Couverture de ETHN_163

Article de revue

Milda

De la Baltique à la Caspienne, une trajectoire révolutionnaire

Pages 395 à 404

Notes

  • [1]
    Sur ce mouvement et sur cette République, voir Bromberger (2013, chap.XII).
  • [2]
    Voir notamment Solomin [1988] et Adipova [1991]. On trouvera aussi des indications sur la participation de Milda aux événements du Gilân dans Guenis [1999 et 2000]. Cette recherche sur Milda est un travail en cours. Des missions en Lettonie et au Bachkortostan devraient permettre d’éclairer des points obscurs de cette biographie.
  • [3]
    Commissaire dans le Caucase du Nord, puis commandant de l’administration bolchevique à Astrakhan, Sergueï Mironovitch Kostrikov dit Kirov, devenu membre du Politburo (bureau politique) s’opposa à Staline et fut assassiné en 1934.
  • [4]
    Commissaire dans le Caucase du Nord, Sergo Ordjonikidzé était un révolutionnaire bolchevique géorgien qui devint président de la Commission de contrôle du Parti, membre du Politburo puis fut assassiné, victime des purges staliniennes, en 1937.
  • [5]
    Selon les mots de Piotr Chervinsky, « Bespokoïne serdtse Mildy » ( Le cœur inquiet de Milda ), mss. p. 4. Voir du même auteur « Krasnyi general » (Le général rouge), Oukraïnskaia Pravda, n.d.
  • [6]
    Anton Ivanovitch Dénikine, commandant en chef des forces armées contre-révolutionnaires du sud de la Russie, qui remportèrent d’importants succès contre les bolcheviques en 1919.
  • [7]
    C’est une des plus hautes décorations militaires qui fut instituée par décret en 1918.
  • [8]
    Il est possible que les « crises » de Milda aient été dues au typhus qu’elle avait contracté.
  • [9]
    rgaspi (Rossiyskiy Gosudarstvennyi Arkhiv sotsial’no-polititcheskoi istorii), f. 495, op. 90, d. 5, l. 11, cité par Guenis [2000 : 275 et note 14, p. 525].
  • [10]
    L. Steinbauma, « Pirma padomju generale », Padomju Karogs, 30, 7 mars 1972 (p. 3).
  • [11]
    Voici un florilège de cette prose militante : « C’est seulement en Union soviétique qu’il ne peut y avoir de crise » [Bulle, 1932 : 3]. « La grande victoire du premier plan quinquennal […] a mis fin à la paupérisation, à la pauvreté dans les campagnes » [Bulle, 1933 : 3] alors que « la provocation, la traîtrise, l’espionnage sont devenus les méthodes habituelles de la bourgeoisie dans la lutte contre le mouvement des masses révolutionnaires » [Bulle, 1932 : 4]. La situation des travailleurs dans les pays capitalistes est, selon Milda, épouvantable (d’autant plus que sévit la crise de 1929) : « Les chômeurs vivent dans des conditions barbares, dans des gourbis autoconstruits sans chauffage ni éclairage » [Bulle, 1933 : 11]. Les femmes sont encore plus victimes que les hommes de cette situation : « Le besoin et la faim dans les pays capitalistes poussent des milliers de filles de la classe ouvrière sur le chemin de la prostitution qui connaît une croissance monstrueuse » [ibid. : 13], alors que la bourgeoisie « aspire à transformer les enfants du prolétariat […] en chair à canon » [ibid. : 20].
  • [12]
    Nikolai Ivanovitch Boukharine, membre du comité central du Parti communiste – bolchevique (1917-1937), chef de l’Internationale communiste (1926-1928), directeur de l’Institut des professeurs rouges, accusé de « dérive droitière » par Staline, démis de ses fonctions au Politburo, arrêté et exécuté en 1938.
  • [13]
    www. Sakharov Center, key=23069 & page=231
  • [14]
    Contrairement à Yashka qui, nous disent les auteurs [ibid. p. 31)], « parce qu’elle est une femme ne peut accéder aux plus hautes décorations ».
  • [15]
    Rappelons que la Lettonie restera une République socialiste soviétique jusqu’en 1991.

1 Au fil d’une recherche, des personnages s’imposent à l’attention, soit qu’ils incarnent les normes d’une société sur un mode superlatif, soit, au contraire, qu’ils les transgressent. La « figure d’exception » que je présente ici a, pour ainsi dire, joué sur les deux tableaux, appliquant scrupuleusement les normes de son parti et enfreignant celles de sa société (celles régissant le genre, la parenté, l’appartenance territoriale…). Comment ai-je rencontré cette figure exceptionnelle qui, notons-le et il nous faudra y revenir, n’est jamais devenue une héroïne ? Au cours de mes recherches sur le nord de l’Iran, je me suis intéressé à un mouvement révolutionnaire (le mouvement jangali « forestier » 1915-1921) et à l’éphémère République socialiste soviétique d’Iran (1920-1921) [1] qui en a résulté. Parmi les figures de proue de cette République et du « coup d’État rouge » fomenté par les bolcheviques, une Lettone, Milda Ottovna Bulle. Ce personnage m’a intrigué. Que faisait donc une Lettone dans le nord de l’Iran en 1920 ? Quelles circonstances l’avaient-elles amenée là, qu’était-elle devenue après ces événements ? Si lacunaires et contradictoires soient-ils, quelques textes épars [2], sociologiquement discrets, permettent de retracer une trajectoire extraordinaire avant de revenir sur ce qui constitue l’exceptionnalité de ce personnage.

