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Article de revue

Explication d’un texte extrait de la deuxième conférence sur « La perception du changement »

(Oxford, 27 mai 1911)

Pages 60 à 69

Notes

  • [1]
    Cette explication de texte a été l’objet d’une communication lors d’une journée d’études « Henri Bergson » organisée à l’Université de Toulouse II – Le Mirail le 19 février 2013. Cette journée avait pour vocation d’aider les agrégatifs, Bergson étant au programme de l’écrit cette année.
  • [2]
    Henri Bergson, Lettre du 3 mai 1911 à Charles Péguy, in Mélanges, Paris, PUF, 1972, p. 883-884.
  • [3]
    Jacques Ricot, Leçon sur La perception du changement de Henri Bergson, Paris, PUF, 1998, p. 43.
  • [4]
    Henri Bergson, La Perception du changement, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2011, p. 19.
  • [5]
    Ibid.
  • [6]
    Ibid.
  • [7]
    Jacques Ricot, Leçon sur La perception du changement de Henri Bergson, op. cit., p. 43.
  • [8]
    Ibid., p. 46.
  • [9]
    Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. 19.
  • [10]
    Ibid.
  • [11]
    Henri Bergson, « Note sur les origines psychologiques de notre croyance à la loi de causalité », 4 août 1900, in Mélanges, op. cit., p. 424 sq.
  • [12]
    Ibid., p. 51.
  • [13]
    Henri Bergson, « Introduction à la métaphysique », in La Pensée et le Mouvant, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2009, p. 211.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    Henri Bergson, L’Évolution créatrice, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2007, p. 4.
  • [16]
    Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. 51.
  • [17]
    Ibid., p. XXIV.
  • [18]
    Henri Bergson, « Onze conférences sur “La personnalité” aux “Gifford lectures d’Edinburgh” », 21 avril-22 mai 1914, in Mélanges, op. cit., p. 1080.
  • [19]
    Ibid., p. 1074.
  • [20]
    Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2009, p 8.
  • [21]
    Henri Bergson, « Onze conférences sur « La personnalité » aux Gifford lectures d’Edinburgh », 21 avril-22 mai 1914, in Mélanges, op. cit., p. 1079.
  • [22]
    Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, op. cit., p. 185.
  • [23]
    Jean-Louis Vieillard-Baron, Bergson et le bergsonisme, Paris, Armand Colin, 1999, p. 72.
  • [24]
    Ibid.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Henri Bergson, Mélanges, op. cit., p. 353.
  • [27]
    Jean-Louis Vieillard-Baron, Bergson et le bergsonisme, op. cit., p. 72.
  • [28]
    « Nous appelons ici intuition la sympathie par laquelle on se transporte à l’intérieur d’un objet pour coïncider avec ce qu’il a d’unique et par conséquent d’inexprimable. », Henri Bergson, « Introduction à la métaphysique », in La Pensée et le Mouvant, op. cit., p. 181.
  • [29]
    Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, op. cit., p. 31.
  • [30]
    Voir la note d’Arnaud Bouaniche : « Dans DS, cette analyse s’approfondira à propos de l’émotion, elle-même mouvement pur analysé par Bergson à travers l’expérience musicale. Le propre de la musique est en effet de produire une émotion en elle-même “complète”, bien qu’elle ne se rapporte à aucun objet déterminé, émotion toute pure donc, dont l’être tient uniquement à son “intensité”, c’est-à-dire à l’épreuve affective qu’en fait le sujet à travers un changement qualitatif ; voir DS, p. 37. », Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. 50.
  • [31]
    Henri Bergson, Mélanges, op. cit., p. 844.
  • [32]
    « Écoutez la mélodie en fermant les yeux, en ne pensant qu’à elle, en ne juxtaposant plus sur un papier ou sur un clavier imaginaires les notes que vous conserviez ainsi l’une pour l’autre, qui acceptaient alors de devenir simultanées et renonçaient à leur continuité de fluidité dans le temps pour se congeler dans l’espace : vous retrouverez indivisée, indivisible, la mélodie ou la portion de mélodie que vous aurez replacée dans la durée pure. Or notre durée intérieure, envisagée du premier au dernier moment de notre vie consciente, est quelque chose comme cette mélodie. » Henri Bergson, Durée et Simultanéité, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », p. 103.
  • [33]
    Henri Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2007, p. 82.
  • [34]
    Jacques Ricot rapporte que Bergson avait abandonné l’image du « ronron continu » de la première version, qui lui avait valu quelques sarcasmes (Jacques Ricot, Leçon sur La perception du changement de Henri Bergson, op. cit., p. 104).
  • [35]
    Henri Bergson, Mélanges, op. cit., p. 774.
  • [36]
    Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, Paris, PUF, « Quadrige », 1986, p. 177.
  • [37]
    Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. XIX.
  • [38]
    Ibid., p. XX.
  • [39]
    Ibid.
  • [40]
    Ibid., p. 99.
  • [41]
    Gaston Bachelard, « Noumène et microphysique », in Recherches philosophiques, I, 1931-1932.

