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Article de revue

Sale temps sur Amherst : de l'abstraction du réel au primat du signifiant

Pages 387 à 399

1L’étymologie du mot « abstraction » ouvre des pistes interprétatives pour l’analyse d’un poème peu commenté d’Emily Dickinson, « An awful Tempest mashed the air ». Le verbe abstraire vient du latin abstrahere et, dès l’usage latin, on est passé de l’idée d’enlever en tirant, arracher à enlever d’un ensemble par la pensée, dans un usage savant et tardif. L’acception moderne considérer isolément ou d’une manière générale un objet de pensée ne s’est dégagée qu’à la fin du xvie siècle, ce qui est tardif. Quant à l’adjectif abstrait, il n’est apparu au sens moderne qu’au xviie siècle, là encore tardivement, mais cela n’exclut pas, par un effet de rémanence, que le sème de l’arrachement physique est toujours fortement présent dans l’usage actuel. Abstraction, pour sa part, vient du latin abstractio, qui signifie enlèvement, dans le sens de rapt, en particulier celui d’une femme (l’enlèvement des Sabines, par exemple), ce qui implique qu’une violence est associée à l’acte. Abstraction signifie par ailleurs aussi extraction, valeur disparue sauf en alchimie à propos de l’abstraction de la quintessence. Ainsi, ce que rappelle l’étymologie, c’est que la notion possède une double face, à la fois concrète, à l’origine, puis abstraite ; ce qu’elle rappelle, c’est également que l’acte d’abstraction suppose un constant mouvement de va-et-vient entre l’objet et le concept : sur le plan psychique, ce mouvement s’opère entre la « réalité » sensible, même reconstruite, et l’imaginaire, et sur le plan de la création poétique, entre l’extra-linguistique et le linguistique. Autrement dit, et là est l’intérêt du concept — et du processus qu’il recouvre — pour l’analyse poétique, l’abstraction suppose à la fois une présentification et un effacement de la présentification. C’est cette question que je vais aborder et commenter, et j’ai choisi, pour cela, de m’interroger sur un poème d’Emily Dickinson, à peu près totalement négligé par la critique. Celui-ci porte le numéro 198 dans l’édition des Complete Poems de Thomas H. Johnson :

2

An awful Tempest mashed the air—
The clouds were gaunt, and few—
A Black—as of Spectre’s Cloak
Hid Heaven and Earth from view.
The creatures chuckled on the Roofs—
And whistled in the air—
And shook their fists—
And gnashed their teeth—
And swung their frenzied hair.
The morning lit—the Birds arose—
The Monster’s faded eyes
Turned slowly to his native coast—
And peace—was Paradise !

3Le poème s’organise autour d’un élément thématique envahissant, le mauvais temps, la bourrasque ou la tempête, qui se déploie uniformément sur les trois strophes que compte le texte. Ce qui attire d’abord l’attention est la mise en scène visuelle d’une manifestation atmosphérique tumultueuse et spectaculaire. Qu’en est-il cependant de la poétisation de cet événement et de la conclusion du poème ? Celle-ci, dans son apparente célébration du « Paradis » retrouvé et sa satisfaction affichée, prend le contre-pied de ce qui s’écrit dans d’autres poèmes, plus sceptiques sur la question. En outre, ce texte a ceci de surprenant qu’il est dénué des caractéristiques habituelles d’abstraction propres à la plupart des poèmes de Dickinson. On le sait, ceux-ci résistent à l’interprétation : le texte dickinsonien exploite en effet toutes les possibilités de disjonction grammaticale afin de rendre compte de l’ambiguïté d’un monde dans lequel l’existence d’une signification claire — celle qui poserait l’existence d’une relation logique entre les faits — ne peut être perçue par le sujet humain (Bennett 29). Quant à l’omniprésence des tirets, caractéristique de l’écriture du poète, elle contribue à ce constat ; de nature oxymoronique, ils sont à la fois pauses et poussées en avant, et je dirai d’eux simplement qu’ils tiennent, ou maintiennent, le poème, qu’ils constituent une armature tout en étant des pauses respiratoires : s’ils structurent la trame, les tirets la trouent aussi, supposant que la voix s’étouffe, pantelante, pour reprendre souffle et, très vite, de nouveau s’éteindre. Marques d’inspiration et d’expiration, et ces deux mots sont à considérer dans leurs sens divers, ces ponctèmes lient et délient, livrent et délivrent, offrent et retirent, dans un va-et-vient ou un mouvement d’abstraction permanent. Le cadre poétique de Dickinson étant ce qu’il est, on comprend que, dans la plupart des cas, ce n’est pas la question de l’interprétation qui se pose à la lecture des poèmes, c’est-à-dire celle de savoir ce qu’ils « signifient », ou même, moins naïvement, de savoir ce qu’ils évoquent, autant d’interrogations qui restent au niveau du signifié, rassurant mais intenable dans l’économie générale de l’œuvre de Dickinson. La question est plutôt celle de comprendre ce que les mots et les signes de ponctuation font advenir, principalement au niveau du signifiant, dans les enchaînements que suscite la complexité de leurs agencements. Or, à première vue, les choses se passent ici autrement : en effet, à l’inverse du poème dickinsonien canonique, connu pour son oblitération du sens, le mot agissant la plupart du temps comme un « agent double » (Aquien 2002), « An awful tempest » se donne comme un tableau directement lisible et intelligible, bien qu’il soit structuré par un puissant réseau métaphorique. Cependant, c’est justement cette apparente lisibilité qui est le facteur paradoxal de l’abstraction du réel.

