Enfance 2017/3 N° 3

Couverture de ENF1_173

Article de revue

L’étude du comportement est unique pour comprendre la cognition fœtale et néonatale – L’imagerie cérébrale la complète lorsqu’elle s’inspire de validité écologique

Pages 307 à 328

Notes

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    Pour l’histoire des recherches de la fondation Fels de Philadelphie, consulter le lien suivant: http://medicine.wright.edu/epidemiology-and-biostatistics/fels-longitudinal-study-collection.
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    Le lien entre la durée de l’IETS et l’estimation de cette durée par le nouveau-né est une loi de puissance.
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    Le seuil différentiel relatif, c'est-à-dire ici la plus petite différence temporelle perçue par le nouveau-né entre deux IETS, avec le premier comme référence (étalon), est une constante.
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    Dans le même esprit que les obstétriciens qui cherchaient à détecter la souffrance fœtale par l’habituation motrice ou cardiaque aux sons (Leader, 1995 ; Hepper, 1997).

Introduction

1La contribution d’Anthony DeCasper au domaine de la psychologie du développement et de l’apprentissage périnatal reflète une passion plus générale pour la compréhension des mécanismes du développement adaptatif des organismes. Son talent particulier à détecter des thèmes transversaux à plusieurs domaines de la psychologie a été façonné par sa formation multidisciplinaire d’expérimentaliste, d’abord dans le domaine de l’apprentissage animal et ensuite dans celui du développement de l’enfant humain. DeCasper s’initia à l’étude des mécanismes de l’apprentissage opérant à l’Université d’Iowa, puis poursuivit sa thèse à l’université Emory d’Atlanta. Dans ce cadre, il conduisit des expériences visant à évaluer chez le pigeon les effets de divers programmes de renforcements, et à définir les lois psychophysiques qui régissent l’organisation temporelle des actions (coups de bec) de l’oiseau sur le levier « de la boîte de Skinner » qui leur délivrait éventuellement les récompenses (DeCasper & Zeiler, 1974, 1977 ; Zeiler, Davis et DeCasper, 1980). En même temps, A. DeCasper commença à étudier le développement du nouveau-né humain au laboratoire de Perception néonatale de l’hôpital de l’université du Kansas. Il intensifia son programme de recherche sur l’enfant lorsqu’il fut recruté en tant que professeur de Psychologie à l’université de Caroline du Nord à Greensboro. Dans ce cadre académique, A. DeCasper déploya alors ses connaissances théoriques et pratiques sur le comportement animal et sur les mécanismes des apprentissages pour les adapter à l’étude des comportements du nouveau-né.

2 Les paradigmes d’apprentissage contingent que DeCasper développa pour examiner les perceptions et les apprentissages précoces sont parmi ses contributions les plus marquantes au domaine du développement de la cognition (cf. Granier-Deferre et Schaal, ce numéro). L’objet premier de cet article est de faire la synthèse des principales découvertes acquises grâce aux approches opérantes mises au point par A DeCasper et ses collègues. Il vise aussi à mettre en lumière l’importance heuristique de ces résultats dans la compréhension des débuts de la cognition humaine, et en particulier la formation des tout premiers apprentissages. Enfin, ces résultats comportementaux seront examinés en relation avec les contributions récentes des études d’imagerie cérébrale réalisées chez le fœtus.

1. – Contexte historique de l’investigation du développement perceptif fœtal

3L’orientation des recherches d’A. DeCasper a, pour partie, été stimulée par les travaux des années 1930-1940 sur le comportement prénatal, examiné en particulier par Lester W. Sontag au Fels Research Institute [1]. Avec de « simples » observations armées des technologies de l’époque, comme, par exemple, l’écoute des changements du rythme cardiaque fœtal à l’aide d’un stéthoscope et d’un chronomètre, ces pionniers ont recueilli une masse de données sur le développement fonctionnel, en particulier sensoriel, du fœtus. Ils ont ainsi systématiquement mesuré la réactivité cardiaque et motrice du fœtus à l’égard de stimulations auditives et vibro-acoustiques (Sontag & Richards, 1938 ; Sontag & Wallace, 1935, 1936).

4En même temps que les recherches du Fels Research Institute stimulaient celles sur la réactivité sensorielle du fœtus, en particulier sur les réponses auditives (pour des revues détaillées des travaux anciens et récents sur la réactivité et la perception auditive fœtales, cf. Busnel & Granier-Deferre, 1983 ; Lecanuet, Granier-Deferre, & Busnel, 1995 ; DiPietro, Costigan, & Voegtline, 2015), d’autres courants de recherche, inspirés par l’éthologie (en particulier la compréhension des mécanismes de l’empreinte) et par la psychologie comparative, s’intéressaient au développement précoce de la perception auditive chez certains oiseaux (Guyomarc’h, 1974 ; Gottlieb, 1975, 1982), ou mammifères nidifuges (Vince, 1979 ; Armitage, Baldwin, & Vince, 1980). Par exemple, le psychobiologiste G. G. Gottlieb démontrait chez une espèce de canard l’impact de l’expérience auditive in ovo sur l’émergence de la reconnaissance des vocalisations de l’espèce. Se fondant sur l’observation que, dès l’éclosion, les canetons préfèrent les vocalisations spécifiques, il démontra que cette préférence n’émerge que s’ils ont pu entendre in ovo les vocalisations maternelles (Gottlieb, 1975).

5 C’est baigné dans cette ambiance d’émulation scientifique autour de la question de l’origine des perceptions et des comportements (le débat inné-acquis était alors au sommet de sa virulence), et suite à l’hypothèse de Salk (1962) sur la possibilité d’une empreinte intra-utérine chez l’espèce humaine, qu’A. DeCasper s’est intéressé aux origines de l’attachement et à l’émergence des perceptions auditives chez l’enfant humain. Fort des paradigmes d’apprentissage contingent développés chez les modèles animaux, il entreprit d’évaluer dans quelle mesure les mécanismes cognitifs qu’il avait décryptés chez le pigeon pouvaient être généralisés à l’espèce humaine.