1Dans une lettre du 3 mai 1911 [1], Bergson confie qu’il traverse « une période de surmenage » [2], en raison de nombreux engagements : le 10 avril, il fait sa communication à Bologne sur « L’intuition philosophique », les 26 et 27 mai, il propose les conférences à Oxford sur « La perception du changement », le 29 mai, il s’entretient à Birmingham avec ses auditeurs sur les rapports entre « La conscience et la vie », sans oublier qu’à la même époque, il rédige la préface au Pragmatisme de William James, qui sera publiée sous le titre « Sur le pragmatisme de William James, Vérité et réalité ». Ces circonstances d’engagement intellectuel ne sont pas sans nous obliger à lire d’une certaine manière et en écho avec elles l’extrait d’une conférence que Bergson a choisi d’insérer dans son second volume d’essais et de conférences, La Pensée et le Mouvant, indiquant par là que ce texte prenait place dans des « écrits relatifs au travail de recherche, à la méthode » [3]. Comme l’indique Bergson, les deux conférences sur « La perception du changement » sont inséparables : alors que dans la première, il indique son projet de « saisir la réalité du changement dans un but spéculatif et pratique » à travers une méthode philosophique spécifique, la deuxième s’attache à la mettre en œuvre à travers l’intuition du changement à proprement parler. La transition entre la première et la deuxième conférence est à ce titre très éclairante. Si l’on arrivait à ressaisir, explique Bergson, le « changement et la durée dans leur mobilité originelle » [4], alors « par l’extension de notre faculté de percevoir » [5], nous « rétablirions la continuité dans l’ensemble de nos connaissances » [6]. Le texte proposé s’inscrit donc dans ces enjeux épistémologiques, qui revisitent le problème philosophique classique : « y a-t-il sous le changement un être permanent substantiel qui ne change pas, et si tel n’est pas le cas, sommes-nous voués à être emportés dans un flux insaisissable et inconsistant ? » [7]. Comme souvent, la pensée bergsonienne refuse les termes d’un problème mal posé : Bergson montre que le changement n’appelle pas un support, c’est-à-dire une substance dont il ne serait que le reflet accidentel et superficiel, et qu’il n’est pas dissous dans la multiplicité des états éparpillés. [8] Le changement est l’objet d’une expérience conquise au terme d’un effort, voire d’une expérimentation où d’ailleurs l’artiste (évoqué dans la première conférence) a précédé le philosophe. Alors que quelques pages plus haut, Bergson a posé ce fameux point : « Il y a des changements, mais il n’y a pas, sous le changement, de choses qui changent », notre texte explicite les éléments fondamentaux qui conduisent à une telle position, en interrogeant les rapports au sein même du changement et à partir du changement, entre substantialité, indivisibilité et continuité, et, partant, en appréhendant fondamentalement la perception du changement. C’est à partir de ce questionnement que nous expliquerons les deux moments qui nous semblent organiser notre texte : un premier moment (l. 1 – l. 13) au cours duquel la perception du changement et de sa substantialité trouve dans « la vie intérieure » la possibilité d’un lieu privilégié d’étude, un second moment (l. 14 – l. 33), qui, à partir de la perception du temps comme indivisible montre comment cette perception même de la durée vraie est de nature à poser une réalité comme mobilité et un changement sans choses qui changent, ce que Bergson s’était proposé de mettre à l’épreuve et de démontrer.

2Alors que Bergson vient de montrer que, par la vue même et selon ce que montre la science physique et plus particulièrement la microphysique, le mouvement « n’exige pas un véhicule » [9], que le changement n’exige pas une substance, et que le « prétendu mouvement d’une chose n’est en réalité qu’un mouvement de mouvements » [10], il s’apprête dans un premier moment de ce texte à appréhender dans la « vie intérieure » même la « substantialité du changement ».

3Bergson commence par mettre en évidence le lieu où la perception du changement est la plus perceptible : « Mais nulle part la substantialité du changement n’est aussi visible, aussi palpable, que dans le domaine de la vie intérieure ». Cette première phrase montre ce qui peut engager la meilleure perception de la nature même de ce « fait primitif » qu’est le changement, comme en rendent compte les adjectifs modalisés « aussi visible », « aussi palpable », rappelant notamment l’organe de la vue – problématique d’ailleurs – dans la perception de la mobilité, mais témoignant ici d’un sens plus figuré, déjà en route vers une intuition. Cela dit, cette articulation de la vue et du toucher n’est pas anodine dans le texte de Bergson, lui qui l’envisage comme origine de notre croyance à la causalité [11]. Bergson semble ici nous inviter à une autre articulation entre la vue et le toucher, réformée de fait par cet objet de perception qu’est la vie intérieure. Il s’agit, pour Bergson, de poser une « substantialité » qui répond à une manière traditionnelle d’envisager le problème du changement. Le temps, mis au centre de la philosophie, n’est pas « une réalité fuyante et inconsistante » [12]. Le dire, c’est déjà entrer « dans le domaine de la vie intérieure », puisque la conservation du temps dans la conscience, ce rapport entre la conscience et le temps sont ce par quoi, en réponse à la philosophie de Spencer, Bergson en était arrivé à poser le concept de durée. Il faut aussi prendre la mesure dans cette première phrase de la nécessité pour Bergson de prévenir toute confusion de sa philosophie avec celle d’Héraclite. Dans son « Introduction à la métaphysique » (1903), Bergson avait déjà montré la réalité comme mobilité, non sans faire lien entre la vie intérieure et la réalité extérieure :

