Qu’est-ce que la science ouverte (open science) ?
1Appuyée par diverses politiques publiques, la notion de science ouverte mobilise aujourd’hui de nombreuses initiatives visant à promouvoir de nouvelles pratiques, de nouveaux enjeux pour la recherche et la société en ouvrant très rarement le débat public de façon plus contradictoire sur ces conceptions, sur les visions et les représentations qui y sont associées.
2Un récent numéro de la Revue française des sciences de l’information et de la communication (Chartron & Schöpfel 2017) a rassemblé différentes contributions utiles pour ces débats. L’article d’Anne Clio et Sartita Albagi (2017) a tracé des repères généalogiques sur ce mouvement, relatant les pratiques pionnières de Jean-Claude Bradley, chimiste de l’Université de Drexel, initiant des “carnets de laboratoire publics” dans les années 1990. Bradley peut être considéré comme un initiateur d’une certaine science ouverte, il avait la conviction qu’il fallait, autant que possible, mettre toutes les recherches à la disposition du public, en temps réel, à commencer par les données brutes. Dans leur article, Clinio et Albagli parlent ainsi d’une nouvelle culture épistémique, apte à contribuer au renouvellement de la recherche scientifique.
3Pourtant, en considérant le concept de “Culture épistémique” développé par Karin Knorr-Cetina (1999), à savoir les arrangements, les mécanismes par lesquels la science devient connaissance, les travaux remarqués de cette sociologue des sciences s’attachent à démontrer la diversité de ce processus et la “désunité” des champs scientifiques. Le paradigme de l’ouverture est donc à questionner avec nuance dans le périmètre des communautés épistémiques.
4Le mouvement transversal qui intéresse ici est à comprendre dans le nouvel écosystème installé par Internet et le Web : travail coopératif facilité par des outils partagés, communication mondiale médiatisée, partage de données, partage de connaissances et outils potentiellement universels. L’accès libre (open access, OA) s’est focalisé sur la communication et la circulation des publications scientifiques, la science ouverte a élargi la problématique à la transformation de la pratique de la science et à son évaluation (ouverture des données de la recherche, fouille de données, nouvelles mesures d’évaluation de la notoriété…).
5La science ouverte concentre la convergence de différents registres de valeurs et de croyances qui semble, globalement, renforcer sa légitimité. Trois registres dominants sont retenus ici dans l’observation du mouvement : celui des valeurs éthiques de la science telles que définies par Merton (1942 [1973]), celui de la science des données assimilé à un nouveau paradigme scientifique et celui de l’innovation considéré comme porteur d’une croissance économique.
6En 1942, Merton définit l’éthos de la science par quatre normes éthiques constituant une grille d’analyse majeure en sociologie des sciences et un référentiel partagé par les chercheurs. Il considère l’universalisme, le communalisme, le désintéressement et le scepticisme organisé stipulant que tout résultat doit être soumis à examen compétent avec une remise en cause toujours ouverte. Ces valeurs éthiques sont très mobilisées pour la science ouverte notamment concernant les arguments sur la gratuité d’accès, la transparence, la reproductibilité des résultats scientifiques, l’évaluation ouverte par les pairs. Le rapport fondateur de la Royal Society (RS 2012) insiste sur les potentialités des évolutions technologiques à mieux répondre à ces enjeux éthiques comme l’imprimerie avait provoqué un bouleversement avec la naissance des premières revues au XVIIe siècle, le Journal des Sçavans en France et les Philosophical Transactions of the Royal Society en Angleterre, toutes deux en 1665.
7Le second registre concerne l’avènement des données massives (capteurs, ouvertures des données publiques, objets connectés, traces du Web…) et la maturité des infrastructures et des algorithmes statistiques de traitement de ces données (principalement les réseaux de neurones). Une science de la donnée a émergé, valorisant les méthodes quantitatives et les méthodes de découverte scientifique par des corrélations mises en évidence avec des algorithmes statistiques. Certains parlent d’un quatrième paradigme épistémologique, la science pilotée par les données (data-driven science) (Hey et al. 2009), après les paradigmes empiriques, théoriques et de simulation computationnelle. Vivrait-on une révolution scientifique au sens de Kuhn, avec de nouvelles pratiques bouleversant les points de vue des chercheurs sur leur objet et leurs méthodes, parce que permettant, par exemple, de dépasser la notion d’échantillon pour laisser place à des corrélations sur des grandes masses de données ? Les données sont les matières premières des algorithmes, ce qui explique la revendication appuyée pour leur ouverture généralisée, brique désormais fondamentale de la science ouverte dans ce paradigme algorithmique et statistique.
