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Article de revue

La découverte de Tombouctou : déconstruction et reconstruction d'un mythe géographique

Pages 131 à 144

Notes

  • [1]
    Ce travail a été mené à bien dans le cadre de l’équipe EHGO (UMR 8504, Géographie-cités), à laquelle j’étais associée en tant que doctorante au moment de son élaboration. Il a fait l’objet d’une contribution au Symposium organisé par la commission d’Histoire de la pensée géographique de l’Union géographique internationale (Yaoundé, janvier 2000), sur le thème « Mythe et connaissance scientifique dans l’histoire de la pensée géographique ».
  • [2]
    J.-L. Rivière, Cartes et Figures de la Terre. Paris : Centre Georges Pompidou, 1980, p. 135, cité dans Palsky, 1995, p. 134.
  • [3]
    Caillié, 1830, rééd. 1965, p. 2.
  • [4]
    Debarbieux, 1995.
  • [5]
    Signalons pour mémoire que René Caillié fut le premier explorateur qui se soit rendu à Tombouctou dans le cadre d’un projet délibéré de découverte et en soit revenu vivant. Peu avant lui, en 1826, le britannique Laing parvint à s’y rendre, mais il fut tué à la sortie de la ville, victime d’une embuscade. Cf. Monod, 1977, ainsi que Pitte, 1973.
  • [6]
    Barth se signale par une formation d’historien et de géographe acquise à l’université de Berlin et par la maîtrise de nombreuses langues indigènes, acquise pour l’essentiel sur le terrain, au cours d’un voyage qui dura cinq ans. Il se joint à l’expédition du pasteur britannique Richardson, qui se proposait de convaincre les chefs d’États africains de renoncer à la traite transsaharienne. De retour en Europe en 1855, Barth est le seul survivant de cette expédition partie de Tripoli fin 1849. Il a traversé le Sahara, visité l’Aïr, les États voisins du lac Tchad, l’Adamawa, l’empire de Sokoto, les États de la boucle du Niger. Il met à profit sa connaissance des langues indigènes et sa familiarité avec les lettrés et les chefs d’État soudanais pour rapporter une ample moisson d’observations touchant à la géographie, à l’histoire, à l’ethnographie, à la botanique des régions situées entre les bassins du lac Tchad et du Niger. Le récit de voyage de Barth sera cité ici d’après l’édition allemande (Reisen und Entdeckungen in Nord- und Zentral-Afrika, …, Gotha, J. Perthes, 5 vol.) et traduit par mes soins, ou, plus rarement, d’après l’édition française (Voyages et découvertes dans l’intérieur de l’Afrique septentrionale et centrale pendant les années 1849 à 1855, Paris, 1860, 4 vol., traduit par P. Ithier) très lacunaire.
  • [7]
    Dubois a déjà l’expérience du reportage en Afrique : en 1890, il avait suivi les travaux de la mission Brosselard-Faidherbe, chargée d’examiner la possibilité de construire une voie de chemin de fer en Guinée. En 1896, le journal Le Temps l’envoie à Tombouctou, où il reviendra encore dix ans plus tard. Chacun de ces voyages donne lieu à la publication d’un ouvrage. On a puisé ici dans : Tombouctou la Mystérieuse, Paris, 1897.
  • [8]
    Barth, édition allemande, t. IV, p. 414.
  • [9]
    Jackson, 1797. Cet ouvrage retrace le récit d’un commerçant marocain qui a visité ces régions en 1787.
  • [10]
    Barth, éd. allemande., t. IV, p. 442.
  • [11]
    Vivien de Saint-Martin, 1894 : article « Tombouctou »
  • [12]
    Élisée Reclus, 1887, p. 571.
  • [13]
    Caillié, 1830, rééd. 1965, t. I, p. 216.
  • [14]
    Lenz, 1881, p. 213.
  • [15]
    Dubois, 1897, gravure p. 248-249, intitulée Panorama extérieur de Tombouctou.
  • [16]
    Caillié, 1830, réed. 1965, t. II, p. 300-301.
  • [17]
    Idem, ibidem, p. 301.
  • [18]
    Id., Atlas de planches, pl. 6, voir fig. 1.
  • [19]
    Barth, édition française, t. III, p. 335 ; édition allemande, t. IV, p. 412. Il est d’ailleurs assez remarquable que le traducteur français ait cru bon d’ajouter « Je vis enfin apparaître à mes regards la ville de Tombouctou », alors que Barth ne fait pas du tout appel à la vue pour décrire le moment, mais dit simplement : « Ainsi nous approchions de la ville, mais le ciel étant très couvert… »
  • [20]
    Barth, édition allemande, IV p. 447.
  • [21]
    Lenz, 1886, t. II, p. 119.
  • [22]
    Lenz, 1881, p. 215.
  • [23]
    Dubois, 1897, p. 239.
  • [24]
    Idem, p. 240. Voir aussi la gravure intitulée «Une rue à l’entrée de Tombouctou».
  • [25]
    Idem, p. 244-245.
  • [26]
    Dubois, 1897, p. 245.
  • [27]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 301.
  • [28]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 313.
  • [29]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 303.
  • [30]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 309.
  • [31]
    Voir gravure (fig. 2).
  • [32]
    Éd. allemande, IV, p. 451.
  • [33]
    C’est à cette métropole de l’Empire de Sokoto, au Nigeria actuel, et non pas à Djenné, que Barth attribue ce rôle.
  • [34]
    Éd. française, IV, p. 30 ; éd. allemande, IV, p. 441.
  • [35]
    Coquery-Vidrovitch, 1993, p. 108-109 et 123.
  • [36]
    C. Coquery-Vidrovitch signale que ces chroniques, les Tarikhs, ont été écrites à un moment où l’activité commerciale de Tombouctou était entrée dans une phase de déclin, ce qui a pu contribuer à faire naître la tentation de célébrer le « souvenir des fastes d’antan », dont la ville ne retrouva jamais l’éclat : op. cit., p. 124-126 et note 53.
  • [37]
    Lenz, 1881, p. 217.
  • [38]
    Lenz, 1887, t. 2, p. 128-129.
  • [39]
    Lenz, 1887, t. 2, p. 129.
  • [40]
    Lenz, 1887, t. 2, p. 176-177.
  • [41]
    Lenz, 1881, p. 217.
  • [42]
    Lenz, 1881, p. 279.
  • [43]
    Il y aurait tout un commentaire à faire sur cette représentation du désert comme lieu de mort. Cette image constitue en effet un cliché passablement éculé au moment où Dubois écrit ces lignes, alors que de grands voyageurs « sahariens », comme Charles de Foucault par exemple, ont entrepris de renouveler l’image du désert.
  • [44]
    Lenz, 1881, p. 414.
  • [45]
    Lenz, 1881, p. 417, ainsi que la citation suivante.
  • [46]
    Ce souci est une constante qui préside aux vues géopolitiques de la France en Afrique au moment du partage colonial.
  • [47]
    Lenz, 1881, p. 418, comme la citation suivante.
  • [48]
    Bernard Lepetit (1999) remarquait de la même façon à propos de Volney la confusion des sens et l’émotion qui assaille le voyageur lorsque Alexandrie se présente à lui pour la première fois.

