1 Il est 14 h 30 en ce jeudi du mois de janvier 2013. Un groupe de six personnes, des sexagénaires et des septuagénaires qui semblent bien se connaître, est réuni dans une des « aires de repos » du centre commercial, aires composées d’assises diverses (bancs, sièges design, fauteuils club, etc.) aménagées à l’attention des clients. Comme à leur habitude, ces personnes âgées bavardent longuement et ne semblent pas pressées de quitter les fauteuils sur lesquels elles sont confortablement assises.
2 Soucieux de comprendre ce qui motive ces personnes âgées à venir régulièrement dans le centre commercial, cet article rend compte de leur sociabilité et de leurs pratiques de détournement de l’espace [De Certeau, 1990]. En ce sens, nous nous situons dans la lignée de travaux qui se sont centrés sur l’appropriation de l’espace, qu’il s’agisse du logement ou de l’espace public [Pétonnet, 1982 ; Whyte, 2002 ; Haumont et Morel, 2005 ; Segaud, 2010]. Nous nous inscrivons également dans la continuité du travail de Jean‑Marc Poupard [2005] lorsqu’il observait les formes de socialité dans un centre commercial à Créteil. Ceci nous permet de reprendre à nouveaux frais son hypothèse selon laquelle les centres commerciaux sont, à bien y regarder, des lieux de socialité dans le paysage urbain. Dès lors, il est question de donner du crédit à la thèse de Guénola Capron [1998] pour qui le centre commercial a la capacité de se muer, le cas échéant, en véritable espace public de la réalité urbaine contemporaine ; et ce, en (re)créant ce qu’elle appelle de la « sociabilité publique ».
Une immersion ethnographique dans un centre commercial
3 Qui sont donc ces personnes qui passent du temps dans l’enceinte commerciale sans consommer la plupart du temps ? Et en quoi leur comportement diffère‑t‑il des « attentes conventionnelles » [Goffman, 2013] caractéristiques de ce type d’institution marchande ?
4 Il s’agit de personnes âgées, des retraités d’origine sociale modeste ou défavorisée, qui se rendent quasi quotidiennement dans les galeries marchandes durant plusieurs heures, et ce, sans effectuer d’achat ou très peu. Ces personnes subissent diverses formes de « déprise » [Caradec, 2005] qui, en se cumulant, rendent leur quotidien précaire. La pauvreté économique, l’ennui, l’isolement ou encore les problèmes de santé sont en effet fréquents parmi nos informateurs. Certains, les plus fragiles, sont sdf, chômeurs de longue durée ou pris en charge dans un foyer d’hébergement et d’assistance sociale situé non loin du Centre Saint‑Cyprien. Mais, en majorité, ceux que nous appelons « les habitués » sont des retraités qui ne peuvent être considérés comme des marginaux : il s’agit plutôt de personnes avancées en âge pour qui la retraite, le veuvage ou le divorce ont constitué des ruptures biographiques nécessitant une adaptation quotidienne de leur part. Les relations familiales et professionnelles ne faisant plus vraiment sens, nos informateurs s’investissent dans une sociabilité de proximité inscrite dans le centre commercial.
5 Après avoir montré comment émerge ici une sociabilité radicalement non marchande, nous définirons en quoi et dans quel sens cette forme de sociabilité peut être dite primaire. Il s’agira ensuite de nous focaliser sur les interactions des habitués du Centre Saint‑Cyprien pour souligner en quoi cette sociabilité primaire est fondamentalement composée de dons plus ou moins significatifs.
Une sociabilité primaire au cœur du centre commercial
6 Lorsqu’on se rend dans le Centre Saint‑Cyprien et que l’on parcourt les galeries du rez‑de‑chaussée et du premier étage, la présence d’un certain nombre d’« habitués » du lieu n’est pas une évidence. En effet, nombreux sont les clients venus faire leurs courses ou s’approvisionner dans le supermarché du centre commercial. En outre, s’arrêtant parfois devant une vitrine, entrant et sortant des boutiques, ils passent également du temps à se promener dans les galeries. Si bien qu’au premier abord les pratiques des usagers semblent indifférenciées à l’intérieur du Centre. Mais dès lors que nous portons un regard plus attentif sur le déroulement de la vie quotidienne au sein des galeries, force est de remarquer la présence régulière d’individus qui se distinguent de la clientèle stricto sensu. Ils y restent plusieurs dizaines de minutes, et même plusieurs heures pour certains. S’ils sont quelques‑uns à demeurer seuls et muets dans leur fauteuil, la majorité des habitués s’arrange plutôt pour agencer les sièges de manière à constituer de petits salons de discussion improvisés.
