Notes
-
[1]
L’équipe de chercheurs, tous professeurs de langue étrangère ou de didactique des langues, était constituée aussi par Margarita Blanco Hölscher (allemand), Bernardo Pérez Fáñez (italien), Isabel Iglesias Casal (espagnol langue étrangère), Gloria López Téllez (didactique de l’anglais), Miguel Ángel López Vázquez (français) et Juan Angel Martínez García (français).
-
[2]
Pour le traitement quantitatif des données de l’enquête nous avons utilisé le programme d’analyse SPSS ; pour faciliter l’analyse qualitative des informations obtenues des entretiens et des journaux croisés nous avons fait appel au programme Atlas-ti.
-
[3]
Mais nous avons montré que l’un des objectifs de cet instrument est aussi de brouiller les rôles : étudiants et professeurs deviennent en même temps des informateurs et des chercheurs. En effet, le journal instaure un dialogue entre égaux. Le professeur prend l’initiative de rédiger les premières pages (sans limitation quantitative ni thématique), en réaction aux réponses données par l’étudiant au questionnaire. À partir de ce moment il se sent engagé, autant que l’étudiant, dans le jeu des échanges (une fois par mois de part et d’autre pendant quatre mois) de représentations qu’il vient d’instaurer. L’étudiant, à son tour, est autorisé à prendre les initiatives qu’il considère nécessaires afin de connaître et comprendre en profondeur les représentations du professeur ou les faits culturels observés depuis son arrivé dans la région.
-
[4]
Voici les énoncés des vingt questions : 1 et 2 : Quels sont les 5 problèmes les plus graves de votre pays/de l’Espagne ? ; 3 et 4 : Signalez 5 caractéristiques de la manière d’être de vos concitoyens/des Espagnols, tel que vous le voyez ; 5 et 6 : Signalez 5 réalités, objets, aspects (matériels ou no) que vous estimez représentatifs de votre culture/de la culture espagnole ; 7 et 8 : Indiquez les 5 monuments les plus représentatifs de votre pays/de l’Espagne ; 9 et 10 : Indiquez le nom des 5 personnalités les plus représentatives de toute l’histoire de votre pays/de l’Espagne ? ; 11 et 12 : Votre langue/la langue espagnole vous semble…… (indiquez trois caractéristiques) ; 13 et 14 : Quand vous entendez le nom de votre pays/de l’Espagne quels sont les images, les mots, les idées qui vous viennent à l’esprit ? ; 15 et 16 : Quelles sont les traditions les plus remarquables de votre culture/de la culture espagnole ? ; 17 : La connaissance que vous avez acquise jusqu’à présent de la langue et culture espagnoles a-t-elle eu une influence sur votre manière d’être, vos comportements, votre vision du monde, etc. ? ; 18 : Pensez-vous que la manière d’être, le comportement, l’apparence externe enfin des Espagnols sont différents de ceux de vos concitoyens ? ; 19 et 20 : Quels aspects culturels de la vie espagnole croyez-vous qui peuvent faciliter/perturber votre intégration ? Pourquoi le pensez-vous ?
-
[5]
C’est pourquoi nous avons combattu la mauvaise renommée des stéréotypes, dans la mesure où nous les jugeons non seulement inévitables, mais aussi nécessaires (espace de passage vers une plus grande complexité des représentations) et même utiles, dans la mesure où c’est grâce à cette « richesse » apportée par les étudiants que l’on pourra mettre en place des activités pour les amener à rendre ses représentations plus proches de la complexité de la réalité.
-
[6]
Voir, par exemple, Byram, Essarte-Sarries et Taylor (1991), Cain et Briane (1994), Atienza (1996) et Oliveras (2000), ou, dans tous les cas, pratiquement les mêmes termes apparaissent en tête de liste.
-
[7]
Rappelons le : sept étudiants ont participé dans les entretiens et sept autres dans les journaux croisés.
1Les attitudes à l’égard des objets (matériels ou spirituels) du monde sont directement débitrices des représentations qu’on a de ces réalités (à moins que ce ne soit pas le contraire, si les attitudes se fondent dans l’inconscient des personnes, mais nous n’aborderons pas le sujet de ce point de vue cette fois-ci). Comprendre les premières exige donc qu’on essaie d’appréhender par la connaissance les secondes. C’est pourquoi, nous croyons utile, dans le cadre de ce numéro des ÉLA qui se penche sur les attitudes à l’égard des langues, de rendre compte d’une recherche sur les représentations linguistiques et culturelles d’étudiants étrangers de l’université d’Oviedo (Espagne). Réalisée entre octobre 2001 et juin 2004, le long rapport final a fait l’objet d’une publication (Atienza, 2005 [1] ) dont nous présenterons ici quelques-uns de ses éléments.
1. LE CADRE THÉORIQUE ET LES INSTRUMENTS
1.1. Un paradigme de recherche constructiviste et biographique
2C’est seulement à partir d’une position ontologique relativiste qu’on peut avoir intérêt à s’intéresser aux représentations des sujets. En effet, si l’étude de celles-ci – et de leur évolution chez les personnes – a un sens c’est parce que l’on se place – contre les positivistes et les néopositivistes – dans cette position qui considère que les connaissances, loin d’avoir d’existence en dehors des sujets et des contextes, sont en bonne mesure le résultat de l’activité cognitive et affective des premiers dans le cadre des seconds, c’est-à-dire, elles sont des constructions sociales et expérientielles singulières, des essais renouvelés et changeants pour donner du sens et de la cohérence au vécu. Les représentations culturelles et linguistiques sont donc relatives aux sujets et aux contextes.
3Il n’y a donc point de connaissance objective mais subjective et interactive, c’est-à-dire, résultante de processus interactifs, c’est pourquoi ce sont ces derniers qu’on doit chercher à saisir plutôt que les connaissances elles-mêmes. Dans le cas concret de ce travail, les processus de construction des représentations linguistiques et culturelles nous importent plus que les représentations concrètes, même si enquêter sur celles-ci, les repérer, montrer dans quelle mesure elles varient d’un à un autre sujet ou d’un groupe d’une communauté à celui d’une autre, est une tâche nécessaire et préalable à l’identification et la description des processus eux-mêmes. De là la nécessité de projeter et d’utiliser des instruments variés pour la récolte de données et d’une pluralité de niveaux d’analyse de celles-ci.
4Ces instruments et niveaux d’analyse sont au service d’une méthodologie herméneutique et dialectique, c’est-à-dire, une méthodologie interprétative fondée sur la comparaison et le contraste de constructions divergentes qui rendent possible une reconstruction des processus sociaux en tant que synthèse de ces divergences, y comprises celles des chercheurs eux-mêmes.
5Tel que nous venons de le caractériser, dans ses aspects ontologique, épistémologique et méthodologique, le paradigme de recherche dans lequel s’inscrit notre étude prend habituellement le nom de constructiviste, pour le distinguer aussi bien du paradigme positiviste ou néopositiviste que du critique ou sociocritique (Rincón et autres, 1995 ; Bolivar, Domingo et Fernández 2001). Dans le domaine méthodologique, que nous avons intérêt à souligner, l’objectif du constructivisme est d’arriver à comprendre la manière dont les sujets éprouvent les significations intersubjectives – de sa propre culture ou d’une autre – et comment ils s’arrangent pour les interpréter et les reconstruire. Partant du principe de l’activité du sujet, l’objectif à terme des chercheurs est de se rapprocher le plus possible des processus internes des sujets pour les comprendre de l’intérieur.
