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Article de revue

La consultation neuropsychomotrice des grands prématurés

Pages 22 à 30

Notes

  • [1]
    L’âge corrigé correspond à l’âge qu’aurait l’enfant s’il était né à terme (9 mois). Il faut donc retrancher les mois de prématurité de l’âge réel (ou chronologique). Par exemple, un enfant né à 27 SA, soit 6 mois de grossesse, a 3 mois d’avance sur le terme. Lorsqu’il arrive à 6 mois d’âge chronologique, son âge corrigé est de 6-3 = 3 mois d’âge corrigé.
  • [2]
    Le cahier de vie est un document écrit individuel, illustré de photos de l’enfant. Il contient des informations sur l’évolution de l’enfant, son statut médical et les différents soins et interventions qui lui sont administrés. Il est destiné à l’enfant et à sa famille pour inscrire son histoire hospitalière.
  • [3]
    Le quotient de développement permet de situer les acquisitions de l’enfant par rapport au groupe d’enfants du même âge. Les quotients de développement ne sont pas donnés aux parents car la situation d’évaluation est toujours un moment particulier qui, en fonction de l’enfant (fatigabilité, irritabilité), ne semble pas refléter ses réelles possibilités.
  • [4]
    Pour l’évaluation neuro-psychomotrice, nous nous appuyons sur les travaux d’Amiel-Tison et Grenier (1985), Dargas-sies (1979) et Vaivre-Douret (1997). L’évaluation des compétences de l’enfant se fait par :
    • l’observation de l’activité spontanée et des capacités interactives ;
    • l’observation de la normalité neuropsycho-motrice au travers de l’examen du tonus passif et actif ;
    • les réactions posturales globales, en explorant les enchaînements posturaux selon les niveaux d’évolution motrice.
  • [5]
    Il existe différents modes de portage ou positions inhibitrices qui limitent les schèmes d’extension entraînant l’excitabilité et les pleurs de l’enfant. La position demi-assise et la position Bouddha sont souvent utilisées permettant un relâchement musculaire global et une attention soutenue de l’enfant en favorisant l’enroulement axial à partir des points de sécurité de base (tête-fesses).

1La naissance d’un enfant prématuré survient généralement dans un contexte d’urgence et de drame. Les bébés prématurés ont un cadre de vie très particulier au début de leur vie. Leur survie est presque entièrement due à des moyens médicaux techniques lourds (incubateur, respirateur, alimentation parentérale, monitorage continu). Il existe une « période sensible » dans le processus d’attachement mère-enfant quand une séparation précoce intervient entre la mère et son enfant, rupture spatiale entre le corps de la mère et de l’enfant. Cette séparation a des répercussions aussi bien sur le comportement maternel que sur le développement de l’enfant. Toutes les ruptures que subit l’enfant prématuré ne facilitent pas l’adaptation corporelle entre la mère et l’enfant.

Devenir psychomoteur des enfants prématurés – Intérêt du dépistage précoce

2Que deviennent donc tous ces bébés prématurés ? Le pronostic vital et fonctionnel de ces enfants est en constante amélioration depuis plusieurs décennies, et particulièrement depuis la fin des années 1990, aussi bien en Amérique du Nord (Robertson et coll., 2007) qu’en Europe (Platt et coll., 2007) Si la plupart des enfants prématurés ont un devenir semblable à celui des enfants nés à terme, les plus immatures sont encore exposés à des risques de troubles du développement.

3L’évaluation précoce des compétences neuropsychomotrices du bébé prématuré permet de repérer très tôt des signes prédictifs de risque, mais une formation en neurodéveloppement est indispensable. Ces signes peuvent s’observer dans différents domaines : cognitif, comportemental, neuromoteur ou sensoriel. Il est nécessaire de prendre le temps d’examiner un grand nombre d’enfants afin d’acquérir l’expérience nécessaire pour comprendre les schémas de développement.