4

Il y a une réalité extérieure et pourtant donnée immédiatement à notre esprit. […] Cette réalité est mobilité. Il n’existe pas de choses faites, mais seulement des choses qui se font, pas d’états qui se maintiennent, mais seulement des états qui changent. [13]

5Il faut alors prêter attention à cette note de Bergson :

6

Encore une fois, nous n’écartons nullement par là la substance. Nous affirmons au contraire la persistance des existences. Et nous croyons en avoir facilité la représentation. Comment a-t-on pu comparer cette doctrine à celle d’Héraclite ? [14]

7Cette substantialité du changement n’est pas nouvelle dans l’œuvre de Bergson, puisqu’on la rencontre au chapitre II et III de Matière et Mémoire et au début du chapitre premier de L’Évolution créatrice, où l’on peut trouver la genèse même de ce passage : « Mais quant à la vie psychologique, telle qu’elle se déroule sous les symboles qui la recouvrent, on s’aperçoit sans peine que le temps en est l’étoffe même. Il n’y a d’ailleurs pas d’étoffe plus résistante ni plus substantielle. Car notre durée n’est pas un instant qui remplace un instant : il n’y aurait alors jamais que du présent, pas de prolongement du passé dans l’actuel, pas d’évolution, pas de durée concrète. » [15] De fait, si la perception de notre vie intérieure, rappelle Arnaud Bouaniche, « c’est-à-dire de notre propre personne dans la multiplicité de ses états, possède un privilège selon Bergson, c’est parce qu’elle nous donne immédiatement le temps comme un être. La substantialité du temps tient en effet à ce qu’il résiste à sa disparition (en quoi il n’est pas un simple passage), en vertu d’un acte de conservation sui generis accompli à chaque instant par notre conscience qui engendre par là continuellement ce que Bergson appelle la « durée ». » [16] Bergson choisit donc de maintenir la notion de substance et la substantialité du changement renvoie à son auto conservation, non pas en vertu d’un principe de permanence comme chez Kant, mais d’une synthèse immanente qui fait que les états de l’univers ou d’une conscience résistent à leur disparition en s’organisant « dans un acte de mémoire qui fait leur durée » [17].

8Bergson en vient alors naturellement à parler des théories de la personnalité, lui qui montrait trois ans plus tard en 1914, dans la septième conférence d’Édimbourg, que la personnalité est « une continuité de changement » [18], et qu’on pouvait considérer la personnalité – ainsi qu’il le montre au début de ses conférences – « comme le problème central de la philosophie ». Faut-il rappeler que cette même année, en 1910-1911, Bergson donne un cours au Collège de France sur « La théorie de la personne » ? En parlant des « théories et des contradictions auxquelles ont abouti les théories de la personnalité », Bergson évoque ce qu’il approfondira dans sa deuxième conférence d’Édimbourg à travers l’histoire du problème fondamental de la personnalité, dont il a pu voir la forme d’élaboration la plus pure chez Plotin :

9

Le problème qui se présentait à Plotin, et qui est resté le problème de la philosophie traditionnelle, était donc celui-ci : comment notre personne peut-elle être d’une part une ou simple, et d’autre part multiple ? [19]