2. – Contributions des paradigmes d’apprentissage contingent à la connaissance des capacités cognitives fœtales

2.1. – Quelques principes méthodologiques

6Au moment où A. DeCasper aborda l’étude du nourrisson, plusieurs procédures expérimentales étaient rodées pour examiner les capacités de détection et de discrimination des nouveau-nés. Les procédures d’habituation-déshabituation, fondées sur le désintérêt relatif pour le familier et l’intérêt pour la nouveauté (en particulier dans les modalités visuelle et auditive), étaient alors les très utilisées. Certaines procédures d’habituation – nous le verrons plus loin – étaient appliquées de manière plus ou moins arbitraire, pouvant même intervenir au cours du sommeil lorsque les réponses touchaient au système neurovégétatif (c’est pourquoi on a pu les employer même chez le fœtus). D’autres procédures d’habituation présentaient les stimulations d’intérêt de manière contingente aux comportements des enfants éveillés et actifs, tels qu’un regard porté sur une cible particulière qui déclenchera l’affichage d’une image, ou qu’une succion (non-nutritive) sur une tétine (munie d’un capteur de pression) qui déclenchera un son. Ainsi, par exemple, dans le paradigme dit de High amplitude sucking, un stimulus répété comme la syllabe /ba/ est présenté de manière contingente à chaque pression sur une tétine jusqu’à ce que la fréquence des succions diminue jusqu’à un niveau prédéfini, considéré comme critère d’habituation. Si, lors d’une nouvelle succion, une nouvelle syllabe /pa/ est diffusée, et que l’enfant augmente alors la fréquence de ses succions, on considère qu’il a discriminé les deux syllabes (Aslin, Pisoni, & Jusczyk, 1983 ; Eimas, Siqueland, Jusczyk, & Vigorito, 1971). Bien que le paradigme d’habituation-déshabituation soit fort utile pour examiner les capacités de discrimination des nourrissons, il est limité pour évaluer le niveau d’attraction ou de préférence qu’engendrent les stimulations. C’est pourquoi d’ailleurs plusieurs variantes de la procédure de High amplitude sucking ont été utilisées chez le nouveau-né (voir par exemple, Moon, Zernzach, & Kuhl, 2015).

7D’autres procédures classiquement utilisées dans les études du nourrisson consistent à observer les choix comportementaux des enfants lorsqu’on leur présente deux stimulations simultanément. On peut ainsi définir laquelle des deux est la plus attractive (ou la moins aversive), ou la plus renforçante, selon le lexique behaviouriste. Ainsi, une orientation plus fréquente ou plus longue de la tête ou du regard vers l’une des deux stimulations est tenue comme preuve non seulement de leur différenciation, mais surtout que l’une d’elle suscite un plus grand intérêt, une plus grande surprise ou encore une préférence plus soutenue que l’autre. Cependant, dans le domaine auditif du moins, un tel test de choix n’est pas très aisé à mettre en œuvre chez le nouveau-né et il est également difficile de différencier des niveaux d’intérêts ou de préférences entre différents sons.

8Aussi, ayant eu accès à des performances complexes d’apprentissages opérants chez son modèle animal de prédilection, le pigeon, A. DeCasper prit le parti de capitaliser sur les aptitudes de comportements plus complexes que de « simples » orientations de la tête ou durées de regard. Il décida donc de créer de nouvelles procédures d’apprentissages opérants adaptées pour le nouveau-né humain de quelques jours seulement. Il développa ainsi deux procédures permettant aux nouveau-nés d’exprimer un choix entre deux stimulations sonores : la procédure de renforcement différentielle et la procédure de discrimination de stimuli. Celles-ci ont en commun (i) de se fonder sur un comportement pour lequel le nouveau-né est particulièrement compétent, la succion, et (ii) d’utiliser des paires de stimulations sonores distinctes diffusées à des moments différents de façon contingente aux comportements du nouveau-né.

9 Dans la procédure de renforcement différentiel, on commence par définir le pattern de base des pauses entre les trains de succions de l’enfant, ainsi que sa médiane et sa variabilité pendant une période de silence. Au cours de la phase expérimentale, on présente à l’enfant une séquence sonore selon les variations temporelles de ses pauses entre trains de succions, c’est-à-dire qui est contingente à la durée de l’Intervalle entre trains de succions (IETS; Inter-Burst Interval ou IBI). L’IETS est variable entre nouveau-nés. Cependant, pour tous les enfants, la durée d’un train de succions est corrélée avec l’IETS précédent (autrement dit, plus la durée de l’IETS est grande, plus le train de succions qui lui succède sera long, et inversement). Ainsi, les succions sont renforcées de manière contingente avec une stimulation auditive dont la diffusion est déterminée par la durée de l’IETS qui les précède : un train de succions qui suit des IETS d’une durée inférieure à la médiane des IETS de base est renforcé avec une stimulation spécifique, par exemple la voix maternelle, alors qu’un train de succions qui suit des IETS d’une durée supérieure à la valeur médiane des IETS est renforcé par une autre stimulation, par exemple une voix féminine inconnue. Cette procédure permit à A. DeCasper et ses étudiants d’évaluer la préférence des enfants envers deux stimulations sonores. En d’autres termes, elle permet aux enfants d’exprimer un « choix » entre deux contingences sonores de leurs propres comportements.

10 Dans la procédure de discrimination de stimulus, deux sons brefs, S1 et S2 (par exemple, deux notes ou deux voyelles), sont diffusés successivement de manière aléatoire (par exemple, selon la séquence S1, S2, S2, S1, S1, S1, S2…). Si l’enfant fait une succion lorsque S1 est émis, alors S1 s’arrête et une séquence sonore (A) est diffusée. Si le nouveau-né fait une succion lorsque S2 est émis, alors S2 s’arrête et une autre séquence sonore (B) est diffusée. La diffusion de S1 et de S2 est indépendante du comportement de l’enfant, qui est libre d’exprimer une succion quand il veut. Il apprend alors à faire des succions de plus en plus fréquentes au moment du son bref qui signale la diffusion de la séquence sonore qui lui est plus renforçante.