8Un troisième registre mobilisé par la science ouverte et très influent pour expliquer le soutien sans faille de la part des politiques européennes, concerne l’enjeu de l’innovation et son impact sur la croissance économique. Selon cette vision, le système d’innovation est au cœur de la promotion de l’open science. La production de savoir doit fertiliser de façon transversale les champs scientifiques, les entreprises et les gouvernements (modèle de la triple hélice Etzkowitz & Leydesdorff 2000). L’intrication forte entre l’université et l’entreprise que porte cette conception de la science ouverte est bien différente de celle du bien commun de Merton. Le retour de l’investissement public dans la science est ici une priorité. L’ouverture brute est alors associée, sans distinction, à de possibles transferts entre science, tissu économique et société civile pour gagner en croissance et en confiance dans la science.
9À la confrontation de ces trois régimes, une certaine confusion s’est progressivement installée. Des visions difficilement conciliables sont projetées telles que la défense d’un bien commun de la science et la recherche d’une création de valeur pour le monde socio-économique. Les prises de position des différentes instances de la Commission européenne traduisent aussi cette confusion.
“Open Science est le terme choisi par les parties prenantes lors de la consultation publique de 2014 pour décrire les transitions en cours dans la façon dont la recherche est effectuée, les chercheurs collaborent, les connaissances sont partagées et la science est organisée. Il représente une nouvelle approche du processus scientifique basée sur le travail coopératif et de nouvelles façons de diffuser les connaissances en utilisant les technologies numériques et de nouveaux outils de collaboration. En pratique, les sciences ouvertes peuvent rendre la science plus crédible (amplifier l’intégrité scientifique) ; plus vérifiable (transparente des données) ; efficace (éviter la duplication des ressources) ; et répondant aux défis sociétaux (aider à trouver des réponses à certaines des préoccupations majeures de notre temps.”
11Cette définition en phase avec l’éthique de Merton est à confronter à la nouvelle version de la recommandation relative à l’accès aux informations scientifiques et à leur conservation, du 25 avril 2018, de tonalité plutôt libérale : “La communication intitulée ‘Stratégie pour un marché unique numérique en Europe’ souligne l’importance de la diffusion des données en tant que catalyseur de croissance économique, d’innovation et de conversion au numérique dans tous les secteurs économiques, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (et les start-ups) et pour la société dans son ensemble. Elle reconnaît que les mégadonnées et le calcul à haute performance font évoluer les pratiques dans le domaine de la recherche et du partage des connaissances, participant d’une transition vers une science ouverte plus performante et réactive. Dans sa communication, la Commission annonce qu’elle encouragera l’accès aux données publiques pour stimuler l’innovation et qu’elle travaillera à la création d’un nuage pour la recherche consacré à la science ouverte dans le cadre de l’initiative européenne sur l’informatique en nuage” (Source : https://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/3/2018/FR/C-2018-2375-F1-FR-MAIN-PART-1.PDF).
12La science ouverte, comme déjà évoqué (Chartron & Schöpfel 2017) et comme développé dans le travail généalogique de S. Moore (Moore 2017), apparaît donc comme un “objet frontière” (Star & Griesemer 1989). Les acteurs y projettent des visions différentes provoquant interactions, confrontations, en renforçant au final le projet en question.
Repères sur les actions de la Commission européenne
13Ces dix dernières années, la Commission européenne a joué un rôle central pour piloter les transformations liées à l’accès libre et à la science ouverte. Elle a tracé, à chaque fois, différentes étapes de la construction anticipées et relayées par différents programmes de recherche financés en parallèle : notamment les projets Openaire, Medoanet, Recode, Foster, FutureTDM, OpenMineTeD.
14Le tableau 1 retrace, de façon chronologique, les principales recommandations et communications officielles qui ont jalonné les étapes fixées par la Commission et qui ont déclenché des initiatives parallèles (manifestations, lancement de structures, orientations politiques) dans la plupart des États membres. Des repères précis par État membre sont décrits dans le travail de Gayoso (2018) au sein du comité national de suivi de l’édition scientifique. L’évolution peut se lire par l’enchaînement de différents chantiers successifs bien identifiés : accès libre des publications, accès libre des données de la recherche, promotion de la fouille de données (TDM), proposition de nouvelles exceptions du copyright permettant le TDM, affirmation du concept plus englobant de science ouverte et enfin focalisation actuelle sur la mise en place d’un portail européen unique de la science ouverte (une infrastructure paneuropéenne), fédérant toutes les ressources ouvertes et participant à la construction de l’espace européen de la recherche et à l’efficience de la recherche financée sur fonds publics pour la société et l’économie.
