travers les mailles du filet.
Où placer le curseur ?
9Bien qu’indispensable au sauvetage des entreprises malades, l’arrêt des poursuites bouleverse les prévisions contractuelles des parties et risque à terme de mettre les créanciers dans l’impossibilité de faire face à leurs propres engagements. Dès lors, la difficulté de certains législateurs à placer le curseur entre les intérêts des créanciers et ceux des débiteurs est compréhensible mais déplorable, d’autant que certaines entreprises sous protection judiciaire continuent malgré tout d’essuyer les assauts de certains créanciers. Les entreprises suisses et européennes font le constat de cette situation non propice à leur redressement.
Sans prétendre à l’exhaustivité, les créances qui échappent à l’arrêt des poursuites peuvent être classées en deux catégories : les unes résultent des exceptions instituées par le législateur, et les autres sont l’effet de l’application de dispositions contractuelles (voir encadrés 1 et 2).
Encadré 1. Les créances qui échappent à l’arrêt des poursuites (1) - Celles qui résultent des exceptions instituées par le législateur
La deuxième exception est celle qui autorise le créancier de gage immobilier à introduire des poursuites, même pendant le sursis. Le législateur atténue cette permission dans la mesure où il interdit au créancier la réalisation du gage, afin de préserver les chances économiques du débiteur. Cette interdiction de réaliser pourrait même être prolongée pour une durée de douze mois après l’homologation, à une double condition : l’entreprise débitrice doit rendre vraisemblable que l’immeuble est indispensable à sa réorganisation et les intérêts de la dette hypothécaire ne doivent pas rester impayés depuis plus d’une année. Cette dernière condition annule l’effet bénéfique que les entreprises auraient pu tirer de cette disposition ingénieuse du législateur.
Le droit anglais connaît également une exception au principe de l’interdiction des poursuites au profit des créanciers munis d’une floating charge. Mais depuis l’entrée en vigueur de l’Enterprise Act 2002, ces créanciers ne peuvent plus passer outre le gel des poursuites pour mettre les entreprises débitrices en faillite.
Ainsi, à l’opposé de la Suisse, les grands pays européens et anglo-saxons tendent vers une suspension généralisée des poursuites et des voies d’exécution en période de redressement. Dans ces pays, la suspension des poursuites frappe aussi bien les créanciers munis d’une sûreté que les créanciers chirographaires. Les exceptions au principe du gel des poursuites sont donc quasiment rares dans les législations modernes sur l’insolvabilité.
Encadré 2. Les créances qui échappent à l’arrêt des poursuites (2) - Celles qui résultent de l’application de dispositions contractuelles
On assiste ainsi dans certains pays européens et en Suisse, au foisonnement de l’aliénation fiduciaire, de la cession des créances, même futures, et au développement du procédé du bordereau Dailly. De manière générale, ces pratiques permettent aux créanciers de soustraire leurs créances de l’emprise de la procédure et de vider le compte-client des entreprises. Ces montages juridiques ont des répercussions sur le sauvetage des entreprises puisqu’elles arrivent en redressement avec une trésorerie exsangue ne pouvant financer la réorganisation. L’exercice des droits attachés à la clause de réserve de propriété et au crédit-bail constitue une autre technique pour vider l’entreprise de tout actif doté d’une valeur économique. Même en période de redressement, les créanciers réservataires et le crédit bailleur doivent être payés si l’entreprise souhaite garder le bien indispensable à son sauvetage. Mais comme plusieurs entreprises en redressement manquent souvent de liquidité, elles sont obligées de mettre fin à ces contrats. Ce qui revient à priver ces entreprises des moyens de production indispensables à leur redressement. C’est sans nul doute la raison pour laquelle, en période de redressement, les législateurs belge et anglais font obstacle à l’exercice de l’action en revendication découlant d’une clause de réserve de propriété. Les recommandations du Guide législatif de la CNUDCI nous paraissent aussi bien réfléchies pour la France, la Suisse et les pays qui laissent libre cours aux droits des créanciers réservataires et des crédits bailleurs en période de sauvetage. Le Guide propose de soumettre les biens fournis sous réserve de propriété ou financés par crédit-bail à un régime similaire à celui des biens grevés de sûreté, tout en prenant des dispositions pour préserver leur valeur économique. Cette proposition est déjà chose concrète en droit américain. En effet, les articles 361 et 363 (e) du code de la faillite exigent une protection adéquate du créancier nanti d’une sûreté spéciale, chaque fois que sa garantie risque de subir une éthérification. Cette protection, inconnue des droits nationaux d’insolvabilité d’origine romano-germanique, du moins dans son entendu, est assurée de diverses manières. Elle peut induire une utilisation restrictive du bien. Le débiteur peut également offrir au créancier une autre garantie ou des paiements périodiques. Cette liste non limitative donne au débiteur la liberté de choix de la garantie.
