1En France, la signature de plusieurs accords-cadres (2006 et 2012) ainsi que les actions engagées par le monde politique depuis quelques années, témoignent du souhait de susciter davantage de vocations entrepreneuriales féminines. Les pays les plus actifs dans l’adaptation de l’accompagnement aux femmes entrepreneures (FE) voient systématiquement le nombre de ces dernières progresser (Stevenson, 2004). C’est sans conteste la raison qui a poussé le gouvernement français à faire de l’accompagnement un axe prioritaire de son plan de promotion de l’entrepreneuriat des femmes (Ministère des Droits des femmes, 2013).
2Si les programmes de soutien occupent un rôle central, la littérature académique sur le sujet demeure relativement marginale et provient majoritairement de sources anglo-saxonnes (Pettersson, 2012). Ces recherches mettent en évidence que les femmes manquent de connaissances sur les compétences nécessaires au développement de leur entreprise et doivent compter plus souvent sur elles-mêmes ou sur leurs réseaux relationnels pour accroître leurs compétences (Ettl et Welter, 2010). Lorsque les femmes se font accompagner, elles ne vont pas pour autant jusqu’à l’étape de création de leur entreprise. Ainsi, une étude menée par Chabbert et Deyris (2009) observe qu’il y a autant de femmes que d’hommes aux réunions d’information qui se déroulent en amont de la création d’entreprise. Malgré cela, à la fin du parcours, seulement 29 % des créateurs d’entreprises sortant de ce dispositif sont des femmes. Les recherches n’ont pas permis jusqu’ici d’identifier les raisons de cette déperdition, les organismes d’accompagnement disposant de peu de données sexuées.
3Dans cette perspective, cette étude exploratoire vise à proposer un modèle d’accompagnement qui correspond à la démarche entrepreneuriale des créatrices de TPE. Il s’agit donc de répondre aux questions suivantes : quelle est la logique entrepreneuriale des créatrices de TPE ? L’accompagnement actuel est-il adapté aux besoins des créatrices ? Comment les créatrices de TPE se représentent-elles l’accompagnement idéal ?
4Pour ce faire, nous avons mené une étude auprès de 10 femmes qui se situent en phase ante création. Nous avons également conduit des entretiens avec des conseillers qui travaillent dans un organisme d’accompagnement généraliste, celui auquel les créatrices, interrogées dans le cadre de cette étude, se sont adressées.
5Cet article apporte trois contributions principales à la littérature sur l’entrepreneuriat des femmes. Il expose, tout d’abord, une recension des travaux sur l’accompagnement de l’entrepreneuriat des femmes qui met en évidence une évolution critique dans les questionnements. Ensuite, il insiste sur la pertinence de mobiliser le concept de genre pour interroger les situations d’accompagnement. La prise en compte du genre, en tant que catégorisation socialement construite, permet de proposer de nouveaux modèles d’accompagnement. Enfin, cet article montre l’intérêt d’un accompagnement différencié qui combine plusieurs méthodes et pratiques d’apprentissage.
6La première partie de cet article présente le cadrage théorique de l’étude. Nous exposons les travaux consacrés à la diversité des accompagnements entrepreneuriaux avant de mettre en lumière les spécificités des femmes entrepreneures (FE), et de nous pencher sur les résultats des études empiriques consacrées à l’accompagnement des FE. Après avoir présenté, dans la seconde partie, les aspects méthodologiques de la recherche, nous exposons les résultats dans la troisième partie. Nous dévoilons d’abord la logique entrepreneuriale des femmes créatrices de TPE. Nous plongeons ensuite au cœur d’une situation d’accompagnement qui nous permet de faire émerger les premiers éléments de compréhension des attentes des FE concernant le soutien institutionnel. Enfin, ces éléments sont approfondis avec une présentation des caractéristiques de l’accompagnement « idéal » selon la perception des répondantes. La dernière partie s’attache à discuter les résultats avant d’évoquer les implications théoriques et managériales de ce travail.
1 – Revue de littérature
7Dans la première partie de ce travail, nous commençons par rendre compte de la nécessité d’adapter l’accompagnement au profil des entrepreneurs (1.1) puis nous nous intéressons aux obstacles spécifiques auxquels sont confrontées les FE (1.2) avant d’exposer une recension des travaux portant sur l’accompagnement des FE (1.3).
1.1 – La nécessité d’adapter l’accompagnement aux profils des entrepreneurs
8L’accompagnement des entrepreneurs augmente significativement les chances de succès des entreprises créées, aussi occupe-t-il une place importante sur l’agenda des pouvoirs publics et de la communauté académique depuis une dizaine d’années (Sammut, 2003 ; Messeghem, Carrier, Sammut, Thurik et Chabaud, 2013). Longtemps sous-exploré dans les recherches sur l’entrepreneuriat (Léger-Jarniou et Saporta, 2006), l’accompagnement des entrepreneurs fait aujourd’hui l’objet de multiples travaux qui interrogent l’adaptation de l’accompagnement au profil des accompagnés. Ceux-ci ne se ressemblent pas : ils ont des profils particuliers, des attentes différentes et des problématiques singulières à résoudre (Chabaud, Messeghem et Sammut, 2010). Les travaux sur l’entrepreneuriat des immigrés (Lévy-Tadjine, 2004), des éco-entrepreneurs (Berger-Douce, 2006), des jeunes (Léger-Jarniou, 2008), des entrepreneurs par nécessité (Nakara et Fayolle, 2012) et des mampreneurs (Richomme-Huet et d’Andria, 2013) mettent en lumière des spécificités qui permettent d’envisager le développement de dispositifs d’accompagnement propres à chaque groupe. Nakara et Fayolle (2012) observent par exemple que les structures d’accompagnement parviennent difficilement à répondre aux demandes spécifiques des entrepreneurs par nécessité. Ceux-ci se tournent alors vers les réseaux solidaires et les médias sociaux pour répondre à leurs interrogations. Les entrepreneurs sociaux initient pour leur part un modèle d’accompagnement fondé sur des apprentissages collaboratifs (Fabbri et Charue-Duboc, 2013). Les recherches sur l’adaptation de l’accompagnement montrent finalement qu’il apparaît pertinent de concevoir des dispositifs de soutien plus personnalisés, en fonction des types de profils de créateurs (Léger-Jarniou, 2005).
1.2 – Les spécificités et difficultés des femmes entrepreneures
9Les spécificités des femmes entrepreneures ont été mises au jour dans la littérature académique (Brush, 1992 ; De Bruin Brush et Welter, 2007), les études insistant sur le fait qu’elles bénéficient d’un environnement entrepreneurial moins favorable (Wilson et al., 2007 ; Jennings et Brush 2013). L’accès au financement est identifié comme un obstacle important dans le développement des entreprises dirigées par les femmes. Celles-ci disposent d’un capital réduit au moment d’entreprendre car elles ont été moins bien rémunérées quand elles étaient salariées (Carter et Rosa, 1998 ; Boden et Nucci, 2000 ; Cornet et Constantinidis, 2004 ; Fairlie et Robb, 2009). Par ailleurs, elles utilisent davantage leurs ressources personnelles et font très peu appel aux sources de financement externe à la fois pour le financement du démarrage et lorsqu’il s’agit de réinjecter de l’argent dans l’entreprise (Coleman et Robb, 2009). Elles sont très peu nombreuses à bénéficier du capital-risque puisque seulement 0,1 % des entreprises créées par les femmes en bénéficient contre 1 % des entreprises détenues par les hommes (Brush, Carter, Greene, Gatewood, Hart, 2002). Le financement est un déterminant non négligeable de la croissance de l’entreprise et de la performance (Berger et Udell, 1998). Cette réalité a sans nul doute poussé les pouvoirs publics à mettre en place une politique d’accompagnement ainsi qu’un ensemble d’outils financiers spécifiques aux FE pour pallier cet accès inégal entre les hommes et les femmes à des ressources nécessaires à la création et au développement de leurs entreprises (Greer et Greene, 2003).
