Couverture de EP_051

Article de revue

Mutatis mutandis

La figure du mutant comme paradigme de la condition humaine

Pages 37 à 47

Notes

  • [1]
    « Ce qui devait être changé ayant été changé. »
  • [2]
    Cf. les travaux de François Bloch-Lainé (1968), fondateurs de la loi d’orientation de 1975 dite « en faveur des personnes handicapée », jusqu’aux derniers avatars de 2002 et 2005.
  • [3]
    La classification internationale des handicaps (cih) ; cf. M. Burry, P. Wood et coll. (1980) ; la classification internationale du fonctionnement du handicap et de la santé (cif) ; cf. oms (2001) ; la classification québécoise du processus de production du handicap (pph) ; cf. P. Fougeyrollas (1998).
  • [4]
    Cf. Henri-Jacques Stiker (2005) qui en fait une remarquable synthèse.
  • [5]
    D. Diderot, « Lettre sur les aveugles à l’intention de ceux qui voient », Œuvres complètes, p. 842.
  • [6]
    Cf. La planète des singes de Pierre Boulle (1963).
  • [7]
    dc pour Detective Comics.
  • [8]
    DareDevil signifie littéralement « tente le diable » et pourrait être traduit par « casse-cou ».
  • [9]
    Pour les créateurs de la série, le gris symbolise la frustration adolescente, le vert, les peurs de l’enfance. Du point de vue éditorial, le gris était une couleur d’un piètre résultat à l’impression, le vert était plus facile à reproduire à l’époque. Dans l’univers de la science-fiction, le vert est massivement représentatif et symbolique de la violence bestiale terrestre ou extraterrestre, elle est associée au mal et à la mort.
  • [10]
    Dans une autre version de l’histoire, il se nomme Éric Lencher.
  • [11]
    Parmi lesquels se distinguent le docteur Jean Grey, bras droit de Charles Xavier, douée de télékinésie et télépathe; Scott Summers alias Cyclope, capable de projeter un rayon laser avec les yeux; Ororo Munroe, la Tornade, contrôle quant à elle les éléments; Logan alias Volverine, ex-militaire aux sens hyper développés, doué d’un pouvoir de régénération accéléré, d’un squelette et de griffes rétractables en Adamantium, alliage indestructible.
  • [12]
    Brotherhood of Evil Mutants.
  • [13]
    Le dessin animé les Indestructibles, produit par les studios Pixar en 2005, reprend à son compte les caractères des personnages des Quatre Fantastiques. L’histoire contée est celle d’une famille de superhéros contraints à la retraite et à l’anonymat. Bob Par, le père possède la force de la Chose, Hélène, la mère, l’élasticité de Mr. Fantastique, Violette, la fille, l’invisibilité et le champ de force de Sue. Quant aux qualités de la Torche Humaine, elles sont partagées par Flèche, le fils, pour la vitesse, et le feu par Jack-Jack, le dernier-né de la famille. Ces récurrences narratives ne doivent rien au hasard et indiquent une matière mythique à l’œuvre dont la texture (cf. Nicole Belmont, 1993) est au service du questionnement sur les origines et les fins.
  • [14]
    On pense ici à Gwynplaine, le héros de l’Homme qui rit, de Victor Hugo (1869), atrocement défiguré par les comprachicos et dont le seul amour est Dea, une jeune femme aveugle.
  • [15]
    Dans une autre version, Victor Von Fatalis, né en Latvéry, petit royaume imaginaire d’Europe centrale, d’une sorcière bohémienne et d’un médecin, fait ses études aux États-Unis en compagnie de Reed Richards, où il mêle science et sorcellerie. Défiguré à la suite d’une expérience qui tourne court, contraint de porter une armure pour dissimuler son infirmité dont il rend responsable Reed, il poursuit ce dernier d’une haine tenace.
  • [16]
    Parmi les récentes versions cinématographiques, Iron Man I, réalisé en 2008 par Jon Favreau pour le compte de Marvel Studio, réactualise l’histoire et situe le conflit en Afghanistan.
  • [17]
    Le concept de « besoin éducatif particulier », né en Grande-Bretagne à la fin des années 1970, témoigne d’une volonté de s’écarter de la stigmatisation, par la reformulation, pour aller vers ce que l’on nomme aujourd’hui l’inclusion. La série sémantique – handicapé, personne handicapée, personne porteuse de handicap, personne en situation de handicap –, relève du même schéma euphémistique qui tente, sans succès, de dissoudre les représentations spécifiques liées à la déficience. L’expression « accidenté de la vie » utilisée pour caractériser Tony Stark alias Iron-Man, s’inscrit dans une rhétorique similaire.
  • [18]
    Un cyborg – contraction de cybernetic organism – est un être vivant intelligent, qui a reçu des greffes de parties mécaniques.
  • [19]
    Personnage créé en 1939 par Bob Kane et Bill Finger, Bruce Wayne est un riche industriel philanthrope. Traumatisé par le meurtre de ses parents auquel il a assisté alors qu’il était enfant, il étudie la criminologie et les arts martiaux jusqu’à l’expertise pour combattre le crime. Afin de terroriser les malfaiteurs, il prend pour symbole la chauve-souris. Batman est un héros sans superpouvoirs. Il dispose de toute une panoplie d’armes de pointe dont il use avec une rare intelligence.
  • [20]
    À l’exception de Logan alias Volverine, rendu amnésique à la suite d’expérimentations militaires dont il a été le cobaye pour créer un super guerrier, et du personnage du professeur Xavier, à la fois mutant et paraplégique.
  • [21]
    Cf. aujourd’hui le diagnostic anténatal de la trisomie 21 avec ses conséquences éliminatoires.
  • [22]
    « Notre instinct de sympathie nous pousse à secourir les malheureux; la compassion est un de ces produits accidentels de cet instinct que nous avons acquis dans le principe, au même titre que les instincts sociables dont il fait partie. La sympathie d’ailleurs tend toujours à devenir plus large et plus universelle. Nous ne saurions restreindre notre sympathie, en admettant même que l’inflexible raison nous en fît loi, sans porter atteinte à la plus noble partie de notre nature. Le chirurgien doit se rendre inaccessible à tout sentiment de pitié au moment où il pratique une opération, parce qu’il s’agit du bien du malade; mais si, de propos délibéré, il négligeait les faibles et les infirmes, il ne pourrait avoir en vue qu’un avantage éventuel, au prix d’un mal présent considérable et certain, nous devons donc subir, sans nous plaindre, les effets incontestablement mauvais qui résultent de la propagation des êtres débiles » (Cité par Patrick Tort, 1997, p. 72).

