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Article de revue

La place de la formation à l’entrepreneuriat dans les programmes de MBA : une analyse lexicométrique des outils de communication

Pages 17 à 43

Notes

Note : Cette recherche a été réalisée dans le cadre du Réseau de recherche et d’expertise en entrepreneuriat qui bénéficie du soutien de la région Grand-Est et du FEDER.

Introduction

1Les établissements d’enseignement supérieur, parmi lesquels les écoles de management, accordent depuis les années 1980 une place croissante à l’innovation et à l’entrepreneuriat dans les programmes de formation (Gibb, 1992 ; Kuratko, 2005). Sur l’ensemble des continents, cette évolution est encouragée au niveau politique, comme en témoignent le rapport de la Commission européenne « Entrepreneurship 2020 Action Plan » [1] ou le « Small Business Act » des États-Unis. L’innovation et l’entrepreneuriat sont considérés comme des leviers majeurs de la dynamique économique et de la création d’emploi (Gladwin et Kennelly, 1995 ; Smith, Collins et Hannon, 2006 ; Mustar, 2009).

2D’abord comprises comme le développement de compétences utiles à la création d’entreprise, les approches de l’éducation à l’entrepreneuriat se sont élargies à l’acquisition de capacités entrepreneuriales axées sur le développement de la personne (Ball, 1989 ; Verstraete et Fayolle, 2005 ; Surlemont et Kearney, 2009). Dans la première approche, l’objectif est de développer l’esprit d’entreprise, par une sensibilisation aux carrières entrepreneuriales, le développement de compétences techniques nécessaires à la création d’entreprises, le développement de l’aptitude à identifier et à exploiter les opportunités entrepreneuriales (Gartner, 1993 ; Aldrich 1999). Dans cette optique, de nombreuses écoles de management ont créé des programmes de formation et d’accompagnement à l’entrepreneuriat, des centres d’entrepreneuriat, des incubateurs et des pépinières d’entreprises (Gibb, 1992 ; Verzat, Fayolle, 2013).

3Dans la deuxième approche, la formation à l’entrepreneuriat vise à développer un esprit d’entreprendre en favorisant l’aptitude des individus à être entreprenants dans des contextes qui ne sont pas nécessairement liés à la création d’entreprise. Elle repose sur le développement de valeurs, d’attitudes et d’un comportement favorable à l’acceptation de la nouveauté, de l’innovation, de la prise de risque, de l’esprit critique. Ces manières innovantes d’appréhender les problèmes peuvent s’exprimer dans des organisations existantes ou hors du contexte professionnel (Léger-Jarniou, 2008 ; Verzat, 2011 ; Hardy et Everett, 2013).

4Développer l’esprit d’entreprendre n’est pas une condition suffisante pour stimuler le désir de création d’entreprise, mais semble cependant constituer une condition nécessaire pour former des managers capables de répondre aux défis de la direction d’entreprise dans une économie mondialisée où les entreprises sont amenées à se repositionner et à se repenser en permanence (Adler, 2011 ; Verzat et Fayolle, 2013). Le monde des affaires, très proche des écoles de management, et les entreprises qui investissent des montants importants dans les formations proposées, considèrent avec attention les défis relatifs au changement de la formation au management et aux affaires. Des reproches ont été adressés aux écoles de management et notamment à leurs programmes phares, les MBAs, quant à la préparation de leurs futurs diplômés à appréhender des situations nouvelles, à faire preuve d’esprit critique et de créativité et à repositionner les entreprises dans lesquelles ils exercent leurs responsabilités dans une économie mondialisée en évolution rapide (Friga, Bettis et Sullivan, 2003 ; Mintzberg, 2004 ; Garvin, 2007 ; De Déa Roglio et Light, 2009 ; Datar, Garvin et Cullen, 2011 ; Aguinis et al., 2014). Cependant, un ensemble de facteurs tels que les accréditations, les classements et l’implication des anciens élèves semblent être des facteurs de rigidité qui freinent l’adaptation des écoles et l’évolution des programmes de formation (Lejeune et Vas, 2009 ; Battalina et Casciaro, 2012 ; Gedeon, 2017).

5Au-delà des arguments et des critiques qui plaident pour le développement de la formation à l’esprit d’entreprendre dans la formation des dirigeants, l’objectif de cet article est d’apprécier la place effectivement donnée à l’entrepreneuriat dans les discours élaborés par les écoles elles-mêmes, dans leurs supports de communication et dans les cursus de formation. Nous nous focalisons sur le cas des MBAs qui constituent le programme phare des écoles de management en matière de formation de dirigeants et dont le nombre de diplômés est en augmentation constante depuis plusieurs dizaines d’années. Nous effectuons une analyse lexicométrique des outils de communication élaborés par les écoles et des contenus des cursus de formation. L’article se structure autour d’une revue de littérature (1), de la présentation de la méthodologie et du corpus utilisé (2), des résultats de l’analyse lexicométrique (3) et d’une discussion (4).

1 – La formation à l’entrepreneuriat dans les écoles de management : une revue de littérature

6Les critiques adressées à la manière dont les écoles de management forment les futurs dirigeants émanent de plusieurs sources et plaident en faveur d’une évolution des formations afin de favoriser le développement de l’esprit d’entreprendre (1.1). La place de l’entrepreneuriat dans les écoles de management dépend de facteurs contextuels (1.2), mais aussi de rigidités liées à la multiplicité des parties prenantes des écoles de management (1.3).

1.1 – Diriger dans un environnement turbulent

7Le développement des compétences des futurs dirigeants d’entreprise est un défi majeur pour les formations dans les domaines du management et du monde des affaires (Cornuel, 2013). Ces compétences se fondent notamment sur un esprit critique et la capacité à faire face à l’incertitude. Elles permettent d’appréhender des problèmes nouveaux et d’y apporter des solutions spécifiques, différentes de celles appliquées ailleurs ou à un autre moment (Clarke et Clegg, 2000 ; Aguinis, Shapiro et Antonacopoulou, 2014). Le renforcement du développement de la créativité et de l’innovation par la formation est également un souhait des professionnels, identifié comme l’un des quatre challenges majeurs pour l’avenir des MBAs (Graduate Management Admission Council, 2013).

8L’aptitude des managers à s’adapter en permanence et à être créatifs dans leurs pratiques relève d’un comportement fondé sur une disposition qui est l’esprit d’entreprendre. Pour Verzat et Fayolle (2013), « l’esprit d’entreprendre est utile dans beaucoup de carrières et d’activités dans lesquelles on a besoin d’acteurs de changement, de forces de proposition, d’innovateurs, d’esprits critiques, créatifs et pragmatiques à la fois ». L’esprit d’entreprendre est une aptitude entrepreneuriale, qui n’est pas associée uniquement à la création d’une entreprise. Dans une vision plus large, il correspond à une manière de voir les choses, de prendre des initiatives, de s’adapter au changement et d’expérimenter de nouvelles solutions face à des problèmes (Léger-Jarniou, 2008). Il se fonde sur l’engagement dans l’action, la confiance en soi, le fonctionnement en réseau, la manière de penser et de réagir face à des problèmes, la recherche d’opportunités, le goût de l’autonomie et de la responsabilité (Verzat, 2011 ; Verzat et Fayolle, 2013). L’esprit d’entreprendre se développe par la pratique, l’expérience, des processus d’essais-erreurs, les interactions entre apprenants, qui permettent de développer progressivement des attitudes favorables à la prise d’initiative et des sentiments de compétences (Heinonen et Poikkijoki, 2006 ; Léger-Jarniou, 2008).