De la Lettonie en Iran, la combattante

2 Milda Grundman naît en 1891 dans un petit village de Courlande, la région occidentale de l’actuelle Lettonie. Son père y est instituteur. Après ses études au lycée de la ville proche, Milda suit une formation complémentaire à Riga ; après quoi, elle devient professeur d’allemand et occupe divers postes en Lettonie et en Ukraine. Elle s’est mariée, sans doute en 1913, avec le poète letton Janis Bullis, acquis aux idées sociales-démocrates et dont les œuvres portent la marque de son militantisme. Les deux époux résident un temps à Petrograd (Saint-Petersbourg) où Milda est secrétaire d’une revue lettone dans laquelle Janis publie ses poèmes. Mais voici le couple établi en 1917 à Kislovodsk (littéralement « Eaux aigres »), une ville thermale du nord du Caucase où Milda est comptable d’une chaîne d’hôtels et de sanatoriums qui y a son siège. C’est Fritz, le frère de Janis, qui les a invités à le rejoindre. Celui-ci (Fritz) était un militant aguerri, membre du Parti social-démocrate de Russie (l’ancêtre du Parti communiste - bolchevique), instructeur de son comité de lutte, ayant effectué un voyage en Suisse pour y acheter des armes et s’étant illustré par son intervention à une conférence du Parti tenue en Finlande sous la présidence de Lénine… Au printemps 1907, il est nommé délégué au congrès du Parti qui se déroule à Londres mais juste avant son départ il est arrêté par l’okhrana (la police secrète du tsar) et jeté en prison ; il n’est libéré qu’à la faveur de la révolution de février 1917. Il souhaite reprendre aussitôt ses activités militantes, mais ses camarades le convainquent de faire une cure à Kislovodsk pour récupérer des rudes épreuves de l’emprisonnement. Le parcours et l’exemple de Fritz confortent la vocation révolutionnaire de Milda. Les Bulle quittent Kislovodsk et s’établissent dans la ville voisine, et un peu plus importante, de Piatigorsk, capitale de l’éphémère République socialiste soviétique du Caucase du Nord, où Fritz exerce les fonctions de commissaire exceptionnel du district tandis que Milda entre au Parti bolchevique et devient secrétaire du comité exécutif du soviet des soldats, des travailleurs et des paysans. Nous sommes en 1918 et le nord du Caucase est « une tour de Babel de contre-révolutionnaires », « de débris réactionnaires de l’Empire russe » [Adipova, 1991 : 61]. Milda est envoyée au front, d’abord dans le détachement communiste de Piatigorsk, créé à l’initiative de S. M. Kirov [3], puis dans les forces du soviet du Caucase du Nord, dirigé par Sergo Ordjonikidzé [4] ; dans ces opérations, elle se distingue par son courage et sa détermination. Alors que le chef du détachement de Piatigorsk est tué, elle exhorte les soldats à poursuivre le combat et les y mène ; un témoin rapporte que « c’était une oratrice extraordinaire, à la voix douce mais retentissante, s’exprimant dans une langue simple et allant à l’essentiel, face à un auditoire sachant à peine lire et écrire» [5]. « Tous ceux qui sont pour la Révolution en avant avec moi ! », cria-t-elle alors que la panique s’était installée et qu’on la croyait morte lors d’un violent affrontement dans un village de cosaques ; mais voici plus éloquent : alors qu’en 1919 la 11e armée, à laquelle elle appartient, se débande et doit se replier, on la charge d’organiser l’évacuation des blessés, des malades et du matériel militaire de valeur ; face aux risques encourus ses compagnons d’armes se rebellent ; les toisant d’un regard méprisant, elle leur lance : « Combattre une femme plutôt que les partisans de Dénikine [6] ! Si vous voulez renoncer et laisser à l’ennemi les camarades blessés, il faudra que vous passiez sur mon cadavre ! » Ces hauts-faits donnèrent lieu à des récompenses et à des distinctions. Alors que l’on remit au commandant qui avait combattu avec elle un porte-cigarettes en argent, c’est un cheval de guerre qu’on lui offrit à cette occasion. Plus tard, en 1928, elle fut décorée pour ses exploits de l’Ordre du drapeau rouge [7]. Mais ses activités militaires et militantes ne s’arrêtent pas là. Elle devient ainsi adjointe au responsable politique de l’ensemble de l’armée. Combattant à cheval, elle entretient le moral des troupes, bien qu’elle-même soit atteinte du typhus dont l’épidémie se répand. Cette énergie déployée dans les activités militaires se combine avec d’importantes responsabilités civiles. Ainsi, exemple parmi d’autres, elle exerce d’importantes fonctions à Astrakhan ; elle est aussi déléguée au 9e congrès du Parti qui se tient à Moscou en mars 1920 ; elle y rencontre Lénine qui l’interroge sur la situation d’Astrakhan et sur la propagande dans l’armée. Intimidée, elle ne sait que répondre ; alors Lénine lui lance : « Qu’est-ce qui vous décontenance, héroïne d’Astrakhan ? »

