Notes
-
[*]
Thomas Legrain a été le fondateur et le PDG de Coach’Invest. Il vient de créer TL Conseil.
-
[1]
Voir O. Basso et T. Legrain, « La Dynamique entrepreneuriale dans les grands groupes », rapport d’étude, Institut de l’entreprise, 2004, www.institutdelentreprise.fr.
-
[2]
Les cinq dimensions caractéristiques du concept d’orientation entrepreneuriale tel que défini par G.T Lumpkin et G. G. Dess pour caractériser et tester le comportement entrepreneurial d’une firme sont la propension à innover, la prise de risque, la proactivité, l’agressivité compétitive et l’autonomie de l’action. Voir G.T Lumpkin et G. G. Dess, « Clarifying the Entrepreneurial Orientation Construct and Linking It to Performance », Academy of Management Review, vol. 21, n° 1, 1996.
-
[3]
R. A. Burgelman, « A Process Model of Internal Corporate Venturing in the Diversified Major Firm », Administrative Science Quarterly, vol. 28, 1983.
-
[4]
Voir notamment, J. G. March, « Exploration and Exploitation in Organizational Learning », Organization Science, vol. 2, n° 1, 1991.
-
[5]
Voir O. Basso, Le Manager entrepreneur, Village mondial, 2006.
-
[6]
A. Fayolle et L.-J. Filion, Devenir entrepreneur, Village mondial, 2006.
-
[7]
O. Basso, L’Intrapreneuriat, Economica, 2004.
-
[8]
Voir C. Carrier, « L’intrapreneuriat dans la PME : une étude exploratoire du phénomène à partir des représentations des principaux acteurs concernés », thèse de doctorat, faculté de droit et de sciences économiques, université de Montpellier I; G. Pinchot, Les Intrapreneurs, Mc Graw Hill, 1986.
-
[9]
A. Fayolle, T. Legrain, « Orientation entrepre-neuriale et grande entreprise : le cas EDF », La Revue des sciences de gestion, n° 219, mai-juin 2006.
-
[10]
D’autres auteurs avant nous ont cherché à caractériser les organisations et ont parfois identifié des types qui portent les mêmes appellations que les nôtres, mais en utilisant des approches et des critères de segmentation différents de ceux que nous avons utilisés. Rappelons simplement ici l’ouvrage, devenu un classique, d’Henry Mintzberg, Structure et dynamique des organisations, publié dans sa version française aux Editions d’organisation, en 1982.
1Les grandes entreprises ont, de par leur taille, une tendance naturelle à se bureaucratiser. Elles sont considérées comme des organisations qui par nature résistent au changement.
2Comment dès lors expliquer que malgré le fait qu’elles soient pénalisées par des règles de planification et de contrôle qui viennent entraver leur flexibilité et leur réactivité, nombre d’entre elles réussissent à conserver une forte capacité à entreprendre?
3La question est complexe dans la mesure où cette capacité à entreprendre dépend de facteurs liés à la fois à l’équipe dirigeante, et à sa vision stratégique, à l’organisation, au management des ressources humaines et à la culture de l’entreprise [1].
4En nous appuyant sur des travaux récents que nous avons réalisés dans des grandes entreprises à la demande, notamment, de l’Institut de l’entreprise et de la présidence du Sénat, nous nous intéressons ici à l’impact de l’organisation sur l’orientation entrepreneuriale d’une grande entreprise [2]. Et nous défendons la thèse que la mise en place de dispositifs organisationnels spécifiques permet de favoriser l’apparition et le développement d’une dynamique intrapreneuriale que Burgelman définit comme « un procédé de création et de développement d’une nouvelle activité par des employés en dehors du cœur d’activité d’une firme établie » [3].
5Après avoir montré toute l’importance que l’innovation revêt pour une grande entreprise et mis en évidence les conditions nécessaires au développement d’innovations de rupture, nous évoquerons la nature et les effets des processus organisationnels à l’œuvre dans les grandes entreprises. Puis nous analyserons dans le détail le rôle que jouent les dispositifs spécifiques pour créer et développer une dynamique intrapreneuriale. Enfin nous proposerons une typologie organisationnelle allant de l’organisation bureaucratique à l’organisation entrepreneuriale.
L’innovation, facteur clé de la performance
6La grande entreprise cherche en permanence à accroître sa compétitivité afin d’assurer sa pérennité. Pour ce faire, elle peut mettre en place une politique de réduction de coûts (nécessairement temporaire) ou une politique de développement (qui s’inscrit dans la durée). Nous retrouvons là les deux grandes dimensions de l’entreprise, l’exploitation et l’exploration, mises en évidence par de nombreux auteurs [4].