11Avec la procédure de renforcement différentiel, l’enfant apprend laquelle de deux réponses motrices il doit effectuer pour déclencher la séquence sonore A ou B. Avec la procédure de discrimination de stimuli, le nouveau-né apprend à quel moment faire une succion pour déclencher l’arrivée de la séquence A ou celle de la séquence B. On peut ainsi estimer lequel de deux renforcements est le plus « puissant ». La différence de « puissance » entre deux renforcements est exprimée par le choix préférentiel du nouveau-né de déclencher un renforcement plutôt que l’autre. En quelque sorte, le nouveau-né travaille pour obtenir la séquence sonore qu’il préfère entendre.

2.2. – Découvertes établies grâce aux procédures opérantes

2.2.1. – Des effets de l’expérience prénatale sur le nouveau-né

12Pour écarter la possibilité d’un apprentissage auditif entre la naissance et le test à 3 jours, A. DeCasper testa donc directement l’hypothèse selon laquelle l’exposition prénatale à la voix maternelle était bien à l’origine de la préférence correspondante chez les nouveau-nés (DeCasper & Spence, 1986). Un groupe de femmes enceintes a ainsi été amené à lire à haute voix une comptine chaque jour pendant plusieurs semaines proches du terme de la gestation. Les préférences de leurs nouveau-nés ont ensuite été évaluées pour la comptine de familiarisation et pour une autre comptine différente au plan phonologique (les deux comptines ayant été enregistrées d’une part, par la mère et d’autre part, par une autre femme). Les enfants ont modifié leur pattern de succions de façon à entendre la comptine de familiarisation in utero et ce, quelle que soit la voix au moment du test. Le groupe témoin, qui n’a jamais été exposé à ces deux comptines, n’a manifesté aucune préférence entre ces comptines. La conclusion de cette étude est que la préférence pour la comptine de familiarisation ne pouvait être attribuée qu’à l’exposition prénatale. Une seconde étude confirma cet apprentissage intra-utérin avec une mélodie chantée par la mère au cours du troisième trimestre de la gestation, les enfants préférant cette mélodie à une variation (Panneton & DeCasper, 1986 ; Cooper-Panneton & Aslin, 1989). Ces études montrèrent pour la première fois un effet de l’expérience auditive sur les perceptions postnatales.

13Plus précisément, elles indiquent que des composantes de la voix maternelle et du flux de paroles peuvent être encodées par le fœtus de fin de gestation. Le cerveau fœtal forme une « représentation » ou une base sonore de connaissances mémorisée in utero, et qui reste accessible et reconnaissable quelques jours après la naissance (DeCasper & Spence, 1991). Ces représentations ou cette mémoire de l’expérience prénatale orientent l’attention du nouveau-né, motivent son comportement de façon différentielle en faveur des stimulations familières ou de stimulations semblables.

14Dans une cascade d’expériences, A. DeCasper et ses collègues ont exploité la réponse opérante néonatale pour explorer a posteriori ce que le fœtus a perçu de son Umwelt sonore intra-utérin, en particulier des stimuli vocaux. Il en ressort les résultats suivants, hiérarchisés ici à grands traits (DeCasper & Prescott, 2009) : (i) le stimulus le plus renforçant pour le nouveau-né de 3 jours est la voix maternelle filtrée pour ne conserver que ses fréquences basses et médiums (en éliminant les fréquences supérieures à 500 Hz) par rapport à l’enregistrement de sa version aérienne ; (ii) la voix maternelle filtrée à 500 Hz est préférée à cette même voix filtrée à 1 kHz ou non filtrée (Moon et Fifer, 2000 ; Spence et Freeman, 1996); (iii) On l’a déjà vu plus haut, la voix maternelle est préférée à une voix féminine non familière (DeCasper et Fifer, 1980 ; Fifer et Moon, 1989) ; (iv) Une voix non-familière sans filtrage fréquentiel est préférée à une voix non-familière filtrée à 500 Hz (Spence et DeCasper, 1987) ; (v) la (ou les) langue(s) maternelle(s) est (sont) plus renforçante(s) qu’une langue étrangère (Moon, Cooper, Fifer, 1993 ; DeCasper et Prescott, 2009 ; voir aussi l’article de R. Bijeljac-Babic dans ce volume) ; enfin, (vi) des séquences parlées ou chantées de façon répétée par la mère et entendues in utero sont plus renforçantes que des séquences parlées ou chantées inconnues, et ce, quelle que soit l’identité de la voix (Cooper-Panneton & Aslin, 1989; DeCasper & Spence, 1986; DeCasper & Prescott, 2009). On l’a vu plus haut, des stimuli non-vocaux sont aussi très efficaces à engager des réponses opérantes du nouveau-né, en particulier le flux des bruits cardiaques (DeCasper & Sigafoos, 1983 ; Panneton & DeCasper, 1984). Il est à noter que tous les sons mentionnés plus haut sont constitutifs de l’écologie sonore normale, plus ou moins continue, du fœtus humain. En revanche, des types de sonorités rares ou inexistantes dans l’environnement fœtal se sont montrées peu ou pas renforçantes du tout pour les nouveau-nés, à savoir la voix chuchotée d’une locutrice féminine et la voix paternelle (Spence & Freeman, 1996 ; DeCasper & Prescott, 1984).

