Empan 2007/2 n° 66

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Article de revue

Sport, santé et situation de handicap mental

De la nécessité de se construire des représentations nouvelles

Pages 150 à 156

Notes

  • [*]
    Roy Compte, docteur en sociologie, les Alicantes 2, 11110 Coursan
    rocomp2@aol.com
  • [1]
    Baromètre santé 2000, www.CFES.santé.fr
  • [2]
    L. Sfez, La santé parfaite, critique d’une nouvelle utopie, Paris, Le Seuil, 1995.
  • [3]
    P. Baudry, Le corps extrême, approche sociologique des conduites à risque, Paris, L’Harmattan, 1991.
  • [4]
    Ibid., p. 39.
  • [5]
    Ibid., p. 38.
  • [6]
    J.M. Brohm, Les meutes sportives. Nouvelles études anthropologiques, Paris, L’Harmattan, 1993.
  • [7]
    A. Canva, « Le leurre des vertus sanitaires du sport et santé », Prévenir, éd. Coopérative d’édition de la vie mutualiste, Marseille, 1998, n° 34.
  • [8]
    M. Rieu, « Aspects bénéfiques des activités physiques et sportives », dans Actualité et dossier en santé publique, n° 14, mars 1996, p. 13 à 19.
  • [9]
    F. Depiesse, « Le sport et les activités physiques pour la santé ; une cause de santé publique. Réalités et propositions », rapport, direction régionale et départementale de la jeunesse et des sports de Midi-Pyrénées et de Haute-Garonne, novembre 2002.
  • [10]
    J. Coudert, « Activité physique et santé chez la personne âgée », revue Prévenir, n° 34, 1998, p. 27-32.
  • [11]
    La Fédération française du sport adapté a reçu délégation de pouvoir du ministère de la Jeunesse et des Sports pour organiser, animer encadrer les activités physiques et sportives pour les personnes en situation de handicap mental ou psychique. Créée en 1971, elle compte 30 000 licenciés.
  • [12]
    Voir à ce propos la Classification internationale du handicap, du fonctionnement et de la santé, oms, 2001. P. Fougeyrollas, « Les modèles explicatifs des conséquences des maladies et traumatismes : le processus de production de handicap », Réseau international cidih, vol. 6, n° 2, 1993, p. 13 à 28.
  • [13]
    J.M. Brohm, « Discours sur le corps », Informations sociales, n° 5, Paris, cnaf, 1985.
  • [14]
    Voir à ce propos, Sport, handicap intégration, Rapport de recherche, commission études et recherche, s/d R. Compte, Les cahiers du sport adapté, n° 3, Paris, ffsa, 2005.
  • [15]
    J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, essai d’ontologie phénoménologique, Paris, Gallimard, 1943, p. 396.
  • [16]
    M. Merleau-Ponty, La phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 1945, p. 97.
  • [17]
    M. Foucault, Histoire de la folie à l’âge classique, Paris, Gallimard, 1972, p. 154.
  • [18]
    R. Compte, C. Lemoigne, « Les caractéristiques médicales des sportifs en situation de handicap mental ou psychique », Les cahiers du sport adapté, n° 5, Paris, 2005.
  • [19]
    R. Castel, La gestion des risques, de l’anti-psychiatrie à l’après-psychanalyse, Paris, Éditions de Minuit, 1981.

1Poser la question du sport dans une visée de santé et son rapport au handicap mental ou psychique, c’est s’interroger, d’une certaine façon, sur la capacité d’une activité éminemment culturelle à réduire les conséquences sociales d’une déficience dont la caractéristique première est de soumettre l’individu qui en est porteur à une dépendance plus psychologique et sociale que physique.

2Aujourd’hui le sport, dans son acception commune, c’est-à-dire défini comme une activité sociale, compétitive ou non compétitive, mettant en jeu la motricité et la corporéité de l’individu, est considéré, entre autres, comme un facteur de santé. Notons que dans notre société, la pratique sportive n’a jamais été aussi importante pour des raisons différentes ou conjuguées, aussi bien esthétiques (sculpter son corps), ludiques (pour le plaisir) que médicales (rester en bonne santé).