3 En 1920 Milda est remariée avec Batirbek Lokmanovitch Aboukov, un fervent militant bolchevique lui aussi. Son premier mari est mort en 1917 d’une brève mais fatale maladie. Aboukov est un Kabarde (une population du Caucase du Nord) issu d’une famille de propriétaires terriens ; il a interrompu ses études supérieures pour se consacrer à la lutte révolutionnaire. Il adhère au Parti en 1918, devient secrétaire du soviet des montagnes de Kislovodsk et s’engage comme simple soldat dans les forces armées du Caucase du Nord ; c’est dans ce contexte qu’il rencontre Milda et lui sauve la vie à deux reprises, d’abord lors d’un affrontement avec les contre-révolutionnaires à proximité de Kislovodsk, ensuite quand celle-ci est atteinte du typhus. Le mariage entre Milda et Aboukov ne va pas sans poser de problèmes : Batirbek est le cadet de la famille et son frère aîné n’est pas encore marié (l’ordre coutumier de séniorité n’est donc pas respecté) ; Milda a sept ans de plus que Batirbek et cette « bolchévico-lettone » est luthérienne d’origine, alors que les Aboukov sont musulmans… Ces transgressions de la coutume font qu’Aboukov est renié par l’ensemble de sa famille.

Illustration 1 – Cette photo (tirée de Solomin, 1988) date sans
doute du début des années 1920, Milda arborant sur sa vareuse
les deux losanges de commissaire de division.
Sa coupe masculine, son regard impavide semblent témoigner
d’un refus d’allégeance aux stéréotypes féminins et aux jeux
du paraître. C’est l’image d’un militaire révolutionnaire
parmi d’autres qui est ici recherchée.

4 De retour du congrès de Moscou, Milda est nommée responsable de l’« agitprop » au sein du Comité central du PC d’Azerbaïjan puis elle est élue au soviet de Bakou où vient d’être renversé un régime « bourgeois » ; son rôle au sein du PC d’Azerbaïjan l’amène à suivre une conférence du Parti à Lenkoran, au sud de la province, et, à son retour, en mai 1920, elle s’embarque pour l’Iran avec son mari. Il s’agit, pour les bolcheviques, de mettre en déroute la flotte et les troupes russes blanches stationnées dans le principal port iranien de la mer Caspienne, Anzali ; il s’agit aussi de prêter main-forte et de donner une nouvelle orientation au mouvement jangali. Entre les bolcheviques et les Jangalis, dans les premiers temps la fraternisation domine et le 4 juin 1920 la République socialiste soviétique d’Iran est proclamée. Du 22 au 24 juin se tient le congrès constitutif du Parti communiste d’Iran dont Milda est élue secrétaire. La tendance qui domine alors et que revendique le couple est celle d’un internationalisme prolétarien, peu enclin à prendre en compte les spécificités nationales ou régionales. Outre les responsabilités qu’elle assume dans le Parti, Milda donne des cours et des conférences aux soldats de l’armée rouge persane qui vient d’être formée. Un membre du Parti la compare pour son ardeur militante (on pourrait ajouter pour son indifférence à la question nationale) à Rosa Luxembourg et il poursuit, pour souligner l’acharnement de son militantisme : « Si vous lui donniez la possibilité de nommer des ministres, il faudrait qu’ils travaillent jour et nuit. » Au fil des jours et des semaines, les tensions et les fractures entre les révolutionnaires locaux et les communistes sont de plus en plus vives. Ces derniers refusent de « s’enliser dans la vase petite-bourgeoise » cité par Guenis [1999 : 471] et entendent « écraser à temps cette garce de contre-révolution et transmettre le pouvoir à des personnes solides et sûres » [ibid. : 490]. Milda ne supporte pas les compromis avec les Jangalis : « Quand quelque chose n’allait pas, une des militantes (Bulle) s’évanouissait, devenait hystérique. Alors la secrétaire du CC – Comité central – (Milda donc) bondissait de sa place, Aboukov courait à sa suite ! Tous essayaient de la calmer. Il y avait des pleurs et des cris ! » [ibid. : 472] [8]. Pour imposer leurs vues, les bolcheviques fomentent un coup d’État (« le coup d’État rouge ») qui a lieu dans la nuit du 31 juillet 1920. Aboukov et Milda en sont les principaux artisans. C’est Milda qui rédige le communiqué annonçant la victoire : « Dans la nuit du 31 juillet, les troupes révolutionnaires et le peuple en armes, conduits par les communistes, conjointement avec l’aile gauche de l’ancien gouvernement, ont pris le pouvoir entre leurs mains. Un Comité provisoire révolutionnaire d’Iran a été formé. Il est composé de huit communistes et populistes révolutionnaires de gauche. […] Les travailleurs sont enthousiastes, les ouvriers et les paysans s’enrôlent massivement dans l’Armée rouge » [ibid. : 488]. Cet intermède révolutionnaire iranien de Milda et de son mari fut de courte durée, l’un et l’autre se brouillant avec les responsables locaux du mouvement. L’un d’entre eux déclarait : « Le conflit (entre nous et les communistes) est né du désir d’Aboukov et de Bulle de diriger le sort d’un peuple qui leur est complètement étranger. » Le couple rejoint Bakou où Milda participe comme déléguée du Parti communiste iranien au premier congrès des peuples d’Orient qui s’ouvre le 1er septembre. C’est en ce mois de septembre 1920 que s’achève la brève aventure iranienne des Aboukov. Le congrès des peuples d’Orient a prôné une attitude plus attentive aux spécificités locales – inclination que ne partageaient manifestement pas Milda et son mari. Suivant cette ligne, le Parti communiste iranien va, à partir de novembre 1920, changer d’orientation et de leader. Dès le 1er octobre, Milda est exclue du comité central de ce parti pour « violation de la discipline ». Elle n’a pas regagné le Gilân au terme de sa mission à Bakou ; elle n’a pas fait bon usage de l’argent qui lui avait été confié [9]. Quant au comité central du Parti communiste russe, qui met fin à leur mission, il éloigne Milda et son mari et envoie le couple à Ivanovo-Voznesensk à quelque 250 km au nord-est de Moscou pour des tâches plus conformes à leurs convictions. Milda y est chargée de la reconstitution de l’armée populaire et paysanne, et prend en main la propagande.