15Il est à noter que dans tous les travaux présentés ci-dessus, les séquences sonores renforçantes ont été diffusées via des écouteurs dans les deux oreilles à la fois. Mais, étant donné les connaissances sur la latéralisation hémisphérique du traitement des sons chez l’enfant et l’adulte, A. DeCasper s’est intéressé à la possibilité d’une asymétrie précoce de l’effet renforçateur des stimulations auditives en fonction de leurs caractéristiques temporelles et de leur familiarité (DeCasper & Prescott, 2009). Avec une procédure de conditionnement opérant différentielle, il a examiné si des séquences sonores avaient le même pouvoir renforçant selon l’oreille stimulée, autrement dit l’apprentissage opérant pouvait-il être facilité selon l’hémisphère cérébral qui y est principalement associé. Les nouveau-nés ont cette fois été testés dans des conditions de stimulation monaurale. Dans une série d’expériences, l’enfant pouvait apprendre à déclencher soit un son A, soit un son B, diffusés dans la même oreille (pour un groupe, dans l’oreille gauche, pour l’autre, dans l’oreille droite); dans une autre série d’expériences, une seule séquence sonore pouvait être déclenchée par l’enfant, et celui-ci pouvait choisir dans quelle oreille (gauche ou droite) il préférait la recevoir. Globalement, les nouveau-nés de 3 jours ont appris la procédure, mais de façon différenciée en fonction des caractéristiques acoustiques du stimulus et de sa familiarité : une séquence sonore à variations temporelles lentes (type bruits cardiaques) est apprise essentiellement lorsque délivrée dans l’oreille gauche, donc essentiellement reçue dans l’hémisphère droit; par contre, une stimulation sonore à variations temporelles rapides (une séquence de paroles) est apprise essentiellement lorsque diffusée dans l’oreille droite, donc vers l’hémisphère gauche. Par ailleurs, il s’avère que les séquences de paroles non familières (langue jamais entendue) sont renforçantes uniquement si délivrées à l’oreille droite et, inversement, les séquences de paroles les plus familières (langue maternelle) renforcent l’apprentissage lorsque reçues dans l’oreille gauche. Ces résultats indiqueraient que les enfants optimisent en quelque sorte la clarté perceptive de séquences sonores complexes en préférant les entendre via l’hémisphère cérébral le plus efficace pour les traiter.

2.2.2. – Des effets de l’expérience prénatale sur le fœtus

16DeCasper et ses collègues (DeCasper, Lecanuet, Busnel, Granier-Deferre, & Maugeais, 1994) ont étendu la recherche sur les apprentissages perceptifs et la mémoire en testant directement les fœtus in utero. Ces prolongements expérimentaux ne pouvaient évidemment pas employer la méthode opérante, et repose donc essentiellement sur des approches réactives basées sur les variations du rythme cardiaque.

17Les fœtus-ci ont été exposés à une même comptine, récitée quotidiennement à voix haute par leurs mères, entre 33 et 37 semaines AG (Âge gestationnel). Leur réactivité cardiaque à deux comptines, celle de familiarisation et une comptine nouvelle, toutes deux enregistrées par une voix féminine non familière, a été examinée à 37 semaines AG, avec une pression sonore trop faible pour évoquer une réponse cardiaque. Seule la comptine de familiarisation a entraîné une réponse cardiaque d’orientation, indicatrice d’attention. Les fœtus n’ont pas réagi à la comptine inconnue, alors même que celle-ci entraîne une réponse fœtale lorsqu’elle est utilisée comme comptine de familiarisation, et inversement pour la comptine de familiarisation. Avec le même protocole, pour tenter de déterminer l’âge prénatal auquel pouvait émerger une telle mémoire, des fœtus ont été familiarisés in utero pendant 4 semaines, soit à partir de 28 semaines AG, soit à partir de 32 semaines AG. Les réponses cardiaques fœtales ont été examinées chaque semaine pendant les 4 semaines de familiarisation. Les résultats suggèrent qu’un apprentissage auditif puisse se mettre en place entre 32 et 34 semaines AG (Krueger, Holditch-Davis, Quint, & DeCasper, 2004). Ce résultat peut être rapproché de celui de Dirix, Nijhuis, Jongsma et Hornstra (2009) qui, avec une procédure d’habituation-déshabituation de la réponse de sursaut du fœtus, indique qu’une rétention de cette habituation commencerait à 34 semaines AG.

18La trace mnésique du son acquise in utero peut persister bien au-delà de la naissance. DeCasper et Spence (1986) avaient rapporté un empan de mémoire de 3-4 jours au moins pour la comptine entendue in utero. Mais Granier-Deferre, Bassereau, Ribeiro, Jacquet et DeCasper (2011) montrèrent une mémoire auditive bien plus longévive en exposant des fœtus 2 fois/jour pendant 3 semaines (35-38 semaines AG) à une mélodie au piano de contour descendant. Ils examinèrent les réponses cardiaques des enfants un mois après la naissance. Les enfants exposés in utero ont présenté une réponse cardiaque d’orientation en moyenne 2 fois plus ample pour cette mélodie par rapport à une mélodie contrôle qui ne différait que par son contour mélodique, montant. Cette réponse était également deux fois plus ample que celles présentées par le groupe contrôle pour les deux mélodies. Ces résultats révèlent qu’une mémoire pour un flux auditif acquise pendant la période prénatale peut perdurer au moins 6 semaines après la dernière exposition et un mois après la naissance. Cet apprentissage perceptif indique également l’élaboration à long terme d’une représentation de certaines propriétés de la séquence auditive, ici, du contour mélodique, indépendamment du spectre et du rythme de la mélodie, puisque ceux-ci sont identiques dans les deux mélodies. La mesure des potentiels cognitifs a ensuite révélé une mémoire perceptive pour une mélodie entendue in utero d’au moins 4 mois (Partanen, Kujala, Tervaniemi, & Huotilainen, 2013).

2.3. – De quelques mécanismes cognitifs engagés par les procédures opérantes

19Il nous semble qu’aucune méthode comportementale alternative ne peut mettre en évidence chez le nouveau-né une chaîne de comportements associés d’une telle complexité que les procédures opérantes développées par A. DeCasper. Pour que la procédure de renforcement différentielle fonctionne, les nouveau-nés doivent être capables de percevoir que le temps s’écoule, d’estimer avec une certaine précision le temps écoulé, et de pouvoir ajuster leur comportement oro-moteur en conséquence. La procédure de discrimination de stimulations nécessite que les enfants aient la capacité de synchroniser leurs mouvements buccaux sur une brève stimulation sonore pour déclencher la diffusion de la séquence sonore qu’ils préfèrent (c’est-à-dire la plus renforçante). Ainsi, dans la procédure de discrimination de stimuli, la séquence à apprendre implique successivement : 1. de discriminer deux sons brefs distincts, 2. d’associer chaque son avec un flux auditif spécifique, 3. de retrouver en mémoire de travail le fait que chacun des sons brefs annonce l’arrivée d’un flux auditif spécifique (impliquant la mémoire de reconnaissance au cours de l’apprentissage, 4. de sélectionner l’action motrice la plus appropriée parmi plusieurs possibles (mémoire procédurale), et enfin 5. d’exécuter ce comportement au moment optimal, c’est-à-dire en l’ajustant à un temps T (émission du son bref).