7 Ainsi, tant leurs pratiques spatiales que leurs pratiques relationnelles contrastent nettement par rapport aux usages des clients, et révèlent ainsi des détournements à travers lesquels les espaces et les usages sont redéfinis. Cela est d’autant plus vrai que la majorité des habitués ressortent du centre commercial les mains vides. Si certains habitués effectuent quand même des achats, il s’agit le plus souvent d’une petite course quotidienne (pain, alimentation du jour, journal) qui n’est pas significative au regard du temps passé à l’intérieur des galeries. Par exemple, nous avons pu accompagner Gilbert durant le temps de son séjour dans le Centre : il est resté deux heures et demie dans les galeries pour n’en sortir qu’avec six pommes ! En revanche, il avait croisé, salué et échangé verbalement avec plus d’une trentaine de personnes.
8 On compte environ quatre‑vingts habitués se rendant régulièrement au Centre Saint‑Cyprien et participant de la sociabilité qui nous intéresse ici. Ils ne sont évidemment pas tous présents en même temps. Certains d’entre eux ont pour habitude de s’y rendre le matin, d’autres en début d’après‑midi, ou encore après 17 heures. Ces personnes se dispersent également sur l’ensemble des aires de repos du centre commercial, si bien qu’elles ne sont jamais visibles simultanément.
Photo 1 – Au centre commercial Saint‑Cyprien. Photo Thibaut Besozzi.
Photo 1 – Au centre commercial Saint‑Cyprien. Photo Thibaut Besozzi.
Sur les deux plans présentés, nous avons surligné les aires de repos et rambardes autour desquelles se regroupent réguličrement les personnes qui nous intéressent.
9 La reconstitution du réseau d’interconnaissance qui structure ce microcosme fondé sur des relations affinitaires en dit long sur la teneur « primaire » de la sociabilité, si l’on entend par là « un type de rapport social dans lequel la personnalité des personnes importe plus que les fonctions qu’elles accomplissent » [Caillé, 2007 : 86]. Au sein de ce réseau localisé, nous avons identifié différents types d’acteurs.
10 Les groupes « ratifiés » – dont les membres se reconnaissent comme appartenant au même groupe et donc se ratifient mutuellement – sont des groupes primaires au sens de Charles Cooley [1909], comme le groupe d’Italiens qui se réunit toujours près d’une rambarde de l’étage, le groupe de dames dans l’aire proche de la pharmacie, ou encore le groupe de Maghrébins assis dans l’aire de l’escalator. Les membres qui composent ces groupes se rendent au Centre Saint‑Cyprien afin de s’en approprier collectivement un recoin précis. Ils savent clairement qui ils sont venus rejoindre et peuvent se définir comme un groupe délimité – quoique toujours ouvert à la présence d’autres habitués. Les propos de Joe sont révélateurs à ce sujet :
Y’en a que je connais bien hein. On se connaît bien, on se dit bonjour, on discute ensemble : « Dès que vous avez un fauteuil de libre vous venez hein, on discute ! » Ce sont des petits clans. On ne se mélange pas avec tout le monde hein.
Figure 3 – Représentation globale du réseau d’interconnaissance.
Figure 3 – Représentation globale du réseau d’interconnaissance.
12 Puis il précise :
Les Italiens, ils sont là tous les jours hein ! Moi ça fait une trentaine d’années. Mais je viens tous les jours depuis que je suis à la retraite, depuis 1991 ! Avant, y’avait pas pour s’asseoir, on se baladait, on tournait. Les sièges là, ça fait une dizaine d’années !