7Une politique de réduction de coûts passe par la recherche d’optimisations au niveau de l’allocation des ressources, ce qui nécessite, à travers un processus de gestion linéaire, de générer et d’exploiter de l’innovation au niveau des process. Ce type d’innovation peut permettre d’augmenter la valeur client sans pour autant la renouveler. Il s’agit là d’une forme d’innovation particulière dite incrémentale.
8La stratégie de développement passe quant à elle par la conquête de nouveaux marchés, c’est-à-dire par l’identification d’opportunités d’affaires et l’invention de nouveaux produits et services. Autrement dit, pour assurer sa croissance à long terme, l’entreprise doit être capable de générer et d’exploiter durablement de l’innovation au niveau des produits et des services qu’elle commercialise. Ces innovations, qui permettent une augmentation mais également un renouvellement de la valeur client, correspondent, par opposition à la première forme, à des innovations de rupture.
9La force d’une grande entreprise réside dans tous les cas dans sa capacité à innover. Elle ne peut pas pour autant se contenter de trouver et d’entretenir une valeur client, voire de chercher à l’améliorer. Elle se doit de la renouveler en permanence. Le statu quo est une stratégie qui conduit inexorablement au déclin. La stratégie qui se limiterait à améliorer la valeur client en générant de l’innovation incrémentale ne permet pas non plus de garantir la pérennité de l’entreprise dans la mesure où cette dernière a de fortes chances d’être mise à distance par le niveau d’innovation du marché sur lequel elle opère. L’incrémentalisme a des limites en raison des rendements décroissants. Il ne suffit pas de faire mieux, soit en réduisant les coûts, soit en améliorant des produits existants ou encore en prenant des parts de marché.
Les points forts
La dynamique résulte de la combinaison de deux processus fondamentaux : celui d’élaboration d’une stratégie et celui de changement.
Ainsi, les entreprises se situent sur une échelle qui va de l’archétype bureaucratique à l’archétype entrepreneurial selon la façon dont se combinent la vision de l’organisation et la nature du management.
10La stratégie d’innovation d’une grande entreprise doit consister à savoir régulièrement bouleverser l’offre sur son marché. Pourtant, cette stratégie ne lui est pas un processus naturel. Sa mise en œuvre nécessite que l’entreprise fasse en permanence évoluer son organisation, globalement ou à travers la mise en place de dispositifs organisationnels spécifiques. Si ces changements organisationnels permettent de générer davantage d’innovations incrémentales, ils sont surtout une condition nécessaire, mais non suffisante, pour créer de l’innovation de rupture. Pour que les changements organisationnels soient à l’origine du développement d’innovations de rupture, ils doivent s’accompagner d’une impulsion entrepreneuriale en interne, afin de lutter contre le processus naturel de bureaucratisation. Cette impulsion n’est possible que si un nombre suffisant de collaborateurs se comportent comme des managers intrapreneurs [5]. Elle permet de passer de la capacité à innover (que beaucoup de grandes entreprises possèdent) à l’innovation (phénomène que l’on observe plus rarement) ; de transformer une vision en réalité.
Des processus opérationnels contradictoires
11Classiquement, on peut distinguer trois processus au sein d’une entreprise :
- un processus de bureaucratisation,
- un processus d’élaboration d’une stratégie,
- un processus de changement.
12Le processus d’élaboration d’une stratégie et le processus de changement sont la résultante des actions d’acteurs multiples qui interagissent mutuellement. Ces deux processus peuvent se combiner partiellement, présenter des synergies, révéler des incompatibilités, être source de dissensions. La dynamique intrapreneuriale peut être analysée comme résultant de leur combinaison. Pour que cette dynamique naisse et se développe, il faut que les deux processus soient compatibles. A quelles conditions cela est-il envisageable? Le processus d’élaboration d’une stratégie est un processus rigide et discontinu, la discontinuité étant l’essence même de la pensée. Il peut être schématiquement représenté par une succession de marches d’escalier (alternance de plateaux et de ruptures). De son côté le processus de changement est un processus évolutif, incrémental. L’essence de l’action est la continuité.
13Le processus de changement s’oppose à celui de bureaucratisation. Cette opposition permanente a tendance à muscler le processus de bureaucratisation. Inversement, le processus de bureaucratisation a tendance à diminuer l’intensité du processus de changement.