1 Dans Space and Place, Yi-Fu Tuan (1979) consacre un chapitre aux espaces et lieux mythiques, dans lequel il propose plusieurs approches de la dimension mythique de la relation des hommes à l’espace : il évoque d’abord le cas d’espaces qui n’existent pas dans la réalité, mais qui structurent plus ou moins fortement la représentation qu’on se fait de la Terre (tels le paradis terrestre ou le passage du Nord-Ouest) ; puis il aborde les conceptions mythiques de l’espace, qui renvoient plutôt à une géographie mythique qu’à des mythes géographiques. Le cas de Tombouctou ne correspond à aucune de ces approches : Tombouctou existe et, si l’on peut parler de mythe géographique, ce n’est pas à l’intérieur d’une géographie mythique, mais au contraire, paradoxalement, au moment même où la géographie entend soumettre, par le truchement de l’exploration et de la carte, l’ensemble des lieux du monde à une approche scientifique. Précisons qu’on abordera ce discours de l’intérieur, sans chercher à l’opposer à une réalité, et sans oublier qu’il s’agit d’un mythe surtout européen, donc exogène par rapport à l’espace concerné [1].

2 Il faut alors se tourner vers une autre piste suggérée par Yi-Fu Tuan (p. 86), pour qui le mythe surgit des espaces restés mal connus, entoure et encadre l’expérience du monde connu. Cette approche permet de rendre compte de la représentation qu’ont les Européens, au début du xixe siècle, des espaces africains, dont la connaissance est encore très lacunaire. L’inconnu ne se situe plus alors autour du monde connu, mais à l’intérieur des continents : l’inconnu n’est plus périphérique, mais « nucléaire [2] ».

3 Au début du xixe siècle, les espaces jusqu’alors inconnus sont l’objet d’un projet d’exploration qui peut se définir en termes de désir : désir d’atteindre un lieu, de le voir, d’en rendre compte, de lui attribuer une place exacte sur la carte du monde. La tache blanche de la carte, qui matérialise l’espace inconnu, stimule les explorateurs, comme en témoigne René Caillié, dans l’introduction à son récit de voyage, où le désir devient passion : « On me prêta des livres de géographie et des cartes : celle de l’Afrique, où je ne voyais que des pays déserts ou marqués inconnus, excita plus que toute autre mon attention. Enfin ce goût devint une passion pour laquelle je renonçai à tout : je cessai de prendre part aux jeux et aux amusemens [sic] de mes camarades ; je m’enfermai les dimanches pour lire des relations et tous les livres de voyages que je pouvais me procurer [3]. »

4 À l’intérieur de l’inconnu, on ne se lance pas tout à fait au hasard : certains lieux acquièrent un tel pouvoir attractif qu’ils mobilisent les énergies ; ils deviennent des « hauts lieux [4] ». Dans le mythe d’origine européenne qui lui est attaché, Tombouctou ne structure pas un territoire propre, mais l’espace d’un « ailleurs » ; comme espace dissocié de son environnement, Tombouctou devient dans l’imaginaire européen un pôle d’attraction, un lieu de « condensation » qui concentre les qualités d’un continent tout entier. On peut ainsi considérer que la manière dont on évoque alors Tombouctou en fait la synecdoque d’une Afrique à explorer, l’usage de cette figure de rhétorique étant identifié comme la marque de fabrique du haut lieu par B. Debarbieux, qui considère la rupture de continuité opérée par le lieu symbolique comme « la condition de sa capacité à supporter un récit, la condition de son efficacité ».

5 Ainsi apparaît d’emblée un paradoxe : le moment de l’exploration est celui où un discours plus ou moins scientifique, à tout le moins un discours porteur de connaissance, est amené à remplacer un discours porteur de désir ; mais l’exploration, dans ses motivations, a partie liée avec le mythe, elle peut même apparaître à maints égards comme le moment de son éclosion, celui où le désir du lieu est poussé à son paroxysme. C’est bien ce paroxysme qu’exprime encore Caillié : « […] la ville de Temboctou devint l’objet continuel de toutes mes pensées, le but de tous mes efforts ; ma résolution fut prise de l’atteindre ou de périr. » À la dimension du désir s’ajoute ici celle de la mort, qui confirme l’appartenance de ce type de discours au registre du mythe, balisé par Éros et Thanatos. L’exploration, lorsqu’elle réussit, c’est-à-dire lorsque l’explorateur parvient à se rendre sur les lieux de son désir, expose à la disparition brutale du mythe, à l’instant même où il est remplacé par une connaissance réelle. Le danger qui guette alors l’explorateur, pire que les dangers de la route, est celui de la déception, de la mort brutale de l’objet du désir, dont on découvre qu’il n’a peut-être jamais existé.

6 C’est à reconstituer ce moment du dévoilement de l’objet mythique, de l’apparition de Tombouctou aux premiers regards du voyageur, que voudrait s’attacher cet article, pour évaluer ensuite les processus qui permettent au voyageur qui a vu, mais aussi au géographe informé par le voyageur, de construire un nouveau discours sur le lieu, et éventuellement de donner au mythe de nouveaux avatars. Cette étude s’appuie sur les textes de quatre voyageurs qui ont séjourné à Tombouctou au xixe siècle et ont donné un récit de cette expérience : René Caillié, le « découvreur » solitaire [5], en 1828 ; le voyageur allemand Heinrich Barth, en 1853 [6] ; le géologue allemand Oscar Lenz, en 1880 ; enfin le journaliste français Félix Dubois [7], qui y séjourne en 1896, quelques mois à peine après la prise de la ville par les Français, et donne de son voyage un récit intitulé « Tombouctou, la Mystérieuse ».

Saisir le mythe

7 Sans proposer une réelle archéologie du mythe de Tombouctou, il convient de donner quelques repères sur sa genèse. L’approche en est malaisée, dans la mesure où les voyageurs eux-mêmes ne s’étendent pas sur le sujet, se contentant d’évoquer la renommée ou la notoriété du lieu, les légendes tirées des livres, sans imputer à un ouvrage ou à un auteur en particulier la responsabilité de l’élaboration ou de la transmission de la légende. Les voyageurs n’envisagent à aucun moment la nécessité de se livrer à un exposé préalable du mythe et de ses sources. Barth évoque à peine les données « isolées et éparses [8] » concernant l’histoire de la ville et de sa région, récoltées avant lui par le géographe anglais Cooley dans les productions des auteurs arabes du Moyen Âge. Il fixe une origine récente aux déformations légendaires dont Tombouctou a été l’objet en attribuant à Jackson [9], consul britannique à Mogador, une « description exagérée » d’après laquelle « on s’est fait de l’importance de cette ville une représentation qui n’a rien à voir avec la réalité [10] ». Les propos de Barth sont repris par Vivien de Saint-Martin : depuis Jackson, l’Europe se figure Tombouctou comme « une ville immense, renfermant de fabuleuses richesses [11]. »

8 Élisée Reclus mentionne la prospérité plus ancienne de Tombouctou et la connaissance qu’en avaient alors les Européens : « Lors de la domination des rois mandingues de Mali ou Mellé, au quatorzième siècle, Tombouctou était une ville riche et prospère, dont la renommée se répandait au loin, grâce au commerce du sel et de l’or ; les Européens même en entendirent parler : le nom de Timboutch apparaît pour la première fois sur une carte catalane de 1373 [12]. » Mais il n’en fait pas le point de départ du mythe pluriséculaire, mentionnant au contraire les pillages dont la ville fut victime de la part des Songhaï au xve et des Marocains au xvie siècle, avant ceux des Touaregs, Foula et Toucouleurs qui mirent en péril son commerce au xixe siècle. La ville de Tombut, capitale d’un « royaume » du même nom, est pourtant régulièrement portée sur les cartes des xviie et xviiie siècles (Blaeu, Sanson, Delille) dont les informations sont tributaires de Léon l’Africain (début du xvie siècle), sans qu’il en soit fait explicitement mention. Quant aux auteurs du xixe siècle, ils semblent largement ignorer cet héritage cartographique ancien.