14 Quant à Mme Frach : « Nous on est ici, y’en a aussi là‑haut des sièges, mais on y va pas, et eux viennent pas ici. » Et David de renchérir : « Les vieilles en bas, elles sont quatre ou cinq, elles, elles regroupent les sièges… elles arrivent à 2 heures elles partent à 6 heures ! »
15 Les « acteurs transversaux » sont des personnes qui circulent entre les différents groupes ratifiés, à l’instar de Francis, M. Chris ou encore David. Ces derniers ont un profil de flâneur, c’est‑à‑dire qu’ils sont davantage debout en train de se mouvoir entre les aires qu’assis dans un espace de repos ou au sein d’un groupe reconnu en tant que tel – ratifié. Ils relient indirectement les différents membres du réseau car ils en connaissent une bonne partie et échangent avec eux des politesses et des bavardages. Francis est explicite sur ce point : « Oh, moi vous savez, j’ai pas vraiment d’endroit préféré, hein, je tourne dans le Centre, j’me promène quoi, et je dis bonjour à plein de monde. »
16 Quant aux « acteurs solitaires », ce sont ceux et celles qui s’installent seuls dans les aires de repos, sans inscription forte dans un groupe social défini, même s’ils entretiennent des contacts, certes réduits à leur plus simple expression, mais néanmoins personnalisés. Au Centre Saint‑Cyprien, c’est le cas de Blanco, M. Pierre‑Vincent ou encore M. Rick. Ces derniers s’assoient dans un fauteuil et y restent souvent plusieurs heures, confortablement allongés, jambes tendues et mains croisées sur le torse. Ce sont alors d’autres habitués (comme les acteurs transversaux) qui passent leur dire bonjour et échanger quelques mots, comme nous le raconte Blanco :
Je viens presque tous les jours oui ! Ça fait dix ans, depuis que ma femme est partie [décédée]. Je me repose, je discute… et des fois je fais une petite course quand même. On rencontre oui, des retraités… beaucoup de gens oui, des personnes seules, elles ont soixante ans ou plus hein ! Moi je me mets assis, je reste souvent tout seul, hein, mais, eux, ils passent me dire bonjour !
18 L’ensemble de ces différentes positions dans le réseau d’interconnaissance compose un groupe diffus d’habitués. Les personnes qui nous intéressent disent « se connaître ». Lorsqu’on leur pose la question, il n’est pas rare qu’elles répondent avec un brin d’ironie : « Je connais tout le monde ici », ou bien « tout le monde me connait ici. ». Cela dit, leur interconnaissance n’est pas toujours de même nature : ils peuvent en effet se dire « amis », « copains », « bonnes connaissances », « connaissances de vue ». L’intensité variable des liens s’exprime à travers leurs propos, comme l’indique à cet égard Mme Caths : « Non y’a pas d’ennemis. Y’en a que je vois tous les jours ou presque, et pis y’en a que je vois moins souvent, ça dépend. Y’en a avec qui y’a plus d’affinités oui. »
19 Tous les habitués ne sont donc pas en relation directe les uns avec les autres. C’est en ce sens qu’ils constituent un groupe diffus que nous avons pu reconstruire à partir d’un regard extérieur et englobant. Les uns et les autres connaissent leurs habitudes mutuelles, comme le signale Franky, un membre central du groupe d’Italiens :
C’est toujours les mêmes, je les connais de vue ! Y’en a qui nous ont quittés, et d’autres, ils sont encore là, toujours à la même place, c’est toujours les mêmes. De l’autre côté, là, dans l’autre aire, c’est toujours les mêmes !
21 Mais ce petit monde ne vit pas replié sur lui‑même dans la mesure où ces habitués entretiennent des relations régulières avec certains professionnels du Centre Saint‑Cyprien, à commencer par les hôtesses d’accueil, les agents de sécurité ou certains commerçants. Les propos d’une hôtesse de l’accueil situé à l’étage sont, à ce titre, très parlants :
Oui, avec eux, c’est vraiment personnel quoi, on a des discussions intimes, même eux hein, c’est vraiment un échange… Ils me racontent leurs voyages, l’Afrique, les enfants pauvres… des fois quand ils sont malades ils me le disent, pis ouais ils m’ont raconté plein de choses !
23 Le vigile qui a le plus d’ancienneté – douze ans – indique lui aussi qu’il connaît certains habitués : « Personnellement non, mais de vue oui. Mais ça n’empêche pas qu’à des moments on discutait. Y en a plusieurs on se serre la main. »
24 Cela n’est pas sans rappeler le cas de Mme Mone qui bavarde avec les commerçants de la bijouterie ou du pressing lorsque les habitués ne sont pas encore arrivés ou déjà partis. En ce sens, les professionnels de cet espace commercial sont des supports relationnels sur lesquels s’appuient nos informateurs pour établir leur sociabilité. Cette forme de sociabilité peut être qualifiée de « primaire ». La personnalisation des relations se traduit ici par l’usage fréquent des prénoms de chacun, ou des surnoms auxquels est associé le tutoiement, comme l’indique le dialogue suivant :
— David : Marcel ? ! Il est là‑haut [dans l’aire Ascenseur], tu l’as pas vu ?