6Mais notre travail peut aussi être considéré un exemple, un peu particulier, il est vrai, de recherche ethnographique et plus précisément biographique et narrative. De manière encore plus fine, nous pouvons dire que nous avons utilisé l’une des démarches de cette modalité de recherche : les récits de vie croisés (Bolivar, Domingo et Fernández, 2001). En effet, l’essentiel de notre travail a consisté à croiser des récits de vie, en utilisant des procédés pluriels. Il s’agit, c’est vrai, de récits de vie partiels et sur une réalité très précise, les représentations culturelles et leurs modalités de construction, mais des récits de vie en fin de compte, y compris en ce qui concerne l’instrument le plus éloigné en apparence du récit, le questionnaire. Une analyse des questions posées et des réponses données permet en effet de percevoir que chaque informateur réalise un récit télégraphique et entrecoupé d’aspects de sa biographie se référant à la manière dont il conçoit certains aspects de son pays d’origine et du pays d’accueil, leurs langues respectives, leurs personnalités les plus représentatives, etc. La somme des réponses – surtout si l’on tient compte du texte complet de celles-ci et non seulement du terme seul résultant de leur réduction à des catégories – dessine un profil humain propre à chaque informateur. Mais ce caractère biographique devient beaucoup plus évident dans le cas des deux autres instruments utilisés, les entretiens et, surtout, les journaux croisés.
1.2. Instruments de recueil des données et public informateur
7Comme nous l’avons fait entendre à plusieurs reprises, nous avons utilisé trois instruments pour la collecte des informations :
- Un questionnaire ouvert à large spectre organisé en deux parties : la première comprenait 17 questions et l’objectif était de dessiner un profil de l’informateur (origine nationale, âge, sexe, langue maternelle, formation académique, niveau de langue espagnole et, le cas échéant, des autres langues parlées, séjours préalables en Espagne, voyages dans d’autres pays) ; la deuxième, composée de 20 questions, visait à connaître les représentations culturelles des informateurs concernant leurs pays d’origine et l’Espagne. Les réponses aux questionnaires ont été obtenues en octobre 2001 pendant l’une des séances, d’une heure de durée, des cours d’espagnol que l’université d’Oviedo organise chaque année à l’adresse de ses étudiants d’origine étrangère. Ceux-ci avaient le choix de lire le questionnaire et d’y répondre en l’une de ces cinq langues : espagnol, italien, français, anglais et allemand.
- Des entretiens semi-directifs maintenus avec sept informateurs, choisis parmi ceux dont les réponses au questionnaire avaient été, de l’avis des chercheurs, les plus riches et qui, par cela, laissaient espérer la même richesse dans les entretiens. Ce critère se croisait avec un autre : il fallait assurer l’éventail de nationalités le plus large possible.
- Des journaux croisés élaborés par sept couples constitués par un étudiant (choisi dans chaque cas selon les mêmes critères ci-dessus indiqués pour les entretiens) et un chercheur [2].
8Le questionnaire a été répondu par 168 étudiants dont voici la distribution par nationalités : 45 Nord-Américains, 36 Allemands, 27 Italiens, 18 Anglais, 12 Français, 8 Irlandais, 6 Chinois, 2 Belges, 2 Grecques, 2 Roumains, 2 Portugais et 1 de chacune de ces origines : Brésilienne, Danoise, Estonienne, Japonaise, Polonaise, Suédoise, Suisse et Ukrainienne. Nous n’avons cherché, on le voit, à satisfaire représentativité aucune ou à respecter un quelconque équilibre entre les différentes nationalités. Notre seule préoccupation a été de toucher le plus grand nombre d’étudiants et la plus grande diversité de nationalités. C’est la richesse et non la représentativité des témoignages qui nous intéressait autant que de découvrir des lignes de force identifiables. Dans les entretiens, ont participé un suédois, une Française, un Anglais, une Irlandaise, une Roumaine et une Allemande ; et dans les journaux croisés, un Irlandais, une Anglaise, une Suisse, une Roumaine, une Allemande et un Italien. Le point de départ du travail avec ces deux instruments a été le même : les réponses aux questionnaires des étudiants concernés dans chaque cas. Il s’agissait de leur faire préciser, approfondir, nuancer, justifier, mettre en contexte, etc. les informations qu’ils y avaient données. Si pour le cas des entretiens la manière de faire peut très bien être imaginée, il nous semble nécessaire de proposer quelques précisions au sujet des journaux croisés. L’utilisation de cet instrument constitue l’un des aspects les plus originaux de notre recherche. On espérait par son intermédiaire – et les résultats obtenus montrent le bien fondé de cet espoir – rendre compte des conceptions des informateurs sur les modalités de construction des représentations et des microprocessus ayant lieu dans l’évolution de celles-ci tout le long de la durée de la recherche. S’il est vrai que le journal est un instrument habituellement utilisé dans le domaine de la recherche qualitative (voir, par exemple, les journaux ou carnets de bord des anthropologues ou des professeurs), l’utilisation que nous en avons faite est nouvelle. Nous avons conçu ces journaux comme instrument de dialogue entre deux processus de réflexion croisés : ceux constitués par les réflexions de l’étudiant et celles du chercheur de chacun des sept couples. Notre hypothèse, largement confirmée, était que, dans le journal, les étudiants-informateurs et les professeurs-chercheurs [3] non seulement rendraient compte de leurs expériences, croyances, attitudes et pensées concernant leur propre culture et celle de leur interlocuteur mais ils seraient aussi amenés à les réajuster, les enrichir, les relativiser, les transformer, etc., ainsi qu’à prendre conscience, grâce au dialogue spéculaire avec l’autre, du caractère de construction culturelle de ces représentations et, donc, de leurs évolutions possibles, et des modalités d’une telle construction et évolution. Et ceci parce que chacun des deux auteurs de chacun des sept journaux a eu l’opportunité de demander à l’autre de préciser, commenter, développer ou avancer des exemples d’aspects qui auraient pu rester obscurs ou imprécis où à propos desquels il aurait souhaité avoir des informations complémentaires et, en ce faisant, il a aussi eu l’opportunité de mettre en cause ses représentations préalables.
2. QUELQUES RÉSULTATS
9Nous ne pouvons ici que proposer un survol d’une partie des résultats de la recherche en forme de conclusions générales, illustrées quand il le faudra, par des exemples.
2.1. Le questionnaire
10a) Les résultats du questionnaire ne sont pas, sauf des exceptions significatives, pour surprendre. En général, ils confirment ce que des connaisseurs du milieu d’origine des informateurs auraient pu attendre.
11b) Il y a, pourtant, beaucoup d’informations nouvelles, étant donné le large éventail de pays représentés et la connaissance très limitée que l’équipe de chercheurs avait de ceux-ci. La leçon la plus évidente est que notre vision du monde environnant est très ethnocentrique et étroite et qu’elle ne s’entrouvre qu’à la culture des pays les plus légitimés et légitimateurs, tels que les États-Unis, et les nations européens les plus puissantes. Les chercheurs se sont rendus compte qu’ils ne connaissaient rien des cultures roumaine, irlandaise, polonaise, danoise, suédoise, etc.