Épidémiologie de la prématurité

Une naissance est considérée comme prématurée par l’Office mondial de la santé (oms) si elle survient avant 37 semaines d’aménorrhée (sa) révolues. Cette définition couvre un large champ de situations qu’il convient de distinguer selon le degré de prématurité. L’incidence de l’extrême prématurité en France est bien connue : 1,6 % des naissances vivantes concernent des enfants de moins de 32 sa ou de moins de 1 500 g de poids de naissance et 0,4 à 0,5 % des naissances vivantes des enfants de moins de 28 sa ou moins de 1 000 g de poids de naissance (statistiques 2003). Dans certains pays, de larges études de suivi prospectif ont permis une meilleure connaissance du pronostic à moyen et à long terme des extrêmes prématurés (Larroque et coll., 2004 ; Mikkola et coll. 2005 ; Vanhaesebrouck et coll. 2004 ; Wood et coll. 2000).
Toutefois, ces études se heurtent à deux écueils difficilement contournables :
  • la fréquence des perdus de vue ;
  • la transposition des résultats à la période actuelle au moment de leur publication (progrès rapides en néonatologie).

Organisation du suivi

4Chaque unité de néonatalogie rencontre des difficultés d’organisation du suivi de la grande prématurité. S’assurer du bon développement des enfants sortant est pourtant une préoccupation constante des services. Mais les transferts, la migration géographique des familles, l’instabilité sociofamiliale augmentent le nombre de perdus de vue.

5Il existe une grande hétérogénéité des propositions de suivi des bébés prématurés en fonction des moyens de chaque centre : consultations pédiatriques, intervention du camsp, fonctionnement en réseau avec des grilles d’évaluation standard pour les correspondants, évaluation ciblée sur la grande prématurité, co-consultations. Les grands prématurés sont les plus exposés à des séquelles neurosensorielles : longue hospitalisation (2-3 mois), pathologies fréquemment intriquées, difficultés psychosociales, familles déstabilisées.

6Le centre hospitalier intercommunal de Créteil (chic) comporte une maternité réalisant environ 2 600 accouchements par an et un service de néonatologie et réanimation néonatale accueillant chaque année environ 60 extrêmes prématurés (< 28 sa) nés à la maternité (inborn) et environ 10 extrêmes prématurés nés hors maternité du chic (outborn). Le suivi est organisé pour tous les survivants. Actuellement, dans notre unité néonatale, ce suivi a lieu à 4 mois, 1 an, 2 ans, 3 ans et 4 ans en âge corrigé [1].

7Les données recueillies au chic sur la période 2000-2004 indiquent les résultats suivants :

  • 287 prématurés avant 28 sa ont été hospitalisés en réanimation néonatale, 8,7 % sont décédés ;
  • à l’âge corrigé de 2 ans, 134 des 245 survivants (55 %) ont été revus en co-consultation de suivi et 16 % de ces enfants présentaient un problème moteur ou cognitif, 12 enfants (9 %) présentaient un trouble sensoriel, essentiellement visuel (port de lunettes).
Le fort taux de perdus de vue souligne les difficultés pratiques liées à l’organisation du suivi.

Consultations de suivi multidisciplinaires

Conditions de consultation

8La consultation pour les 4 mois et un an d’âge corrigé a lieu dans une salle de consultation médicale polyvalente située à l’extérieur de l’unité néonatale. Cette proximité est importante pour permettre aux infirmières qui se sont occupées de l’enfant pendant son séjour en réanimation de venir le voir pendant ou après la consultation.

9Le partenariat pédiatre-psychomotricienne ou kinésithérapeute permet un décloisonnement des professions, une observation conjointe de l’enfant et de ses parents. L’organisation du dépistage des troubles éventuels s’en trouve améliorée. Après plusieurs années de fonctionnement, nous avons appris à travailler ensemble, à respecter l’identité professionnelle de chacun, à nous ajuster l’un à l’autre pour créer une certaine harmonie dans la consultation. Elle dure environ 45 minutes, temps minimum pour écouter les parents, échanger autour de l’enfant, et répondre au besoin éventuel d’informations. Cette consultation est un événement important pour les parents, qui permet de faire le point sur le devenir neurodéveloppemental de leur enfant après une hospitalisation néonatale longue.

10Pendant l’hospitalisation, les parents posent des questions mais la naissance prématurée est vécue comme un drame et leur questionnement s’oriente davantage sur le risque vital et le pronostic global (risque ou non de handicap). Les parents sont alors informés du suivi du développement psychomoteur de leur enfant prévu après la sortie de l’hôpital. Un document, expliquant les buts et objectifs de cette consultation, leur est remis avec le « cahier de vie [2] ». Après l’hospitalisation, les questions changent et s’orientent sur le devenir de l’enfant et son intégration dans un projet de vie. L’inquiétude est parfois présente, générée par la situation d’évaluation.