— Blanco : Ah, je l’avais pas vu tout à l’heure, peut‑être qu’il était pas encore arrivé…
— Joe : Moi, je suis passé en bas [à l’aire de l’entrée], y avait la dame âgée là ! Et puis j’ai croisé Francis, il est pas venu ici ?
— David : Non, pas encore. Et puis y’a l’autre qui connaît les trois là‑haut. Je l’aime pas trop lui, il cause trop ! Hein, tu l’aimes bien ?
— Blanco : Oui… moi, je les laisse causer… tu sais.
— David : Et le Meusien, on le voit pu celui‑là ! On ne sait pas ce qu’il fait ni rien…
— David : C’est comme la Martine, et la rouquine !
— Jacques : Ah, je l’ai croisé à la foire [attractive] tiens !
(Journal du bord du 15 février 2013)
26 Cela étant, le vouvoiement peut aussi être de rigueur et se conjugue en l’occurrence avec des rapports personnalisés. Sur le plan non‑verbal, cette personnalisation se concrétise par différents gestes de salutation (accolade, bise, poignée de main, hochement de tête ou signe de la main). Pour autant, il ne s’agit pas ici de laisser entendre que les habitués sont les meilleurs amis du monde, il s’agit bien plus de souligner qu’ils sont engagés ensemble dans le maintien d’un lien social de proximité. Le temps passé à entretenir ce lien et la multiplication des rituels d’interaction confirment, de fait, l’existence de l’Autre. Voici à ce propos ce que nous dit Alain :
Oui ! Euh, c’est important parce que je vois que… je commence euh… c’est pas comme une drogue, mais à être addict [rire]. Si j’y vais pas… tant de fois par semaine, bah j’me dis tiens je ne vais pas voir euh… je vais voir personne, ou les gens qui sont ici et euh… ça me manque ! J’me dis, tiens, il faut que j’aille voir un peu qui c’est qu’y a ! C’est pas une addiction grave… mais euh… c’est bien de, tu sais, de voir des gens, voir ce que deviennent les gens, si y’a du nouveau… voir un peu euh le mouvement.
28 Puis il ajoute :
Bah à force de venir ouais… j’ai créé des liens avec des gens. Euh… sinon bah c’est des connaissances hein, c’est pas vraiment des amis, c’est des gens… on discute, on se voit en brocante, on se voit à droite à gauche et pis voilà.
30 L’interconnaissance au sein du microcosme ne se fonde pas (majoritairement) sur des liens d’intimité profonde ou de forte amitié. Bien au contraire, les relations se réduisent parfois à l’expression de rites de politesse et de discussions spontanées, ce qu’on peut appeler une sociabilité « diffuse » incarnée par l’échange exemplaire qui suit :
— Lisette [saluant avec engouement l’arrivée de Mme Frach] : Bonjour ! Oh vous avez vu le temps aujourd’hui ? ! J’ai bien cru que je n’allais pas venir…
— Mme Frach : Bonjour… oui, quelle affaire cette pluie ! Mais il commence à faire moins froid.
— Lisette : Eh bien, pas hier ! Mais c’est l’humidité, je supporte mal je crois…
— Simone [interrompant Lisette] : Moi aussi, dès qu’il fait humide je sens le froid, même s’il fait meilleur qu’en plein hiver. Je préfère quand il fait sec.
— Mme Frach : Il va faire meilleur de jour en jour, enfin, il faut espérer.
— Lisette : La semaine prochaine ils annoncent un peu de soleil, ça fera pas de mal !
— Simone : Oh oui, j’ai vu ça, mais encore tôt pour sortir dehors…
— Francis passe devant l’aire : [sur le ton de l’humour] Ah bonjour, mesdames ! J’ai sorti mon parapluie aujourd’hui…
— Mme Frach : Mais moi aussi, mais enfin… avec ma canne, c’est pas pratique !
— Francis : Allez, je repasserai tout à l’heure, je reste à l’intérieur… trop de vent.