20La réalisation de cet ensemble fonctionnel implique que les nouveau-nés peuvent rapidement comprendre des relations de cause à effet, ou des « règles » (Lécuyer, 2014 ; voir l’article de Lécuyer & Durand, dans ce numéro), une capacité qui jusqu’alors n’était attribuée qu’à des enfants bien plus âgés. Ces procédures ont aussi révélé que les nouveau-nés sont sensibles à des dimensions temporelles très fines au sein de la tâche. A. DeCasper met en effet en évidence que les estimations que font les nouveau-nés de la durée des IETS s’apparentent à une fonction psychophysique exponentielle du type loi de Stevens [2], alors que leur capacité à effectuer des discriminations temporelles entre IETS adhère à une fonction de type Weber [3] (DeCasper, 1978, 1980 ; DeCasper & Spence, 1991 ; Panneton & DeCasper, 1982).

21Le fait que des nouveau-nés de 3 jours puissent maîtriser plusieurs contingences associées met en lumière quelques performances les plus précoces du développement cognitif humain, telles que la mémoire de reconnaissance, la mémoire de travail et la mémoire procédurale, ainsi que la perception du temps et des durées, la détection de relations associatives et l’apprentissage de règles procédurales. Il est important de souligner que, pour que le nouveau-né puisse maîtriser ainsi plusieurs contingences associées dans le bon ordre, cet apprentissage opérant nécessite pour sa réalisation l’engagement de toutes ces fonctionnalités de mémoire selon une séquence qui dépend de la perception du temps.

22Les procédures développées par A. DeCasper démontrent que les nouveau-nés sont capables de comportements moteurs contrôlés, qui sont la résultante de l’intégration de tous ces processus cognitifs fondamentaux pour pouvoir accéder à une séquence sonore préférée, comme la voix maternelle, ou comme d’autres flux auditifs associés à sa voix au cours de la seule période prénatale (par exemple, une comptine lue à voix haute). Dans ce qui suit, les manifestations comportementales de la cognition fœtale seront confrontées à ce que l’on commence à savoir des manifestations neurales de la cognition précoce.

3. – Contributions des techniques de l’imagerie cérébrale à la connaissance des capacités cognitives fœtales

23Les techniques d’imagerie cérébrale, comme la Magnétoencéphalographie (MEG), la Résonance magnétique nucléaire fonctionnelle (IRMf) et l’Électroencéphalographie (EEG), sont de plus en plus utilisées pour l’étude du développement cérébral au cours de la période périnatale (cf. par exemple, Hertz-Pannier et al., 2000 ; Anderson & Thomason, 2013 ; Dunn, Reissland, Reid, 2015). Jusque-là, l’IRMf a été peu utilisée dans la caractérisation des perceptions fœtales ou néonatales (bien que des améliorations récentes aient sécurisé son emploi; Jardri et al., 2012). Par contre, n’étant pas invasive, la MEG est plus employée par les développementalistes et, bien que ne donnant pas d’indication anatomique comme l’IRMf, elle a l’avantage d’une excellente résolution temporelle (Lowery, Govindan, Preissl, Murphy, & Eswaran, 2009). Enfin, le signal MEG reflète les potentiels évoqués par des stimulations sensorielles, quelle qu’en soit la modalité, et ainsi de recueillir également le potentiel cognitif endogène (composante P3 du potentiel évoqué), celui-ci étant indépendant de la modalité sensorielle. De plus, au cours de la période fœtale, la capacité de la MEG à déceler une activité cérébrale est supérieure à celle de l’EEG (Papadelis, Grant, Okada, & Preissl, 2015). À partir des potentiels évoqués, on peut calculer la négativité de discordance ou MMN (Mismatch Negativity). Sa présence indique la détection d’une stimulation déviante (peu fréquente) au sein d’une série de stimulations répétées à l’identique selon un paradigme dit « du stimulus discordant » (odd-ball). La négativité de discordance est particulièrement intéressante pour l’étude des perceptions fœtales puisque la détection d’une différence (donc une réponse à la nouveauté) implique une mémoire sensorielle sans mobiliser l’attention du sujet, alors que le potentiel cognitif engage l’attention pour être évoquée et doit donc être utilisée chez le sujet éveillé. Toutes ces approches d’imagerie permettent d’examiner, mais cette fois au niveau neural, les capacités de discrimination les plus précoces du cerveau fœtal. Mais les données ainsi acquises chez le fœtus (et l’enfant né à terme ou prématurément) dépassent le cadre de cet article et nous ne résumerons ici que certains résultats pour illustrer quelques progrès dans le domaine de la cognition auditive, si possible en lien avec les travaux d’A. DeCasper.

3.1. – La MEG et l’audition fœtale

24Depuis les premières mises en évidence des Potentiels évoqués auditifs (PEA) corticaux chez le fœtus à l’aide de la MEG (Dunn et al., 2015; Zappasodi et al., 2001), ce type d’enregistrement est devenu de plus en plus fiable et répétable (par exemple, Schleussner & Schneider, 2004 ; Govindan et al., 2008 ; Moraru et al., 2011), permettant d’examiner des aspects de l’ontogenèse auditive fœtale inaccessibles aux méthodes classiques d’exploration sensorielle. Les mesures d’occurrence, de latence et d’amplitude des PEA et des potentiels cognitifs enregistrés par MEG fœtale, et la localisation des régions d’activation cérébrale par IRMf ont ainsi précisé les tout débuts du fonctionnement auditif in utero. Ainsi, au cours d’études longitudinales, les PEA obtenus avec des trains d’ondes de 27 semaines AG (Âge gestationnel) au terme de la gestation montrent que les fréquences de fœtus répondants et les différentes composantes des PEA sont comparables à celles observées chez des enfants nés prématurément de même âge que les fœtus testés (Schleussner & Schneider, 2004; Holst et al., 2005). Par exemple, Holst et al. (2005) enregistrent des PEA chez 83 % des fœtus testés, leurs latences diminuent considérablement avec l’avancement de la gestation (de 288 ms à 27-31 semaines AG, à 197 ms à 36-39 semaines AG), attestant de l’amélioration de la conduction nerveuse.

