Notes
-
[1]
Depuis la Déclaration universelle des droits de l’Homme (1948), nombreux sont les textes qui ont été adoptés par différentes organisations internationales et qui affirment le droit de tout individu à ne pas être discriminé sur la base de son appartenance ethnique, de sa langue, de sa religion etc. Voir par exemple la Directive 2000/43/CE relative à l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique (http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1399470361626&uri=CELEX:32000L0043) ou la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne de décembre 2000 qui a été modifiée et publiée au mois de mars 2010 (http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2010:083:0389:0403:fr:PDF).
-
[2]
Pour un approfondissement des liens entre les notions de médiation, interprétation et traduction nous renvoyons à Falbo (2013a et 2013b : 28-44).
-
[3]
Établie par le Conseil de l’Europe, la convention a été signée à Rome en 1950 et ratifiée par l’Italie en 1955.
-
[4]
Élaboré au sein de l’ONU, le pacte a été signé à New York en 1966 et ratifié par l’Italie en 1977.
-
[5]
Texte consultable à l’adresse : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32010L0064&rid=1.
-
[6]
Sur le site d’EULITA (http://www.eulita.eu/fr) il est possible de consulter les rapports finaux des projets mentionnés.
-
[7]
Pour une vision complète des aspects spécifiquement juridiques, nous renvoyons à Gialuz (2012b, 2013b, 2014).
-
[8]
« Sans préjudice de l’indépendance de la justice ni de la diversité dans l’organisation des ordres judiciaires dans l’Union, les États membres demandent aux personnes chargées de la formation des juges, des procureurs et du personnel de justice intervenant dans les procédures pénales d’accorder une attention particulière aux spécificités de la communication avec l’assistance d’un interprète, afin d’assurer une communication efficace et effective ».
-
[9]
Par souci de complétude, nous précisons que les articles 144-147 traitent respectivement de l’incapacité et de l’incompatibilité relatives à l’exercice de la fonction d’interprète, de la récusation et de l’abstention de l’interprète, des modalités qui président à l’attribution de la fonction d’interprète et les délais pour la traduction écrite de documents ainsi que les conditions pour la substitution, voire la condamnation de l’interprète qui ne respecte pas les délais fixés par le juge (pour un approfondissement des dispositions relatives aux articles cités cf. Ballardini, 2012 : 129-137).
-
[10]
Nous signalons en gras les ajouts et les modifications apportées au texte précédent.
-
[11]
Pour un approfondissement en la matière, nous renvoyons à Gialuz (2013a, 2013b) ainsi qu’au travail de recherche mené par Mometti (2013) dans le cadre du projet Bisogni e bisogni formativi nella comunicazione interlinguistica con i servizi di polizia e nei procedimenti penali, Université de Trieste (Falbo & Viezzi, 2014).
-
[12]
Art. 2 par. 4 Dir. 2010/64/UE : « Les États membres veillent à la mise en place d’une procédure ou d’un mécanisme permettant de vérifier si les suspects ou les personnes poursuivies parlent et comprennent la langue de la procédure pénale et s’ils ont besoin de l’assistance d’un interprète ».
-
[13]
SIGTIPS (Special Interest Group on Translation and Interpreting for Public Services) (2011) Final Report, DG Interprétation, Union Européenne, http://ec.europa.eu/dgs/scic/docs/sigtips_en_final_2011.pdf.
-
[14]
Parfois les délais sont impartis par la loi, comme par exemple les 48 heures que le juge de l’enquête préliminaire a à sa disposition pour confirmer ou invalider l’arrêt d’une personne.
-
[15]
S’agissant de la nomination de l’interprète, l’autorité judiciaire n’est pas tenue de se servir des listes officielles présentes auprès du tribunal. Par contre, pour tout autre expert judiciaire, l’autorité judiciaire doit avant tout consulter les listes de référence et, si aucun des experts y figurant ne correspond aux besoins de la situation donnée, l’autorité peut nommer un expert « extérieur » (art. 221 c.p.p.).
-
[16]
La qualité de l’assistance linguistique est prévue aux articles 2 et 3 de la Directive 2010/64/ UE : Art. 2 par. 8, « L’interprétation prévue par le présent article est d’une qualité suffisante pour garantir le caractère équitable de la procédure, notamment en veillant à ce que les suspects ou les personnes poursuivies aient connaissance des faits qui leur sont reprochés et soient en mesure d’exercer leurs droits de défense ». Art. 3 par. 9, « La traduction prévue par le présent article est d’une qualité suffisante pour garantir le caractère équitable de la procédure, notamment en veillant à ce que les suspects ou les personnes poursuivies aient connaissance des faits qui leur sont reprochés et soient en mesure d’exercer leurs droits de défense ».
INTRODUCTION
1 Parmi les droits de l’Homme et les libertés fondamentales figure le droit à parler sa propre langue [1].
2 Très souvent cela implique le besoin de dépasser les barrières linguistiques qui peuvent entraver la communication entre une personne ne parlant pas la langue du pays où elle se trouve et les institutions de ce même pays. Le droit à la langue se concrétise alors à travers l’interprétation et la traduction, à savoir les deux formes de médiation interlinguistique [2] (et interculturelles) décrites et définies par le Conseil de l’Europe (Blini, 2008).
