Cortisol, amygdale, néocortex, voilà des mots que nos grands-parents n’auraient jamais rencontrés dans un manuel d’éducation. Pour Édouard Gentaz, professeur en psychologie du développement, les prémices de cet intérêt pour les savoirs scientifiques remontent à une quarantaine d’années : « Les pouvoirs publics ont commencé à attendre des chercheurs qu’ils fournissent des connaissances scientifiques fondées sur des preuves pour optimiser la pratique des professionnels. Ce mouvement “evidence-based practice” est né dans le champ de la médecine avant de s’étendre à ceux de la psychologie et de l’éducation. » De nombreuses initiatives ont alors consacré cette ambition nouvelle de faire des sciences un support des politiques publiques, telle la création en 2018, en France, du Conseil scientifique de l’Éducation nationale.
Mais jusqu’où la science est-elle réellement à même de guider les attitudes des éducateurs et des parents ? Pour Franck Ramus, directeur de recherche au CNRS et spécialiste du développement cognitif de l’enfant, la réponse est simple : « La recherche a pour but d’identifier des liens causaux entre des phénomènes observables. Elle peut donc nous renseigner sur les mécanismes des interactions ou sur l’effet des pratiques éducatives, mais elle n’a aucune légitimité à prescrire des valeurs : qu’est-ce qu’une bonne éducation ? Que faut-il enseigner ? C’est à la société d’en décider ! »
Si le chercheur récuse tout scientisme dans la démarche evidence-based, il déplore néanmoins l’engouement aveugle pour les neurosciences …