9Face aux critiques qui leur sont adressées, les écoles de management sont incitées par les praticiens à contribuer au développement de l’esprit d’entreprendre des managers. Du fait de leurs réseaux de grandes entreprises, de leurs liens avec les dirigeants et des nationalités multiples de leurs étudiants, elles possèdent un positionnement unique pour prendre conscience du besoin d’adaptation des formations et concevoir des modèles de formation alternatifs (Greenwood et Suddaby, 2006). En particulier, les programmes de MBA ont un format propice pour tester de nouvelles approches pédagogiques favorisant le développement de l’esprit d’entreprendre. Ils concentrent sur une période courte un enseignement multidisciplinaire de management d’entreprise pour des profils d’étudiants très variés. Ils forment des généralistes multi-compétents, la polyvalence étant une qualité importante des bons dirigeants et des bons entrepreneurs (Lazear, 2004).

1.2 – Le facteur culturel et la place de l’entrepreneuriat

10La culture entrepreneuriale propre à chaque école de management influence l’approche de la formation à l’entrepreneuriat (Roberts, Murray et Kim, 2015 ; Eesley et Miller, 2017 ; Matt et Schaeffer, 2018). Stanford et le MIT constituent deux cas emblématiques qui montrent l’importance du contexte et de la culture développée par les institutions à travers leur histoire (Saxenian, 1994). Eesley et Miller (2012) analysent l’ensemble des activités de Stanford, incluant les MBAs mais ne s’y limitant pas, à partir d’une série de données collectées auprès d’anciens élèves et d’enseignants. Leur analyse montre qu’un tiers des diplômés de Stanford se sentent entrepreneurs, un tiers a créé une entreprise ou participé à la création d’une entreprise et la moitié a choisi Stanford pour cette raison. La formation à l’esprit d’entreprise est fondamentale et prépondérante, mais la formation à l’esprit d’entreprendre est présente également. Elles sont favorisées par la création d’un environnement propice à l’entrepreneuriat. La recherche, les groupes d’étudiants, le réseau des anciens élèves et le centre de carrière de l’école sont les facteurs principaux d’incitation à l’entrepreneuriat par les diplômés. Les cours sur l’entrepreneuriat, la pédagogie par les études de cas, ainsi que les aides à l’investissement apparaissent quant à eux peu incitatifs.

11Selon Roberts, Murray et Kim (2015) qui évaluent l’approche de l’entrepreneuriat et de l’innovation au MIT de façon similaire à l’étude menée à Stanford, l’innovation n’est pas traitée en tant que telle, mais comme une composante de l’entrepreneuriat. Un tiers des diplômés se sentent entrepreneurs, un quart d’entre eux a créé ou participé à la création d’une entreprise, et la moitié a participé au développement d’un nouveau produit dans une entreprise. La recherche académique est une source fondamentale d’idées, d’innovations et crée un environnement favorable à l’entrepreneuriat. Plus que dans le cas de Stanford qui met l’accent sur la formation à l’esprit d’entreprise, l’approche du MIT intègre à la fois la formation à l’esprit d’entreprise et à l’esprit d’entreprendre. Elle se fonde sur un équilibre entre connaissance théorique et pratique, le travail en équipe et la collaboration interdisciplinaire. Par ailleurs, la dimension sociale de l’entrepreneuriat est une valeur forte de l’éducation entrepreneuriale au MIT, qui n’apparaît pas à Stanford.

12La culture entrepreneuriale propre à chaque école est également influencée par les contextes nationaux et par des attitudes différentes quant à l’entrepreneuriat. Selon Carayannis et al (2003) les carrières entrepreneuriales sont perçues moins positivement en France qu’aux États-Unis. Une étude plus récente (Sieger, Fueglistaller et Zellweger, 2016) montre que la propension des étudiants à être engagés, durant leur cursus, dans un processus de création d’entreprise, est plus importante aux États-Unis (17 % des étudiants interrogés), qu’en Angleterre (15 %), en France (13 %), en Espagne (10 %) ou en Italie (9 %). Ils montrent cependant que cinq ans après la fin de leurs études, une part importante des diplômés anglais (29 %), français (36 %), espagnols et italiens (30 %) sont attirés par l’entrepreneuriat, d’une manière sensiblement plus importante qu’aux États-Unis (28%). Cet attrait est plus important encore pour les pays de l’Est de l’Europe. Il dépasse 50 % en Inde et en Chine, qui sont des acteurs de plus en plus importants sur le marché de la formation. Il est particulièrement fort pour les pays en développement, notamment en Amérique latine avec un maximum de 69 % pour le Pérou.

13Malgré les changements importants constatés dans la perception de l’entrepreneuriat, des facteurs internes aux écoles peuvent freiner l’évolution de leur culture entrepreneuriale. Les acteurs institutionnels sont confrontés à une sorte de paradoxe. Ils développent à travers le temps des cartes cognitives sur lesquelles se fondent des valeurs et des normes de comportement partagées au sein de l’organisation. Ils évoluent dans un contexte organisationnel dont ils sont censés provoquer le changement. Cependant ce contexte conditionne leur comportement, inhibant ainsi leur capacité à envisager d’autres modèles (Seo et Creed, 2002 ; Greenwood et Suddaby, 2006 ; Battilana, Leca et Boxenbaum, 2009). Si l’on s’en réfère aux théories de l’apprentissage organisationnel (Argyris et Schön, 1978 ; Koenig, 2015), le changement résulte d’un processus d’apprentissage qui s’enclenche lorsque les stratégies habituelles ne permettent plus d’atteindre les objectifs de l’organisation. L’inertie des écoles pourrait s’interpréter comme résultant d’une situation dans laquelle les acteurs potentiels du changement ne perçoivent pas le décalage entre la situation actuelle et la situation souhaitée et n’enclenchent pas une dynamique de changement dans laquelle s’inscrirait l’évolution des modèles de formation. Outre ces facteurs internes à l’organisation, les écoles de management connaissent des facteurs d’inertie externes susceptibles d’inhiber l’évolution des formations au management vers le développement d’une plus grande capacité entrepreneuriale de leurs diplômés.

1.3 – Les facteurs d’inertie des programmes de formation

14Les réseaux très structurés de contacts formels et informels affectent la capacité de changement d’une organisation (Battalina et Casciaro, 2012). De ce fait, les liens étroits que les diplômés des écoles de management entretiennent avec celles-ci apparaissent comme un facteur de rigidité. Leur grand nombre, notamment pour les MBAs et le fort engagement des anciens élèves pour leur propre école (Elsbach et Kramer, 1996 ; Hall, 2011 ; Gupta et Bennett, 2014) contribuent à la reproduction dans le temps des programmes proposés, orientés vers la formation d’analystes de haut niveau (Roglio et Light, 2009).

15Les classements des formations diffusés par la presse constituent un autre facteur introduisant une inertie dans le système. Leurs critères et leurs méthodologies sont régulièrement remis en question et accusés d’inciter les écoles de management à tendre vers un standard, tandis que la qualité de la formation serait un objectif secondaire (Gedeon, 2017). Malgré ces critiques, il est fortement conseillé aux écoles de management d’y participer, car ils apparaissent comme des facteurs importants de leur réputation et du choix des étudiants (Bradshaw, 2007 ; Peters, 2007 ; Ray et Jeon, 2008). Ainsi, à défaut d’autres méthodologies, et pour obtenir de bons résultats dans ces classements, les écoles de management se conforment à un modèle d’évaluation qui influencent leur structuration et leurs orientations stratégiques. Les écoles de management sont notamment amenées à se focaliser sur leur image et sur la perception qu’ont les étudiants des débouchés professionnels offerts, pour être performantes sur le marché concurrentiel de la formation. Ainsi, des notions comme le contenu de leurs programmes ou l’accomplissement de leur mission primaire d’éducation deviennent de seconde importance (Gioia et Corley, 2002 ; Morgenson et Nahrgang, 2008). Ce comportement serait auto-entretenu par le fait que les écoles de management, en tant qu’organisations, doivent, pour survivre, convaincre de leur légitimité en se conformant au moins en apparence à ce que les acteurs institutionnels externes attendent d’elles (Battilana et Casciaro, 2012).