3 L’un des secteurs concernés par l’exercice des droits linguistiques est sans aucun doute le domaine judiciaire. Le droit des suspects et des personnes poursuivies, qui ne connaissent pas la langue officielle de la procédure, à être assistées par un interprète est reconnu dans plusieurs textes internationaux comme la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales [3] et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques [4], auxquels s’est ajoutée récemment la Directive n. 64 du Parlement Européen et du Conseil du 20 octobre 2010 [5], relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales. La directive représente la première action de l’Union Européenne en matière de justice au sein des différents États membres qui, dès l’adoption d’une telle mesure législative, sont tenus de la transposer et de la mettre en œuvre. Le gouvernement italien, par l’adoption du décret-loi n. 32 du 4 mars 2014, a officiellement transposé la Directive 2010/64/UE en apportant des modifications au titre IV du code de procédure pénale qui règle l’assistance linguistique aux personnes allophones poursuivies.
4 Après un bref rappel des traits fondamentaux de la Directive 2010/64/UE et des textes de loi italiens qui ont fait suite à la transposition de ladite directive, nous analyserons les caractéristiques de l’interprétation judiciaire en Italie en mettant en exergue les problèmes qui, malgré la transposition récente de la directive européenne, ne manqueront pas d’influencer l’assistance linguistique au sein des procédures pénales italiennes dans les années à venir.
1. LA DIRECTIVE 2010/64/UE ET SA TRANSPOSITION EN ITALIE
5 Ce n’est pas un hasard si l’Union européenne s’est penchée sur le droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales. Bien des travaux dans le domaine de l’interprétation et de la traduction, ainsi que dans le domaine du droit, ont montré en effet, depuis presque vingt ans, que le droit à l’interprétation et à la traduction, au quotidien, n’est pas respecté comme il faudrait. Depuis des projets européens tels que Grotius I et II, AGIS I et II, TRAFUT, BMT, AVIDICUS I, II et III, ImPLI, Qualitas et la fondation d’Eulita, l’Association des traducteurs et interprètes juridiques [6], un cercle vertueux s’est créé entre la Direction Générale Justice de l’Union européenne et les milieux de la recherche, de la formation et des professionnels de l’interprétation et de la traduction. La directive a pour but de préciser certains aspects fondamentaux du droit à l’interprétation et à la traduction et d’harmoniser la mise en œuvre de ce même droit dans les États membres.
6 Nous n’en rappellerons que très brièvement les contenus [7]. Tout en reconnaissant l’unité et l’inséparabilité du droit à l’assistance linguistique (Gialuz, 2014 : 83), la directive n’en distingue pas moins les deux volets représentés par l’interprétation (art. 2) et la traduction (art. 3). Si le but de toute forme d’assistance linguistique est le même (permettre aux personnes allophones poursuivies d’exercer leurs droits de défense et, ce faisant, assurer l’équité du procès), il est indéniable que traduction et interprétation constituent deux opérations interlinguistiques présupposant des compétences différentes (cf. Ballardini, 2012 : 174).
7 L’un des points forts de la directive est certainement la mise au tout premier plan de la qualité de l’interprétation et de la traduction. D’après la directive, cet objectif peut être atteint grâce à la création de « un ou plusieurs registres de traducteurs et d’interprètes indépendants possédant les qualifications requises » (art. 5 par. 2).
8 La mise au point sur l’interprétation et la traduction et, conséquemment, sur les professionnels qui sont censés assurer la communication interlinguistique, s’étend jusqu’à englober le personnel de justice (juges, procureurs, etc.) pour lequel on prévoit une intégration au niveau de sa formation afin qu’il soit sensibilisé aux spécificités de la communication avec interprète dans le but d’atteindre une communication efficace et effective (art. 6) [8].
9 En Italie, le droit à être assisté par un interprète (pour ce qui est du domaine pénal) est inscrit à l’art. 111 de la Constitution et les articles 143-147 du Code de procédure pénale en représentent la continuation naturelle. Nous nous pencherons en particulier sur les dispositions de l’art. 143 qui règle la nomination de l’interprète [9] et a fait l’objet de modifications lors de la transposition de la Directive 2010/64/UE. L’article 143 du c.p.p. se composait de 4 paragraphes dont nous fournissons ci-dessous la version en italien et en français – la traduction est nôtre.
Art. 143. Nomina dell’interprete.
Nomination de l’interprète
1. L’imputato che non conosce la lingua italiana ha diritto di farsi assistere gratuitamente da un interprete al fine di potere comprendere l’accusa contro di lui formulata e di seguire il compimento degli atti cui partecipa. La conoscenza della lingua italiana è presunta fino a prova contraria per chi sia cittadino italiano.
1. L’accusé qui ne connaît pas la langue italienne a le droit de se faire assister gratuitement d’un interprète pour comprendre l’accusation portée contre lui et suivre le déroulement de la procédure à laquelle il participe. La connaissance de la langue italienne est présumée jusqu’à preuve du contraire pour tout citoyen italien.