Déroulement de la consultation

11La consultation se passe en trois temps :

  • la psychomotricienne réalise l’examen neuropsychomoteur ;
  • le pédiatre pratique l’examen clinique ;
  • les observations sont mises en commun pour les restituer aux parents dans un langage accessible : le compte rendu de la consultation est dicté devant les parents.
Le pédiatre commence la consultation en retraçant l’histoire néonatale de l’enfant : le terme, le poids de naissance, la durée du séjour en réanimation et la durée de ventilation artificielle, les problèmes médicaux éventuels (opérations, infections, etc.), les examens neurologiques (échographie transfontanellaire, électro-encéphalogramme, etc.).

Le syndrome de l’ancien prématuré

Bergès et Lézine ont décrit, en 1969, « le syndrome de l’ancien prématuré » qui correspond à un ensemble de troubles (Bergès et coll., 1969). Ces troubles peuvent s’observer précocement et prendre la forme de troubles de l’alimentation, de troubles du sommeil, de décharges motrices, de troubles du comportement (colères, spasmes du sanglot, instabilité motrice). Mais ils peuvent aussi s’observer plus tardivement, se traduisant par une maladresse motrice, une dyspraxie, des troubles du schéma corporel, des difficultés de repérage spatio-temporel. On peut observer également des troubles dans l’acquisition de la propreté, des difficultés scolaires, des troubles cognitifs et des troubles du comportement (troubles attentionnels, instabilité, irritabilité, agressivité, anxiété). Ces troubles semblent être fonction du degré de la prématurité et de la durée du séjour hospitalier. Souvent, ils ne sont soupçonnés qu’au moment des apprentissages scolaires.

12La consultation permet de contenir les émotions suscitées par le récit dans l’après-coup de l’histoire médicale néonatale qui peut réactiver le traumatisme de la naissance et les inquiétudes liées à l’hospitalisation de l’enfant. Comment les parents ont-ils vécu cette période ? Quelles représentations en ont-ils gardées ? Comment s’est passé le retour au domicile ? Le médecin pose des questions sur l’alimentation, les éventuelles maladies (bronchiolites, gastroentérites, etc.), vérifie les examens de contrôles. L’enfant est déshabillé par les parents. La psychomotricienne ou la kinésithérapeute réalise une évaluation détaillée et commentée du développement de l’enfant et passe le relais au médecin : prise des mensurations de l’enfant (poids, taille, périmètre crânien), examen médical.

13Les parents peuvent être tour à tour spectateurs et acteurs de l’examen de leur enfant en sollicitant ses capacités à jouer ou en le calmant. Le regard que nous portons sur le bébé et notre attention soutiennent les parents dans leur capacité d’observation du développement de leur enfant. Ils découvrent leur bébé dans de nouvelles situations motrices, s’étonnent de ses compétences. L’évaluation devient pour eux un support identificatoire : elle n’est pas un verdict où tout serait dit et fixé. Nous gardons toujours à l’esprit la notion de convalescence des bébés à risque, avec de possibles signes transitoires pendant la première année. En fonction de l’histoire néonatale (durée d’hospitalisation, interventions chirurgicales, séquelles respiratoires), le temps de récupération est plus long et l’évaluation différente. La consultation permet de mettre des mots sur les particularités du développement global du bébé : elle aide les parents à percevoir où en est l’enfant dans les différentes étapes de son développement. De plus, la notion d’âge corrigé perturbe souvent les parents en modifiant le calendrier des acquisitions psychomotrices.

Examens des 4 mois et 1 an d’âge corrigé

14Les plus petits sont évalués sur une table d’examen médical face au miroir, les parents placés à côté de l’enfant. L’âge corrigé de 4 mois correspond au passage d’une motricité réflexe à une motricité plus organisée, volontaire :

  • maintien de la tête, réactions posturales globales harmonieuses avec participation de l’enfant (retournement, tiré-assis latéral, redressement, suspension, etc.) ;
  • début de coordination oculo-manuelle, préhension volontaire au centre et latéralement ;
  • contact et poursuite visuelle facilement obtenue, recherche de la relation (sourires, gazouillis).
Pour les plus grands, âgés d’un an, l’évaluation neurodéveloppementale se réalise sur un tapis face au miroir, l’examen médical sur la table d’examen. Cette deuxième consultation permet de s’assurer de la mise en place des grandes étapes du développement psychomoteur avec l’acquisition du retournement, de la station assise, d’un mode de déplacement pour la majorité (en rampant, à quatre pattes) et les activités de coordinations oculo-manuelles : passage des objets d’une main à l’autre, déliement de l’index, action de vider-remplir.