9 Tout se passe comme si le mythe, au moment de son paroxysme, refusait de se laisser saisir dans ses origines, à la manière des noms attribués par les Grecs aux continents, dont Hérodote nous dit que chacun les connaît, mais que nul ne serait capable d’en décliner l’origine. Il se serait donc subrepticement installé, pour éclore véritablement dans le monde scientifique au moment où il devenait envisageable d’envoyer des voyageurs dans l’intérieur depuis les côtes du Sénégal ou de Guinée. C’est ce à quoi s’emploie l’African Association, fondée à Londres en 1788, en envoyant en vain vers Tombouctou huit voyageurs, qui meurent en route ou sont obligés de rebrousser chemin. Le prix proposé par la Société de Géographie de Paris en 1824 en Encouragement pour un Voyage à Temboctou et dans l’intérieur de l’Afrique semble avoir eu quelque effet sur un voyageur isolé comme Caillié, de son aveu même : « Une espérance tranquillisait mon esprit, occupé du sort de ma pauvre sœur : j’avais eu connaissance du prix que la Société de géographie de Paris avait promis au premier Européen qui pénétrerait à Temboctou, et je me disais : Mort ou vif, je l’obtiendrai ; si je n’en jouis pas, ma sœur le recueillera [13]. » Pourtant, le texte qui accompagne la publication de ce prix ne mentionne à aucun moment les raisons particulières qui s’attachent à cette découverte et ne fait aucune allusion à un mythe ou à une renommée. Il précise seulement qu’il a semblé opportun à la Société de Géographie, au moment où de nouvelles tentatives de pénétration dans l’intérieur de l’Afrique étaient entreprises, d’encourager les initiatives : l’unique motivation apparente semble être l’actualité de l’exploration.

10 Si la discrétion des géographes surpasse encore celle des voyageurs sur le mythe de Tombouctou et sa genèse, c’est finalement plutôt en creux, à travers tous les efforts consentis par les voyageurs pour atteindre Tombouctou, qu’il se laisse saisir. Sur ce point, en effet, les voyageurs comme les institutions scientifiques (African Association, Société de Géographie) ou les autorités consulaires (à Mogador, Saint-Louis, Freetown ou Tripoli) sont nettement plus diserts. Seuls les efforts déployés témoignent de la vivacité du désir d’atteindre Tombouctou : les actes parlent pour le mythe.

Le mythe et la vue de l’objet

L’approche

11 Les quatre voyageurs qui ont fait l’objet de cette étude, mentionnent tous, en général à maintes reprises, en amont de l’arrivée à Tombouctou, les difficultés innombrables qu’ils ont dû affronter pour poursuivre leur chemin. Lenz rappelle à son retour, au moment de raconter l’arrivée dans « ce Tombouctou objet de tant d’efforts [14] », les souffrances endurées dans le désert au cours des quarante-trois étapes de marche forcée de nuit. Trois des quatre récits mentionnent sous une forme ou une autre la présence de la mort dans l’ultime approche de la ville mythique. Ainsi, après la perte d’un serviteur probablement mort de soif, Lenz signale les traces de lions qui effraient ses guides dans les derniers instants du trajet, les restes de murs et de décombres qu’il faut franchir avant d’arriver à la ville, jadis plus étendue en direction du nord. Barth et Dubois, arrivant par Kabara, le port de Tombouctou sur le Niger, notent les dangers de la route qui joint Kabara à Tombouctou, lieu de prédilection des coupeurs de route et pillards Touaregs. Tous deux notent le lieu-dit Oum Aïmara, qui signifie « On n’entend pas », car il est impossible d’y percevoir les cris et les appels du malheureux qu’on attaque. L’un comme l’autre témoignent de l’assassinat de voyageurs à cet endroit peu avant leur propre passage. Dubois décrit les nombreuses carcasses d’animaux de bât qu’il faut enjamber dans le terrain sableux et déjà désertique qui entoure la ville, et renchérit en proposant une vue de la ville qui s’étire à l’horizon alors qu’une énorme carcasse d’animal occupe le premier plan [15]. On ne peut mieux donner l’impression qu’une ceinture de mort défend l’accès à la ville.

L’apparition

12 Assez curieusement, le moment où la ville apparaît pour la première fois aux yeux du voyageur ne donne pas lieu à une véritable description, à un véritable panorama sur la ville. Caillié arrive « au moment où le soleil touchait à l’horizon » ; il est trop submergé par l’émotion pour observer : « En entrant dans cette cité mystérieuse […] je fus saisi d’un sentiment inexprimable de satisfaction ; je n’avais jamais éprouvé une sensation pareille et ma joie était extrême. » Il s’agit d’un transport quasi mystique : « Mais il fallut en comprimer les élans : ce fut au sein de Dieu que je confiai mes transports ; avec quelle ardeur je le remerciai de l’heureux succès dont il avait couronné mon entreprise ! Que d’actions de grâce j’avais à lui rendre pour la protection éclatante qu’il m’avait accordée, au milieu de tant d’obstacles et de périls, qui paraissaient insurmontables [16] ! » Puis brus- quement, la vue revient au voyageur qui, tout en retrouvant ses esprits, déchante : « Revenu de mon enthousiasme, je trouvai que le spectacle que j’avais sous les yeux ne répondait pas à mon attente ; je m’étais fait de la grandeur et de la richesse de cette ville une tout autre idée : elle n’offre, au premier aspect, qu’un amas de maisons en terre, mal construites ; dans toutes les directions, on ne voit que des plaines immenses de sable mouvant, d’un blanc tirant sur le jaune, et de la plus grande aridité. Le ciel, à l’horizon, est d’un rouge pâle ; tout est triste dans la nature ; le plus grand silence y règne ; on n’entend pas le chant d’un seul oiseau [17]. ». La mort, qui n’était pas présente chez Caillié lors de l’approche de la ville, surgit de sa découverte : Tombouctou est une ville de silence et de mort, bâtie sur des sables mouvants. La gravure proposée par l’éditeur d’après un dessin de Caillié traduit l’impression du voyageur : elle montre des maisons en assez petit nombre pour que l’on puisse les compter, non alignées, non jointives, comme posées sur l’espace vide [18].

Fig. 1

« Vue d’une partie de la ville de Temboctou, prise du sommet d’une colline, à l’est-nord-est »

Fig. 1

« Vue d’une partie de la ville de Temboctou, prise du sommet d’une colline, à l’est-nord-est »

(René Caillié, Journal d’un voyage à Temboctou et à Jenné dans l’Afrique centrale, Paris, 1830 : Atlas de planches, Pl. 6). Cliché BNF.

