Le Droit de la liberté est le plus long des ouvrages publiés jusqu’à présent par Axel Honneth. Cette traduction d’un livre paru en 2011 sort en même temps que le tome II du recueil Ce que social veut dire, intitulé les Pathologies de la raison. Avec les autres livres publiés chez Gallimard, aux Éditions du Cerf ou à La Découverte, une bonne part de la production du philosophe francfortois, qui enseigne à l’université Columbia, est désormais à la disposition du public francophone. Dans tous ces travaux, Hegel est présent soit à titre d’objet (dans la « réactualisation » de sa philosophie politique qu’offrent les Pathologies de la liberté), soit en tant qu’inspirateur d’un thème qu’il s’agit de retravailler (la reconnaissance, mais aussi l’éthicité : voir les chapitres iii et iv de Ce que social veut dire I). De la sorte, Honneth représente, au sein de la théorie critique – dont il incarne la troisième génération, après celle de Horkheimer, Marcuse et Adorno, puis celle de Habermas – une manière de « retour à Hegel », un retour (critique, d’ailleurs) qui lui permet de se démarquer des positions souvent très anti-hégéliennes de ses prédécesseurs (pensons en particulier à la Dialectique négative d’Adorno).
Cette assise hégélienne est consolidée dans le Droit de la liberté. Cela se perçoit dès le sous-titre : Esquisse d’une éthicité démocratique, qui fait référence à un concept majeur de la théorie hégélienne de l’esprit objectif, celui de Sittlichkeit. Il indique à la fois la référence hégélienne du propos et, grâce à l’épithète « démocratique », la volonté de s’écarter du hégélianisme historique…