10Toujours moins impliquées dans des activités de réseautage (Hampton, Cooper et Mc Gowan, 2009), les FE sont pénalisées dans l’augmentation de leur stock de connaissance et la croissance de leur entreprise (Hamouda, Henry et Johnston, 2003). Du fait de l’existence de freins reconnus dans d’accès aux réseaux (responsabilités familiales, distance géographique, moindre accès à l’information), Hamouda, Henry et Johnston (2003) insistent sur l’intérêt de développer des réseaux axés sur les besoins spécifiques des femmes. C’est ainsi que de nombreux réseaux d’affaires exclusivement féminins sont apparus sur le territoire français durant les dernières années. Ces réseaux visent à permettre aux FE de sortir de l’isolement et d’échanger sur des problématiques communes liées aux nouvelles attentes de leur rôle professionnel (Hampton, Cooper et Mc Gowan, 2009 ; Richomme-Huet et d’Andria, 2013).
11Plus éduquées, les FE manquent néanmoins de formation en gestion, ont une expérience professionnelle et managériale moins conséquente que celles des créateurs (Carter, Anderson et Shaw, 2001 ; Carrier, Julien et Menvielle, 2006). Les études montrent également que les FE ont une croyance plus faible en leurs capacités à devenir et réussir en tant qu’entrepreneure (Wilson, Kickul et Marlion, 2007 ; Dempsey et Jennings, 2014). Wilson et al. (2007) concluent que les étudiantes limitent leurs aspirations de carrières entrepreneuriales parce qu’elles sentent qu’elles n’ont pas les compétences requises. Le manque de confiance en soi, certainement le plus grand obstacle au cheminement des femmes à la tête de très petites entreprises (Fielden, Davidson, Dawe et Makin, 2003), influe sur leur intention entrepreneuriale et joue également sur les décisions prises par la suite (Kirkwood, 2009). Elles peuvent limiter l’expansion de leur entreprise, de peur de perdre le contrôle, sentiment étroitement lié à la confiance en soi (Kirkwood, 2009). Les dispositifs de soutien ont donc un rôle important en ce qu’ils peuvent modifier le niveau de confiance en soi des FE et, par là même, accroître leur intention entrepreneuriale et le développement de leur entreprise (Kirkwood, 2009).
12En effet, les femmes créent majoritairement de petites structures (Lee-Gosselin et Grise, 1990 ; Robichaud, Mc Graw et Roger, 2005). L’essor des petites entreprises est d’ailleurs perçu comme un moyen d’encourager le développement des territoires locaux et l’emploi des femmes (Nilsson, 1997). Les spécificités des petites entreprises ont été repérées dans la littérature (Marchesnay, 2003 ; Torrès, 2003 ; Robichaud, Mc Graw et Roger, 2005 ; Jaouen, 2010). La création de très petites entreprises correspond à un projet de vie et devient donc un mode de réalisation des objectifs personnels de l’entrepreneur (Jaouen, 2010). Les TPE poursuivent moins des objectifs de profitabilité que de succès définis à partir de la satisfaction des dirigeants (Jaouen, 2010). Ainsi, l’accompagnement des petites entreprises revêt un caractère spécifique (Rouault, 2006).
13Les secteurs d’activité majoritairement investis par les FE sont ceux de la santé, des services aux particuliers et aux entreprises, de l’éducation et du commerce de détail (Anna, Chandler, Jansen et Mero, 2000 ; APCE, 2014). Ces secteurs d’activité sont traditionnellement qualifiés de féminins dans la mesure où ils comptent davantage de femmes tandis que les secteurs d’activité masculins font référence à la technologie, l’industrie et la construction (Anna, Chandler, Jansen et Mero, 2000). Le secteur d’activité a un effet sur le processus de reconnaissance d’opportunités, la taille de l’entreprise ainsi que la croissance de celle-ci. Ainsi, les femmes se trouvant dans les secteurs traditionnellement féminins, seraient davantage motivées par des opportunités offertes par leur situation personnelle plutôt que par un processus de recherche délibérée (Anna, Chandler, Jansen et Mero, 2000). Elles ont de plus petites entreprises et développent une croissance plus lente que les femmes qui exercent leur activité dans des secteurs d’activité qualifiés de masculins (Buttner et Moore, 1997). La situation des femmes entrepreneures fait apparaître des aspirations et des pratiques de gestion différentes (Anna, Chandler, Jansen et Mero, 2000 ; Morris, Miyasaki, Watters et Coombes, 2006). Certaines dirigent des entreprises de haute croissance dans les domaines industriels et technologiques et ont des ambitions de croissance élevée ainsi qu’une appétence pour le risque (Morris, Miyasaki, Watters et Coombes, 2006). Tandis que d’autres créent de plus petites structures dans les secteurs d’activité du service et du commerce et privilégient une gestion prudentielle de leur activité (Anna, Chandler, Jansen et Mero, 2000). Aussi, des incubateurs à destination des porteuses de projets innovants sont apparus sur le territoire français au côté de structures d’accompagnement se focalisant sur d’autres types de créatrices.
14Il est donc important de considérer que les FE ne constituent pas un groupe homogène (Constantinidis, 2010) au risque que les processus d’accompagnement ne reproduisent des stéréotypes de genre (Ahl, 2006). Toutefois la structure genrée de notre société et le fait de considérer que la norme entrepreneuriale implicite est masculine, conduit à la rencontre de difficultés semblables pour les femmes (Mirchandani, 1999). Celles-ci sont motivées pour devenir entrepreneures en raison de “gender splitting” qui sont des barrières culturelles, sociales et sexuées (Riebe, 2005). Elles perçoivent un salaire inférieur à celui de leurs homologues masculins et le plafond de verre freine leur accès à des postes à responsabilités. Une fois entrées dans la carrière entrepreneuriale, elles font face à ces “gender splitting” qui se manifestent par un moindre accès à des ressources importantes pour le développement de leurs entreprises : elles rencontrent en effet des difficultés d’accès au réseau, à l’information et au capital (Green et al., 2003 ; Carrier, Julien et Menvielle, 2006).
15Par conséquent, bien que les FE ne forment pas un ensemble aux caractéristiques similaires, elles ont en commun de rencontrer des difficultés liées à la persistance d’obstacles légaux, culturels et institutionnels. Aussi, pour aider les FE à surmonter ces barrières spécifiques qui affectent la reconnaissance et l’exploitation des opportunités entrepreneuriales (De Bruin, Brush et Welter, 2007 ; Manolova, Brush et Edelman, 2008), les politiques nationales et régionales de soutien à l’entrepreneuriat, et les services d’appui proposés sont prépondérants (Costin, 2012). L’accompagnement institutionnel peut, en effet, permettre aux FE de soutenir le développement de leur entreprise et d’en assurer la pérennité (Treanor et Henry, 2011).
1.3 – L’accompagnement des femmes entrepreneures
16L’accompagnement des FE, et a fortiori des créatrices de très petites entreprises, est une question très peu explorée dans la littérature en entrepreneuriat. Nous avons donc procédé à une recension des travaux portant sur cette thématique. Le tableau 1 met en évidence les questions de recherche soulevées ainsi que les principaux résultats.
Approche comparée d’études sur l’accompagnement des femmes entrepreneures
Approche comparée d’études sur l’accompagnement des femmes entrepreneures
17Les études proviennent majoritairement des pays de l’Europe de l’Ouest. Les pouvoirs publics de ces pays se sont en effet interrogés sur l’intérêt de mettre en place des activités de conseils et de formations spécifiques aux femmes (Wilson, Whittam et Deakins 2004). Une question majeure dont les recherches se font l’écho. Les motivations des FE ainsi que les obstacles spécifiques auxquels elles sont confrontées constituent des éléments solides pour justifier de la nécessité de mettre en place des programmes d’accompagnement spécifiques (Pardo-del-Val, 2010 ; Drine et Grach, 2012).
18Les recherches s’accordent pour observer que les valeurs socio-culturelles sexuées sont profondément enracinées et intégrées dans l’environnement légal et les mécanismes de soutien institutionnel. Le genre a une influence sur l’entrepreneuriat des femmes et doit donc être pris en considération dans leur accompagnement (Treanor et Henry, 2010). Toutefois, les recherches divergent sur la façon dont on peut parvenir à intégrer le genre dans l’accompagnement. Si certaines études prônent la mise en place de programmes d’accompagnement spécifiques, d’autres au contraire insistent sur la nécessité d’intégrer la problématique du genre dans les dispositifs d’accompagnement généralistes.