14Changer l’organisation nécessite de changer une (ou un ensemble de) règle, autrement dit d’introduire une rupture qui va déclencher et orienter le processus de changement. L’orientation dépend de l’intensité de la rupture. Faisant partie du processus d’élaboration d’une stratégie qui obéit aux lois de la pensée, la rupture permet d’éliminer les oppositions, de passer outre les règles et donc de forger une nouvelle représentation : ce qui était impossible auparavant devient possible. Généralement, la nouvelle vision apparaît en réaction à des événements extérieurs. Il faut ensuite qu’elle se stabilise afin qu’elle puisse être transformée, au moins partiellement, en réalité à travers l’action du processus de changement. C’est ce « plateau » dans le processus d’élaboration d’une stratégie qui permet la compatibilité avec le processus de changement.
15Celui qui élabore la stratégie est un visionnaire. Celui qui la stabilise est un individu capable d’identifier et d’exploiter une opportunité, ce qui nécessite qu’il soit capable de se faire comprendre par les parties prenantes de l’organisation. Le processus d’élaboration d’une stratégie est d’autant plus intense et cohérent que la stratégie est clairement perçue par l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise. Elle le sera d’autant mieux que l’individu qui a la vision est le même que celui capable d’identifier et d’exploiter une opportunité. On parlera alors d’un leader. L’intensité et la clarté du processus d’élaboration d’une stratégie sont encore renforcées lorsque le leader a le statut de PDG de l’entreprise, car dans ce cas le leader est légitime. Cette légitimité accroît la force d’attraction du processus d’élaboration d’une stratégie, ce qui a un impact positif sur la vitesse et l’amplitude du changement.
16Le leader tel que nous l’avons défini est capable de casser les stéréotypes dans l’esprit des collaborateurs. Lesquels peuvent être répartis en deux groupes :
- ceux qui sont dans un mode de réaction, qui ont une attitude de résistance face au changement. Ce sont des managers gestionnaires;
- ceux qui, au contraire, ont une attitude proactive face au changement et qui mettent en œuvre la stratégie de l’entreprise en faisant preuve d’autonomie et d’esprit d’initiative. Ces individus sont des managers intrapreneurs.
L’art de promouvoir la dynamique intrapreneuriale
17On a souvent tendance à considérer que les grandes entreprises n’entreprennent pas et qu’il faut être de petite taille pour entreprendre [6]. Il s’agit là d’un préjugé sans fondement. Un défi majeur pour les grandes entreprises consiste à mettre en œuvre une organisation capable de développer l’esprit intrapreneurial qui permettra de transformer le concepteur ou le chef de projet en manager intrapreneur [7]. Autrement dit l’amener à considérer son projet non pas comme la réponse à une demande mais comme un business plan avec des objectifs à atteindre, des stratégies à élaborer, des arbitrages à réaliser, des optimisations de ressources à mettre en place.
18L’intrapreneuriat désigne la capacité des individus à se comporter et à décider de manière autonome et entrepreneuriale au sein d’une organisation existante, afin de créer une nouvelle activité ou d’impulser une innovation de rupture [8].
19Se comporter de manière entrepreneuriale signifie être capable de détecter des opportunités et de les mettre en œuvre pour créer de la valeur. Cela induit trois aptitudes spécifiques :
- la capacité à être porteur d’une vision sur le projet, la situation ou l’opportunité identifiée,
- la capacité à prendre des initiatives et des risques,
- la capacité à rassembler et à combiner des ressources de manière innovante.
20La mise en place et le développement d’une dynamique intrapreneuriale apparaît comme un impératif pour les grandes entreprises. Impératif économique tout d’abord, car toute entreprise qui veut progresser se doit d’innover en permanence et les plus performantes sont celles qui mieux, plus vite et plus régulièrement, savent percevoir les nouvelles opportunités et les exploiter. Impératif social ensuite. Dans un système où l’individu est aujourd’hui plus éduqué, où il s’affirme davantage, il importe de lui offrir la possibilité de se réaliser dans son travail et dans ses idées, qui constituent des sources d’avantages potentiels considérables pour l’organisation qui l’emploie.
21L’apparition et le maintien de cette dynamique intrapreneuriale passent généralement par la mise en place de dispositifs organisationnels spécifiques qui permettent d’agir sur deux leviers :
- encourager l’innovation,
- permettre d’exploiter les innovations à travers une dynamisation de la gestion des ressources humaines.