10Les expressions mêmes de notre texte montrent cette « contradiction », entre « une série d’états psychologiques distincts, chacun invariable, qui produiraient les variations du moi par leur succession même » et par ailleurs « un moi, non moins invariable, qui leur servirait de support ». Il faut alors se rappeler ce que montre Bergson dans la première partie de l’Introduction de La Pensée et le Mouvant lorsqu’il dit, dans une espèce de jeu de mots, que, parce que des problèmes métaphysiques avaient été mal posés, il n’y avait pas lieu de les croire « éternels » [20]. Autrement dit, il faut accorder toute son importance au verbe « représenter ». Il s’agit bien d’un problème de représentation, et plus particulièrement de la représentation de l’« invariable ». Cet « invariable » revient deux fois dans le texte, à travers le double couple « invariable »/« non moins invariable » et, par ailleurs « ne durant ni l’une ni l’autre ». Or, cette double invariabilité, de fait contradictoire, vient d’un défaut d’intuition de la durée du moi, et sans doute plus précisément d’une personnalité à l’œuvre dans le sens où, comme nous l’avons montré dans des travaux antérieurs, la pensée bergsonienne de la personnalité est à même de dépasser des catégories, notamment métaphysiques et psychologiques. Dans sa septième conférence d’Édimbourg, Bergson montrera que l’élucidation du « vieux problème de la personnalité », nous pouvons nous attendre à la trouver dans les idées de « changement substantiel » et de « durée indivisible ». Les problèmes re-posés par Bergson apparaissent manifestement comme un détour pour penser le rapport entre substantialité, indivisibilité et continuité. Dans une articulation assez forte, liée à certains égards à l’oralité de la conférence, Bergson renvoie, pour parler de la personnalité, à une double image, celle du théâtre et celle de la musique. Dans un premier temps, Bergson remet en cause le substratum rigide d’un moi, comme support, comme scène, où défileraient des états distincts comme des acteurs. Il y a là pour Bergson l’occasion de parler – sans insister et comme par petites touches – de la substantialité, puisqu’il ne faut pas oublier que « substratum » est le participe passé nominalisé de sub-sternere, « ce qui s’étend, ce qui se trouve en dessous ». L’image du théâtre n’est pas étrangère, par ailleurs, à la question de la personne, puisque le prosonon ou persona désignait chez les Anciens le masque que portaient les acteurs de théâtre, ce qui leur permettait de montrer l’unité du caractère du rôle qu’ils jouaient dans l’ensemble de la représentation et de s’en servir comme d’un porte-voix. Or, c’est bien ici cette unité quasiment théâtrale du moi qui est interrogée par Bergson. Il n’y a pas de moi au-dessous des états du moi : c’est précisément ce qui conduit Bergson à poser la continuité de changement propre à la personnalité. Dans le recours à une deuxième image, « la mélodie ininterrompue de notre vie intérieure », l’ouïe semble se substituer alors au défaut de la vue, avec l’image d’une mélodie continue, rendant compte d’une personnalité où se trouvent mises en lien la continuité, l’indivisibilité, la substantialité :

11

[…] cette continuité de changement est indivisible, dira Bergson dans la septième conférence d’Édimbourg de 1914, elle est tout d’une pièce, d’un bout à l’autre de la totalité de l’existence de la conscience ; et cette indivisibilité constitue sa substantialité. [21]

12De fait, l’indivisibilité de la mélodie personnelle est liée à la totalité de l’« existence consciente ». Cependant, cette métaphore de la mélodie est l’objet ici d’une première évocation qui trouvera son prolongement dans le moment suivant. L’utilisation de ces images, dont on sait qu’elles sont pour Bergson l’occasion de s’opposer à la fois aux « idées générales » et aux « idées philosophiques », permettent « de diriger la conscience sur le point précis où il y a une certaine intuition à saisir. » [22] C’est manifestement à travers ces indices textuels que Bergson veut mettre à l’épreuve et soumettre à la recherche et à l’expérimentation d’un rapport au concret la substantialité même du changement.

13Au terme de ce premier moment de notre texte, se trouvent posée, à travers la vie intérieure et la personnalité, la perception même d’un changement propre à une réalité tant intérieure qu’extérieure. C’est par la continuité personnelle que l’on pourra percevoir la mobilité de la réalité. Reste pour Bergson à clarifier la question d’une durée entendue comme continuité indivisible de changement et de nature à nous faire éprouver et percevoir l’essence même de la réalité et du changement.

14Dans un second moment de ce texte, Bergson en arrive donc à la question de la perception d’une « durée vraie », fondamentale pour percevoir le changement et sa nature même, pour démontrer ce qu’il avait énoncé quelques paragraphes plus haut : « Il y a des changements, mais il n’y a pas, sous le changement, de choses qui changent ».

