La parabole du fils prodigue fut longtemps un mythe structurant du passage de témoin initiatique entre les générations. Dans maints films des années 1950-1960, des frères ennemis se disputent la reconnaissance du père. Le « mauvais » fils, en rupture de ban, rejette un temps l’héritage familial, pourfend toute tradition, refuse avec perte et fracas un destin écrit d’avance, avant d’être réintégré dans la lignée (le Plus Sauvage d’entre tous, 1963, Martin Ritt). Les dysfonctionnements familiaux y sont ritualisés et momentanés : après la révolte viennent la réconciliation et l’inclusion dans le clan. Cependant, dès 1955, la Fureur de vivre propose le parcours tourmenté d’un « rebelle sans cause ». Nicholas Ray dépeint une jeunesse en perte de repères, aux parents autoritaires, démissionnaires ou absents, inaptes à canaliser les excès propres à cet âge de transition. Jim Stark (James Dean) aspire à « devenir un homme » face à un père en tablier, soumis et balbutiant, incapable de l’accompagner sur cette voie. Dans le modèle encore classique de la famille d’avant la fin des sixties et l’avènement de la contre-culture, le cinéma explore les reliquats d’une société fondée sur des structures patriarcales vieillissantes, prêtes à exploser.
Les mouvements contestataires et la libération sexuelle font voler en éclats les institutions familiales pour mettre en avant les revendications d’une jeunesse éprise d’utopie et de liberté. Si l’aspiration à l’émancipation engendre momentanément des rites de passage collectifs (concert de Woodstock) et/ou militants (pour les droits des minorités), le Nouve…