19Ainsi, Nilsson (1997) observe que les structures d’appui spécifiques aux femmes peuvent avoir des difficultés à obtenir une reconnaissance des autres acteurs de l’accompagnement présents sur leur territoire. Ces structures doivent alors faire appel au soutien des organismes réservés aux femmes se situant dans les régions voisines pour asseoir leur positionnement et consolider leur légitimité au sein de l’écosystème entrepreneurial. Les processus de sélection des femmes dans les incubateurs exclusivement composés de créatrices ne sont pas exclus de partialité et tendent aussi à considérer que la norme entrepreneuriale est masculine (Tillmar, 2007). Il faut être, de plus, attentif au fait que les programmes d’accompagnement réservés aux femmes peuvent reproduire les stéréotypes de genre en situant les femmes dans une position secondaire par rapport aux hommes (Pettersson, 2012).
20Tillmar (2007) avance que des programmes spécifiques pour les femmes sont nécessaires mais les conseillers doivent avoir une haute compréhension de ces mécanismes de genre afin qu’ils n’influencent pas le processus de sélection (Tillmar, 2007). Dans cette même optique, Treanor et Henry (2010) soulignent que les incubateurs ont intérêt à cibler les activités de sensibilisation pour y augmenter la proportion d’entreprises dirigées par les femmes. Ceux-ci peuvent également recruter des femmes, conseillères en affaires ou formatrices, et veiller à ce que le soutien et les services offerts répondent aux besoins des femmes (Treanor et Henry, 2010). Pour Drine et Grach (2012), l’accompagnement a un effet positif sur la satisfaction des FE, laquelle influe sur la performance des entreprises (Lee, Sohn et Ju, 2011). Toutefois les FE ne constituent pas un groupe homogène et par conséquent ne trouvent pas toujours dans les dispositifs d’accompagnement qui leur sont réservés les réponses à leurs attentes. Certaines décident donc de se regrouper et de créer leurs propres outils d’accompagnement (Richomme-Huet et d’Andria, 2013).
21Cet exposé de la littérature a renforcé l’intérêt de questionner l’accompagnement des FE, et plus particulièrement des créatrices de petites entreprises largement majoritaires (Fouquet, 2005). La suite de cet article tentera donc de circonscrire la logique entrepreneuriale de ces FE et d’examiner si l’accompagnement actuel est adapté à leurs besoins. Nous verrons finalement comment les créatrices de TPE se représentent l’accompagnement idéal. Avant d’exposer les résultats de l’étude empirique, nous présentons la méthodologie utilisée pour collecter et analyser les données.
2 – Méthodologie
2297 % des entreprises en France sont des très petites entreprises (TPE) et plus de la moitié des femmes travailleures indépendantes (55 %) sont dirigeantes de micro-entreprises n’employant qu’elles-mêmes (Fouquet, 2005, Bernard, Le Moigne et Nicolaï, 2013). Parce qu’elle concerne plus de la moitié des femmes chefs d’entreprise, la structure juridique micro-entreprise sans salarié a retenu notre attention ; toutes les créatrices interrogées envisageant de créer seules.
23Étant donné le nombre limité de travaux sur cette question, une étude exploratoire nous a semblé être une solution adaptée (Wacheux, 1996). Nous avons privilégié une logique qualitative inductive visant à écouter les porteuses de projet et les accompagnants pour éclairer la dynamique de cette relation et comprendre les raisons de son succès ou de son échec (Wacheux, 1996). Nous avons retenu dix créatrices en prédémarrage, dont la présentation est proposée dans le tableau 2. Les secteurs d’activité sont ceux majoritairement investis par les femmes, à savoir les activités commerciales, les services aux particuliers et les services aux entreprises. Cinq femmes sur les dix créatrices interrogées ont bénéficié de l’accompagnement d’une même structure. Le choix a été fait d’accueillir également les témoignages des femmes non accompagnées (cinq femmes) afin de comprendre les raisons qui les ont poussées à ne pas suivre d’accompagnement institutionnel. Léger-Jarniou (2005) recommande en effet de mener des recherches auprès des créateurs qui refusent d’être accompagnés afin qu’ils identifient les caractéristiques de l’accompagnement idéal.
Présentation des cas
Présentation des cas
24L’organisme d’accompagnement retenu est celui auquel les créatrices se sont adressées. Il faut noter qu’elles ont eu recours à la même structure d’accompagnement. Celle-ci a été créée en 1989 à l’initiative d’entrepreneurs qui ne trouvaient pas la réponse à leurs besoins dans les dispositifs existants. Ces entrepreneurs souhaitaient offrir aux porteurs de projets une aide à l’émergence de leur idée. Pionnière de l’accompagnement à la création d’entreprise, cette structure s’étend sur 53 structures associatives et 450 implantations de proximité sur toute la France. Elle accueille des individus qui ont un projet de création et propose des accompagnements individualisés de trois mois avec des conseillers en création d’entreprise. Tous les créateurs y sont accompagnés de la même façon sans qu’il ait été défini de parcours spécifique pour les femmes. Concernant plus particulièrement la structure avec laquelle nous avons travaillé, elle se situe en région Bretagne et accueille environ 1 200 personnes en information collective sur une année. 800 accompagnements sont effectués et près de 250 entreprises sont ainsi créées. Les conseillers interrogés dans le cadre de cette recherche ont un profil juridique pour le premier (homme âgé de 55 ans) et comptable (femme âgée de 35 ans) pour la seconde.
25Nous avons interrogé les créatrices sur leur parcours entrepreneurial, leurs motivations, leurs perceptions de l’accompagnement – notamment les effets qu’il avait sur elles-mêmes et leur projet – et leurs attentes quant à un accompagnement « idéal ». Pour celles qui n’ont pas été accompagnées par un organisme, des questions ont été posées sur les raisons de ce choix. Nous avons questionné les accompagnants sur leurs pratiques, la forme et le contenu de l’accompagnement, la mesure de son efficacité, le processus de sélection et leurs perceptions de l’entrepreneuriat des femmes. Des questions sur les projets des cinq créatrices ayant suivi l’accompagnement ont également été posées. Cela nous a permis de confronter les perceptions des créatrices et des accompagnateurs sur le projet de création d’entreprise de ces femmes.
2626 entretiens d’une durée moyenne de 120 minutes ont été conduits avec les dix créatrices. Il faut noter que cette recherche sur l’accompagnement s’intègre dans une recherche plus longue que la seule période de création puisqu’elle étudie le processus entrepreneurial des femmes sur une durée de trois années. Nous avons mené entre deux et quatre entretiens avec chaque créatrice. Les questions sur les motivations entrepreneuriales et sur l’accompagnement tel qu’il était vécu par les femmes étaient posées au cours du premier entretien tandis que le thème des caractéristiques de l’accompagnement idéal était évoqué au cours des entretiens suivants. Quatre entretiens avec la directrice et avec deux de ses salariés ont été menés. Nous avons eu l’occasion d’échanger avec la directrice et ses salariés de manière plus informelle lors des salons sur la création d’entreprise. Il faut noter que la directrice de la structure a aussi un rôle d’accompagnatrice. Tous les entretiens ont été enregistrés et ont fait l’objet d’une retranscription intégrale
27La méthode retenue pour le traitement des données est l’analyse de contenu thématique (Miles et Huberman, 2003). Nous avons élaboré une liste de codes : ce sont des « étiquettes » ayant pour fonction de contribuer au traitement des données. La progression de notre analyse a observé le passage du codage descriptif au codage plus explicatif.
28Alors que le codage descriptif consiste à synthétiser des segments de données, le codage explicatif vise à « regrouper ces résumés en un nombre plus réduit de thèmes ou d’éléments conceptuels plus synthétiques » (Miles et Huberman, 2003 : 133). L’utilisation d’un logiciel de traitement des données qualitatives – le logiciel Nvivo 8 – a facilité la structuration du travail d’analyse.
29Cette démarche méthodologique, associant d’un côté les discours sur les pratiques qui caractérisent une structure d’appui et, de l’autre, les récits des femmes sur leurs attentes en matière d’accompagnement et le rôle qu’a pu y jouer la structure d’appui, nous paraît particulièrement adaptée à l’objectif de cette recherche. Celle-ci vise à identifier les termes d’un accompagnement qui correspond à leur démarche entrepreneuriale.