15De manière très logique et conséquente, ce que Bergson a posé au sujet de la personnalité vient éclairer dans un premier temps le concept de « durée vraie » (l. 10 – l. 12) : « C’est justement cette continuité indivisible de changement qui constitue la durée vraie. » Cette phrase est beaucoup plus problématique que l’on ne pourrait le croire à première vue. Tout d’abord, on peut comprendre cette position dans la logique même du texte en disant que ce caractère indivisible de la durée est lié à l’observation intérieure de ma conscience. De fait, cette durée vraie, entendue comme continuité indivisible, suppose de penser en durée, hors de toute synthèse intellectuelle pouvant la dénaturer. Cette continuité de la durée, comme l’explique Jean-Louis Vieillard-Baron, « est une dynamique antérieure à toute synthèse, ce que Merleau-Ponty retrouvera dans son étude de la perception. » [23] Cette continuité de la durée est bien vraie « en ce qu’elle n’est pas un simple concept formel s’opposant à celui de la discontinuité. Elle est mémoire intégrant l’antérieur et le postérieur et s’opposant à l’instantané » [24]. Cependant, ce passage fait quelque peu problème, parce que la continuité de la durée comporte pourtant à certains égards de la discontinuité, rappelle Jean-Louis Vieillard-Baron. En effet, penser la vie en durée suppose de la penser comme élan, différenciation, arrêt, « processus actif susceptible d’ondulations infinies, ne se fixant jamais dans des objets » [25]. D’ailleurs, dans un « Compte rendu de la genèse de l’idée de temps de G. Guyau » de 1891, Bergson précisait déjà : « Supposer un objet invariable et en quelque sorte extérieur à la conscience » [26] « devient contradictoire dès que l’on pense en durée » [27], ce qui est assez proche des propos de notre texte. Nous sommes vraiment, dans ces premières lignes du second moment de notre texte, dans cette situation où Bergson introduit implicitement la problématique expérience qu’est penser en durée. Cela dit, Bergson indique qu’il ne souhaite pas approfondir, ayant, dit-il, traité cette question ailleurs : on peut penser au chapitre II de l’Essai, où l’on retrouve les images proches du « bercement » et de la « mélodie », mais il faut préciser, comme le rappelle Arnaud Bouaniche, que l’insistance sur le changement dans la durée se fait plus nette à partir de L’Évolution créatrice. En fait, Bergson souhaite insister davantage sur le fait que la durée aille de pair avec cet objet particulier de perception qu’est le temps comme « indivisible ». L’objet de perception engage d’ailleurs ici le mode de perception. De manière à peine voilée, à travers « ceux qui voient dans cette durée « réelle » je ne sais quoi d’ineffable et de mystérieux », Bergson évoque des critiques récurrentes, et sans doute plus précisément les critiques toutes récentes de Berthelot, dans Un Romantisme utilitaire, qui paraît justement en 1911. Dans ce passage de « l’ineffable » et du « mystérieux » à « la chose la plus claire du monde », Bergson, une fois encore, travaille de manière implicite. Il ne citera pas l’intuition tout au long de cette seconde conférence, mais pourtant la sous-entend dans ce qu’elle comporte de coïncidence avec l’inexprimable [28]. Or, s’il y a bien un inexprimable, en réalité, conceptuel, cette appréhension de la durée n’est ni mystérieuse ni ineffable, parce que précisément on peut la suggérer par des images. De fait, on assiste bien dans ce texte à une légitimation réciproque de l’appréhension de la durée vraie et d’un détour par l’image. Cependant, une difficulté subsiste : il ne faudrait pas croire que l’intuition est immédiatement claire : Bergson rappelle qu’elle « commence d’ordinaire par être obscure » [29]. C’est donc une incitation à un effort que propose ici Bergson, cette union du voir et du vouloir qui va précisément porter la considération de la durée dans son indivisibilité. C’est cet effort-là de perception, renvoyant tacitement à un effort d’intuition, qui va pouvoir éclairer son objet et lui enlever sa dimension « mystérieuse ».

16En fait, pour aller plus avant dans la perception de cet indivisible, il est nécessaire pour Bergson d’expliciter le concept de « succession » (l. 13 – l. 20). La durée continue ici à être appréhendée par un travail de négation. Après une indivisibilité relevant de l’indécomposable, la succession exclut la juxtaposition, la simultanéité, le découpage de l’« avant » et de l’« après ». Le nouveau détour par la mélodie – passage dans ce texte de l’image à la réalité même de la mélodie – donne à percevoir « la plus pure impression de succession », preuve pour Bergson que l’on puisse approcher cette succession réelle. L’exemple de la musique, comme le rappelle Arnaud Bouaniche, est récurrent dans l’œuvre de Bergson pour parler d’un changement pur, c’est-à-dire d’un changement sans quelque chose qui change [30]. On peut ici voir, dans ce détour par la mélodie, la mise en évidence de l’ouïe comme sens du temps, par rapport à la vue qui serait plutôt le sens de l’espace, manière pour Bergson de poser la nécessité de s’adresser à l’ouïe pour apprendre la perception du changement. Ne pourrait-on pas penser ici au Bergson, fils de musicien, mélomane, admirateur de Debussy, dont la musique était pour lui « une musique de la « durée » par l’emploi de la mélodie continue qui accompagne et exprime le courant unique et ininterrompu de l’émotion dramatique » [31] ? Ce détour par la mélodie pour exprimer l’intuition de la durée sera d’ailleurs repris par Bergson en 1922 [32] dans Durée et simultanéité. La réserve « et pourtant » montre que cette succession musicale vient d’une « continuité » et d’une « impossibilité de la décomposer ». Le « découpage en notes distinctes » trouve son origine dans notre apport d’« images spatiales », qui engage le fait d’imprégner la « succession de simultanéité ». Les « images spatiales » ne conviennent pas, parce que le temps n’est pas de l’espace – où il y a distinction nette de parties extérieures les unes aux autres – et que dans ce cas-là de perception d’une simultanéité, Bergson avait dit dans l’Essai, qu’il y a « intersection du temps avec l’espace » [33]. Notre intérêt courant nous détourne alors, dit Bergson, du « bourdonnement ininterrompu de la vie profonde » [34], seule image s’opposant dans ce passage aux « images spatiales », et elle est bien nécessaire puisque seule, la qualité des images permet, ainsi que nous l’avons dit plus haut, à la « durée vraie » d’échapper à l’ineffable. La dernière phrase du deuxième paragraphe, dans sa densité, mériterait alors beaucoup d’attention : « c’est grâce à elle [la durée vraie] que prennent place dans un seul et même temps les changements plus ou moins longs auxquels nous assistons en nous et dans le monde extérieur. » La nature même de la durée permet donc que des changements « prennent place », et que nous pensions selon le changement, alors que nous en sommes spectateurs et percevants « en nous et dans le monde extérieur », ce qui n’est pas sans rappeler la fin de Matière et Mémoire, où Bergson montre que la durée intérieure peut être étalon d’une échelle de durées, ce qui n’est pas sans rappeler également l’objet de L’Évolution créatrice, dont Bergson disait qu’il était de « montrer que le Tout est de même nature que le moi, et qu’on le saisit par un approfondissement de plus en plus complet de soi-même. » [35] Nous sommes ainsi amenés dans ce texte vers la perception d’un changement lié au moi et aux objets extérieurs.