L’« adequate protection » a néanmoins l’inconvénient de porter atteinte à la règle de l’interdiction de poursuite et de l’égalité de traitement des créanciers, mais il a l’avantage de préserver les actifs qui rendent l’entreprise attractive dans l’optique de nouveaux financements.
10Pour faciliter le sauvetage des entreprises insolvables, le législateur suisse autorise les actes de financement mais il a laissé entière la problématique de la sauvegarde des contrats en cours, pourtant tout aussi indispensable pour le renflouement des entreprises.
Un optimisme démenti par les faits
11Les entreprises en redressement font souvent face à deux impératifs catégoriques. Dans l’immédiat, le conseil d’administration ou les instances dirigeantes doivent assurer la continuité de l’exploitation, ce qui suppose des fonds d’exploitation. A court ou à moyen terme, l’entreprise doit disposer de moyens pour financer l’adoption du plan. Mais dans la grande majorité des cas, les entreprises manquent de liquidités suffisantes pour faire face à ces besoins. L’obtention de nouveaux crédits devient souvent la condition du sauvetage des entreprises impécunieuses. L’ancien article 298 LP s’y opposait en interdisant aux entreprises sursitaires d’aliéner ou d’hypothéquer un immeuble, de constituer un gage ou de se porter caution après la publication du sursis. Une question restait néanmoins posée : une entreprise peut-elle obtenir des soutiens financiers sans offrir en garantie des sûretés réelles ou personnelles ?
12Le problème n’a pas échappé au législateur de 1994. Ayant diagnostiqué le mal, il a prévu deux remèdes majeurs pour amener les créanciers et les investisseurs à soutenir les entreprises en difficulté : d’abord, l’autorisation judiciaire des actes de financement, et ensuite la transformation de certaines dettes sursitaires en dettes de la masse dans une faillite subséquente. Ces dispositions devraient, selon le Conseil fédéral et la doctrine spécialisée, faciliter le refinancement des entreprises sursitaires. Mais les faits démentent cet optimisme. Les investisseurs ne se bousculent pas au chevet des entreprises en sursis. Une saine exégèse des mesures susmentionnées aurait pu conduire à douter de leur efficience.
L’interdiction comme principe
13En ce qui concerne la première solution, il faut rappeler que l’interdiction des actes de disposition, de caution ou de constitution de gage est toujours le principe, et l’autorisation l’exception. Cette autorisation qu’on pourrait qualifier de « permission négative » commande toute la politique des juges qui, selon l’avis même des praticiens, donnent assez rarement leur caution à des actes de financement. Il ne s’agit donc pas d’une libéralisation des actes de financement ou d’un pouvoir du sursitaire d’apprécier l’opportunité d’un financement.
14L’interdiction continue de s’imposer non seulement à l’entreprise débitrice, mais également au commissaire qui ne peut autoriser de procéder à la vente des actifs de l’entreprise sans autorisation préalable du juge du concordat. Selon l’économie de l’alinéa 1 de l’article 298 LP, même lorsque les activités sont poursuivies par le débiteur sous la simple surveillance du commissaire, les dirigeants sociaux ne sont pas libres d’engager le patrimoine de la société, ni de contracter n’importe quelle obligation.