3 – Résultats
30Afin d’atteindre cet objectif, nous répondrons aux questions suivantes :
- Quelle est la logique entrepreneuriale des créatrices de TPE ? (3.1)
- L’accompagnement actuel est-il adapté aux besoins des créatrices ? (3.2)
- Comment les créatrices de TPE se représentent-elles l’accompagnement idéal ? Recommandent-elles de mettre en place un accompagnement spécifique à l’entrepreneuriat des femmes ? (3.3)
3.1 – Créer son entreprise pour donner du sens à sa vie
31Les femmes interrogées ont exprimé le souhait d’investir leur domaine de créativité et de créer un projet en rapport avec ce qui les anime profondément :
« Je décide de faire un travail qui me plaît et que j’aime. On est davantage dans l’accomplissement personnel ».
33Selon Denave (2006 : 91), « Être heureux dans son travail passe par l’actualisation d’une partie de ses dispositions […] le changement professionnel peut correspondre à la résurgence d’un désir professionnel enfoui depuis plusieurs années ». Ces FE souhaitent en effet développer leurs compétences afférentes à l’« être » plus qu’au « faire ». Elles poursuivent le but de « se faire plaisir, pour être épanouies et être bien avec elles-mêmes » (Élisabeth).
34C’est certainement aussi la raison du changement d’activité puisque nous notons que la plupart des créatrices (sept créatrices sur dix) ont entrepris dans un secteur complètement différent de celui dans lequel elles évoluaient auparavant. Une étude de l’APCE (2007) confirme d’ailleurs ce phénomène. Ingénieur dans le domaine des cosmétiques, France est aujourd’hui mosaïste d’art ; assistante de direction dans le froid industriel, Françoise est désormais organisatrice de voyages ; secrétaire, Élisabeth se forme au stylisme et crée son entreprise dans ce domaine.
35Les créatrices que nous avons rencontrées cherchent à donner du sens à leur action, qu’elles inscrivent dans un véritable projet de vie. Il est intéressant de relever que plusieurs entrepreneures dans notre échantillon font référence au terme « tripal » pour qualifier leur entrepreneuriat. Le terme « tripal » se rapporte à celui de « tripe » qui signifie dans ce contexte « ce qu’il y a de plus intime, de plus profond en soi » [1].
« Demain, on m’aurait dit “bon voilà écoute j’ai un super plan, on ouvre une entreprise de vente de chaussures High-Tech avec des bulles d’air. J’ai un ami qui a ouvert la même chose, il est milliardaire. Cela va marcher”. Je n’y serais pas allée. Parce que c’est tripal, il y aurait eu la motivation de gagner de l’argent certes, mais il n’y aurait pas eu la motivation d’un mieux-être dans ma vie, c’est-à-dire pas un mieux-être matériel mais un mieux-être personnel ».
37Ainsi, l’authenticité et le souhait de vérité avec soi-même animent la démarche entrepreneuriale de ces femmes. Le souci des autres qui renvoie à la notion d’altruisme, est également manifeste. L’analyse des données met en évidence une propension des entrepreneures à utiliser leur expérience entrepreneuriale afin de faire progresser la société.
38Ce qui apparaît très prégnant est la volonté des femmes de contribuer, non seulement à leur propre épanouissement, mais également à celui des autres : les proches, les femmes, les jeunes, les hommes. Les résultats de notre recherche nous amènent donc à qualifier la logique entrepreneuriale des femmes de logique socio-émancipatrice dans le sens où elles souhaitent donner du sens à leur vie, tout en intégrant le souci des autres dans leur démarche entrepreneuriale.
39Les propos de la directrice de l’organisme d’accompagnement illustrent clairement cette logique :
« Les femmes vont oser faire un projet en accord avec soi. Parce que, pour les femmes, cela doit partir plus d’elles et elles ne vont pas vouloir partir du marché. […] Une femme souvent crée son entreprise parce qu’elle aime ce qu’elle fait. Soit elle aime ce qu’elle fait, soit il y a une considération sociale, ce qu’elle fait sera bien pour d’autres individus ».
41La logique entrepreneuriale socio-émancipatrice est sous-tendue par l’idée que les femmes entreprennent non seulement pour elles-mêmes, mais cette expérience devra leur permettre d’être un véritable vecteur de l’épanouissement de nombreux individus (famille, clients, jeunes, femmes, porteurs de projets, etc.). En somme, l’entrepreneuriat de ces créatrices de TPE est engagé et engageant. Il s’inscrit donc dans une quête de sens, laquelle implique d’approfondir le travail sur l’intention et la vision du projet durant l’accompagnement. L’organisme d’appui retenu dans le cadre de cette recherche observe-t-il cette réalité ?
3.2 – Inadéquation des pratiques d’accompagnement avec les attentes des créatrices de très petites entreprises
42Après avoir caractérisé la démarche entrepreneuriale des créatrices de TPE, nous exposons les premiers éléments de compréhension de leurs attentes concernant l’accompagnement institutionnel. Pour cela, nous observons les besoins couverts par la structure d’appui : celle-ci tente-t-elle de travailler sur les aspirations de la porteuse de projet ? Apporte-t-elle des ressources afin de pallier un manque ? Et étudie-t-elle l’environnement du projet, quelle que soit sa nature ?
3.2.1 – Une demande focalisée sur les aspirations face à une offre concentrée sur l’environnement
43La logique socio-émancipatrice dans laquelle les créatrices inscrivent leur entrepreneuriat les conduit à vouloir travailler prioritairement sur leurs aspirations avant de se questionner sur leurs ressources ou leur environnement. Mais l’offre proposée ne semble pas aller dans cette direction. Au contraire, l’organisme d’accompagnement se focalise sur l’étude de l’environnement sectoriel et sa composante : l’étude de marché.
« À la réunion d’information, les statistiques sont toujours évoquées en premier. C’est important mais quand même, une entreprise commence par une idée, ça ne commence pas par des chiffres. Les chiffres viennent après. Eux font l’inverse ».
« L’accompagnement est bien perçu par les créateurs qui savent ce qu’ils veulent faire, mais sans avoir aucune idée de l’environnement de la création d’entreprises ».
46C’est souvent avec une grande réserve que les créatrices interrogées passent la porte d’un organisme d’accompagnement et qu’elles présentent leur projet, le plus souvent pour la première fois, à un regard extérieur, qualifié d’expert en gestion de la création d’entreprises. Nos répondantes attendent donc une ouverture et une compréhension de la part de leurs conseillers. Mais la difficulté à appréhender les « nouveaux métiers » qui découlent de cette logique entrepreneuriale socio-émancipatrice (secteurs du bien-être et du service à la personne) rend délicate la rencontre avec leurs conseillers, comme le montrent les deux extraits suivants :
« Quand ce sont des profils comme une commerçante, il n’y a aucun souci. Ces projets sont plus mis en avant et montrés en exemple par rapport à quelqu’un qui s’installe pour faire du massage ».
« Parce qu’ils ne croient pas encore aux nouveaux métiers. Comme le métier n’a pas de code, cela n’existe pas ».
49Christelle qui souhaitait proposer des prestations d’audio-biographie, Suzie dont le projet était de s’installer comme massothérapeute ou Françoise qui poursuivait l’objectif de créer des voyages à thèmes n’ont pas perçu un écho favorable de la part des conseillers. Deux d’entre elles (Suzie et Françoise) ont alors préféré ne pas poursuivre l’accompagnement.
50Les créatrices observent la nécessité d’aborder l’étude de marché, mais elles préconisent que cela soit réalisé dans un deuxième temps, après avoir clarifié la question des aspirations. De même pour la question des finances que les créatrices souhaitent traiter plus tard dans l’accompagnement. Si ces questions sont évoquées trop tôt dans le cadre de l’accompagnement, cela aura un effet négatif selon les répondantes. Elles se sentent en effet mises sous pression et peuvent rompre l’accompagnement, les créatrices préférant ne plus revenir, comme nous le relate Gabrielle :
« Je suis partie de ce rendez-vous complètement stressée et j’ai dit : “non, je ne pourrai pas aller là-dedans”. Si on me met la pression, cela ne me correspond pas ».
52Entraînées par la passion et la quête de sens, les créatrices arrivent dans la structure avec beaucoup d’envies et d’aspirations qu’elles souhaitent évoquer et travailler. La rencontre avec l’organisme davantage focalisé sur l’analyse du marché se révèle peu satisfaisante pour les FE.
3.2.2 – Une demande de personnalisation et d’aide au montage du projet face à une offre normée et évaluative
53Dans la mesure où les femmes recherchent une personnalisation, l’approche classique et normée de la structure d’accompagnement ne semble pas réellement correspondre aux attentes de celles que nous avons rencontrées.