Bien penser pour mieux agir?

1Le phénomène de la déficience, dans la multitude de ses expressions, est constant dans les sociétés humaines. Comme invariant, il a donné lieu à tous les âges et en tout lieu du globe à des discours et des pratiques qui constituent un corpus de premier ordre pour des études anthropologiques et sociologiques. Le statut et le sort réservés aux infirmes à travers les époques renseignent à bien des égards sur les profondeurs sociales des sociétés étudiées. À la façon dont elles traitent les infirmes, elles nous montrent leur visage, pourrait-on écrire. Le monde d’aujourd’hui n’échappe pas à la règle. Si nous considérons l’aire culturelle occidentale, des sujets concernés au premier chef par la situation de handicap aux professionnels de terrain, en passant par les gestionnaires et les législateurs, jusqu’aux chercheurs en sciences sociales et humaines, sans oublier monsieur-tout-le-monde, tous participent à l’entreprise qui consiste depuis la nuit des temps à traiter cette question par le verbe et l’action. Des Amphidromies (Vernant, 1963), rituel antique d’intégration à la famille, à l’examen neuromoteur d’Albert Grenier (1981), des textes épiques évoquant l’infirmité d’Œdipe (Delcourt, 1944) aux derniers ouvrages en date sur la situation de handicap (Chazan et Grim, 2010; Gardou, 2010), tout ce matériau éclaire, souvent d’une lumière crue, la condition humaine. Ainsi, malgré un ensemble de lois [2] destinées aujourd’hui à garantir l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap; malgré un assortiment de classifications internationales [3] destinées à mettre en place cette politique; malgré une réflexion théorique [4] conséquente pour comprendre, à partir des réalités du terrain, la condition sociale faite aux personnes en situation de handicap et définir leur statut anthropologique, participer pleinement à la vie de la cité reste pour ces personnes une lointaine utopie.

2Une fois établi le constat, pourquoi les représentations sociales évoluent-elles si lentement? Pourquoi la société tergiverse-t-elle? Sans doute le regard posé est-il toujours dans l’évitement ou au contraire trop focalisé. À force d’aiguiser nos prétentions à vouloir comprendre pour mieux agir là où d’autres dans le même temps ne veulent rien savoir, manquons-nous de hauteur de vue? De perspective? Robert F. Murphy (1987) repose son anthropologie de l’infirmité sur un interactionnisme fort: nos comportements sont déterminés de façon très diffuse par les pulsions biologiques, et ces dernières sont façonnées par notre socialisation, c’est-à-dire par la culture. Il s’agit d’un processus d’échanges réciproques où il est plus judicieux de parler de condition humaine en lieu et place de nature humaine. De l’Antiquité classique à nos jours, pour prendre ces deux bornes historiques, ce processus s’avère lent, discontinu, en perpétuel devenir. À l’aune de cette lecture, la question du handicap ne s’inscrirait-elle pas dans une problématique anthropologique beaucoup plus vaste dont elle ne serait qu’un aspect, échappant ainsi, à l’échelle d’une vie, à notre entendement?