15Seuls les actes de gestion courante sont permis, à savoir la disposition des biens et services produits par l’entreprise. L’engagement des actifs immobilisés est le domaine réservé du juge, décidant non plus seulement en matière juridique, mais également en matière économique. Le consentement du commissaire à l’aliénation d’un bien ne saurait empêcher sa nullité.
Obligés d’agir dans l’illégalité
16Dans la pratique, ces interdictions mettent l’entreprise dans l’illiquidité, si bien que certains commissaires agissent parfois dans l’illégalité en procédant à la vente de certains actifs (Le Temps du 11 août 2003, p.16). Devant ce constat, une partie de la doctrine propose de modifier la loi pour du moins permettre au commissaire de vendre des actifs, voire un secteur d’activités, si cette aliénation ne porte pas atteinte au droit des créanciers. D’ailleurs, sous l’ancien article 298 LP, les effets néfastes du régime de l’interdiction pure et simple des actes de disposition sur le sauvetage des entreprises avaient été perçus, et le Tribunal fédéral avait été amené à admettre la validité de la constitution d’un gage immobilier avec l’autorisation du commissaire, car cet acte paraissait comme une mesure conservatoire prise dans l’intérêt des créanciers (ATF 77 III 47, JdT 1951 I 364/365).
La seconde solution n’est pas satisfaisante non plus. Les créances sursitaires consenties avec l’assentiment du commissaire ou du juge donnent aux créanciers une certaine priorité, mais elles ne procurent pas une garantie contre le risque de l’irrécouvrabilité : en cas de faillite, elles sont primées par les dépenses de la procédure et les créanciers nantis de sûreté (Gillieron, 2005, p.342 ; 2003, p.457, N°31).
Solutions américaines
17Des solutions pour améliorer le dispositif de financement pourraient être recherchées dans le droit américain. Le groupe d’experts suisses, commis pour faire du droit concordataire un véritable droit d’assainissement des entreprises en difficulté, était également de cet avis, mais il s’est refusé de faire des propositions allant dans ce sens car, estimant qu’il n’avait pas été mandaté pour ce faire. En effet, le chapitre 11 du Bankruptcy Code américain repose sur la notion de « débiteur en possession ». Est « débiteur en possession », le dirigeant social ou le conseil d’administration qui n’a pas été évincé de la direction de l’entreprise. Ce qui le caractérise, c’est la liberté et les pouvoirs dont il dispose pour mener à bien la réorganisation de la société. Il est gratifié des pouvoirs de l’administrateur des biens du débiteur en faillite (trustee) (F. S. Chiccarelli et E. L. Perez, « Le droit américain de la faillite », in : Folsom & Levasseur, 1994-95, p.338 ss.). Ainsi, il lui incombe d’examiner la légitimité des créances, d’effectuer des comptes-rendus au tribunal et d’exercer le pouvoir en annulation de certaines transactions. Le débiteur doit aussi négocier avec ses créanciers et dresser le plan de réorganisation. Il n’y a donc pas, comme dans les systèmes européens, ce chevauchement des fonctions des dirigeants sociaux et des commissaires concordataires, même s’il est requis de nommer un comité de créanciers. Chose importante, le responsable de la gestion peut, pendant la procédure, vendre les actifs, même ceux grevés d’une sûreté (11 USC section 363 f ; Tanger, 2002, p.286 ss.).