3Si on regarde les chiffres [1], en 2003 en France, trente-quatre millions de personnes ont pratiqué au moins une activité sportive de façon régulière ou occasionnelle, et quinze millions de licences ont été délivrées par cent quatorze fédérations différentes. C’est dire que le sport prend une place non négligeable dans le mode de vie des Français.

4Dans les 44 % de la population qui déclare avoir pratiqué un sport au cours des sept derniers jours (les hommes plus longtemps et plus souvent que les femmes), 72 % disent que le plaisir est la principale motivation, devant la santé (60 %) et la rencontre d’amis (40 %). La motivation santé dans la pratique d’un sport, et plus largement d’une activité physique, est donc affirmée. Le sport fait partie sociologiquement des comportements de santé que nombre d’individus mettent en avant.

La notion de santé, et les représentations nouvelles qui s’y attachent, méritent que l’on s’y attarde quelques minutes

5Pour l’Organisation mondiale de la santé (oms), la santé est « un état complet de bien-être physique, mental et social ne se caractérisant pas uniquement par l’absence de maladie ou d’infirmité. » Cette définition très large souligne cependant que la notion de santé échappe à l’opposition formelle santé-maladie et renvoie à une notion de santé pluridimensionnelle où l’individu, dans son environnement et sa manière d’être au monde, peut agir pour s’approprier (faire sien), maintenir, préserver un capital santé sur lequel 45 % des Français, dans un récent sondage ifop, estiment pouvoir agir, même si 54 % pensent que leur capital santé est donné à la naissance.

6L’obsession contemporaine autour de la santé, l’utopie réclamée, proclamée, d’une « santé parfaite », que Lucien Sfez [2] désigne comme l’utopie du xxie siècle, trouve sens dans un surinvestissement du corps.

7De ce point de vue, le souci de soi se traduit d’abord par le souci de son corps. Surmédiatisé, il est surinvesti. Des pratiques vestimentaires soignant l’apparence aux pratiques corporelles visant la préservation d’un capital santé/jeunesse, le corps prend de plus en plus d’importance aux yeux du sujet.

8En entretenant la séduction et/ou la forme-santé du corps avec le souci de le maintenir en bon état le plus longtemps possible, l’individu est invité à découvrir son corps comme un autre soi-même et non comme étranger à soi, fuyant, inquiétant, dangereux.

9Ce corps alter-ego est appréhendé dans l’imaginaire du corps comme lieu de transformation du sujet rejetant inconsciemment ses fragilités, sa vulnérabilité.

10L’exigence de la forme, soulignée par Patrick Baudry [3], va dans le sens d’une libération d’un corps désenglué en quelque sorte de ses lourdeurs, de ses maladresses, mais elle s’acquiert contre lui.

11

« C’est une lutte constante contre le corps que l’idéal de la forme entretient [4]. »

12Il ne suffit pas de paraître en bonne santé, encore faut-il le montrer. Il faut être dynamique, tonique, enjoué, bref, heureux de vivre : « la forme, c’est plus que la santé [5] », autrement dit, la culture du corps développée par une pratique hygiéniste liant à la santé la forme physique, entendue comme capacité à utiliser pleinement son corps grâce à l’entraînement et à une hygiène de vie, introduit immanquablement l’idée que l’usure du corps serait due en grande partie à l’usage ou le non-usage que nous en faisons.

13Dès lors, il s’agit d’entretenir son corps, de ne pas faire d’excès, mais aussi de s’imposer un autocontrôle permanent.