2. Oltre che nel caso previsto dal comma 1 e dall’articolo 119, l’autorità procedente nomina un interprete quando occorre tradurre uno scritto in lingua straniera o in un dialetto non facilmente intelligibile ovvero quando la persona che vuole o deve fare una dichiarazione non conosce la lingua italiana. La dichiarazione può anche essere fatta per iscritto e in tale caso è inserita nel verbale con la traduzione eseguita dall’interprete.
2. Outre le cas prévu à l’alinéa 1 de l’article 119, l’autorité de poursuite nomme un interprète lorsqu’il est nécessaire de traduire un texte écrit en langue étrangère ou en dialecte difficilement intelligible ou lorsque la personne qui veut ou doit faire une déclaration ne connaît pas la langue italienne. La déclaration peut être rédigée par écrit et, dans ce cas, elle est jointe au procès-verbal avec la traduction faite par l’interprète.
3. L’interprete è nominato anche quando il giudice, il pubblico ministero o l’ufficiale di polizia giudiziaria ha personale conoscenza della lingua o del dialetto da interpretare.
3. L’interprète est nommé même si le juge, le ministère public ou l’officier de police judiciaire connaît la langue ou le dialecte parlé par l’accusé.
4. La prestazione dell’ufficio di interprete è obbligatoria.
4. La prestation de la fonction d’interprète est obligatoire.
11 Le décret-loi n. 32 du 4 mars 2014 modifie le texte de l’art. 143 et l’enrichit de deux paragraphes supplémentaires [10].
1. L’imputato che non conosce la lingua italiana ha diritto di farsi assistere gratuitamente, indipendentemente dall’esito del procedimento, da un interprete al fine di poter comprendere l’accusa contro di lui formulata e di seguire il compimento degli atti e lo svolgimento delle udienze cui partecipa. Ha altresì diritto all’assistenza gratuita di un interprete per le comunicazioni con il difensore prima di rendere un interrogatorio, ovvero al fine di presentare una richiesta o una memoria nel corso del procedimento.
1. […] indépendamment de l’issue de la procédure […]. Il [l’accusé] a également droit de se faire assister d’un interprète pour communiquer avec son avocat avant d’être interrogé ou afin de présenter une requête ou déposer un mémoire au cours de la procédure.
2. Negli stessi casi l’autorità procedente dispone la traduzione scritta, entro un termine congruo tale da consentire l’esercizio dei diritti e della facoltà della difesa, dell’informazione di garanzia, dell’informazione sul diritto di difesa, dei provvedimenti che dispongono misure cautelari personali, dell’avviso di conclusione delle indagini preliminari, dei decreti che dispongono l’udienza preliminare e la citazione a giudizio, delle sentenze e dei decreti penali di condanna.
2. Dans les mêmes cas, l’autorité de poursuite dispose, dans le respect de délais raisonnables permettant l’exercice des droits de défense, la traduction écrite de l’information judiciaire, de l’information sur le droit de défense, des dispositions prévoyant des mesures provisoires personnelles, de l’information de conclusion de l’enquête préliminaire, des décrets disposant l’audience préliminaire et l’assignation à comparaître, des sentences et des décrets pénaux de condamnation.
3. La traduzione gratuita di altri atti o anche solo di parte di essi, ritenuti essenziali per consentire all’imputato di conoscere le accuse a suo carico, può essere disposta dal giudice, anche su richiesta di parte, con atto motivato, impugnabile unitamente alla sentenza.
3. La traduction gratuite de l’ensemble ou d’une partie d’autres documents, considérés comme essentiels pour permettre à l’accusé de connaître les accusations portées contre lui, peut être disposée par le juge, également sur requête du défenseur, par un acte motivé, attaquable ainsi que la sentence.
4. L’accertamento sulla conoscenza della lingua italiana è compiuto dall’autorità giudiziaria. La conoscenza della lingua italiana è presunta fino a prova contraria per chi sia cittadino italiano.
4. L’évaluation de la connaissance de la langue italienne est effectuée par l’autorité de poursuite. La connaissance de la langue italienne est présumée jusqu’à preuve du contraire pour tout citoyen italien.
5. L’interprete e il traduttore sono nominati anche quando il giudice, il pubblico ministero o l’ufficiale di polizia giudiziaria ha personale conoscenza della lingua o del dialetto da interpretare.
5. L’interprète et le traducteur sont nommés même si le juge, le ministère public ou l’officier de police judiciaire connaît la langue ou le dialecte parlé par l’accusé.
6. La nomina del traduttore per gli adempimenti di cui ai commi 2 e 3 è regolata dagli articoli 144 e seguenti del presente titolo. La prestazione dell’ufficio di interprete e di traduttore è obbligatoria.
6. La nomination du traducteur pour les dispositions prévues aux paragraphes 2 et 3 est réglée aux articles 144 et suivants du titre présent. […]
13 Il est facile de remarquer que la figure de l’interprète, qui était prévue également pour les tâches de traduction écrite, s’accompagne de celle du traducteur. La présence des deux figures et la différenciation dont elles sont porteuses entre traduction orale et traduction écrite, efface le caractère flou qui entourait l’interprète (et par conséquent le traducteur) quant à ses connaissances et compétences.