12c) L’analyse des représentations qu’ont les sujets étrangers de leurs pays respectifs permet d’établir ce constat : un parallélisme existe entre ces représentations et la manière dont ces nations se sont historiquement construites, créant au passage leurs mythes, valeurs et principes. L’on pourrait énoncer l’hypothèse suivante : les représentations que les sujets d’une communauté nationale donnée ont aujourd’hui de leur pays, ne sont pas seulement les traces des événements historiques qui ont marqué ces nations mais elles sont aussi un bon instrument pour les donner à connaître aux étrangers, dans la mesure où ces représentations permettent de remonter cette histoire. Et cela pas seulement en ce qui concerne les événements eux-mêmes (les gestes, les personnages, les produits architecturaux, artistiques, juridiques, etc.), mais aussi la manière dont ces événements se sont intégrés dans l’imaginaire collectif, les mécanismes cognitifs et affectifs qui font que ces phénomènes construisent des liens entre les sujets et les font solidairement responsables d’en témoigner et de les transmettre aux générations futures.
13Prenons deux exemples : d’abord celui des questions [4] 7 et 8, après celui des questions 9 et 10, concernant respectivement les monuments et les personnalités les plus représentatifs de chaque pays et de l’Espagne.
14Le nombre total de monuments architectoniques ou naturels cités, l’Espagne exceptée, a été de 260. Ils constituent sans doute une partie importante du patrimoine culturel de l’humanité, vu qu’ils ont été choisis par des sujets de 19 pays pour représenter ces derniers. La lecture du tableau ci-dessus, qui réunit les cinq premiers résultats pour les cinq pays ayant le nombre d’étudiants le plus important dans notre échantillon, permet de proposer certaines conclusions :
- En général, l’on préfère les monuments civils aux religieux, les deux extrêmes de cette préférence étant les USA – qui ne comprend aucun des derniers – et l’Italie – qui inverse la donne : quatre sur cinq sont religieux.
- On repère trois manières de se référer aux monuments représentatifs : l’un, plus centralisé – où tous les monuments cités se concentrent dans la capitale de la nation –, correspond au Royaume-Uni et à la France, pays pionniers dans la construction d’une démocratie fortement organisée autour d’un centre de décision, même si le premier a été capable de concilier cela avec la valorisation des nationalités qui l’intègrent ; un autre, plus dispersé, qui correspondrait aux EE.UU, dont la cohésion forte se fonde sur une reconnaissance des différences qui ont été à l’origine du pays et sur le poids fort des symboles du pouvoir politique et militaire ainsi que des valeurs de la liberté et la tradition récente ; le troisième, plus dispersé, qui correspond à l’Italie, pays qui est le résultat d’une agrégation de pouvoirs régionaux relativement récente et dont les ressortissants semblent ne pas pouvoir rencontrer un symbole civil les réunissant que dans le passé lointain : le Colisée. L’Allemagne serait un cas particulier, marquée comme elle l’est par des événements plus au moins contemporains : le fascisme, la deuxième guerre mondiale et ses conséquences et la réunification récente se lisent dans les choix faits.
15Voici maintenant quelques observations concernant la liste des monuments espagnols :
- Toutes les périodes et pratiquement tous les styles architecturaux sont ici représentés : nous avons d’abord – avec l’Alhambra (et la Mosquée de Cordoue qui vient peu après, en septième position) – une référence à la culture arabo-andalouse ; vient ensuite la modernité imaginative, la Sainte Famille (à laquelle il faut ajouter la sixième place occupée par le Parque Güell et, plus loin, d’autres références aux travaux de Gaudí, telles que « la Pedrera » ou les « immeubles Gaudí ») ; on cite après deux des musées les plus importants de l’Espagne l’un classique, Le Prado, l’autre futuriste, le Guggenheim, cité peut être en tant que contenant plus que par rapport aux œuvres qu’il contient ; enfin, la dernière de la liste est la Cathédrale de Saint Jacques qui rassemble les styles roman et baroque, en même temps que, par les pèlerinages, l’histoire passée et présente de l’Espagne et de l’Europe.
- Les choix faits soulignent la richesse architectonique de l’Espagne, que les informateurs ont soin de remarquer à plusieurs reprises et de manières diverses dans leurs réponses au questionnaire. Dans cette même question, certains répondent par des généralisations telles que « les cathédrales », « les châteaux », « les grandes places des villes », etc.
- Les cinq monuments cités sont placés chacun dans des villes différentes, lesquelles se situent dans les quatre coins de l’Espagne : Andalousie, Catalogne, Pays Basque, Galice et Madrid. On ne peut que s’étonner de constater que cette dispersion est un reflet parfait de la tendance espagnole à la décentralisation et du poids chez nous des périphéries. Au contraire de ce qui semble se passer dans les autres pays référenciés dans le tableau ci-dessus, la capitale de l’Espagne manquerait, aux yeux des étrangers, de monument où l’imaginaire collectif pourrait se satisfaire (le premier monument de Madrid cité ne vient qu’en huitième place, si nous excluons le Prado qui témoigne plutôt de notre richesse picturale).
16La liste de personnalités parle elle aussi de la personnalité des peuples. Les étudiants venant des EEUU citent surtout des présidents, ces « pères de la patrie » qui les ont guidés et soutenus dans de moments difficiles dont, comme la plupart de leurs compatriotes, ils se sentent fiers : outre Washington, Kennedy et Bush, présents dans la liste, Lincoln occupe la sixième place, et, un peu plus loin, viennent les noms de Jefferson et Roosevelt. La présence de M.L. King en première position s’explique sans doute aussi par le rôle de référence morale qu’il a joué. Aucun créateur dans la liste, pourtant, contre ce qui se passe dans tous les autres cas. Pour ne parler que des français – mais de choses semblables pourraient être dites des autres pays –, si, d’une part, la position est semblable à la précédente (à côté de Chirac sont convoqués Napoléon et De Gaulle qui ont représenté l’orgueil national en deux moments bien différents, l’un d’expansion, l’autre de repli), de l’autre, ils marquent aussi leur fierté par leur puissance créative et rebelle, que l’acteur Depardieu et le corrosif Coluche représentent parfaitement. Les étudiants étrangers de l’Université d’Oviedo font de l’Espagne aussi un pays d’hommes d’état et de culture.
17d) La double fonction des représentations que nous avons souligné ci-des-sus (elles témoignent du passé et le transmettent et en même temps permettent de le reconstruire) semble se vérifier quel que soit le nombre des sujets interrogés (par exemple, 8 pour l’Irlande ou 45 pour les EEUU). Nous avançons cela avec la plus grande prudence, mais les résultats semblent avaliser cette hypothèse.
18e) Cela ne veut pas dire qu’un seul système représentationnel existe pour chaque pays. Notre recherche montre le contraire, mais il semble bien qu’un système dominant s’impose. Or, à côté de celui-ci d’autres s’affirment marginalement mais non sans éclat. Ces modèles minoritaires ont des origines différentes : ils peuvent se fonder sur l’appartenance de l’informateur à un collectif idéologique, social, confessionnel, etc., ou sur des expériences singulières et plus ou moins exceptionnelles.
19Ainsi ce jeune de 23 ans, originaire du Royaume-Uni, qui, après s’être identifié comme écossais, propose seulement des personnalités de cette nationalité dans sa réponse. Mais comme il sait bien qu’elles risquent d’être méconnues par des étrangers il prend soin de préciser leur domaine professionnel : « Billy Connelly, musicien et acteur renommé ; James Hogg, littérature, C.R. Mackintosh, beaux arts ; David Hume, philosophie ; Adam Smith, politique ». Ce même étudiant répondra à la question 13 (Quand vous entendez ou lisez le nom de votre pays, quels sont les mots, images ou idées qui vous viennent à l’esprit ?) de cette manière : « Angleterre, car tant que nous ne pouvons pas être écossais, notre identité se fonde sur ce que nous ne sommes pas ; Kilt (la jupe écossaise) ; Whisky ; Pubs ; Highlands and islands ». Un exemple saisissant de la pluralité des représentations est offert par ce petit éventail de réponses données par des étudiants nord-américains à cette même question 13 :
- Diversité : le territoire, les gens, les croyances varient beaucoup.