Extinction, mutation

3Suivons cette piste. Interrogé sur la création de l’univers, Nicolas Saunderson (1682-1739), héros malvoyant de La lettre sur les aveugles de Denis Diderot, postule des commencements anarchiques, maelström instable et furieux générateur de mondes et d’êtres éphémères. Ces derniers « sans tête, sans pieds, sans estomac, informes », témoignent de la précarité de l’ordre où nous sommes. Rien n’est stable, solide, fiable, le monde est « un composé sujet à des révolutions qui toutes indiquent une tendance continuelle à la destruction; une succession rapide d’êtres qui s’entre-suivent, se poussent et disparaissent: une symétrie passagère, un ordre momentané [5] ». Ces événements nous dépassent car sur l’échelle du temps, tels des insectes éphémères, nous sommes incapables de les comprendre et d’en prendre la mesure. Ainsi, Homo sapiens n’a pas toujours existé, y compris dans la perspective créationniste. Une conclusion s’impose, l’humanité n’est pas fixée ad vitam æternam dans sa forme. Qu’elle soit perçue ou puisse se percevoir en son entier comme une espèce intermédiaire soumise à extinction au même titre qu’homo habilis, ergaster ou erectus ou toute autre espèce vivant à la surface de la Terre, produit une angoisse collective ancestrale onto-phylogénétique alimentée par l’idée d’une disparition de l’espèce humaine selon deux scénarios. Le premier met en scène son extinction radicale comme ce fut le cas pour homo neanderthalensis. Le deuxième scénario s’appuie quant à lui sur la mutation de l’espèce au sens biologique premier introduit en 1766 par Buffon, comme changement dans la physiologie de l’espèce, et dans son sens général et moderne pris dès 1903, de modification génétique brusque et permanente.

4Revenons un instant à Nicolas Saunderson. Par sa cécité, il se qualifie de monstre, et établit un cousinage fort avec les êtres incomplets censés avoir peuplés les mondes premiers. Dans ce droit fil, la situation de handicap, figure moderne de la condition de l’infirme, concentrerait sur elle, tel un paratonnerre, cette terreur onto-phylogénétique où, dans le registre de l’extinction, la figure de l’infirme serait une représentation de mort (Grim, 2008), et dans celui de la mutation, une incarnation du mutant, la situation de handicap étant ainsi le paradigme de la mutation.

5Cette idée de l’évolution et ses implications à la fois directes et terrifiantes en matière d’extinction et de mutation possible de l’espèce sont tout entières contenues dans la littérature, la bande dessinée, le dessin animé et le cinéma de science-fiction, genre qui exploite ce filon dans toutes les directions [6].

L’univers Marvel

6« La vie est pauvre en monstres. Le fantastique est un monde », écrit Georges Canguilhem (1962, p. 32). Ainsi, la figure du mutant tient une place de premier choix dans de nombreux univers science-fictionnels, avec une concentration remarquable de ce type de héros chez Marvel Comics (Lee et Ditko, 1965; Lee et Kirby, 1965). Cette maison d’édition américaine de bandes dessinées – dont le premier titre fut publié en 1939 pour concurrencer DC Comics [7] qui triomphe dès 1938 avec Superman – mettra au monde des personnages aujourd’hui au panthéon des super-héros à la renommée interplanétaire. Genre et médium à destination de la jeunesse, relayé ces dernières années par le cinéma grâce aux progrès numériques liés au septième art, qui ne connaît pas Spider-Man, l’incroyable Hulk, Les Quatre Fantastiques, Les X-men, Daredevil, Iron Man, Ghost Rider, etc.?

Un aveugle

7Daredevil[8], personnage créé en 1964 par Stan Lee et Bill Everett, est pour notre propos le prototype parfait du superhéros. Orphelin de mère à l’âge de 6 ans, Matt Murdock est élevé par un père exigeant. Il fait de son fils un avocat respecté et reconnu. Alors qu’il porte secours à un vieil homme sur le point d’être écrasé par un camion de déchets radioactifs, Matt est éclaboussé par les matières toxiques et perd la vue. Après une phase de dépression, il s’entraîne d’arrache-pied pour dépasser son handicap et devenir un athlète martial accompli. L’exposition aux substances radio-actives a décuplé ses capacités sensorielles. Il est désormais doté d’un sens radar capable de pallier sa cécité. L’assassinat de son père parachève sa transformation en justicier. Le jour il est Matt Murdock, avocat aveugle défenseur du droit, la nuit DareDevil à la poursuite des malfaiteurs qui échappent à la justice. Ce personnage s’inspire d’une bande dessinée éponyme créée en 1940 par Don Rico et Jack Binder dont le héros, baptisé Bart Hill, est muet. La revue DareDevil, consacrée aux aventures de ce héros, contait également les aventures d’un certain Nightro, aveugle lui aussi. Le motif de l’infirmité associé de diverses manières à une ou plusieurs qualités surhumaines issues d’une mutation est, comme nous le verrons, récurent dans le genre.

