Notes
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[*]
Élisabeth DÉCULTOT est Directrice de Recherche au CNRS, UMR 8547, « Pays germaniques : histoire, culture, philosophie », École Normale Supérieure, 45, rue d’Ulm F-75005 PARIS et Kissinger Platz 2, D-14199 BERLIN ; courriel : elisabeth.decultot@ens.fr
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[1]
J. J. Winckelmann : Geschichte der Kunst des Alterthums, hrsg. von A. H. Borbein, T. W. Gaehtgens, J. Irmscher und M. Kunze, Mainz : Philipp von Zabern Verlag, 2002, Vorrede, S. X sq. (la pagination de la Geschichte der Kunst indiquée ici comme dans la suite du présent article correspond à celle de la première édition de 1764).
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[2]
Cf. Michèle Duchet : Anthropologie et histoire au siècle des Lumières : Buffon, Voltaire, Rousseau, Helvétius, Diderot, Paris : Albin Michel, 31995 (11971).
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[3]
J. J. Winckelmann : Gedancken über die Nachahmung der Griechischen Wercke in der Mahlerey und Bildhauer-Kunst (11755), in : J. J. Winckelmann : Kleine Schriften. Vorreden. Entwürfe, hrsg. von Walther Rehm, Berlin : De Gruyter, 1968, S. 27-59, cit. p. 31-32.
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[4]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 23.
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[5]
J. J. Winckelmann : Erläuterung der Gedanken von der Nachahmung der griechischen Werke in der Malerey und Bildhauerkunst ; und Beantwortung des Sendschreibens über diese Gedanken (11756), in : Kleine Schriften. Vorreden. Entwürfe (note 3), p. 97-144, cit. p. 100.
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[6]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 21.
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[7]
Gedancken über die Nachahmung (note 3), p. 32.
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[8]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 130.
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[9]
Édouard Pommier : « Winckelmann et la vision de l’Antiquité classique dans la France des Lumières et de la Révolution », in : Revue de l’art 83 (1989), p. 9-20 ; Id. : L’Art de la liberté. Doctrines et débats de la Révolution française, Paris : Gallimard, 1991.
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[10]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 132-133.
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[11]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 78.
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[12]
Cette rubrique, constituée d’extraits de Strabon, figure dans les Collectanea ad historiam artis que Winckelmann rassembla en vue de la rédaction de sa Geschichte der Kunst des Altertums (Bibliothèque Nationale de France, Paris, Département des manuscrits, Fonds allemand, vol. 57, fol. 215 v° ; dans la suite du présent article, les références à ce fonds de manuscrits sont signalées par l’abréviation : BN All.). On trouve également dans les notes de lecture de Winckelmann une rubrique intitulée : « Liebe der Griechen zu ihrem Vaterlande » contenant des extraits de Pausanias (BN All., vol. 57, fol. 203). Pour l’utilisation de ces extraits, cf. par exemple Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), S. 137. Pour une analyse plus précise du rôle de ces notes de lecture dans l’œuvre de Winckelmann, nous nous permettons de renvoyer à notre ouvrage, É. Décultot : Johann Joachim Winckelmann. Enquête sur la genèse de l’histoire de l’art, Paris : Presses Universitaires de France, 2000 (tr. allemande : Untersuchungen zu Winckelmanns Exzerptheften. Ein Beitrag zur Genealogie der Kunstgeschichte im 18. Jahrhundert, übers. von Wolfgang von Wangenheim und René Mathias Hofter, Ruhpolding : Verlag Franz Philipp Rutzen, 2004).
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[13]
Winckelmann tire de la lecture de De l’Esprit des Lois une dense série d’extraits (BN All., vol. 69, fol. 39-40 v°).
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[14]
BN All., vol. 69, fol. 40 (Montesquieu : De l’Esprit des lois, éd. par V. Goldschmidt, 2 vol., Paris : Garnier Flammarion, 21993-1994 [11979], vol. 1 p. 185).
