Notes
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[1]
Dr L. O. Darkschewitsch (Moscou) et Dr Sigmund Freud, privatdocent (Vienne), « Über die Beziehung des Strickkörpers zum Hinterstrang und Hinterstrangskern nebst Bemerkungen über zwei Felder der Oblongata », Neurologische Centralblatt, Berlin, 5 mars 1886, n° 6, p. 121-129 [De la relation du corps restiforme avec les cordons postérieurs et leurs noyaux, et de quelques observations sur deux régions du bulbe].
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[2]
Jones renvoie ici à deux lettres d’octobre 1884 adressées à Martha (E. Jones, La vie et l’œuvre de Sigmund Freud, Les années de jeunesse 1856-1900, tome I, Paris, Puf, 2006, p. 229).
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[3]
S. Freud (1885), « Ein Fall von Muskelatrophie mit ausgebreiteten Sensibilitätsstörungen » [Un cas d’atrophie musculaire avec troubles diffus de la sensibilité], Wiener Medizinische Wochenschrift, 35, n° 13, p. 389-392 ; n° 14, p. 425-429.
Freud fera partie des auteurs cités par Charcot pour leur apport au développement des connaissances de cette affection. Cf. Leçons du Mardi à la Salpêtrière. Policlinique 1888-1889, Éditions Lecrosnier, 1889, p. 488. -
[4]
Lettre à Martha Bernays du 4 novembre 1885, dans Correspondance 1873-1939, Paris, NRF Gallimard, 1979, p. 190.
-
[5]
Cf. également la lettre à Martha Bernays du 28 janvier 1884, dans Correspondance 1873-1939, op. cit. : « Un Russe qui travaille au laboratoire (de Meynert) va traduire ma méthode. »
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[6]
Freud fait référence ici à l’une de ses publications écrites en 1884 et qu’il traduisit lui-même pour la revue Brain. Il s’agit d’une méthode de coloration cellulaire à l’or : « Eine neue Methode zum Studium des Faserverlaufes im Zentralnervensystem », Arch. Anat. Physiol., Anat. Abt., Leipzig, mai 1884, p. 453-460 [« A new histological method for the study of nerve-tracts in the brain and spinal cord (Résumé du précédent. Nouvelle méthode histologique pour l’étude des trajets nerveux dans le cerveau et la moelle épinière) », Brain, Londres, 7 avril 1884, p. 86-89 (trad. angl. par Freud lui-même)] et reprise la même année : S. Freud (1884), « Eine neue Methode zum Studium des Faserverlaufes im Zentralnervensystems » [Une nouvelle méthode pour l’étude du parcours des fibres dans le système nerveux central], Archiv für Anatomie und Entwickelungsgeschichte, p. 453-460.
Cf. également à ce sujet Christfried Tögel, « … UND GEDENKEDIE WISSENSCHAFT AUSZUBEUTEN » Sigmund Freuds Weg zur Psychoanalyse, Ed. Diskord, 1994, p. 45. Selon cet auteur, c’est Fleischl qui organisa la publication par la revue Brain de la version anglaise et Darkschewitsch qui en fut le traducteur russe. À Leipzig, on goûta peu cette nouvelle proposition de coloration tissulaire qui reprenait celle proposée dès 1876 par Flechsig lui-même et revendiquée comme sienne dans son livre Die Leitungsbahnen im Gehirn und Rückenmark des Menschen (Leipzig, Engelmann) (n° 1, p. 268 et p. 294). Freud introduisait pourtant longuement son article princeps sur les travaux de Flechsig, qui cependant disparaissent dans la traduction anglaise au seul profit des techniques de coloration d’Exner et de Weigert. La méthode de Freud est mentionnée par Jules Dejerine dans son traité d’anatomie de 1895 parmi les six méthodes de coloration des fibres à myéline qu’il répertorie, pour reconnaître cependant que cette coloration au chlorure d’or ne donne de bons résultats que pour les pièces fraîchement recueillies. Jules Dejerine et Augusta Dejerine-Klumpke, Anatomie des centres nerveux, tome I, Paris, Rueff & Cie, 1895, p. 45-46. -
[7]
S. Freud, « Ueber den Ursprung des N. Acusticus », article publié en deux parties dans la revue du Pr Josef Gruber, directeur de la Clinique universitaire d’otologie à Vienne : Monatsschrift für Ohrenheilkunde Kehlkopf-, Nasen-, Rachen-Krankheiten, Berlin, n° 8, juillet 1886, p. 245-251 ; n° 9, septembre 1886, p. 277-282 (traduction personnelle inédite).
-
[8]
A. Volney Waller, « Nouvelle méthode anatomique pour l’investigation du système nerveux », Comptes rendus de l’académie des sciences, 1852. « Expériences sur les sections des nerfs », Gazette médicale, 1856. (Cf. la loi de Waller A. Van Gehuchten, L’année psychologique, année 1903, volume 10, n° 10, p. 228-235.)
-
[9]
Dans sa Selbstdarstellung il évoque ainsi sa relation à Meynert, dont l’œuvre et la personnalité le fascinaient à l’époque : « Un jour, Meynert, qui m’avait ouvert son laboratoire même à l’époque où je ne travaillais pas dans son service, me convia à me consacrer définitivement à l’anatomie cérébrale ; il me promettait de me céder sa chaire, car il se sentait trop vieux pour manier les méthodes nouvelles. Je refusais effrayé par l’ampleur de la tâche. Il se peut par ailleurs que j’eusse alors déjà deviné que cet homme génial n’était pas du tout disposé favorablement à mon égard. » Sigmund Freud présenté par lui-même, Paris, NRF, 1984, traduction Fernand Cambon, p. 19-20.
-
[10]
Giacomo Ricchetti, 1833-1890, est un médecin vénitien, ami de Charcot, qui séjourna chez lui à Turin en 1886.
Cf. M. Bonduelle, T. Gelfand et C.G. Goetz, Charcot, un grand médecin dans le siècle, Paris, Michalon, 1996, p. 308.
Cf. A. Hirschmüller, « Giacomo und Louise Ricchetti. Marginalien zu den Brautbriefen », Jahrbuch der Psychoanalyse Beiheft, n° 25, 2013.
