On s’est habitué à ne voir les relations internationales qu’à travers l’action des États démocratiques. Dans le concert des nations, pourtant, des États non démocratiques bloquent les capacités d’action de la « communauté internationale » et ne misent que sur des rapports de force. On est loin des brèves années d’illusion qui ont suivi la chute du mur de Berlin : l’échec prévisible du plan de Kofi Annan dans la terrible guerre qui se poursuit en Syrie en est la tragique manifestation. Mais la Syrie nous appelle justement à un peu de lucidité : Michel Seurat rappelait à juste titre que, dans les situations de violence, la lecture de Hobbes ou de Rousseau aide mieux à comprendre les ressorts de la terreur et de l’état de nature qu’une science politique qui ne se penche guère sur les ressorts de la puissance des États. Certes, ceux-ci se sont multipliés depuis les décolonisations et la fin de la guerre froide et nous ne pensons pas que les printemps arabes ne conduisent qu’à des dérapages peu glorieux ou à des victoires antidémocratiques.C’est pourquoi il importe de mieux prendre la mesure de la nature des États contemporains constitués, en voie de constitution ou en voie de dégradation, pour ne pas dire en voie de dissolution. Il faut en effet reconnaître la diversité des situations : il y a des États faibles comme le Mali, des États hautement corrompus dont la Roumanie vient de fournir l’exemple, il y a la « poutinisation » de pays comme l’Ukraine soumis au chantage économique, à la peur, à la déstabilisation des institutions démocratiques, la permanence d’autocrates qui vivent d…