13 Chez Barth aussi, la ville, à peine apparue, disparaît : « Le ciel étant très couvert et l’air étant rempli de sable, les masses d’argile, sombres et malpropres, de la ville, ne recevant pas les rayons du soleil, ne se distinguaient pratiquement pas du sable et des débris gisant aux alentours. Je n’eus, du reste, pas le temps de me retourner, une quantité de gens étant venus de la ville, pour saluer l’étranger et lui souhaiter la bienvenue [19]. » La ville disparaît dans le ciel, ne se distingue pas de l’horizon, tandis que la foule de ses habitants, aspirant le voyageur, lui ôte la possibilité de la contempler vraiment, lui fait manquer la « vue » de sa propre arrivée. C’est un effet de trop-plein qui engloutit la perception de la ville. Comme chez Caillié cependant, la présence du sable, sur lequel repose la ville ou qui la submerge de toutes parts, suggère l’idée d’une construction mal assurée, évanescente, presque un mirage tributaire des caprices de la lumière.

14 La ville est confisquée à Barth, dès le lendemain de son arrivée, pour des raisons politiques : dès son réveil, il est averti que le chef peul du Macina l’assigne à résidence et lui interdit toute sortie dans la ville et tout contact avec ses habitants. L’énergie qui avait animé Barth disparaît dans un accès de fièvre : « La présence d’esprit et la vigueur corporelle ne m’étaient plus d’aucun usage, et dès la première nuit que je passai à Tombouctou, je fus envahi par l’agitation et par de sérieux soucis [20]. ». Il n’appréhende Tombouctou que de la terrasse de sa maison, durant plusieurs mois d’une claustration presque totale.

15 Chez Lenz, on retrouve le même sentiment de très vive satisfaction que chez Caillié et la même absence de description : « J’aperçois dans le lointain les maisons et les tours des mosquées, connues depuis les descriptions de Barth [21] », dit-il seulement. Tombouctou s’efface même métaphoriquement : « Ce n’est plus aujourd’hui que l’ombre de ce qu’elle a dû être autrefois. […] Avant de pénétrer dans la ville, on passe une large ceinture de terrains déserts où des ruines de vieilles murailles permettent de juger de l’étendue du Timbouktou d’autrefois. [22] » Tombouctou oblige ainsi le voyageur qui veut l’atteindre à marcher sur ses ruines, à fouler d’abord les espaces qu’elle occupait naguère et d’où elle a disparu ; c’est une ville à marée basse, rétractée, dont la vie s’en est allée au loin.

16 Dubois, au contraire, met en scène à grand renfort de procédés rhétoriques le dévoilement de Tombouctou, en plusieurs étapes successives qui sont aussi celles de la mort apparente du mythe. L’apparition de la ville se fait brusquement, du haut d’un pli du terrain que le voyageur vient d’escalader. Cette première vision permet d’identifier Tombouctou à la ville du mythe, imaginée et désirée : « un fin et grand profil de ville, une silhouette sombre, régulière et longue, c’est ainsi qu’apparaît la Reine du Soudan, image de la grandeur dans l’immensité. […] Elle trône sur l’horizon dans une majestueuse attitude, comme une reine. C’est bien là la cité imaginée, la Tombouctou des séculaires légendes d’Europe [23]. » L’étape suivante, celle de l’entrée dans la ville et d’un premier coup d’œil sur ce qu’elle recèle, engendre une série de disparitions. L’existence du mur d’enceinte, comme la continuité du bâti, se révèle illusoire : « […] des maisons désertes, éventrées, dont les plafonds se sont effondrés, dont les portes sont absentes ; des pans de murs ébréchés et croulants ; puis des tertres de ruines informes, amoncellements de terre, de briques crues et de morceaux de bois. Et, au milieu de tout cela, des espaces libres, sans doute les chaussées des maisons défuntes [24]. » Même le marché, où l’on s’attendait à trouver le « commerce universel de Tombouctou », ne vend que « de ces infimes petites choses rouges, vertes, blanches, fauves, noires […] pour d’infiniment petites sommes en coquillages ». Ce qui apparaît alors, c’est ce que Dubois appelle des « taches lépreuses » : des terrains vagues, et surtout des huttes de paille, déjà mentionnées par Caillié. « Les sables du désert prêtent évidemment aux conceptions architecturales des matériaux insuffisants. Mais des huttes en paille ! Peu nombreuses, il est vrai, mais en pleine ville ! […] Et, d’une extrémité à l’autre de la ville, c’est toujours le même spectacle : des rues malades, des rues mourantes et des rues mortes, au milieu desquelles on enfonce dans le sable mouvant comme en plein Sahara [25]. » Le sable a pris possession des lieux, signe que la ville n’a pas su garder son caractère urbain, n’a pas su se prémunir des outrages de l’environnement. Et, comme chez Caillié et Barth, le sable sous les pieds suggère l’impression d’une ville instable, qui manque à la fois de fondations et de fondement, menacée d’engloutissement ou de submersion.

17 C’est Dubois qui va le plus loin dans la déconstruction du mythe. Arrivé au terme du dévoilement de Tombouctou, Dubois met explicitement en cause l’illusion dont il estime avoir été l’objet et va jusqu’à parler d’un « mirage », attribué au « soleil, ce terrible illusionniste ». Il oppose ainsi extérieur et intérieur, vision de loin et vision de près. Mais le plus difficile à admettre, ce n’est pas le délabrement de Tombouctou, c’est la déception, qui s’accompagne de « l’effondrement de tout le prestige que le nom de Tombouctou évoque à l’esprit d’un européen » : « La déroute est complète [26]. » Pourtant, au delà de cette disparition de la ville rêvée, une réalité nouvelle prend peu à peu corps sous les yeux des voyageurs, et chacun rapporte une image plus ou moins restaurée de la ville.

Que reste-t-il de Tombouctou ?

Une lecture impossible

18 L’image que retient finalement Caillié est celle de la gravure, qui figure une ville bâtie sur du sable : « Il y a je ne sais quoi d’imposant à voir une grande ville élevée au milieu des sables, et l’on admire les efforts qu’ont eus à faire ses fondateurs [27]. » Mais ce qui lui rend Tombouctou incompréhensible, c’est l’absence de terroir propre : Tombouctou est une ville qui « n’a d’autres ressources que son commerce de sel, son sol n’étant aucunement propre à la culture ». « Si les flottilles venant à Cabra étaient arrêtées en route par les Touaricks, les habitants de Tombouctou seraient dans la plus affreuse disette. […] Ces malheureux habitent un sol entièrement stérile, qui fournit à peine un peu de fourrage pour leurs chameaux [28]. » Caillié le terrien ne peut pas comprendre qu’une ville ait pu bâtir sa prospérité sur un commerce de transit, trop fragile à ses yeux ; le caractère saisonnier de ce commerce lui échappe. Djenné, la métropole du delta intérieur du Niger, située au cœur d’un terroir agricole fertilisé par les crues, et dont le commerce est plus constant quoique de plus faible amplitude, reste son point de référence ; il dit de Tombouctou : « Je ne la trouvai ni aussi grande ni aussi peuplée que je m’y étais attendu ; son commerce est bien moins considérable que ne le publie la renommée ; on n’y voit pas, comme à Jenné, ce grand concours d’étrangers venant de toutes les parties du Soudan. J’étais surpris du peu d’activité, je dirais même de l’inertie qui régnait dans la ville. […] La chaleur étant excessive, le marché ne se tient que le soir, vers trois heures […] mais ce marché est presque désert, en comparaison de Jenné [29]. »