16Les accréditations des écoles et des formations de MBA sont un critère considéré par les futurs étudiants et par les classements des écoles. Elles apparaissent également comme un facteur d’inertie (Julian et Ofori-Dankwa, 2006 ; Lejeune et Vas, 2009). Elles confèrent aux écoles une légitimité vis-à-vis des attentes des professionnels (Thomas et al., 2014), cependant, elles les conduisent également à adopter des trajectoires d’évolution similaires pour se conformer aux mêmes critères de performance. La place croissante donnée par les écoles aux activités de recherche des enseignants résulte de l’importance de ce facteur dans les évaluations menées par les organismes accréditeurs. L’accent mis sur la recherche est un objet de critique vis-à-vis des écoles de management et particulièrement des MBAs. La déconnexion entre la recherche en gestion menée dans les écoles et la pratique (Birkinshaw et Mol, 2006) a suscité de nombreux débats quant à la pertinence de la reconnaissance académique du corps enseignant comme indicateur de qualité des formations délivrées (Pfeffer et Fong, 2002 ; Mintzberg, 2004). L’évaluation du processus de création de connaissances dans le monde académique repose sur une évaluation par les pairs et ne se fonde pas sur des critères de performance opérationnelle de ces connaissances (Trieschmann et al., 2000 ; Aguinis et al., 2014). Différents auteurs, à la suite de Mintzberg (2004) reprochent aux programmes de MBA d’être trop standardisées, de transmettre des connaissances obsolètes à travers des études de cas fondées sur des expériences passées et de véhiculer le paradigme dominant de la pensée positiviste inadapté à la formation de bons managers (Datar, Garvin et Cullen, 2010). Ces programmes sont aussi mis en cause pour laisser une place insuffisante aux questions d’éthique et de morale, conduisant à des scandales tels que l’affaire Enron en 2000 ou la crise des subprimes en 2008 (Bennis et O’Toole, 2005 ; Déry, Mailhot et Schaeffer, 2007 ; Thomas, Lee, Thomas et Wilson, 2014 ; Akrivou et Bradbury-Huang, 2015). En réponse à ces critiques, Datar, Garvin et Culler (2010) formulent des préconisations quant à l’évolution de la formation des dirigeants. Ils identifient les aptitudes comportementales qui devraient guider l’évolution des projets pédagogiques des écoles de management : le leadership, la créativité, la capacité d’innovation, l’esprit critique, la capacité à communiquer clairement. Or ces aptitudes comportementales sont des compétences propres à l’entrepreneuriat.

17Ainsi, nous avons d’un côté une demande d’évolution des formations émanant des milieux professionnels, de certains enseignants et des instances politiques, qui poussent à développer la formation à l’entrepreneuriat. Et d’un autre côté, des facteurs de rigidité sont présents, liés à la dynamique institutionnelle propre aux organisations et à des stratégies guidées par des critères imposés de l’extérieur par les classements et les systèmes d’accréditation. Sur la base de ces constats, nous avons cherché à apprécier de manière objective la place effectivement donnée au développement des aptitudes entrepreneuriales dans les cursus de formation des dirigeants.

2 – Méthodologie

18La méthodologie de recherche adoptée pour apprécier la place donnée aux valeurs entrepreneuriales dans la formation des dirigeants, se fonde sur une analyse lexicométrique (2.1) des supports de communication des écoles de management relatifs aux programmes de MBA les plus renommés (2.2).

2.1 – L’analyse lexicométrique

19Pour apprécier la place donnée à la formation à l’entrepreneuriat nous avons choisi de nous focaliser sur l’analyse des outils de communication élaborés par les écoles pour présenter leurs programmes de MBA. Nous avons mené une analyse lexicométrique des brochures de présentation des MBAs et des curriculums, qui constituent un outil marketing fondamental et dont l’élaboration relève d’un exercice lexical délicat. Ils résultent d’une stratégie de communication axée sur les principaux messages adressés aux futurs étudiants, mais aussi à l’ensemble des autres parties intéressées : entreprises, anciens élèves, médias, communautés éducatives. Pour élaborer les deux corpus indépendants, brochures et curriculums, les données ont été collectées soit directement sur les sites internet des MBAs, soit en s’adressant aux MBAs qui nous ont transmis les informations demandées. Nous avons analysé les deux corpus à l’aide du logiciel IRaMuTeQ [2]. Les formes lexicales identifiées et leurs regroupements sont analysés statistiquement, afin d’éviter les biais d’interprétation liés au choix d’un cadre théorique préalable. L’outil permet de gérer les synonymes (ce qui n’est pas apparu nécessaire dans notre analyse) et de lemmatiser les formes. Nous avons adopté quatre approches :

  1. Une analyse de la fréquence des formes lexicales dans chacun des deux corpus.
  2. Une analyse de l’association des formes lexicales par une analyse des similitudes (ADS) basée sur la quantification de la proximité des formes lexicales (Marchand et Ratinaud, 2012), sur les corpus des brochures et des curriculums, afin de vérifier la cohérence entre le contenu des brochures et celui des formations.
  3. Une caractérisation des principaux messages véhiculés par le corpus des brochures, grâce à une classification hiérarchique descendante (CHD) selon la méthode de Reinert (Reinert, 1983). Elle se fonde sur le fractionnement du corpus en classes de formes en fonction de la distance lexicale des segments de texte auxquels elles appartiennent. Elle regroupe les formes dans les classes selon leur indépendance mesurée par un test du Chi2.
  4. Une analyse du corpus des brochures en fonction des zones géographiques et des rangs de classement, par une analyse factorielle des correspondances (AFC) fondée sur les variables du tableau 1.

Tableau 1

Variables et modalités utilisées pour l’AFC

VariablesModalitésSignification
GEOUSA et EuropeLocalisation des MBAs aux États-Unis ou hors des États-Unis
RANK1 à 24Rang des MBAs selon notre classement

Variables et modalités utilisées pour l’AFC

20Pour analyser l’importance accordée à l’esprit d’entreprise et à l’esprit d’entreprendre dans les corpus, nous avons identifié dans la littérature les champs sémantiques s’y rapportant (Fayolle et Gailly, 2008 ; Surlemont et Kearney, 2009 ; Lackéus et Middletown, 2015). Les objectifs affichés dans le développement de l’esprit d’entreprise sont la création d’entreprise, l’identification d’opportunités d’affaires, l’ouverture à des partenaires, le développement d’affaires, tandis que dans le développement de l’esprit d’entreprendre l’accent est plus mis sur le développement personnel, la créativité, la confiance en soi, la prise de risque, l’engagement dans l’action, sans faire explicitement référence à la création d’entreprise.

2.2 – Présentation des données

21Nous avons sélectionné les vingt-cinq MBAs les plus réputés au niveau international (tableau 2). Ils constituent des idéaux types au sens de Yin (1994). Nous avons sélectionné les quatre classements internationaux les plus consultés, publiés par le Financial Times, The Economist, Bloomberg Businessweek et Forbes en 2015, tout en étant conscients de leurs imperfections (Gioia et Corley, 2002 ; Peters, 2007 ; Bradshaw, 2007 ; Navarro, 2008). Notre objectif n’était pas d’établir une liste indiscutable des vingt-cinq meilleurs MBAs, mais de sélectionner un ensemble de formations bénéficiant de la meilleure réputation internationale évaluée sur la base des mêmes critères et constituant ainsi un ensemble homogène permettant de mener une analyse lexicométrique significative et représentative.