- Manque d’histoire : nous sommes un très jeune pays. Nos croyances et nos coutumes ne sont pas très enracinées et nous n’avons pas d’anciens monuments.
- Excès : les Américains travaillent jusqu’à la mort pour avoir assez d’argent pour des choses artificielles et matérielles.
- Foyer : excursionnisme, la beauté des montagnes, des lacs… L’Amérique est tellement belle et tellement intéressante à explorer !
- Opportunités : j’ai été éduquée en entendent toujours dire (et je le crois encore aujourd’hui) que je peux faire quoi que ce soit et devenir ce que je souhaite être ;
tout ce que ma tête projette peut être réalisé, n’importe sa difficulté.- Argent : c’est cela qui compte.
- Sang : huit millions de victimes depuis la deuxième guerre mondiale.
- Marketing : c’est ce que nous avons à la place de la culture.
- Apathie : depuis la guerre du Vietnam, les gens ne sont pas capables d’agir contre ce qu’ils savent que ce n’est pas correct.
- Pitié : voir ci-dessus.
- Pouvoir mondiale : il a une grande influence dans le reste du monde.
- Pouvoir économique : des gens de tous les coins du monde y collaborent pour créer des technologies, des produits, des idées…
- Ignorant : il a peur de l’Islam, des autres cultures, au point de, parfois, interdire d’autres langues.
- Foyer : grand, beau, familial, beaucoup de gens merveilleux.
- Liberté : l’idée de l’individualisme rend possible des élections personnelles et libres.
- Le drapeau américain : Le symbole des USA.
- George Washington : « père » de notre pays.
- Liberté : c’est pour elle que nous luttons.
- Guerre/conflit : apparemment il y en a toujours une quelque part dans laquelle les USA sont impliqués.
- Baseball : notre sport national
- Peur : 11 septembre.
- Fierté : 11 septembre.
- Force : 11 septembre.
- Unité : 11 septembre.
- Beau : 11 septembre.
20Si ces extraits font peut-être un peu long, ils nous permettent d’illustrer plusieurs choses : d’un côté, c’est pour cela que nous les avons amenés ici, la diversité des représentations culturelles dont l’explication est à trouver dans ces aspects idéologiques et expérientiels que nous avons ci-dessus soulignés ; de l’autre, l’intérêt pour la différence, les marges, le singulier, le biographique, etc., qui caractérise notre modèle de recherche ; en troisième lieu, le détournement qualitatif d’un instrument en principe quantitatif, le questionnaire : d’une part, on voit dans ces exemples que les informateurs refusent parfois, avec raison, de se soumettre aux contraintes imposées par les chercheurs ; d’autre part, l’on peut comprendre comment nous nous sommes arrangés pour faire ressortir le singulier de la globalité, à savoir en notant, comme nous l’avons déjà dit, tout ce qui ne pouvait pas être réduit à des catégories dans les réponses données aux questionnaires, en valorisant ces « déviations » et en leur aménageant un espace important dans notre rapport final pour leur donner la parole et les interpréter (Atienza, 2005), tout cela au prix d’un travail harassant pour les chercheurs ; enfin, les exemples ci-dessus sont la preuve du fait que les réponses des informateurs constituent des véritables récits de vie croisés, tel que nous l’avions dit en 1.1.
21f) Les représentations que les informateurs ont sur l’Espagne sont soumises aux mêmes règles que celles indiquées pour celles qu’ils ont de leurs propres pays. Un accord majoritaire existe, indépendamment des nationalités d’origine, sur quelques-unes des représentations, lesquelles coïncident avec les stéréotypes les plus connus sur notre pays, et qui ne manquent pas de vérité parce que comme tout stéréotype, qui est quelque chose de différent du préjugé, ces représentations n’ont pas comme seule origine des idées reçues, mais elles se fondent sur des expériences réelles bien que limitées [5]. Quand nos informateurs répondent à la question 14 (Quand vous entendez ou lisez le nom de l’Espagne, quels sont les mots, images ou idées qui vous viennent à l’esprit ?) et pensent, dans l’ordre, aux taureaux, le soleil, les plages, la paella et le flamenco, ils disent des vérités incontestables, les mêmes qu’on retrouve dans d’autres enquêtes semblables [6]. Mais, en même temps, toute une gamme de réponses échappe à cette liste standardisée, offrant une vision riche, plurielle et complexe de la réalité espagnole. Elles sont aussi vraies, le reflet d’un autre regard orienté par l’origine nationale, sociale, idéologique, etc. ainsi que par le parcours formatif ou par la connaissance plus ou moins profonde de notre pays ou par d’autres éléments biographiques, regard différent, donc, où des causes conscientes et inconscientes peuvent se conjuguer. Aussi, on pourra lire dans la prolongation de la liste de cinq éléments ci-dessus, d’autres termes tels que, guerre civile, histoire, des hommes et des femmes dansant avec des vêtements très ajustés, émotivité, pauvreté, liberté sexuelle, terrorisme, régionalisme, movida, asperges, Pays Basque, Madrid, Barcelone, Gaudí, hommes à gosses moustaches… La reproduction complète de quelques-unes des réponses précisera cette diversité de points de vue :
- Plaisir de vivre : les Espagnols apprécient beaucoup la vie de chaque jour avec la famille et les amis.
- Stagnation : diminution de la population et difficulté pour trouver du travail.
- Manque de motivation : les Espagnols aiment le plaisir à un point tel que pour eux faire de l’argent manque d’importance.
- Cigarettes : On dirait que tout le monde fume ici. Quel est le pourcentage de gens cancéreux ?
- Famille : familles fermées et unies ; les enfants sont élevés entourés de beaucoup d’amour et sont sous la responsabilité de tous.
- Des gens en train de parler espagnol : j’entends la langue
- Des groupes des gens : je vois des groupes de cinq, dix personnes ou plus, qui se promènent et se rencontrent.
- Taureaux : je ne peux rien pour eux. Les choses sont comme elles sont.
- Europe : l’Espagne fait partie d’un très large continent.
- Guerre Civile : misère et désolation, désespoir complet causé par l’Espagne à elle-même, ce qui donna lieu à une génération qui connu et compris le sens du mot « défaite ».
- Flamenco, musique, plages. L’industrie du tourisme est centrée dans l’Espagne du sud.
- Vin/nourriture : les Espagnols se plaisent entre eux !
- Conquérants/cruels : la conquête des colonies.
- La mer : leur style de vie est dû à l’importance économique et culturelle de la mer.
- Monuments, architectures incroyables : longue histoire d’une diversité de cultures, bien entretenues, des châteaux, des aqueducs, des murailles, etc.