4Dans ce poème, un phénomène logiquement cohérent est donné à voir au lecteur à grand renfort d’effets spéciaux concrètement projetés, à l’aide de métaphores « graphiques » et d’orchestrations allitératives qui soulignent sensuellement ou oniriquement la puissance évocatrice de l’orage : le poème rend la turbulence imaginable et représentable, et ce jusqu’à la caricature. Le texte, de plus, suit un ordre chronologique, et donc logique, plausible : du désordre de la tempête à l’apaisement final, de l’enfer météorologique au « Paradis » retrouvé. Le poème se clôt ainsi sur un retour thématique à l’origine, qu’elle soit géographique (v. 12 « Turned slowly to his native coast— ») ou, au v. 13, fantasmatique, avec la mention du Paradis retrouvé (« And peace—was Paradise ! »). Le cheminement logique est soutenu par la structure tripartite du poème, que l’on trouve bien sûr dans d’autres poèmes mais qui, dans le contexte idéologique de la chrétienne Nouvelle-Angleterre, prend une signification particulière, et nourrie par l’ironie. La Trinité n’est plus que strophique, et ses composantes sont des masques d’Halloween : le Père — Dieu caché dans les nuages « hâves » de la première strophe (clouds en contiguïté avec gaunt, dissimulant god tapi au fond des mots) est débordé par le Fils (« Son » encagé et renversé à la lettre dans le « Monster » de la strophe 3) et par le Saint-Esprit, plus ghost que Holy Ghost, Spectre en tous cas.

5Un retour à la paix est toutefois signifié, paix humaine essentiellement, et ce retour est associé à une revanche sur l’animalité, puisque, au vers 12, le monstre ne ressortit plus à l’inhumain, comme en rend compte l’adjectif possessif « his » (« his native coast »), au lieu du neutre « its », légitimement attendu. Un autre mot contribue à humaniser le « monstre » : l’épithète « native », qui renvoie à une origine identifiable, voire à un foyer ou une famille, donc à un ordre symbolique et par conséquent humain. Le déroulement chronologique est conventionnel, pour ne pas dire stéréotypé ; il est à la fois représentable dans l’imaginaire et fréquent dans le discours commun, en particulier dans la locution populaire « après la pluie, le beau temps » (« the sun is shining again after the rain ») pour le sens littéral, ou « everything’s fine again » pour le sens figuré. Le retour au calme s’apparente ainsi à la transposition poétique d’un dicton populaire en prenant la forme de la réactivation d’un cliché. On se trouve ainsi confronté à au moins deux possibilités interprétatives, qui sont liées : soit le poème est la repoétisation sérieuse d’un truisme, soit il fonctionne sur un mode ironique, le poétique déconstruisant la banalité du propos. Il le fait en effet en mettant l’accent sur la multiplication des procédés, c’est-à-dire en s’écartant formellement de la tournure gnomique de la prétendue sagesse populaire. De plus, les procédés reconstruisent le phénomène atmosphérique en tant que texte, ce qui a pour effet connexe de ramener le lecteur à la littérature, c’est-à-dire à la fois à l’expérience concrète de la lecture et au travail opéré par la mise en mots et, par conséquent, à l’abstraction du réel.