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[15]
BN All., vol. 69, fol. 40 ; De l’Esprit des lois (note 14), vol. 1, p. 189. Parmi les méfaits du despotisme, Winckelmann note encore : « La pauvreté et l’incertitude des fortunes, dans les États despotiques, y naturalisent l’usure » (BN All., vol. 69, fol. 40 ; De l’Esprit des lois [note 14], vol. 1, p. 190).
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[16]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 130.
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[17]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 19-20.
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[18]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 19, 22.
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[19]
Pour ces extraits des Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture de Jean-Baptiste Dubos, cf. BN All., vol. 61, fol. 48-61 v° et vol. 72, fol. 192. Winckelmann prend en note en Allemagne (à en juger par le filigrane et par la qualité du papier) l’ensemble des huit sections que Dubos consacre à la question des climats : Jean-Baptiste Dubos : Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture (11719, 21733, 31740), éd. par D. Désirat (d’après l’édition de 1740), Paris : École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, 1993, p. 218-274 (sections 13 à 20). L’ouvrage ne fut traduit qu’ultérieurement en allemand : J.-B. Dubos : Kritische Betrachtungen über die Poesie und Mahlerey, aus dem Französischen des Herrn Abtes Dü Bos, übers. von G. Funcke, 3 Bde., Kopenhagen 1760-1761.
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[20]
Si la lecture de De l’Esprit des lois a été effectivement déterminante pour la pensée politique de Winckelmann, comme nous l’avons montré, il faut souligner que rien dans les cahiers d’extraits ne permet de dire qu’il ait seulement lu les réflexions de Montesquieu sur la théorie de climats. En revanche, il a pris celles de Dubos en note.
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[21]
BN All., vol. 61, fol. 57 v°, 58 v° ; Réflexions critiques (note 19), p. 250, 264.
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[22]
Sur les pays froids (Groenland), cf. Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 19-20 ; sur les pays chauds (Perse, Égypte), ibid., S. 25-26 ; sur les régions tempérées (Grèce, Asie mineure), ibid., p. 23, 25.
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[23]
Réflexions critiques (note 19), p. 257.
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[24]
Réflexions critiques (note 19), p. 257. Extrait recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 61, fol. 58.
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[25]
Réflexions critiques (note 19), p. 258. Extrait recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 61, fol. 58.
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[26]
Erläuterung der Gedanken von der Nachahmung (note 5), p. 105. Winckelmann cite en note les récits de voyage de Belon et de Le Brun. Pierre Belon : Observations de plusieurs singularitéz et choses mémorables trouvées en Grèce, Asie et Judée, Paris 1553-1555 ; Corneille Le Brun : Voyages au Levant, c’est-à-dire dans les principaux endroits de l’Asie Mineure, Delft 1700.
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[27]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 21.
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[28]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 83.
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[29]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 4.
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[30]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 78.
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[31]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 68.
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[32]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 5.
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[33]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 8.
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[34]
Shaftesbury est très présent dans la bibliothèque manuscrite de Winckelmann. Cf. BN All., vol. 62, fol. 7 (Characteristics) ; vol. 66, fol. 17-18 v°, 20-21 v°, 30-31 (Characteristics) ; fol. 26 (Letter concerning the Art or Science of Design) ; fol. 33-35 v° (Treatise IV, An Enquiry concerning Virtue or Merit) ; 35 v° (Treatise V, Upon the Moralists, a philosophical Rhapsody) ; fol. 37-43 (Treatise VI, Miscellaneous Reflections). Winckelmann semble avoir lu Shaftesbury à Nöthnitz et à Dresde. Le papier sur lequel il rédige ces extraits porte en effet le filigrane hollandais « I Villandry », spécifique de cette période.
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[35]
BN All., vol. 66, fol. 40 v° (extrait de Shaftesbury, Treatise VI. Miscellaneous Reflections ; les passages en italique correspondent aux passages soulignés par Winckelmann dans le texte manuscrit).
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[36]
Erläuterung der Gedanken von der Nachahmung (note 5), p. 104.
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[37]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 357-360.