Cf. également la lettre à Martha du 27 janvier 1886, p. 210-211 : « Les Ricchetti sont partis hier soir ; je les ai accompagnés à la gare et, en leur disant au revoir, j’ai oublié tous les multiples petits griefs que j’avais contre lui, ne voulant me rappeler que la sympathie profonde qu’il m’a témoignée et les deux choses que je lui dois directement : la traduction et l’invitation chez Charcot. » -
[11]
À comparer avec le titre définitif.
-
[12]
Lettre à Martha du 12 décembre 1885, dans Correspondance 1873-1939, op. cit., p. 202.
-
[13]
S. Freud, « Kritische Einleitung in der Nervenpathologie » (1885-1887), première édition et commentaire de Katja Guenther in Luzifer-Amor, Zeitschrift zur Geschichte der Psychoanalyse, n° 45, 2012, p. 7-82
-
[14]
Cette fonction de coauteur chez Freud mérite d’être soulignée, ainsi, outre Darkschewitsch, on peut citer dans l’ordre d’apparition Oskar Rie pour les paralysies infantiles, Josef Breuer pour l’hystérie, Otto Rank pour plusieurs éditions de la Traumdeutung et William C. Bullitt pour la biographie du président Wilson.
-
[15]
L. O. Darkschewitsch et J. J. Dejerine (1885), « Sur l’existence d’altérations dans certaines paralysies des muscles de l’œil chez les tabétiques », Compte rendu de la Société de Biologie, n° 5.
-
[16]
Le noyau de Darkschewitsch est l’un des noyaux de la commissure postérieure où convergent les fibres du faisceau longitudinal médial qui relie l’appareil vestibulaire aux muscles oculaires et cervicaux et au système extrapyramidal. Les pathologies affectant cette partie du bulbe peuvent induire des troubles des mouvements de la verticalité oculaire.
-
[17]
L. O. Darkschewitsch (1904-1917), Course of Nervous Diseases, 3 volumes, Kazan, Br. Bashmakovy.
-
[18]
E. Flatau (sous la direction de), Handbuch der Pathologischen Anatomie des Nervensystems, Berlin, Karger, p. 1218-1227.
-
[19]
Ces informations biographiques sont issues de deux articles référencés en bibliographie.
-
[20]
J. Chemouni, « Lénine, la sexualité et la psychanalyse », Psychologie clinique, n° 26, hiver 2008, Le pulsionnel et le politique. L’article s’appuie sur ce point sur les travaux de Martin Miller (1998), Freud and the Bolsheviks. Psychoanalysis in Imperial Russia and the Soviet Union, Yale, p. 86, et de A. Etkind, Histoire de la psychanalyse en Russie, Paris, Puf, 1998, p. 147-148.
-
[21]
Outre l’article déjà mentionné sur le nerf auditif, et en préambule, Freud a publié l’année précédente une brève note « Zur Kenntniss der Olivenzwischenschicht » [Une contribution à la connaissance de la couche interolivaire] dans la revue Neurologisches Centralblatt, 1885, n° 12, p. 268-270. Cette contribution est citée par Freud en note de bas de page dans l’article présenté ici.
-
[22]
Archives de neurologie, Revue des maladies nerveuses et mentales, publiées sous la direction de J.-M. Charcot, vol. VII, n° 19, janvier 1884, p. 124.
-
[23]
G. Wiest et R. Baloh, « Sigmund Freud and the VIIIth cranial nerve », Otology & Neurotology, 23, 2002, p. 228-232 [Sigmund Freud et le VIIIe nerf crânien].
-
[24]
« Die Selbststeuerung der Athmung durch den Nervus vagus », Sitzungsberichte der Akademie der Wissenschaften Wien, math.-naturw. Kl. 58/2 (1868), S. 909-937 [L’autocontrôle de la respiration par le nerf vague]. Ewald Hering avait exposé peu avant et devant le même auditoire, l’Académie des sciences de Vienne, des conclusions analogues sur le contrôle vague du reflexe inhibiteur de l’expansion pulmonaire. Le mérite de la découverte leur fut attribué à tous deux, le nom du reflexe en témoigne.
-
[25]
A. Thomas, Le cervelet. Étude anatomique, clinique et physiologique, Steinheil Éditeur, 1897 (travail du laboratoire du Dr Dejerine, hospice de la Salpêtrière)
-
[26]
Sigmund Freud présenté par lui-même, traduction de Fernand Cambon, Paris, NRF, 1984, p. 19.
-
[27]
L. Edinger, « Einiges vom Verlauf der Gefühlsbahnen im centralen Nervensysteme », Deutsche Medizinische Wochenschrift, 20, 1890. Les références aux travaux de Freud se trouvent respectivement aux pages 422 et 423 de la revue. (https://www.thieme-connect.de/ejournals/pdf/dmw/doi/10.1055/s-0029-1207205.pdf)
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[28]
S. Freud (1878), « Über Spinalganglion und Rückenmark des Petromyzon », Sitzungsberichte der Mathematisch-Naturwissenschaftliche Classe der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften, Dritte Abtheilung, 78, n° 7, juillet, p. 81-167.)