Un déficient mental

8Né en 1962 de l’imagination de Stan Lee et de Jack Kirby, l’incroyable Hulk confirme la règle. Bruce Banner, généticien timide et réservé, dont les recherches portent sur la régénérescence cellulaire, est devenu un mutant à la manière du Docteur Jekyll et Mister Hyde de Robert L. Stevenson (1886). Objet d’expériences alors qu’il était enfant, puis exposé à un rayonnement gamma massif lors d’un incident de laboratoire, Bruce est victime d’une mutation génétique temporaire et récurrente. Un choc, une blessure, une vexation, la colère, le transforment à vue en une incroyable créature, un colosse vert surpuissant et destructeur: Hulk. Capable de soulever plus de cent tonnes, de faire des sauts prodigieux de plusieurs kilomètres, insensible aux froids et aux chaleurs extrêmes, il peut survivre dans le vide de l’espace. Immunisé contre toutes les maladies terrestres, ses tissus se régénèrent à grande vitesse en cas de blessure. Ses qualités surhumaines s’accompagnent de capacités mentales limitées dont le signe le plus patent est l’absence de langage parlé. Pourchassé par l’armée, intéressée au plus haut point par une application militaire de ses capacités hors du commun, Hulk possède l’âme d’un enfant et souhaite vivre en paix. En vain. Le personnage a évolué au cours du temps dans son apparence et sa psychologie. Dessiné en gris puis en vert [9], les scénaristes le conduiront sur le divan d’un psychothérapeute afin qu’il rassemble ses personnalités. Désormais Hulk est intelligent, parle et maîtrise sa transformation.

Un paraplégique et ses protégés

9Le professeur Charles Xavier et Max Eisenhardt [10] sont amis d’enfance. Le premier est paraplégique et télépathe, le second, rescapé de la Shoah, contrôle le magnétisme et commande au métal. Dans une société où les mutations génétiques sont devenues le pain quotidien d’une part croissante de la population, tout finit par séparer les deux amis arrivés à l’automne de leur vie. Dans ce monde, les mutations se déclarent le plus souvent à l’adolescence, période critique où les jeunes gens peuvent être profondément déstabilisés et effrayés par leur transformation liée à des qualités surhumaines dont ils ignorent le plus souvent l’essence et qu’ils ne maîtrisent pas. Le professeur Xavier fonde une école spécialisée destinée à aider les jeunes mutants à maîtriser leur nouveau pouvoir, à accepter leur singularité, s’épanouir et vivre en harmonie avec les autres humains. La fine fleur de cette école forme les X-Men[11], confrérie secrète au service du bien. Pour Max Eisenhardt, traumatisé à jamais par son expérience de la Shoah, les mutants sont destinés à diriger le monde et remplacer les humains incapables de vivre sur Terre sans causer malheurs et destructions. Sous le nom de Magneto, il réunit autour de lui au sein de la Confrérie des mauvais mutants[12], tous les « transformés » rejetés et persécutés par la société ou qui n’ont pas pu bénéficier des bons soins du professeur Xavier. Les pièces de l’échiquier créées par Stan Lee et Jack Kirby en 1963 sont en place. Les deux clans de mutants sont aux prises dans des affrontements sans cesse renouvelés dont l’enjeu est la destinée d’une l’humanité ordinaire effrayée par l’altérité incarnée par les mutants, qu’ils soient bienveillants ou malveillants. Sur la même trame narrative, cette série qui connaîtra, sur cinquante ans d’existence, plusieurs périodes avec l’apparition et la disparition de personnages divers et variés, mêle par la figure du mutant la problématique adolescente et celle de l’infirmité dans ce qu’elles peuvent avoir de dramatique au plan individuel et collectif.

Une bande de monstres

10La série Les Quatre Fantastiques, créée en 1961 par les mêmes Stan Lee et Jack Kirby, exploite également la veine de la mutation par irradiation. Lors d’une mission spatiale en orbite autour de la Terre, quatre chercheurs et leur mécène sont exposés à une dose massive de rayonnement cosmique. Cette exposition va provoquer chez eux des mutations génétiques radicales. Reed Richards, Ben Grimm, Sue Storm et son frère John deviennent respectivement Mr. Fantastique: homme élastique capable d’étirer son corps à l’extrême, la Chose: un colosse de pierre à la force prodigieuse, la Femme Invisible capable de produire un champ de force protecteur, et la Torche Humaine au tempérament tout feu tout flamme [13]. Il leur faudra à chacun un temps particulier pour accepter leur nouvel état vécu dans un premier temps comme une maladie honteuse. Ben Grimm est le plus éprouvé de tous par son état. Abandonné par sa femme terrorisée et dégoûtée par son apparence monstrueuse, il finira par retrouver l’âme sœur en la personne d’une aveugle [14]. Quant au mécène, entrepreneur mégalomaniaque, dont la peau a mué en un métal inaltérable, capable de détourner et de concentrer entre ses mains une énorme énergie électrique, il deviendra l’inquiétant Docteur Fatalis[15], ennemi juré des Quatre Fantastiques désormais impliqués dans la lutte contre les forces extraterrestres ou venues d’autres dimensions.