14 Les paragraphes 2 et 3 introduisent une spécification essentielle pour ce qui est du droit de défense de la personne allophone poursuivie : suivant les dispositions prévues à l’art. 3 (Droit à la traduction de documents essentiels) par. 2 de la Directive 2010/64/UE (« Parmi ces documents essentiels figurent toute décision privative de liberté, toutes charges ou tout acte d’accusation, et tout jugement »), le législateur italien identifie les documents susceptibles de limiter la liberté personnelle de l’accusé [11].
15 Outre les changements apportés à l’article 143, le décret-loi n. 32 modifie les dispositions d’actuation du code de procédure pénale et précisément l’art. 67 alinéa 2, où, désormais, à côté de différentes catégories d’experts judiciaires, la catégorie relative à « Interprétariat et traduction » doit obligatoirement apparaître. La question qui se pose est de savoir si l’affichage d’une catégorie professionnelle correspond effectivement à un niveau adéquat de compétences professionnelles de la part des personnes qui y figurent.
16 Ces modifications, toutefois, ne semblent pas résoudre des questions considérées comme problématiques et par les chercheurs en interprétation et par les juristes et dont nous traiterons dans le paragraphe suivant.
2. LES NŒUDS PROBLÉMATIQUES DE L’ASSISTANCE LINGUISTIQUE EN ITALIE
17 Trop peu de temps s’est écoulé depuis l’adoption du décret-loi n. 32, ce qui rend impossible tout jugement sur les effets que ce décret est censé produire en matière d’assistance linguistique dans le domaine judiciaire. Il y a toutefois des aspects de l’interprétation judiciaire qui ne sont pas ou qui sont peu touchés par les modifications évoquées plus haut et qui, d’après nous, continueront de conditionner la communication interlinguistique dans le domaine pénal. C’est sur ces aspects et sur celui de la qualité de l’interprétation, qui est, quant à elle, au cœur de la Directive 2010/64/UE et que le législateur italien a transposé par l’insertion de la rubrique « Interprétariat et traduction » parmi les catégories d’experts judiciaires, que nous nous attarderons.
18 S’agissant de l’assistance linguistique, les points sur lesquels les experts d’interprétation et de droit se sont davantage penchés sont la détermination du degré de connaissance de la langue italienne de la part de la personne poursuivie, le choix de la langue étrangère pour laquelle nommer un interprète et le statut de l’interprète, aspect étroitement lié au niveau de qualité de l’interprétation.
2. 1. La détermination de la connaissance de la langue italienne
19 L’expression “non conosce” (ne connaît pas) peut paraître ambiguë. En fait, par “non conosce”, le législateur entend “ne comprend et ne parle pas la langue de la procédure”. Deux capacités unifiées dans l’expression “ne connaît pas” (Rapport préliminaire au Code, 1988). Aucun moyen objectif n’existe pour déterminer la connaissance et tout particulièrement le degré suffisant de connaissance de la langue italienne permettant à une personne poursuivie allophone de comprendre et de parler la langue de la procédure. Les spécialistes semblent tomber d’accord sur le fait que cette connaissance ne se réfère ni à la compréhension des termes techniques du droit (ce qui serait compliqué aussi pour un italien italophone), ni à la connaissance qui permet à la personne allophone de vivre et de communiquer au quotidien. Ce type de connaissance pourrait en effet se réduire à la maîtrise de la partie de la langue liée aux actions quotidiennes, une sorte de connaissance de « survie », donnant lieu à une communication essentielle. Ces considérations amènent les juristes à considérer que l’interprète doit être nommé chaque fois qu’un doute persiste sur la connaissance suffisante de la langue italienne de la part de la personne poursuivie. Sur ce point la recherche en interprétation s’approprie les perplexités et les conclusions auxquelles aboutissent les experts du droit. Une attention particulière semble toutefois être consacrée aux violations du par. 3 de l’art. 143 (ou, après les modifications apportées, par. 5) qui prévoit que l’interprète soit nommé même si l’autorité judiciaire connaît la langue parlée par la personne allophone (Alimenti Rietti, 1999 : 229). Une recherche récente (Rossini, 2013) a montré que la nomination d’un interprète est loin d’être incluse parmi les actions prioritaires en vue d’une audience. Dans le cas relaté par Rossini (2013), c’est au cours de l’audience, suspendue pendant quelques minutes, que le juge a intimé à l’avocat défenseur de trouver un interprète.
20 L’introduction de « L’évaluation de la connaissance de la langue italienne est accomplie par l’autorité de poursuite » au par. 4 de l’art. 143 c.p.p., représente, sans doute, une nouveauté sur laquelle les juristes vont se pencher à l’avenir, mais il n’empêche qu’aux yeux des chercheurs en interprétation cette formule n’est que l’explicitation d’une pratique consolidée. Ce qu’il reste à déterminer ce sont, encore une fois, les critères – ou, pour paraphraser les mots de la directive, les procédures, voire les mécanismes [12] – sur la base desquels cette évaluation est faite.