1 L’article que Freud signe du 23 janvier 1886 à Paris avec le neurologue russe Darkschewitsch n’est pas prémédité. Il est affaire de circonstance et d’opportunité. À son arrivée pour ce stage de quelques mois à la Salpêtrière de Charcot, Freud ne dispose pour tout viatique que d’une lettre de recommandation de l’excentrique Benedikt, ami du maître des lieux de longue date. Ernst Jones [2] accorde davantage d’importance à la présence de Liweri Ossipowitsch Darkschewitsch, neurologue russe qui poursuit et termine ici à Paris un périple de quatre années dans les meilleurs sites de la neurologie européenne. L’université de Moscou, où il fit ses études médicales, lui offre cette longue formation avant qu’il y prenne ses fonctions avec l’appui de son mentor le docteur A. Y. Kozhevnikov. Il rejoindra ensuite l’université de Kazan pour succéder à Bechterew, qui assura de 1885 à 1893 la direction du service de neurologie de l’hôpital impérial de Kazan. Bechterew, avant lui, avait fait le même périple. Darkschewitsch a en effet remis à Charcot le tiré à part de l’article de son condisciple viennois sur la syringomyélie [3], il s’est fait entremetteur pour celui qui le célèbre comme son Freund in cerebro et leurs retrouvailles à Paris sont chaleureuses. Voici comment Freud présente Darkschewitsch à sa fiancée Martha Bernays le 4 novembre 1885 [4], peu après son installation à Paris :
« Laisse-moi te raconter les premiers temps de notre connaissance : quand je suis entré au laboratoire de Meynert pour y faire des recherches sur le procédé par l’or, y travaillaient un Américain, M. Barney Sachs, homme particulièrement aimable et intelligent (j’ai appris depuis qu’il était juif), et mon Russe, Darkschewitsch, qui a tout d’abord attiré mon attention par cet air de mélancolie propre aux Ruthènes et aux Petits Russiens, mais je n’ai fait plus ample connaissance avec lui qu’après la découverte de mon procédé. Sachs traduisit mon article en anglais pour Brain ou, plus exactement, il corrigea ma traduction et D… m’offrit de le traduire pour un journal russe, ce qu’il fit d’ailleurs [5]. Peu à peu, il s’ouvrit à moi et je découvris en lui un fanatisme secret et profond. Ennemi de tous les plaisirs, la patrie, la religion et l’anatomie du cerveau occupaient entièrement son âme. Il avait pour idéal d’écrire en russe le premier livre sur l’anatomie du cerveau. Mécontent de Meynert, il se rendit alors à Leipzig chez son concurrent Flechsig d’où il m’écrivit une fois, mais je ne reçus jamais de réponse à la lettre que je lui adressai. Depuis mars 1884, époque à laquelle il quitta Vienne, j’ai lu quelques beaux articles de lui où il exposait ses découvertes sur l’anatomie cérébrale. Le voilà donc maintenant ici chez Charcot où il passe sa dernière année à l’étranger. Son gouvernement lui a promis une chaire de professeur à son retour… Dans un article dont il m’a fait cadeau, il dit que ma méthode [6] lui a, de beaucoup, fourni les meilleures données pour ses recherches, et ses dessins ont aussi été exécutés d’après mes coupes. Il m’a raconté que mon procédé avait fait sensation à Leipzig, ce qui m’a grandement réjoui. Il m’a décrit Flechsig comme un homme insignifiant et incapable de tirer parti de la grande découverte qu’il avait faite. »
3 Dans le laboratoire de Meynert où ils se sont rencontrés, et mutuellement appréciés, les deux neurologues travaillent sur des principes identiques et des localisations anatomiques voisines. Freud a développé, dans sa présentation des travaux sur le nerf auditif, les différentes méthodes qui prévalaient dans la recherche neuro-anatomique à cette époque. On peut reprendre ici son propos lorsqu’il introduit son lectorat aux différentes méthodes en cours et explicite les raisons de l’intérêt de poursuivre dans la voie de l’observation directe sous certaines conditions :
« L’observation directe du parcours du nerf ne cède le pas à aucune autre méthode, lorsqu’elle est entreprise en suivant l’exemple de Flechsig, c’est-à-dire non pas à partir de l’objet constitué mais alors qu’il poursuit son développement et c’est cette méthode que j’ai finalement utilisée pour les recherches sur l’origine du nerf auditif.
La valeur de la méthode de Flechsig repose sur des principes qui ne peuvent pas être développés ici mais que je me contenterai de citer et qui sont les suivants :
1) Les fibres nerveuses du système nerveux central ne s’enveloppent pas de leur gaine protectrice toutes ensemble, mais dans un ordre déterminé par les lois naturelles.
2) Les fibres qui ont établi entre elles des relations trophiques et fonctionnelles pendant leur parcours montrent aussi une concordance quant à la formation de leur gaine protectrice.
3) À l’intérieur d’un même territoire fibreux, les voies les plus proches de la périphérie se myélinisent les premières, tandis que leurs prolongements centraux et les voies reliant entre elles les formations de substance grise ne seront myélinisés que tardivement.
Enfin, 4) j’ai fait l’hypothèse qu’une voie nerveuse en cours de myélinisation voit le développement de sa gaine protectrice simultanément ou presque simultanément sur toute la longueur de la fibre, de sorte que la disparition d’une voie nerveuse myélinisée de l’image devra être interprétée comme une rupture de sa fibre issue de la substance grise [7]. »
5 Cette méthode chez Flechsig s’appuie sur l’analyse comparative du développement de l’appareil nerveux central et périphérique du fœtus humain à différents stades de son évolution. L’étude est donc longitudinale et séquentielle et cette double qualification en fait bien sûr toute la puissance et l’originalité. L’ensemble du travail de Freud de neuro-anatomie descriptive pour ces trois articles ne repose, lui, que sur l’analyse d’une série de coupes effectuées sur un seul fœtus. La série de coupes qu’il transporte avec lui à Paris et qu’il compare avec celles de Darkschewitsch est celle-là même qui a déjà servi pour l’écriture des deux articles précédents, le premier sur la couche interolivaire (publié dès 1885) et le deuxième sur l’origine du nerf auditif (déjà écrit mais qui ne paraîtra qu’en juillet 1886 pour des raisons éditoriales). Cette réduction à la dimension séquentielle de la méthode grève cependant d’autant les résultats obtenus. La dimension ontogénique de la méthode de Flechsig se trouve de fait réduite à la portion congrue.
6 Cette méthode novatrice s’inscrit en complément, voire en opposition, de celle qui repose sur le dogme de la dégénérescence wallérienne [8] dans sa version pathologique et surtout traumatique. Freud écrivait des tenants de cette méthode qu’ils
« se prévalent d’une réalité de la physiologie des centres nerveux, à savoir que l’intégrité d’une partie dépend du soutien nutritionnel d’une autre partie, et interprètent cette relation physiologique à partir de la continuité anatomique. Il s’agit de provoquer à un endroit un désordre nutritionnel (lorsqu’il n’a pas déjà lieu du fait d’une maladie spontanée) et de rechercher ensuite, à l’aide de la technique mentionnée, où se situent les atrophies et les dégénérescences qui en résultent. Ces méthodes qui reposent sur une relation trophique supposent à chaque fois une préparation mutilante de l’objet (spontanée ou expérimentale) ; ce que l’on recherche ce n’est plus le parcours des fibres nerveuses existantes, mais davantage la distribution des fibres nerveuses détruites ou modifiées pathologiquement ».