Un accidenté de la vie

11Personnage créé en 1963 par Stan Lee, Anthony Edward Stark est un industriel comblé dont les entreprises fabriquent des armes sous contrat avec le gouvernement. Ingénieur génial et playboy cynique, il se rend sur le théâtre d’opérations militaires au Vietnam afin d’y démontrer la suprématie du matériel de guerre développé par Stark industries[16]. À cette occasion, il saute sur une mine dont des éclats menacent son cœur. Prisonnier du Viêt-minh, grièvement blessé, il est contraint de fabriquer des armes en compagnie d’un autre détenu, le Professeur Yinsen. Conscients tous deux du trépas imminent de Tony Stark, ils conjuguent leur génie respectif dans la mise au point d’une armure électronique capable de ralentir la progression des éclats vers le cœur et permettre leur évasion. L’armure une fois construite requiert, pour être opérationnelle, l’accumulation d’une importante quantité d’énergie. Pour gagner le temps nécessaire à l’opération, le Professeur Yinsen sacrifie sa vie. Tony Stark s’échappe. De retour chez lui, il perfectionne le dispositif qui contrôle les éclats de mine et conçoit une armure plus performante. En hommage au Professeur Yinsen et au grand dam du lobby militaro-industriel, il cesse de fabriquer des armes et combat le crime grâce à son équipement. Iron Man est né. À l’instar des autres superhéros, si la transformation est également psychique, notamment par une prise de conscience où ses nouvelles capacités sont mises au service du Bien, le corps de Tony Stark reste celui d’un humain, « accidenté de la vie » sans pouvoir particulier. Ici la mutation n’est plus génétique mais biomécanique. Le corps défaillant est rendu surpuissant par une orthèse sophistiquée.

Un adolescent à besoin éducatif particulier [17]

12Parfaite incarnation de l’antihéros, Peter Parker n’a rien pour lui. Fils unique de Richard et Mary Parker, agents du gouvernement morts en service commandé, élevé à partir de l’âge de 6 ans par son oncle Benjamin et sa tante May, couple stérile, il est l’antithèse du rêve américain. Lycéen solitaire, introverti, chétif et binoclard, souffre-douleur de ses comparses, empoté avec les filles, surprotégé par sa tante et dépendant, il est en 1962, selon la volonté de ses créateurs Stan Lee et Steve Ditko, « un vrai minable ». Dans ce tableau calamiteux, Peter présente néanmoins un certain talent pour les sciences. À la suite d’une expérience à laquelle il assiste, il est mordu par une araignée radioactive. Le venin de l’arachnide recombinera son code génétique pour lui conférer des superpouvoirs: une force, une agilité, une résistance et une compétence au combat hors du commun notamment grâce à un « sixième sens araignée » l’avertissant d’un danger imminent. Il est capable de coller aux parois avec les pieds et les mains et de s’y déplacer tel un insecte. De ses poignets, il peut tisser des toiles d’araignée à la soie résistante pour se déplacer dans les airs et combattre ses ennemis. Bien décidé à prendre sa revanche sur la vie, il mettra à profit ses superpouvoirs pour s’affirmer et subvenir à ses besoins et ceux de sa famille. À l’issue d’un combat clandestin soumis à paris auquel Peter Parker participe, il laissera s’enfuir un voleur qui assassinera par la suite son oncle. Terrassé par la culpabilité, Peter Parker deviendra Spider-Man et luttera contre le crime en faisant sienne la maxime de son oncle: « Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. » Intéressé par la photographie, Peter deviendra reporter pour le Daily Bugle, propriété de l’irascible J. Jonah Jameson, dont la haine farouche à l’égard des superhéros en général et de Spider-Man en particulier est légendaire. Peter Parker finira par séduire Mary Jane, l’élue de son cœur, sans toutefois réussir à établir avec la belle une relation solide et durable.

Infirmes et psychotiques

13Un bon nombre d’ennemis de superhéros présentent la caractéristique de mêler intimement infirmité et psychose. Ainsi, Spider-Man luttera contre une cohorte de super vilains parmi lesquels se distinguent le Bouffon Vert, Docteur Octopus et l’Homme des Sables. Le premier est le double maléfique de Norman Osborn, riche industriel dont le fils est un camarade de lycée de Peter Parker. Plongé dans le coma à la suite d’un accident de laboratoire où il est contaminé par un mystérieux liquide vert, Norman Osborn se réveille transformé. Il dispose d’une force accrue, d’une intelligence débridée et de capacités de régénération rapides. Dans le même temps, il sombre rapidement dans une folie paranoïaque. Sous le masque difforme du Bouffon Vert, il met à profit ses nouveaux pouvoirs pour confectionner tout un arsenal d’armes de haute technologie pour dominer le monde et affronter Spider-Man. Le second est la métamorphose d’Otto Octavius, savant atomiste à l’enfance marquée par des mauvais traitements infligés dans le cercle familial. Afin de mener à bien ses recherches, il imagine un dispositif portatif constitué de quatre tentacules métalliques douées d’une intelligence artificielle, destinées à manipuler à distance des matières radioactives. Victime lui aussi d’un accident de laboratoire où il est irradié et mis en contact avec des substances radioactives, il verra au cours de l’incident le dispositif tentaculaire faire littéralement corps avec lui, se relier à son système nerveux central et prendre le contrôle de son esprit. Cyborg [18] malgré lui, métamorphosé en Docteur Octopus, il sombre dans une folie destructrice et meurtrière. Quant à William Baker, le troisième larron, malfrat au bon cœur, il est irradié par l’explosion d’un réacteur nucléaire alors qu’il se trouve sur une plage. À son réveil, il constate avec angoisse sa capacité à transformer tout ou partie de son corps en une substance en tout point semblable au sable. Il peut désormais comme Homme Sable changer de taille et de volume à volonté, couler ou se répandre, ou utiliser le sable comme arme. On peut lire ici cette mutation comme une métaphore de la psychose.