Chronologie des principales recommandations et communications de la Commission européenne
Décembre 2006 European Research Council (ERC), déclaration du Conseil scientifique pour l’accès libre https://erc.europa.eu/sites/default/files/press_release/files/erc_scc_statement_2006_open_access_0.pdf 17 juillet 2012 – Recommandation de la Commission européenne “Accès et préservation de l’information scientifique”, (2012/417/EU) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=CELEX:32012H0417&rid=1 Pour définir dans chaque État une politique nationale sur le libre accès : soutien des 2 voies ; embargos : 6 mois en Sciences Techniques et Médecine (STM), 12 mois en Sciences humaines et sociales (SHS) au maximum. Calendrier : une politique doit être établie dans chaque État membre en 2014, 60% de libre accès en 2016, 100% en 2020. – Communication sur l’Espace européen de la recherche : http://ec.europa.eu/research/science-society/document_library/pdf_06/era-communication-partnership-excellence-growth_en.pdf Décembre 2013 Lancement des politiques du libre accès à l’horizon 2020. Mise en place d’un guide pour les chercheurs financés. http://ec.europa.eu/research/participants/data/ref/h2020/grants_manual/hi/oa_pilot/h2020-hi-oa-pilot-guide_en.pdf Octobre 2013 La commission publie son rapport suite à une consultation publique sur les données ouvertes de la recherche. Financement du projet FP7 RECODE et publication des recommandations https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/news/recode-project-recommendations-open-access-research-data-are-now-available Avril 2014 La commission publie son rapport d’expert sur “La fouille de textes et de données, standardisation pour l’innovation et le développement technologique” http://ec.europa.eu/research/innovation-union/pdf/TDM-report_from_the_expert_group-042014.pdf. En parallèle, financement des projets FutureTDM et OpenMineTeD (Open Mining INfrastructure for TExt and Data). Décembre 2015 La Commission propose une évolution des exceptions pour le copyright afin de faciliter le TDM http://ec.europa.eu/research/index.cfm?pg=newsalert&year=2015&na=na-091215 Février 2016 Alignement stratégique, état de progression des politiques OA (suivi de la recommandation de juillet 2012) dans les États membres par les remontées de données des points de référence nationaux pour l’information scientifique (National Points of Reference for scientific information). Mai 2016 La transition vers un système global de science ouverte. Conclusions du Conseil de l’UE (adoptées le 27 mai 2016) http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-9526-2016-INIT/fr/pdf Juin 2017 Vision de l’EOSC (European Open Science Cloud). Déclaration de Carlos Moedas, “Le nuage européen de la science ouverte (EOSC), la nouvelle République des Lettres https://ec.europa.eu/commission/commissioners/2014-2019/moedas/announcements/eosc-summit-european-open-science-cloud-new-republic-letters_en octobre 2017 Déclaration européenne de la science, nouvelles recherches et innovation http://ec.europa.eu/research/openscience/pdf/eosc_declaration.pdf#view=fit&pagemode=none 25 Avril 2018 Révision de la recommandation de 2012 “Accès et préservation de l’information scientifique”, 2012 C(2018)2375. Intégration des recommandations sur les données de la recherche, sur le concept FAIR (Findable, accessible, Interoperable, re-usable) et le TDM https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/news/recommendation-access-and-preservation-scientific-information 24 Mai 2018 Feuille de route 2018-20120 pour le développement de l’EOSC, portail fédéré d’accès aux savoirs produits par les chercheurs européens http://ec.europa.eu/research/openscience/pdf/eosc_strategic_implementation_roadmap_short.pdf#view=fit&pagemode=none |
Chronologie des principales recommandations et communications de la Commission européenne
15Si l’orientation actuelle du portail EOSC a une réelle pertinence fonctionnelle (fédération, interopérabilité, adressage unique des ressources de chaque État membre), l’identité du public cible pour ce portail interroge. Les propositions de valeurs particulières avancées sont le remède à la fragmentation actuelle des recherches européennes, un bien commun de la production scientifique inclusif (toutes les disciplines, tous les États membres), une science performante fondée sur les données, l’interdisciplinarité, l’innovation facilitée (cf. déclaration EOSC et feuille de route dans le tableau 1). Si les politiques et les décideurs peuvent y projeter des instruments de mesure adéquats à leurs besoins de pilotage, il est bien moins sûr que les chercheurs y projettent leur identité car ce portail n’est pas un portail construit sur la base d’un recensement des besoins des communautés de recherche. L’adhésion des chercheurs à des dispositifs numériques peut difficilement s’envisager sans l’implication de leur communauté. Notamment, les champs scientifiques n’ont guère de frontières, pourquoi se limiter à l’Europe, à la recherche financée ? En comparant avec un portail très plébiscité en sciences biomédicales et de la vie, comme le portail PubmedCentral (www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/), des clés de succès sont décelables : exhaustivité du recensement de la recherche biomédicale, pertinence et qualité des sources fédérées, actualisation continue avec des interactions construites avec les éditeurs, liens avec les données, enrichissements constants des fonctionnalités.