« Je parle par rapport à l’organisme d’accompagnement qui pour moi n’est pas un bon accompagnement parce qu’ils font dans le tout basique. Moi je pense qu’on ne pourra jamais monter une entreprise de pain comme on monte une entreprise de chaussures […] il y a aussi une sensibilité de chacun, ce ne sont pas les mêmes produits, donc ce n’est pas possible de faire un manuel de A à Z et vous faites ça et c’est comme ça. Et si vous oubliez le D, cela ne va pas marcher ».
55La directrice de l’organisme d’accompagnement explique que la méthodologie est « très précise, écrite mot pour mot ». Elle a conscience que « le côté négatif de cela est qu’il n’y a pas beaucoup d’adaptabilité dans l’accompagnement » mais comme elle le remarque « le côté positif est qu’un conseiller peut en remplacer un autre ». Cette structuration de l’accompagnement est perçue par nos répondantes comme « rigide » et ne permettant pas de satisfaire aux besoins parfois distincts des entrepreneures. Gabrielle utilise d’ailleurs la métaphore des figures géométriques pour illustrer cette inadaptation.
« Il faut que ton profil de femme et ton cursus professionnel entrent dans une case, comme si c’était une ligne droite. Mais je ne suis pas une ligne droite, moi je suis en rondeur et en courbe ».
57La responsable de l’organisme d’accompagnement observe d’ailleurs les limites :
« Il y a quand même plusieurs types de personnes et c’est évident que tout le monde ne peut pas se retrouver dans un cadre rigide ».
59La mission donnée initialement à la structure d’accompagnement qui visait l’aide à l’émergence de l’idée, a été supplantée par des objectifs plus quantitatifs d’installation d’entreprises. L’organisme d’accompagnement opère ainsi une sélection pour retenir les projets les plus aboutis, comme nous le confirme un des salariés de l’organisme d’accompagnement.
« Alors que la structure a été créée au départ pour accompagner les projets en amont, on s’oriente davantage vers un accompagnement qui mène à une installation juridique d’activité […] Et ceux qui ne sont pas prêts, il leur est conseillé de mûrir leur projet avant de venir ».
61France qui souhaitait créer une entreprise de décoration d’intérieur observe que l’organisme d’accompagnement « était là pour vérifier la viabilité de l’idée et du processus, mais ils ne sont pas là pour aider à monter le projet ». Cette fonction d’aide à la prise de décision qui est supplantée au profit d’une démarche évaluative a des conséquences dommageables selon les créatrices de TPE. Célia qui a décidé de ne pas suivre l’accompagnement rapporte :
« Souvent aussi, on se frotte à ça dans les organismes d’accompagnement. Donc à force de se casser le nez à ne pas rentrer dans leur case, tu ne vas plus te casser le nez du tout et tu fais ton bonhomme de chemin comme ça ».
63Ce témoignage montre les réticences des FE à s’adresser à une structure de soutien par peur de vivre cette évaluation-sélection de leur projet, certaines préférant alors ne pas faire appel à leurs services. Pour celles qui ont bénéficié de l’appui institutionnel, le fait d’inscrire leur projet de création d’entreprise dans un véritable projet de vie rend d’autant plus difficile la prise de recul par rapport à l’évaluation de l’organisme. En phase d’émergence d’idées, elles font appel à l’organisme d’accompagnement afin de les aider à faire aboutir ce projet de vie. Toutefois, l’étude empirique montre que la structure d’appui peine à adapter sa démarche d’accompagnement à ces modèles entrepreneuriaux et leur permet difficilement de passer « du rêve à la réalité ».
3.3 – Regard des créatrices sur l’accompagnement « idéal »
64Pour pouvoir aller plus loin dans la compréhension de l’accompagnement des créatrices de TPE, nous avons cherché à identifier les caractéristiques d’un accompagnement « idéal » correspondant à leurs attentes. En effet, qu’elles aient obtenu ou non un soutien institutionnel, les dix répondantes vont finalement créer leur entreprise. Pourtant, elles témoignent toutes de la nécessité de mettre en œuvre un dispositif d’appui dont les termes sont à présent développés.
3.3.1 – Un accompagnement qui intègre les sphères personnelle et professionnelle
65Selon les créatrices de TPE, il est essentiel que l’accompagnement aborde les implications d’une carrière entrepreneuriale aux niveaux personnel et professionnel.
3.3.1.1 – Au-delà d’un appui technique, l’importance du soutien psychologique
66Durant la phase de projet et les débuts de la vie de l’entreprise, les créatrices soulignent avoir particulièrement besoin de mener une réflexion plus personnelle sur leur positionnement et la reconnaissance de ce qu’elles sont capables de faire. Le témoignage suivant révèle en effet qu’il s’agit de contribuer à leur propre valorisation et au développement de leur légitimité.
« Je crois que je suis ma pire ennemie. C’est le fait de ne pas croire en moi. Ne pas avoir eu une caution de quelqu’un, une personne-ressource qui puisse me légitimer dans ce que je faisais a été difficile ».
68Pour les aider à surmonter le manque de confiance en soi qui constitue un obstacle important à l’entrée des femmes dans l’entrepreneuriat et à leur progression (Fielden, Davidson, Dawe et Makin, 2003 ; Koellinger, Minniti et Schade, 2006), les créatrices attendent de se voir proposer des outils afin d’apprendre à se positionner et à décider dans leur nouveau rôle d’entrepreneure.
69L’entrepreneuriat implique une plus grande liberté dans la gestion de l’agenda et cette totale maîtrise décisionnelle signifie que les femmes ne peuvent imputer la cause de leur absence à d’autres personnes. Cela peut donc renforcer le sentiment de culpabilité qu’elles éprouvent à l’égard de leur famille. Celles-ci travaillent beaucoup et sont parfois amenées à rentrer tardivement le soir afin de rencontrer des clients. France nous fait part de son sentiment de culpabilité à l’égard de ses enfants qui lui font d’ailleurs remarquer son absence. Selon cette entrepreneure, « l’accompagnement peut aussi aider à sortir d’un sentiment de culpabilité ».
70D’autres thématiques comme la conciliation des vies professionnelle et personnelle, la gestion du stress et la relation à l’argent sont aussi mises en avant par les répondantes.
« Il faudrait aborder la gestion du développement personnel. Des conférences sur la gestion du temps et la gestion du stress, la relation à l’argent. […] Comment je mets mon travail à côté de ma porte d’entrée, à la maison ? Parce que sinon, on ne le débranche jamais. Ça c’est très important. Fondamental. Fon-da-men-tal. C’est un accompagnement précieux ».
72L’accompagnement doit également aborder une dimension en lien avec le développement professionnel. Les questions de compétences techniques requises pour développer son entreprise se posent avec insistance au bout de quelques semaines, voire quelques mois après le lancement. Mais comme le constatent les entrepreneures, il est pourtant important de mûrir le projet entrepreneurial et d’explorer la majorité des points liés à la création de l’entreprise, préalablement au lancement juridique. Celles qui n’ont pas suffisamment travaillé leur « projet d’entreprendre » en amont, témoignent d’un manque de savoir-faire opérationnel et font part de leurs regrets. Des actions de formation très spécifiques sur le métier d’entrepreneure et les compétences opérationnelles sont donc sollicitées par les créatrices.
73Les points à aborder concernent par exemple la définition de l’offre, l’identification des canaux de distribution et de communication, la négociation d’un prêt bancaire, la tenue d’une comptabilité ainsi que la relation aux clients. Les créatrices souhaitent « apprendre à se vendre », une compétence qu’elles jugent indispensable pour créer leurs entreprises et pour laquelle elles estiment avoir besoin d’être formées.
« Du commercial, du marketing, il faut qu’on apprenne à se vendre. Ça, c’est très important, c’est la clé de tout […] La démarche prospection car ce n’est pas facile, je dois me faire violence. J’ai besoin d’être encouragée et valorisée ».
75Les FE ont pour la plupart d’entre elles changé de secteur d’activité et doivent donc construire un nouveau réseau professionnel. Elles soulèvent leurs difficultés à approcher les organisations professionnelles auprès desquelles elles auraient tout intérêt à faire connaître leur offre. Un appui dans la mise en réseau est donc souhaité, comme le révèle l’extrait ci-dessous.