2. 2. Le choix de la langue étrangère
21 Le choix de la langue étrangère pour laquelle un interprète est nommé peut parfois s’avérer aléatoire.
22 Dans l’éventail linguistique qui caractérise les sociétés européennes [13], les autorités judiciaires sont de plus en plus confrontées à des langues considérées comme « rares » ou « très rares » telles que l’ourdou, le hindi, le pachto, le farsi… Parfois il est plus simple pour l’autorité judiciaire d’avoir recours à un interprète connaissant une langue véhiculaire connue par la personne poursuivie, solution prônée par la doctrine qui voit dans l’utilisation des langues véhiculaires « traditionnelles », à savoir l’anglais, le français, l’espagnol, l’allemand, la possibilité de repérer des interprètes professionnellement préparés. Mais, d’après nous, la question qui se pose est de savoir si l’utilisation d’une langue véhiculaire assure à la personne poursuivie l’accès à la compréhension de ce qui est dit et si cela lui permet de s’exprimer librement et complètement. Si la connaissance d’une langue véhiculaire correspondait à une connaissance très réduite et/ou limitée à des contextes quotidiens d’activité, la personne allophone se retrouverait alors exactement dans la même situation décrite plus haut concernant la connaissance de la langue italienne. Il est indéniable que si la langue véhiculaire coïncidait avec une langue seconde, c’est-à-dire avec une langue apprise et/ou parlée en milieu naturel ou institutionnel, il serait possible, toute proportion gardée, de considérer la langue véhiculaire en question sur un pied d’égalité avec une langue maternelle. Malheureusement, très souvent, l’urgence de trouver un interprète pour faire avancer la procédure [14] ne permet pas à l’autorité d’approfondir cette question et d’identifier la langue qui permettrait à l’accusé d’exercer au mieux ses droits de défense.
23 Une preuve supplémentaire des difficultés concernant la détermination de la langue étrangère requise a été relevée grâce à l’analyse d’un échantillon de dossiers relatifs à des procédures pénales auprès du Tribunal de Trieste. Il a été surprenant de lire : « lingue del Senegal » (langues du Sénégal), « lingue dell’India » (langues de l’Inde) (Mometti, 2014 : 50). Il est vrai que très probablement il s’agissait du français dans le premier cas et de l’hindi dans le deuxième, mais, si on accepte l’idée que l’assistance linguistique, et par conséquent l’attention à la langue de la personne poursuivie est l’une des garanties du droit de défense, le flou qui caractérise les désignations de langues évoquées ci-dessus constitue l’un des indices qui invitent à réfléchir au respect des droits linguistiques dans le domaine de la justice.
24 La question des langues véhiculaires nous amène à évoquer, bien qu’indirectement, le rapport intrinsèque qui unit langue et culture. Si on assume qu’une langue n’est pas seulement un code mais l’expression d’un substrat culturel donné, alors il est évident qu’il n’y aura pas « un français », « un anglais », mais plutôt autant de « français » et autant d’« anglais » qu’il y a de cultures s’exprimant à travers ces langues. Il devient donc essentiel pour l’interprète de connaître également, en plus de la langue parlée par la personne allophone, la provenance de cette personne. Les autorités judiciaires ignorent, dans la plupart des cas, les enchevêtrements qui existent entre une langue dite véhiculaire et les cultures qui à travers elle s’expriment et la forment. La nécessité de nommer parfois, en Australie, un interprète pour des aborigènes s’exprimant en anglais (Cook in Hale 2006 : 212-214) en est un exemple éclatant. La façon qui a été remarquée chez quelques aborigènes de parler l’anglais trahit un substrat culturel indigène « déguisé » en langue anglaise, d’où le besoin d’interpréter de l’anglais à l’anglais pour permettre à l’autorité judiciaire de bien saisir le sens de ce qui est dit.
2. 3. Le statut de l’interprète
25 Le statut de l’interprète est l’une des questions auxquelles la recherche en interprétation et les juristes ont consacré beaucoup de pages.
26 Certains, en doctrine, ont assimilé l’interprète au « perito » (expert), au témoin ou encore au nuntius (messager). Curtotti Nappi (2002 : 282-283) explique très clairement que si on considère le processus de la transposition interlinguistique en tant que tel, il est facile de constater qu’aucune des figures mentionnées ne peut correspondre à l’interprète. En effet, l’expert contribue à la formation du jugement en apportant ses connaissances personnelles, qui sont le fruit de son expertise ; il apporte des connaissances extérieures aux personnes impliquées dans la procédure. L’interprète, au contraire, est censé reproduire les connaissances exprimées verbalement par les personnes qui participent à la procédure. Le témoin, par son témoignage, influe directement sur l’évolution de la procédure, tandis que l’interprète n’apporte rien de personnel qui puisse avoir une influence sur l’évolution de la procédure. Enfin, l’interprète se distingue du nonce/nuntius puisqu’il s’adonne à une activité intellective de compréhension et de reproposition de ce qui est dit. Il n’en reste pas moins que, dans la pratique quotidienne, l’interprète est inséré dans les listes des experts et que l’autorité judiciaire le considère en tant que tel. Il faut ajouter à cela que les listes de traducteurs/interprètes auprès des tribunaux ne sont qu’un aspect de la réalité des choses. Toute autorité judiciaire essaie de se faciliter la tâche en prédisposant des listes « officieuses » d’interprètes dans lesquelles elle puise [15].