6La première référence littéraire, présente à la lettre, avec le mot « Tempest » et, dans une certaine mesure, le mot « Monster » (voir le Caliban de The Tempest), est la pièce de Shakespeare. Une autre référence concerne l’inscription du « gothique » dans le texte. Ce phénomène n’est pas nouveau, puisque le gothique en tant que genre informe un certain nombre de poèmes de Dickinson, par exemple « How many times these low feet staggered » (poème 187), « ’Tis not that Dying hurts us so » (poème 335), « ’Twas like a Maelstrom, with a notch » (poème 414) ou « ’Twas a long Parting—but the time » (poème 625). L’évocation, de plus, se lit comme une retranscription partielle de la nuit de Walpurgis, c’est-à-dire du sabbat des sorcières tel qu’il est évoqué dans les contes populaires, et tel qu’il fut repris, sous une forme parodique, par Robert Burns dans son poème narratif « Tam O’Shanter » (1790) ou, plus sérieusement, par Goethe dans son premier Faust (1808). L’évocation démoniaque est par ailleurs comme encryptée dans le texte sur un mode anagrammatique. En effet, le mot « witch » (absent du poème) s’écartèle phonétiquement entre « whistled », « shook » et « gnashed », et cette dissémination littérale et phonique a pour pendant thématique et figuratif l’éparpillement de la chevelure méduséenne, « frenzied hair », « hair », paronyme de « air », l’air littéralement envahi par la manifestation monstrueuse. Cette hantise du poème par la littérature est enfin suggérée, dans un autre domaine, celui de l’épopée miltonienne, par le passage thématique d’un « Paradis perdu » à un « Paradis retrouvé ». On en soulignera plus tard la nature problématique, liée, d’une part, à l’appréciation très critique, par Dickinson, de la métaphysique miltonienne et, d’autre part, à son rejet de l’illusion paradisiaque.

7Les procédés ici mis en œuvre sont, pour l’essentiel, caractéristiques de toute écriture poétique, c’est-à-dire sa nature anaphorique et sa densité, avec l’accent mis sur le travail phonétique et sur le travail de l’image et de la métaphore. Ce que l’on va ici mettre en évidence, c’est que le texte multiplie ces procédés pour abstraire verbalement le phénomène initialement donné à voir (la tempête), devenu ipso facto secondaire par rapport à un autre processus. Celui-ci est ce que j’appellerai l’exhibition du poétique, dans tous ses modes de fonctionnement et dans tous ses états. Ensuite, on soulignera la mise en évidence du primat du signifiant, autre caractéristique fondamentale de l’écriture poétique. Celui-ci non seulement résonne de toute sa puissance acoustique, mais encore a pour effet de remettre radicalement en question la logique discursive du poème, celle qui mène le lecteur de la crise au « happy end ». Ce que l’on va enfin montrer, c’est que le signifiant fonctionne à la manière d’une distillerie verbale, opérant un travail d’abstraction quintessentielle, démarche précieuse permettant de mieux cerner la vérité de la parole poétique.

Grammaire et syntaxe

8Un texte est d’abord une grammaire et une syntaxe, qui m’intéressent ici en tant que procédés d’abstraction. Le premier point concerne les articles, dont la première occurrence est celle d’un indéfini, à l’amorce du premier vers. On le retrouve au vers 3, vers dont la structure est toutefois plus complexe que celle du premier. Dans ces deux vers, l’indéfini introduit et illustre la valeur de « première mention » (Cotte 32) et il contribue fortement à décrire l’impression que le poète découvre le référent en même temps que le lecteur. Cet indéfini a une propriété de singularisation, et, en tant que tel, il est lié étroitement à la qualification qui, de façon postérieure, intègre au référent la qualité (« awful ») de l’objet (Cotte 213). Le locuteur est ainsi placé au premier plan énonciatif, et cette démarche a l’avantage de focaliser le référent (« Tempest ») et de faire ressortir certaines de ses propriétés objectives ou subjectives, autrement dit de souligner le rapport direct de l’énonciateur avec l’extra-linguistique. En d’autres termes, de souligner son rapport avec le concret, celui du référent qui se voit assigner des frontières. En revanche, l’article défini, qui apparaît dès le deuxième vers, et qui reviendra avec insistance dans les strophes suivantes, souligne que le référent, dans ses diverses occurrences (« the clouds », « the creatures », « the morning », « the Birds », « the Monster ») est repoussé à l’arrière-plan, ce qui met en évidence le « circuit intérieur du texte » (Cotte 33) et son économie interne en tant qu’enchaînement de signes. Si le réseau des articles définis pointe les référents « clouds », « morning », « creatures », etc., en même temps il remonte à un énoncé initial (« Tempest ») qui justifie et informe rétrospectivement l’anaphore en soulignant que la structure textuelle a une genèse, une histoire, et que cette structure s’abstrait de son référent devenu stricto sensu pré-texte, désormais renvoyé à l’arrière-plan. En d’autres termes, l’article défini participe de l’abstraction (Cotte 41). Ce défini fonctionne de façon anaphorique, puisque les nuages, les créatures, le Monstre, etc., sont des reprises, sur un mode métonymique, de la tempête liminaire. Est ainsi créée, au sein du texte, une anaphore de construction qui dépasse et reprend, bien plus qu’un segment de texte, une relation sémantique en cours de réélaboration.