Garanties américaines
18Pour inciter les bailleurs de fonds à investir dans les entreprises soumises à la procédure de réorganisation, le Bankruptcy Code américain leur offre plusieurs avantages. La première garantie qui leur est délivrée est l’ultra priorité. Elle confère à son bénéficiaire un rang prioritaire, en tête des dépenses de la procédure. La créance est payée après le désintéressement des créanciers antérieurs munis de sûreté spéciale. Concrètement, elle occupe le deuxième rang dans l’ordre de distribution (11 USC section 364 (c) (1)). Ensuite, si l’entreprise possède des actifs non grevés, le bailleur peut se voir attribuer une sûreté légale de premier rang sur ces biens. Le code permet, par ailleurs, de leur accorder une sûreté légale de second rang sur un bien déjà grevé (11 USC section 364 (c) (3)). Enfin, la garantie la plus efficace à nos yeux, offerte par le législateur américain, est la super-priorité qui donne à son bénéficiaire une antériorité de droit sur les créanciers privilégiés antérieurs (11 USC section 364 (d)). Une autre approche alliant équité et efficacité pourrait consister en une garantie partagée : il s’agirait d’un système qui permettrait à un nouveau bailleur de consentir des avances à une entreprise en partageant à égalité avec les anciens créanciers la sûreté à l’égard des avoirs liquides du débiteur.
Le dispositif de refinancement peut être également amélioré en dérogeant à l’application de certaines dispositions du droit commun.
Prévoir une solution de sauvegarde
19A l’instar du crédit bancaire, le crédit fournisseur est un moyen de financement auquel ont recours les entreprises, surtout les PME (Dembinski, 2003, p.89). Mais ce système de financement est menacé dès que l’entreprise dépose le bilan et forme une requête de sursis concordataire ou d’ajournement de faillite. La source de cette insécurité est contenue dans l’article 83 CO. La disposition confère aux parties à un contrat bilatéral le droit de résoudre le contrat lorsque l’une des parties est devenue insolvable, à moins que le créancier de l’obligation fournisse à son co-contractant une garantie. Par application de cet article, la jurisprudence et la doctrine assimilent une requête de sursis concordataire à une reconnaissance d’insolvabilité pouvant conduire à la rupture des contrats. Une entreprise est souvent considérée comme une unité de production, mais elle est par excellence un nœud de contrats. Dès lors, c’est signer la mort de l’entreprise que de permettre à ses partenaires ou à ses fournisseurs de résilier les contrats du seul fait qu’elle ait demandé un sursis concordataire.
20Pour éviter cette rupture, l’entreprise défaillante doit, conformément à l’alinéa 2 de la même disposition, fournir une garantie dans un délai raisonnable. Mais comment une entreprise en sursis concordataire pourrait- elle donner la garantie requise si la loi le lui interdit par ailleurs et que les juges habilités à le lui permettre manient l’article 298 al. 2 LP avec beaucoup de circonspection ? Le droit concordataire aurait dû prévoir une solution de sauvegarde pour les contrats en court, comme l’a d’ailleurs fait le législateur belge. L’article 28 de la loi belge du 17 juillet 1997 sur le concordat judiciaire dispose à cet effet que « l’ouverture de la procédure concordataire ne met pas fin aux contrats conclus avant cette date » et que « toute clause d’un contrat, et notamment une clause résolutoire, suivant laquelle la résolution du contrat a lieu du seul fait de la demande ou de l’octroi d’un concordat, est sans effet ».
21En définitive, les procédures de sauvetage plongent souvent les entreprises dans une inertie impropre à leur financement. En principe, les entreprises soumises à une procédure de redressement devraient pouvoir se renflouer par leurs propres activités et l’apport de capitaux frais. Mais les limitations d’activité dont ces entreprises font l’objet et l’insuffisance de protection des nouveaux créanciers ne s’y prêtent pas. La législation suisse sur le redressement des entreprises gagnerait en efficacité en étant, sur ces questions, plus flexible et pragmatique. Pour ce faire, la procédure de réorganisation du code américain de la faillite contient des solutions diversifiées de financement qui pourraient inspirer les législateurs suisse et européen. Car contrairement au droit anglo-saxon marqué par le fresh start, les procédures de sauvetage d’origine romano-germanique prescrivent généralement aux entreprises en redressement, « une obligation de ne pas faire » qui, à notre avis, a marqué l’inconscient collectif des populations européennes moins enclines à investir dans les entreprises en difficulté (Commission européenne, 2003, p.30 ss). •
[Synthesis in english]
22In 1994 the Swiss legislature undertook an overhaul of the law governing proceedings for debt enforcement and insolvency (LP); the aim was to make it easier to refinance insolvent businesses. Having now been on the statute books for several years, this reform has not really produced the results expected of it.