22Les dispositifs mis en place afin de renforcer le processus d’élaboration d’une stratégie ont pour objectif de générer de l’innovation de rupture. Ce sont généralement des dispositifs tournés vers l’extérieur. En effet, contrairement aux TPE/PME, la majorité des grandes entreprises échouent à innover de manière radicale en interne. Face à une rupture, elles laissent la plupart du temps le champ libre à de nouveaux entrants. Elles mettent donc en place des dispositifs organisationnels qui leur permettent d’identifier à l’extérieur des innovations de rupture pour pouvoir dans un second temps les absorber (modèle de l’enclave chez EDF avec EDF Business Innovation [9], modèle de l’acquisition apprenante chez Air Liquide avec Air Liquide Venture).
23Pour renforcer le processus de changement, les dispositifs mis en place cherchent à dynamiser la gestion des ressources humaines afin d’être capable de mieux exploiter les innovations de rupture (modèle de la dissémination chez Gaz de France avec Gaz de France Entreprendre, modèle de l’imprégnation chez Pernod Ricard).
24L’approche consistant à vouloir faire évoluer l’organisation dans son ensemble paraît a priori plus complexe dans la mesure où, en cherchant à agir sur la culture de l’entreprise, on s’oppose au processus de bureaucratisation. Les dispositifs organisationnels spécifiques ont, quant à eux, un rôle de catalyseur et sont protégés du processus naturel de bureaucratisation. Ils sont soit conçus comme des isolats, soit animés par des entrepreneurs ou des experts en entrepreneuriat qui, dans les deux cas, conservent une certaine distance par rapport à la culture de l’entreprise.
25Les dispositifs organisationnels spécifiques permettent d’intensifier le processus de changement qui de fait a un caractère cumulatif et exponentiel plus important. Ainsi les managers gestionnaires ont-ils tendance à mieux identifier la dynamique intrapreneuriale et à davantage imiter les managers intrapreneurs, ce qui leur permet de développer des compétences intrapreneuriales. L’augmentation du nombre de managers intrapreneurs dans l’organisation au sein de laquelle il existe une réelle vision stratégique permettra le développement cohérent et pérenne d’une dynamique intrapreneuriale, source d’innovation de rupture. Dès lors qu’elles rencontrent un marché, ces innovations de rupture contribueront à l’amélioration de la compétitivité de l’entreprise et, par conséquent, à son développement pérenne.
Vers l’organisation intrapreneuriale
26En définitive, les grandes entreprises peuvent se retrouver dans l’un ou l’autre des cinq types d’organisation présentés ci-dessous, dans un continuum allant de l’archétype bureaucratique à l’archétype entrepreneurial [10]. Dans chaque cas, il est possible d’agir sur certains facteurs pour transformer l’organisation.
271 - L’organisation qui n’a pas de vision (absence de leader) et dans laquelle les individus sont très majoritairement réticents au changement ou n’ont pas assez d’autonomie. Il s’agit d’une organisation bureaucratique avec des managers gestionnaires. Ce type d’entreprise n’est pas intrapreneuriale. C’est une organisation cohérente, qui est vouée à disparaître à moyen terme dans le cadre d’une économie libérale.
282 - L’organisation qui n’a pas de vision (absence de leader) et dans laquelle les individus moteurs de changement sont nombreux et jouissent d’une certaine autonomie. Il s’agit d’une organisation bureaucratique avec des managers intrapreneurs. Ce type d’entreprise est perçue comme intrapreneuriale et ne l’est pas en réalité. Face au changement, l’organisation crée une force d’opposition qui renforce la bureaucratie et empêche l’apparition d’une dynamique intrapreneuriale. Il s’agit d’une organisation chaotique dans laquelle règnent agitation et stress, et où l’énergie se disperse.
293 - L’organisation qui a une vision (existence d’un leader) et dans laquelle les individus sont très majoritairement réticents au changement ou n’ont pas assez d’autonomie. Il s’agit d’une organisation intrapreneuriale avec des managers gestionnaires. Pas plus que la précédente, ce type d’organisation perçue comme intrapreneuriale ne l’est en réalité. Les processus d’élaboration d’une stratégie et de changement ne sont pas compatibles. Les collaborateurs opposent une résistance importante au changement dès lors qu’ils perçoivent la force d’attraction du processus d’élaboration d’une stratégie comme étant trop faible. Ils ne comprennent pas ou refusent de suivre le leader qui bien souvent n’est pas légitime. Le développement d’une dynamique intrapreneuriale est impossible.