14Chez dc Comics, concurrent direct de Marvel, un héros comme Batman[19] lutte sans fin contre toute une troupe de super vilains infirmes et psychotiques. Citons à l’envi le Pingouin, nain psychopathe, obèse au nez crochu; le Joker, gangster défiguré rendu fou par une chute dans un bain d’acide; Double Face, procureur jadis respecté, également défiguré par un jet d’acide, schizophrène et criminel; le Chapelier fou, nain accablé d’une longue paire de dents et d’un long nez aquilin, criminel aliéné obsédé par l’idée de contrôler le cerveau d’autrui; Gueule d’Argile assassin fou au visage défiguré; l’Épouvantail, maltraité dans son enfance à cause de son apparence, ex-professeur de psychologie aliéné, tuant par la peur et des gaz hallucinogènes.

La figure du mutant comme point focal

15De ce passage en revue se dégagent trois types de production de mutants. Le scientifique apprenti sorcier victime de ses recherches est une figure majeure de ce corpus. Bruce Banner alias Hulk, les Quatre Fantastiques, Tony Stark alias Iron Man, Norman Osborn, le Bouffon Vert et Otto Octavius, les Dr Octopus et Fatalis sont de celle-là. La mutation somato-psychique où superpouvoirs, infirmité et folie se mêlent, mise au service du Bien ou du Mal, est le prix à payer pour avoir transgressé un ordre supposé naturel au-delà duquel le commun des mortels pris en flagrant délit de délire démiurgique est sanctionné.

16Daredevil, Spider-Man ou l’Homme Sable incarnent une catégorie de héros ordinaires placés au mauvais endroit au mauvais moment, ils sont victimes des circonstances. Si la mutation n’est pas le fruit d’une punition manifeste, elle les place aux frontières ou hors de l’humanité. Cette position est également une des caractéristiques des mutants de la série X-men. Ici les mutations sont non pas acquises par accident mais transmises le plus souvent mystérieusement [20]. La communauté des mutants, dans cette série comme dans les autres, qu’ils soient bienveillants ou malveillants, inquiète l’humanité ordinaire. Cette dernière cherche à repérer, à identifier, à classer la première afin de la contrôler. Il s’agit d’organiser la déviance, de la réduire, de maîtriser le chaos. La quête du même et sa promotion rassurent. Il s’agit de se prémunir contre toute forme d’altérité et d’une possible contagion. Quitte à détruire l’autre, l’obsession consiste à survivre fidèle à l’image que l’on a de soi [21]. Les questions d’intégration, d’inclusion, de discrimination positive, de diversité, de mixité, de sexualité, de procréation comme de mise à la marge, d’exclusion, de la plus douce à la plus radicale, d’une population stigmatisée au sens où le défend Erving Goffman (1975) avec toutes les violences qui peuvent y être attachées de toutes parts, sont au cœur de ces récits et, dans ce droit fil, l’ensemble du discours savant sur le handicap pourrait servir de grille de lecture à ce corpus.

17Dans ce monde de représentation, la déficience constitutive de la mutation: la cécité de Daredevil, la paraplégie du Professeur Xavier, la déficience mentale d’Hulk, les monstruosités des Quatre Fantastiques ou la fragilité cardiaque d’Iron Man, devient une force salvatrice mise au service d’une humanité ordinaire somme toute assez peu reconnaissante d’être sauvée. La déficience est ici une chance de salut pour l’humanité, tel est le message. Lorsqu’elle a partie liée avec la maladie mentale comme avec le Bouffon Vert, Octopus, Fatalis, le Joker ou Double Face, elle devient une terrible menace, un retour vers le chaos des origines. Ange ou démon, dans les deux cas elle est considérée par l’humanité comme une frontière à ne pas franchir, au-delà de laquelle s’étendent des territoires où homo sapiens ne se reconnaît plus. Cette géographie relative – dont la temporalité échappe à l’échelle d’une vie – est le signe et le fruit du lent travail anthropologique mené par l’humanité ordinaire pour déplacer cette frontière. Labeur qui s’inscrit dans le cadre de ce que l’on nomme aujourd’hui la théorie néodarwinienne de l’évolution (Lecointre, 2009), car de génération en génération, l’humanité entière mute à bas bruit.