19 Il concède pourtant l’existence d’un commerce fructueux à Tombouctou (« Il y a […] beaucoup de Maures établis à Tombouctou ; ils ont les plus belles maisons de la ville. Le commerce les enrichit tous très promptement. ») et ne manque pas d’énumérer les marchandises sur lesquelles il porte : tabac, marchandises d’Europe parmi lesquelles des fusils français, sel de Taoudéni, ivoire, plumes d’autruche, sans compter les denrées alimentaires déjà mentionnées, venues par flottille de Djenné à Kabara. Il reconnaît finalement que « Tombouctou peut être considéré comme le principal entrepôt de cette partie de l’Afrique [30] », mais, dans la mesure où il ne décèle pas une grande activité autour de cet entrepôt, il le présente comme un lieu de stockage de marchandises dormantes. Chez Caillié, la déception face à la Tombouctou réelle n’est finalement pas surmontée. Et, bien qu’il ait déclaré Tombouctou objet de tous ses efforts, il lui préféra toujours Djenné, et s’en souvint au moment de donner un titre à son ouvrage : Voyage à Temboctou et à Jenné dans l’intérieur de l’Afrique.

20 Ce qui avait étonné Caillié devient au contraire un élément structurant des descriptions de Tombouctou à partir de Barth : la situation de Tombouctou, entre Sahara et Soudan, au point de rencontre des pistes caravanières venues du Nord et du réseau de navigation du delta intérieur du Niger, est alors considérée comme le principal facteur d’explication de la prospérité de la ville. On ne s’étonnera plus désormais de voir une ville fonder son existence sur un commerce lointain. Dès lors, la description que propose Barth de Tombouctou parvient à la fois à en restaurer l’image et à en prendre en compte les spécificités.

Le mythe historique

21 Comme en témoigne la gravure qui montre la partie nord de la ville vue de la terrasse de la maison du voyageur [31], Tombouctou retrouve avec Barth l’apparence d’une vraie ville, aux « rues bordées de maisons alignées et jointives [32] », même si elle n’a pas tout à fait l’animation d’une grande métropole commerciale comme Kano [33]. En décrivant l’aspect général de la ville, Barth s’étonne de l’inexactitude de l’image qu’en a donnée Caillié avant lui. L’un des reproches formulés par Barth à l’encontre de Caillié est d’avoir fait de Tombouctou une ville « ordinaire », bien qu’il admette que Tombouctou ne devait guère être florissante au moment de la visite du Français, qui eut lieu peu de temps après la conquête de la ville par les Peuls, — et que Caillié, dont la qualité d’explorateur et de chrétien devait rester clandestine, n’eut pas la possibilité de lever lui-même, sur place, une esquisse des lieux.

22 Barth établit ce qui fait l’identité de Tombouctou : elle n’a jamais été la capitale d’un empire, elle n’a jamais joué un rôle politique de premier plan, contrairement à ce qu’on avait longtemps cru : « Nous voyons prouvé à l’évidence […] que c’est à tort que cette ville a été considérée en Europe comme le centre politique et la capitale d’un grand État nègre, attendu qu’elle n’a joué à aucune époque, et surtout à celle de l’antique splendeur du pays, qu’un rôle politique tout à fait secondaire. » [34] C’est une cité dont la prospérité appartient essentiellement au passé, car son activité commerciale a été très perturbée par l’environnement politique au xixe siècle. Barth mène une enquête historique sur Tombouctou et sa région, comme il le fait pour toutes les régions traversées, et collecte des manuscrits arabes datant des époques songhaï ou marocaine (xvie et xviie siècles). Insistant sur le caractère arabe de Tombouctou, exagérant sans doute l’influence marocaine, il la nomme medina[35]. On touche là à un autre aspect du mythe, en partie endogène : l’image d’une Tombouctou connaissant à la fois l’apogée de sa prospérité et de l’arabisation de la culture, du mode de vie de ses habitants, est très présente dans les manuscrits des lettrés du xviie siècle [36]. Ce regard qu’ils ont porté sur leur ville et sur eux-mêmes a ensuite été repris, contribuant ainsi à en faire une caractéristique intemporelle de la ville. Avec Barth, on quitte ainsi l’univers du mythe géographique : la splendeur de Tombouctou n’est pas une illusion, mais elle appartient au passé. Elle ne se laisse saisir que par le biais de l’enquête historique. De géographique, le mythe est devenu historique.

Fig. 2

« Tumbutu. La partie nord de la ville vue de la terrasse de la maison du voyageur »

Fig. 2

« Tumbutu. La partie nord de la ville vue de la terrasse de la maison du voyageur »

(Heinrich Barth, Reisen und Entdeckungen in Nord- und Zentral -Afrika, Gotha, J. Perthes). Cliché BNF.

Un bien cher souvenir

23 Lenz, qui se démarque peu de Barth lorsqu’il donne des informations générales sur la ville, rend à son séjour à Tombouctou un hommage qui fourmille d’impressions sensibles. Il décrit la « jolie maison » qui lui a été attribuée, la « nourriture abondante et saine » offerte par son protecteur : « Peut-être sera-t-on surpris d’apprendre qu’on trouve dans cette ville d’excellent pain de froment, de bon beurre, du miel et des viandes variées [37]… » Il énumère les mets qui composent l’ordinaire des repas (couscous, viande, riz, pain) et en tire des observations beaucoup plus générales : « Par ce menu on peut voir que Tombouctou est un grand centre de civilisation au milieu de la population noire du Soudan et des Touareg du désert », bref, « on ne peut méconnaître à Tombouctou un certain bien-être [38] ». Il témoigne de l’agrément que constitue la présence d’animaux divers (autruches, chevaux, bœufs à bosse), parmi lesquels les oiseaux, dont Caillié soulignait au contraire l’absence : « C’est un joli spectacle que ce monde d’oiseaux, quand on vient d’une longue traversée du désert [39] ». Le départ est encore l’occasion pour Lenz de faire un bilan positif de son séjour dans la ville : « Je quittai Tombouctou, qui m’était déjà devenu bien cher, après y avoir passé dix-huit jours seulement. […] Les adieux qu’on nous fit lors de notre départ de Tombouctou eurent un caractère absolument cordial et même grandiose […] Nulle part un mot hostile ou un visage haineux [40]. »

24 On est bien loin du séjour de tristesse et de désolation que décrivait Caillié. Si Tombouctou peut désormais être considérée comme une étape très agréable, c’est qu’elle est envisagée relativement aux espaces saharien et soudanais à la jonction desquels elle se situe, et dont elle semble à la fois cumuler les avantages et éviter les inconvénients. Cette relativité exclut le témoignage de Lenz de la catégorie du mythe. À la différence de ses prédécesseurs, Lenz affirme n’avoir gardé « qu’un bon souvenir [41] » de Tombouctou. Aussi pourrait-on se demander s’il ne propose pas les éléments d’un discours touristique, dans la mesure où il fait référence aux éléments essentiels d’un voyage d’agrément : un peu d’histoire, mais surtout bon logement, bonne chère et des habitants accueillants. Cependant, par l’insistance sur les dangers traversés, l’ensemble du récit relève du registre de l’exploration. On saisit aussi chez Lenz un tournant, sensible dans la banalisation de la ville qu’opère le ton général de la description où, plus qu’une ville, c’est un séjour qui est décrit, comme expérience non pas unique, mais presque familière. Lenz ne peut se résoudre, cependant, à faire de la ville un simple souvenir parmi d’autres : au moment de donner un titre à son récit, il choisit de faire de Tombouctou, où il n’a séjourné que dix-huit jours, la ville éponyme d’un voyage qui dura presque deux ans. Les géographes ne s’y trompent pas qui, dans la foulée de Lenz, révisent à la baisse les chiffres qu’ils donnent pour évaluer la population de Tombouctou. Élisée Reclus évoque « la prospérité relative » que Tombouctou a su conserver dans l’adversité : nette rupture avec le discours du mythe.