9Un autre point concerne le verbe, à la fois dans sa nature et dans son emploi. En dehors du verbe to be, que l’on trouve dans des tours définitoires soit abstrait (« And peace — was Paradise ! ») soit visant à la construction d’une métaphore (« The clouds were gaunt ») les verbes sont des verbes d’action et de mouvement, par exemple, « whistled », « shook », « gnashed », dont l’une des fonctions est de dynamiser le tableau. On verra toutefois que le réseau métaphorique qu’ils construisent produit l’effet inverse, le texte ne se trouvant renvoyé à nul autre réel que celui de son élaboration. De plus, le temps choisi par Dickinson est le prétérit, traditionnellement celui de la fiction et de l’ailleurs caractéristique de l’imaginaire, qui montre que le procès est antérieur à l’énonciation et qu’il ne coïncide pas avec sa représentation. Par conséquent, si ce temps place l’univers de la narration de l’événement sur une scène objective, il souligne que le texte construit une représentation, dont la réalité principale ainsi élaborée est purement énonciative.

10Les adjectifs possessifs (« their » dans la strophe 2, et « his » à l’avant-dernier vers) occupent une place centrale dans le poème, particulièrement active dans le travail d’abstraction opéré. Ce que la possession souligne est un rapprochement de réalités différentes (Cotte 58) et par conséquent une association de signifiés. En ce sens, dans un premier temps, elle va dans le sens d’une consolidation du réel évoqué. Elle montre aussi que le repère (dans la strophe 2 « The creatures », et dans la strophe 3 « The Monster ») devient le centre d’un noyau qui est une extension de lui-même, les « poings », les « dents » ou la « tignasse » faisant partie de lui, en l’occurrence de son « corps ». C’est là sans doute que le possessif pose problème puisque sa place centrale dans le vers, un peu à la manière du tiret, crée un double mouvement, à la fois centripète (en soulignant que les « dents », par exemple, sont une composante organique, l’adjectif possessif fonctionnant à la manière d’une copule) et centrifuge, puisqu’il désigne les parties du corps en tant qu’objets étrangement autonomes et détachés du réel ; ce processus est en outre renforcé, sur le plan de l’imaginaire, par la puissance d’évocation de l’atmosphère cauchemardesque.

11La syntaxe, pour sa part, fonctionne sur un mode paratactique qui est, comme on le sait, un refus de la subordination. La parataxe peut être asyndétique, comme dans les vers 1 et 2, ou encore dans les deux premiers vers de la dernière strophe. La parataxe peut également être syndétique, lorsque s’accumulent les éléments de coordination, plus précisément la conjonction and. Dickinson multiplie les occurrences de la conjonction qui laissent ouvert le principe énumératif, tout en dynamisant l’énoncé : nul terme n’est fixé, l’énumération, comme les risques ou les menaces évoqués sur le plan thématique, pouvant se multiplier à l’infini. En outre, la parataxe suppose un refus de la hiérarchisation ; aussi dissimule-t-elle la présence de l’observateur-locuteur pour mettre en évidence les éléments discontinus d’un réel échappant à une interprétation globale. S’ajoutent à cela l’efficacité rythmique dont elle est porteuse et surtout sa capacité à arrêter et fixer le fugace et à traduire à la fois la perception de la sensation et son abstraction, la parataxe s’affichant comme un procédé littéraire, c’est-à-dire comme un dispositif au fort pouvoir déréalisant.

Le travail poétique

12Le second point concerne la nature anaphorique ou cyclique du texte poétique, qui est ce en quoi elle s’oppose à la progression logique de la linéarité. Ce point se manifeste par la répétition, qui fonctionne à la façon d’un soulignement, lié naturellement au rythme. De plus, la répétition fait du texte un objet doué d’une logique qui lui est propre, et dont la caractéristique principale est celle de l’auto-référentialité. Le poème concentre ainsi un grand nombre d’effets de répétition qui se retrouvent à divers niveaux : celui du rythme, par la répétition de schémas syllabiques ou métriques (par exemple, v. 7 et 8) ; et celui des phonèmes (et des graphèmes), sous forme de rimes (v. 2 « few »/v. 4 « View » ; v. 11 « eyes »/v. 13 « Paradise ») et d’assonances et d’allitérations, très nombreuses. Les allitérations sont fondées sur deux types de consonnes : des occlusives comme /k/ /p/ ou /t/ et des fricatives, ou spirantes, comme /s/ qui, à l’inverse des occlusives, sont des consonnes qui peuvent se prolonger sans être dénaturées. Le système consonantique se fonde donc sur une tension, ou une opposition, entre deux catégories radicalement différentes : clôture, d’un côté, prolongement de l’autre, que j’interprète comme la transcription phonétique du va-et-vient entre la tentation de la représentation (ouverte sur le réel) et celle de l’abstraction (repliée sur le texte).