8 La dégénérescence n’est pas évoquée ici avec la précision qu’on lui connaissait cependant depuis son énoncé devenu canonique dès 1856 ; il s’agit des effets des méthodes mutilantes par section ou écrasement qui prévalent à l’époque permettant de reconstituer le parcours des fibres nerveuses repéré par les éléments histologiques du stress subi. À l’époque de Waller, au milieu du XIXe siècle, les phénomènes survenant sur la partie périphérique d’un nerf sectionné étaient considérés comme un véritable phénomène de dégénérescence entraînant inévitablement la destruction complète de toutes les fibres nerveuses. Ces phénomènes de dégénérescence consistaient essentiellement en une fragmentation de la gaine de myéline entraînant celle du cylindraxe, ne laissant au terme du processus subsister que des gaines de Schwann vides.
9 Les progrès effectués grâce aux arguments tirés de l’observation usant de cette méthode ont été rapides et constants, cependant Freud opte pour la méthode de Flechsig combinant observation directe et développement, respectant l’ordre naturel sans intervention surajoutée. Son intérêt précoce pour les principes de coloration tissulaire – on vient de l’évoquer à propos de l’utilisation des sels d’or permettant de distinguer les fibres non encore myélinisées de celles qui sont en voie de l’être – et l’influence de Meynert [9], dans le laboratoire duquel il s’exerce à la recherche en neuro-anatomie, en dépit des divergences qui apparaîtront plus tard, doivent avoir joué un rôle prépondérant dans l’orientation de ce choix. Il en est de même pour Darkschewitsch usant des mêmes protocoles sur des matériaux identiques. Voici comment Freud relate les circonstances qui donnèrent lieu à la rédaction de l’article :
« Je suis assis auprès du lit de mon ami russe qui est malade. Je peste contre Ricchetti [10] qui continue, comme par le passé, à le piller et je lui narre une jolie histoire que j’ai découverte à Vienne et que je n’ai pas publiée, craignant qu’il y eût encore quelque chose derrière. Sur ce, il me montre dans ses notes exactement la même chose et me dit qu’il en a communiqué le résultat à un collègue et concurrent qui va l’exploiter dans un article. Non, cher ami, lui dis-je, nous allons le publier ensemble et, qui plus est, tout de suite. J’ai là quelques coupes ; vous en avez une quantité, nous allons les étudier ensemble, ensuite vous en ferez un dessin, je rédigerai le texte, et nous le ferons paraître. Entendu. Le premier jour, nous avons passé cinq heures et demie ensemble à étudier les coupes à la lumière du jour, puis de la lampe, cherchant et doutant sans cesse jusqu’à ce qu’il se laisse tomber sur son lit et que je m’en aille avec un tel bourdonnement dans le crâne que, le soir, je ne pus trouver le sommeil et qu’il m’a fallu me promener sur les boulevards de dix heures à minuit pour m’aérer un peu. L’affaire me paraissait encore douteuse, quand le lendemain je fis quelques remarques heureuses qui m’enthousiasmèrent et tout s’éclaircit. Aujourd’hui nous avons résolu entièrement la question. Cela marche très bien, je réfléchis à mon texte, il médite sur ses dessins et, dans trois semaines, tu pourras annexer à ta collection de traités scientifiques, qui se trouvent dans le vieux portefeuille, une nouvelle petite œuvre des Dr. F… et Darkschewitsch, intitulée “Étude sur le noyau du cordon postérieur et sur les parties du corps restiforme [11] (eh !) ou quelque chose de ce genre. C’est une belle histoire qui me remplit de joie. Bien entendu, j’ai dû pendant les trois jours interrompre ma traduction et mes études. »
11 L’interruption, ici évoquée, concerne bien sûr la traduction des leçons qui lui sont régulièrement remises par Charcot lui-même, et l’écriture qu’il décidait alors d’engager et qui ne paraîtra jamais d’une Introduction à la neuropathologie. Les deux sont évoqués dans le même mouvement dans la lettre du 12 décembre [12] :
« Charcot m’a fait savoir qu’il consentait volontiers à ce que je traduise en allemand son tome III et non seulement la première partie qui a déjà paru en français mais encore la seconde qui n’a pas encore été imprimée… Voilà encore une très bonne chose, se félicite Freud, qui me fera connaître des médecins et malades, à Vienne et en Allemagne, et qui vaut la peine d’y consacrer quelques semaines et de dépenser quelques centaines de florins ; elle me rapportera aussi quelques centaines de florins. C’est vraiment de bon augure pour l’exercice de ma profession et, en outre, cela ouvrira les voies à mon propre livre quand il sera prêt à être publié. »
13 La publication concerne la revue qui accueille régulièrement, et à peu de distance de leur tenue, les conférences de Charcot. La fierté dont Freud témoigne tient donc à cette préséance qui lui est accordée et qu’il va s’employer à conserver jusqu’à la publication de l’édition allemande dès juillet 1886, anticipant de quelques mois le recueil des leçons originales.
14 La rédaction de l’Introduction à la neuropathologie [13] s’étale sur deux ans avant d’être abandonnée, faute d’un intérêt suffisant pour l’écriture et sans doute pour le bénéfice escompté. La première partie est écrite à Paris en quelques jours, toujours dans cette effervescence qui caractérise bien cette époque de sa vie fortement stimulée par l’usage de la cocaïne.