Examens des 2 et 3 ans d’âge corrigé

15Le suivi à 2-3 ans s’oriente davantage vers une attention particulière sur les fonctions visuomotrices et visuospatiales, les praxies, le langage, l’organisation ludique avec la mise en place de stratégies et l’aisance corporelle dans les déplacements et les situations motrices. À 4 mois et un an, les inquiétudes concernent davantage les séquelles motrices et neurosensorielles. L’inquiétude sur l’acquisition de la marche étant passée, les parents seront attentifs à la mise en place des fonctions supérieures comme le langage, les activités éducatives et les capacités de concentration de l’enfant en vue d’une intégration future à l’école maternelle. Chaque étape est très importante et chaque consultation peut soulever les mêmes inquiétudes sur d’éventuelles difficultés du développement en lien avec la naissance prématurée. Pour l’évaluation des enfants âgés de 2 et 3 ans, nous utilisons, en complément de notre évaluation neuropsychomotrice, le test de Brunet-Lézine Révisé – « Évaluation du développement de la première enfance », qui nous donne un quotient de développement [3] dans 4 domaines :

  • la motricité globale (étude des mouvements de l’enfant en position dorsale, ventrale, assise et debout) ;
  • la coordination oculomotrice (étude de la préhension et du comportement de l’enfant avec les objets) ;
  • le langage (étude des fonctions de compréhension et d’expression),
  • les relations sociales (prise de conscience de soi, relations avec autrui, adaptations sociales).

Principes de l’évaluation neuropsychomotrice

Objectifs de l’évaluation

16L’objectif est d’évaluer le plus précisément possible le niveau psychomoteur de l’enfant ainsi que la qualité de la relation parents-enfant. Nous utilisons l’observation clinique qui nous renseigne sur les capacités de l’enfant, sur l’organisation de ses compétences, c’est-à-dire l’harmonisation, la richesse et la fantaisie de ses mouvements. L’évaluation neuropsychomotrice apprécie la spécificité dynamique du bébé en mettant en évidence ses dysfonctionnements, mais surtout en s’efforçant de repérer ses compétences et en faisant émerger ses potentialités. Des repères chronologiques sont bien sûr nécessaires pour dépister un retard dans les acquisitions, mais la qualité, la dynamique, le déroulement spatial et temporel du mouvement ainsi que le passage d’une position à l’autre, l’analyse du développement des coordinations, la variabilité et la richesse des stratégies mises en jeu dans les étapes de développement, sont davantage à prendre en compte. Dans un souci de prévention, cette consultation permet de repérer très tôt des signes prédictifs de risque : troubles du tonus (tendance hypotonique ou hypertonique), signes d’excitabilité, troubles visuels, etc. L’évaluation éclaire également la dynamique relationnelle entre le bébé et ses partenaires, reflet du développement psychoaffectif du bébé [4].

17L’intérêt d’un tel examen est de faire le point ensemble sur les possibilités interactives et développementales de l’enfant. On appréciera la qualité de son engagement moteur, ludique, social et émotionnel. Pendant la consultation, l’histoire de l’hospitalisation de l’enfant, la séparation, les inquiétudes médicales sur son devenir reviennent avec émotion. La notion « d’ancien prématuré » semble bien devoir marquer à vie cet enfant, véritable part blessée des parents. Si le traumatisme de la naissance prématurée n’est pas surmonté par les parents, elle expose l’enfant à des perturbations dans les interactions. Pleurs incessants, coliques, troubles du sommeil, mais aussi signes d’évitement relationnels précoces et difficultés de séparation-individuation peuvent se retrouver avec des tensions corporelles. La dimension du développement psycho-affectif s’intègre ainsi à l’évaluation clinique. L’observation des ajustements tonico-émotionnels entre le bébé et ses parents, et le bébé et l’examinateur, nous renseigne sur la qualité des interactions.