13La répétition fonctionne également au niveau lexical, avec des reprises sous forme de paronomases (v. 1 « air »/v. 9 « hair » ; v. 2 » clouds »/v. 3 « cloak » ; v. 10 « morning »/v. 11 « Monster », etc.) et avec des répétitions anaphoriques de mots ou de structures à certaines places. L’anaphore, avec la répétition de la conjonction, contribue à l’effet d’empilement ; elle a aussi le pouvoir connexe, dans la mesure où elle est, en poésie et en rhétorique, l’une des figures de répétition les plus courantes, en raison de sa nature incantatoire, de ramener le poème à sa textualité en soulignant la prééminence de la séquence énumérative. Enfin, au niveau syntaxique, la répétition est soutenue par des effets de parallélisme (strophe 2) portés par l’anaphore.

14Le troisième point concerne la densité, soutenue non seulement par le travail sur les sonorités déjà évoqué, mais aussi, au niveau des figures, par le recours à la comparaison et à la métaphore. On ne trouve dans ce poème qu’une seule comparaison, au vers 3 (« as of Spectre’s Cloak »), mise en évidence par la rupture rythmique, le vers 3, et son anapeste central bousculant la régularité iambique des vers 1 et 2. La comparaison n’est pas un trope à proprement parler, puisque, avec elle, il n’y a pas de détournement de sens. Cette figure, telle qu’elle apparaît dans ce poème, est en fait une figure intermédiaire entre comparaison et métaphore, de plus enchâssée dans une autre métaphore (« A Black… Cloak »), en ce sens où Dickinson introduit plutôt une identification modalisée par la structure « as of ». Les poéticiens (Bouverot) parlent ici d’« identification atténuée » : comparant et comparé restent autonomes et intacts, ce qui s’affirme ici étant la subjectivité énonciative. Et c’est cette vision subjective qui rapproche la figure de la métaphore. Si, dans le cas de tropes tels que la métonymie et la synecdoque, le rapport entre les signifiés 1 et 2 est d’ordre logique, il est, dans le cas de la métaphore, d’ordre analogique, ce qui signifie qu’il est une construction de l’esprit : la subjectivité de l’énonciateur, qui suppose la mise en forme d’un univers mental et d’une reconstruction du réel, est mise en jeu de façon structurante. De plus, comme la métaphore introduit une isotopie étrangère au discours et à l’expérience ordinaire, elle met au premier plan le travail du langage et l’expansion de l’imaginaire que celui-ci suppose, et, par conséquent, le textuel.

15L’analyse de la métaphore se fait sur deux axes, le premier syntaxique, le second sémantique. Dans ce poème, d’un point de vue syntaxique, les métaphores sont fondées sur une relation de substitution, ce qui est la définition la plus simple de la métaphore dite in abstentia. La métaphore se manifeste de diverses manières : elle porte en effet sur l’adjectif, dans le vers 2 (« The clouds were gaunt, and few— »), qui donne du corps à un élément insaisissable, les nuages, et qui conduit à une redéfinition, c’est-à-dire à une restructuration de la substance. Cette démarche sera plus tard celle de G. M. Hopkins dans, par exemple, « The Wreck of the Deutschland » (1re Partie, str. 13), « Spelt from Sibyl’s Leaves » ou « Harry Ploughman ». Dans ces poèmes, comme le fait observer Bernard Brugière, « [l]es éléments les plus fluides, les substances les plus ductiles, voire friables, vont perdre de leur souplesse et leur malléabilité pour être bardés de tiges, saturés de tensions » (Brugière 147). Si, chez Hopkins, l’image articule ce qui, dans la nature, est fuyant, chez Dickinson, de façon comparable, la métaphore abolit et réimagine en même temps la relation entre le concret et l’abstrait. Cela est très perceptible dans, par exemple, le vers 2, dans lequel le motif, qui s’applique de façon dénotative au comparant, est attribué au comparé par un glissement connotatif soutenu par la force de l’hyperbole, qui est l’un des fondements constitutifs d’un grand nombre de métaphores. La métaphore porte également sur le verbe, par exemple dans le vers 1, et, comme dans la seconde strophe, elle est entièrement fondée sur des tours descriptifs qui s’articulent sur des verbes d’action et de mouvement. La métaphore du premier vers n’exprime pas le comparant et n’affecte pas le comparé mais le prédicat, ce qui a pour effet de créer une tension entre l’implicite et l’explicite, ou entre le mystère et le dévoilement de l’événement évoqué.