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[38]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 365-366.
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[39]
Anne Claude Philippe de Tubières, comte de Caylus : Recueil d’antiquités égyptiennes, étrusques, grecques et romaines, 7 vol., Paris 1752-1767, vol. 1 (1752), p. IX-X. Recopié (jusqu’au mot « Grèce ») par Winckelmann, in : BN All., vol. 67, fol. 46.
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[40]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. VIII.
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[41]
Sur ce « commerce réciproque entre les Égyptiens et les Étruriens », cf. Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. 78 ; recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 67, fol. 46 v°-47.
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[42]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. 54-57, commentaire de la planche XVIII, 1 et 2 ; recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 67, fol. 46 v°.
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[43]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 5 (1762), p. 127.
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[44]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. 117-118.
-
[45]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 4, cité in : J. G. Herder : Kritische Wälder. Älteres Kritisches Wäldchen, in : Id. : Schriften zur Ästhetik und Literatur 1767-1781, hrsg. von Gunter E. Grimm, Frankfurt am Main : Deutscher Klassiker Verlag, 1993, S. 11-55, hier S. 24.
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[46]
Älteres kritisches Wäldchen (note 45), p. 25.
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[47]
Älteres kritisches Wäldchen (note 45), p. 28-29.
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[48]
Älteres kritisches Wäldchen (note 45), p. 30-31.
1Winckelmann est connu comme l’auteur, et même aux yeux de certains comme le premier auteur, d’une histoire de l’art au sens véritable du terme. Que l’art soit le principal sujet de la Geschichte der Kunst des Altertums (1764), nul ne saurait assurément en douter. Pour la première fois en allemand, comme d’ailleurs dans l’ensemble des langues européennes, le mot art au singulier se trouve placé au cœur même du titre d’un livre d’histoire. Dès la préface, Winckelmann confirme cette focalisation en établissant une distinction nette entre sa propre histoire et deux modèles concurrents : celui des Vite qui, dans la tradition vasarienne, prennent non pas l’art mais les biographies d’artistes pour objets, et celui des recherches antiquaires, dépourvues de perspective historique globale et de sensibilité au beau. [1] En élaborant une notion d’art intimement connectée à celle de beau d’une part et fondée sur une périodisation claire des styles d’autre part, la Geschichte der Kunst se veut la première à mériter pleinement le titre d’histoire de l’art.
2Force est pourtant de constater que si l’ouvrage ménage incontestablement une place importante à l’art, il contient aussi de nombreux éléments qui excèdent largement cet objet : les mœurs des Anciens, leur alimentation, leur costume, leur climat, les divers modes de gouvernement des cités grecques ou encore leurs habitudes de commerce font l’objet de très amples descriptions. De fait, Winckelmann conçoit l’art comme la résultante directe d’une multitude de facteurs politiques, sociaux, culturels, anatomiques, physiologiques, climatologiques qui – bien qu’extérieurs aux œuvres d’art au sens strict du terme – doivent à ses yeux impérativement figurer dans toute histoire de l’art véritablement digne de ce titre. Autant qu’un panorama de l’art antique, conçu dans une acception étroite comme une revue des œuvres artistiques ordonnées selon leur style, la Geschichte der Kunst propose donc un tableau des peuples antiques qui frappe par son exhaustivité, sa densité et sa complexité. Winckelmann y fait figurer tous les peuples antiques depuis les Égyptiens jusqu’aux Romains, en passant par les Phéniciens, les Étrusques et les Grecs. Pour chacun de ces peuples, et tout particulièrement pour les Grecs, il examine les divers facteurs qui ont décidé de leur évolution artistique : structures politiques, habitudes culturelles, données naturelles, dispositions physiques et psychologiques. Non content de les décrire un par un, il les compare et esquisse par là une nomenclature des lois qui président à l’évolution générale des peuples. En cela, l’histoire de l’art telle qu’elle s’ébauche à travers la Geschichte der Kunst des Altertums est intimement liée à deux disciplines en cours d’élaboration dans la seconde moitié du xviiie siècle : l’anthropologie et l’ethnologie – deux disciplines dont elle partage non seulement les questionnements, mais aussi les sources. [2]
3L’objet du présent article est d’analyser cette dimension anthropologique et ethnologique de la Geschichte der Kunst des Altertums, un aspect particulièrement complexe et plurivoque de l’œuvre winckelmannienne. Pour dresser son panorama des peuples antiques, Winckelmann mobilise en effet une multitude de facteurs explicatifs, dont l’ordre de priorité n’apparaît pas immédiatement. Cela est notamment vrai du peuple grec, principal objet de son attention en raison de la supériorité artistique qu’il lui prête sur toutes les autres nations de l’Antiquité. Les Grecs doivent-ils l’insurpassable qualité de leur art à leur système politique, essentiellement fondé – chez les Athéniens du moins – sur l’attachement à la liberté et à la patrie ? Ou bien doivent-ils leur excellence artistique à leur respect des dieux, à leur climat tempéré, à leur éducation physique et intellectuelle ou encore aux qualités natives de leur « sang » ? Telles sont les questions centrales auxquelles Winckelmann s’affronte très tôt et fournit une réponse élaborée.