14Ainsi, le paradigme de la santé domine dans les représentations du corps. Il n’est donc pas étonnant que dans cette représentation du corps et de la santé, le sport vienne prendre place comme moyen de (re)conquête de soi au travers de son corps. Les activités physiques et sportives participent de la recherche d’un corps fluide, d’un corps lieu de jubilation, d’un corps lieu de conquête de soi, d’un corps dont l’expression hédoniste vise à sa longévité et à sa santé.

15La dimension sport-santé, comme motivation nouvelle pour les pratiquants, apparaît au début des années 1970 avec l’avènement d’une société de loisirs proposant une nouvelle vision du monde, plus hédoniste, plus centrée sur l’individu, son mode et ses rythmes de vie.

16Le sport dans une optique de santé vient alors prendre place comme palliatif à bien des maux, tant psychologiques que sociaux.

17Il n’est pas anodin de souligner ici que le sport, de par son importance grandissante dans le mode de vie des Français, a introduit une nouvelle discipline médicale : la médecine du sport (spécialité présente depuis 1947). D’abord centrée sur des missions spécifiquement liées aux aspects médicaux de la pratique sportive (examen des sportifs ordinaires, dépistage des contre-indications, conseil de bonnes pratiques), la médecine du sport a évolué vers la maximisation de la performance, évolution qui souligne en contrepoint les méfaits d’une pratique sportive mal conduite, c’est-à-dire trop intense ou trop épisodique.

18Ainsi, le rapport sport, corps et santé s’est instauré comme allant de soi et ne pouvant être, dans la pensée commune, que bénéfique aux pratiquants.

19Cependant, le tableau est plus nuancé, car de nombreuses études montrent le rôle dévastateur de la pratique sportive, notamment chez les jeunes ou les sportifs occasionnels.

20Le sport de compétition est montré du doigt par certains auteurs du courant critique du sport, avec à leur tête J.M. Brohm [6]. Le sport de compétition, par une pratique de plus en plus intense et de plus en plus jeune, est générateur de traumatismes physiques et psychologiques irréversibles.

21Stéphane Cascua [7], auteur de Le sport est-il bon pour la santé ?, nous rappelle que l’effort provoque la mort brutale de 1 500 sportifs par an, que la dépression des sportifs de haut niveau liée à la confrontation au stress est une réalité, que le sport de loisir où l’on cherche à se dépasser est porteur de risques, que les nouvelles pratiques où il n’est pas question de records mais de sensations fortes ne sont pas exemptes de danger pour l’intégrité physique des pratiquants.

22En 2004, le ministère de la Jeunesse et des Sports comptabilisait 6 662 sportifs(ives) de haut niveau. Dès l’âge de 13 ans, des jeunes footballeurs sont intégrés en centre de formation (6 en France) ou en sport-études. À cet âge, ils sont astreints à une heure trente d’entraînement quotidien et à une compétition hebdomadaire. À partir de 15 ans, le volume d’entraînement double.

23Aussi, chez les jeunes sportifs, engagés dans une logique de compétition intensive et précoce, on relève une traumatologie importante au-delà de quinze heures d’entraînement par semaine (lésions traumatiques tendineuses et articulaires, fractures de fatigue, problèmes de rachis…).

24Ces quelques observations soulignent que le rapport sport et santé peut être un leurre pour peu qu’il s’inscrive (parfois à corps défendant ou par méconnaissance) dans une pratique hors normes, impliquant des comportements à risques ou des conduites addictives.

25Cependant, l’aspect bénéfique de l’activité physique et sportive n’est plus à démontrer, de multiples études en soulignent la pertinence, dans la mesure où cette pratique est « régulière, modérée et diversifiée ».

Les effets bénéfiques pour la santé de l’activité physique et sportive

26Quel que soit l’âge, une pratique régulière, modérée et diversifiée est porteuse de bienfaits.

27Michel Rieu [8] évoque un certain nombre d’études mettant en évidence le rôle positif des activités physiques et sportives dans la prévention et le traitement de pathologies. L’exercice musculaire chronique d’intensité modérée a pour effet d’élever les défenses immunitaires de l’organisme. Les activités physiques et sportives auraient une action thérapeutique chez des malades déprimés, l’exercice diminuant l’anxiété et l’instabilité émotionnelle.