16Le portail EOSC pourra répondre à des besoins de pilotage européen et d’évaluation de l’impact de la recherche, mais il est permis d’en douter en ce qui concerne les communautés de recherche alors que la promotion du projet se fait en grande partie en évoquant les avantages pour les chercheurs “l’EOSC va permettre un accès universel aux données et un nouveau terrain de jeu pour les chercheurs européens” (EOSC Strategic Implementation Roadmap 2018-2020). Ce projet se rapproche donc d’une posture purement diffusionniste en reprenant la théorie de Rodgers (2003) qui considère que l’adoption d’une nouveauté passe essentiellement par la diffusion et le pari sur des processus mimétiques, au contraire d’approches de co-construction ou de co-design avec les publics concernés.
De la liberté d’agir à l’injonction de faire
17L’éthos d’un chercheur est majoritairement en phase avec une circulation libre du savoir, donnant de surcroît une visibilité immédiate aux travaux, une reconnaissance et des échanges qui peuvent s’en trouver grandement facilités. Les partisans sont donc nombreux (Le Crosnier et al. 2011).
18Le monde de l’“open” marque nos dernières décennies, que ce soit l’open source pour les logiciels libres, l’open gouvernement pour lequel la France est chef de file, l’open data des institutions publiques, l’open accès des publications scientifiques et des données de la recherche. Il faudra certainement rassembler les genèses de tous ces mouvements, mais un constat évident est celui du lien que tous partagent avec la société numérique en réseau. Sans l’Internet, sans le Web, un tel développement n’aurait pu s’affirmer et rendre opératoires certaines visions politiques pour nos sociétés.
19Mais, dès lors que ces mouvements deviennent des idéologies, il apparaît que des corps intermédiaires prônent les orientations et prennent les décisions, à la place même des principaux acteurs concernés. Ainsi, dans l’évolution du mouvement open access/open science, une grande différence est évidente entre la liberté d’ouvrir ses travaux des années 1990 et l’injonction politique actuelle à tout ouvrir, heurtant profondément l’autonomie de décision du chercheur. Au début des années 2000, ce sont des chercheurs qui ont initié les principales archives ouvertes disciplinaires : ArXiv, Repec, ArchiveSic… Ceux qui avaient besoin de partager des données notamment de mesure le faisaient déjà (astronomie, génomique). Les motivations profondes étaient l’échange, la mise en visibilité décidée par les chercheurs. Aujourd’hui, les orientations sont celles des mandats obligatoires, de la visibilité des financements et des institutions, de l’ouverture systématique des données sans que soit réellement posée la question de la valeur de ces données.
20Le débat dominant d’une promotion incantatoire de la science ouverte sans recul critique doit être possible, mais ce n’est pas facile tant la détermination politique semble forte et relayée par des militants mus par l’idéologie du bien commun universel de la science, associée à d’autres stratégies certainement moins avouées.
La référence à la transparence et à la démocratie
21La promotion des mouvements données ouvertes (open data), science ouverte sont associés à des enjeux de transparence et donc de démocratie : le citoyen est en droit de connaître les dépenses et recettes publiques, les données écologiques, sociales de ses environnements, les résultats de la science sur des questions sociétales qui lui sont adressées… Ces visions sont légitimes. Mais à l’extrême, est-ce que la généralisation de la transparence à l’ensemble de la société ne conduit pas immanquablement à de nouvelles formes de totalitarisme ? Autrement dit, n’y a-t-il pas à considérer, au regard de l’idéal démocratique, d’autres valeurs différentes que celles de l’ouverture et de la transparence, en particulier celles de liberté et d’indépendance ? Dès lors que l’injonction à la transparence est posée, chaque individu est exposé par ses actes, ses paroles, conduisant à la société de contrôle telle que décrite par le panoptique de Bentham et analysé par Foucault, le panoptique est une machine à surveiller et dont la finalité est de voir sans être vu. Et si la transparence ralliait la cause, sans l’avouer, d’un panoptique de la société numérique ? Ce débat doit être nourri avec une réelle réflexion philosophique et politique : “Une meilleure application du principe de publicité et donc un meilleur contrôle de la représentation, ne doit pas être confondue avec la pure et simple extension de la transparence qui, lorsqu’elle devient une fin à elle-même, tourne le dos à la démocratie, si du moins on conçoit celle-ci comme garantie du maximum de liberté en même temps que d’informations possibles aux citoyens” (Cavaillé 2014, 1).