1 – Les caractères du peuple grec : une nomenclature complexe
4Si l’on considère l’ensemble de l’œuvre de Winckelmann, et notamment ses deux principales publications que sont les Gedanken über die Nachahmung der griechischen Werke (1755) et la Geschichte der Kunst des Altertums, les facteurs qui déterminent les caractères du peuple grec sont multiples et de nature très variée. Parmi les principaux facteurs évoqués dans les Gedanken, sa première œuvre publiée, ainsi que dans les annexes qu’il leur adjoint en 1756, Winckelmann commence par évoquer l’influence déterminante des mœurs et de l’organisation sociale sur le peuple grec. Les Grecs se distinguent par l’importance qu’ils accordent aux exercices physiques et à l’émulation dans les jeux corporels (gymnases, jeux olympiques, concours de beauté), au confort des vêtements (étoffes et drapés favorables aux mouvements) ou encore à la nudité – tous éléments qui contribuent à cette exaltation des corps qui leur est propre. [3] À ces caractères sociaux ou sociétaux s’ajoutent des données climatiques, qui tiennent à la situation géographique tempérée de la Grèce. Le climat grec, « à mi-distance entre chaleur et froid », [4] induit une végétation généreuse, propre à une alimentation saine, des corps robustes et développés, des visages réguliers et beaux.
Unter einem so gemässigten, und zwischen Wärme und Kälte gleichsam abgewogenen Himmel spüret die Creatur einen gleich ausgetheilten Einfluß desselben. Alle Früchte erhalten ihre völlige Reife und selbst die wilden Arten derselben gehen in eine bessere Natur hinüber ; so wie bey Thieren, welche besser gedeyen und öfter werfen. Ein solcher Himmel, sagt Hippocrates, bildet unter Menschen die schönsten und wohlgebildetesten Geschöpfe und Gewächse, und eine Uebereinstimmung der Neigungen mit der Gestalt. [5]
6Mais le peuple grec tient aussi son caractère de ses dispositions natives ou encore de son « sang », autrement dit de spécificités biologiques héréditaires qui ressortissent à l’atavisme ethnique. Malgré les métissages, et notamment les contacts avec les populations turques qui ont marqué l’histoire moderne de la Grèce, le « sang grec actuel », insiste Winckelmann, reste « aujourd’hui encore célèbre pour sa beauté ». [6]
Das schöne Geblüt der Einwohner der mehresten Griechischen Inseln, welches gleichwohl mit so verschiedenen fremden Geblüte vermischet ist, und die vorzüglichen Reitzungen des schönen Geschlechts daselbst, sonderlich auf der Insel Scios, geben zugleich eine gegründete Muthmaßung von den Schönheiten beyderley Geschlechts unter ihren Vorfahren, die sich rühmeten, ursprünglich, ja älter als der Mond zu seyn. [7]
8À quoi s’ajoute enfin un facteur politique, qui affleure certes dès les Gedanken über die Nachahmung, mais n’est pleinement évoqué que dans la Geschichte der Kunst : les Grecs ont pour la liberté un attachement spécifique, qualité particulièrement propice à l’éclosion des arts : « In Absicht der Verfassung und Regierung von Griechenland ist die Freyheit die vornehmste Ursache des Vorzugs der Kunst ». [8]
2 – La part de la nature