28Les conséquences de l’absence d’activité physique sont importantes du point de vue sanitaire. La sédentarité apparaît comme un fléau invisible favorisant la dépendance et le handicap de manière d’autant plus marquée que la personne avance en âge.

29Frédérick Depiesse [9], médecin du sport et conseiller à la drdjs de Midi-Pyrénées, dans un rapport très détaillé sur le sport et les activités physiques pour la santé, nous rappelle que la mise au repos chronique de l’organisme entraîne une limitation de la consommation maximale d’oxygène et des capacités aérobies, une surcharge pondérale avec un excès de masse grasse, une diminution de la force musculaire, une réduction de la souplesse musculo-tendineuse, une fragilité osseuse.

30Concernant les populations atteintes de pathologies chroniques (insuffisances respiratoires, cardiaques, diabétiques) l’absence d’activité physique jouerait un rôle amplificateur dans la maladie, notamment dans ses conséquences sociales et psychologiques.

31L’activité physique prend une place importante dans les programmes de rééducation et de réinsertion sociale de patients atteints de lésions coronaires, d’insuffisance cardiaque, de diabète, d’asthme, etc.

32L’entraînement physique a des effets favorables sur le cholestérol, la régulation de la glycémie, la diminution de la surcharge graisseuse.

33Chez les personnes âgées, un programme d’activités physiques adaptées limite les conséquences (chutes avec fractures du col du fémur et du radius) de l’ostéoporose.

34Jean Coudert [10] professeur à la faculté de médecine de Clermont Ferrand, note que les bénéfices de l’entraînement physique chez les personnes âgées se situent à différents niveaux :

  • amélioration des fonctions cardiaques, en particulier augmentation du volume d’éjection ventriculaire ;
  • profil lipidique favorable : abaissement du cholestérol sanguin total ;
  • amélioration de la tolérance aux sucres et augmentation de la sensibilité à l’insuline ;
  • augmentation et maintien des masses et des forces musculaires associés à une meilleure agilité motrice et à un meilleur équilibre, facteurs de préservation des chutes et de leurs conséquences ;
  • densité et contenu minéraux osseux accrus, facteurs de prévention de l’ostéoporose.
Ces bénéfices s’estompent ou disparaissent dès l’arrêt de l’entraînement.

35Par ailleurs, la pratique de l’activité physique et du sport, comme le montre une étude menée par l’ufr staps de Montpellier auprès de blessés médullaires, favorise une amélioration de leur vécu corporel avec une intégration psychique des déficits ainsi qu’une amélioration de l’estime de soi.

Qu’en est-il du rapport activités physiques et santé pour les personnes en situation de handicap mental ou psychique ?

36Du point de vue du rapport sport/santé, faut-il faire un sort particulier aux personnes en situation de handicap mental ? Pourquoi en serait-il ainsi, car les bénéfices physiologiques et psychologiques de la pratique d’activités physiques et sportives que nous venons d’évoquer ne peuvent être moindres que pour une population ordinaire. Bien au contraire, la situation de handicap devrait renforcer la nécessité pour la personne de s’inscrire dans une pratique physique et/ou sportive régulière. Cependant, les usages sociaux du handicap (travail, emploi, loisirs, éducation, sport…) montrent la difficulté des personnes à accéder à la norme sociale.

37L’activité physique et sportive est présentée au sein de la Fédération française du sport adapté [11] comme un élément de stimulation des personnes handicapées les plus dépendantes, le moyen de passer de l’inaction à l’action, de vaincre, en quelque sorte, l’inertie des corps.