22Le droit au secret, à la rétention, peut permettre une qualité de production, de publicité ultérieure. L’ouverture immédiate revendiquée par certains s’oppose aussi à des réalités évidentes de concurrence d’idées, d’enjeux de valorisation divers ou encore de volonté décidée d’inscrire sa pensée dans un périmètre limité, à la recherche d’une valeur épistémique considérée comme plus significative que l’ouverture générale sur des dispositifs banalisés. Il y a également un paradoxe à revendiquer une totale transparence immédiate aux chercheurs quand il apparaît que ces visions sont souvent associées à des stratégies calculées de contrôle ou de déstabilisation à des fins de promotion de nouveaux agencements.
La référence à l’innovation
23À l’échelon européen, l’enjeu de l’innovation est devenu le moteur le plus fort du mouvement libre accès/science ouverte depuis la première recommandation européenne de 2012 avec la publication concomitante des rapports très favorables de l’OCDE. C’est clairement un virage libéral qui s’est installé dès lors, avec une certaine confusion pour la branche libertaire initiale du mouvement.
24La science ouverte est inscrite au sein de la Direction générale de la Recherche et de l’innovation de la Commission et se trouve réunie avec la problématique de l’innovation ouverte dans une même sous-direction (https://ec.europa.eu/info/sites/info/files/organisation_charts/organisation-chart_dg-rtd_en.pdf). Les différences sont pourtant majeures. Il est utile de rappeler ce qu’est l’innovation ouverte telle que Chesbrough la définit en 2003 (Chesbrough 2003). Le paradigme de l’innovation ouverte postule que, dans nos sociétés contemporaines, la complexité est telle qu’il est illusoire pour une entreprise de miser sur ses propres activités de recherche et développement (R&D) pour être créatif et innovant, il s’agit désormais de collaborer avec d’autres, d’élargir son périmètre partenarial dans des processus de créativité collaborative. La convergence est forte avec le mouvement des laboratoires ouverts (OpenLab) dont les appellations varient entre FabLabs, LivingLabs, Hackerspaces, Makerspaces (Futuris 2016). Pourtant, une grande différence concerne les modalités qui lient les partenaires : dans un processus d’innovation ouverte entrepreneurial, les partenaires se choisissent et établissent généralement des règles communes de travail et notamment de sortie du processus pour partager la valeur produite ensemble, l’engagement est majoritairement cadré. Les FabLabs sont beaucoup plus dans une philosophie libertaire et créative ouverte sans finalité immédiate, mais l’appréciation du temps investi et des contreparties redevient une réalité, les échecs semblent assez nombreux. Ce que les FabLabs et la science ouverte de la Commission européenne partagent, c’est cet impensé du processus organisationnel, misant de façon plus floue sur la “créativité collective”.
25L’idée que l’ouverture suffira à créer de la valeur est sans doute illusoire. L’innovation est aussi un processus de construction sociale et non une simple question de diffusion ouverte. Appropriation, confiance, co-construction sont des facteurs clés de succès. Les grands projets défis de société financés en grande partie par la Commission ont d’ailleurs créé des espaces collaboratifs, mais avec des degrés d’accès très différents, seuls les partenaires impliqués ont certains accès à des sources de données ou certains outils de traitement, voir notamment le projet collaboratif européen sur le cerveau (www.humanbrainproject.eu).
26Ouvrir, ouvrir aux partenaires ou alors protéger ? La protection de la connaissance produite par des brevets en vue d’un transfert industriel est aussi une voie possible de toute activité de recherche notamment partenariale avec les industries, dynamique par ailleurs fortement encouragée par les financeurs publics en général. Les potentielles frictions sont décelables entre cette posture et celle de la science ouverte et les tensions auxquelles sont exposés les chercheurs impliqués dans ce type de recherche, notamment sur le partage des données (Dillaerts 2017). Des études de cas précis montrent que cet arbitrage relève sagement de la négociation entre partenaires et non d’une posture dogmatique a priori. L’ESA (European Space Agency), par exemple, qui rassemble des partenaires publics et privés, mentionne dans un récent rapport de la Commission (JRC 2017) que certaines données sont ouvertes telles que celles relevant de la mesure des radiations solaires alors que des données spécifiques liées à l’impact de ces radiations sur les satellites avec un effet commercial et militaire fort ne sont pas diffusées publiquement.