La générale et l’idéologue rouge

5 Milda est cependant rapidement rappelée à Moscou par le Comité central du Parti communiste ; elle connaît, outre le letton, cinq langues (le russe, l’allemand, le français, l’anglais, le turc, sans doute celui parlé en Azerbaïjan) et on lui demande de travailler au Commissariat du peuple aux affaires étrangères en tant que rédactrice dans la Direction de la Perse, tandis que son mari est nommé au Commissariat du peuple aux nationalités. Pour parfaire leur formation, les deux époux sollicitent leur admission en tant qu’auditeurs à la section orientale de l’Académie militaire. L’état-major s’étonne de la candidature d’une femme alors qu’aucun texte de serment au féminin n’existe. Mais, après avoir examiné les faits d’armes de Milda, il accepte sa demande et le 1er mai 1922 celle-ci proclame son serment :

6

Moi, fille du peuple laborieux, citoyenne de la République soviétique, je reçois le titre militaire de l’armée des travailleurs et des paysans. Si je m’écarte de ma promesse solennelle, le mépris s’abattra sur ma destinée et la main sévère de la loi révolutionnaire me châtiera.

7 Après deux ans d’études couronnées de succès, Milda sort de l’Académie militaire avec le titre de kombrig, un titre intermédiaire entre colonel et général (correspondant à « général de brigade »), qu’elle est la première femme à porter. Le grade de général n’existe en effet pas dans l’armée rouge jusqu’en 1940 et c’est donc par anachronisme, significatif cependant, que Piotr Chervinsky intitule son article sur Milda « Le général rouge » [voir note 5]. En cette année 1924 où Milda achève sa formation, Lénine meurt. Son cercueil, apporté de Gorki à Moscou, est exposé à la Maison des syndicats puis sur la Place Rouge. Milda fait partie de la garde d’honneur qui veille sur le cercueil [10]. Munie de son diplôme, celle-ci rejoint le nkid, le Commissariat du peuple aux affaires étrangères, où elle est d’abord rédactrice à la Direction de l’Iran, puis nommée sous-chef de la direction du Proche-Orient. Elle ne renonce pas pour autant à son activité militante ; elle participe au comité d’épuration d’un district de Moscou, au soviet de ce district sous les auspices du Parti communiste pansoviétique (qui deviendra le Parti communiste de l’Union soviétique).

8 Nous voici donc en 1929. Milda est malade, sans doute une rechute de son typhus. Rétablie, elle est invitée à participer à l’Internationale communiste (Komintern) en tant que rédactrice, puis en tant que secrétaire de l’Internationale des femmes et membre du Collège de l’Agitprop pour la Scandinavie et l’Orient. C’est, semble-t-il, à cette époque (les années 1930-1932) que Milda voyage et écrit ; elle participe au congrès mondial du mopr (l’Association internationale d’aide aux révolutionnaires), au congrès panmongol et rédige des livres sur la situation des femmes « à l’étranger ». Je croyais – naïveté ethnologique ? – que ces livres étaient le fruit d’observations ou, à tout le moins, de conversations menées dans divers pays. La lecture de ces ouvrages a vite dissipé cette impression. L’idéologie stalinienne y bat son plein, alors que le premier plan quinquennal est lancé, que sont éliminés gauchistes et droitistes du Parti et qu’est dénoncé le « social-fascisme » des régimes occidentaux qui se dissimulent sous la couverture de « démocraties bourgeoises » [11]. Dans ses écrits Milda vante, faut-il le souligner ?, le « programme » de Staline et sa lutte contre les droitistes et les gauchistes du Parti (c’est la période où Boukharine [12] est écarté de toutes les responsabilités). En 1932, sur recommandation du comité central du Parti communiste, Milda entre à l’Institut des professeurs rouges, un établissement spécialisé dans l’étude du marxisme et destiné à former l’élite des cadres bolcheviques.