Attitude en cas d’anomalie(s)

18Si des signes cliniques apparaissent à la consultation dès 4 mois d’âge corrigé (comme une tendance hypotonique ou hypertonique, des signes d’excitabilité), nous proposons de revoir l’enfant un ou deux mois plus tard. Notre objectif est de clarifier le diagnostic entre les signes transitoires présents dans la première année de vie et les anomalies précoces du tonus. L’évaluation permet également de faire le diagnostic différentiel entre des anomalies du tonus d’origine neurologique et des inhibitions motrices d’origine psychique avec attitudes d’enraidissement corporel, sursauts, trémulations. Il n’est pas rare que l’enfant nous montre des compétences motrices et ludiques différentes au cours de la consultation. Le très jeune âge des enfants rend difficile ce diagnostic différentiel, d’où l’intérêt de les revoir. Par exemple, la qualité du regard au carrefour de signes neurologiques, relationnels et/ou cognitifs, est explorée tout au long de l’évaluation. Cet élément de compréhension nous oriente vers une guidance parentale plus adaptée. Si, lors des prochaines consultations, les signes neuromoteurs persistent, en fonction de leur gravité, nous adressons l’enfant soit vers une prise en charge libérale en kinésithérapie ou psychomotricité, soit vers un service spécialisé comme le camsp. Si, pendant la consultation, les parents exposent des difficultés comportementales du bébé (troubles alimentaires ou du sommeil, difficultés de séparation), nous proposons une orientation vers une consultation thérapeutique avec un pédopsychiatre ou un psychologue. Les liens avec les réseaux de suivi extra-hospitaliers sont malheureusement encore insuffisants et il conviendra à l’avenir de renforcer les échanges avec les médecins de ville, pmi et autres intervenants.

Conséquences de l’hospitalisation

19L’hospitalisation entraîne une séparation qui a des répercussions importantes aussi bien sur le comportement maternel que sur le développement de l’enfant. Après plusieurs mois d’hospitalisation, les parents, et surtout la mère, peuvent avoir des difficultés dans les ajustements corporels et relationnels au moment du retour au domicile. Les mères évoquent fréquemment une période dépressive d’effondrement psychique au moment du retour au domicile, signant le caractère traumatique de cette naissance. Nous sommes souvent amenés à proposer aux parents des conseils posturaux, d’installation, de détente corporelle et sur les modes de portage [5], en une action de guidance de la famille dans les soins quotidiens de l’enfant et de respect du développement psychomoteur.

20Quand des difficultés de séparation apparaissent au cours des consultations, nous conseillons une intégration dans un lieu d’accueil de la petite enfance (halte-garderie, maison verte) en vue de préparer la vie en collectivité et la rentrée scolaire.

Conclusion

21Ce temps de consultation partagé avec les parents est essentiel. Il est un complément indispensable aux nombreuses techniques mises en œuvre à la naissance de ces prématurés extrêmes. La lourdeur des soins de réanimation impose une évaluation à plus long terme pour s’assurer de la mise en place des différentes étapes du développement tant physique que psychique. Il permet souvent de dédramatiser des situations angoissantes après un séjour hospitalier long et de rassurer quant au devenir développemental de l’enfant. Il permet la continuité du lien établi lors de l’hospitalisation entre l’enfant, les parents et les soignants.

22Notre programme de suivi reste perfectible, notamment sur sa durée. Nous souhaiterions en effet pouvoir proposer des consultations jusqu’à la rentrée au cours préparatoire pour s’assurer de la bonne mise en place de la lecture et de l’écriture.

23Ce suivi pluridisciplinaire illustre la volonté de fournir des soins de qualité en équipe à ces extrêmes prématurés dont la survie n’est pas le seul objectif. La qualité de vie et l’accompagnement parental à long terme font aussi partie des soins aux prématurés.