27Ce rapport, dans sa conclusion, reste donc prudent et mise à la fois sur l’analyse, cas par cas, des négociations intelligentes entre les enjeux de transfert de technologie et les enjeux de données ouvertes pour l’innovation. Par ailleurs, la comparaison et l’harmonisation avec les autres puissances économiques restent une vraie question stratégique, notamment avec les États-Unis, la Chine et le Japon.
La référence au transfert à la société
28Les arguments pour promouvoir la science ouverte relèvent aussi du transfert au tissu social. Cet argument est particulièrement défendu pour les sciences humaines et sociales pour lesquelles le transfert à l’entreprise et à l’industrie est moins fort et pour lesquelles les frontières entre sciences et société sont plus poreuses car plus accessibles, plus directement liées à la vie sociale (éducation, travail, management, comportements sociaux…). La question est donc de savoir si la science ouverte va satisfaire ce besoin d’information du public et du politique notamment. Il peut en tout cas fortement y contribuer si les livrables de la science sont compréhensibles, ce qui présuppose des textes accessibles, expurgés de jargons trop difficiles. Là encore, il y a lieu de s’interroger sur le meilleur dispositif pour atteindre cet objectif : ouvrir les textes scientifiques ou soutenir des publications de transfert, de synthèse, reformulant les résultats de la recherche de façon controversée ? Ne faut-il pas plutôt prendre modèle sur les productions de la cellule de veille et d’analyse scientifique comme celle de l’Institut français de l’éducation (http://veille-et-analyses.ens-lyon.fr/) pour les sciences de l’éducation ? À quand, également, l’accès libre de publications telles que Alternatives économiques, Sciences humaines, Manière de voir, les pages scientifiques du Monde par exemple ? Comme l’a montré Elsabry (2017) dans une revue de littérature intéressante, l’impact sur la société concerne aussi les décideurs, le secteur associatif, les praticiens, les groupes de patients, les chercheurs indépendants. Il s’agirait donc d’apprécier auprès de ces publics leurs réels besoins quant aux types de livrables attendus, le libre accès aux textes est-il utile ou trop difficile ? Une médiation éditoriale spécifique est-elle attendue ?
Transformations majeures et priorité du pilotage
Éléments significatifs de la transformation
29La Commission européenne a fixé l’horizon du 100% accès libre en 2020 pour les publications issues de recherches financées sur fonds publics dont il s’agit encore de préciser le périmètre. Mais un des derniers rapports publiés sur l’état des lieux (PRC 2017) évoque un taux de croissance annuel de 10 à 15% de l’OA alors qu’il devrait atteindre 25% pour satisfaire un tel objectif. La question de la transformation des modèles économiques est donc première.
30Les modèles adoptés varient principalement entre le dépôt dans des archives ouvertes (voie verte) avec des négociations sur les périodes d’embargo, le modèle auteur-payeur (appelé APC, article processing charge) ou d’autres modèles de paiement en amont par des tiers publics (notamment des infrastructures de publications financées). Depuis la conférence de Berlin 12 (en décembre 2015 à l’Institut Max Planck), il faut aussi noter une accélération des négociations globales avec les gros éditeurs pour le droit de lire et de publier sans barrière à l’échelle d’une université ou d’un pays (Schimmer, Geschuhn & Vogler 2015).
31Mais la transformation n’est pas achevée et rencontre de multiples obstacles : inadéquation des modèles de financement amont pour de nombreux champs scientifiques, peu de politiques compensatoires pour réduire les embargos des revues pour la voie verte, contraintes des budgets disponibles au niveau national, adhésion partielle des chercheurs aux injonctions de dépôts.
32La pression se resserre notamment à cause des agendas politiques fixés dans certaines zones comme l’Europe. Ne pas être en libre accès risque aussi progressivement de devenir pénalisant pour la visibilité des publications dès lors qu’une masse significative sera adressée sans barrière et plus facilement lue. Le dilemme est entier en particulier pour les revues de sciences humaines et sociales (Anheim 2015), nombreuses, souvent fragiles et ne pouvant compter sur des modèles auteur-payeur. La perte des abonnements conduit inévitablement à une fragilisation financière que ne pourrait combler qu’un financement public. Le scénario possible est celui de la disparition ou de la perte d’indépendance, l’horizon perçu est assez sombre pour de nombreux rédacteurs en chef (Gonin, Jochems & Parazelli 2016). Des scénarios collectifs sont aussi en cours de réflexion, tel le projet pilote que teste la plateforme Cairn.info avec le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) en France (www.openaccess-shs.info/) afin de réduire les périodes d’embargo à un an, pour répondre à l’accès libre et préserver les recettes nécessaires pour le fonctionnement des revues. Un corollaire à cette pression est le malaise perçu sur l’innovation éditoriale de demain, notamment pour les sciences humaines. Quel acteur, autre qu’un acteur public, aura le projet d’innover, de lancer un nouveau projet d’animation d’un champ scientifique dans une conjoncture aussi contrainte sur les modèles économiques ? Ne risque-t-on pas certaines formes d’appauvrissement ou des projets peu durables car sans modèle économique pérenne ?
