Notes
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[1]
Afpa, février 2016. La même source précise que 44 % des parents prêtent leur smartphone à leur enfant de moins de 3 ans pour l’occuper.
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[2]
Ipsos Connect, 2017.
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[3]
generation5.fr, éditeur français de ressources numériques.
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[4]
Accessible sur le site de la Fondation, les relais des réseaux sociaux, YouTube et via #digitalBaby.
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[5]
Emmanuel Devouche et Laure Deschamps. Lire p. 52.
L’objet numérique doit trouver sa juste place dans la vie familiale. Une campagne de la Fondation pour l’Enfance met l’accent sur les besoins des enfants et l’importance des apprentissages fondamentaux.
1 La banalisation du numérique mobile et connecté marque une étape décisive dans l’accès des jeunes générations au savoir, au jeu et à la culture, y compris des tout-petits. Or l’utilisation massive des appareils et outils numériques chez ces derniers risque de réduire les indispensables moments de relations du jeune enfant avec son entourage. Lui qui a surtout besoin de partager du temps avec d’autres personnes, d’expérimenter des activités variées pour découvrir et comprendre le monde qui l’entoure, et « grandir dans la vraie vie ».
4 h 37 de connexion hebdomadaire chez les moins de 6 ans
2 Les chiffres sont éloquents. On compte en moyenne neuf écrans dans une famille. Entre 0 et 3 ans, un enfant sur deux utilise un écran interactif nomade, le plus souvent une tablette ou un smartphone, seul dans 30 % des cas [1]. Le temps passé chaque semaine à regarder un contenu sur l’écran de la télévision, d’une console, d’une tablette, d’un smartphone ou d’un ordinateur par les enfants de moins de 6 ans a doublé depuis 2012 en France, passant de deux heures dix à quatre heures trente-sept en 2017 [2]. Il existe même un clavier pour les bébés, « qui permet d’initier les tout-petits au monde de l’ordinateur d’une manière simple et naturelle. Il se compose d’un surclavier avec de grosses touches attirantes et colorées, qui se “scratche” sur le clavier de l’ordinateur. Une version avec des touches “soft” pour un toucher plus câlin et plus tendre est disponible [3] ».
3C’est pourquoi la Fondation pour l’Enfance, dont « la préoccupation principale est de donner des repères aux parents et aux enfants dans la société moderne et qui est reconnue comme incubateur historique de dispositifs innovants en faveur de l’enfance, a lancé une campagne de sensibilisation des adultes aux usages du numérique par les enfants de moins de 3 ans : #DigitalBaby, grandir dans la vraie vie [4]. La période 0-3 ans est essentielle pour les apprentissages fondamentaux et le développement de l’enfant. Or le numérique ne peut pas transmettre les acquisitions fondamentales, explique Georges Lefebvre, président de la Fondation. Notre objectif n’est en aucun cas de culpabiliser les parents ».
4 Cette campagne digitale, sous forme de saynètes vidéo, apporte de façon ludique des repères aux jeunes parents pour leur permettre de découvrir sereinement les besoins des enfants de 0 à 3 ans et les apprentissages fondamentaux qu’ils doivent faire, et d’adapter en conséquence leurs usages du numérique.
5 Ces vidéos s’inspirent de situations quotidiennes vécues par toutes les familles : de jeunes enfants jouent à un jeu d’encastrement ou à coucou-caché, dessinent, etc. Chacune montre que si le numérique et ses objets les plus courants, comme les tablettes ou les smartphones, font désormais partie de la vie de toutes les familles, ils ne remplacent pas les jeux, les inventions, les contacts. En un mot, que le numérique n’apprend pas tout. « Avant 3 ans, apprendre à communiquer, c’est bien mieux avec les autres » ; « Avant 3 ans, jouer en vrai c’est tellement mieux » ; « Avant 3 ans, manipuler plein d’objets c’est la meilleure façon de grandir » ; « Avant 3 ans, communiquer c’est mieux avec ses parents ».
6 Parallèlement à ces vidéos, la plate-forme digital-baby.fondation-enfance.org et le hashtag associé #DigitalBaby, réalisés avec la participation de professionnels des relations précoces parent-bébé et de l’accompagnement parental au numérique [5], mettent en lien les principales étapes du développement de l’enfant – 0 à 6 mois, 6 à 12 mois, 12 à 18 mois, 18 à 24 mois, 2 à 3 ans –, ses besoins, ses compétences, son rapport au monde avec les différents usages du numérique qui lui sont adaptés (lire encadré p. 50).
7 Plusieurs situations courantes sont abordées. Les réponses proposées tiennent plus de la suggestion que de la recette. Ni directives, ni culpabilisantes, elles donnent matière à réflexion aux parents et sont adaptables aux conditions de vie de chacun. Par exemple : « Avant de dormir c’est temps calme » ; « Jamais plus de dix minutes d’écran et toujours à deux » ; « Choisir des jeux numériques adaptés à son âge » ; « Les contacts se nouent bien avec la famille éloignée grâce à une application d’appel vidéo ».
Quelques conseils
Il existe de beaux albums numériques, comme de beaux livres papier. On s’installe ensemble devant la tablette et on lit. Les histoires racontées par les parents ravissent les enfants et leur donneront envie plus tard de déchiffrer les lettres et de lire tout seul. Une fois le livre terminé, vous pouvez revenir au début pour animer une à une les pages avec votre enfant. L’album numérique rajoute du merveilleux : votre bébé entendra et verra les personnages s’exprimer, les feuilles frémir sous le vent. En partageant ses émotions avec vous, il appréciera mieux cette expérience.
