Qui aurait cru que la parentalité ferait l’objet d’une controverse d’ampleur nationale alimentant des mois d’affrontements médiatiques ? C’est pourtant ce que nous a donné à voir l’année 2023. Il y a tout juste un an, la psychologue et psychanalyste Caroline Goldman lançait sa « croisade » contre les dérives de l’éducation dite positive. Multipliant les interviews dans la plupart des grands médias pour dénoncer une épidémie d’enfants « mal limités » au comportement ingérable et vanter les mérites de sa méthode miracle consistant à envoyer l’enfant dans sa chambre à la moindre transgression, elle mettait le feu aux poudres, ralliant à sa cause quantité d’individus partageant sa méfiance à l’égard des évolutions contemporaines et attisant parallèlement la colère des militants de la bienveillance éducative. Au fil des tribunes, articles de presse et émissions de radio, le dissensus n’a cessé de croître, laissant les parents plus que jamais désemparés quant à la bonne manière d’agir avec leur enfant.
Il faut dire que les questions sous-tendues n’ont rien de trivial : qu’est-ce qu’une autorité juste et émancipatrice ? Où s’achève le devoir de protection, où commence l’abus de pouvoir des adultes ? Pour le pédagogue Philippe Meirieu, elles sont inépuisables : « Déterminer quel degré de contrainte et de liberté est nécessaire pour permettre à l’enfant de grandir et de prendre un jour sa place dans la société constitue l’essence même de la réflexion éducative. On peut faire remonter ce débat au siècle des Lumières, avec Jean-Jacques Rousseau, à la Renaissance, avec Rabelais, voire à la philosophie antique de Platon…