9Ces divers facteurs, socioculturels, climatiques, biologiques et politiques, paraissent à première vue davantage juxtaposés que logiquement connectés les uns aux autres et pourraient laisser au lecteur pressé l’impression d’une certaine a-systématicité. Pourtant, la nomenclature winckelmannienne des caractères du peuple grec obéit à quelques principes constants, sur lesquels il faut insister. Au premier rang de ces constantes figure ce que l’on pourrait appeler la « naturalisation » de la culture grecque. Parmi les divers facteurs précédemment énumérés (organisation sociale, climat, hérédité ethnique, organisation politique), on chercherait en vain à distinguer clairement ceux qui relèvent des données strictement naturelles et ceux qui relèvent du développement culturel, ou encore ceux que l’on peut considérer comme innés et ceux qui sont à regarder comme acquis. En effet, s’il est bien clair que le climat et l’hérédité ethnique sont sans hésitation à subsumer sous la rubrique des données naturelles, on s’aperçoit bien vite, en y regardant de plus près, que les facteurs en apparence liés à la « culture » ou encore au domaine de l’acquis – les mœurs et le système politique – restent intimement liés pour Winckelmann au domaine de la nature.
10Cela vaut notamment pour son concept de liberté, ce caractère politique qui a tant séduit les révolutionnaires français dans l’œuvre de winckelmannienne et nourri une grande partie de sa réception dans la France du xviiie siècle. [9] Une idée parcourt en effet cette œuvre avec une remarquable régularité : la nation grecque est animée d’un amour fervent pour la liberté, qui seul explique l’épanouissement sans précédent des arts dans cette civilisation. C’est parce que les Grecs ont su protéger et cultiver la liberté que les arts ont atteint chez eux une apothéose inégalée. Rien n’illustre mieux cet axiome que la période florissante de la démocratie athénienne au ve siècle.
Durch die Freyheit erhob sich, wie ein edler Zweig aus einem gesunden Stamme, das Denken des ganzen Volks. […]. Herodotus zeiget, daß die Freyheit allein der Grund gewesen von der Macht und Hoheit, zu welcher Athen gelanget ist, da diese Stadt vorher, wenn sie einen Herrn über sich erkennen müssen, ihren Nachbarn nicht gewachsen seyn können. Die Redekunst fieng an aus eben dem Grunde allererst in dem Genusse der völligen Freyheit unter den Griechen zu blühen ; und daher legten die Sicilianer dem Gorgias die Erfindung der Redekunst bey. [10]
12Winckelmann énumère aussi une série d’exemples négatifs qui corroborent a contrario sa démonstration. Ainsi, les Égyptiens, les Perses et les Phéniciens n’ont pu cultiver les beaux-arts parce qu’ils n’ont connu que des régimes despotiques. [11]
13Dans ses cahiers d’extraits – volumineuse bibliothèque manuscrite dans laquelle Winckelmann consigna sa vie durant ses notes de lecture –, la question de la liberté grecque occupe une place importante, comme le signale par exemple la rubrique « Libertas Græciæ » qui lui est spécifiquement consacrée. [12] Parmi les sources qui ont nourri Winckelmann dans ce domaine figurent non seulement des auteurs antiques, dont notamment Pausanias, mais aussi des auteurs modernes, au premier rang desquels Montesquieu (ill. 1). [13] De façon symptomatique, Winckelmann consigne intégralement dans ses cahiers d’extraits le chapitre de De l’Esprit des lois intitulé « Idée du despotisme », qui tient en cette phrase : « Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre au pied, et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique ». [14] Ou encore il recopie cette évocation des crimes des despotes de l’ancienne Perse dans De l’Esprit des Lois : « Artaxerxès fit mourir tous ses enfants pour avoir conjuré contre lui ». [15] Les tyrans de l’Égypte ou de la Perse ancienne mentionnés dans la Geschichte der Kunst ne sont pas sans présenter quelque parenté avec les tyrans antiques ou modernes décrits par Montesquieu.