25Dès 28 semaines AG, soit environ 4 semaines après l’entrée en fonction de la cochlée (vers 24 semaines AG), on peut mettre en évidence des réponses de discordance (MMN) : les fœtus peuvent détecter un train d’ondes de 750 Hz déviant au sein d’une série répétée d’un train d’ondes de 500 Hz (Draganova, Eswaran, Murphy, Lowery, & Preissl, 2007). Elles sont présentes chez 89 % des nouveau-nés et chez 66 % des fœtus testés entre 28 et 39 semaines AG (61 % à 28-31 semaines AG; 67 % à 32-35 semaines AG, et 70 % à 36-39 semaines AG) (Draganova et al., 2007). Par ailleurs, l’IRMf a enregistré une activation localisée au cortex auditif gauche chez des fœtus dès 33 semaines AG pour des sons purs de 500 et 700 Hz (Jardri et al., 2008). Autrement dit, le traitement cérébral de sons simples est asymétrique très précocement.

26Les chercheurs s’emploient maintenant à explorer dans quelle mesure la MEG fœtale peut mettre en évidence au niveau neural des capacités cognitives par ailleurs déjà bien démontrées par des méthodes comportementales ou des mesures neurovégétatives chez le fœtus et/ou le nouveau-né. Ils ont ainsi examiné les potentialités de cette approche pour détecter d’une part, les capacités de discrimination de différentes stimulations auditives (variations temporelles rapides et contrastes de numérosité) et d’autre part, l’habituation-déshabituation des potentiels évoqués par des sons ou des voyelles. Pour ce qui concerne les capacités de discrimination, il n’a pas été possible de mettre en évidence une réponse MMN qui montrerait que le fœtus soit capable d’un traitement temporel rapide. En effet, ils n’ont pu discriminer des paires de sons de 70 ms (500 Hz, avec 750 Hz comme son déviant) séparées d’une durée de 300 ms ou de 70 ms. Les nouveau-nés, quant à eux, ont discriminé les sons séparés de 300 ms, mais non ceux séparés de 70 ms (Sheridan, Draganova et al., 2010). Ce résultat va à l’encontre des données obtenues chez le nouveau-né par les psycholinguistiques sur la discrimination des phonèmes avec des méthodes classiques (Bertoncini, Bijeljac-Babic, Blumstein, & Mehler, 1987). Sheridan, Draganova et al. (2010) interprètent les données MEG comme témoignant soit d’une immaturité des processus de traitement auditif rapide, soit d’un effet de l’état de vigilance du fœtus (non contrôlé au cours de l’expérience). Il n’est pas à exclure non plus que cette discordance entre approches neurales et approches comportementales puisse être liée à la nature des stimulations utilisées (des sons purs par rapport à des phonèmes). Par contre, les résultats de MEG indiqueraient que d’autres processus de traitement de l’information seraient suffisamment matures chez le fœtus pour détecter des différences de numérosité entre stimulations sonores. 74 % des fœtus testés présentent en effet des réponses MMN lors de la présentation de séquences auditives différentes en nombre d’éléments sonores (2 sons d’une fréquence donnée suivis de 2 sons d’une autre fréquence comme stimulus standard, et 4 sons successifs d’une des deux fréquences comme stimulus déviant) (Schleger et al., 2014).

27En ce qui concerne l’habituation, les recherches poursuivent surtout des objectifs cliniques de vérification de l’intégrité du système nerveux central utilisant l’audition comme sonde d’exploration neurosensorielle [4]. La MEG fœtale met en évidence une habituation-déshabituation du PEA cortical chez des fœtus de 30-39 semaines AG avec de brefs sons simples (500 Hz pour l’habituation et 700 Hz pour la déshabituation), sans changements significatifs avec l’âge fœtal (Muenssinger et al., 2013). En revanche, il n’y a ni habituation, ni déshabituation avec des stimuli de paroles, [ba] versus [bi], ou [bi] versus [ba], chez des fœtus de 28-39 semaines AG (plus précisément, aucune décroissance en amplitude des PEA est enregistrée après répétition de [ba], et aucune augmentation d’amplitude des PEA est présente après diffusion de la stimulation de déshabituation [bi], et vice-versa pour [bi] versus [ba]). De plus, il est intéressant de constater que même le nouveau-né à terme ne présente pas non plus de phase d’habituation du PEA à ces mêmes syllabes; par contre, une phase de déshabituation au changement de syllabe est bien présente, l’augmentation de l’amplitude du PEA attestant ainsi qu’il discrimine bien les deux syllabes (Hartkopf et al., 2016). En regard des données obtenues par les méthodes classiques (réponses neuro-végétatives ou comportementales) avec les mêmes stimuli, ces résultats pointent des limites soit du paradigme de stimulation mis en œuvre, soit de la technique des PEA pour examiner les modifications de la réactivité à des stimulations sonores complexes répétées, comme ceux de la parole, au cours de la période périnatale. En effet, les réactions cardiaques fœtales à la présentation répétée des voyelles [a] ou [i], comme dans [babi] versus [biba] (Lecanuet et al., 1987), [baba] versus [bibi] (Shahidullah & Hepper, 1994), et [a] versus [i] (Groome, Mooney, Holland, Bentz, & Atterbury, 1997) s’habituent rapidement, et montrent une réaction à la nouveauté (déshabituation) lors du changement de voyelles. De plus, les fœtus présentent des modifications cardiaques à la présentation de ces mêmes voyelles dès 26 semaines AG (Zimmer et al., 1993).

28Les recherches sont encore rares pour ce qui concerne la réactivité neurale du fœtus à des stimuli auditifs naturels, objets d’étude privilégiés des recherches d’A. DeCasper. La MEG indique que les fœtus manifestent des réponses évoquées aux bruits cardiaques maternels (Porcaro et al., 2006). De plus, avec un échantillon limité de fœtus, Jardri et al. (2012) enregistrent à 33 semaines AG une activation corticale dans le lobe temporal supérieur gauche plus importante pour les voix féminines par rapport à des sons purs. À 34 semaines, la partie supérieure du lobe temporal est essentiellement activée par les voix, alors que la partie inférieure l’est essentiellement par la voix maternelle (par rapport à une voix féminine inconnue). On peut en conclure que la capacité à différencier deux voix, dont l’une est familière, opère au moins deux mois avant le terme de la gestation.