L’œil de Darwin

18Dans La descendance de l’homme, Charles Darwin (1871) découvre combien la sélection naturelle comme principe directeur de I’évolution n’est plus, face à l’état de civilisation, la force principale qui règle le devenir de l’humanité. Si la sélection naturelle sélectionne les variations organiques avantageuses, elle sélectionne au même titre les instincts.

19L’avantage sélectif n’est pas strictement biologique; il est également social. Dans cette conception, baptisée effet réversif de l’évolution par Patrick Tort (1996), l’éducation prend la main et dote l’homme de comportements qui s’opposent aux effets primitivement éliminatoires de la sélection naturelle: « La sélection naturelle sélectionne la civilisation, qui s’oppose à la sélection naturelle » (Patrick Tort, 1997, p. 68). Ce paradoxe trouve résolution dans ce que Charles Darwin appelle les instincts sociaux, par le biais desquels la sélection naturelle a sélectionné son contraire. Au lieu de l’élimination des moins aptes, apparaît le devoir d’assistance aux malades et aux infirmes, processus illustrant le renversement progressif qui produit un effet de rupture, comme le nomme Patrick Tort. L’émergence du progrès et de la morale a partie liée avec l’évolution. La sélection naturelle, au cours de sa propre évolution, s’est soumise elle-même à sa propre loi, sa forme nouvelle protège le faible et l’emporte, parce que avantageuse, sur l’ancienne forme qui privilégiait l’élimination. La sélection naturelle a donc travaillé à son propre déclin en ayant retenu, en particulier, ce que Charles Darwin nomme l’instinct de sympathie[22]. À ce titre, celui qui ne considère pas un autre être humain, aussi éloigné soit-il de lui de par sa conformation, comme un semblable, celui-là régresse sur l’échelle de I’évolution. Nous mesurons ici combien la figure du mutant déclinée dans les univers Marvel et dc Comics est entièrement au service de cette philosophie.

Pour conclure

20Le corpus que nous venons de survoler, replacé dans son hors champ référentiel (Puiseux, 1991), c’est-à-dire à l’époque de sa création, témoigne également, au plus fort de la guerre froide, de la terreur inspirée par un conflit nucléaire planétaire avec toutes les conséquences supposées sur l’humanité et son devenir en termes de mutation et d’extinction. Hiroshima et Nagasaki sont dans toutes les mémoires avec leur cortège de désolation, de dévastation, de morts, de survivants irradiés, d’infirmes et d’enfants congénitalement malformés au point d’incarner les chimères évoquées par Nicolas Saunderson.

21Dans l’univers Marvel, le motif récurrent de l’exposition à des matières radioactives ou à des rayonnements par accident et ses répercussions en attestent. Le discours savant et sa vulgate sur l’atome, ses applications militaires et civiles, ses réussites comme ses catastrophes – Tchernobyl et Fukushima –, n’en finissent pas d’alimenter ces narrations qui en retour servent d’oracle. Si dans leur luxuriante polysémie, elles peuvent être lues comme des greffes narcissiques, elles mettent également en sens et répondent aux angoisses ontologiques: celles de l’adolescent qui voit son corps et sa psyché se transformer à vue, celles de l’adulte confronté au vieillissement, auxquelles s’ajoutent et se mêlent les angoisses phylogénétiques de toute une espèce préoccupée par son origine et son devenir, et dont la force essentielle de mutation est l’amour.

Bibliographie

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : mutation, dc Comics, adolescence, univers Marvel, super héros, mutant, situation de handicap, condition humaine