Tableau 2

Classement des MBAs sélectionnés pour l’analyse lexicométrique

Tableau 2
MBAs Financial Times The Economist Bloomberg Businessweek Forbes Moyenne Rang moyen Classement analyse brochures Classement analyse curriculums Harvard (USA) 1 4 1 2 2,0 1 / / INSEAD (FRA) 4 8 3 1 4,0 2 1 1 Chicago Booth (USA) 9 1 2 6 4,5 3 2 2 Standford (USA) 4 13 7 1 6,3 4 3 3 Wharton (USA) 3 10 5 7 6,3 5 4 4 Kellogg (USA) 14 3 3 6 6,5 6 5 5 Columbia (USA) 6 12 6 4 7,0 7 6 6 London BS (GRB) 2 24 2 1 7,3 8 7 7 IESE (ESP) 7 14 7 2 7,5 9 8 8 Haas (USA) 10 6 9 8 8,3 10 9 9 HEC Paris (FRA) 16 5 10 3 8,5 11 10 10 MIT Sloan (USA) 8 15 4 9 9,0 12 11 11 IE University (ESP) 12 17 4 5 9,5 13 12 12 Tuck (USA) 23 3 14 5 11,3 14 13 13 Yale (USA) 17 19 11 11 14,5 15 14 14 IMD (SUI) 20 32 5 2 14,8 16 15 15 Fuqua (USA) 21 20 8 12 15,3 17 16 / Esade (ESP) 19 21 11 10 15,3 18 17 16 Darden (USA) 32 2 12 16 15,5 19 18 / Anderson (USA) 25 9 13 17 16,0 20 19 / Leonard Stern (USA) 18 11 24 18 17,8 21 20 / Cornell (USA) 28 23 16 10 19,3 22 21 17

Classement des MBAs sélectionnés pour l’analyse lexicométrique

tableau im2
Cambridge (GBR) 13 61 8 3 21,3 23 22 18 SDA Bocconi (ITA) 26 50 12 4 23,0 24 23 19 Oxford (GBR) 22 77 6 7 28,0 25 24 20

22Pour établir un classement unique, nous n’avons considéré que les MBAs qui figurent simultanément dans les quatre classements. Leur rang de classement est déterminé par le calcul de leur rang moyen. Nous avons retenu quinze formations situées aux États-Unis et dix en Europe. En complément de cette approche, nous avons considéré le classement « Top MBAs for entrepreneurship » 2016 publié par le Financial Times. Les critères utilisés figurent dans le tableau 3.

Tableau 3

Les critères de classement des MBAs entrepreneuriaux du Financial Times

  • Le pourcentage de diplômés de l’année 2012 qui ont créé une entreprise
  • L’aide apportée par l’école de management pour sécuriser le financement
  • L’aide apportée par le réseau d’anciens élèves pour sécuriser le financement
  • Le pourcentage d’entrepreneurs ayant rassemblé au moins un tiers des fonds propres auprès de financeurs privés
  • Le pourcentage de femmes parmi les diplômés de 2012 qui ont créé une entreprise
  • Le pourcentage d’entrepreneurs pour lesquels l’entreprise qu’ils ont créée est leur source principale de revenus
  • L’impact de l’école de management sur la motivation des entrepreneurs à créer leur entreprise
  • L’aide de l’école à recruter des personnes clefs
  • L’aide de l’école de management pour démarrer l’activité
  • Le pourcentage d’entreprises démarrées en 2014 et avant, et qui sont toujours en activité fin 2015

Les critères de classement des MBAs entrepreneuriaux du Financial Times

23Parmi les vingt-cinq MBAs que nous avons retenus dans notre classement, dix-huit figurent dans le classement des MBAs formant le mieux à l’entrepreneuriat proposé par le Financial Times. Notre classement comprend donc bien des MBAs considérés comme très entrepreneuriaux au niveau international. Mais il ne s’y limite pas car les critères de classement retenus traduisent une vision de la formation à l’entrepreneuriat focalisée sur le développement de l’esprit d’entreprise. Notre objectif est d’appréhender également la formation à l’esprit d’entreprendre.

24Un MBA n’avait pas de brochure. Nous avons donc finalisé un corpus homogène de brochures et représentatif de vingt-quatre MBAs, dont quatorze américains et dix non américains. Pour le corpus de texte issu des curriculums, cinq MBAs fournissaient un curriculum trop partiel ou ne fournissaient pas de curriculum, ils ont donc été exclus. Nous avons finalisé un corpus homogène des curriculums et représentatif de vingt MBAs, dont dix américains et dix non américains (tableau 2). Le tableau 4 donne les caractéristiques principales de ces deux corpus.

Tableau 4

Caractéristiques des deux corpus de texte

BrochuresCurriculums
Nombre de textes2420
Nombre d’occurrences70664204647
Nombre de formes61288292
Nombre d’hapax28933340

Caractéristiques des deux corpus de texte

3 – Les résultats

25L’analyse lexicométrique menée a permis de mesurer la fréquence des formes lexicales utilisées (3.1), de caractériser la nature des messages véhiculés à travers une analyse de leurs cooccurrences (3.2) et de leur classification hiérarchique (3.3). Le choix des formes lexicales a été également analysé en fonction de la zone géographique (3.4) et du rang de classement (3.5).

3.1 – Les opportunités de carrière mises en avant

26Nous avons identifié les cinquante formes lexicales dont les fréquences d’apparition sont les plus élevées dans les corpus des brochures et des curriculums. Elles représentent le socle du corpus utilisé pour définir la nature du projet de formation.

27Dans le corpus des brochures (tableau 5), les formes lexicales dépassant les 400 occurrences véhiculent le message que le MBA prépare les étudiants au monde des affaires. Les formes présentant de 251 à 400 occurrences constituent également un ensemble pleinement significatif. Elles traduisent une cohérence avec les critères d’élaboration des principaux classements de MBA, qui donnent une place importante à l’augmentation de salaire promise par le diplôme et à l’ouverture internationale. Le message véhiculé est que les MBAs offrent des opportunités de carrière en un temps réduit, grâce à des programmes organisés par des écoles réputées, dans un contexte international. Le troisième ensemble de formes lexicales exprime la volonté de former des managers internationaux, conscients des enjeux d’une économie mondialisée et capables d’affirmer leur leadership au sein de grandes entreprises. On retrouve l’attention donnée aux critères utilisés par les organismes certificateurs. Le quatrième champ lexical présente les MBAs comme des formations sélectionnant les meilleurs étudiants au sein d’écoles reconnues, pour leur donner des compétences, un diplôme et les ouvrir à un réseau. Il ressort globalement de cette analyse que le cœur du message véhiculé par les brochures ne s’articule pas autour des notions d’entrepreneuriat et d’innovation, mais est en cohérence avec les critères des classements et des organismes certificateurs.

Tableau 5

Les cinquante formes lexicales les plus fréquentes dans les brochures

Fréquences d’apparitionFormes lexicales dans le corpus des brochures
+ de 400MBA, business, student, program
251 à 400school, year, career, management, course, experience, global, world
151 à 250learn, leadership, international, work, time, opportunity, degree, class, admission, company
101 à 150market, tuck, alumni, university, study, faculty, skill, offer, professional, finance, network, club, campus, leader, include, community, application, academic, help, first, project, elective, graduate, develop, full, lead, curriculum

Les cinquante formes lexicales les plus fréquentes dans les brochures

28Dans le corpus des curriculums (tableau 6), les notions d’entrepreneuriat et d’innovation apparaissent également secondaires. L’accent est mis, comme dans le corpus des brochures, sur l’étudiant, les affaires, les marchés et le management. Au niveau des contenus de formation, les termes de strategy, finance, project, organization, decision, leadership, firm, social, analysis, account, product reflètent une formation très classique de la gestion d’entreprise plus qu’une orientation vers l’entrepreneuriat, la créativité et l’innovation. Cette analyse des curriculums confirme que la faible place accordée à l’entrepreneuriat dans les brochures correspond bien à un positionnement des projets de formation.