Du mystère au mythe colonial

25 Dubois, après avoir ostensiblement mis à mort le mythe de Tombouctou, parlant de « mirage » et d’« illusion », procède à une certaine résurrection et à la mise en abîme du mythe. Après avoir décrit et décrié une ville délabrée, il nous conduit à l’intérieur de la maison qu’il occupe, où il reçoit nombre d’habitants dont il recueille les récits. C’est l’histoire de Tombouctou qui vient à lui, en ressuscite la splendeur, en explique la dégradation. Mais Dubois ne se contente pas d’opérer le transfert d’un mythe géographique à un mythe historique : il affirme que les habitants, en proie aux pillages et aux exactions des Touareg, ont résolu de cacher délibérément leurs richesses et leur prospérité sous des dehors misérables. Ainsi les maisons, délabrées à l’extérieur, sont-elles très confortables, presque luxueuses à l’intérieur ; les habitants ne sortent qu’en boubous élimés pour ne pas attirer sur eux l’attention et l’envie, tandis qu’ils gardent leurs riches vêtements pour l’intérieur. Le commerce lui-même se fait sans qu’il n’en paraisse rien à l’extérieur, à la nuit tombée, et des maisons en apparence ruinées abritent en fait de riches magasins. D’après Dubois, la ruine, plus qu’une simple apparence, est un maquillage que la ville s’est imposé. Elle se cache aux regards non initiés, elle est un secret bien gardé, le secret que Dubois a compris et entreprend de nous révéler, et qui l’autorise à appeler Tombouctou « la Mystérieuse » : « J’étais initié au secret de Tombouctou. La désastreuse vision de l’arrivée m’était expliquée. Avec mes narrateurs pour guides je commençai alors à parcourir les mêmes rues et les mêmes places que lors de mon arrivée. Ils me montrèrent de plus près les petites masures cubiques et les grandes maisons croulantes, me firent ouvrir les portes bardées et closes, me révélèrent tout ce que cachaient les décors de ruines [42]. »

26 Par deux fois, Dubois aura donc été le jouet d’une illusion, de grandeur la première fois, de ruine la seconde. Pourtant, il ne considère pas la réalité comme une succession de décors de théâtre. Ce qu’il met implicitement en cause, c’est sa perception défectueuse de voyageur trop prompt à se contenter d’une appréhension superficielle de la réalité, pour avoir eu la présomption de vouloir la maîtriser trop rapidement : la première fois il la voyait de trop loin ; la seconde fois, croyant être parvenu dans Tombouctou, il n’en voyait encore que l’extérieur. C’est le point de vue du voyageur qui est en cause. La réalité, selon Dubois, exige de celui qui veut l’atteindre une accoutumance, une accommodation du regard, mais aussi un détour par l’intérieur des maisons et l’intimité des gens, qui permet d’adopter le point de vue des habitants. Ce détour passe par l’écoute de récits, par une transmission orale.

Fig. 3

Extrait de Félix Dubois, Tombouctou la mystérieuse. Paris, 1897, p. 361-362

Fig. 3

Extrait de Félix Dubois, Tombouctou la mystérieuse. Paris, 1897, p. 361-362

27 Même si l’on fait la part de la mise en scène à laquelle Dubois soumet son expérience et des procédés de dramatisation qui président à l’effeuillage ostentatoire de Tombouctou, qu’il dépouille successivement de tous ses voiles jusqu’à en atteindre l’intimité, il semble qu’il faille dans une certaine mesure prendre au sérieux son discours. Le parcours que nous propose Dubois, qui va de l’extérieur à l’intérieur de la ville, s’accompagne d’un passage du mythe exogène de « Tombouctou la Grande » à un mythe endogène révélé par les habitants au terme d’une initiation. Et Dubois a beau forcer le trait en parlant de Mystère et de Révélation, il n’en reste pas moins qu’il est venu puiser à la source du mythe, non pour le faire disparaître devant une pâle réalité, mais pour le revivifier.

28 Pourtant, Dubois ne se contente pas de s’approprier le mythe endogène. Il éprouve aussi le besoin d’en expliquer l’existence. Il met en abîme le récit de l’approche et de l’arrivée à Tombouctou, en les transposant dans le passé (voir encadré, fig. 3). Ce voyage dans le temps nous plonge aux racines du mythe en faisant revivre le temps où le mythe était réalité. En jouant sur l’opposition entre le désert et la ville, entre la mort et la vie [43], entre le néant et le tout, Dubois fait de Tombouctou, dans l’impression du voyageur maghrébin, un concentré de vie, la ville où tous les désirs accumulés durant la traversée du désert seront brusquement satisfaits, en une secousse quasiment orgasmique. Tombouctou est le mirage qui, éprouvé par tous les sens à la fois, devient réalité. C’est bien dans l’impression de satiété de tous les sens et de toutes les aspirations que réside pour Dubois l’origine du mythe, puisqu’il nous dit que cette impression si forte exigeait du voyageur qu’il rendît hommage à la ville qui l’avait provoquée par une célébration de tous les instants, une sorte de culte constitué de récit. Dubois en propose donc dans ce texte une genèse, en même temps qu’il établit, par le truchement de ce voyageur venu de Tripoli, de Tunis ou d’Alger, un lien entre mythe endogène et mythe exogène.