22Des réponses pleines d’épaisseur et de vision en profondeur, qui ne nient
pas les stéréotypes les plus fréquents, et qui nous intéressent non seulement
par ce qu’elles disent de l’Espagne et des Espagnols mais aussi par ce qu’elles laissent entendre des rédacteurs de ces morceaux fugaces de biographie.
h) Les problèmes des sociétés développées semblent être partout les
mêmes : les réponses données aux deux premières questions et les résultats
de l’enquête contemporaine (décembre 2001) du CIS (Centre d’Investigations Sociologiques) pour l’Espagne le confirment :
espagnols des universités d’Oviedo et de Clermont-Ferrand (Atienza, 1996)
la liste était déjà proche de celle-ci. Pour les Espagnols, les problèmes les
plus graves de la France étaient, dans l’ordre, les essais nucléaires (1996 a
été l’année des derniers essais à Mururoa), le racisme, le terrorisme, le chômage et la crise économique et ceux de l’Espagne, le chômage, le terrorisme,
la corruption, la confrontation politique, l’économie. L’échantillon français,
de son côté, avait considéré que les problèmes de l’Espagne étaient le chômage, la pauvreté, le terrorisme, la toxicomanie et les différences sociales et
ceux de la France, la pauvreté, l’exclusion-SDF, le trou de la caisse de sécurité sociale, l’intégration sociale et l’insécurité citoyenne.
23i) Les représentations de nos informateurs concernant la langue maternelle et la langue étrangère nous ont fortement étonnés. Ce n’est pas parce qu’ils ont utilisé jusqu’à quatre-vingt-trois adjectifs différents pour la caractériser (le chiffre est plus important dans les réponses aux autres questions), mais parce que 42 % parmi eux disent de leur langue maternelle qu’elle est difficile, ce terme venant largement en tête de la liste de réponses (dans laquelle on trouve aussi, mais à distance, laide et ennuyeuse). L’antonyme, facile, n’est utilisé que par 10 % des étudiants. Comment interpréter cela ? S’agit-il de donner de la valeur à sa propre langue face aux autres dans un pays étranger ? Ou, plutôt, c’est l’expression d’une difficulté réelle ou, pour le moins, vécue comme telle, concernant certaines des compétences linguistiques, l’expression écrite, par exemple, et, plus précisément l’orthographe ? Ou ce n’est qu’une manière qu’à le sujet de dire une difficile relation avec sa propre langue, laquelle difficulté ne seraient que le symptôme d’un problème d’origine, c’est-à-dire, un problème lié aux effets de la manière dont la langue et, avec elle, l’ensemble de l’ordre symbolique et culturel, lui a été donné dans son enfance ? Nous n’écartons pas cette dernière possibilité, renforcée par l’acceptation de la langue espagnole, que 37 % considèrent mélodieuse et 19 % facile. D’où vient cette difficulté de la langue maternelle et cette facilité d’une langue étrangère ? Sans laisser de côté d’autres cadres interprétatifs possibles, nous croyons que la psychanalyse pourrait apporter des éclairages intéressants. Mais au lieu d’approfondir ici cette voie nous préférons renvoyer le lecteur à certains de nos travaux (Atienza, 2003a, 2003b, Atienza et G. Riaño, 2004, Pascual et autres, 2003).
2.2. Les entretiens et les journaux croisés
24Les données offertes par ces deux instruments ont été traitées ensemble. Pour faciliter l’analyse, les informations ont été organisées autour de huit catégories et soixante-sept sous-catégories. Nous ne citerons ici que les premières : Des aspects concernant la manière d’être et les attitudes à l’égard de la vie ; des aspects sociaux, économiques, politiques et culturels ; des aspects idéologiques et historiques ; des aspects éducatifs ; des aspects langagiers et psychoaffectifs ; des aspects physiques du pays et de leurs habitants ; évolution personnelle ; modalités de construction des représentations.
25N’ayant pas ici la place pour présenter les résumés des résultats de chacune de ces catégories, nous nous contenterons de le faire par rapport à la dernière de celles-ci, les modalités de construction des représentations, car elle nous semble apporter les informations le plus significatives de cette partie de notre recherche, et qu’elle est à mettre en rapport avec un des chapitres les plus importants des pages que nous avons dédiées au cadre théorique. Il ne s’agit pas pour nous de montrer comment les représentations se construisent mais de rendre compte de ce que nous avons entendu dans les discours de nos informateurs à ce sujet.
26a) L’attitude de chaque sujet à l’égard de ce qui est différent, selon qu’elle soit plus ouverte ou fermée, plus ou moins tolérante, semble être un élément déterminant dans la construction des représentations que les participants [7] ont des autres langues, cultures, personnes. Or, cette attitude n’est pas facilement influençable, parce qu’elle serait une composante constituante de la personnalité profonde des personnes : les plus ouverts seraient ceux qui ne trouvent pas satisfaction à tous leurs besoins dans leur propre milieu culturel, s’il faut écouter ce qu’un de nos informateurs affirme. Mais cette « manière d’être » pourrait aussi être l’effet d’un apprentissage dans le cadre de la culture nationale, locale ou familiale des sujets, comme cela a aussi été signalé. On introduit par là un élément de rationalité qui ouvre la porte à une mise en relation des attitudes avec des aspects cognitifs – qui produisent de généralisations qui orientent nos attitudes (« pour pouvoir comprendre le monde, nous créons des catégories dans lesquelles nous introduisons les choses, parce qu’il est ainsi plus facile d’aborder ce monde qui est tellement grand », écrit un des étudiants) – et même géopolitiques – les ressortissants d’un petit pays peuvent être ouverts parce que la taille réduite de celui-ci et le nombre peu important de ses habitants leur font conscients du fait qu’ils ont besoin des autres (« nous ne sommes que neuf millions d’habitants… alors nous devons prendre en compte les autres pays »).
27b) Les expériences de formation sont naturellement l’une des sources de construction de représentations les plus importantes. Plusieurs étudiants le soulignent. Cette formation est parfois une simple information (« J’ai entendu beaucoup de gens parler » de ceci ou de cela). Et comme l’informationformation dépend en grande partie de l’origine nationale des personnes, cette origine détermine la construction des représentations (« Je crois que les différences dépendent de la manière dont nous sommes élevés, le milieu ambiant, les mœurs et la manière de penser de chaque pays »). Naturellement, le poids de la formation institutionnalisée est sinon supérieure au moins plus repérable, c’est sans doute la raison pour laquelle nos informateurs se réfèrent à leurs études comme étant à l’origine de leurs représentations culturelles sur leur propre pays mais surtout sur l’Espagne : « ce sont les choses que nous apprenons à l’école » ; « la plus grande partie de ce que je connais de la culture espagnole vient de l’université » ; « Oui, oui, je le dois aux cours de langue ».
28c) Naturellement, la littérature et le cinéma sont deux importantes sources de représentations sur la culture de l’autre. Mais là aussi, cela se déduit de ce que nos informateurs disent non point par la fréquence mais par la force avec laquelle ils l’affirment. Le poids du cinéma est important surtout en ce qui concerne les représentations à l’égard des EEUU, au point que quand l’un des chercheurs, comme résultat des échanges croisés avec une étudiante nord-américaine, en prend conscience il renonce à exprimer ses représentations sur ce pays parce qu’il le sait fabriquées, non issues de l’expérience directe ou du contraste entre des informations variées et d’origines diverses. L’importance de la littérature est aussi décisive et plusieurs de nos informateurs écrivent qu’elle est à l’origine de leur passion pour un pays ou une région du monde donnés, même si la connaissance directe ne se correspond pas toujours avec ce que l’on avait imaginé à partir des lectures :
Pourquoi mon intérêt pour le monde de langue hispanique ? À l’époque ou je faisais des études d’espagnol à l’université j’ai lu beaucoup de littérature latino-américaine et, en lisant, mon intérêt a commencé à grandir, et même une passion est née pour connaître les lieux qui avaient vu naître cette littérature, et mon intérêt pour la langue et le défi que cela représentait pour moi a aussi augmenté. Dans la littérature que je lisais il y avait un élément qui me semble magique et se mélange à la réalité (Réalisme Magique). Il y a aussi la présence d’une nature sauvage et exotique que les hommes ne peuvent pas contrôler. La littérature contient des idées et des thèmes comme la présence indigène et le métissage des Créoles et les indigènes, et des idées différentes sur ce que l’amour, la famille et les priorités dans la vie doivent être. Voilà certaines des choses qui m’attiraient […] Dans la littérature, les idées de l’amour et de la famille m’intéressaient parce qu’elles étaient vraiment mystérieuses et différentes et, comme je n’étais pas tout à fait d’accord avec les normes dans ma propre culture, j’avais de l’intérêt pour connaître celles des autres. […] Quand, finalement, je suis allé vivre à l’Équateur j’ai réalisé que certaines des choses que la littérature racontait s’y trouvaient reflétées, d’autres pas.