17Le dernier paragraphe, à partir d’une formule qui relève d’un résumé conclusif condensé, montre que « la réalité est la mobilité même » et que cette perception s’applique tant au « dedans » qu’au « dehors ». Plus encore, la durée vécue fait comprendre la mobilité et la signification du changement ; elle oblige l’abandon d’une substance immuable. En note, Bergson avait indiqué plus haut, au sujet de cette formule déjà énoncée, que tous les malentendus « proviennent de ce qu’on a abordé les applications de notre conception de la durée réelle avec l’idée qu’on se faisait du temps spatialisé. » On pourrait alors penser que cette substance renvoie à la « permanence des phénomènes », à ce que Kant appelait substantia phænomenon, la substance immanente aux phénomènes et non pas sous-jacente ou encore moins transcendante à ceux-ci, mais le texte kantien tendrait à nous détourner de cette hypothèse :

18

Tous les phénomènes contiennent quelque chose de permanent (substance) considéré comme l’objet lui-même, et quelque chose de changeant, considéré comme une simple détermination de cet objet, c’est-à-dire d’un mode d’existence de l’objet. [36]

19(Première analogie de l’expérience). Cependant Bergson va plus loin que Kant qui refusait la chose en soi. Bergson refuse la chose et même l’objet, par ce que dans leur identité même ils comportent de spatialisation et, sans doute plus précisément, d’images spatiales. L’originalité de cette thèse, explique Arnaud Bouaniche, consiste à soutenir qu’il n’y a pas « besoin d’ajouter à la succession subjective des phénomènes un schème de la permanence pour lui donner une consistance. » [37] Des enjeux métaphysiques sont présents, mais dans un point de vue métaphysique revu par la pensée bergsonienne : « Si cette thèse est bien métaphysique, explique Arnaud Bouaniche, c’est au sens où tout changement, et pas seulement le nôtre, celui de notre conscience, mais aussi par exemple celui d’une feuille qui tombe, d’un corps qui se blesse ou de l’univers dans son ensemble, possède un passé, autrement dit une durée. » [38] Se trouve donc ici dépassée, rappelle-t-il, une position kantienne, dans son versant épistémologique, à travers une théorie de la connaissance exposée dans les « analogies de l’expérience », par l’intermédiaire de la permanence comme condition du changement, mais aussi à travers un versant dialectique de la doctrine, à travers une critique de la substantialité propre à la personne [39]. Plus encore, il faudrait sans doute revenir vers l’argument microphysique pour commenter ce rapport entre réalité et mobilité. Si une tache colorée n’est qu’une série d’oscillations, dispensant de l’hypothèse d’un mobile support de la couleur, les corpuscules de l’infiniment petit ne sont qu’un support superflu et, pour Bergson et à partir de cet exemple, il a autant de raison de dire que toute réalité est mobilité que d’énoncer que la mobilité est réalité [40]. Le mouvement et le changement en ressortent substantiels. D’ailleurs cette position ne cessera de se confirmer pour Bergson, qui invitera plus tard dans une note du début de La Pensée et le Mouvant à prendre connaissance d’un texte de Bachelard, et précisément d’un extrait de « Noumène et microphysique » :

20

Inutile de pousser l’analyse jusqu’à isoler à tous les points de vue un objet unique, car il semble bien que dans le monde de la microphysique l’unique perde ses propriétés substantielles. Il n’y a alors des propriétés substantielles qu’au-dessus – et non pas audessous – des objets microscopiques. La substance de l’infiniment petit est contemporaine de la relation. [41]

21Bergson peut ainsi maintenant revenir vers cette formulation radicale énoncée plus haut : « […] il y a du changement », mais il « n’y a pas de choses qui changent ». Le changement est tout : il n’y a pas de support au changement. Bergson ne dissout pas la notion de substance, puisqu’il pose la « substantialité du changement », qui introduisait d’ailleurs notre texte.