38La déficience conduit à l’inaction physique et celle-ci renforce la déficience. Ainsi s’auto-alimente le processus de production du handicap, dans une interaction étroite avec les habitudes de vie et l’environnement [12]. Cette présentation entre dans une visée ré-adaptative voire thérapeutique, donc de santé, de l’activité physique, et vient en contrepoint répondre au paradoxe d’une organisation banalisant son ancrage dans le modèle performatif du sport, tout en voulant donner sens à une pratique corporelle en décalage des pratiques, comme le dit J.M. Brohm, de « corps sains qui ignorent tout du spectre de l’anormalité [13] ».

39La singularité des personnes en situation de handicap mental, qui se manifeste notamment par un fort degré de dépendance vis-à-vis de l’environnement éducatif ou parental, peut être considérée comme un frein à un investissement personnel dans l’activité physique et sportive [14]. Autrement dit, les bienfaits d’une activité physique et sportive régulière, relevés précédemment, ne peuvent être effectifs que dans une appropriation par la personne en situation de handicap mental, de la nécessité d’agir.

40Il faut bien dire que, si la prise en compte des personnes handicapées dans notre société est réelle, leur participation à la vie de la cité, leur organisation personnelle, leur vie affective, culturelle, ou sociale sont subordonnées à un tutorat réel ou de fait. Leurs voix sont peu ou pas entendues. Ainsi, la pratique d’activités physiques et sportives comme projet personnel ne peut prendre corps que si la personne trouve en écho un accompagnement, une volonté, une responsabilité pour résoudre les multiples difficultés qui encombrent un cheminement participatif.

41Notons que les notions de sport et de handicap ont été longues à concilier dans les représentations sociales du sens commun. Une histoire commune qui prend forme aujourd’hui sur le modèle dominant de la performance, qui est valorisée comme production significative de la normativité sportive. C’est le cas pour les sportifs de Handisport, alors que les sportifs handicapés mentaux sont perçus comme des ersatz, malgré les efforts accomplis par les organisations représentatives pour les insérer dans le modèle dominant du sport.

42La question in fine est alors : quel contre-modèle signifiant la société peut-elle proposer pour donner une identité sportive reconnue à une population dont les pratiques corporelles sont marginalisées ?

Les personnes en situation de handicap mental ou psychique : une population à risques ?

43Pratiquer et faire pratiquer l’activité physique et sportive dans une visée de santé, c’est-à-dire dans le but d’acquérir un état de bien-être physique, mental et social, est déjà en soi pour les personnes en situation de handicap mental un défi pour ceux que certains considèrent comme une population à risques.

44Qu’est-ce qui fait dire, de façon générale, que la personne en situation de handicap mental ou psychique est une personne vulnérable, à risques, si ce n’est que le corps handicapé, sa norme sociale et biologique, s’impose comme archétype de l’altérité.

45Autrement dit le corps, corps vécu « objet psychique [15] » dont nous parle Sartre dans L’Être et le Néant ou corps « pivot du monde [16] » comme l’écrit Merleau-Ponty, le corps s’impose à la conscience d’autrui et révèle une image parfois inacceptable car trop contraire aux représentations communes.

46Il y a une impossibilité d’identification au corps souffrant, enlaidi par la maladie, amoindri, mutilé, handicapé. La maladie, le handicap, la souffrance rompent une unité somato-psychique et font du corps le centre de nos préoccupations, de notre manière de vivre et d’être au monde. La santé est alors, comme le définit René Leriche dans sa célèbre formule, « la vie dans le silence des organes ».

47Le champ du handicap nous rappelle que la vision du corps est d’abord une confrontation à un corps différent, que ce soit celui du malade mental considéré comme le « corps visible et solide de la maladie [17] » ou celui des personnes en situation de handicap mental dont le corps montré, présenté doit être aussi présentable, c’est-à-dire non dérangeant.

48Il s’agit alors, pour une société qui vit avec l’obsession du corps autour de la santé, d’éradiquer toute souffrance, de limiter les risques dans une vision d’un corps idéal.