23The number of businesses entering insolvency during 2005 is already approaching 4,000, a level as high as any period over the past ten years. Losses occasioned by corporate insolvencies account for a large portion of the 4.7 billion francs figure published by the Federal Statistics Office. However, studies show that corporate financing is the primary cause of the bankruptcies.
24A mechanism for the protection of existing assets is vital in order to guarantee and plan for business financing. This objective is often achieved by placing a moratorium on legal proceedings and payments, a common theme of modern insolvency law. However some lenders manage to undermine the measure’s effectiveness by subverting the process.
25Under Swiss law, as with all national European and North American systems, freezing proceedings implies suspending any actions pending, and creditors whose claim predates the initiation of the administration process are barred from pursuing any new action that might tip the enterprise into bankruptcy.
26Although indispensable, the cessation of proceedings disrupts the planned-for contractual relationship between the parties, and over time carries a risk that the creditors in turn will be unable to meet their obligations. Consequently, some legislatures have trouble striking the right balance between creditors’ and debtors’ interests, and whilst this is understandable it is also deplorable, all the more so as some businesses continue to be attacked by creditors even once under judicial protection.
27In order to make it easier to save insolvent businesses, the Swiss parliament did authorise refinancing, but failed to address the issue of how to save current contracts, although this is an equally vital question.
28Parliament provided two major remedies designed to incite creditors and investors to support businesses in trouble: first, legal authorisation for refinancing packages, second, the transformation of certain classes of suspended debt into preference debt in the event of a subsequent bankruptcy. However, the facts refute such optimism. Investors are in no rush to come to the aid of businesses under administration.
29Solutions for improving the refinancing provisions can be found by looking at American law. In Chapter 11 of the US Bankruptcy Code one finds the notion of debtor-in-possession. A debtor-in-possession is a corporate officer or governing board that retains control of the management of the business. This status is characterised by considerable freedom and power to restructure the company. There does not exist, unlike in the European systems, the combined function of corporate officer and administrator.
30As a way of encouraging lenders to invest in businesses undergoing restructuring, the US Bankruptcy Code offers a number of guarantees. The most effective is the super-priority protection that gives its beneficiaries legal precedence over pre-existing priority creditors.
31Credit extended by suppliers is as much a form of business financing as is credit from the banking system. But this form of finance is threatened from the moment a business declares itself insolvent and applies for receivership or restructuring, for at that moment suppliers are free to cancel their contracts.
32In order to avoid this situation, the business is required under the terms of paragraph 2 to provide surety within a reasonable period. But how can a business undergoing restructuring give the guarantees needed when this is forbidden by law and the judges empowered to grant permission interpret article 298 paragraph 2 of the LP with such caution?
33In essence, corporate rescue procedures often plunge businesses into a suspended state that renders them unattractive prospects for refinancing. In theory, companies undergoing restructuring should be equipped to return to health through their own trading activities combined with an injection of fresh capital. However, the restrictions placed on these businesses’ operations and the inadequate protection afforded to new lenders weigh against this. Swiss corporate restructuring legislation would be more effective if, in these areas, its became more flexible and more pragmatic.
Bibliographie
Bibliographie
- Commission européenne, 2003. Projet Best « Restructuration, Dépôt de bilan et Nouveau départ », Bruxelles, Direction générale des entreprises, septembre.
- Dembinski, Paul H., 2004. Les PME en Suisse. Profils et défis, Genève, Georg.
- Folsom, Ralph H. et Alain A. Levasseur, 1994-95. La pratique du droit des affaires aux Etats-Unis, Paris, Dalloz.
- Gillieron, Pierre-Robert, 2003. Commentaire de la LP, Lausanne, Payot.
- Gillieron, Pierre-Robert, 2005. Poursuite pour dettes, faillite et concordat, Lausanne, Payot.
- Tanger, Margaret, 2002. La faillite en droit fédéral des Etats-Unis, Paris, Economica.