(Journal de bord du 24 avril 2013)
32 À cet égard, les relations primaires, bien que chargées de sens et facteur de reconnaissance pour les habitués, ne sont pas pour autant incompatibles avec des relations davantage superficielles typiques de la socialité des espaces publics urbains [Joseph, 1998]. Elles ne sont pas non plus en l’occurrence totalement dépourvues de liens faibles teintés d’anonymat et d’impersonnalité qui prennent une expression toute particulière dans les « rapports de trafic » identifiés par Ulf Hannerz [1983 : 140].
33 La teneur primaire des liens observés s’exprime à travers l’importance accordée au bavardage et aux menus propos [Goffman et Winkin, 1988] destinés à entretenir un lien social localement intégrateur. Lorsque les habitués détournent une aire de repos pour en faire un petit salon circonstancié, leurs discussions s’articulent essentiellement autour de sujets qui ne font pas polémique, – tels que la météo, les actualités locales, les petits soucis de santé, les conséquences de la « crise » – et ne risquent pas d’altérer les relations établies. Dans le cadre de cette sociabilité discursive, comment ne pas penser également aux pratiques relatives au commérage [Elias, 1985]. Commérer à propos des clients (par exemple les décrire comme des « robots », des « gens pressés qui ne savent pas prendre leur temps »), c’est en quelque sorte inverser le stigmate.
34 Enfin, ce type de lien peut être dit primaire étant donné qu’il se suffit à lui‑même. Il repose sur des énoncés qui revêtent une fonction « phatique » destinée à entretenir la communication [Malinowski, 1989]. La relation n’existe pas ici en dehors de sa réalisation même, étant donné qu’elle n’est pas solidifiée en dehors des individus ; par une institution, par exemple, qui formaliserait des règles précises, des rôles bien définis et des valeurs clairement établies comme celles visibles par exemple dans le rapport client‑caissière. Le petit monde des habitués, autant que les relations qui en sont la chair, reste toujours informel et vulnérable : il disparaît à partir du moment où les personnes qui le font exister in actu quittent le centre commercial. Les liens entretenus le sont donc « en eux‑mêmes et pour eux‑mêmes » ; ils n’ont d’autres finalités que de s’exprimer au moment présent.
35 Nos investigations empiriques se distinguent ainsi de diverses approches qui abordent la question des centres commerciaux sous l’angle de l’architecture et de l’imaginaire marchand, comme ont pu le faire Ricardo Ferreira Freitas [1996], Christine Chivallon, Nathalie Marme et Dominique Prost [1997], ou encore Marc Berdet [2013]. De même, elles se différencient des recherches se focalisant sur la jeunesse [Poupard 2005 ; Le Renard, 2010]. Par ailleurs, au‑delà des pratiques d’approvisionnement au cours desquelles s’impose l’identité sociale de client [Chevalier, 2007a ; 2007b], nos observations concernent des non‑clients – des « squatteurs » du point de vue de l’institution – pour qui la dimension marchande du lieu est secondaire [1]. Ici, nous sommes loin de la vie sociale qui prend parfois place dans les rues commerçantes du centre‑ville puisqu’il y a de facto une présence institutionnelle forte – incarnée par les caméras, les agents de sécurité, les hôtesses… – avec laquelle il faut compter.
Photo 2 – Au centre commercial Saint‑Cyprien. Photo Thibaut Besozzi.
Photo 2 – Au centre commercial Saint‑Cyprien. Photo Thibaut Besozzi.
Le don au fondement de la sociabilité primaire
36 La sociabilité primaire, telle qu’elle vient d’être étudiée, s’articule autour de multiples dons peu visibles dans le concret du quotidien. Les approches classiques du don, à la suite des travaux de Marcel Mauss [2007], mettent en évidence trois catégories majeures du don (don cérémoniel, don gracieux, don d’entre‑aide) [Hénaff, 2009 : 475]. On peut y ajouter le don de relation qui ne correspond à aucune des catégories mentionnées précédemment. D’une part, le don de relation ne prend sens qu’à travers des rapports intersubjectifs concrets, circonstanciés et immédiats. D’autre part, cette catégorie ne suppose pas a priori la circulation d’objets étant donné qu’elle consiste principalement en des rites d’interaction, et donc en des comportements, des attitudes, des manières d’être.