15 Dans le corps de l’article, Freud s’explique sur cette double signature, l’un, lui-même, rédigeant, l’autre illustrant le propos :
« Nous sommes parvenus aujourd’hui sur la base de recherches menées indépendamment l’un de l’autre à confirmer l’hypothèse du système fibrillaire de Flechsig et ce faisant à reconstituer le lien entre le cordon postérieur et le cervelet sur lequel Meynert a insisté si souvent. Après avoir constaté la parfaite concordance de nos découvertes, nous avons décidé de les relater dans une communication commune. »
17 Darkschewitsch, qui inaugure la fonction de coauteur [14] dans l’œuvre de Freud, est donc un jeune praticien de 26 ans, de deux ans le cadet de Freud, lorsqu’ils se rencontrent pour la première fois dans le laboratoire de Meynert. Il en est au début de son tour d’Europe de la neurologie auquel le soumet son mentor le Dr A. Y. Kozhevnikov, responsable du service de neurologie à Moscou, l’un des trois grands noms de la neurologie russe avec Bechterew et Korsakov, avant que Darkschewitsch n’impose le sien comme quatrième. Ce tour d’Europe de quatre années le conduira de Vienne à Leipzig, de Berlin à Strasbourg et donc de Meynert à Flechsig, de Westphal à Golz, avant de se conclure à la Salpêtrière de Charcot où il réside deux ans et où Freud le rejoint donc pour quelques mois. Au cours de cette période de formation, il publie onze articles dans des revues allemandes et françaises, parmi lesquels un article sur les manifestations et les perturbations musculaires dans le tabès dorsal, en collaboration avec J. Dejerine [15], et cet autre article cosigné donc avec Freud.
18 De retour à Moscou en 1887, il soutient sa thèse portant sur « La conduction de la stimulation lumineuse de la rétine au noyau oculomoteur » sous la direction du Dr A. Y. Kozhevnikov. En 1889, il identifie le noyau de la commissure postérieure qui porta longtemps son nom avant de devenir, dans la nomenclature moderne, le noyau commissural du faisceau longitudinal médial [16]. À la suite de quoi, Darkschewitsch devient professeur associé à l’université de Moscou et un membre éminent de l’école de neurologie de Moscou fondée par Kozhevnikov. En 1892, il est nommé directeur du département de neurologie de Kazan, sur la double recommandation de Kozhevnikov et de Bechterew, qui dirigea lui-même le département de psychiatrie à l’université impériale de Kazan de 1885 à 1893. Son élection à ce poste marque la véritable fondation de l’école de neurologie de Kazan. Durant sa présence à Kazan, il développe le laboratoire et la clinique neurologique à l’université. Après quelques années, il y ajoutera une consultation ambulatoire et un laboratoire disposant d’un matériel moderne en microscopes, instruments de radiologie et d’électrothérapie, ainsi que des salles d’opération et un musée. Le modèle charcotien développé à la Salpêtrière n’est pas loin.
19 Cette période est riche en recherche anatomique et clinique puisqu’on lui doit la distribution de la projection des fibres de la racine postérieure sur la colonne de Clarke, la distribution des fibres ascendantes des noyaux de Goll et Burdach en tant qu’éléments des corps restiformes, la dégénérescence secondaire des fibres nerveuses et la dégénérescence de la colonne postérieure consécutive à une lésion de la queue de cheval ou d’autres racines postérieures comme dans le tabès dorsal. En 1892, il décrit le premier cas russe de migraine ophtalmique « en tant que neuropathie chronique », révélant son origine vasculaire. Il met en évidence les atrophies musculaires arthropathiques, la composante autonome dans les troubles du système nerveux périphérique des atrophies dans la syringomyélie.
20 Son parcours ultérieur est dominé par l’enseignement et de 1904 à 1917 il rédige les trois volumes du premier traité de neuropathologie en langue russe [17], dont la partie consacrée à la myologie sera reprise et traduite dans le traité fameux à l’époque d’Edward Flatau [18]. Il termine sa carrière académique en prenant la tête du département de neuropathologie de la faculté de Moscou, assumant la direction de l’institut de neurologie de Moscou. Il sera à ce titre l’un des consultants appelés au chevet de Lénine affecté d’une pathologie vasculaire [19].
21 La rencontre avec Freud n’est pas sans suite, semble-t-il, pour Darkschewitsch, alors même que les deux hommes se perdent de vue après ce séjour parisien, ou, pour le dire autrement, il n’y a pas trace jusqu’à présent d’une correspondance au-delà de ce moment. Dans un article récent, Jacquy Chemouni [20] a pu écrire : « Rien d’étonnant alors de constater que l’ami russe, dont plusieurs élèves appartenaient au cercle psychanalytique de Kazan, recommande dans son Cours des maladies nerveuses (1914-1917) l’utilisation de la méthode psychanalytique de Freud à l’égard de certains cas d’hystérie. Son attitude à l’égard de la psychanalyse se modifiera après la révolution. Il manifesta ouvertement un refus d’une approche freudienne des névroses. »
22 Les enjeux de l’article ici traduit sont à la fois personnels et scientifiques. La hâte de Freud à se saisir de cette opportunité tient à son souhait de signer de Paris pour une revue berlinoise ; de marquer ainsi son passage par la capitale de la neurologie d’un écrit qui fera date au moins pour la collection de ses traités scientifiques. Il vient compléter les informations délivrées par les deux précédents, l’un déjà publié et l’autre en instance de l’être, écrits depuis Vienne sur cette zone particulière du bulbe rachidien d’où émerge la VIIIe paire des nerfs crâniens [21] et il prend de nouveau position sur la méthode descriptive ontogénétique pour s’inscrire dans la lignée Flechsig-Meynert, en opposition aux tenants des méthodes expérimentales fondées sur la dégénérescence induite.
23 Au-delà de la description anatomique des relations entre le corps restiforme et les cordons postérieurs de la moelle et de leurs noyaux qui forme la partie principale de l’article et qui, sans faire injure à leurs auteurs, n’apporte guère à la connaissance de cette région au regard des nombreux travaux qui précèdent le leur, il faut s’arrêter sur un point singulier que le titre révèle. « Et de quelques observations sur deux régions du bulbe » complète le titre. Cet ajout au titre principal qui annonce les deux derniers paragraphes de l’article occupe une fonction polémique dans la querelle qui anime les colonnes des revues de neurologie autour de la participation des cellules du noyau de Deiters à la constitution de la racine ascendante du nerf acoustique. Pour l’heure, dans le discord qui oppose nommément von Monakow et Roller, Freud et Darkschewitsch prennent position en faveur du dernier et ce avec d’autant plus de vigueur pour Freud que ses propres travaux se trouvent dénoncer par ceux de Monakow au même titre que ceux de Roller.
24 Voici le compte-rendu, publié dans les Archives de neurologie de janvier 1884 [22], de l’article décisif de von Monakow :
« Contribution à l’étude du noyau externe de l’acoustique et du corps restiforme par Von Monakow. (Neurol. Centralbl. 1882.)