14Mais si la Geschichte der Kunst porte la marque d’une pensée politique héritée de Montesquieu, on ne saurait l’y réduire. Pour Winckelmann en effet, l’ordre de la liberté n’est politique (au sens de culturel et d’acquis) qu’en apparence, car au fond, l’homme grec ne devient pas libre, il naît libre. Il ne conquiert par sa liberté par l’émancipation volontaire de la raison et la construction d’un régime politique adéquat, il la possède de naissance – quelle que soit la forme de gouvernement sous laquelle il vit. La preuve en est que sous les régimes aristocratiques ou oligarchiques qui précédèrent l’avènement de la démocratie, l’esprit natif de liberté dominait déjà la Grèce, et qu’il continua de survivre sous le règne des tyrans. Pour Winckelmann, l’équation Grèce-liberté est indépendante de la nature du régime politique. Elle vaut aussi bien pour le siècle de Périclès que pour les périodes des gouvernements non démocratiques.
Die Freyheit hat in Griechenland allezeit den Sitz gehabt, auch neben dem Throne der Könige, welche väterlich regiereten, ehe die Aufklärung der Vernunft ihnen die Süßigkeit einer völligen Freyheit schmecken ließ, und Homerus nennet den Agamemnon einen Hirten der Völker, dessen Liebe für dieselben, und Sorge für ihr Bestes anzudeuten. Ob sich gleich nachher Tyrannen aufwarfen, so waren sie es nur in ihrem Vaterlande, und die ganze Nation hat niemals ein einziges Oberhaupt erkannt. [16]
Notes de lecture manuscrites de Winckelmann, tirées de: Montesquieu: De l’Esprit des lois, Bibliothèque Nationale de France, Paris, Département des manuscrits, Fonds allemand, vol. 69, fol. 39
16La démocratie grecque du ve siècle n’est en somme que l’actualisation forte, organisée en système politique cohérent, d’un caractère atavique, instinctif, originel de la Grèce : l’homme grec, par nature, aime la liberté.
17Si la nature entre donc pour une part déterminante dans l’histoire politique du peuple grec, elle influe aussi de façon décisive sur ces composantes centrales de l’identité des peuples que sont leur langue et leur « manière de penser ». Ainsi, la douceur perpétuelle des cieux grecs, propice à l’élasticité des tissus, favorise le raffinement des organes de la voix, et notamment l’abondance de voyelles qui fait la beauté remarquable de l’idiome grec. La douceur naturelle du climat grec explique donc l’harmonie de la poésie d’Homère et, partant, des innombrables œuvres grecques qui s’en sont inspirées.
In kalten Ländern [müssen] die Nerven der Zunge starrer und weniger schnell seyn […], als in wärmeren Ländern, und wenn den Grönländern und verschiedenen Völkern in America Buchstaben mangeln, muß dieses aus eben dem Grunde herrühren. Daher kommt es, daß alle Mitternächtige Sprachen mehr einsylbige Worte haben, und mehr mit Consonanten überladen sind, deren Verbindung und Aussprache andern Nationen schwer, ja zum Theil unmöglich fällt. [17]
19Winckelmann fait ici converger en un habile raccourci deux termes que l’allemand donne comme séparés : celui, anatomique, de Zunge et celui, linguistique, de Sprache. Les qualités de l’idiome grec se trouvent rattachées à une origine physique singulière : l’agilité des organes de la voix, qui dépendent eux-mêmes des latitudes où ils se développent. Par le biais de la langue, ce sont toutes les caractéristiques politiques et culturelles des peuples qui, dès lors, sont directement reliées au climat. Les ardeurs du climat oriental expliquent non seulement la langue fougueuse des Égyptiens et des Perses, mais aussi leur fanatisme religieux et leur goût pour le despotisme. Le climat tempéré des Grecs explique à l’inverse leur goût pour la mesure en religion, en art comme en politique.