Mise en ligne 03/01/2012

https://doi.org/10.3917/ep.051.0037

Notes

  • [1]
    « Ce qui devait être changé ayant été changé. »
  • [2]
    Cf. les travaux de François Bloch-Lainé (1968), fondateurs de la loi d’orientation de 1975 dite « en faveur des personnes handicapée », jusqu’aux derniers avatars de 2002 et 2005.
  • [3]
    La classification internationale des handicaps (cih) ; cf. M. Burry, P. Wood et coll. (1980) ; la classification internationale du fonctionnement du handicap et de la santé (cif) ; cf. oms (2001) ; la classification québécoise du processus de production du handicap (pph) ; cf. P. Fougeyrollas (1998).
  • [4]
    Cf. Henri-Jacques Stiker (2005) qui en fait une remarquable synthèse.
  • [5]
    D. Diderot, « Lettre sur les aveugles à l’intention de ceux qui voient », Œuvres complètes, p. 842.
  • [6]
    Cf. La planète des singes de Pierre Boulle (1963).
  • [7]
    dc pour Detective Comics.
  • [8]
    DareDevil signifie littéralement « tente le diable » et pourrait être traduit par « casse-cou ».
  • [9]
    Pour les créateurs de la série, le gris symbolise la frustration adolescente, le vert, les peurs de l’enfance. Du point de vue éditorial, le gris était une couleur d’un piètre résultat à l’impression, le vert était plus facile à reproduire à l’époque. Dans l’univers de la science-fiction, le vert est massivement représentatif et symbolique de la violence bestiale terrestre ou extraterrestre, elle est associée au mal et à la mort.
  • [10]
    Dans une autre version de l’histoire, il se nomme Éric Lencher.
  • [11]
    Parmi lesquels se distinguent le docteur Jean Grey, bras droit de Charles Xavier, douée de télékinésie et télépathe; Scott Summers alias Cyclope, capable de projeter un rayon laser avec les yeux; Ororo Munroe, la Tornade, contrôle quant à elle les éléments; Logan alias Volverine, ex-militaire aux sens hyper développés, doué d’un pouvoir de régénération accéléré, d’un squelette et de griffes rétractables en Adamantium, alliage indestructible.
  • [12]
    Brotherhood of Evil Mutants.
  • [13]
    Le dessin animé les Indestructibles, produit par les studios Pixar en 2005, reprend à son compte les caractères des personnages des Quatre Fantastiques. L’histoire contée est celle d’une famille de superhéros contraints à la retraite et à l’anonymat. Bob Par, le père possède la force de la Chose, Hélène, la mère, l’élasticité de Mr. Fantastique, Violette, la fille, l’invisibilité et le champ de force de Sue. Quant aux qualités de la Torche Humaine, elles sont partagées par Flèche, le fils, pour la vitesse, et le feu par Jack-Jack, le dernier-né de la famille. Ces récurrences narratives ne doivent rien au hasard et indiquent une matière mythique à l’œuvre dont la texture (cf. Nicole Belmont, 1993) est au service du questionnement sur les origines et les fins.
  • [14]
    On pense ici à Gwynplaine, le héros de l’Homme qui rit, de Victor Hugo (1869), atrocement défiguré par les comprachicos et dont le seul amour est Dea, une jeune femme aveugle.
  • [15]
    Dans une autre version, Victor Von Fatalis, né en Latvéry, petit royaume imaginaire d’Europe centrale, d’une sorcière bohémienne et d’un médecin, fait ses études aux États-Unis en compagnie de Reed Richards, où il mêle science et sorcellerie. Défiguré à la suite d’une expérience qui tourne court, contraint de porter une armure pour dissimuler son infirmité dont il rend responsable Reed, il poursuit ce dernier d’une haine tenace.
  • [16]
    Parmi les récentes versions cinématographiques, Iron Man I, réalisé en 2008 par Jon Favreau pour le compte de Marvel Studio, réactualise l’histoire et situe le conflit en Afghanistan.
  • [17]
    Le concept de « besoin éducatif particulier », né en Grande-Bretagne à la fin des années 1970, témoigne d’une volonté de s’écarter de la stigmatisation, par la reformulation, pour aller vers ce que l’on nomme aujourd’hui l’inclusion. La série sémantique – handicapé, personne handicapée, personne porteuse de handicap, personne en situation de handicap –, relève du même schéma euphémistique qui tente, sans succès, de dissoudre les représentations spécifiques liées à la déficience. L’expression « accidenté de la vie » utilisée pour caractériser Tony Stark alias Iron-Man, s’inscrit dans une rhétorique similaire.
  • [18]
    Un cyborg – contraction de cybernetic organism – est un être vivant intelligent, qui a reçu des greffes de parties mécaniques.
  • [19]
    Personnage créé en 1939 par Bob Kane et Bill Finger, Bruce Wayne est un riche industriel philanthrope. Traumatisé par le meurtre de ses parents auquel il a assisté alors qu’il était enfant, il étudie la criminologie et les arts martiaux jusqu’à l’expertise pour combattre le crime. Afin de terroriser les malfaiteurs, il prend pour symbole la chauve-souris. Batman est un héros sans superpouvoirs. Il dispose de toute une panoplie d’armes de pointe dont il use avec une rare intelligence.
  • [20]
    À l’exception de Logan alias Volverine, rendu amnésique à la suite d’expérimentations militaires dont il a été le cobaye pour créer un super guerrier, et du personnage du professeur Xavier, à la fois mutant et paraplégique.
  • [21]
    Cf. aujourd’hui le diagnostic anténatal de la trisomie 21 avec ses conséquences éliminatoires.
  • [22]
    « Notre instinct de sympathie nous pousse à secourir les malheureux; la compassion est un de ces produits accidentels de cet instinct que nous avons acquis dans le principe, au même titre que les instincts sociables dont il fait partie. La sympathie d’ailleurs tend toujours à devenir plus large et plus universelle. Nous ne saurions restreindre notre sympathie, en admettant même que l’inflexible raison nous en fît loi, sans porter atteinte à la plus noble partie de notre nature. Le chirurgien doit se rendre inaccessible à tout sentiment de pitié au moment où il pratique une opération, parce qu’il s’agit du bien du malade; mais si, de propos délibéré, il négligeait les faibles et les infirmes, il ne pourrait avoir en vue qu’un avantage éventuel, au prix d’un mal présent considérable et certain, nous devons donc subir, sans nous plaindre, les effets incontestablement mauvais qui résultent de la propagation des êtres débiles » (Cité par Patrick Tort, 1997, p. 72).
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