27 Au-delà des assimilations admissibles ou pas entre la figure de l’interprète et celle de l’expert évoquées plus haut, l’interprète représente au sein des experts auxquels a recours l’autorité judiciaire, la seule figure non professionnelle (Ballardini, 2012 : 175). L’inscription dans les listes dressées dans les différents tribunaux n’est, en effet, pas soumise à des critères de sélection prouvant que la personne en question possède les connaissances et les compétences nécessaires pour l’exercice de l’activité d’interprète. Une simple déclaration de la personne qui se propose comme interprète qu’elle connaît l’italien et une langue étrangère est une condition nécessaire et suffisante pour qu’elle soit insérée dans ces listes. Bien évidemment, il y a d’autres critères qui doivent être respectés, comme par exemple le permis de séjour ou de résidence, etc. (Falbo, 2013 : 88-90). Ce sont des critères qui, toutefois, ne prouvent pas la capacité d’assurer un service d’interprétation. D’ailleurs, encore une fois, ces constats ont trouvé une confirmation supplémentaire dans les données recueillies lors du projet mené à Trieste : que ce soit la police, les juges ou le procureur, tout le monde s’accorde sur le fait que les personnes exerçant les fonctions d’interprètes sont des « connaisseurs de langues étrangères ». Cela implique que – exception faite pour les personnes ayant des années d’expérience dans le domaine juridique/judiciaire et/ou une formation en interprétation/traduction et parfois en droit – la plupart des interprètes nommés par l’autorité judiciaire n’ont aucune formation, ni même aucune expérience, en la matière.
2. 4. La qualité de l’interprétation
28 Le manque de professionnalisme, aux dires de plusieurs auteurs (par exemple Ballardini, 2012 ; Garwood, 2012 ; Garwood & Preziosi, 2013 ; Gialuz, 2014), se traduit dans l’absence de qualité qui semble caractériser de façon endémique l’interprétation judiciaire en Italie. Des exemples très parlants ont été décrits par Garwood (2012) et les recherches menées, entre autres, à Trieste et à Brescia ont confirmé qu’aucun contrôle n’est fait sur la qualité de l’interprétation (et de la traduction). Ce contrôle inexistant est, à son tour, la conséquence directe de l’inconscience qui règne en matière de langues, d’interprétation, de traduction, bref de communication interlinguistique. En insistant sur la qualité de l’interprétation et de la traduction [16], la Directive 2010/64/UE semble affirmer de façon incontestable que seule la qualité de l’activité interprétative et traductive peut assurer l’équité de la procédure et le respect des droits de défense. Par conséquent, la seule présence de l’interprète n’est pas une garantie suffisante pour assurer le respect des droits des personnes allophones poursuivies.
29 La transposition de la directive effectuée par l’Italie ne semble pas régler ce point crucial de l’assistance linguistique. Si, comme nous l’avons vu, parmi les listes obligatoires des experts judiciaires auprès des tribunaux celle qui concerne « Interprétariat et traduction » doit impérativement apparaître, rien n’est dit sur les critères à suivre pour l’inscription des interprètes et traducteurs sur ces listes. Ce silence pèse lourd sur le maillon essentiel de l’assistance linguistique à savoir la professionnalisation des interprètes et des traducteurs. Seuls une formation adéquate et un système d’accréditation répondant aux standards de qualité universellement reconnus peuvent assurer le respect des droits des personnes allophones poursuivies et de l’équité du procès.
EN GUISE DE CONCLUSION
30 Dans le panorama inquiétant de l’assistance linguistique en Italie, Gialuz (2014 : 88) n’hésite pas à qualifier la transposition de la Directive 2010/64/ UE d’« occasion ratée ». Et l’aspect le plus décevant concerne la qualité de l’interprétation et de la traduction. Le jugement de Gialuz (2014 : 89-90) est sévère et sans appel :
Sul versante della professionalizzazione dell’esperto linguistico, il legislatore delegato se l’è cavata con una soluzione “burocratica” : si è sgravato la coscienza con la previsione che gli esperti in “interpretariato e traduzione” vengano inseriti nell’albo dei periti istituito presso ogni tribunale. […] In realtà, a ben considerare, rischia di essere un cambiamento più formale che sostanziale.
32 Il est décevant que toute décision ait été renvoyée à l’autorité judiciaire locale et aux femmes et hommes de bonne volonté. La possibilité s’offrait à l’Italie de saisir l’occasion de la transposition de la Directive 2010/64/UE pour reconnaître un droit de cité à la qualité de l’assistance linguistique, pour se conformer aux bonnes pratiques mises en œuvre dans d’autres pays européens et élever de cette manière le niveau de démocratie au sein de la société italienne (Viezzi, 2014).