33Concernant l’appréciation de cette transformation par les acteurs, il faut souligner l’émergence d’éditeurs avec un modèle nativement en libre accès comme PlosOne, constat significatif dans de nombreux champs des sciences de la nature où le modèle auteur-payeur se développe. Par ailleurs, dans certains pays comme la France et le Brésil, l’investissement public a été majeur, renforçant des infrastructures publiques comme Open Edition et Scielo, respectivement.
34Quant à la revue, le recul montre qu’elle est restée majoritairement la structure d’organisation de validation et de circulation des savoirs scientifiques, avec quelques innovations significatives à relever : les mégarevues répondant notamment à l’inflation des publications et à des enjeux interdisciplinaires, les usages développés des réseaux sociaux scientifiques (ResearchGate, Academia.edu). De nouvelles métriques mesurant la notoriété sociétale des articles sont apparues, mais n’ont pas fondamentalement détrôné les métriques fondées sur la citation des articles pour les scientifiques, les indicateurs de notoriété des revues sont restés des valeurs de référence pour le moment.
35Enfin, la mutualisation des données de la recherche reste un chantier très inégal selon les champs scientifiques. Certains n’ont pas attendu la pression européenne pour partager des données de mesure (astrophysique, génétique). Des recensements plus systématiques ont eu lieu (par exemple Cat-Opidor en France, https://cat.opidor.fr) et des nouvelles organisations émergent ayant pour mission de gérer et de valoriser des données (Bequali, Progedo, Nakala/Isidore, en France). Il reste à voir le sens que ces réservoirs auront pour les chercheurs, la confiance et la qualité qu’ils accorderont à ces jeux de données et à leur réutilisation.
L’enjeu du pilotage global, les risques d’asymétrie
36Le projet de transformation du système de communication entre chercheurs ne pourra aboutir sans un pilotage global qui, au-delà des enjeux prescrits, tienne compte des freins, des réalités en contexte, des acteurs et de leurs revendications. L’objectif final de l’espace européen ouvert de la recherche ne pourra aboutir que si tous les États membres progressent simultanément. Pour l’accès libre aux publications, le paysage est déjà contrasté entre des pays fortement engagés dans le modèle du libre accès doré (Royaume-Uni, Pays-Bas, Suède, Hongrie, Roumanie, Bulgarie), ceux engagés dans la voie verte (Belgique, Grèce, Portugal, Espagne, Norvège, Danemark…) et ceux poursuivant les deux voies (Allemagne, France, Italie…). Les indicateurs sont importants car ils doivent permettre d’objectiver les évolutions et les discussions, au-delà des postures souvent partiales des interlocuteurs en place.
37Le Royaume-Uni, très favorable à l’accès libre pour l’innovation, est assez exemplaire en terme de gouvernance d’indicateurs pour son pays, des rapports réguliers sont publiés depuis 2015 et conduits par des acteurs extérieurs au cercle des acteurs concernés (RIN 2015 et 2017). Des tableaux de bord ont été mis en place aux États-Unis par le dispositif en ligne Chorus et, plus récemment, l’Europe a également mis à disposition ce type de suivi interactif. Le tableau 1 en est un exemple, il fournit la progression de l’OA dans les différents pays européens, l’exhaustivité des données reste une question ouverte. Quant à la France, c’est essentiellement Couperin qui livre des données pour les archives ouvertes ainsi que, plus récemment et de façon encore partielle, pour la voie dorée <www.couperin.org/images/stories/AO/Depouillement_enquete_AO2017.pdf> <www.couperin.org/breves/1339-couperin-org-fournit-les-premieres-donnees-apc-pour-la-France>. Il est attendu que le nouveau comité de la science ouverte (Coso) puisse développer une gouvernance chiffrée et transparente de la science ouverte.