29 Mais cette fiction a une autre fonction. Elle fait aussi le lien entre le passé et un futur dont Dubois espère la résurrection de la splendeur de Tombouctou. Le voyage dans le passé trouve son symétrique dans une évocation du futur. L’ouvrage de Dubois ne comporte ni départ ni bilan ; Dubois ne semble pas quitter Tombouctou, il lui interdit de devenir un souvenir. Puisque la structure de l’ouvrage emmène le lecteur, par étapes successives, jusqu’au cœur de Tombouctou, qui n’est véritablement atteint que par une plongée dans le passé, la seule ouverture possible est une envolée vers l’avenir. Dubois confie cet avenir à la puissance coloniale qui vient de prendre possession de la ville, la France, à laquelle il assigne la mission de réparer ce qui a été détruit. Il croit d’ailleurs vivre « les premiers jours de l’ère nouvelle dans laquelle est entrée Tombouctou » : « Le long cauchemar Touareg se dissipe lentement. On commence à rebâtir les maisons, à entrebâiller les portes, à porter de nouveau les belles robes brodées [44]. »

30 La présence de la France, dépeinte comme une puissante mais bienveillante protection, rend déjà inutile le Mystère dont se parait Tombouctou. Elle efface le mythe endogène. Mais « l’ère nouvelle » projetée par Dubois efface aussi le mythe européen, d’origine maghrébine, de la Grande Tombouctou du passé. Le projet de dépasser la splendeur du passé en imposant à la ville les marques du génie européen, que Dubois assigne à la puissance coloniale, passe d’abord par la résurrection de la ville des jardins, au moyen de travaux d’aménagement hydrauliques. Car, pour Dubois, l’arrivée de l’eau s’accompagnera du retour de la civilisation : « Une fraîche ceinture entourera la ville de toutes parts. Elle aura retrouvé ses jardins, ses verdures, ses palmiers d’autrefois […] Striée d’avenues ombragées, elle sera une plaisante et active cité cosmopolite […] [45] » Tombouctou retrouverait alors la fonction que lui dictait sa position géographique, une fonction de port du Sahel aux portes du désert, de « trait d’union entre le monde blanc et le monde noir ». Simplement, dans cette nouvelle configuration, le « monde blanc » est celui de l’Europe, qui a supplanté le Maghreb. Très confiant dans la maîtrise technique détenue par ses compatriotes, Dubois imagine même un nouveau moyen d’arriver à Tombouctou, qui efface complètement la caravane transsaharienne qu’il plaçait à l’origine du mythe : « Le Sahara aura été dompté. Une chaîne d’acier lui aura été imposée dont les anneaux seront des rails. Les locomotives électriques auront permis de réaliser le chemin de fer transsaharien. Avec une vitesse de foudre les convois circuleront entre Alger et Tombouctou, les flots de la Méditerranée seront unis aux flots du Niger. »

31 Ce mode de traversée du désert qui renouvelle l’approche de Tombouctou, ce chemin de fer transsaharien dont on ne posera pas la première traverse, constitue le noyau du nouveau mythe destiné à remplacer l’ancien. C’est tout un système d’appréhension de l’espace et du temps qui se met ainsi en place, niant les obstacles que pourraient constituer les hommes, l’espace et les éléments, utilisant les ressources de la technique dans le but de relier entre elles les possessions françaises d’Afrique [46] au nom de la restauration d’une splendeur passée. La nouvelle représentation de Tombouctou, dont Dubois se fait le héraut, peut être considérée, dans la mesure où elle adhère à ce système, comme un mythe colonial de Tombouctou. D’ailleurs, il propose de « réparer de douloureuses injustices » en célébrant par des monuments les militaires et les explorateurs qu’il considère comme les pères fondateurs de cette nouvelle Tombouctou [47]. Le mythe est d’emblée pourvu de son propre système d’autocélébration, de ses lieux de mémoire. Et Dubois d’achever son ouvrage sur une phrase qui opère la fusion de tous les mythes de Tombouctou en un seul, le mythe colonial d’une ère nouvelle : « Dans le lointain des temps futurs, je vois Tombouctou apparaître superbe, lettrée, riche, Reine du Soudan, telle qu’elle se dessine dans le lointain des temps passés, telle que son panorama donne l’illusion au voyageur des temps présents. »

Conclusion

32 Chacun de ces voyageurs aura finalement illustré à sa façon l’articulation entre mythe et découverte géographique. Au-delà des différences de sensibilités et des inflexions apportées par le contexte, on aura relevé, en privilégiant le moment de l’apparition de l’objet mythique aux yeux du voyageur, quelques constantes. La première, qui relève de la perception, ou plus exactement d’un trouble qui semble l’affecter, est cette cécité généralisée, cette incapacité à voir l’objet tant attendu lorsque, enfin, il se présente à la vue [48]. La seconde, qui semble faire écho à ce trouble tout en le transposant dans l’ordre de l’affectif, est la déception généralement ressentie par le voyageur lorsqu’il parvient à voir un objet qui ne se présente pas sous la forme attendue. Et l’on peut se demander si la cécité momentanée que subissent les voyageurs n’est pas plutôt l’effet anticipé de cette déception : tout se passe comme si le voyageur, qui arrive porteur d’une certaine représentation de Tombouctou, se trouvait dépourvu d’image parce que l’objet qu’il a soudain sous les yeux ne peut être saisi à travers cette représentation. Il lui faut alors du temps pour en prendre acte et réorganiser ses observations selon un point de vue unificateur qui lui sera propre.

33 Mais le fait que la déception se présente comme une constante pose aussi le problème de sa réédition : si la déception du voyageur, qui s’était produite une première fois en 1828, se reproduisit en 1853, puis en 1880 et encore en 1896, cela signifie que personne n’avait rien appris sur Tombouctou entre-temps. On sait pourtant que chacun des voyageurs avait lu ses prédécesseurs ; mais il semble que l’accumulation de connaissances objectives sur la ville, ses formes architecturales, son histoire, ses habitants, ne soit pas parvenue à imposer au cours du siècle une nouvelle image de Tombouctou. L’émergence d’un discours scientifique ne sonne pas le glas de l’attente provoquée par la représentation mythique, décidément indétrônable, alors que le sentiment de déception, partagé par tous les voyageurs, ne peut se frayer un chemin dans la mémoire collective et ébranler le mythe trop solidement ancré dans les représentations : aucun voyageur ne prend en compte la déception de ses prédécesseurs.

34 Au-delà du mythe, les discours dont Tombouctou est le support suggèrent aussi une évolution des pratiques et des conceptions de l’espace africain au cours du xixe siècle : tandis que l’on rencontre essentiellement chez Caillié un espace du parcours, où ce qui compte est la traversée d’une fraction de continent, celui de Barth est un espace à comprendre, ce qui implique qu’on lui restitue, dans une démarche quasi archéologique, sa profondeur chronologique ; l’espace de Lenz est celui d’une rencontre, qui se joue dans le moment partagé avec les habitants ; celui de Dubois, enfin, est l’objet d’une appropriation, autant matérielle que symbolique.

35 Si l’on jette un rapide regard à ce que devient la représentation de Tombouctou au xxe siècle, on voit encore à l’œuvre la dialectique de la déception et de la résurrection du mythe. Paul Morand, en 1928, ne trouve pas de mots assez durs pour dire sa déception, décrit « une ville aplatie », « trois mosquées aux pylônes de nougat gris, piqués de bois comme un fétiche de clous », « partout des ruines, des déchets, des ordures », et se demande « où sont les coupoles rutilantes, les sacs de poudre d’or et d’ivoire des caravanes dont parlaient les livres ». Albert Londres lui réplique : « Qu’ont donc les Blancs contre la cité fameuse ? Tous y sont allés pour voir le mystère et paraît-il ne l’ont point vu. Le mystère ne se voit pas, mes amis. Il se sent. Il s’exprime sans voix, comme un sourd-muet. » Et l’on ne peut se défaire de l’impression de revenir à notre point de départ. On retrouve là un mythe « mutique », qui ne peut pas rendre compte de lui-même, mais qui a survécu à un siècle d’explorations et de voyages. L’expérience n’a donc pas aboli le mythe. Elle ne l’a pas altéré. Il semble même que le recours au mythe ait joué le rôle d’un schème cognitif, capable de modeler l’expérience.