3.2. – La MEG chez le nouveau-né exposé à des stimulations auditives fœtales

29Plus récemment, les recherches en MEG (déjà évoquées plus haut) ont examiné l’impact à long terme d’une exposition sonore intra-utérine spécifique. Dans une première expérience, le pseudo-mot [tatata] a été présenté quotidiennement de 29 semaines AG jusqu’au terme, ainsi que, mais de manière peu fréquente, des versions de ce mot modifiées sur la syllabe du milieu, par un changement de la voyelle [tatota] ou par un changement de hauteur [taTAta]. Contrairement au groupe témoin (non exposé aux pseudo-mots), les nouveau-nés de 5 jours détectent ces différences inhabituelles au sein de ce pseudo-mot, de même que d’autres modifications (intensité ou durée de la syllabe du milieu) auxquelles ils n’ont jamais été exposés (Partanen, Kujala, Naätänen et al., 2013). Une seconde expérience du même type évalue les changements cérébraux en manipulant le contenu musical de la berceuse, issue d’un thème de Mozart, Twinkle, Twinkle, Little Star. Après une familiarisation à cette berceuse in utero pendant le 3e trimestre de gestation, les potentiels cognitifs de discordance (P300) quelques jours après la naissance sont significativement plus amples pour la mélodie originale que pour la mélodie modifiée alors que ce n’est pas le cas du groupe témoin qui n’a jamais été exposé à cette mélodie. Ces augmentations d’amplitudes des potentiels sont corrélées avec la durée de l’exposition prénatale. Cet effet de l’exposition fœtale est encore détecté 4 mois après la naissance. La persistance de la finesse discriminative acquise in utero est donc particulièrement stable (Partanen, Kujala, Tervaniemi, & Huotilainen, 2013). De tels effets de persistance de l’expérience auditive fœtale avaient déjà été documentés par des tests comportementaux sur des laps temporels de quelques jours (DeCasper & Spence, 1986) et par l’examen des réponses cardiaques un mois après la naissance (Granier-Deferre et al., 2011).

3.3. – Opérations convergentes entre imagerie et comportement

30Cependant, comme largement discuté en neurosciences cognitives du traitement de l’information et de la perception, tant chez l’enfant que chez l’adulte (cf., par exemple, Poldrack, 2008, 2012 ; Guillaume, Tiberghien, & Baudouin, 2013 ; Forest, 2014), les approches d’imagerie cérébrale ont des limites pour la compréhension des mécanismes cognitifs en action. Ces limites concernent, entre autres, la validité des mesures liée aux difficultés (progressivement surmontées) du traitement des données, et les difficultés posées par les variations interindividuelles qui sont estompées par le moyennage des données issues de populations hétérogènes. Plus important encore, les processus cognitifs complexes mobilisent des réseaux de structures cérébrales multiples plutôt qu’elles ne sollicitent des régions spécifiques du cerveau (Poldrack, 2008, 2012). Par conséquent, il est crucial de générer ou de se fonder sur des données comportementales convergentes pour pouvoir interpréter les données de neuro-imagerie cérébrale sous-jacentes aux traitements perceptifs et cognitifs, et ceci d’autant plus que l’on étudie des populations en développement (Poldrack, 2008, 2012; Franklin, Jamieson, Glenn, & Nock, 2015).

31Les protocoles mis en œuvre dans nombre d’études de neuro-imagerie de l’activité perceptive fœtale n’ont en général pas cherché à recueillir de données comportementales, et se sont appuyés essentiellement sur des données électrophysiologiques comparatives chez le nouveau-né à terme ou prématuré. Et lorsqu’elles l’ont fait, la correspondance entre corrélats cérébraux et comportements peut, on l’a vu, s’avérer complexe ou même contradictoire. L’étude de Moon et al. (2015) est une autre illustration de résultats apparemment discordants entre les deux approches. Les nouveau-nés manifestent, d’une part, des réponses MMN lorsqu’il s’agit de la voix d’une locutrice autre que celle de la mère qui prononce le même mot (Baby) (deRegnier, Wewerka, Georgieff, Mattia, & Nelson, 2002), et, d’autre part, sont insensibles à cette différence vocale dans une procédure de succion non-nutritive qui utilise le même stimulus (Moon et al., 2015). Autrement dit, il arrive que là où le cerveau discrimine des stimuli, cette discrimination n’est pas « suffisamment intéressante » pour entraîner une réponse comportementale. Lorsqu’exposés à un stimulus répétitif, les enfants semblent pris d’un « effet d’ennui » (boredom effect) qui atténue leur motivation à agir pour déclencher une voix plutôt qu’une autre; pourtant les nouveau-nés sont très actifs dans les procédures opérantes présentant des séquences vocales complexes et modulées (cf. plus haut). Cette recherche illustre bien l’intérêt d’utiliser des stimulations psychologiquement signifiantes pour explorer au mieux les capacités cognitives des nouveau-nés, ainsi que l’impact des stimulations prénatales sur leurs comportements. A. DeCasper n’aurait sans doute pas pu découvrir l’apprentissage auditif prénatal s’il avait expérimenté avec des stimulations dépourvues de validité écologique pour ses sujets. La valeur de renforcement, la signification affective et la motivation qui y sont associées sont, en effet, fondamentales dans le succès des recherches sur la cognition précoce (à ce propos, voir l’article de C. Trevarthen dans ce numéro). La recherche de Moon et al. illustre donc bien la complémentarité des approches de neurophysiologie avec les approches comportementales dans l’étude du développement perceptif périnatal.