Progression de l’accès libre dans les États membres, pourcentage de publications en libre accès pour la voie verte (archivage dans des répertoires) et pour la voie dorée (paiement en amont des frais de publications)
Progression de l’accès libre dans les États membres, pourcentage de publications en libre accès pour la voie verte (archivage dans des répertoires) et pour la voie dorée (paiement en amont des frais de publications)
38L’harmonisation à l’échelle mondiale est compliquée car chaque pays n’a pas la même priorité ni le même soutien financier pour la science ouverte. Cette complexité a déjà été pointée pour les politiques nationales d’accès libre lors de l’analyse de la loi numérique (Chartron 2016). Ce qui risque de conduire à une géopolitique de la science ouverte assez complexe, certains pays ouvrant largement leur production alors que d’autres bénéficieront de ces accès sans pour autant “libérer” leur production nationale. Les paradoxes de ce partage émergent sérieusement comme, par exemple :
- Acheter des ressources étrangères et simultanément offrir au monde sa production nationale en supportant seul les coûts de la transition de la production locale,
- Affaiblir certains secteurs éditoriaux nationaux du fait des pressions exercées alors que ces pressions n’existent pas dans d’autres pays,
- Libérer les articles des auteurs uniquement rattachés à des pays engagés dans des politiques de compensation (off-settings) <http://esac-initiative.org/offsetting>.
39Ces asymétries sont des freins majeurs, les équations à trouver ne sont pas simples. Certains éditeurs s’engagent vers des accès libres régionaux, est-ce la voie à suivre ? Le dispositif SCOAP3 en physique des particules est l’idéal à atteindre car il opère sur une mutualisation mondiale de la communauté scientifique grâce à la médiation du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) :
Mais très peu de communautés peuvent s’appuyer sur une telle structuration et sur un nombre aussi réduit de revues centrales (11 revues sont ici concernées).“Contrairement aux autres modèles Open Access où les bibliothèques, les auteurs ou les agences paient des frais pour chaque article, les éditeurs participants au SCOAP3 ont un seul contrat avec le CERN qui centralise les frais de traitement des articles pour les services de publication fournis. Les éditeurs à leur tour éliminent ou réduisent les coûts d’abonnement à tous les clients. Les partenaires SCOAP3 redirigent les fonds précédemment utilisés pour payer les abonnements dans un pool commun qui est ensuite utilisé pour les paiements des APC de façon centrale. Cela garantit des opérations efficaces et permet de fixer de manière compétitive un tarif d’APC tout en utilisant principalement des fonds déjà disponibles dans le système de publication”.
Pour conclure : l’autodétermination des communautés
40À plusieurs reprises dans ce texte ont été soulignés des processus descendants pour penser une science qui profiterait pleinement des opportunités du numérique en réseau afin de repenser ses dispositifs de débats et de communication. Ces prescriptions ont la fâcheuse tendance à vouloir aligner des visions et des principes généraux à l’ensemble des champs de recherche. Il est encore temps que les communautés scientifiques fassent connaître leur voix sur la science ouverte et installent des processus de co-construction avec les politiques et les corps intermédiaires. Parmi les chantiers à débattre rapidement, nous semble-t-il :
- Les 8 piliers formulés par le Commissaire C. Moedas pour le développement de la science ouverte et structurant aujourd’hui la feuille de route des États membres (Integrated advice of the Open Science Policy Platform recommandations, 29/05/2018, <https://ec.europa.eu/research/openscience/pdf/integrated_advice_opspp_recommendations.pdf#view=fit&pagemode=none>) : récompenses et incitations à la science ouverte, indicateurs et nouvelles métriques, futur de la communication scientifique, le nuage (cloud) de la science ouverte européenne ; le respect des principes FAIR (<www.go-fair.org/fair-principles/>) pour les données, l’intégrité scientifique, les compétences et formation à développer, les sciences citoyennes. Il s’agit de prendre position en tant que communauté de recherche sur ces priorités, sur leur applicabilité et les éventuelles lacunes.
- L’intérêt du libre accès immédiat aux articles à l’horizon 2020 avec l’avis des rédacteurs en chef des revues qui font le champ scientifique. Des prises de position coordonnées sont nécessaires pour être entendues.
- L’enjeu réel des données de la recherche : quelles données retenir, comment les qualifier et caractériser leur potentiel de réutilisation, l’intérêt des fouilles de données. Par exemple, aujourd’hui, le service Isidore mentionne 182 jeux de données d’enquêtes pour les sciences en éducation dont 61 venant de sources américaines, principalement des départements des ministères américains (via le service Inter-university Consortium for Political and Social Research (ICPSR)) alors que les 92 jeux de données actuels du MESRI n’y sont pas ou du moins sont introuvables à cet échelon.
41À l’heure où la pensée créatrice (design thinking) traverse de nombreux champs d’activités dans l’ensemble des organisations, la science ouverte devrait aussi être prioritairement réfléchie par la Commission en étroite relation avec les communautés de chercheurs (introduire la notion de science ouverte “by design”) car la science ouverte doit rester avant tout une dynamique de chercheurs pour leur créativité.
Bibliographie
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