« Apprendre à faire et à avoir des réseaux, c’est important je pense. Ce n’est pas quelque chose d’inné non plus […] Que l’accompagnateur décide qu’il a quelqu’un à te faire rencontrer »
77Les créatrices reconnaissent l’importance de traiter les aspects financiers du projet durant l’accompagnement mais insistent sur la nécessité de ne pas aborder cette thématique en priorité. Il est en effet difficile pour elles de traiter les questions liées au financement ou au modèle de revenu de leur projet alors même que celui-ci n’est pas encore abouti.
« L’accompagnement idéal serait de ne pas mettre de pression financière. C’est comme une épée de Damoclès. On n’est même pas encore inscrite à l’Urssaf qu’on nous dit : c’est quoi votre chiffre d’affaires la première année ? […] Je trouve que cela met une pression vraiment importante ».
79Finalement les extraits illustrent la complexité du rôle d’entrepreneur et la mise en avant d’un accompagnement dépassant largement les frontières techniques de la création d’entreprise pour appréhender le développement de compétences comportementales. L’objectif est ainsi d’amener les créatrices à gérer au mieux les dilemmes et potentiels conflits afférents à leur changement de rôle.
3.3.1.2 – La prise en compte de l’environnement familial
80Les répondantes recommandent également d’intégrer le conjoint mais également les enfants dans l’accompagnement. Christelle dont le conjoint a été d’un fort soutien émotionnel et opérationnel dans le développement du projet entrepreneurial observe :
Le conjoint est perçu par les créatrices comme ayant un rôle très important dans le développement de leur projet entrepreneurial. Elles insistent particulièrement sur l’importance d’obtenir le soutien et la compréhension de la personne qui partage leur vie. Selon les répondantes, les dispositifs d’appui pourraient développer des modules de formation à destination des proches afin de leur expliquer les conséquences d’un choix de carrière entrepreneuriale et de leur donner des conseils pour soutenir au mieux la créatrice. L’implication du conjoint dans l’accompagnement est, par conséquent, considérée par les FE comme pouvant réellement améliorer les chances de succès du projet de création (Chasserio, Lebègue et Poroli, 2014).« Il s’agit juste de les faire parler de la façon dont ils comprennent le défi que s’est lancé la personne. Comment le vivent-ils ? Qu’en pensent-ils ? […] Sont-ils prêts car on sait que se lancer dans la création d’une entreprise, c’est un défi […] Dire à la famille comment être armé pour vivre ça. Je ne sais pas quels mots il faudrait utiliser avec des enfants ».
3.3.2 – La forme de l’accompagnement : le groupe pour apprendre
81En ce qui concerne la forme de l’accompagnement, les créatrices mettent toutes l’accent sur le besoin de prévoir une période d’accompagnement d’une année en amont du projet. Elles insistent également sur la nécessité d’être suivies à la suite du lancement pendant deux années. L’entrepreneuriat implique de nombreux changements dans la vie conjugale et familiale et la mise en place d’un accompagnement sur une durée relativement longue permettrait aux femmes de gérer ces changements au mieux : Sylvie et France témoignent ainsi :
« Est-ce que c’est juste financièrement ? Pour mes enfants ? Pour mon mari ? Comment j’organise ma vie ? […] Sincèrement je dis 3 ans c’est bien ».
« N’importe qui peut créer une entreprise mais après, la pérenniser, n’importe qui ne peut pas le faire. Et l’accompagnement il est utile, parce qu’après, le chef d’entreprise, il est extrêmement seul. Et il est précieux cet accompagnement ».
84L’accompagnement pourrait concilier des méthodes d’apprentissage collectif et individuel. Les créatrices observent, en effet, que des séances de groupe sont parfaitement adaptées dans le cas où il s’agit de transmettre des informations générales. Le groupe, lieu d’échanges féconds, contribue également à l’enrichissement mutuel, comme le souligne Suzie :
« Les deux : un petit peu d’individuel et beaucoup de groupe. Pour moi, cela a été vraiment plus important sur la fin d’échanger. Je me dis que si j’avais échangé plus, si j’avais pu entendre les questionnements de certains ou les avancements de certains, j’aurais été plus dans l’action ».
86La plupart des créatrices démarrent leurs activités de chez elles (huit d’entre elles). Bien que cette pratique réduise les frais engagés, au début de l’activité, les entrepreneures en observent très rapidement les limites. En effet, la vie professionnelle est parasitée par les tâches domestiques. Le fait de travailler chez soi peut renforcer l’isolement vécu par les créatrices. Aussi, certaines proposent la mise en place de pôles privés dédiés à l’entrepreneuriat des femmes.
« Je rêve toujours d’un pôle privé à l’entrepreneuriat, une sorte de pépinière d’entreprises mais pas telle qu’elle existe aujourd’hui. […] Un bouillon d’énergie. Un lieu où on puisse travailler en synergie les unes avec les autres. […] C’est l’énergie qu’ensemble on peut développer ».
88Elles insistent sur le sentiment de solitude qu’elles éprouvent tout au long de ce parcours de création d’entreprise et les effets positifs que génèrent les discussions avec d’autres FE. La notion d’échange est donc au cœur du processus d’apprentissage entrepreneurial, selon les FE, et renvoie à leur volonté de pouvoir se retrouver autour de problématiques communes et ainsi de bénéficier de l’expérience des unes et des autres.
3.3.3 – Quelle relation d’accompagnement pour un soutien satisfaisant : le point de vue des créatrices
89La suite de ce travail consiste à caractériser la philosophie de l’accompagnement et à insister sur la mise en place de modules réservés aux FE. Nous verrons comment les mécanismes de genre doivent être considérés dans la conception des dispositifs de soutien.
3.3.3.1 – La philosophie de l’accompagnement : une écoute respectueuse des femmes entrepreneures
90Selon ces FE, projet et porteur de projet ne peuvent être dissociés. L’individu porte le projet, lui donne corps, le conceptualise, le cartographie, le présente, le fait évoluer, le transforme, le crée. Ainsi, l’accompagnement doit mener à un travail en profondeur au côté de la femme porteuse de projet. L’acceptation du parcours de chaque créatrice est une composante évoquée par toutes les répondantes : elles souhaitent en effet être accompagnées à leur rythme et être soutenues dans le choix du secteur d’activité. Gabrielle observe :
« Moi je n’avais pas envie d’être brusquée, qu’on me mette de la pression et pour moi c’était clair que j’irais à mon rythme ».
92Les créatrices attendent que les conseillers fassent alliance avec elles afin de tendre vers la réussite de leurs projets. Les conseillers sont alors invités à se poser non en « sachant » mais en « conseiller-tuteur ». Les propos de Sylvie sont ici éloquents :
« Cela veut dire on cherche ensemble ce qui va être le mieux pour toi, ton projet. C’est la pédagogie de l’alliance. On cherche ensemble pour que l’autre se réalise, pose son projet au bon endroit et avec les bons clients ».
94L’importance de laisser l’entrepreneure prendre toutes ses décisions est également manifeste dans les témoignages. Elles remarquent ainsi que, dans le cas où l’entreprise ne fonctionnerait pas, c’est à elle qu’appartient la décision de clôturer l’entreprise et non au conseiller. L’adaptation aux besoins de chaque accompagnée est essentielle selon nos répondantes car il est impossible de « fonctionner de la même manière avec des personnes différentes ». Écoute, confiance et stimulation sont également perçues comme des éléments indispensables à la construction d’une relation d’accompagnement satisfaisante. Les créatrices insistent finalement sur le respect de leurs projets et de leurs aspirations :
« [Les organismes d’accompagnement] devraient être plus dans la motivation, c’est-à-dire qu’ils devraient porter des projets pas parce qu’ils aiment bien ce que font les gens mais parce qu’ils sentent que ce sont des projets qui leur tiennent à cœur et que du coup il faut amener [les créatrices] dans la bonne lignée de ce qu’elles font, de ce qu’elles sont, de ce qu’elles ont envie ».
96Selon les répondantes, l’accompagnement doit intégrer des valeurs féminines et masculines (Bem, 1974), comme l’expose Françoise :
« Aux étapes de la création, il faut au début comme on est fragile un côté plus féminin. Mais très vite quand tu es dans le concret, c’est un côté plus masculin qui se développe dans l’action, la décision. Donc je pense que c’est complémentaire. Et c’est dans l’accompagnement où tu as besoin qu’il y ait les deux versions ».