Tableau 6

Les cinquante formes lexicales les plus fréquentes dans les curriculums

Fréquences d’apparitionFormes lexicales dans le corpus des curriculums
+ de 1000business, student, market, management
601 à 1000strategy, offer, spring, financial, fall, develop, understand
501 à 600learn, MBA, finance, project, syllabus, download, company, organization, include, term, decision
401 à 500focus, case, new, global, firm, core, social, skill, class, work, design, elective, analysis, leadership, account
300 à 400development, study, opportunity, pm, team, corporate, model, issue, value, venture, manage, product, challenge

Les cinquante formes lexicales les plus fréquentes dans les curriculums

3.2 – L’entrepreneuriat inscrit dans le monde des affaires

29L’analyse de similitude rassemble les formes selon leurs cooccurrences. Elle permet d’analyser la nature des principaux messages structurés par association de mots. Elle a été réalisée sur l’ensemble des formes actives du corpus des brochures MBA (figure 1), soit 1947 formes, et des curriculums (figure 2), soit 3 141 formes.

Figure 1

Analyse de similitude du corpus des brochures MBA

Figure 1

Analyse de similitude du corpus des brochures MBA

Figure 2

Analyse de similitude du corpus des curriculums MBA

Figure 2

Analyse de similitude du corpus des curriculums MBA

30L’analyse du corpus des brochures fait apparaître quatre communautés de termes plus fréquemment associées que les autres, structurées autour des termes mba, business, student et career. Au centre, la communauté MBA fait le lien entre le monde des affaires (business) et l’étudiant (student) auquel il offre des opportunités de carrière (career). La communauté MBA est fortement associée à la description de l’expérience de formation proposée et des modalités de candidature, ce qui n’est pas surprenant compte tenu de la vocation informative des documents analysés. La communauté business traduit une vision internationale du monde des affaires dans lequel s’inscrit la formation de MBA qui ouvre sur le monde (company, international, world, school, global). Les formes entrepreneurship et innovation figurent dans cette communauté mais sont très secondaires et ne la caractérisent pas. La communauté student est centrée sur les enseignements (course, class, work, academic, faculty) et la vie sur le campus qui permet de développer des relations (campus, community, alumnus, team, support, network). La carrière est associée aux formes industry et service et est située à proximité des formes leaderships et curriculum de la communauté voisine.

31L’analyse des curriculums permet d’apprécier plus précisément la place effectivement donnée à l’entrepreneuriat et à l’innovation dans les programmes de MBA (figure 2). La forme entrepreneurship appartient à la communauté business mais comme une notion secondaire et située en périphérie. Elle est proche de la communauté construite autour des termes new, venture et entrepreneurial, qui jouxte la communauté définie par real, estate, world et fait le lien avec les formes private et equity. L’entrepreneuriat apparaît ainsi lié à la création d’entreprise, plus qu’au développement de l’esprit d’entreprendre. L’analyse montre également l’importance des études de cas comme méthode pédagogique, critiquées pour ne pas être propices au développement de l’esprit d’entreprendre (Mintzberg, 2004). Alors que la communauté business était très liée à la dimension internationale dans les brochures, elle est ici liée au monde de la finance et du management des grandes entreprises. Ses formes principales sont strategy, include, organization, company, understand, analysis, administration et decision. Elle est proche de la communauté management et de la communauté market. Au sein de cette dernière, le positionnement des formes product et customer et leurs coocurrences traduisent une approche plus financière qu’entrepreneuriale de la création de valeur (finance, financial, capital, value, account).

3.3 – Les principaux messages véhiculés par les brochures

32La Classification Hiérarchique Descendante (CHD) permet de caractériser les principaux messages présents dans les brochures, grâce à l’identification de groupes de mots structurés selon leur proximité thématique et lexicale. Nous identifions quatre classes significatives qui comprennent 87,35 % des segments, ce qui exprime une bonne qualité de l’analyse (figure 3).

Figure 3

CHD du corpus des brochures MBA

Figure 3

CHD du corpus des brochures MBA

3.3.1 – Une formation qui ouvre des réseaux pour une belle carrière (classe 2, figure 3)

33Cette classe est la plus importante et représente 33 % du corpus. Les notions de réseau et de relations avec la communauté des anciens élèves du MBA y sont centrales. Elle met en avant, deux messages principaux véhiculés par les brochures de présentation des MBAs. Le premier, prédominant, est que la formation de MBA permet de nouer des relations et d’appartenir à une communauté utile pour le développement de la carrière et l’accès à de nouvelles opportunités professionnelles. Ce message ressort de l’association des termes network, alumnus, community, avec les termes career, offer, access, job, industry, recruitment. Le deuxième message est que les alumni conservent des liens forts avec leur formation et sont très impliqués dans la vie de l’école. Les termes network, alumnus et community sont associés à ceux de campus, student, event, faculty, session. Les termes support et help montrent les bénéfices de cette expérience pour les étudiants des formations de MBA. Dans la littérature sur les MBAs, les bénéfices de l’implication des alumni dans la vie de l’école est perçue d’une manière moins positive. Elle est considérée comme un facteur de rigidité, les anciens étudiants ayant tendance à reproduire le modèle qu’ils ont eux-mêmes connu lorsqu’ils étaient étudiants (De Réa Roglio et Light, 2009 ; Gupta et Bennett, 2014).

3.3.2 – Le développement des savoir-faire et du leadership (classe 1, figure 3)

34Cette classe représente 25 % du corpus. Le message véhiculé par les formes lexicales les plus importantes est que l’objectif principal du MBA est de former des leaders (skill, develop, learn, leadership, leader, curriculum) capables de résoudre des problèmes complexes dans le monde actuel (challenge, approach, today, think, problem, solve, understand, complex). Les formes lexicales regroupées au sein de cette classe évoquent le développement par la formation de modes de pensée analytiques (problem, solve, understand, framework, analytical, shape, prepare). Elles n’appartiennent pas au champ lexical caractéristique de l’esprit d’entreprendre, plus orienté vers le sens de l’initiative, le développement de la personne, l’autonomie, la proactivité (Caird, 1990 ; Verzat, 2011 ; Pepin, 2012 ; Champy-Remoussenard, 2012). La forme innovative s’en rapproche d’avantage mais n’est pas centrale et apparaît relativement isolée.

3.3.3 – Le marché et la stratégie (classe 3, figure 3)

35Cette classe représente 22 % du corpus. Elle est quasiment aussi importante que la précédente. Les formes lexicales dominantes sont market, economics et strategy. Elles sont relatives au rôle du dirigeant qui définit une stratégie pour orienter l’entreprise sur des marchés concurrentiels. La dimension technologique associée à la stratégie est très présente avec les formes lexicales génériques technology et science, ainsi que des formes lexicales relatives à des domaines technologiques plus précis tels que energy, health, healthcare. Ce monde est celui de l’entreprise à forte intensité technologique, située dans un environnement scientifique qui nourrit le développement technologique de l’entreprise grâce à des liens entre les secteurs publics et privés, comme le suggèrent les formes lexicales science, private, public, Boston. Le monde de la finance et la dimension financière des décisions stratégiques sont également caractéristiques de cette classe, avec les formes lexicales finance, investment, equity, fund, account. Les décisions stratégiques, la technologie et la finance sont au centre de cette classe. Les dirigeants orientent les entreprises sur les marchés et les considèrent dans leur dimension financière et technologique. Ce monde est essentiellement celui de la grande entreprise et de la finance, mais laisse également une place à l’univers de la startup de haute technologie, liée notamment à la présence du MIT dans notre échantillon (founder, Boston).

