L’inceste, aujourd’hui regardé comme une violence sexuelle commise sur un enfant par un membre de sa famille, n’est pas un objet figé. Il a connu de nombreuses définitions au fil des siècles. Jusqu’à la Révolution, il est assimilé à un crime de luxure perpétré entre parents, et les deux membres du couple incestueux sont considérés comme criminels. La notion de violence étant absente de sa définition, seul le degré de parenté entre ces derniers sert de boussole à la justice pour apprécier la gravité du crime.
Ce crime d’inceste disparaît de la législation en 1791 pour réapparaître dans le Code pénal de 1810. Si ce dernier ne l’intègre pas nommément, il le redéfinit en revanche en le désignant comme circonstance aggravante des violences sexuelles. Entre 1810 et 1980, les violences incestueuses peuvent être qualifiées par le biais de trois incriminations : le viol (art. 332), l’attentat à la pudeur avec violence (art. 332) et l’attentat à la pudeur sans violence (art. 331). Ces crimes sont aggravés par l’article 333 lorsque leur auteur détient une autorité sur sa victime. Sont concernés les ascendants légitimes ou naturels de la victime, qu’elle soit mineure ou majeure, lorsqu’ils détiennent sur elle une autorité de droit conférée par le Code civil, mais aussi des beaux-parents, grands-parents ou concubins s’ils détiennent une autorité de fait admise par les conventions sociales.
Dans cet ensemble, le viol incarne la forme de violence sexuelle la plus grave. De 1810 à 1980, sa définition légale, qui ne varie guère – il s’agit d’une pénétration vaginale complète commise par un homme, par violence, contrainte ou surprise –, ne permet pas de criminaliser les actes perpétrés sur les garçons ou par des femme…