3 – Conflit des déterminismes : hérédité biologique et climat
20La nomenclature winckelmannienne des caractères de la nation grecque ne doit pas sa cohérence au seul principe de naturalisation de la culture grecque. Elle la tient aussi d’un ordre hiérarchique caché. Les quatre principaux facteurs évoqués par Winckelmann pour définir la nation grecque (organisation sociale, climat, hérédité ethnique, organisation politique) ne sont en effet pas égaux les uns par rapport aux autres. Parmi eux, deux dominent, qui sont précisément les plus directement imputables à la seule nature, à savoir le climat et l’hérédité ethnique. Or le rapport entre ces deux facteurs mérite une attention spéciale.
21Winckelmann est en apparence, comme nous l’avons déjà esquissé, un ferme sectateur de la théorie des climats, à laquelle il prête une influence déterminante sur de multiples données (constitution physique, langue, système politique, etc.). Pour appuyer sa démonstration, il se réfère volontiers aux principaux théoriciens antiques en la matière : Polybe, Cicéron, Hippocrate ou Lucien. [18] Mais en réalité, plus encore qu’aux sources antiques, c’est à une source moderne précise qu’il s’alimente : les Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture de l’abbé Dubos, qui occupent pour cette question une place centrale dans sa bibliothèque manuscrite (ill. 2). [19] Insistons ici sur le fait que, contrairement à une opinion très répandue mais démentie par les manuscrits, Winckelmann emprunte sa théorie des climats bien plus à Dubos qu’à Montesquieu. [20] Des Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, il retient deux motifs fondamentaux pour sa nomenclature des peuples : le principe d’un déterminisme météorologique fort d’une part et le privilège du climat tempéré d’autre part. « Le grand froid », recopie Winckelmann dans les Réflexions critiques de Dubos, « glace l’imagination d’une infinité de personnes », tandis que « la température des climats chauds […] énerve l’esprit comme le corps » [21] – toutes remarques qui figurent, à peine modifiées, dans les Gedanken über die Nachahmung et dans la Geschichte der Kunst des Altertums. [22]
Notes de lecture manuscrites de Winckelmann, tirées de : Jean-Baptiste Dubos : Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Bibliothèque Nationale de France, Paris, Département des manuscrits, Fonds allemand, vol. 61, fol. 48
22Pourtant, s’il emprunte à Dubos l’axiome des trois climats – froid, torride et tempéré –, Winckelmann s’éloigne de lui sur une question centrale : quelle influence l’hérédité biologique exerce-t-elle sur l’identité grecque ? La thèse de Dubos est fort claire : « C’est de tout temps qu’on a remarqué que le climat était plus puissant que le sang et l’origine ». [23] Dans le domaine des déterminismes naturels donc, l’empire du climat, c’est-à-dire de l’environnement dans lequel se développe l’individu, l’emporte sans discussion sur l’effet de l’hérédité biologique pour l’auteur des Réflexions critiques. Et Dubos de livrer maintes preuves de ce déterminisme climatique strict. Les « Macédoniens établis en Syrie et en Égypte y devinrent au bout de quelques années des Syriens et des Égyptiens, et, dégénérant de leurs ancêtres, ils n’en conservèrent que la langue et les étendards. Au contraire les Grecs établis à Marseille contractèrent avec le temps l’audace et le mépris de la mort particulier aux Gaulois ». [24] Pour Dubos, il en va des peuples comme des plantes ou des animaux. Leurs qualités dépendent moins des qualités propres de la graine que du terroir où on l’a semée. « Ainsi les graines qui réussissent excellemment dans un certain pays, dégénèrent quand on les sème dans un autre ». [25]