3.3.4 – Informations administratives (classe 4, figure 3)

36La classe 4 représente 20 % du corpus. Elle est principalement caractérisée par un ensemble de formes lexicales relatives au mode d’accès à la formation. Les formes lexicales les plus présentes dans la classe (admission, application, candidate, complete, applicant) mettent en avant le caractère sélectif de la formation. Un ensemble de formes lexicales est relatif aux conditions que les candidats doivent remplir pour poser leur candidature (requirement, grade, degree, toefl, minimum, score). Les informations pratiques sur le dépôt des candidatures (dead-line, test, date, name, email, online, fax) contribuent à structurer cette classe. Leur présence est cohérente par rapport à la nature des documents analysés qui sont des brochures informatives destinées à susciter les candidatures. Ce champ lexical renvoie aux aspects administratifs pratiques des inscriptions, sélections et admissions en MBA.

37Finalement, le champ lexical relatif à l’esprit d’entreprendre est peu présent dans les outils de communication des écoles de management les plus prestigieuses, dont les messages sont très centrés sur les développements de carrière promis à des leaders compétents dans les grandes entreprises, grâce notamment aux réseaux propres aux écoles.

3.4 – Une analyse par zone géographique

38La variable géographique a été introduite dans le corpus des brochures, en distinguant les MBAs localisés aux États-Unis et de ceux localisés en Europe. Une Analyse Factorielle des Correspondances (AFC), permet d’identifier les formes lexicales plus spécifiques à chaque zone géographique (tableau 7).

Tableau 7

Formes lexicales spécifiques aux formations en Europe et aux États-Unis

Ensemble lexical n° 1Ensemble lexical n° 2
Europemba, test, centre, europe, participant, scholarship, candidate, namecompany, business, consult, luxury, career
USAcourse, degree, student, unit, education, year, schoolboard, community, requirement, law

Formes lexicales spécifiques aux formations en Europe et aux États-Unis

valeur>5

39Les termes innovation ou entrepreneurship ne sont pas des éléments différenciant des contextes américains et européens. La communication des MBAs européens soulignent l’opportunité de pouvoir suivre un programme de MBA en Europe (mba, Europe, participant), le caractère sélectif de la formation (test, candidate, name), la possibilité d’obtenir une bourse (scholarship) et les opportunités de carrière qui s’ouvrent dans le monde des affaires (company, business, career), la consultance et le luxe (consult, luxury). La communication des MBAs américains est plus axée sur le déroulement de la formation elle-même (course, student, unit, education, year, school), les aspects juridiques (law), les liens que les étudiants développent avec des dirigeants au sein de communautés (board, community) et les profils permettant l’accès à la formation (requirement, degree). La présence de la forme law s’explique par une plus grande judiciarisation de la société américaine par rapport à la société européenne (Hill et King, 2004).

40En Europe, la communication est plus tournée sur les opportunités qu’offre le diplôme de MBA, pour convaincre les futurs étudiants de l’intérêt que présente l’investissement dans cette formation réservée à une élite. Dans le contexte américain, la communication vise plus à se démarquer des programmes concurrents proposés par les autres écoles. Elle est plus centrée sur le déroulement de la formation elle-même et l’accès à la communauté d’une école prestigieuse.

3.5 – Une analyse par rang de classement

41Une première analyse de l’influence des rangs de classement a été réalisée en comparant l’ensemble TOP10, constitué des MBAs classés dans les dix premiers (tableau 1) et le groupe BOT10 comprenant les MBAs occupant les dix dernières places de notre classement, c’est-à-dire classés entre le quinzième et le vingt-quatrième rang.

42L’analyse des formes lexicales dominantes (tableau 8) montre que la notion d’innovation apparaît dans la modalité TOP10 (innovation, innovative) alors qu’elle est absente du groupe BOT10. Ces termes relevant explicitement du champ sémantique de l’esprit d’entreprendre seraient donc une caractéristique distinctive des MBAs les plus reconnus par les classements. La comparaison des ensembles TOP10 et BOT10, fait également apparaître que ce dernier donne une place importante à la description d’aspects formels relatifs à l’obtention du diplôme (unit, project, grade, term, research, fail, module, honor), à la candidature à la formation (application, e-mail, date, submit) et aux différents acteurs (professor, assistant, associate, instructor, ceo). Les formes lexicales dominantes de l’ensemble BOT10 ne sont pas relatives à des comportements entrepreneuriaux mais s’adressent à des étudiants qui ont le souci de réussir un diplôme. Les formes lexicales dominantes du TOP10 sont, elles, plus axées sur l’expérience qui va être vécue durant la formation (campus, major, supportive, lifelong, define, learn, club, culture, help, coursework), dans une école au corps professoral prestigieux qui forme des leaders (leader, nobel, prize).

Tableau 8

Formes lexicales spécifiques au TOP 10 et au BOT 10

TOP10campus, june, innovation, quarter, major, supportive, lifelong, leader, nobel, define, learn, serve, find, mba, club, culture, area, innovative, help, coursework, prize
BOT10unit, project, grade, application, assistant, professor, associate, investment, term, research, fail, email, instructor, date, module, development, ceo, submit, fitness, honor

Formes lexicales spécifiques au TOP 10 et au BOT 10

43Nous avons ensuite complété cette analyse par la comparaison des ensembles TOP3 regroupant les trois meilleurs MBAs de notre classement (INSEAD, Chicago Booth et Stanford) et BOT3 regroupant les 3 MBAs occupant les rangs vingt-deux, vingt-trois et vingt-quatre (Cambridge, SDA Bocconi, Oxford).

44Pour les MBAs du TOP3, apparaissent des formes spécifiques plus variées (tableau 9), relatives au réseau (club, joint, association, alumnus), à un parcours de formation de dirigeant personnalisé (learn, elective, choose, like, executive) et au champ sémantique de l’esprit d’entreprendre (innovation). Pour les MBAs du BOT3, les formes spécifiques sont orientées vers les aspects administratifs (term, admission, date, application, address, euro) et le réseau (network, team), mais aucun terme spécifique ne relève du champ de l’innovation ou de l’entrepreneuriat. Ces deux analyses montrent donc un lien positif entre l’importance donnée à l’innovation et le rang de classement des MBAs.

Tableau 9

Formes lexicales spécifiques du TOP 3 et du BOT 3

TOP3club, campus, joint, learn, center, association, elective, choose, like, executive, alumnus, innovation, base
BOT3term, project, admission, date, network, application, address, team, euro

Formes lexicales spécifiques du TOP 3 et du BOT 3

TOP3 et BOT3 (valeurs>2,5)

4 – Discussion

45Les résultats de l’analyse lexicométrique montrent que la place de la formation à l’entrepreneuriat et à l’innovation est secondaire dans l’ensemble des formations. En mettant en avant les notions de business, de stratégie et de marché, et en les associant à des termes essentiellement financiers l’orientation donnée est une approche du management macroscopique et analytique.