Références bibliographiques
- ALIMENTI RIETTI, A. C. 1999. « Il traduttore di tribunale », dans La traduzione. Saggi e documenti (IV), Quaderni di Libri e riviste d’Italia, 43, Roma : Istituto Poligrafico e Zecca dello Stato : 223-248.
- BALLARDINI, E. 2012. Traduire devant la justice pénale. L’interprète traducteur dans les codes de procédure pénale italiens aux XIXe et XXe siècles. Bologna : Bononia University Press.
- BALLARDINI, E. 2014. « L’interprete traduttore nel procedimento penale italiano : quale formazione alla luce delle recenti direttive europee ? », dans C. Falbo, M. Viezzi (éds), Traduzione e interpretazione per la società e le istituzioni. Trieste : Eut, p. 59-72, http://www.openstarts.units.it/dspace/bitstream/10077/9837/1/5_Ballardini.pdf.
- BLINI, L. 2008. « Mediazione linguistica : riflessioni su una denominazione ». Rivista Internazionale di Tecnica della Traduzione, 10, p. 123-138.
- CURTOTTI NAPPI, D. 2002. Il problema delle lingue nel processo penale. Milano : Giuffré.
- FALBO, C. 2013a. « Interprete et mediatore linguistico-culturale : deux figures professionnelles opposées ? », dans G. Agresti, C. Schiavone (éds), Plurilinguisme et monde du travail. Professions, opérateurs et acteurs de la diversité linguistique. Actes des Cinquièmes Journées des Droits Linguistiques. Roma : Aracne : 257-274.
- FALBO, C. 2013b. La comunicazione interlinguistica in ambito giuridico. Trieste : Eut, http://www.openstarts.units.it/dspace/bitstream/10077/9306/1/Falbo_comunicazione _interlinguistica_giur.pdf.
- FALBO, C. 2014. « I risultati emersi dal progetto FRA 2011. Bisogni e bisogni formativi nella comunicazione interlinguistica con i servizi di polizia e nei procedimenti penali », dans C. Falbo, M. Viezzi (éds), Traduzione e interpretazione per la società e le istituzioni. Trieste : Eut, p. 19-39, http://www.openstarts.units.it/dspace/bitstream/10077/9835/1/3_Falbo.pdf.
- GARWOOD, C. 2012. « Court Interpreting in Italy. The daily violation of a fundamental human right », The Interpreters’Newsletter, 17, p. 173-189.
- GARWOOD, C., PREZIOSI, I. 2013. « Un modello per un interpretariato giudiziario efficiente e di qualità in Italia : un approccio realistico all’applicazione della Direttiva 2010/64/UE », dans M. Rudvin, C. Spinzi (éds), Mediazione linguistica e interpretariato. Regolamentazione, problematiche presenti e prospettive future in ambito giuridico. Bologna : Clueb, p. 79-121.
- GIALUZ, M. 2012a. « L’obbligo di interpretazione conforme alla direttiva sul diritto all’assistenza linguistica », Diritto penale e processo, 4, p. 434-440.
- GIALUZ, M. 2012b. « Il diritto all’assistenza linguistica nel processo penale. Direttive europee e ritardi italiani », Rivista di Diritto Processuale, LXVII/5, p. 1193-1206.
- GIALUZ, M. 2013a. « La Corte di cassazione riconosce l’obbligo di tradurre la sentenza a favore dell’imputato alloglotto », Cassazione penale, p. 2188-2194.
- GIALUZ, M. 2013b. « La lingua come diritto : il diritto all’interpretazione e alla traduzione nel processo penale », dans F. Ruggieri, T. Rafaraci, G. Di Paolo, S. Marcolini, R. Belfiore (éds), Processo penale, lingua e Unione europea, Padova : Cedam, p. 227-245.
- GIALUZ, M. 2014. « L’assistenza linguistica nella prassi giudiziaria e la difficile attuazione della Direttiva 2010/64/UE », dans C. Falbo, M. Viezzi (éds), Traduzione e interpretazione per la società e le istituzioni. Trieste : Eut, p. 83-95, www.openstarts.units.it/dspace/bitstream/10077/9839/1/7_Gialuz.pdf.
- HALE, S. B. 2006. « Themes and methodological issues in court interpreting research », dans E. Hertog, B. van der Veer (éds), Taking Stock : Research and Methodology in Community Interpreting, Linguistica Antverpiensia 5, p. 205- 228.
- MOMETTI, F. 2014. « Il diritto all’assistenza linguistica dell’imputato straniero nel procedimento penale. Indagine conoscitiva presso il tribunale di Trieste », dans C. Falbo, M. Viezzi (éds), Traduzione e interpretazione per la società e le istituzioni. Trieste : Eut, p. 41-57, http://www.openstarts.units.it/dspace/bitstream/10077/9836/1/4_Mometti.pdf.
- ROSSINI, S. 2013. Indagine conoscitiva sull’assistenza linguistica presso la Questura e il Tribunale di Brescia. Mémoire de thèse non publié. Trieste : IUSLIT, Université de Trieste.