M. de Monakow sectionne chez un lapin, le jour de sa naissance, la moitié gauche de la moelle épinière, immédiatement au-dessous de l’entrecroisement des pyramides. Six mois plus tard les altérations rencontrées montrent : 1° que le noyau externe de l’acoustique (noyau de Deiters) dépend des fibres de la moelle et qu’il n’affecte aucune espèce de rapports avec les racines de l’acoustique, ni avec le segment interne du pédoncule cérébelleux ; 2° que le cordon cunéiforme passe en partie dans le corps restiforme ; 3° que le cordon latéral dans le cervelet se termine dans le vermis. P. K. »
26 L’inventeur de la racine ascendante de l’acoustique, Roller, se trouve ici contredit radicalement dans sa description par les travaux fondés sur les méthodes de dégénérescence expérimentale telles qu’en use von Monakow et n’entend pas en rester là ; il réfute l’argumentation de von Monakow en publiant l’année suivante, en 1883, dans le 14e volume des Archiv für Psychiatrie und Nervenkrankheiten, « In Sachen der aufsteigenden Acusticuswurzel » (« La racine ascendante du nerf auditif en question ») là où dans cette même revue von Monakow vient de publier une confirmation de ses travaux sous le titre « Experimentellen Beitrag zur Kenntniss des Corpus restiforme » (« Contribution expérimentale à la connaissance du corps restiforme »). Dans ce débat animé, Freud prend donc parti et pour la troisième fois réitère son adhésion au dogme rollérien faisant du noyau de Deiters le troisième noyau de l’acoustique.
« Face aux différents partis formulant une opposition à l’existence même de cette racine acoustique là, particulièrement à partir des résultats de la dégénérescence expérimentale, nous avons à nouveau étudié cette question, et nous devons soutenir encore avec une grande fermeté tout comme Roller l’a fait à ce sujet que les fibres si régulièrement groupées que contient et qui prennent naissance dans le noyau de Deiters, par un simple recourbement se transforment en nerf auditif et lui donnent par le même effet une racine ascendante, comme en ont les deux autres nerfs crâniens. »
28 L’avenir des recherches contredira sèchement Roller et donc Freud et Darkschewitsch pour accorder à Monakow le bénéfice de la controverse [23].
29 Envisager l’influence de Flechsig et de Meynert dans l’élaboration du texte va de soi, les auteurs y font eux-mêmes explicitement référence. Envisager celle de Josef Breuer relève davantage de la spéculation, mais ne manque pas d’arguments. Inutile de revenir sur la place qu’occupe à cette époque du parcours intellectuel et dans la vie affective de Freud son aîné devenu son mentor et son principal soutien académique et matériel. Plus stimulant l’intérêt convergent chez les deux chercheurs pour la neurophysiologie, l’un et l’autre ayant bénéficié de l’enseignement de la pratique qu’offrait à ses élèves le grand Brücke, dans son Institut de physiologie pauvrement doté mais formidablement attractif au sein de l’hôpital général de Vienne et de l’Europe de la physiologie. Dès l’année 1868, Breuer illustrait ses compétences dans le domaine par un article retentissant démontrant la fonction du nerf vague sur le réflexe d’inflation caractérisé par l’inhibition de l’inspiration après expansion pulmonaire et déclenchement de l’expiration. Ce reflexe dit de Hering-Breuer [24], du nom de ses deux inventeurs simultanés, valut à Breuer une célébrité précoce dans le domaine de la recherche, dont il ne se contenta pas. On lui doit des recherches approfondies et constantes sur l’appareil labyrinthique et le sens de l’équilibre dès 1873 et l’on recense de cette date à 1907 pas moins de douze publications originales et recension d’articles publiées par l’auteur.
30 On constate ici que la physiologie anticipait les recherches neuro-anatomiques puisque la double fonction du nerf auditif, et désormais nerf cochléo-vestibulaire, restait dissimulée au cartographe du système nerveux de l’époque. Ainsi, le relais de l’audition par le nerf cochléaire et celui de l’équilibre par le nerf vestibulaire, qui appariés forment le nerf auditif, n’était pas encore posé de façon catégorique. Faut-il voir dans le centrage des recherches anatomiques de Freud sur cette zone d’émergence de la huitième paire crânienne une conséquence des recherches sur l’équilibre et l’orientation chez l’homme et chez l’animal entreprises et poursuivies par Breuer ? Si rien en l’état de nos connaissances ne vient l’étayer de façon décisive, la convergence des intérêts est troublante mais peut n’être aussi qu’une illusion d’après-coup.
31 Ce dernier article écrit par Freud dans le domaine de la neuro-anatomie eut quelque retentissement. On le trouve en référence pour les voies afférentes dans l’étude que le laboratoire de Déjerine consacra au cervelet sous la plume d’André Thomas [25], dont nous reproduisons ici les deux fragments, le premier concernant les fibres du cordons postérieurs, la seconde celles du contingent olivaire :
« Darkschewitsch et Freud admettent l’existence de fibres arciformes externes postérieures, servant de voie de passage des cordons postérieurs vers le corps restiforme, mais celui-ci reçoit un renfort beaucoup plus considérable des fibres nées des noyaux des cordons postérieurs et surtout du noyau de Burdach (principalement dans sa partie supéro-externe, noyau du corps restiforme de quelques auteurs) » (p. 60) ;
« Darkschewitsch et Freud se basant sur l’étude de la myélinisation du corps restiforme (et pour cela ils ont examiné deux séries de coupes appartenant l’une à un fœtus de six mois, l’autre à un fœtus d’un âge plus avancé, mais pas exactement connu) ont distingué dans sa formation deux portions : une centrale, une périphérique. Sur les coupes du bulbe d’un fœtus âgé de six mois, seule la partie centrale est myélinisée, ils lui distinguent encore deux segments : l’une antérieure ou tête (Kopf des primären Strickörpers) l’autre postérieure ou queue (Schweif des primären Strickörpers).