En Bachkirie, la militante culturelle

9 Mais l’année suivante, le couple est envoyé en Bachkirie (aujourd’hui Bachkortostan), une république autonome, située entre la Volga et les monts Oural et riche en ressources naturelles. Pourquoi cet exil à quelque 1 500 km de Moscou ? Une mise à l’écart, précédant une élimination, selon un processus fréquent sous le stalinisme ? C’est ce que suggérerait le conseil donné à Milda par Staline lui-même, sans doute avec d’obscures intentions, de « passer du Komintern à un travail pratique », lors d’une réception des titulaires de l’Ordre du drapeau rouge au printemps 1933. Ou plutôt – seconde hypothèse – le recours à deux militants confirmés pour mater les récalcitrants en cette période de collectivisation des terres ? Aboukov, devenu expert dans les questions agricoles est nommé successivement responsable des affaires politiques d’un district, puis des sovkhozes d’un autre, tandis que Milda, qui l’a suivi, est affectée au PC bachkir comme adjointe pour le travail féminin. L’un et l’autre vont faire régner l’ordre et répandre la « bonne parole », notamment celle du premier congrès soviétique des « kolkhoziens-travailleurs de choc » (février 1933). Pour leurs services, Milda et son mari sont promus ; elle devient adjointe à la direction du Parti de Bachkirie et lui responsable du commissariat du peuple aux affaires rurales de Bachkirie. L’un et l’autre deviennent membres du comité régional du Parti qu’Aboukov représente au 17e congrès du pcus. Ces distinctions ne suffisent pas à Milda ; les questions de culture la passionnent et la voici engagée dans la promotion du développement culturel, la création de théâtres, de cinémas, de clubs sportifs, de bibliothèques… dans les kolkhozes et sovkhozes. Dans cette République où coexistent Bachkirs et Russes (ce sont les deux groupes les plus importants), quel théâtre promouvoir ? Milda propose de séparer les deux théâtres, chacun avec son organisation singulière, formule qui est acceptée par le comité régional du Parti en mars 1936 ; parallèlement, elle fait créer un théâtre du jeune spectateur à Oufa, la capitale de la Bachkirie, puis un opéra national bachkir qui ouvrira en 1938 mais qu’elle ne pourra pas voir, nous y reviendrons. Le cinéma tient aussi sa place dans les initiatives de Milda si bien qu’en 1937 on compte dans la République 31 cinémas et 149 cinémas ambulants. Le secteur des bibliothèques n’est pas négligé. Milda en fait établir dans tous les centres importants. Cet activisme culturel fut la dernière expression de ce militantisme hors du commun.

La fin tragique

10 « D’août 1937 à novembre 1938, environ 750 000 citoyens soviétiques furent exécutés après avoir été condamnés à mort » [Werth, 2009 : 16]. Il s’agissait de « détruire méthodiquement […] tous les membres de la vieille garde bolchevique » [ibid. : 18], « les cliques provinciales accusées de sabotage » [ibid. : 34], « les responsables régionaux du Parti » [ibid. : 37]. Milda et son mari n’échappèrent pas à cette purge ; ils furent arrêtés en octobre 1937 (Milda le 5, Aboukov le 14). Ils furent exclus du Parti, sitôt après leur arrestation. Milda fut accusée d’avoir saboté la création de cinémas et les activités culturelles et, parallèlement, d’avoir nourri des projets terroristes contre les dirigeants du PC ; charge supplémentaire, le comportement de ses frères : deux d’entre eux ont été arrêtés et expulsés de Moscou, un troisième a été exclu du Parti en 1937 ; pour ces turpitudes qui la compromettent, on a fait venir Milda deux fois à Moscou, alors même que celle-ci n’a plus de liens avec ses frères depuis longtemps mais la loi sur « la responsabilité collective » au sein de la famille de 1934 ne tient pas compte de la fréquentation ou non de la parentèle. Aboukov est accusé, lui, de participer depuis 1935 à une organisation trotskyste en Bachkirie. Dans des articles parus dans la Pravda (La vérité) et dans Krasnaïa Bachkiria (La Bachkirie rouge), Milda et son mari sont traités de « déchets trotsko-bourgeois, d’espions bourgeois nationalistes » groupés autour de Bikine, le responsable régional du Parti. Aboukov, en raison de ses origines aristocratiques, est surnommé « le prince » et Milda « la princesse » ; ils appartiennent aux « bas-fonds bourgeois, nationalistes, aux réseaux fascistes, trotsko-boukhariniens, aux foyers d’ennemis du peuple sur lesquels les responsables du Parti ont trop longtemps fermé les yeux » [cité par Adipova 1991 : 72]. Des « camarades » du comité régional ne manquent pas d’accuser les exclus. L’un accuse ainsi Milda de « liens avec des espions et de dissimuler ses activités criminelles dans les kolkhozes lettons » [ibid. : 73]. Dans ses « aveux », falsifiés par le nkvd, Milda « reconnaît » avoir mené des activités contre-révolutionnaires dès 1928 à Moscou, activités qu’elle poursuivit à Oufa à partir de 1933. Face à ces accusations mensongères, Milda balança entre la dénégation révoltée et l’incrédulité. Aussitôt après la parution de l’article dans la Pravda, elle écrit, scandalisée, à Staline. On l’a « diffamée », elle n’est pas une « princesse », elle est une « garde rouge », « décorée de l’ordre du drapeau rouge » ; tout en précisant qu’elle n’est pas seulement la femme de son mari, elle fait un long plaidoyer pour Aboukov, « combattant honnête dans les rangs du Parti », « s’étant engagé dès ses dix-neuf ans dans le parti bolchevique, ayant lutté sur le front » lors de la Guerre civile, pas plus « prince » qu‘elle n’est « princesse » ; de plus, rappelle-t-elle, Aboukov est un familier de Staline, il fréquentait son appartement en 1920 quand Staline dirigeait le Commissariat du peuple aux nationalités où Aboukov travaillait. Elle conclut en ces termes : « Je suis persuadée que vous, Joseph Vissarionovitch, vous ne laisserez pas cette lettre sans suite » [ibid. : 72]. Il n’y eut, bien sûr, ni réponse ni suite disculpant les accusés. Un témoignage [13] montre que, dans un premier temps, Milda ne put croire à la réalité du scénario qui l’entraînait vers sa destruction. Quand elle est emprisonnée, elle questionne une compagne de cellule sur les interrogatoires auxquels sont soumis les détenus. Celle-ci lui répond que, pour échapper à la torture de l’interrogatoire, les prisonniers signent de fausses déclarations. Milda est interloquée et demande à son interlocutrice si elle a elle-même été témoin de ce simulacre. « Non, répondit-elle, mais je sais que ça se passe comme ça. » Milda ne dit pas non « mais, à son sourire sceptique, je compris qu’elle ne croyait pas ce que je venais de lui dire ». Elle finit cependant par y croire quand, après soixante-douze heures d’interrogatoires, « elle signa tout ce qu’on avait exigé d’elle ». Le jugement fut rendu en juillet 1938 ; en entendant ses « aveux », Milda, d’après une source, protesta énergiquement et ne reconnut pas sa culpabilité ; rien n’y fit. Elle fut condamnée à la confiscation de ses biens et à la peine capitale, et exécutée ce même mois, tout comme son mari.