304 - L’organisation qui a une vision et dans laquelle les individus moteurs de changement sont nombreux, jouissent d’une autonomie suffisante et adhèrent à la vision stratégique du leader. Il s’agit d’une organisation intrapreneuriale avec des managers intrapreneurs. Les processus d’élaboration d’une stratégie et le processus de changement se combinent et s’équilibrent de manière synergique pour donner naissance à un processus de dynamique intrapreneuriale. Ce processus résultant est un processus continu. La cohérence de l’organisation garantit le maintien de la dynamique intrapreneuriale. L’équilibre organisationnel reste instable du fait de l’existence du processus de bureaucratisation. C’est l’impossibilité d’éliminer ce dernier qui empêche l’organisation de tendre vers un équilibre stable caractéristique d’une dynamique entrepreneuriale. La création et le développement d’une dynamique intrapreneuriale sont néanmoins possibles.
315 - L’organisation qui a une vision et dans laquelle les individus sont moteurs de changement, autonomes et anticipent la vision. On peut dire que les individus sont visionnaires dans leur action. L’intensité du processus de changement est plus forte que dans le cas précédent. Il s’agit d’une organisation entrepreneuriale avec des managers entrepreneurs. Le processus d’élaboration d’une stratégie et le processus de changement sont compatibles. Il existe dans ce type d’organisation une dynamique entrepreneuriale. Seules les structures de petite taille dans lesquelles il n’existe pas encore de processus de bureaucratisation peuvent prétendre atteindre l’organisation entrepreneuriale cible. Le modèle s’applique donc uniquement aux petites structures et reste un objectif théorique pour les grandes. Si elle n’est pas possible compte tenu de l’existence inévitable du processus de bureaucratisation, l’atteinte de ce modèle cible n’est pas non plus souhaitable, contrairement à ce qu’on pourrait penser a priori. En effet, les entrepreneurs ont tendance à entreprendre pour eux et non pas pour l’entreprise. Ils ne sont pas faits pour s’inscrire dans le cadre d’une grande entreprise et en respecter la stratégie. Aussi une grande entreprise ne doit-elle pas chercher à retenir les entrepreneurs si elle veut éviter de se retrouver dans une situation de conflit et de chaos, mais au contraire les inciter à créer ou à reprendre une structure.
Notes
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[*]
Thomas Legrain a été le fondateur et le PDG de Coach’Invest. Il vient de créer TL Conseil.
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[1]
Voir O. Basso et T. Legrain, « La Dynamique entrepreneuriale dans les grands groupes », rapport d’étude, Institut de l’entreprise, 2004, www.institutdelentreprise.fr.
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[2]
Les cinq dimensions caractéristiques du concept d’orientation entrepreneuriale tel que défini par G.T Lumpkin et G. G. Dess pour caractériser et tester le comportement entrepreneurial d’une firme sont la propension à innover, la prise de risque, la proactivité, l’agressivité compétitive et l’autonomie de l’action. Voir G.T Lumpkin et G. G. Dess, « Clarifying the Entrepreneurial Orientation Construct and Linking It to Performance », Academy of Management Review, vol. 21, n° 1, 1996.
-
[3]
R. A. Burgelman, « A Process Model of Internal Corporate Venturing in the Diversified Major Firm », Administrative Science Quarterly, vol. 28, 1983.
-
[4]
Voir notamment, J. G. March, « Exploration and Exploitation in Organizational Learning », Organization Science, vol. 2, n° 1, 1991.
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[5]
Voir O. Basso, Le Manager entrepreneur, Village mondial, 2006.
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[6]
A. Fayolle et L.-J. Filion, Devenir entrepreneur, Village mondial, 2006.
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[7]
O. Basso, L’Intrapreneuriat, Economica, 2004.
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[8]
Voir C. Carrier, « L’intrapreneuriat dans la PME : une étude exploratoire du phénomène à partir des représentations des principaux acteurs concernés », thèse de doctorat, faculté de droit et de sciences économiques, université de Montpellier I; G. Pinchot, Les Intrapreneurs, Mc Graw Hill, 1986.
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[9]
A. Fayolle, T. Legrain, « Orientation entrepre-neuriale et grande entreprise : le cas EDF », La Revue des sciences de gestion, n° 219, mai-juin 2006.
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[10]
D’autres auteurs avant nous ont cherché à caractériser les organisations et ont parfois identifié des types qui portent les mêmes appellations que les nôtres, mais en utilisant des approches et des critères de segmentation différents de ceux que nous avons utilisés. Rappelons simplement ici l’ouvrage, devenu un classique, d’Henry Mintzberg, Structure et dynamique des organisations, publié dans sa version française aux Editions d’organisation, en 1982.