22Pour conclure, nous dirons que ce texte apparaît comme une invitation à expérimenter la perception du changement, par la musique, mais aussi par une pensée en durée qui ne donne pas toujours son nom. Cette manière de revisiter le problème classique de la substance et du changement aboutit ici à la vérification d’une des formules sans doute les plus fortes de la pensée bergsonienne : il y a du changement, mais il n’y a pas de choses qui changent. Bergson est ici sur une ligne de crête et se défendra dans « De la position des problèmes » d’une justification de l’instabilité : « Autant vaudrait s’imaginer que le bactériologiste nous recommande les maladies microbiennes quand il nous montre partout des microbes. […] Autre chose est un principe d’explication, autre chose une maxime de conduite ». Bergson n’est pas certain de devoir conseiller le changement pur aux sociétés humaines. Reste cette perspective épistémologique, philosophique, scientifique, posée par ce concept fondamental de continuité, et posant la perception, comme perception du changement, en nous et hors de nous, en lien avec une intuition de la durée, et explicitant une survivance du passé dans le présent.

23

Mais nulle part la substantialité du changement n’est aussi visible, aussi palpable, que dans le domaine de la vie intérieure. Les difficultés et contradictions de tout genre auxquelles ont abouti les théories de la personnalité viennent de ce qu’on s’est représenté, d’une part, une série d’états psychologiques distincts, chacun invariable, qui produiraient les variations du moi par (5) leur succession même, et d’autre part un moi, non moins invariable, qui leur servirait de support. Comment cette unité et cette multiplicité pourraient-elles se rejoindre ? comment, ne durant ni l’une ni l’autre – la première parce que le changement est quelque chose qui s’y surajoute, la seconde parce qu’elle est faite d’éléments qui ne changent pas – pourraient-elles constituer un moi qui dure ? Mais la vérité est qu’il n’y a ni un substratum rigide immuable ni des états distincts (10) qui y passent comme des acteurs sur une scène. Il y a simplement la mélodie continue de notre vie intérieure, – mélodie qui se poursuit et se poursuivra, indivisible, du commencement à la fin de notre existence consciente. Notre personnalité est cela même.
C’est justement cette continuité indivisible de changement qui constitue la durée vraie. Je ne puis entrer ici dans l’examen approfondi d’une question que j’ai traitée ailleurs. Je me bornerai (15) donc à dire, pour répondre à ceux qui voient dans cette durée « réelle » je ne sais quoi d’ineffable et de mystérieux, qu’elle est la chose la plus claire du monde : la durée réelle est ce que l’on a toujours appelé le temps, mais le temps perçu comme indivisible. Que le temps implique la succession, je n’en disconviens pas. Mais que la succession se présente d’abord à notre conscience comme la distinction d’un « avant » et d’un « après » juxtaposés, c’est ce que je ne (20) saurais accorder. Quand nous écoutons une mélodie, nous avons la plus pure impression de succession que nous puissions avoir, – une impression aussi éloignée que possible de celle de la simultanéité, – et pourtant c’est la continuité même de la mélodie et l’impossibilité de la décomposer qui font sur nous cette impression. Si nous la découpons en notes distinctes, en autant d’« avant » et d’« après » qu’il nous plaît, c’est que nous y mêlons des images spatiales et (25) que nous imprégnons la succession de simultanéité : dans l’espace, et dans l’espace seulement, il y a distinction nette de parties extérieures les unes aux autres. Je reconnais d’ailleurs que c’est dans le temps spatialisé que nous nous plaçons d’ordinaire. Nous n’avons aucun intérêt à écouter le bourdonnement ininterrompu de la vie profonde. Et pourtant la durée réelle est là. C’est grâce à elle que prennent place dans un seul et même temps les changements plus ou moins longs (30) auxquels nous assistons en nous et dans le monde extérieur.
Ainsi, qu’il s’agisse du dedans ou du dehors, de nous ou des choses, la réalité est la mobilité même. C’est ce que j’exprimais en disant qu’il y a du changement, mais qu’il n’y a pas de choses qui changent.
Henri Bergson, La perception du changement, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2011, p. 27-29.