16L’approche sémantique, en associant des sèmes en principe incompatibles, conduit à une rupture d’isotopie en imposant là encore une recatégorisation. La démarche métaphorique consiste ici essentiellement à concrétiser l’insaisissable (l’air, les nuages, le vent) en lui donnant de l’épaisseur et du muscle. La représentation de la nature implique ce qui s’apparente à une conception animiste, qui introduit dans le texte une touche, insistante, de fantastique. La représentation métamorphosante brouille les frontières ordinaires entre les catégories fondamentales et s’emploie à construire des relations inédites entre les constituants du monde, qu’ils soient sensoriellement perceptibles ou reconstruits par l’imaginaire. L’effet est d’autant plus puissant que la métaphore du monstre déchaîné est filée tout au long du poème, la récurrence des sèmes créant une isotopie dont le pouvoir est de donner une forme corporelle à ce qui s’apparente à un fantasme. La métaphore filée, par nature hyperbolique, a pour effet de construire un univers de substitution qui ressortit à la construction mentale. Un point, toutefois, atténue la portée de ce phénomène, ou du moins le nuance : la nature littéraire attestée de l’association entre l’orage et les manifestations monstrueuses (voir, par exemple, King Lear, 3.2.1-14 ; Macbeth, 3.2.60 ; The Tempest, 1.1), qui fait de la construction langagière un écho partiel de textes célèbres. Ceux-ci renvoient le lecteur, sur un mode intertextuel, à la culture littéraire, c’est-à-dire à un corpus canonique et, partant, à une autorité objectivement attestée et en principe incontestable. Cette association thématique est également présente dans le roman gothique, chez les Romantiques, et, plus tard, chez Swinburne (voir « Cyril Tourneur », sonnet publié en 1878 dans Poems and Ballads, Second Series, dont les images et le tissu allitératif font écho, de manière inattendue, au texte dickinsonien ; Aquien 2009). Par ailleurs, on peut aussi considérer la représentation de la tempête chez Dickinson comme la métaphore ironique du souffle de l’inspiration poétique (fréquemment associée au vent en poésie) ou encore comme la métaphore, également courante, d’un désordre intérieur, selon l’expression de Victor Hugo, d’« une tempête sous un crâne » (titre d’un chapitre des Misérables). On aurait alors affaire, avec la tempête monstrueuse, à un travail de métaphorisation dans lequel le comparé (le trouble moral ou psychologique) ne serait pas exprimé. Dans ces conditions, le poème se donnerait dans sa totalité comme la métaphore, elle aussi in abstentia, d’un indicible, et d’une hantise, dont on peut toutefois trouver tout au long du texte des indices qui mettent plus ou moins explicitement l’accent sur l’existence d’une douleur cachée. Je ne donnerai que quelques exemples : l’adjectif « awful » qui met d’autant plus en avant la réaction émotionnelle qu’il a un contenu sémantique flou et qu’il est à peu de chose près l’anagramme de « flaw » ; la double valeur sémantique de « Heaven », au vers 4, à la fois espace aérien et royaume divin auquel les hommes n’ont plus accès (voir le verbe « Hid » en début de vers), ce qui les laissent abîmés dans la souffrance.

17Sur un autre plan, enfin, celui des figures de construction, on relève la présence de deux hypallages, au vers 9 et au vers 11, « their frenzied hair » et « The Monster’s faded eyes », qui modalisent l’énoncé et mettent ainsi en avant la subjectivité. Les hypallages, qui se fondent structurellement sur un déplacement, jouent sur un transfert de caractérisant, celui-ci ne s’appliquant pas au terme attendu mais à un autre qui lui est contigu. Ils portent ici sur les participes adjectivés « frenzied » et « faded », mais ce sont moins la chevelure et les yeux évoqués qui subissent les transformations suggérées que les « créatures » du vers 5, ou le « monstre » du vers 11. Si l’hypallage, qui estompe les frontières de la perception ordinaire, se fonde en partie sur un déplacement métonymique, il suppose aussi une mise en avant de l’appréciation subjective et, partant, sur une intériorisation du phénomène perturbant. Avec l’hypallage, la qualité et l’impression produites sont mises en avant, faisant ainsi passer au second plan l’objet évoqué, ipso facto physiquement abstrait.