11 Sa mère, Ekaterina Ottovna Grundman, demanda en 1956, année où Khroutchev dénonça le stalinisme devant le xx e congrès du pcus, la réhabilitation de sa fille qui fut « dévouée à son parti et à son peuple ». Milda fut réhabilitée en octobre de cette année puis réintégrée en novembre dans le Parti par le comité régional de Bachkirie. Il en fut de même pour Aboukov.

Milda, une figure d’exception ?

12 Ce n’est pas sa fin tragique qui fait de Milda une figure d’exception ; elle a partagé le sort de centaines de milliers de prisonniers abattus par le stalinisme. Ce qui rend ce personnage exceptionnel, c’est sa capacité à briser les frontières et les conventions pour poursuivre et mettre en œuvre un idéal en refusant tout compromis ou toute duplicité. Quelles frontières, quelles normes Milda a-t-elle transgressées pour aller jusqu’au bout de ses convictions ?

Illustration 2 – Les principaux déplacements de Milda
de la Baltique à la Caspienne.
Réalisation Éric Pons, idemec.

13 Commençons par le plus simple et le plus visible : son extraordinaire mobilité au service de la « cause ». De la Lettonie où elle est née, de l’Ukraine où elle a enseigné, on la retrouve dans le nord du Caucase (en Ossétie, à Kislovodsk, à Piatirgosk…) où elle guerroie, à Astrakhan, dans le sud de la Russie, à Bakou en Azerbaïdjan où elle exerce des responsabilités politiques, à Lenkoran au sud de ce même Azerbaïjan, au Gilân en Iran où elle est une des chevilles ouvrières de l’éphémère République socialiste soviétique, à Ivanovo, au nord de Moscou, pour des activités de propagande, à Moscou même à plusieurs reprises, au congrès du Parti, au Commissariat du peuple aux affaires étrangères, à l’Académie militaire, etc., en Bachkirie, dans les villes et les villages. Il faudrait aussi mentionner Petrograd et d’autres villes-étapes de ce rallye militant (voir la carte), peut-être aussi d’autres pays (mais sur ce point nos sources demeurent floues). Le militantisme semble abolir les frontières géographiques. Il abolit aussi les frontières, habituellement si étanches, entre les spécialisations. Milda est successivement enseignante, militaire, responsable local, traductrice et rédactrice aux affaires étrangères, chargée de la cause des femmes, de la culture, promotrice de la littérature et du théâtre bachkir… Ce cumul d’activités diverses mais toujours au service du même idéal contribue à façonner un personnage exceptionnel, polyvalent tel que les appréciaient les bolchéviques toujours à la recherche de cadres pouvant s’investir dans plusieurs domaines. Mais c’est encore plus en brisant les frontières culturelles qu’elle se place en dehors des trajectoires communes. Rappelons-nous : elle, la Lettone, épouse en secondes noces un Kabarde, issu d’une famille musulmane de propriétaires terriens, de sept ans son cadet, que sa famille renie pour avoir transgressé les normes coutumières. Autre exemple de transgression des frontières culturelles que le militantisme efface, l’attitude de Milda et d’Aboukov à l’égard de la population du Gilân. Les deux époux semblent avoir manifesté une incompréhension profonde de la société et de la culture locales, qu’ils considéraient comme « arriérées » [Guenis, 2000 : 273]. Cette insensibilité internationaliste leur fut reprochée par le Comité central du Parti communiste russe qui mit fin à leur mission, et la nouvelle direction du Parti communiste iranien, en accord avec le congrès des peuples d’Orient, prit ses distances avec cette position dogmatique. Ce militantisme aveugle fut, au premier chef, reproché par le leader du mouvement jangali, Mirzâ Kouchek Khân. Dans une lettre à Lénine, celui-ci écrivait : « Or les propagandes bolcheviques entraînent en Iran de fâcheuses conséquences car les propagandistes ignorent les mœurs et les coutumes du peuple iranien […]. Même les habitants du Gilân qui étaient prêts à se sacrifier répugnent maintenant aux activités des propagandistes » [cité par Chaqueri, 1983 : 154-156]. Milda semble avoir été plus attentive aux spécificités locales quand elle s’est retrouvée en Bachkirie. Fut-ce par opportunisme contextuel ou par conviction ? Peut-être les deux. Il est difficile de trancher.

14 Autre rupture, celle avec la parenté. Avec Aboukov, comme précédemment avec Janis Bulle, dont elle conserve le nom de famille qui l’a fait connaître en tant que pasionaria, les liens sentimentaux semblent se confondre avec les liens idéologiques. Par rapport aux exigences du militantisme, les relations familiales apparaissent, au demeurant, secondaires. On apprend ainsi qu’en 1935, quand la machine stalinienne se met en marche pour broyer Milda, celle-ci a perdu le contact avec ses frères depuis longtemps. Dans la lettre qu’elle adresse à Staline pour tenter de sauver Aboukov, elle rappelle qu’elle n’est pas que la femme de son mari.