Motricité fine et globale
Tablettes et smartphones amusent et intriguent l’enfant comme ses parents, et le captivent. Et ils sont si faciles à utiliser que même un enfant de 2 ans y arrive. Il est indispensable d’accompagner et d’encadrer les pratiques numériques de votre tout-petit. De lui apprendre que la tablette est fragile, qu’elle peut faire mal au dos ou aux yeux, qu’on ne l’utilise qu’à des moments spéciaux, et toujours à deux.
Émotion et gestion des frustrations
Ne soyez pas pressés d’offrir à votre bébé un écran personnel, même interactif. Pensez aux difficultés des adultes à se séparer de leurs objets numériques personnels et imaginez celles d’un enfant qui n’a pas encore appris à partager. Privilégiez les écrans collectifs. Votre enfant les consultera de temps en temps avec vous, pour des usages favorisant l’échange : passer des appels vidéo à ses grands-parents, regarder des photos de famille…
Développement cognitif
À partir de 18 mois, pendant des plages horaires de dix minutes maximum, vous pouvez proposer à votre enfant, en restant à ses côtés, des applications d’éveil adaptées à ses premiers apprentissages : dessiner des lignes et des formes, découvrir la musicalité des lettres, jouer avec les chiffres ou encore apprendre la propreté. Renseignez-vous bien sur les applications et privilégiez celles qui n’imposent pas un rythme à votre bébé, qui les explorera à sa manière. Et, avant tout, posez-vous cette question : qu’est-ce que le numérique apporte à cet apprentissage ?
(Extraits du site digital-baby.fondation-enfance.org)
Bébé et écrans, je fais comment ?
8 Jouer dans la vie réelle, partager du temps avec les autres – adultes comme enfants –, expérimenter des activités variées reste le moteur du développement d’un petit enfant. « Le bébé a de nombreuses compétences qui lui permettent d’entrer en contact avec ses parents et son environnement, et de développer de véritables échanges dans le plaisir du jeu, explique Emmanuel Devouche, enseignant chercheur à l’université Paris-Descartes, spécialiste des relations précoces du bébé avec son environnement social. Trop souvent, les jeux proposés par les tablettes ou les smartphones répondent mal aux besoins des enfants : ils ne sollicitent ni les cinq sens ni la motricité, ne favorisent pas les échanges et sont d’abord conçus pour leur apprendre quelque chose, ce qui efface le plaisir du jeu gratuit et de la découverte. »
De nombreux produits, beaucoup de promesses…
Selon cette étude, les avantages éducatifs avancés par les marques restent peu clairs. L’argumentation joue sur le registre émotionnel, notamment sur l’anxiété des parents concernant leurs capacités éducatives, tout en prétendant la réduire, avec des produits leur promettant une « tranquillité d’esprit et une amélioration du bien-être de l’enfant ». D’où la nécessité d’« un regard critique sur les principales promesses faites par les marques pour légitimer leurs innovations numériques », note le Cepe.
Dans le même temps, le marché français des objets connectés, notamment de ceux destinés aux enfants (bracelets de surveillance physique, articles de puériculture, poupées, transats…), ne cesse de croître (10 milliards d’euros en 2016), et devrait encore doubler d’ici à 2019. Pour autant, les effets des objets connectés et les problèmes juridiques qu’ils soulèvent sont encore largement méconnus.
1. Centre d’enseignement, de documentation et de recherche interdisciplinaire, spécialisé dans les nouveaux enjeux du marketing appliqués aux jeunes consommateurs.
9 Le comportement de l’entourage adulte s’avère déterminant pour donner aux objets numériques, devenus quotidiens et omniprésents au sein des familles, leur juste place dans les interactions : l’adulte choisit les outils et les contenus qu’utilise l’enfant, il l’autorise – ou non – à y accéder et, surtout, il représente un modèle. Par imitation, l’enfant adopte et reproduit le comportement de ses parents face aux écrans. On peut donc regretter que ces derniers n’aient pas suffisamment conscience de leur influence sur le comportement numérique de leur enfant (et de leur adolescent).
10 C’est pourquoi la Fondation pour l’Enfance s’attache à proposer des repères simples, accessibles à tous, parents comme professionnels de la petite enfance, et insiste sur l’importance d’en faire un usage limité et raisonné, cohérent avec la réalité de la vie de la famille, et sur la nécessité d’un accompagnement adulte pour les enfants de cet âge. Pour guider les familles, elle réfléchit aussi à d’autres actions. « Ces dispositifs pourraient prendre des formes diverses et accessibles pour le grand public ou, pour les professionnel(le)s (accueil, petite enfance, PMI, Aide sociale à l’enfance…), être prévus dans les programmes de formation », suggère Georges Lefebvre.
Notes
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[1]
Afpa, février 2016. La même source précise que 44 % des parents prêtent leur smartphone à leur enfant de moins de 3 ans pour l’occuper.
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[2]
Ipsos Connect, 2017.
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[3]
generation5.fr, éditeur français de ressources numériques.
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[4]
Accessible sur le site de la Fondation, les relais des réseaux sociaux, YouTube et via #digitalBaby.
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[5]
Emmanuel Devouche et Laure Deschamps. Lire p. 52.