98Par conséquent, les créatrices qui souhaitent être encouragées avec dynamisme et douceur, dans la prise en compte de ce qu’elles sont, insistent sur l’idée de mettre la créatrice au cœur de la démarche d’accompagnement.
3.3.3.2 – Une demande de modules spécifiquement réservés aux femmes
99Si les créatrices ne s’accordent pas sur le besoin de mettre en place un processus d’accompagnement exclusivement réservé aux femmes, elles insistent toutes sur l’importance de concevoir des modules qui leur permettraient de se retrouver « entre elles » et ainsi d’aborder « des réalités purement féminines ». L’exemple de Sylvaine dont l’époux est également entrepreneur est ici intéressant :
« Le fait de mettre en commun ses expériences entre entrepreneures, cela a un côté très sécurisant. On voit qu’on vit des choses et des difficultés relativement communes. Ce sont des choses qu’on ne peut pas partager avec les créateurs masculins d’entreprises parce qu’ils ne le vivent pas comme ça […] Il y a des vérités qu’on a besoin d’entendre, justement sur les schémas-types, les attentes de la société face aux femmes, sur les croyances qu’on peut avoir, on a besoin de dépoussiérer tout ça et cela fait partie de l’accompagnement ».
101Les normes sociales sexuées peuvent avoir, selon les répondantes, des répercussions négatives sur la mise en œuvre de leur projet entrepreneurial. Selon Françoise :
102Celles-ci viennent « de l’éducation, de la société, de toutes les formes de pensées. Même si nous avons eu la révolution féminine, le féminisme, je trouve qu’on est en train de faire marche arrière ».
103La prise de conscience par les femmes que leur réalité entrepreneuriale est affectée par les mécanismes de genre semble constituer un préalable nécessaire pour pouvoir mener plus sereinement leur création d’entreprise. L’élaboration de modules réservés aux femmes pourrait s’inscrire dans cet objectif.
104Pour conclure cette partie consacrée à la relation d’accompagnement, nous revenons sur la nécessité d’intégrer les mécanismes de genre à deux niveaux différents dans l’accompagnement. Le premier concerne la philosophie de l’accompagnement : celui-ci doit être élaboré à partir de valeurs masculines et féminines. Le deuxième niveau renvoie à la pression normative de genre qui s’exerce sur les FE et l’intérêt de sensibiliser ces dernières sur l’effet que peuvent avoir les normes sexuées sur leur démarche entrepreneuriale. En somme, il s’agit de concevoir un accompagnement par le genre et un accompagnement au genre.
4 – Discussion
105Le soutien institutionnel auprès des FE connaît des résultats mitigés, tant au niveau de leur fréquentation des dispositifs d’appui, qu’au nombre de femmes décidant de créer leur entreprise après avoir été accompagnées. Il y a donc un réel besoin de mieux comprendre les attentes des FE concernant le soutien institutionnel. La question du possible décalage entre les attentes des femmes créatrices de TPE et la posture de la structure d’accompagnement se trouve également posée.
106Nous avons constaté qu’un organisme généraliste, reconnu pour sa volonté de soutenir les créateurs en phase ante création, peine à leur proposer un accompagnement qui réponde à leurs attentes, d’aucunes préférant alors ne pas se faire accompagner. L’approche de soutien souhaitée par ces FE impliquerait de concilier leur double identité de femme et d’entrepreneure (Jennings et Brush, 2013). Comme l’ont montré de nombreux auteurs, l’entrepreneur doit être considéré dans une perspective dynamique et intégrative, prenant en considération le contexte immédiat personnel et professionnel (Aldrich et Cliff, 2003 ; Dimov, 2007) et, par extension, les interactions entre ses rôles multiples (Brush, de Bruin et Welter, 2009). Cette situation est d’autant plus importante pour les femmes qui assument, encore aujourd’hui dans notre société, la majorité des tâches domestiques et doivent faire face à un conflit plus intense entre la vie professionnelle et la vie personnelle (Powell et Eddleston, 2013). Les créatrices souhaitent donc à la fois acquérir des compétences techniques liées à leur nouveau rôle d’entrepreneure et des compétences comportementales inhérentes la gestion de ces différents rôles. Ce processus peut prendre beaucoup de temps et c’est pourquoi l’accompagnement doit être pensé sur une durée suffisamment longue qui coïncide avec les besoins des femmes (Palmer et Schoorman, 1999). Cette recherche confirme les résultats de Dobiecki (2007) qui observe qu’il faut du temps pour concrétiser un rêve, en faire ressortir tous les aspects, bien en saisir toutes les implications et toutes les conséquences.
107Les femmes qui évaluent l’impact de leur projet entrepreneurial sur leur environnement proche (Jennings et Mc Dougald, 2007 ; Powell et Eddleston, 2013 ; Chasserio, Lebègue et Poroli, 2014) recommandent d’intégrer leur conjoint et leurs enfants dans l’accompagnement. Celui-ci doit être élaboré dans une démarche personnalisée et intégrative de sorte qu’il puisse les guider dans les sphères personnelle et professionnelle, considérer leurs dilemmes, leurs états d’âmes, leurs peurs et leurs forces. Dans cette perspective, ce sont davantage les pratiques de formation et de coaching qui semblent convenir aux FE. Notre recherche confirme les résultats d’autres études sur le bien-fondé du coaching entrepreneurial féminin (Dobiecki, 2007 ; Tillmar, 2007), qui est une méthode efficace pour éviter le double écueil de considérer les entrepreneurs selon l’hypothèse implicite d’une norme masculine et les FE comme un groupe homogène (Tillmar, 2007).
108La mise en place de modules d’accompagnement réservés aux femmes répond à un besoin des FE d’aborder des thématiques spécifiques et ainsi d’être soutenues dans leur réalité de femme et d’entrepreneure. Cette démarche s’inscrit dans une logique analogue à celle qui s’est développée autour de l’essor des réseaux d’affaires féminins. Ceux-ci traduisent en effet le besoin des femmes de se rassembler « entre soi », afin non seulement d’échanger sur des sujets particuliers, mais également d’œuvrer pour la promotion de l’entrepreneuriat féminin (Constantinidis, 2010). La pertinence de formations entrepreneuriales mixtes a été mise en doute car elles contribueraient à renforcer les clivages entre hommes et femmes (Du Rietz et Henrekson, 2000). Ces dernières, plus réservées dans leurs questionnements à l’égard des accompagnateurs, laisseraient à leurs homologues masculins la place d’interroger leurs formateurs. Les hommes pourraient, de cette façon, acquérir davantage de connaissances et ainsi mieux progresser dans le développement de leurs entreprises. De plus, le modèle mixte dissimule la tendance à la création d’un entrepreneur de genre masculin. Aussi, les programmes d’accompagnement réservés aux femmes permettent de répondre aux limites des modèles d’accompagnement généralistes. Selon Schmidt and Parker (2003), les femmes n’ont pas toujours conscience des problèmes qui se posent ou se poseront à elles, ce qui peut rendre l’accompagnement plus difficile. Il appartient donc aux structures de soutien d’identifier les besoins réels des entrepreneures concernant la structure genrée de la société et d’intégrer ces connaissances aux programmes destinés aux FE. Si cette information n’est pas communiquée aux entrepreneures, celles-ci ne peuvent effectuer aucune avancée dans leur façon d’appréhender leur nouveau rôle de femme entrepreneure (Tillmar, 2007). Une démarche d’accompagnement mettant en avant la coopération entre les créatrices et l’échange d’expériences concernant l’impact des processus de genre sur la démarche entrepreneuriale semble donc bien adaptée. La pratique de l’accompagnement entre paires paraît dans ce cas être une solution adéquate pour amener les FE à évoluer dans leur positionnement d’entrepreneure à travers la co-construction de leurs expériences (Richomme-Huet et d’Andria, 2013). Il s’agit par exemple d’instaurer des temps d’échanges sur la manière de gérer l’influence des normes genrées sur le processus entrepreneurial. Les créatrices qui développent une réflexion sur la socialisation sexuée et ses implications, seront, en effet, plus à même de s’affranchir des croyances et attentes que la société entretient vis-à-vis des femmes.