« Il y aurait, d’après ces auteurs, un rapport direct entre le noyau du cordon de Burdach, d’une part, les fibres arciformes et la tête du corps restiforme d’autre part : la queue du corps restiforme se continue avec le faisceau latéral de la moelle. Enfin on s’aperçoit que dans les premiers plans du corps restiforme il existe des fibres qui viennent de l’entrecroisement pyramidal supérieur et – à ce niveau on voit encore les fibres à myéline des cordons postérieurs – par la couche interolivaire et les fibres arciformes internes se perdent à la périphérie de la coupe et sur le faisceau latéral (Untere Bogenfasersystem des Hinterstrangkernes) ; c’est une jonction du cordon postérieur avec le restiforme du côté opposé. La portion périphérique du corps restiforme qui ne se myélinise que beaucoup plus tard représente le contingent olivaire » (p. 81).
33 Bien des années plus tard, lors de la rédaction de son autobiographie en 1925, Freud pourra rappeler que ces travaux en neurologie et neuro-anatomie eurent un certain écho : « Des petits travaux sur le trajet des fibres et les origines des noyaux dans le bulbe rachidien (Oblongata) ont vu le jour pendant ces années d’hôpital et ont d’ailleurs été relevés par Edinger [26]. » On trouve de fait dans un article de Ludwig Edinger [27], fondateur de la neurologie comparée, une double citation des travaux de Freud pour ses travaux précoces sur l’architecture médullaire de la lamproie [28] et à propos des voies de transmission entre les noyaux des cordons postérieurs et le cervelet pour cet article coécrit avec Darkschewitsch.
Notes
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[1]
Dr L. O. Darkschewitsch (Moscou) et Dr Sigmund Freud, privatdocent (Vienne), « Über die Beziehung des Strickkörpers zum Hinterstrang und Hinterstrangskern nebst Bemerkungen über zwei Felder der Oblongata », Neurologische Centralblatt, Berlin, 5 mars 1886, n° 6, p. 121-129 [De la relation du corps restiforme avec les cordons postérieurs et leurs noyaux, et de quelques observations sur deux régions du bulbe].
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[2]
Jones renvoie ici à deux lettres d’octobre 1884 adressées à Martha (E. Jones, La vie et l’œuvre de Sigmund Freud, Les années de jeunesse 1856-1900, tome I, Paris, Puf, 2006, p. 229).
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[3]
S. Freud (1885), « Ein Fall von Muskelatrophie mit ausgebreiteten Sensibilitätsstörungen » [Un cas d’atrophie musculaire avec troubles diffus de la sensibilité], Wiener Medizinische Wochenschrift, 35, n° 13, p. 389-392 ; n° 14, p. 425-429.
Freud fera partie des auteurs cités par Charcot pour leur apport au développement des connaissances de cette affection. Cf. Leçons du Mardi à la Salpêtrière. Policlinique 1888-1889, Éditions Lecrosnier, 1889, p. 488. -
[4]
Lettre à Martha Bernays du 4 novembre 1885, dans Correspondance 1873-1939, Paris, NRF Gallimard, 1979, p. 190.
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[5]
Cf. également la lettre à Martha Bernays du 28 janvier 1884, dans Correspondance 1873-1939, op. cit. : « Un Russe qui travaille au laboratoire (de Meynert) va traduire ma méthode. »
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[6]
Freud fait référence ici à l’une de ses publications écrites en 1884 et qu’il traduisit lui-même pour la revue Brain. Il s’agit d’une méthode de coloration cellulaire à l’or : « Eine neue Methode zum Studium des Faserverlaufes im Zentralnervensystem », Arch. Anat. Physiol., Anat. Abt., Leipzig, mai 1884, p. 453-460 [« A new histological method for the study of nerve-tracts in the brain and spinal cord (Résumé du précédent. Nouvelle méthode histologique pour l’étude des trajets nerveux dans le cerveau et la moelle épinière) », Brain, Londres, 7 avril 1884, p. 86-89 (trad. angl. par Freud lui-même)] et reprise la même année : S. Freud (1884), « Eine neue Methode zum Studium des Faserverlaufes im Zentralnervensystems » [Une nouvelle méthode pour l’étude du parcours des fibres dans le système nerveux central], Archiv für Anatomie und Entwickelungsgeschichte, p. 453-460.
Cf. également à ce sujet Christfried Tögel, « … UND GEDENKEDIE WISSENSCHAFT AUSZUBEUTEN » Sigmund Freuds Weg zur Psychoanalyse, Ed. Diskord, 1994, p. 45. Selon cet auteur, c’est Fleischl qui organisa la publication par la revue Brain de la version anglaise et Darkschewitsch qui en fut le traducteur russe. À Leipzig, on goûta peu cette nouvelle proposition de coloration tissulaire qui reprenait celle proposée dès 1876 par Flechsig lui-même et revendiquée comme sienne dans son livre Die Leitungsbahnen im Gehirn und Rückenmark des Menschen (Leipzig, Engelmann) (n° 1, p. 268 et p. 294). Freud introduisait pourtant longuement son article princeps sur les travaux de Flechsig, qui cependant disparaissent dans la traduction anglaise au seul profit des techniques de coloration d’Exner et de Weigert. La méthode de Freud est mentionnée par Jules Dejerine dans son traité d’anatomie de 1895 parmi les six méthodes de coloration des fibres à myéline qu’il répertorie, pour reconnaître cependant que cette coloration au chlorure d’or ne donne de bons résultats que pour les pièces fraîchement recueillies. Jules Dejerine et Augusta Dejerine-Klumpke, Anatomie des centres nerveux, tome I, Paris, Rueff & Cie, 1895, p. 45-46. -
[7]
S. Freud, « Ueber den Ursprung des N. Acusticus », article publié en deux parties dans la revue du Pr Josef Gruber, directeur de la Clinique universitaire d’otologie à Vienne : Monatsschrift für Ohrenheilkunde Kehlkopf-, Nasen-, Rachen-Krankheiten, Berlin, n° 8, juillet 1886, p. 245-251 ; n° 9, septembre 1886, p. 277-282 (traduction personnelle inédite).
-
[8]
A. Volney Waller, « Nouvelle méthode anatomique pour l’investigation du système nerveux », Comptes rendus de l’académie des sciences, 1852. « Expériences sur les sections des nerfs », Gazette médicale, 1856. (Cf. la loi de Waller A. Van Gehuchten, L’année psychologique, année 1903, volume 10, n° 10, p. 228-235.)