Le signifiant dans tous ses états

18Le dernier point concerne le primat du signifiant. Il y a, dans « An awful tempest », une lexie remarquable : le dernier mot de la dernière strophe, « Paradise », dont le poème se fait l’expansion. Du moins s’achemine-t-il vers lui pour le proposer en gloire, à la façon d’un apogée. La lexie « Paradise » détrône le mot « Heaven », introduit dans la première strophe, parce qu’elle permet à Dickinson de passer outre l’opposition traditionnelle entre les mots « Heaven » et « Hell » (et leurs signifiés, Ciel et Enfer) pour proposer un nouveau signifiant, « Paradise », particulièrement visible. Sur le plan du signifié, « Paradise » est bien sûr évocateur du « paradis » premier, celui de l’Éden perdu. Au plan métaphorique, il est aussi associé au bonheur terrestre, à la sérénité retrouvée qui apparaît thématiquement dans le poème. L’étymologie, toutefois, rappelle que le grec paradeisos, emprunté au persan pardez qui signifie enceinte ou enclos, désignait le parc clos où se trouvaient des bêtes sauvages et qu’il était employé seulement pour désigner les parcs des rois et des nobles perses. Cette dimension de sauvagerie animale est présente dans le poème, bien que le caractère zoologique du lieu, c’est-à-dire sa délimitation culturelle rassurante, soit entièrement écarté. Ce n’est que par extension que le mot paradeisos a désigné un jardin d’agrément. De son côté, la traduction grecque de la Bible emploie ce terme pour désigner le jardin de la Genèse, mais le Paradis d’Emily Dickinson n’est ici en rien celui de l’Ancien Testament. Ce qu’elle met en scène est en fait plutôt un état mental, en dehors de toute référence religieuse. On notera toutefois que le tiret, qui précède le mot « Paradise », rompt, du moins suspend, le tour définitoire de la dernière proposition (« And peace—was Paradise ! ») en se posant comme l’expression d’un doute sur la possibilité même de mettre en avant pareille définition.

19Toutefois, « Paradise » se lit autrement, d’autant que ce terme que, certes, l’on trouve dans d’autres poèmes comme le 1119, « Paradise is that old mansion » ou le 1145, « In thy long Paradise of Light », n’a pas la même fréquence dans le corpus dickinsonien que le mot « Heaven », tant s’en faut. Tout d’abord, un autre terme s’entend partiellement dans « Paradise », le mot parade, désignation implicite, au plan du signifié, de la sarabande monstrueuse qui précède et, au plan rhétorique, de l’une des figures dominantes du poème, l’anaphore. Ensuite, et surtout, « Paradise » creuse un espace de doute radical au sein de ce qui serait sinon l’expression d’une euphorie un peu niaise, d’autant plus irrecevable que Dickinson a toujours tenu un discours violemment critique contre ce concept et sa charge idéologique. Culturellement, le terme « Paradise » doit s’analyser, dans un premier temps, en lien avec l’épopée miltonienne, dont la poésie de Dickinson, d’une manière générale, offre une lecture fondée essentiellement sur la défiance. De façon récurrente, Dickinson réfute l’hypotexte du psalmiste (Psaumes 66 : I-2) invitant à la célébration de la gloire divine, et celui de Milton, qui en est l’émanation partielle dans sa justification des « voies de Dieu envers les hommes » (« I may assert Eternal Providence,/ And justifie the wayes of God to men », Paradise Lost I, 25-26). Sa stratégie prend la forme d’une critique de la notion même de « Paradis », ce qu’elle fait en s’appropriant paradoxalement la démarche descriptive de Milton. Celui-ci, en effet, pour rendre l’incohérence de l’Enfer, multiplie les termes abstraits (« Regions of sorrow », « The seat of desolation », Paradise Lost I, 65 et 181), comme le fait Dickinson dans son désir de définir l’essence terrifiante de ce qu’est à ses yeux le Paradis : voir, par exemple, « Departed — to the Judgment » (524), ou « It was not Death, for I stood up » (510). Dans ce dernier poème, le travail de subversion est extrême puisque la mise en mots et en images du « Ciel » qu’opère Dickinson est formellement proche de la stratégie descriptive de Milton dans son tableau de l’Enfer. De nombreux poèmes, enfin, comme « If I may have it, when it’s dead » (577), mettent en évidence cet oxymore suprême que sont les horreurs du Ciel divin, frère jumeau de l’Enfer tempêtueux de « An awful Tempest ».