49Les personnes en situation de handicap mental ou psychique, en exposant au travers des activités physiques un corps déviant, sont-elles pour autant des personnes à risque du point de vue de la santé ? Une enquête [18], ouvrant au secret partagé auprès de 900 médecins traitants de cette population, nous révèle qu’il n’en est rien et que les caractéristiques des sujets n’entraînent pas ipso facto de risques majeurs pour la santé.

50Cette notion de risque, que Robert Castel [19] a initiée, est au cœur des pratiques sociales et médico-sociales aujourd’hui. Nous devons en évaluer la pertinence au regard des facteurs personnels et contextuels qui construisent dans leurs imbrications la situation de handicap.


Mots-clés éditeurs : handicap mental, corps, sport, risques, santé

Date de mise en ligne : 01/09/2007

https://doi.org/10.3917/empa.066.0150

Notes

  • [*]
    Roy Compte, docteur en sociologie, les Alicantes 2, 11110 Coursan
    rocomp2@aol.com
  • [1]
    Baromètre santé 2000, www.CFES.santé.fr
  • [2]
    L. Sfez, La santé parfaite, critique d’une nouvelle utopie, Paris, Le Seuil, 1995.
  • [3]
    P. Baudry, Le corps extrême, approche sociologique des conduites à risque, Paris, L’Harmattan, 1991.
  • [4]
    Ibid., p. 39.
  • [5]
    Ibid., p. 38.
  • [6]
    J.M. Brohm, Les meutes sportives. Nouvelles études anthropologiques, Paris, L’Harmattan, 1993.
  • [7]
    A. Canva, « Le leurre des vertus sanitaires du sport et santé », Prévenir, éd. Coopérative d’édition de la vie mutualiste, Marseille, 1998, n° 34.
  • [8]
    M. Rieu, « Aspects bénéfiques des activités physiques et sportives », dans Actualité et dossier en santé publique, n° 14, mars 1996, p. 13 à 19.
  • [9]
    F. Depiesse, « Le sport et les activités physiques pour la santé ; une cause de santé publique. Réalités et propositions », rapport, direction régionale et départementale de la jeunesse et des sports de Midi-Pyrénées et de Haute-Garonne, novembre 2002.
  • [10]
    J. Coudert, « Activité physique et santé chez la personne âgée », revue Prévenir, n° 34, 1998, p. 27-32.
  • [11]
    La Fédération française du sport adapté a reçu délégation de pouvoir du ministère de la Jeunesse et des Sports pour organiser, animer encadrer les activités physiques et sportives pour les personnes en situation de handicap mental ou psychique. Créée en 1971, elle compte 30 000 licenciés.
  • [12]
    Voir à ce propos la Classification internationale du handicap, du fonctionnement et de la santé, oms, 2001. P. Fougeyrollas, « Les modèles explicatifs des conséquences des maladies et traumatismes : le processus de production de handicap », Réseau international cidih, vol. 6, n° 2, 1993, p. 13 à 28.
  • [13]
    J.M. Brohm, « Discours sur le corps », Informations sociales, n° 5, Paris, cnaf, 1985.
  • [14]
    Voir à ce propos, Sport, handicap intégration, Rapport de recherche, commission études et recherche, s/d R. Compte, Les cahiers du sport adapté, n° 3, Paris, ffsa, 2005.
  • [15]
    J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, essai d’ontologie phénoménologique, Paris, Gallimard, 1943, p. 396.
  • [16]
    M. Merleau-Ponty, La phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 1945, p. 97.
  • [17]
    M. Foucault, Histoire de la folie à l’âge classique, Paris, Gallimard, 1972, p. 154.
  • [18]
    R. Compte, C. Lemoigne, « Les caractéristiques médicales des sportifs en situation de handicap mental ou psychique », Les cahiers du sport adapté, n° 5, Paris, 2005.
  • [19]
    R. Castel, La gestion des risques, de l’anti-psychiatrie à l’après-psychanalyse, Paris, Éditions de Minuit, 1981.

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