Bibliographie

Références

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  • Tuan Y.-F. (1979). Space and Place. The Perspective of Experience. Minneapolis : University of Minesota Press, 2nd ed.

Notes

  • [1]
    Ce travail a été mené à bien dans le cadre de l’équipe EHGO (UMR 8504, Géographie-cités), à laquelle j’étais associée en tant que doctorante au moment de son élaboration. Il a fait l’objet d’une contribution au Symposium organisé par la commission d’Histoire de la pensée géographique de l’Union géographique internationale (Yaoundé, janvier 2000), sur le thème « Mythe et connaissance scientifique dans l’histoire de la pensée géographique ».
  • [2]
    J.-L. Rivière, Cartes et Figures de la Terre. Paris : Centre Georges Pompidou, 1980, p. 135, cité dans Palsky, 1995, p. 134.
  • [3]
    Caillié, 1830, rééd. 1965, p. 2.
  • [4]
    Debarbieux, 1995.
  • [5]
    Signalons pour mémoire que René Caillié fut le premier explorateur qui se soit rendu à Tombouctou dans le cadre d’un projet délibéré de découverte et en soit revenu vivant. Peu avant lui, en 1826, le britannique Laing parvint à s’y rendre, mais il fut tué à la sortie de la ville, victime d’une embuscade. Cf. Monod, 1977, ainsi que Pitte, 1973.
  • [6]
    Barth se signale par une formation d’historien et de géographe acquise à l’université de Berlin et par la maîtrise de nombreuses langues indigènes, acquise pour l’essentiel sur le terrain, au cours d’un voyage qui dura cinq ans. Il se joint à l’expédition du pasteur britannique Richardson, qui se proposait de convaincre les chefs d’États africains de renoncer à la traite transsaharienne. De retour en Europe en 1855, Barth est le seul survivant de cette expédition partie de Tripoli fin 1849. Il a traversé le Sahara, visité l’Aïr, les États voisins du lac Tchad, l’Adamawa, l’empire de Sokoto, les États de la boucle du Niger. Il met à profit sa connaissance des langues indigènes et sa familiarité avec les lettrés et les chefs d’État soudanais pour rapporter une ample moisson d’observations touchant à la géographie, à l’histoire, à l’ethnographie, à la botanique des régions situées entre les bassins du lac Tchad et du Niger. Le récit de voyage de Barth sera cité ici d’après l’édition allemande (Reisen und Entdeckungen in Nord- und Zentral-Afrika, …, Gotha, J. Perthes, 5 vol.) et traduit par mes soins, ou, plus rarement, d’après l’édition française (Voyages et découvertes dans l’intérieur de l’Afrique septentrionale et centrale pendant les années 1849 à 1855, Paris, 1860, 4 vol., traduit par P. Ithier) très lacunaire.
  • [7]
    Dubois a déjà l’expérience du reportage en Afrique : en 1890, il avait suivi les travaux de la mission Brosselard-Faidherbe, chargée d’examiner la possibilité de construire une voie de chemin de fer en Guinée. En 1896, le journal Le Temps l’envoie à Tombouctou, où il reviendra encore dix ans plus tard. Chacun de ces voyages donne lieu à la publication d’un ouvrage. On a puisé ici dans : Tombouctou la Mystérieuse, Paris, 1897.
  • [8]
    Barth, édition allemande, t. IV, p. 414.
  • [9]
    Jackson, 1797. Cet ouvrage retrace le récit d’un commerçant marocain qui a visité ces régions en 1787.
  • [10]
    Barth, éd. allemande., t. IV, p. 442.
  • [11]
    Vivien de Saint-Martin, 1894 : article « Tombouctou »
  • [12]
    Élisée Reclus, 1887, p. 571.
  • [13]
    Caillié, 1830, rééd. 1965, t. I, p. 216.
  • [14]
    Lenz, 1881, p. 213.
  • [15]
    Dubois, 1897, gravure p. 248-249, intitulée Panorama extérieur de Tombouctou.
  • [16]
    Caillié, 1830, réed. 1965, t. II, p. 300-301.
  • [17]
    Idem, ibidem, p. 301.
  • [18]
    Id., Atlas de planches, pl. 6, voir fig. 1.
  • [19]
    Barth, édition française, t. III, p. 335 ; édition allemande, t. IV, p. 412. Il est d’ailleurs assez remarquable que le traducteur français ait cru bon d’ajouter « Je vis enfin apparaître à mes regards la ville de Tombouctou », alors que Barth ne fait pas du tout appel à la vue pour décrire le moment, mais dit simplement : « Ainsi nous approchions de la ville, mais le ciel étant très couvert… »
  • [20]
    Barth, édition allemande, IV p. 447.
  • [21]
    Lenz, 1886, t. II, p. 119.
  • [22]
    Lenz, 1881, p. 215.
  • [23]
    Dubois, 1897, p. 239.
  • [24]
    Idem, p. 240. Voir aussi la gravure intitulée «Une rue à l’entrée de Tombouctou».
  • [25]
    Idem, p. 244-245.
  • [26]
    Dubois, 1897, p. 245.
  • [27]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 301.
  • [28]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 313.
  • [29]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 303.
  • [30]
    Caillié, op. cit., t. II, p. 309.
  • [31]
    Voir gravure (fig. 2).
  • [32]
    Éd. allemande, IV, p. 451.
  • [33]
    C’est à cette métropole de l’Empire de Sokoto, au Nigeria actuel, et non pas à Djenné, que Barth attribue ce rôle.
  • [34]
    Éd. française, IV, p. 30 ; éd. allemande, IV, p. 441.
  • [35]
    Coquery-Vidrovitch, 1993, p. 108-109 et 123.
  • [36]
    C. Coquery-Vidrovitch signale que ces chroniques, les Tarikhs, ont été écrites à un moment où l’activité commerciale de Tombouctou était entrée dans une phase de déclin, ce qui a pu contribuer à faire naître la tentation de célébrer le « souvenir des fastes d’antan », dont la ville ne retrouva jamais l’éclat : op. cit., p. 124-126 et note 53.
  • [37]
    Lenz, 1881, p. 217.
  • [38]
    Lenz, 1887, t. 2, p. 128-129.
  • [39]
    Lenz, 1887, t. 2, p. 129.
  • [40]
    Lenz, 1887, t. 2, p. 176-177.
  • [41]
    Lenz, 1881, p. 217.
  • [42]
    Lenz, 1881, p. 279.
  • [43]
    Il y aurait tout un commentaire à faire sur cette représentation du désert comme lieu de mort. Cette image constitue en effet un cliché passablement éculé au moment où Dubois écrit ces lignes, alors que de grands voyageurs « sahariens », comme Charles de Foucault par exemple, ont entrepris de renouveler l’image du désert.
  • [44]
    Lenz, 1881, p. 414.
  • [45]
    Lenz, 1881, p. 417, ainsi que la citation suivante.
  • [46]
    Ce souci est une constante qui préside aux vues géopolitiques de la France en Afrique au moment du partage colonial.
  • [47]
    Lenz, 1881, p. 418, comme la citation suivante.
  • [48]
    Bernard Lepetit (1999) remarquait de la même façon à propos de Volney la confusion des sens et l’émotion qui assaille le voyageur lorsque Alexandrie se présente à lui pour la première fois.
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