37 Ce qui circule dans le don de relation, au niveau de l’interaction, ce sont des symboles de confirmation réciproque de l’existence et de la valeur de soi :
Quand une offrande rituelle se fait, c’est‑à‑dire quand un individu signale son implication et sa connexion avec un autre, il incombe au bénéficiaire de montrer que le message a été reçu, que la valeur en a été appréciée […]. Une prestation (pour employer le terme favori de Marcel Mauss) amène ainsi une contre‑prestation et […] nous voyons que l’énoncé généreux tend à être immédiatement suivi d’une manifestation de gratitude. Ces deux mouvements forment ensemble une petite cérémonie : un « échange confirmatif. » (Nous soulignons) [Goffman, 1973 : 74]
39 Les relations sociales observées autorisent à penser les interactions en termes du don, et plus encore en termes de don de relation. Cette forme de don se décline de plusieurs manières, à commencer par les rites d’interaction (positifs et négatifs) [Goffman, 1973 : 73] qui sont autant d’attitudes produites et reçues comme des dons au sein du réseau d’interconnaissance. Ainsi, les rites de salutation évoqués précédemment sont des marques d’attention qui comptent pour nos informateurs. D’ailleurs, ils se plaignent lorsqu’un membre manque à ce rituel, ou bien s’amusent à compter le nombre de gens qu’ils saluent, comme l’indique à ce propos Gilbert : « L’autre fois j’ai compté, depuis l’entrée jusqu’aux rayons, j’avais serré dix‑sept mains [rire]. Bon, c’est vrai que moi je me lie vite ! Moi j’aime bien causer aux gens. » Ou encore M. Christ : « Heureusement, on peut dire un mot aux hôtesses, voir du monde, sinon on serait tous comme des robots sans paroles. Tu sais, quand on voit du monde ça fait du bien, c’est pour ça qu’on vient là aussi, pour sortir, pour voir du monde… »
40 Pour nos informateurs vivant dans un état de grand isolement en‑dehors du centre commercial, l’importance que prennent ces salutations – même lorsqu’il s’agit d’un simple geste de la main ou d’un hochement de tête à distance – se révèle capitale.
41 Quand bien même les rites d’interaction s’expriment corporellement, de manière non verbale, ils prennent également la forme d’échanges de paroles recouvrant le même sens. Qu’il s’agisse de discussions ou bien d’échanges d’informations, les propos échangés peuvent aussi être considérés comme des dons de relation. On donne effectivement de sa personne lorsqu’on participe aux commérages, ou simplement lorsqu’on entretient les menus propos incarnant concrètement le lien. On donne également de sa personne lorsqu’on détient une information sur le petit monde local et qu’on la transmet aux autres membres du groupe diffus. Ce fut le cas à plusieurs reprises après que certains faits se sont déroulés au Centre Saint‑Cyprien. Certains habitués, témoins de ces événements, se trouvaient dans la position de pouvoir « donner » ces informations aux autres, comme dans le cas d’une altercation entre un habitué et un vigile, de la suppression du journal jusqu’alors disponible en consultation à l’accueil ou encore du décès d’un membre du groupe. À propos du journal, l’hôtesse d’accueil suggère à quelle vitesse l’information a été transmise entre les habitués : « Ils se sont donné le mot, dès le lendemain tout le monde est venu me demander ce qu’il en était ! »
42 En ce qui concerne l’altercation entre un habitué et un vigile, l’un de nos informateurs a fait savoir aux autres qu’il détenait une information de première importance car susceptible d’avoir des conséquences sur le compromis passé jusqu’alors entre ce vigile et nombre d’habitués.
— Jacques : À ce propos, y’a une femme qui s’est fait virer ce matin ; le gars lui a dit qu’il ne faut pas rester là toute la journée parce que y’a eu des plaintes apparemment samedi !
— Joe : Bah, ils ont qu’à passer, on les attend !
— Jacques : Ils n’ont qu’à dire ça aux vieilles en bas, elles sont quatre ou cinq, elles, elles regroupent les sièges… !
— Blanco : J’le sentais venir, à force qu’on y reste tout le temps…
(Journal de bord du 12 janvier 2013)
44 Au‑delà de leur contenu informatif, les paroles contribuent à confirmer la relation mutuelle. Elles sont même le vecteur de l’acceptation et de la considération réciproque de chacun au sein du petit monde des habitués. Regard, parole, attention de l’autre sont les fondements de la reconnaissance intersubjective [Todorov, 2003] et, à ce titre, autant de dons de relation. Certains commentaires expriment combien le fait d’être attentif à l’autre est important à leurs yeux :
— Mme Mag : C’est une pauvre dame, elle est bien seule, ça lui fait du bien de discuter un peu, d’avoir des sourires.