109Les répondantes témoignent finalement de leur souhait de recevoir un accompagnement équilibré, conjuguant action, alliance et adaptation, intégration des problématiques professionnelles et personnelles, implication de l’entourage proche et mise en relation avec d’autres entrepreneurs ainsi que structuration du projet et respect des étapes propres à chacune.
110Dans cette perspective et par analogie avec la proposition de Bird et Brush (2002) concernant la maturité liée au genre de l’entrepreneur, cette recherche met en évidence l’importance accordée à la maturité liée au genre de l’accompagnateur. Cette maturité correspondrait à la conscience que le conseiller a de l’influence de la socialisation sexuée, mais aussi à l’intégration qu’il fera des qualités masculines et féminines dans les rôles sociaux et les comportements attendus de l’entrepreneur. Plus le conseiller sera au fait des problématiques du genre, plus grande sera la probabilité qu’il conçoive un accompagnement équilibré tenant compte de la nécessité d’intégrer le masculin et le féminin dans le processus de création d’entreprise.
111L’accompagnement des créatrices de TPE implique une combinaison d’approches individuelle et collective, de modules mixte et non-mixte, requérant majoritairement des formes de coaching, de formation et d’accompagnement par les pairs. La mise en œuvre de modules spécifiquement féminins, demande élaborée par les dix FE, met en évidence leur besoin de formation concernant la structure genrée de notre société. Il s’agit plus particulièrement d’aider les femmes à appréhender l’impact de la construction sociale des sexes sur leur réalité d’entrepreneure. Elles peuvent ainsi puiser dans les mécanismes de genre pour comprendre leur situation et progresser dans le développement de leur entreprise (Lewis, 2006).
112Les résultats de cette recherche concernant les termes d’un accompagnement idéal, selon les créatrices, peuvent donc être synthétisés comme suit.
L’accompagnement « idéal » des créatrices de TPE
L’accompagnement « idéal » des créatrices de TPE
Conclusion
113Souhaitant saisir la complexité du phénomène d’accompagnement des femmes créatrices de très petites entreprises, nous avons interrogé des accompagnateurs et des créatrices d’entreprises. Cette recherche exploratoire a montré que la démarche entrepreneuriale caractérisant la création de très petites entreprises par les femmes s’inscrit dans une logique socio-émancipatrice qui nécessite des pratiques d’accompagnement adaptées. Sans cela, les créatrices pourraient refuser de recourir à l’accompagnement institutionnel dont on sait pourtant qu’il améliore les chances de survie des entreprises.
114Sur le plan théorique, la première contribution de cette recherche est d’exposer une approche comparée des travaux sur l’accompagnement de l’entrepreneuriat des femmes qui à notre connaissance n’avait jusqu’alors jamais été proposée. Ensuite, sur ce sujet encore très peu développé dans la littérature internationale, nos résultats montrent que l’accompagnement ne doit pas nécessairement être totalement spécifique mais il doit néanmoins comporter des modules exclusivement réservés aux femmes. Les approches standards de l’accompagnement peuvent en effet omettre de considérer les besoins spécifiques ainsi que les obstacles rencontrés par les FE (Manolova, Brush et Edelman, 2008). La deuxième contribution théorique de ce travail est de mettre en évidence que la prise en compte du concept de genre est pertinente pour étudier l’accompagnement des FE. L’intégration du genre amène à dépasser la dichotomie homme-femme pour tendre vers la considération du masculin et du féminin dans l’accompagnement, que ce soit au niveau des valeurs prônées par la structure de soutien, de l’approche de soutien, du comportement de l’accompagnateur ou de la vision qu’il a du processus de création d’entreprise. Un accompagnateur dont la vision de la réussite entrepreneuriale est principalement masculine aura quelques difficultés à soutenir une porteuse de projet avec une autre vision de la réussite. Ce faisant, l’accompagnée se sentant incomprise et insatisfaite pourrait quitter le dispositif. Concernant la troisième contribution théorique, cet article s’intègre dans les recherches qui étudient l’adaptation des pratiques de soutien aux profils des accompagnés. Notre travail va dans le sens d’un accompagnement différencié comprenant plusieurs pratiques. La majorité des recherches menées sur les pratiques de soutien dévoilent des démarches d’apprentissage individuel ou collectif mais cet article montre la pertinence d’intégrer les deux méthodes dans l’accompagnement, les pratiques n’étant pas exclusives les unes des autres.
115Sur le plan managérial, cette recherche comporte des implications pour les structures d’accompagnement et, plus généralement pour les pouvoirs publics. Ces derniers doivent être attentifs aux objectifs qu’ils assignent à l’entrepreneuriat et aux moyens qu’ils mettent à disposition car ni les objectifs ni les moyens ne sont neutres pour le développement de l’entrepreneuriat des femmes. Les politiques publiques sont, en effet, sous-tendues par diverses approches que sont notamment les paradigmes néolibéraux et féministes (Wilson, Whittam et Deakins, 2004 ; Pettersson, 2012). Si les pouvoirs publics poursuivent des objectifs de croissance économique, les femmes doivent être encouragées à contribuer à cette croissance, via un meilleur accès au capital et aux réseaux. Mais si le but des pouvoirs publics est aussi de participer au changement du caractère genré de l’entrepreneuriat et de faire en sorte que l’accompagnement bénéficie réellement aux femmes, les programmes d’accompagnement doivent profondément évoluer pour s’adapter aux attentes de ces dernières.
116En s’appuyant sur les approches du féminisme libéral et du féminisme social, les acteurs politiques pourraient construire des programmes d’accompagnement répondant à ce double objectif. Il s’agirait donc d’identifier et d’éliminer les obstacles empêchant les FE d’accéder aux ressources importantes pour le développement de leur projet tout en respectant leur « voix » et ainsi de soutenir que « la façon de faire des femmes, et spécifiquement l’approche féminine de l’entrepreneuriat, doit être célébrée comme un apport unique et précieux » (Barrett, 1995 : 323). Si le passé s’est construit autour de la pensée entrepreneuriale des hommes, le futur ne peut s’écrire qu’avec les femmes.
117Ce travail présente un certain nombre de limites. Nous avons en effet mené cette recherche auprès de FE qui travaillent dans des secteurs d’activité qualifiés de féminins. Or, ces secteurs ont des caractéristiques particulières et ne peuvent donc être confondus avec les secteurs moins traditionnels, comme ceux de l’industrie ou de la technologie. Ils sont notamment caractérisés par un plus faible niveau d’innovation et une probabilité plus élevée pour les femmes de tendre vers une conciliation des vies personnelle et professionnelle (Ruiz-Arroyo, Fuentes, Bojica et Rodriguez-Ariza, 2012). Soulignons que ces secteurs sont très généralement investis par les femmes. Une autre limite provient de la focalisation sur les entreprises qui ne comportaient aucun salarié à leur début. Ceci s’explique par notre souhait d’appréhender la phase de l’accompagnement ante création et le fait de ne pas avoir de salarié est généralement le cas des entreprises en création.
118Les perspectives de recherche qu’offre ce travail exploratoire sont nombreuses. En s’appuyant sur les résultats de cette étude, nous pourrions observer si l’accompagnement proposé par des structures spécialisées [2], est plus adapté à leur démarche entrepreneuriale. À la suite du travail mené par Richomme-Huet et d’Andria (2013) sur l’accompagnement des mampreneurs, il serait également souhaitable de mener des travaux concernant l’accompagnement d’autres profils de FE, notamment celles qui développent un entrepreneuriat de haute croissance (Manolova, Brush et Edelman, 2008). Notre travail s’est intéressé à l’accompagnement ante création, une phase majoritairement investiguée dans les recherches et il semble donc nécessaire de mener des recherches sur les autres étapes du processus entrepreneurial. D’autres recherches pourraient également observer la façon dont les programmes d’accompagnement sont conçus et comment ils positionnent la femme entrepreneure (Ahl, 2006). En outre, l’accompagnement institutionnel n’est qu’une forme de soutien et il paraît opportun d’interroger les autres types de soutien à l’entrepreneuriat des femmes (soutiens financiers, par les réseaux et par les proches) afin de pouvoir dresser un tableau global de l’accompagnement des femmes entrepreneures.
Bibliographie
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : démarche entrepreneuriale, création d’entreprise, accompagnement de l’entrepreneuriat, genre, entrepreneuriat féminin
Mise en ligne 28/10/2015
https://doi.org/10.3917/entre.142.0109