20Enfin et surtout, le signifiant « Paradise » rappelle que l’homme est un être pour la mort, qu’il n’existe que dans l’approximation, le presque rien ou le pas tout à fait tout, et que les représentations concrètes s’effacent derrière le jeu des manifestations langagières. On relèvera ici deux points : le premier concerne le vers 4, « Hid Heaven and Earth from View » qui, par effet de dissémination anagrammatique, donne à lire la « disette », « dearth », dans ce que le langage désigne comme le monde dans sa totalité, soit le Ciel et la Terre, « Heaven » and « Earth ». Le « d » final de « Hid », en lien avec « Earth », affirme que le manque et l’absence minent les représentations simplistes que l’homme, pour se rassurer, peut se faire du monde. Bien évidemment, « death » se lit et s’entend aussi dans ce vers. Le second point concerne le vers 13, où apparaît le mot « Paradise ». « And peace was—Paradise ! » n’est pas l’affirmation d’un bonheur plein, mais l’enveloppe séduisante donnée à la mort toute proche : en d’autres termes, peace para-dies, la paix retrouvée est un leurre puisqu’elle meurt presque au moment même où elle semble s’imposer ; sitôt advenue, elle n’est déjà plus, et la prétendue quiétude paradisiaque se retrouve ainsi, par le jeu du travail des signifiants, en relation de contiguïté avec la mort. Le jeu sur les allitérations et les assonances est également révélateur. D’une part, l’allitération en « p » (peace/ Paradise) signifie moins la clôture autotélique que le bégaiement et le martèlement de consonnes qui n’en finissent pas de se dire. D’autre part, si la voyelle longue de « peace » est considérée par les phonéticiens comme une voyelle pure, celle-ci fait l’objet, avec le dernier mot du poème, d’une réalisation phonétique qui transforme la voyelle souche en une diphtongue fermante, le [ai] de « Paradise ». La clôture, de vocalique, devient sémantique, et si le Paradis est dans la Genèse un « jardin clos », cette clôture se fait ici carcan phonétique. En d’autres termes, le Paradis retrouvé est un leurre. Avec le mot « Paradise », tel que je le lis, Dickinson affirme ironiquement ce presque (para) à la fois biaisé et limitrophe, qui est non seulement celui de l’approximation existentielle mais aussi celui de tout discours canonique sur les constructions culturelles, parmi lesquelles le « Ciel » qui est l’une des plus sublimes et par conséquent l’une des plus critiquables.

21C’est ainsi que Dickinson abîme la chromo futile de la représentation paradisiaque dans le gouffre d’un purgatoire caractérisé par l’asymptote, le « para ». On sait par ailleurs que l’écriture, pour Dickinson, se fait à la lisière du réel, que l’on peut aussi prendre dans l’acception lacanienne de hors-monde ou d’« im-monde ». C’est ce que traduit thématiquement le choix du mot « coast » (« côte »), métaphore de l’entre-deux et, par association, du passage, ou du va-et-vient, qui s’effectue en permanence du « littéral » vers le « littoral » (Lacan), en un aller-retour constant. Ce mouvement est également à relier à ce que j’exposais au début de cette étude à propos du processus d’abstraction fondé sur une présentification qui se nie en même temps qu’elle se produit. La démarche est paradoxale puisque, en suscitant l’idée de l’objet, elle le rend plus aisément concevable et, par conséquent, plus visible pour l’arracher immédiatement au champ de visuel et le réinstaller dans le champ poétique des associations langagières. Le temps est aussi venu pour le sujet, menacé de disparition, ou de « fading », comme le suggère l’hypallage du vers 11, non pas d’advenir mais de se maintenir. Ce « fading », anglicisme dont se sert Lacan, ou cette éclipse, est ce qui fait que « le sujet ne s’appréhende, à travers son langage, qu’en l’espèce d’une représentation, d’un masque [ici signifié par le « Monster », autre nom de la « monstration »] qui l’aliène en le dissimulant à lui-même » (Dor 137). Le monstre, comme persona, peut s’évanouir, parce que le sujet poétique est en train de reprendre sa place en tant qu’instance de parole dominante. En fin de poème, il se redresse même fièrement, sous la forme d’un ponctème à forte valeur modalisante, la posture subjective étant signifiée par le point d’exclamation final, à la fois représentation abstraite du sujet et icône érigée ironiquement « en gloire », en lieu et place d’un Dieu au mieux caché, au pire inexistant. Ce que met en évidence « An awful tempest mashed the air », c’est ce retour contestataire du sujet, à la fois souffrant et puissant, c’est aussi sa capacité à abstraire, à l’aide de son alambic verbal, pour mieux donner à voir et à entendre.

Bibliographie

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