— Mme Mone : Le monsieur là, il est malheureux, parfois il dort dehors… c’est bien qu’il ne soit pas seul.
46 Si bien qu’envers les plus marginaux certains habitués se présentent comme un soutien volontaire. C’est aussi un rôle que peuvent endosser les hôtesses d’accueil :
Les vieux, ils vont chercher un contact, mais ça va être euh… ils s’en foutent de ta vie, ils veulent pas te raconter la leur, ils veulent parler de la pluie ou du beau temps, clairement, ils veulent parler de… peut‑être un mot d’actualité… mais ils sont vraiment là pour un petit échange, pour parler à quelqu’un…
48 Par ailleurs, la quantité de temps passée à l’intérieur du Centre, le nombre de discussions et de contacts entretenus, le nombre de poignées de main ou de bises effectuées sont autant d’indices qui permettent d’identifier la place des habitués au sein du microcosme. Car tous les habitués ne s’y investissent pas aussi intensément et n’y sont donc pas tous centraux. Celui qui donne le plus de son temps, de sa présence, de son écoute ou encore de sa parole sera le plus reconnu et le plus légitime au sein du petit monde observé. Donner de soi permet ainsi de s’imposer dans le réseau d’interconnaissance. Parmi les différents types d’habitués, certains sont les leaders du groupe diffus parce qu’ils s’y investissent plus fortement que les autres. En ce sens, le don permet de « manifester sa supériorité, [d’] être plus, plus haut, magister » [Mauss, 1960 : 269‑270]. Cette dimension agonistique des rapports de don permet aussi de relativiser l’image idyllique (et fausse) d’un ensemble de relations qui seraient pacifiques et exemptes d’hostilité. Les exemples suivants attestent des possibles conflits qui peuvent éclater à l’intérieur des galeries marchandes :
— Jacques : Tiens, tu as raté ça samedi dernier, y’a eu un conflit dans l’aire de l’étage ! Un vieux monsieur s’est énervé après une dame qui voulait pas lui laisser son siège, t’aurais dû voir ça !
— Alain : La dernière fois, ça a fritté avec un vieux, il m’a piqué le siège et m’a dit : « Toi, tu fais rien de ta vie, etc. » Je voulais le frapper… depuis j’y vais plus trop.
50 En outre, des solidarités concrètes se manifestent par exemple avec les fauteuils : les occupants se passent mutuellement « leur » place assise lorsqu’ils quittent le centre commercial ou simplement lorsqu’ils désirent faire plaisir à un autre habitué :
Cela fait une heure que je suis assis dans l’aire Pharmacie, six personnes sont venues saluer Alain qui collectionne les « bonjours » à l’image de Francis qui est d’ailleurs passé à l’instant, ainsi que Lisette et Simone, qui ont été rejointes par Mme Frach. Celle‑ci prévient : « Je vais faire une course, je reviens après ! Gardez‑moi une place… » Tandis qu’Alain me précise en se levant de son siège pour aller « faire un tour » : « lui [un vieil homme assis en face de nous], il va partir dans trente minutes, il me repassera son fauteuil, je reviens tout à l’heure ! »
(Journal de bord du 5 février 2013)
52 Le fauteuil est en effet un objet d’une valeur inégalable à l’intérieur des galeries marchandes. « Donner » sa place permet d’assurer la continuité du collectif qui demeure toujours informel et « clandestin », et d’assurer le confort d’un autre habitué le cas échéant. Il faut dire qu’aux heures d’affluence « les places sont chères » dans les aires de repos du Centre Saint‑Cyprien selon une expression fréquemment entendue. Les témoignages d’Alain ou de Mme Frach sont particulièrement révélateurs de l’enjeu que représentent les fauteuils :
— Alain : Commence pas à donner ton siège, après cette dame ne te lâche plus ! [Sous‑entendu : elle voudra toujours ta place].
— Mme Frach : Ah, je peux pas la voir celle‑là, elle regarde toujours si y’a de la place, elle est même pas polie ! Ce n’est pas moi qui lui donnerais ma place !
54 Au‑delà des places assises, ce sont parfois de petits présents qui circulent entre les membres du groupe diffus comme l’indique l’exemple de Mme Mag qui reçoit régulièrement du chocolat de la part d’une autre habituée : « C’est pour le magnésium, mais elle n’en donne pas qu’à moi. Ça doit lui faire plaisir. » Ainsi naissent des rapports tacites de solidarité entre les habitués. Au‑delà du don de relation qui est inhérent aux interactions de nos informateurs, ces derniers s’échangent donc aussi des services plus matériels.