15 Mais c’est en transgressant les frontières de genre que le futur « général rouge » brise les conventions de la façon la plus significative et la plus ostentatoire : elle prend la tête de détachements et harangue ses frères d’armes, conspue les lâches et les pleutres ; elle guerroie dans les steppes au nord d’Astrakhan, suit une formation complète à l’Académie militaire, est décorée de l’Ordre du drapeau rouge. À chaque étape de cette « carrière » militaire, les hommes sont intrigués : seuls des cadeaux masculins sont prévus pour récompenser les héros de leurs exploits et on ne sait qu’offrir à Milda lors de ses premiers hauts-faits ; S.M. Kirov s’étonne de son ardeur au combat et, comme pour la freiner, la fixe pour un temps à Astrakhan ; l’état-major de l’Académie militaire ne dispose pas de serment au féminin et on doit en adapter un lorsque Milda y est admise, Milda qui devient donc la première « générale rouge ». Sans doute « l’intégration d’une femme dans les troupes combattantes n’était pas absolument exceptionnelle » [Audoin-Rouzeau et Werth, 2012 : 11] en Russie où « la ligne de clivage entre hommes et femmes est restée plus faible que partout ailleurs en Europe » [ibid. : 13] mais avec Milda « la rupture historique et anthropologique » est double ; non seulement, par ses faits d’armes, elle brise le tabou interdisant aux femmes de verser le sang [Testart, 2014 : 36] ; notons, en effet, qu’elle n’est pas affectée à des tâches auxiliaires ; de l’autre, elle accède aux plus hauts grades et décorations [14]. Le caractère exceptionnel de Milda semble avoir été renforcé par son langage simple et direct, par sa voix « douce mais retentissante » et par un regard impavide ne laissant transparaître aucune sensiblerie. Milda fait bien partie de ces « intrépides qui ne s’arrêtent pas à mi-chemin mais vont aussi loin que possible au risque de leur bonheur, voire de leur vie » [Todorov, 2005 : 16].

16 Figure d’exception, sans doute, pour avoir réuni tous ces traits hors de l’ordinaire, héroïne, non. Le héros symbolise une collectivité dont il incarne les valeurs au superlatif. Milda ne figure pas au panthéon des héroïnes lettones, ni même de Courlande ; le seul hommage qui lui est rendu est un petit musée au dernier étage de l’école de son village natal. Quand j’ai cherché des documents sur elle à la bibliothèque nationale de Riga, les employées, pourtant très érudites, ont écarquillé les yeux : qui est-ce ? Et qui est donc ce bizarre universitaire intéressé par cette inconnue ? Si Milda est oubliée, voire rejetée, en Lettonie, c’est sans doute en raison de son bolchévisme, de son inféodation à l’Union soviétique, une Union soviétique qui a annexé la Lettonie en 1940, puis en 1944 après trois ans de conquête par l’Allemagne nazie. Il suffit de visiter le Musée d’histoire de la Lettonie et le Musée d’occupation de la Lettonie à Riga [15], pour se convaincre que Milda n’a jamais pu et ne pourra jamais dans le contexte actuel et sans doute futur être consacrée héroïne de Lettonie. De même elle n’a pu devenir une héroïne de l’Union soviétique : ses origines lettones furent sans doute un obstacle à cette consécration dans une Union dominée pratiquement et symboliquement par la Russie. Seuls quelques témoignages épars provenant des marges de l’ « empire » (l’Ukraine, la Bachkirie…) ont conservé la mémoire de cette destinée extraordinaire.

17 Cette figure oubliée d’exception a connu la fin tragique de ceux qui s’engagent sincèrement et gratuitement au service d’une cause qui finit par engloutir ses plus fervents zélateurs. Avec leurs rappels réguliers et gênants à la pureté doctrinale, ces « croisés » deviennent des obstacles pour ceux « qui soumettent leurs actions à des fins personnelles » [Schopenhauer cité par Todorov, 2005 : 214]. On se débarrasse alors volontiers de « ces têtes qui dépassent ».

Remerciements

18 Merci à Céline Bricaire, Dmitry Tchervinski, Francis Conte, Anna Grike, Vladimir L. Guenis, Kira Kaurinkoski, Anna Laicena et au personnel de la bibliothèque nationale de Riga, Étienne Peyrat, Francis Richard qui, à des titres divers, m’ont apporté leur précieux concours. ■