30d) Mais la source la plus citée par les étudiants étrangers de l’université d’Oviedo comme étant à l’origine de leurs représentations sont les médias. Même ceux qui voyagent au pays en parlent. Ils semblent jouir d’un statut d’objectivité, de miroir reflétant la réalité, au contraire du cinéma qui serait un lieu de fabulation et de déformation de celle-ci : « L’ETA n’est que ce que je sais grâce à la télévision, les médias ». Mais des dangers guettent, car la télévision, en particulier, peut donner l’impression de pouvoir uniformiser certains comportements au point qu’elle peut induire l’illusion d’une proximité entre les cultures beaucoup plus grande que celle réellement existante : « Je sais que cela est dû en partie à des choses telles que le contact entre les cultures à la télévision et la musique américaine et peut-être que je cherche des similitudes là où il n’y en a point, mais j’aime croire qu’elles existent bel et bien ». Quoi qu’il en soit, les médias sont un très puissant instrument de distribution et de généralisation des stéréotypes : « c’est ce que tu reçois quand tu vas dans ton pays et que tu regardes la télé ; ce qui vient de l’Espagne c’est les taureaux, le flamenco, tout cela, et alors ça devient automa tique ». e) C’est justement le poids des clichés et des stéréotypes qui est, avec la précédente, la sous-catégorie la plus citée par les étudiants. Par contre, seulement un professeur s’y réfère. Leur entité et mode de fonctionnement sont pluriels : dans une même culture des stéréotypes concernant une même réalité fonctionnent dans l’amalgame. Une étudiante, roumaine, souligne à quel point cela peut être négatif pour certains pays : « Souvent les idées que les gens se font sur un pays leur enlèvent l’envie de s’y rendre. Et ils ne savent pas tout ce dont ils sont en train de se priver ! ». Une autre, nord-américaine dans ce cas, remarque que les représentations culturelles ne pourront jamais rendre compte de la diversité d’un pays et seront donc, nécessairement, stéréotypées : « Les EEUU sont un pays tellement grand ! ayant de normes différentes dans chaque zone… ». Une troisième, rappelle que la vérité que le stéréotype possède tend à être magnifiée par les observateurs étrangers : « Ce sont des choses qui existent en Angleterre, mais c’est aussi que les étrangers s’y focalisent quand ils pensent à l’Angleterre ». Dans ce dernier cas on remarque le poids des hétéro-stéréotypes dont les effets peuvent être contraires : ils aident à prendre conscience de ce qui caractérise la culture maternelle (« Moi, cela m’a servi pour voir les Espagnols du ‘dehors’, pour prendre conscience du fait que les autochtones ne sommes pas conscients de ce que nous faisons », écrit l’un des chercheurs dans son journal) mais ils peuvent aussi manipuler les auto-stéréotypes au point de forcer la personne a les quitter : « Si j’ai écrit le nom de Dracula, dit une étudiante roumaine, c’est surtout parce que c’est ce que les étrangers pensent comme étant une caractéristique de la Roumanie ». Enfin, les lieux communs et les stéréotypes embrassent l’ensemble des aspects culturels : linguistiques, politiques, sociaux, climatiques, folkloriques, gastronomiques, ceux concernant les mœurs et le physique des personnes, etc.
31f) Outre les sources de construction des représentations ci-dessus citées les étudiants et professeurs se sont référés à d’autres, d’une entité mineure, que nous avons réunies justement sous le chapeau d’autres sources des représentations : le retranchement idéologique (parfois les représentations des personnes contredisent les constats empiriques, la cause étant un aveuglement idéologique) ; traits de personnalité (les représentations qu’un sujet a sur un pays donné peuvent ne pas être représentatives de ce pays, mais plutôt de la sensibilité, la personnalité et les intérêts de la personne elle-même) ; la représentativité « critériée » (les faits culturels ont besoin de remplir certaines conditions ou critères pour être considérés représentatifs d’une culture) ; la proximité « impliquante » (pour pouvoir se construire des représentations on a besoin d’une proximité et d’une implication affective et cognitive sans lesquelles on ne peut pas être attentif à l’étrangeté de l’autre : souvent l’arrivée dans un autre pays libère le sujet des contraintes de la vie ordinaire, relâche les tensions causées par son « être au monde » et ses habitudes de lien et d’engagement avec le milieu proche, que l’on peut alors regarder avec une certaine indifférence empêchant une compréhension suffisante d’où des représentations pourraient émerger) ; le poids du « politiquement correct » (la pression sociale peut conduire à ne pas faire, dire et même penser que ce que la société elle-même juge politiquement correct, agissant comme une sorte de court-circuit des processus de construction des représentations) ; le poids de l’histoire et des mythes fondateurs (les représentations que les sujets d’aujourd’hui ont de leur culture ont beaucoup à voir avec les modes de vie que subirent et inventèrent les pionniers à l’origine de la communauté, lesquels modes de vie ont orienté de manière forte le regard sur le monde des générations actuelles et à venir) ; la rumeur (parfois les étudiants ne trouvent d’autres sources de leurs représentations que ce qu’ils ont entendu dire : « En Irlande j’ai entendu dire beaucoup de choses sur l’Espagne, le manque de travail, les salaires réduits, ce genre de choses. Cela explique mes réponses au questionnaire »).
2.3. Évolution et reconstruction des représentations des professeurschercheurs
32L’un des objectifs de notre recherche était de connaître dans quelle mesure le dialogue des membres du groupe de chercheurs avec les représentations des étudiants, devenait pour les premiers une exigence de réélaboration et reconstruction de leurs propres représentations. La dernière étape de la recherche a donc été de nous contraindre à réaliser un travail d’introspection (qui n’était possible qu’au terme du processus, car ce n’est que là que nous avons eu accès à l’ensemble des connaissances construites) pour essayer de rendre compte des transformations personnellement vécues. Cette tâche représente non seulement, indirectement, une évaluation de la recherche, ni, directement, une manière de la conclure, mais elle constitue aussi un de ses moments essentiels. Malheureusement nous ne pouvons pas ici, manquant d’espace, en rendre compte de manière suffisamment précise. Nous devrons nous contenter de quelques observations très générales qui risquent de décevoir. Avançons pourtant qu’il ne faut pas s’attendre à lire ici des paroles d’experts (les professeurs qui ont conduit cette recherche ne sont pas des spécialistes du domaine des représentations culturelles) : ce sont, de manière plus modeste, des réactions simples de personnes qui ayant vécu une expérience privilégiée la communiquent avec les mots de tous les jours.