55 Dès lors que l’attention se focalise sur les rapports qui unissent les habitués aux professionnels du Centre Saint‑Cyprien, il est possible d’observer d’autres formes de don plus traditionnelles mais tout aussi inattendues. En effet, les agents de sécurité se montrent plus souples vis‑à‑vis des habitués les plus marginaux, surtout lors des froides périodes hivernales. Ou bien ils laissent dormir certaines personnes dans les aires de repos – ce qui est interdit par le règlement intérieur –, comme c’est le cas avec M. Rick, « parce qu’il est schizophrène, il prend ses médocs, et ça l’assomme ». De la même manière, les hôtesses de l’accueil accordent des privilèges à certains habitués avec qui elles ont créé des liens :
Et en fait avec mes collègues, on leur garde le 20 minutes [le journal], parce qu’on les connait très bien, enfin moi, je me suis attachée à eux, donc euh… on leur garde le 20 minutes, et en échange, ils nous donnent le Métro parce que nous, on l’a pas à l’accueil. Donc, comme ça, je peux le consulter, et on a le Métro. Ils me le passent et puis moi je leur donne le 20 minutes, des fois y’en a plus et je leur réserve à eux, spécialement pour eux [rire] ! Et mes collègues font pareil, on s’est passé le mot…
57 Les rapports primaires que développent les habitués avec les professionnels du centre commercial sont traversés par des formes de don/contre‑don à la fois rituelles, symboliques, et matérielles. L’idée du don de relation se fonde, selon Christian Papilloud [2002], sur la réciprocité du « sacrifice à la relation humaine », ici manifestée à travers des attitudes anodines telles que l’écoute de l’autre même lorsqu’on n’est pas intéressé par ses propos, saluer une personne qu’on n’apprécie pas, prendre de son temps pour accompagner une dame âgée inspirant de la compassion, donner son fauteuil à un habitué connaissant des difficultés à se tenir debout, etc.
58 La vulnérabilité et la sociabilité des personnes qui fréquentent le Centre Saint‑Cyprien font ainsi ressortir « l’instant fugitif où la société prend, où les hommes prennent conscience sentimentale d’eux‑mêmes et de leur situation vis‑à‑vis d’autrui » [Mauss, 1960 : 275]. Autrement dit, à la lumière du concept de don de relation, il conviendrait de suivre l’intuition maussienne du don comme « roc » du social, quand bien même on l’étudie au cœur de la modernité marchande. C’est en tout cas à partir des conduites observées in situ que nous pouvons saisir la pertinence de cette perspective théorique, et ainsi voir combien ces conduites, qui peuvent sembler anodines, sont en réalité fondamentales.
59 Cet article se proposait de montrer l’irréductibilité d’un centre commercial à sa réalité économique, impersonnelle et utilitaire, en faisant apparaître l’existence de liens non marchands et non monétaires – aucun échange d’argent n’a été observé entre les habitués. Les relations qui s’y nouent de manière peu intense, diffuse, cherchent uniquement à entretenir et à perpétuer un groupe d’interconnaissance ; elles s’appuient sur des dons de relation, loin des attentes fonctionnelles généralement associées à ces lieux.
60 Certes, les centres commerciaux s’organisent aujourd’hui comme des espaces de loisirs et de rencontres, mais faut‑il rappeler que c’est à des fins marchandes et en aucun cas dans l’objectif d’attirer des « non‑clients » absolument pas « rentables » et donc perçus comme gênants aux yeux des commerçants et des clients ? L’étude microsociologique proposée ici a rendu visible la spécificité de relations à bien des égards impertinentes dans ce type de lieu qui, contre toute attente, rend propice l’existence de telles formes de sociabilité en proposant des coins appropriables et un confort (climatisation, chauffage, fauteuils, propreté) qu’on ne retrouve ni dans la rue ni dans les parcs urbains. Le petit monde des personnes âgées, si informel qu’il soit, se construit en négociant continûment avec l’institution. ■
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Mots-clés éditeurs : Sociabilité, Don, Détournement, Centre commercial, Espace public
Date de mise en ligne : 25/07/2017
https://doi.org/10.3917/ethn.173.0531