32Jusqu’ici, les techniques d’imagerie cérébrale appliquées au fœtus se sont avérées appropriées pour l’étude de l’ontogenèse de la détection de stimuli auditifs, de la perception des propriétés fines de séquences sonores complexes, comme celles de la parole ou de la musique chez le nouveau-né, mettant en évidence les conséquences neurales d’une expérience auditive prénatale. Cependant, elles ne permettent pas encore de mesurer les conséquences neurales d’un apprentissage chez le fœtus, défini comme l’effet plus ou moins stable d’une expérience sensorielle ou sensorimotrice sur les réponses neurovégétatives ou comportementales ultérieures in utero. De plus, mis à part la signature neurale du niveau d’attention ou du désintérêt ponctuel à l’occasion d’un protocole d’habituation-déshabituation, les méthodes d’imagerie n’apportent pas encore d’indications sur les corrélats neuraux de l’émergence fœtale de la valence hédonique et motivationnelle des stimulations sensorielles.

4. – Conclusions

33Pour terminer, soulignons l’importance pour A. DeCasper de penser en termes de validité écologique les questions de recherche, les stimulations délivrées et les réponses enregistrées, aussi bien que les situations expérimentales mises en œuvre dans ses recherches, et de ne rien faire qui puisse troubler le cours du développement du fœtus et du nouveau-né. Ces considérations scientifiques étaient toutefois contraintes par des considérations éthiques récurrentes dans ses discussions avec ses collègues. Par exemple, il ne souhaitait pas mettre en balance dans une expérience la préférence des nouveau-nés entre la voix paternelle et la voix maternelle.

34Pour vérifier l’hypothèse d’une généralisation des données du développement perceptif de l’animal à l’espèce humaine, A. DeCasper considérait comme indispensable que les stimulations et les méthodes employées dans les recherches fœtales soit calquées au plus près des caractéristiques de l’expérience auditive typique ou habituelle des fœtus. C’est pour cette raison que lui et ses collègues ont exploré des sonorités utérines spontanées d’origines physiologique (bruits cardiaques) aussi bien que sociale (voix parlée ou chantée). De même, l’application plus généralisée de stimulations spécifiques ou familières aux études d’imagerie cérébrale pourrait notablement enrichir leur apport à la compréhension du développement de la cognition auditive au début de la vie.

35Les comportements complexes analysés chez le nouveau-né par A. DeCasper et ses collègues dès le début des années 1980 ont suscité une vision entièrement nouvelle du développement des capacités cognitives, et en particulier des mécanismes d’attention, d’apprentissages et de mémoire précoces. Cet éclairage unique est redevable aux paradigmes d’apprentissage opérant permettant d’évaluer la valeur renforçante pour le nouveau-né de stimulations encodées comme étant en quelque sorte signifiantes par le fœtus. Cette avancée a poussé A. DeCasper et ses collègues à remonter le cours du développement, avec la contrainte de trouver d’autres moyens d’analyse de la réactivité fœtale à des événements sonores devenus familiers par exposition répétée à des âges fœtaux antérieurs. Il s’est alors tourné vers la mesure des variations du rythme cardiaque en réponse aux stimulations. Ces recherches comportementales et psychophysiologiques révèlent nombre de mécanismes élémentaires sous-jacents à la formation prénatale de la cognition auditive humaine. En particulier, elles permettent d’inférer que le nouveau-né humain possède, dès la naissance, non seulement des représentations auditives, mais aussi des préférences acquises qui peuvent significativement affecter ses comportements, à l’instar de ce qui est observé chez les autres modèles animaux étudiés selon les mêmes principes. Enfin, la recherche d’A. DeCasper démontre aussi que certaines composantes acoustiques des voix et des flux sonores complexes (paroles, musiques) sont mémorisées en fin de gestation, et restent accessibles après la naissance, créant ainsi les conditions d’une continuité transnatale du développement perceptif (DeCasper & Spence, 1991; Granier-Deferre, Schaal, & DeCasper, 2004).

36Les différentes approches, analyse des réponses motrices et cardiaques en réponse aux stimulations sonores, paradigmes comportementaux d’apprentissage et imagerie cérébrale contribuent, chacune avec sa spécificité, à la compréhension du développement perceptif et mnésique du fœtus. Il est évident que les techniques d’imagerie cérébrale fœtale sont complémentaires des techniques comportementales et psychophysiologiques. Elles commencent à apporter, et continueront à apporter, des précisions utiles sur l’ontogenèse de la sensibilité et de la réactivité neurale du système auditif in utero, et en particulier sur la perception des propriétés fines de séquences sonores complexes. Si les techniques d’imagerie peuvent détecter les conséquences perceptives d’une expérience auditive prénatale, telle qu’une augmentation de la finesse discriminative pour certaines caractéristiques acoustiques présentes au sein de sons complexes, elles ne semblent pas encore en mesure de révéler les signatures neurales des réponses neurovégétatives ou comportementales qui résultent d’apprentissages fœtaux. Comme le soulignent aussi DiPietro et al. (2015), jusqu’à présent, les méthodes comportementales demeurent inégalées pour interpréter la signification des signatures neurales, et à quels comportements ou réponse neurovégétative celles-ci peuvent être associées. Au final, la compréhension des processus perceptifs complexes et des apprentissages au cours de la période périnatale sera d’autant plus complète et profonde que les variables mesurées par les techniques d’imagerie cérébrale bénéficieront de variables comportementales convergentes et écologiquement valides.

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Mots-clés éditeurs : perception, succion non-nutritive, fœtus, nouveau-né, mémoire, apprentissage opérant, contingence, audition, corrélats cérébraux du comportement

Date de mise en ligne : 15/01/2018

https://doi.org/10.3917/enf1.173.0307

Notes

  • []
    Pour l’histoire des recherches de la fondation Fels de Philadelphie, consulter le lien suivant: http://medicine.wright.edu/epidemiology-and-biostatistics/fels-longitudinal-study-collection.
  • []
    Le lien entre la durée de l’IETS et l’estimation de cette durée par le nouveau-né est une loi de puissance.
  • []
    Le seuil différentiel relatif, c'est-à-dire ici la plus petite différence temporelle perçue par le nouveau-né entre deux IETS, avec le premier comme référence (étalon), est une constante.
  • []
    Dans le même esprit que les obstétriciens qui cherchaient à détecter la souffrance fœtale par l’habituation motrice ou cardiaque aux sons (Leader, 1995 ; Hepper, 1997).

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