- VIEZZI, M. 2014. « Multilinguismo, interpretazione, democrazia », dans C. Falbo, M. Viezzi (éds), Traduzione e interpretazione per la società e le istituzioni. Trieste : Eut, p. 9-18, http://www.openstarts.units.it/dspace/bitstream/10077/9834/1/2_Viezzi.pdf.
Notes
-
[1]
Depuis la Déclaration universelle des droits de l’Homme (1948), nombreux sont les textes qui ont été adoptés par différentes organisations internationales et qui affirment le droit de tout individu à ne pas être discriminé sur la base de son appartenance ethnique, de sa langue, de sa religion etc. Voir par exemple la Directive 2000/43/CE relative à l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique (http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1399470361626&uri=CELEX:32000L0043) ou la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne de décembre 2000 qui a été modifiée et publiée au mois de mars 2010 (http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2010:083:0389:0403:fr:PDF).
-
[2]
Pour un approfondissement des liens entre les notions de médiation, interprétation et traduction nous renvoyons à Falbo (2013a et 2013b : 28-44).
-
[3]
Établie par le Conseil de l’Europe, la convention a été signée à Rome en 1950 et ratifiée par l’Italie en 1955.
-
[4]
Élaboré au sein de l’ONU, le pacte a été signé à New York en 1966 et ratifié par l’Italie en 1977.
-
[5]
Texte consultable à l’adresse : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32010L0064&rid=1.
-
[6]
Sur le site d’EULITA (http://www.eulita.eu/fr) il est possible de consulter les rapports finaux des projets mentionnés.
-
[7]
Pour une vision complète des aspects spécifiquement juridiques, nous renvoyons à Gialuz (2012b, 2013b, 2014).
-
[8]
« Sans préjudice de l’indépendance de la justice ni de la diversité dans l’organisation des ordres judiciaires dans l’Union, les États membres demandent aux personnes chargées de la formation des juges, des procureurs et du personnel de justice intervenant dans les procédures pénales d’accorder une attention particulière aux spécificités de la communication avec l’assistance d’un interprète, afin d’assurer une communication efficace et effective ».
-
[9]
Par souci de complétude, nous précisons que les articles 144-147 traitent respectivement de l’incapacité et de l’incompatibilité relatives à l’exercice de la fonction d’interprète, de la récusation et de l’abstention de l’interprète, des modalités qui président à l’attribution de la fonction d’interprète et les délais pour la traduction écrite de documents ainsi que les conditions pour la substitution, voire la condamnation de l’interprète qui ne respecte pas les délais fixés par le juge (pour un approfondissement des dispositions relatives aux articles cités cf. Ballardini, 2012 : 129-137).
-
[10]
Nous signalons en gras les ajouts et les modifications apportées au texte précédent.
-
[11]
Pour un approfondissement en la matière, nous renvoyons à Gialuz (2013a, 2013b) ainsi qu’au travail de recherche mené par Mometti (2013) dans le cadre du projet Bisogni e bisogni formativi nella comunicazione interlinguistica con i servizi di polizia e nei procedimenti penali, Université de Trieste (Falbo & Viezzi, 2014).
-
[12]
Art. 2 par. 4 Dir. 2010/64/UE : « Les États membres veillent à la mise en place d’une procédure ou d’un mécanisme permettant de vérifier si les suspects ou les personnes poursuivies parlent et comprennent la langue de la procédure pénale et s’ils ont besoin de l’assistance d’un interprète ».
-
[13]
SIGTIPS (Special Interest Group on Translation and Interpreting for Public Services) (2011) Final Report, DG Interprétation, Union Européenne, http://ec.europa.eu/dgs/scic/docs/sigtips_en_final_2011.pdf.
-
[14]
Parfois les délais sont impartis par la loi, comme par exemple les 48 heures que le juge de l’enquête préliminaire a à sa disposition pour confirmer ou invalider l’arrêt d’une personne.
-
[15]
S’agissant de la nomination de l’interprète, l’autorité judiciaire n’est pas tenue de se servir des listes officielles présentes auprès du tribunal. Par contre, pour tout autre expert judiciaire, l’autorité judiciaire doit avant tout consulter les listes de référence et, si aucun des experts y figurant ne correspond aux besoins de la situation donnée, l’autorité peut nommer un expert « extérieur » (art. 221 c.p.p.).
-
[16]
La qualité de l’assistance linguistique est prévue aux articles 2 et 3 de la Directive 2010/64/ UE : Art. 2 par. 8, « L’interprétation prévue par le présent article est d’une qualité suffisante pour garantir le caractère équitable de la procédure, notamment en veillant à ce que les suspects ou les personnes poursuivies aient connaissance des faits qui leur sont reprochés et soient en mesure d’exercer leurs droits de défense ». Art. 3 par. 9, « La traduction prévue par le présent article est d’une qualité suffisante pour garantir le caractère équitable de la procédure, notamment en veillant à ce que les suspects ou les personnes poursuivies aient connaissance des faits qui leur sont reprochés et soient en mesure d’exercer leurs droits de défense ».