4.1 – Une vision de l’entrepreneuriat réduite à la création d’entreprise

46Le champ lexical utilisé dans les brochures et les curriculums révèle des formations de MBA centrées sur le monde des affaires, qui proposent un enseignement très classique de la gestion d’entreprise. Elles accordent une place secondaire aux notions d’entrepreneuriat et d’innovation, absentes des principaux messages véhiculés par les brochures de présentation des formations. L’étude menée conforte les nombreux travaux qui soulignent la faible place donnée au développement de l’esprit critique et de la créativité dans les formations de MBA (Mintzberg, 2004 ; Garvin, 2007 ; Roglio et Light, 2009 ; Datar, Garvin et Cullen, 2011 ; Aguinis et al., 2014). L’analyse du corpus des curriculums montre par ailleurs que lorsque la notion d’entrepreneuriat apparaît, elle est associée à la création d’entreprise et non au développement de comportements associés à l’esprit d’entreprendre (Verstraete et Fayolle, 2005). La formation à l’entrepreneuriat n’est cependant pas absente de tous les programmes des écoles de management. Elles l’ont fortement développée et ont créé des dispositifs d’accompagnement aux étudiants porteurs de projets (Verzat et Fayolle, 2013 ; Gedeon, 2017), en dehors des programmes de MBA.

47L’analyse traduit une vision réductrice de l’identité de l’entrepreneur au sein des écoles. Il est vu essentiellement comme un créateur d’entreprise, alors qu’il peut être membre d’une entreprise existante (Schumpeter, 1939 ; Marvel et al., 2007). Le rôle des dirigeants est important pour que des comportements entrepreneuriaux se manifestent au sein de l’entreprise. Leur attitude détermine la capacité de l’organisation à prendre des risques et à adopter des stratégies de leader plus que de suiveur sur les marchés (Miller, 1983). Cette attitude peut être développée par la formation à l’esprit d’entreprendre (Verstraete et Fayolle, 2005 ; Béchard et Grégoire, 2009), qui trouverait toute sa place dans des programmes de MBA.

48La littérature rattache la formation à l’esprit d’entreprise et à l’esprit d’entreprendre à deux visions différentes de l’entrepreneuriat, l’une centrée sur la création d’entreprise et l’autre sur la création de valeur (Léger-Jarniou, 2008). Nous pensons que ces deux notions sont complémentaires et pertinentes dans une formation de dirigeants. La formation à l’esprit d’entreprise favorise le développement de la capacité à identifier des opportunités entrepreneuriales, à les traduire en modèles d’affaires et à les saisir. Dans des contextes mouvants et complexes, ces aptitudes sont utiles aux dirigeants amenés à repositionner les entreprises, à faire évoluer leurs modèles d’affaires (Lambert et Schaeffer, 2014 ; Saebi, Lien et Foss, 2017), à identifier, saisir et exploiter des opportunités d’affaires (Shane et Venkataraman, 2000). Par ailleurs, les entreprises existantes ont besoin de s’appuyer sur de nouveaux partenaires pour nourrir leur capacité d’innovation (Bercovitz et Feldman, 2007), parmi lesquels des start-ups (Schaeffer, 2015 ; Bertin, 2019). Ces dernières jouent un rôle important dans les dynamiques d’innovation, sous l’influence notamment du développement des technologies digitales (Carlsson, 2004 ; Nambisan, 2017). La formation des dirigeants à l’esprit d’entreprise et à l’esprit d’entreprendre peut contribuer à réduire la différence de culture entre les start-up et les grandes entreprises, favorisant ainsi les collaborations (Boschma, 2005).

4.2 – L’influence des parties prenantes et du contexte sur les programmes de MBA

49L’analyse du champ lexical utilisé montre également l’influence des classements et des processus d’accréditation, sur les outils de communication et la conception des programmes de MBA. Elle peut constituer un frein à l’évolution des programmes de formation des cadres. Les MBA sont des programmes stratégiques pour les écoles. Ils sont une source de revenu importante et contribuent à leur prestige, car ils s’adressent à un public de cadres, attirent des intervenants réputés, renforcent leur dimension internationale et leur ouverture sur les réseaux professionnels. Les classements des MBAs et les accréditations contribuent considérablement à la valeur marchande des formations, plus que la qualité du contenu académique ou l’impact des enseignements sur les pratiques, qui sont difficiles à évaluer (Vesper et Gartner, 1997 ; Lejeune et Vas, 2009 ; GMAC, 2013 ; Gedeon, 2017). Les classements sont conçus comme des outils d’aide à l’investissement pour les futurs étudiants. Le critère principal est la rentabilité de l’investissement dans une formation de MBA, mesurée par le rapport entre le niveau des revenus espérés à l’issue de la formation et le coût supporté. Leur influence est particulièrement importante dans la population des MBAs les plus réputés que nous avons étudiée, dont la forte réputation s’accompagne de tarifs élevés. Les accréditations, quant à elles, accordent une place importante à la recherche académique comme gage de légitimité, incitant les écoles à recruter des enseignants publiant dans des revues de haut rang. Les critères dominants incitent finalement peu à développer la formation à l’esprit entrepreneurial.

50L’analyse du positionnement des MBAs par rang de classement fait cependant ressortir que les MBAs les mieux classés au niveau mondial laissent plus de place que les autres à la personnalisation des parcours et à la formation de managers innovants, même si ces thèmes ne sont pas dominants. Une explication possible est que ces MBAs prestigieux, répondant parfaitement aux critères guidant les classements, peuvent se permettre de mettre en place de nouvelles approches pédagogiques, plus innovantes, pour continuer à se démarquer des formations concurrentes qui auraient une position de suiveur. L’aspect concurrentiel est particulièrement important dans le haut du classement, qui compte essentiellement des MBAs américains (six parmi les sept premiers). La comparaison des axes de communication des MBAs européens et américains, montre que les premiers cherchent plus à convaincre d’investir dans un diplôme de MBA, tandis que les seconds cherchent plus à se démarquer de leurs concurrents, en focalisant sur les avantages offerts par le programme spécifique de l’école plus que sur les avantages du diplôme de MBA en général.

51Aux États-Unis, le marché des MBAs prestigieux est plus concurrentiel qu’en Europe. La liste des vingt-cinq MBAs les plus réputés que nous avons établie, compte quinze MBAs situés aux États-Unis. Les dix autres se répartissent dans les différents pays d’Europe (Angleterre, Espagne, Italie, France, Suisse) et ont été introduits plus récemment. Les MBAs américains cherchent donc à se démarquer de leurs concurrents sur un marché mature. Les notions d’entrepreneuriat et d’innovation apparaissent comme des éléments de différentiation uniquement pour les MBAs américains du haut du classement. Ce haut du classement comprend des acteurs tels que Stanford, le MIT et Wharton, pour lesquels la place donnée à l’entrepreneuriat ne résulte pas d’une plus grande capacité à évoluer que les autres, mais d’une tradition entrepreneuriale plus ancienne. Beaucoup d’étudiants choisissent Stanford parce qu’ils sont attirés par la culture entrepreneuriale de l’école et de son environnement (Eesley et Miller, 2012). La perception traditionnellement moins positive de l’entrepreneuriat expliquerait un positionnement différent des écoles européennes (Carayannis, Evans et Hanson, 2003 ; Béchard et Grégoire, 2009). Cependant, l’attrait pour les carrières entrepreneuriales s’est beaucoup accru partout dans le monde (Sieger, Fueglistaller et Zellweger, 2016). Les écoles évoluent sur un marché de plus en plus compétitif au niveau mondial et les attentes des futurs étudiants devraient influencer les positionnements des formations, pour répondre au fort engouement pour l’entrepreneuriat dans des pays comme la Chine et l’Inde, ou des régions telles que l’Amérique latine et l’Est de l’Europe.