332.3.1. De l’aveu de tous les chercheurs l’exercice de dialogue était nécessaire mais pas facile. L’un d’eux souligne que :
en contrepartie, le manque de représentations concrètes sur sa culture enlevait de
la profondeur à ma réflexion […] Cette méconnaissance et le nombre très limité de
représentations culturelles qui étaient les miennes sur le pays de mon interlocutrice
m’empêchait d’incorporer mes propres expériences concernant sa culture, enrichir
mes réflexions et les voir évoluer, car je n’en avais d’autre porte d’accès que les récits
et les questionnements qu’elle me communiquait dans chacun de nos échanges sur le
support du journal.
35Or, la difficulté ne vient pas seulement du manque de représentations à mettre en jeu, mais aussi de la résistance naturelle à admettre l’inattendu, même si cette résistance peut être levée :
Je dois dire que les représentations que j’avais des anglais et des anglaises ne m’auraient jamais conduite à admettre que le Royaume-Uni et l’Espagne ont en commun beaucoup plus qu’il ne le semble. […] En cela, ma représentation culturelle a changé. Ma représentation très positive des espagnols (et des asturiens), que je jugeais non seulement ouverts, gais et sympas mais aussi fondamentalement nobles, travailleurs et honnêtes, est en train de faire la place à une autre où ils apparaissent comme plus matérialistes, plus jaloux des autres et même plus indolents, et qui commence à s’installer dans mon inconscient
372.3.2. La majorité des sept chercheurs s’accorde pour affirmer que le
processus de recherche dans lequel ils ont participé leur a fait prendre
conscience de deux faits essentiels :
– le caractère radicalement ethnocentrique de leur système représentationnel ;
– cet ethnocentrisme est constitué non seulement par leur culture d’origine
mais aussi par les cultures dominantes dont celle-ci fait partie, plus précisément par celles de l’Europe occidentale et des États-Unis, dont on partage d’une manière ou autre les valeurs et les représentations en même
temps qu’on refuse celles des pays qui ne font partie de cette culture dominante, la Bulgarie, par exemple, dont d’ailleurs les chercheurs reconnaissent ne rien connaître.
382.3.3. Les chercheurs font le même constat que les étudiants avaient déjà fait. À savoir, qu’un lien – qui ne se présente pas nécessairement de manière transparente dans les consciences – existe entre les représentations culturelles des citoyens et l’histoire des peuples auxquels ils appartiennent. Ainsi, pour les Nord-Américains – mais ce n’est qu’une hypothèse – les paysages et espaces naturels seraient moins représentatifs de leur culture que les monuments architecturaux ou les conquêtes technologiques parce que leur histoire nationale est le résultat d’une confrontation avec la nature et d’un effort acharné pour la maîtriser. C’est au moins, ce que l’une des étudiantes laissait entendre dans un paragraphe cité par l’un des chercheurs :
Notre culture valorise beaucoup plus la capacité de faire des grands travaux malgré les
contraintes naturelles. Par exemple, d’une merveille comme les Niagara Falls, qui peut
aussi être un endroit dangereux, nous avons fait un lieu touristique avec des bateaux
qui naviguent sous les cascades
402.3.4. Le processus de réflexion collective que notre recherche a rendu possible, nous a permis de voir à l’œuvre deux réalités qui normalement sont à tel point banalisées qu’elles passent inaperçues : d’un côté, le fait que nous regardons la culture de l’autre à travers la nôtre et que celle-ci conditionne ce que nous voyons dans celle-là, ce qui nous semble significatif ou pas ; mais aussi, d’un autre côté, que nous apprenons à regarder notre propre culture à travers le regard jeté sur elle par les originaires d’autres cultures :
Nos représentations culturelles concernant les autres pays, plus ou moins éloignés
du nôtre, sont fortement conditionnées par la manière qu’on a eue de nous élever, le
milieu environnant, les mœurs et la manière de penser de chaque pays […] Autrement
dit, ce sont nos propres référents culturels qui seront à l’origine de notre vision et
analyse d’autres cultures. [Mais] parfois les représentations que nous construisons sur
nous-mêmes ou nos pays d’origine, sont orientées par ce que nous considérons être
plus connu par les étrangers.
42C’est en partie le même constat fait par un autre professeur, quand il écrit que les représentations des étudiants « m’ont forcé à questionner mes propres représentations culturelles en ce qui nous concerne nous, les Espagnols ». Et la dimension de complexité que le regard étranger rend possible interroge une autre investigatrice en ces termes :
Tout cela a produit chez moi un sentiment d’étonnement : j’ai découvert tout à coup que je partage ma vie avec une communauté que je ne connais pas en réalité. Est-ce parce que ma connaissance de l’autre se borne à mon cercle serré d’amis, auprès duquel je me sens en sécurité et en confiance ?
44Dans la suite de son discours, elle semble répondre par l’affirmative à cette question quand elle est contrainte d’admettre que les représentations exprimées par les étudiants l’ont conduite à se rendre compte que, contre ce qu’elle croyait, « tout semble indiquer que [les Espagnols] nous sommes un peuple qui vit dans des cercles d’amitié fermés qui ne s’ouvrent pas facilement à la présence d’autrui ».
452.3.5. L’on pourrait résumer l’ensemble d’observations ci-dessus par les mots avec lesquels un membre du groupe de chercheurs conclut son discours introspectif, des mots tous simples mais qui auraient pu être cosignés par toute l’équipe :
Les résultats de notre recherche me conduisent à m’interroger sur les conséquences que cela doit avoir sur mon travail professionnel. La première de ces conséquences est que nous devons être beaucoup plus prudents quand il s’agit de s’exprimer dans le domaine des faits culturels. Désormais, notre regard sur la culture et la langue que nous enseignons – l’anglais, dans mon cas – sera plus authentique, plus curieux, plus ouvert au dialogue et au désir de connaissance d’autres peuples, de manière à ce qu’un processus d’enseignement-apprentissage fondé sur la comparaison, la compréhension et l’acceptation des différences, soit à même de nous enrichir en tant que personnes et enseignants. La conclusion qui est la nôtre – laquelle constitue l’un des apprentissages importants que notre recherche nous a permis de réaliser – est que la prudence et le tact, la curiosité et la volonté d’apprendre de l’autre devraient guider notre comportement aussi bien dans notre vie personnelle au quotidien que sur le plan professionnel.
CONCLUSION
47Après ce parcours, long mais insuffisant, l’appréhension des contenus des représentations culturelles que les personnes ont sur leurs propres pays et sur ceux des autres et des manières dont elles se construisent et évoluent dans la dynamique du jeu des auto et des hétéro-stéréotypes et l’influence des médias, la littérature, le cinéma, la formation, etc. nous semble peut-être plus abordable. Nous n’avons pourtant fait qu’effleurer le problème. Ceci pas seulement parce que nous avons peu fait de travail d’analyse et d’interprétation, nous bornant pratiquement à résumer les informations obtenues, mais surtout parce que nous sommes restés sur le plan de la logique rationnelle et de la conscience. Or, depuis quelques années, je suis convaincu que les phénomènes humains, spécialement ceux liés aux faits de langue, ont besoin aussi, pour être appréhendés, de ce regard dans les profondeurs que la psychanalyse – langage de la logique libidinale et de l’inconscient – rend possible. Il nous faudra un jour, donc, reprendre toutes les données que nous avons concentrées ici à zéro, et les regarder à travers cette loupe qui va chercher la lumière dans les ombres.