Notes

  • [1]
    Cette explication de texte a été l’objet d’une communication lors d’une journée d’études « Henri Bergson » organisée à l’Université de Toulouse II – Le Mirail le 19 février 2013. Cette journée avait pour vocation d’aider les agrégatifs, Bergson étant au programme de l’écrit cette année.
  • [2]
    Henri Bergson, Lettre du 3 mai 1911 à Charles Péguy, in Mélanges, Paris, PUF, 1972, p. 883-884.
  • [3]
    Jacques Ricot, Leçon sur La perception du changement de Henri Bergson, Paris, PUF, 1998, p. 43.
  • [4]
    Henri Bergson, La Perception du changement, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2011, p. 19.
  • [5]
    Ibid.
  • [6]
    Ibid.
  • [7]
    Jacques Ricot, Leçon sur La perception du changement de Henri Bergson, op. cit., p. 43.
  • [8]
    Ibid., p. 46.
  • [9]
    Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. 19.
  • [10]
    Ibid.
  • [11]
    Henri Bergson, « Note sur les origines psychologiques de notre croyance à la loi de causalité », 4 août 1900, in Mélanges, op. cit., p. 424 sq.
  • [12]
    Ibid., p. 51.
  • [13]
    Henri Bergson, « Introduction à la métaphysique », in La Pensée et le Mouvant, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2009, p. 211.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    Henri Bergson, L’Évolution créatrice, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2007, p. 4.
  • [16]
    Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. 51.
  • [17]
    Ibid., p. XXIV.
  • [18]
    Henri Bergson, « Onze conférences sur “La personnalité” aux “Gifford lectures d’Edinburgh” », 21 avril-22 mai 1914, in Mélanges, op. cit., p. 1080.
  • [19]
    Ibid., p. 1074.
  • [20]
    Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2009, p 8.
  • [21]
    Henri Bergson, « Onze conférences sur « La personnalité » aux Gifford lectures d’Edinburgh », 21 avril-22 mai 1914, in Mélanges, op. cit., p. 1079.
  • [22]
    Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, op. cit., p. 185.
  • [23]
    Jean-Louis Vieillard-Baron, Bergson et le bergsonisme, Paris, Armand Colin, 1999, p. 72.
  • [24]
    Ibid.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Henri Bergson, Mélanges, op. cit., p. 353.
  • [27]
    Jean-Louis Vieillard-Baron, Bergson et le bergsonisme, op. cit., p. 72.
  • [28]
    « Nous appelons ici intuition la sympathie par laquelle on se transporte à l’intérieur d’un objet pour coïncider avec ce qu’il a d’unique et par conséquent d’inexprimable. », Henri Bergson, « Introduction à la métaphysique », in La Pensée et le Mouvant, op. cit., p. 181.
  • [29]
    Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, op. cit., p. 31.
  • [30]
    Voir la note d’Arnaud Bouaniche : « Dans DS, cette analyse s’approfondira à propos de l’émotion, elle-même mouvement pur analysé par Bergson à travers l’expérience musicale. Le propre de la musique est en effet de produire une émotion en elle-même “complète”, bien qu’elle ne se rapporte à aucun objet déterminé, émotion toute pure donc, dont l’être tient uniquement à son “intensité”, c’est-à-dire à l’épreuve affective qu’en fait le sujet à travers un changement qualitatif ; voir DS, p. 37. », Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. 50.
  • [31]
    Henri Bergson, Mélanges, op. cit., p. 844.
  • [32]
    « Écoutez la mélodie en fermant les yeux, en ne pensant qu’à elle, en ne juxtaposant plus sur un papier ou sur un clavier imaginaires les notes que vous conserviez ainsi l’une pour l’autre, qui acceptaient alors de devenir simultanées et renonçaient à leur continuité de fluidité dans le temps pour se congeler dans l’espace : vous retrouverez indivisée, indivisible, la mélodie ou la portion de mélodie que vous aurez replacée dans la durée pure. Or notre durée intérieure, envisagée du premier au dernier moment de notre vie consciente, est quelque chose comme cette mélodie. » Henri Bergson, Durée et Simultanéité, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », p. 103.
  • [33]
    Henri Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience, Paris, PUF, « Quadrige/Grands textes », 2007, p. 82.
  • [34]
    Jacques Ricot rapporte que Bergson avait abandonné l’image du « ronron continu » de la première version, qui lui avait valu quelques sarcasmes (Jacques Ricot, Leçon sur La perception du changement de Henri Bergson, op. cit., p. 104).
  • [35]
    Henri Bergson, Mélanges, op. cit., p. 774.
  • [36]
    Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, Paris, PUF, « Quadrige », 1986, p. 177.
  • [37]
    Henri Bergson, La Perception du changement, op. cit., p. XIX.
  • [38]
    Ibid., p. XX.
  • [39]
    Ibid.
  • [40]
    Ibid., p. 99.
  • [41]
    Gaston Bachelard, « Noumène et microphysique », in Recherches philosophiques, I, 1931-1932.
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