Bibliographie

Références bibliographiques

  • Adipova R., 1991, « Odna soudba na dvoïkh » (Un destin pour deux) in Vozvrachtchennie imena (Les noms qui reviennent), Oufa, Bachirskoe knijnoie izdatelstvo : 60-75.
  • Audoin-Rouzeau Stéphane et Nicolas Werth, 2012 « Introduc­tion » in Yashka. Journal d’une femme combattante. Russie 1914- 1917, Paris, Armand Colin.
  • Bromberger Christian, 2013, Un autre Iran. Un ethnologue au Gilân, Paris, Armand Colin.
  • Bulle Milda, 1932, Polojenie i borba rabotnits za rubejom (La situation et la lutte des travailleuses à l’étranger), Partiinoie izdatelstvo, Moscou.
  • Bulle Milda, 1933, Jenchtchiny v revoliutsionnykh boiakh (Les femmes dans les luttes révolutionnaires), Moscou, Izdatelstvo TsK mopr sssr.
  • Chaqueri Chosroe, 1983, L’Union soviétique et les tentatives de soviets en Iran, 2, s.l., Antidote.
  • Guenis Vladimir Leonidovitch, 1999, « Les bolcheviques au Guilan », Cahiers du monde russe, 40-3 : 459-495.
  • Guenis Vladimir Leonidovitch, 2000, Krasnaia Persia, Bolcheviki v Giliane 1920-1921, (La Perse rouge. Les bolcheviks au Gilân), Moscou, mnpi.
  • Solomin N., 1988 « I komissari b pylnykh chlemakh » (Les commissaires aux casques poussiéreux), Sovetskaia Latvia (La Lettonie soviétique), 29 janvier.
  • Testart Alain, 2014, L’Amazone et la cuisinière, Paris, Gallimard.
  • Todorov Tzvetan, 2005, Les Aventuriers de l’absolu, Paris, Robert Laffont.
  • Werth Nicolas, 2009, L’Ivrogne et la marchande de fleurs. Autopsie d’un meurtre de masse 1937-1938, Paris, Taillandier.

Mots-clés éditeurs : Femme, Lettonie, Union soviétique, Iran, Bolchevique

Date de mise en ligne : 11/07/2016.

https://doi.org/10.3917/ethn.163.0395

Notes

  • [1]
    Sur ce mouvement et sur cette République, voir Bromberger (2013, chap.XII).
  • [2]
    Voir notamment Solomin [1988] et Adipova [1991]. On trouvera aussi des indications sur la participation de Milda aux événements du Gilân dans Guenis [1999 et 2000]. Cette recherche sur Milda est un travail en cours. Des missions en Lettonie et au Bachkortostan devraient permettre d’éclairer des points obscurs de cette biographie.
  • [3]
    Commissaire dans le Caucase du Nord, puis commandant de l’administration bolchevique à Astrakhan, Sergueï Mironovitch Kostrikov dit Kirov, devenu membre du Politburo (bureau politique) s’opposa à Staline et fut assassiné en 1934.
  • [4]
    Commissaire dans le Caucase du Nord, Sergo Ordjonikidzé était un révolutionnaire bolchevique géorgien qui devint président de la Commission de contrôle du Parti, membre du Politburo puis fut assassiné, victime des purges staliniennes, en 1937.
  • [5]
    Selon les mots de Piotr Chervinsky, « Bespokoïne serdtse Mildy » ( Le cœur inquiet de Milda ), mss. p. 4. Voir du même auteur « Krasnyi general » (Le général rouge), Oukraïnskaia Pravda, n.d.
  • [6]
    Anton Ivanovitch Dénikine, commandant en chef des forces armées contre-révolutionnaires du sud de la Russie, qui remportèrent d’importants succès contre les bolcheviques en 1919.
  • [7]
    C’est une des plus hautes décorations militaires qui fut instituée par décret en 1918.
  • [8]
    Il est possible que les « crises » de Milda aient été dues au typhus qu’elle avait contracté.
  • [9]
    rgaspi (Rossiyskiy Gosudarstvennyi Arkhiv sotsial’no-polititcheskoi istorii), f. 495, op. 90, d. 5, l. 11, cité par Guenis [2000 : 275 et note 14, p. 525].
  • [10]
    L. Steinbauma, « Pirma padomju generale », Padomju Karogs, 30, 7 mars 1972 (p. 3).
  • [11]
    Voici un florilège de cette prose militante : « C’est seulement en Union soviétique qu’il ne peut y avoir de crise » [Bulle, 1932 : 3]. « La grande victoire du premier plan quinquennal […] a mis fin à la paupérisation, à la pauvreté dans les campagnes » [Bulle, 1933 : 3] alors que « la provocation, la traîtrise, l’espionnage sont devenus les méthodes habituelles de la bourgeoisie dans la lutte contre le mouvement des masses révolutionnaires » [Bulle, 1932 : 4]. La situation des travailleurs dans les pays capitalistes est, selon Milda, épouvantable (d’autant plus que sévit la crise de 1929) : « Les chômeurs vivent dans des conditions barbares, dans des gourbis autoconstruits sans chauffage ni éclairage » [Bulle, 1933 : 11]. Les femmes sont encore plus victimes que les hommes de cette situation : « Le besoin et la faim dans les pays capitalistes poussent des milliers de filles de la classe ouvrière sur le chemin de la prostitution qui connaît une croissance monstrueuse » [ibid. : 13], alors que la bourgeoisie « aspire à transformer les enfants du prolétariat […] en chair à canon » [ibid. : 20].
  • [12]
    Nikolai Ivanovitch Boukharine, membre du comité central du Parti communiste – bolchevique (1917-1937), chef de l’Internationale communiste (1926-1928), directeur de l’Institut des professeurs rouges, accusé de « dérive droitière » par Staline, démis de ses fonctions au Politburo, arrêté et exécuté en 1938.
  • [13]
    www. Sakharov Center, key=23069 & page=231
  • [14]
    Contrairement à Yashka qui, nous disent les auteurs [ibid. p. 31)], « parce qu’elle est une femme ne peut accéder aux plus hautes décorations ».
  • [15]
    Rappelons que la Lettonie restera une République socialiste soviétique jusqu’en 1991.
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