Bibliographie
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
- ATIENZA, J.L. (dir.). 2005. ¿Cómo se ven ? ¿Cómo nos ven ? Atrapados en los estereotipos. Oviedo : Universidad de Oviedo.
- —. 2003a. « L’émergence de l’inconscient dans l’appropriation des langues étrangères », ÉLA, nº 131.
- —. 2003b. “La entonación es el sentido : reflexiones en torno a la voz y al aprendizaje de lenguas extranjeras”, in Adquisición de lenguas extranjeras en edades tempranas. Madrid : Anaya.
- —. 1996. Las representaciones culturales de estudiantes universitarios de Clermont-Ferrand y de Oviedo (non publié).
- ATIENZA, J.L., GONZALEZ-RIAÑO, X.A. 2004. « Attitudes linguistiques et incidents critiques », Traverses, nº 6.
- BARTH, F. 1969. « Introduction », dans F. Barth (éd.), Ethnic Groups and Boundaries. London : Allen and Unwin.
- COHEN, A.P. 1982. « Belonging : the experience of culture », dans A.P. Cohen (éd.), Belonging-Identity and Social Organisationin British Rural Cultures. Manchester : Manchester University Press.
- BOLIVAR, A., DOMINGO, J., FERNANDEZ, M. 2001. La investigación biográficonarrativa en educación. Madrid : La Muralla.
- BYRAM, M. 1992. Culture et éducation en langue étrangère. Paris : Crédif/Hatier/ Didier.
- BYRAM, M., ESARTE-SARRIES, V., & TAYLOR, L. 1991. Cultural studies and language learning : A research report. Clevedon, Avon : Multilingual Matters.
- CAIN, A., BRIANE, C. 1994. Comment collégiens et lycéens voient les pays dont ils apprennent la langue. Représentations et stéréotypes. Pris : INRP.
- CONSEIL DE L’EUROPE. 2000. Cadre européen commun de référence pour les langues. Strasbourg/Paris : Conseil de l’Europe/Didier.
- DAVIDOV, V. 1988. La enseñanza escolar y el desarrollo psíquico. Moscou : Editorial Progreso.
- EISNER, E.W. 1998. El ojo ilustrado. Indagación cualitativa y mejora de la práctica educativa. Barcelona : Paidós.
- GALISSON, R. 1991. De la langue à la culture par les mots. Paris : CLE International.
- GEERTZ, C. 1975. The interpretation of Cultures. London : Hutchison.
- GUBA, E. 1990. The Paradigm Dialog, Newbury Park : Sage.
- —. 1983. « Criterios de credibilidad de la investigación naturalista », dans J. Gimeno et A. Pérez (éd.), La enseñanza, su teoría y su práctica. Madrid : Akal.
- GUMPERZ, J. 1989. Engager la conversation. Paris : Minuit.
- JODELET, J. 1994. Les représentations sociales. Paris : PUF.
- OLIVERAS, A. 2000. Hacia una competencia intercultural en el aprendizaje de una lengua extranjera. Madrid : Edinumen.
- PASCUAL, J., MORI, M., GONZALEZ-RIAÑO, X.A., FUEYO, A., ATIENZA, J.L. 2003. Interculturalidad y diversidad lingüística : estudio de actitudes lingüísticas en Asturias y sus implicaciones didácticas. Oviedo : KRK.
- RINCON, D., LATORRE, A., ARNAL, J., SANS, A. 1995. Técnicas de investigación en ciencias sociales, Madrid : Dykinson.
- ZARATE, G. 1993. Représentations de l’étranger et didactique des langues. Paris : Didier.
Notes
-
[1]
L’équipe de chercheurs, tous professeurs de langue étrangère ou de didactique des langues, était constituée aussi par Margarita Blanco Hölscher (allemand), Bernardo Pérez Fáñez (italien), Isabel Iglesias Casal (espagnol langue étrangère), Gloria López Téllez (didactique de l’anglais), Miguel Ángel López Vázquez (français) et Juan Angel Martínez García (français).
-
[2]
Pour le traitement quantitatif des données de l’enquête nous avons utilisé le programme d’analyse SPSS ; pour faciliter l’analyse qualitative des informations obtenues des entretiens et des journaux croisés nous avons fait appel au programme Atlas-ti.
-
[3]
Mais nous avons montré que l’un des objectifs de cet instrument est aussi de brouiller les rôles : étudiants et professeurs deviennent en même temps des informateurs et des chercheurs. En effet, le journal instaure un dialogue entre égaux. Le professeur prend l’initiative de rédiger les premières pages (sans limitation quantitative ni thématique), en réaction aux réponses données par l’étudiant au questionnaire. À partir de ce moment il se sent engagé, autant que l’étudiant, dans le jeu des échanges (une fois par mois de part et d’autre pendant quatre mois) de représentations qu’il vient d’instaurer. L’étudiant, à son tour, est autorisé à prendre les initiatives qu’il considère nécessaires afin de connaître et comprendre en profondeur les représentations du professeur ou les faits culturels observés depuis son arrivé dans la région.
-
[4]
Voici les énoncés des vingt questions : 1 et 2 : Quels sont les 5 problèmes les plus graves de votre pays/de l’Espagne ? ; 3 et 4 : Signalez 5 caractéristiques de la manière d’être de vos concitoyens/des Espagnols, tel que vous le voyez ; 5 et 6 : Signalez 5 réalités, objets, aspects (matériels ou no) que vous estimez représentatifs de votre culture/de la culture espagnole ; 7 et 8 : Indiquez les 5 monuments les plus représentatifs de votre pays/de l’Espagne ; 9 et 10 : Indiquez le nom des 5 personnalités les plus représentatives de toute l’histoire de votre pays/de l’Espagne ? ; 11 et 12 : Votre langue/la langue espagnole vous semble…… (indiquez trois caractéristiques) ; 13 et 14 : Quand vous entendez le nom de votre pays/de l’Espagne quels sont les images, les mots, les idées qui vous viennent à l’esprit ? ; 15 et 16 : Quelles sont les traditions les plus remarquables de votre culture/de la culture espagnole ? ; 17 : La connaissance que vous avez acquise jusqu’à présent de la langue et culture espagnoles a-t-elle eu une influence sur votre manière d’être, vos comportements, votre vision du monde, etc. ? ; 18 : Pensez-vous que la manière d’être, le comportement, l’apparence externe enfin des Espagnols sont différents de ceux de vos concitoyens ? ; 19 et 20 : Quels aspects culturels de la vie espagnole croyez-vous qui peuvent faciliter/perturber votre intégration ? Pourquoi le pensez-vous ?
-
[5]
C’est pourquoi nous avons combattu la mauvaise renommée des stéréotypes, dans la mesure où nous les jugeons non seulement inévitables, mais aussi nécessaires (espace de passage vers une plus grande complexité des représentations) et même utiles, dans la mesure où c’est grâce à cette « richesse » apportée par les étudiants que l’on pourra mettre en place des activités pour les amener à rendre ses représentations plus proches de la complexité de la réalité.
-
[6]
Voir, par exemple, Byram, Essarte-Sarries et Taylor (1991), Cain et Briane (1994), Atienza (1996) et Oliveras (2000), ou, dans tous les cas, pratiquement les mêmes termes apparaissent en tête de liste.
-
[7]
Rappelons le : sept étudiants ont participé dans les entretiens et sept autres dans les journaux croisés.