Bibliographie

Bibliographie

  • Amiel-Tison, C. ; Grenier, A. 1985. Surveillance neurologique au cours de la première année de vie, Paris, Masson.
  • Berges, J. ; Lezine, I. ; Harrison, A. ; Boisselier, F. 1969. « Le syndrôme de l’ancien prématuré », Revue de Neuropsychiatrie Infantile, 17, 11, p. 719-779.
  • Dargassies Saint-Anne, 1979. Le développement neurologique du nouveau-né à terme et prématuré, Paris, Masson.
  • Larroque, B. ; Breart, G. ; Kaminski, M. ; Dehan, M. ; Andre, M. ; Burguet, A. ; Grandjean, H. ; Ledesert, B. ; Leveque, C. ; Maillard, F. ; Matis, J. ; Roze, J. C. ; Truffert, P. 2004. « Survival of very preterm infants: Epipage, a population based cohort study », Archives of Disease in Childhood - Fetal and Neonatal Edition, 89, 2, p. F139-44.
  • Mikkola, K. ; Ritari, N. ; Tommiska, V. ; Salokorpi, T. ; Lehtonen, L. ; Tammela, O. ; Paakkonen, L. ; Olsen, P. ; Korkman, M. ; Fellman, V. 2005. « Neurodevelopmental outcome at 5 years of age of a national cohort of extremely low birth weight infants who were born in 1996-1997 », Pediatrics, 116, 6, p. 1391-400.
  • Platt, M. J. ; Cans, C. ; Johnson, A. ; Surman, G. ; Topp, M. ; Torrioli, M. G. ; Krageloh-Mann, I. 2007. « Trends in cerebral palsy among infants of very low birthweight (<1500 g) or born prematurely (<32 weeks) in 16 European centres: a database study », The Lancet, 369, 9555, p. 43-50.
  • Robertson, C. M. ; Watt, M. J. ; Yasui, Y. 2007. « Changes in the prevalence of cerebral palsy for children born very prematurely within a population-based program over 30 years », Journal of the American Medical Association, 297, 24, p. 2733-2740.
  • Vaivre-Douret, L 1997. Précis théorique et pratique du développement moteur du jeune enfant, Paris, Elsevier.
  • Vanhaesebrouck, P. ; Allegaert, K. ; Bottu, J. ; Debauche, C. ; Devlieger, H. ; Docx, M. ; François, A., Haumont, D. ; Lombet, J. ; Rigo, J. ; Smets, K. ; Vanherreweghe, I. ; Van Overmeire, B. ; Van Reempts, P. 2004. « The epibel study: outcomes to discharge from hospital for extremely preterm infants in Belgium », Pediatrics, 114, 3, p. 663-675.
  • Wood, N. S. ; Marlow, N. ; Costeloe, K. ; Gibson, A. T. ; Wilkinson, A. R. 2000. « Neurologic and developmental disability after extremely preterm birth », epicure Study Group, New England Journal of Medicine, 343, 6, p. 378-84.

Mots-clés éditeurs : psychomoteur, relation, handicap, nouveau-né, mère-enfant, développement

Mise en ligne 27/05/2008

https://doi.org/10.3917/ep.038.0022

Notes

  • [1]
    L’âge corrigé correspond à l’âge qu’aurait l’enfant s’il était né à terme (9 mois). Il faut donc retrancher les mois de prématurité de l’âge réel (ou chronologique). Par exemple, un enfant né à 27 SA, soit 6 mois de grossesse, a 3 mois d’avance sur le terme. Lorsqu’il arrive à 6 mois d’âge chronologique, son âge corrigé est de 6-3 = 3 mois d’âge corrigé.
  • [2]
    Le cahier de vie est un document écrit individuel, illustré de photos de l’enfant. Il contient des informations sur l’évolution de l’enfant, son statut médical et les différents soins et interventions qui lui sont administrés. Il est destiné à l’enfant et à sa famille pour inscrire son histoire hospitalière.
  • [3]
    Le quotient de développement permet de situer les acquisitions de l’enfant par rapport au groupe d’enfants du même âge. Les quotients de développement ne sont pas donnés aux parents car la situation d’évaluation est toujours un moment particulier qui, en fonction de l’enfant (fatigabilité, irritabilité), ne semble pas refléter ses réelles possibilités.
  • [4]
    Pour l’évaluation neuro-psychomotrice, nous nous appuyons sur les travaux d’Amiel-Tison et Grenier (1985), Dargas-sies (1979) et Vaivre-Douret (1997). L’évaluation des compétences de l’enfant se fait par :
    • l’observation de l’activité spontanée et des capacités interactives ;
    • l’observation de la normalité neuropsycho-motrice au travers de l’examen du tonus passif et actif ;
    • les réactions posturales globales, en explorant les enchaînements posturaux selon les niveaux d’évolution motrice.
  • [5]
    Il existe différents modes de portage ou positions inhibitrices qui limitent les schèmes d’extension entraînant l’excitabilité et les pleurs de l’enfant. La position demi-assise et la position Bouddha sont souvent utilisées permettant un relâchement musculaire global et une attention soutenue de l’enfant en favorisant l’enroulement axial à partir des points de sécurité de base (tête-fesses).
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