-
[9]
Dans sa Selbstdarstellung il évoque ainsi sa relation à Meynert, dont l’œuvre et la personnalité le fascinaient à l’époque : « Un jour, Meynert, qui m’avait ouvert son laboratoire même à l’époque où je ne travaillais pas dans son service, me convia à me consacrer définitivement à l’anatomie cérébrale ; il me promettait de me céder sa chaire, car il se sentait trop vieux pour manier les méthodes nouvelles. Je refusais effrayé par l’ampleur de la tâche. Il se peut par ailleurs que j’eusse alors déjà deviné que cet homme génial n’était pas du tout disposé favorablement à mon égard. » Sigmund Freud présenté par lui-même, Paris, NRF, 1984, traduction Fernand Cambon, p. 19-20.
-
[10]
Giacomo Ricchetti, 1833-1890, est un médecin vénitien, ami de Charcot, qui séjourna chez lui à Turin en 1886.
Cf. M. Bonduelle, T. Gelfand et C.G. Goetz, Charcot, un grand médecin dans le siècle, Paris, Michalon, 1996, p. 308.
Cf. A. Hirschmüller, « Giacomo und Louise Ricchetti. Marginalien zu den Brautbriefen », Jahrbuch der Psychoanalyse Beiheft, n° 25, 2013.
Cf. également la lettre à Martha du 27 janvier 1886, p. 210-211 : « Les Ricchetti sont partis hier soir ; je les ai accompagnés à la gare et, en leur disant au revoir, j’ai oublié tous les multiples petits griefs que j’avais contre lui, ne voulant me rappeler que la sympathie profonde qu’il m’a témoignée et les deux choses que je lui dois directement : la traduction et l’invitation chez Charcot. » -
[11]
À comparer avec le titre définitif.
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[12]
Lettre à Martha du 12 décembre 1885, dans Correspondance 1873-1939, op. cit., p. 202.
-
[13]
S. Freud, « Kritische Einleitung in der Nervenpathologie » (1885-1887), première édition et commentaire de Katja Guenther in Luzifer-Amor, Zeitschrift zur Geschichte der Psychoanalyse, n° 45, 2012, p. 7-82
-
[14]
Cette fonction de coauteur chez Freud mérite d’être soulignée, ainsi, outre Darkschewitsch, on peut citer dans l’ordre d’apparition Oskar Rie pour les paralysies infantiles, Josef Breuer pour l’hystérie, Otto Rank pour plusieurs éditions de la Traumdeutung et William C. Bullitt pour la biographie du président Wilson.
-
[15]
L. O. Darkschewitsch et J. J. Dejerine (1885), « Sur l’existence d’altérations dans certaines paralysies des muscles de l’œil chez les tabétiques », Compte rendu de la Société de Biologie, n° 5.
-
[16]
Le noyau de Darkschewitsch est l’un des noyaux de la commissure postérieure où convergent les fibres du faisceau longitudinal médial qui relie l’appareil vestibulaire aux muscles oculaires et cervicaux et au système extrapyramidal. Les pathologies affectant cette partie du bulbe peuvent induire des troubles des mouvements de la verticalité oculaire.
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[17]
L. O. Darkschewitsch (1904-1917), Course of Nervous Diseases, 3 volumes, Kazan, Br. Bashmakovy.
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[18]
E. Flatau (sous la direction de), Handbuch der Pathologischen Anatomie des Nervensystems, Berlin, Karger, p. 1218-1227.
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[19]
Ces informations biographiques sont issues de deux articles référencés en bibliographie.
-
[20]
J. Chemouni, « Lénine, la sexualité et la psychanalyse », Psychologie clinique, n° 26, hiver 2008, Le pulsionnel et le politique. L’article s’appuie sur ce point sur les travaux de Martin Miller (1998), Freud and the Bolsheviks. Psychoanalysis in Imperial Russia and the Soviet Union, Yale, p. 86, et de A. Etkind, Histoire de la psychanalyse en Russie, Paris, Puf, 1998, p. 147-148.
-
[21]
Outre l’article déjà mentionné sur le nerf auditif, et en préambule, Freud a publié l’année précédente une brève note « Zur Kenntniss der Olivenzwischenschicht » [Une contribution à la connaissance de la couche interolivaire] dans la revue Neurologisches Centralblatt, 1885, n° 12, p. 268-270. Cette contribution est citée par Freud en note de bas de page dans l’article présenté ici.
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[22]
Archives de neurologie, Revue des maladies nerveuses et mentales, publiées sous la direction de J.-M. Charcot, vol. VII, n° 19, janvier 1884, p. 124.
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[23]
G. Wiest et R. Baloh, « Sigmund Freud and the VIIIth cranial nerve », Otology & Neurotology, 23, 2002, p. 228-232 [Sigmund Freud et le VIIIe nerf crânien].
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[24]
« Die Selbststeuerung der Athmung durch den Nervus vagus », Sitzungsberichte der Akademie der Wissenschaften Wien, math.-naturw. Kl. 58/2 (1868), S. 909-937 [L’autocontrôle de la respiration par le nerf vague]. Ewald Hering avait exposé peu avant et devant le même auditoire, l’Académie des sciences de Vienne, des conclusions analogues sur le contrôle vague du reflexe inhibiteur de l’expansion pulmonaire. Le mérite de la découverte leur fut attribué à tous deux, le nom du reflexe en témoigne.
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[25]
A. Thomas, Le cervelet. Étude anatomique, clinique et physiologique, Steinheil Éditeur, 1897 (travail du laboratoire du Dr Dejerine, hospice de la Salpêtrière)
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[26]
Sigmund Freud présenté par lui-même, traduction de Fernand Cambon, Paris, NRF, 1984, p. 19.
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[27]
L. Edinger, « Einiges vom Verlauf der Gefühlsbahnen im centralen Nervensysteme », Deutsche Medizinische Wochenschrift, 20, 1890. Les références aux travaux de Freud se trouvent respectivement aux pages 422 et 423 de la revue. (https://www.thieme-connect.de/ejournals/pdf/dmw/doi/10.1055/s-0029-1207205.pdf)
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[28]
S. Freud (1878), « Über Spinalganglion und Rückenmark des Petromyzon », Sitzungsberichte der Mathematisch-Naturwissenschaftliche Classe der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften, Dritte Abtheilung, 78, n° 7, juillet, p. 81-167.)