4.3 – La contribution des écoles au développement de la culture entrepreneuriale

52La presse et les organismes accréditeurs ne sont cependant pas les seules parties prenantes des écoles de management. Elles comprennent également les donateurs, les réseaux d’affaires, les éditeurs, les recruteurs et les acteurs politiques locaux et nationaux (Mailhot, Schaeffer et Simon, 2006 ; Iñiguez de Onzoño, 2011). Ces derniers sont soucieux de la contribution des acteurs de l’enseignement supérieur à la dynamique économique (Matt et Schaeffer, 2015) et incitent les écoles à développer les formations à l’entrepreneuriat (Gedeon, 2017 ; Wright, Siegel et Mustar, 2017). La multiplication de formations à l’entrepreneuriat s’inscrit dans une logique d’impératif éducatif (Chambard, 2013). Les écoles ont un rôle important à jouer dans les dynamiques locales en contribuant à diffuser une culture entrepreneuriale par la formation. La dynamique d’un écosystème entrepreneurial repose sur un ensemble d’acteurs (institutions d’enseignement supérieur et de recherche, entreprises, acteurs politiques, communautés), sur leurs interactions et sur la création d’un environnement culturel favorable à l’entrepreneuriat (Cohen, 2005). Les recherches relatives à la dynamique interne des écosystèmes entrepreneuriaux (Isenberg, 2010 ; Harrison et Leitch, 2010 ; Spigel, 2017) intègrent les attributs culturels propres au contexte social et à l’économie locale comme des facteurs déterminants (Bird, 1988 ; Katz et Gartner, 1988 ; Krueger et Carsrud, 1993 ; Gladwin et Kennelly, 1995). La formation à l’entrepreneuriat augmente l’intention d’entreprendre des étudiants (Sieger, Fueglistaller et Zellweger, 2016). Les écoles, comme les autres acteurs de l’enseignement secondaire ou supérieur, contribuent au développement d’une culture entrepreneuriale, selon des trajectoires propres à chaque contexte (Bécard et Grégoire, 2009 ; Spigel, 2017). Elles jouent ainsi un rôle dans l’attractivité des territoires sur lesquels elles sont implantées, en tant qu’acteur d’un écosystème local de l’innovation (Uzunidis, 2010).

53Les incitations des pouvoirs publics à développer la culture entrepreneuriale s’accompagnent de critères d’évaluation des programmes de formation qui mettent l’accent sur la création d’entreprise plus que sur le développement d’un esprit entrepreneurial. La dynamique de création d’entreprise peut se mesurer par le nombre d’entreprises créées, le montant des fonds levés par les créateurs d’entreprises ou le pourcentage d’étudiants ayant créé leur entreprise. En revanche, l’esprit d’entreprendre, qui repose sur le développement de comportements entrepreneuriaux est difficilement quantifiable. Cependant, outre ces aspects quantitatifs, les écoles disposent d’atouts pour favoriser les connexions entre start-ups, entreprises matures, étudiants, chercheurs et participer à l’émergence de territoires propices au développement de projets créatifs au sein de nouvelles entreprises ou d’entreprises plus matures.

Conclusion

54Les MBAs les plus réputés au niveau international, destinés à la formation des dirigeants d’entreprises, se décrivent avant tout comme une offre de mise en relation des étudiants et du monde des affaires. Les notions d’entrepreneuriat, d’innovation et de créativité apparaissent très en retrait par rapport aux notions de finance et de stratégie d’entreprise. La notion d’entrepreneuriat est plus présente dans les MBAs du haut du classement, mais cette différence semble plus liée à la culture entrepreneuriale du contexte local de certaines écoles américaines qu’à une aptitude plus importante à faire évoluer de l’intérieur les modèles de formation proposés. Lorsque l’entrepreneuriat apparaît, la notion d’esprit d’entreprise associée à la création d’entreprise prédomine par rapport à celle d’esprit d’entreprendre, plus axée sur le développement d’une culture entrepreneuriale. Cette prédominance est cohérente par rapport aux critères quantitatifs utilisés dans les classements des MBAs les plus tournés vers l’entrepreneuriat.

55Notre recherche contribue à asseoir empiriquement une littérature critique relative à la qualité de la formation des dirigeants par les écoles de management, qui dénonce la faible part donnée au développement des aptitudes entrepreneuriales dans les cursus de MBA. Elle confirme la forte influence des classements et des accréditations dans la conception des programmes de formation (Lejeune et Vas, 2009 ; Battalina et Casciaro, 2012 ; Gedeon, 2017), qui n’incitent pas à développer l’esprit d’entreprendre. Nos résultats contribuent à enrichir cette littérature, en montrant l’influence de la culture entrepreneuriale locale et de la concurrence entre écoles sur le positionnement des MBAs. Par ailleurs, notre recherche fait apparaître une vision de l’entrepreneuriat trop souvent réduite à la création d’entreprise, ignorant l’entrepreneur appartenant à une entreprise existante. Elle répond ainsi à une contradiction présente dans la littérature, qui d’une part critique l’absence de développement de l’esprit entrepreneurial dans la formation des dirigeants et d’autre part met en avant le développement des programmes de formation à l’entrepreneuriat dans ces mêmes écoles.

56Une vision plus large de la notion d’entrepreneur nous conduit à plaider pour le développement de l’esprit d’entreprise mais aussi de l’esprit d’entreprendre dans la formation des dirigeants, afin de favoriser la capacité d’adaptation et d’ouverture des organisations existantes. Pour les écoles de management, les enjeux sont multiples face aux critiques récurrentes formulées et au besoin des futurs diplômés des MBAs de développer les capacités pour diriger les organisations dans un monde complexe en constante évolution. À défaut de suivre cette démarche, le risque principal est de finir par opposer des spécialistes de l’innovation et de l’entrepreneuriat aux spécialistes de la gestion d’entreprise et de créer deux mondes peu enclins au dialogue et aux synergies. Les organisations manqueraient alors de capacité d’adaptation pour assurer dans la durée leur pérennité et leur efficience (Fonrouge, 2008).

57Si l’évolution des programmes de formation des cadres repose sur une vision plus large de la notion d’entrepreneur, elle repose également sur une vision plus large de la notion d’innovation. Elle est souvent limitée à sa dimension technologique, ignorant le champ de l’innovation managériale (Birkinshaw et Mol, 2006). L’innovation managériale repose sur la conception et l’introduction de nouvelles pratiques de management destinées à augmenter l’efficacité des organisations (Mol et Birkinshaw, 2009). Le renforcement de la capacité des dirigeants à développer et introduire des innovations managériales repose en partie sur des pédagogies favorisant le développement d’aptitudes comportementales et de la créativité des individus. Des écoles et des universités expérimentent de telles pédagogies, dans des contextes d’innovation technologique (Awang et Ramly, 2008 ; Daly, Mosyjowski et Seifert, 2014) ou d’innovation managériale (Chanal et Merminod, 2019). Ces pédagogies focalisent les apprentissages sur la manière de poser et d’analyser les problèmes, plus que sur la capacité à mobiliser des méthodes pour résoudre un problème, comme dans la méthode des cas. Notre propos n’est pas d’opposer ces pédagogies, mais de souligner leur complémentarité.

58Cette recherche présente aussi des limites qui ouvrent des pistes pour de futures recherches. Il serait intéressant de comparer les MBAs les plus prestigieux que nous avons considérés avec des formations créées plus récemment, qui ne sont pas dans cette compétition de tête, pour étudier plus largement le positionnement stratégique des écoles et l’émergence de modèles de formation différenciés. Il serait également intéressant d’étudier la manière dont les étudiants évaluent leur formation quelques années après l’avoir suivie, au-delà des critères liés au différentiel de revenu qu’ils en ont retiré, pour mieux appréhender le rôle des écoles dans le développement de l’esprit d’entreprendre. Les défis ouverts par le développement de l’esprit entrepreneurial sont encore nombreux pour les chercheurs en management, du fait de la difficulté à établir des liens entre des attitudes, des innovations managériales et des critères de performance.

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Mots-clés éditeurs : esprit d’entreprise, MBA, esprit d’entreprendre, entrepreneuriat, école de management

Date de mise en ligne : 09/07/2021

https://doi.org/10.3917/entre.202.0017

Notes

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

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