23Winckelmann, qui consigne méticuleusement tous ces arguments dans ses cahiers d’extraits, s’en détache nettement dans son œuvre. Au déterminisme climatique strict défendu par Dubos, il ajoute en effet un autre ordre de causalité : celui du « sang », c’est-à-dire de l’héritage biologique. L’idée, certes, ne se glisse que subrepticement dans son argumentation. Il demeure pourtant que, à côté du climat, le mot « Geblüt » s’impose comme un facteur de plus en plus déterminant dans l’identité des peuples qu’il décrit. La concurrence entre l’influence du climat et l’incidence de l’hérédité biologique est évoquée dès la seconde édition des Gedanken über die Nachahmung en 1756. Comme souvent par la suite, c’est la comparaison entre la Grèce ancienne et la Grèce moderne – sur laquelle Winckelmann se documente avec intérêt, en lisant notamment des récits de voyage – qui lui fournit l’occasion d’introduire l’argument du patrimoine biologique :
Bey aller Veränderung und traurigen Aussicht des Bodens, bey dem gehemten freyen Strich der Winde durch die verwilderte und verwachsene Ufer, und bey dem Mangel mancher Bequemlichkeit, haben dennoch die heutigen Griechen viel natürliche Vorzüge der alten Nation behalten. Die Einwohner vieler Inseln, (welche mehr als das feste Land von Griechen bewohnt werden) bis in klein Asien, sind die schönsten Menschen, sonderlich was das schöne Geschlecht betrift, nach aller Reisenden Zeugniß. [26]
25Autrement dit, la continuité biologique de la race grecque assure jusqu’à l’époque moderne la présence des « plus beaux êtres humains qui soient » dans ces contrées colonisées autrefois par les Grecs anciens.
26Dans cette première publication, l’argument de l’atavisme ethnique n’est encore mentionné qu’incidemment. Il l’est avec beaucoup plus d’insistance dans la Geschichte der Kunst. Ainsi, si les Égyptiens modernes, pourtant placés sous les mêmes cieux – c’est-à-dire sous le même climat – que les anciens Égyptiens, n’en partagent pas la valeur, c’est qu’ils constituent en vérité « une souche totalement étrangère ». [27] Les Grecs modernes en revanche ont, malgré l’occupation turque, en partie conservé les qualités propres à leur sang, qui leur assurent entre autres une beauté physique remarquable. Il arrive que l’argument de l’atavisme biologique soit formulé de façon beaucoup plus nette encore. Ainsi, par leur constitution politique comme par leur climat, les Étrusques auraient dû atteindre en art les mêmes sommets que les Grecs. Tout en apparence les y prédestinait : leur amour fervent de la liberté comme leur latitude proche de la Grèce, qui induit un climat tempéré. Mais, à la différence du peuple grec, le peuple étrusque est héréditairement affligé d’une mélancolie profonde, qui le conduit à se repaître d’images violentes et mortuaires. [28] Le déterminisme climatique vaut ici bien peu au regard du déterminisme du sang.
4 – Originalité et métissage : la question de l’autarcie grecque
27Si Winckelmann semble accorder une place de plus en plus importante à l’hérédité biologique dans sa description du peuple grec, il n’en demeure pas moins qu’il maintient aussi les autres composantes explicatives déjà évoquées. Par là, il rend possibles deux lectures fort différentes de l’histoire des peuples, deux modèles ethnographiques contradictoires entre lesquels il ne cesse en apparence d’hésiter : un modèle autarcique fondé sur le principe du développement du potentiel biologique propre à chaque nation, et un modèle transversal, fondé sur le principe de leur mutuelle fécondation.
28Ces deux schémas contradictoires sont représentés à part égale dans la Geschichte der Kunst. Mais ils n’y occupent nullement le même rang. Tout porte en effet à croire que le principe d’autarcie des cultures constitue pour Winckelmann un modèle idéal, que seule la Grèce est parvenue à réaliser parfaitement. « Den ersten Saamen zum Nothwendigen hat jedes Volk bey sich gefunden », annonce-t-il au seuil de son histoire de l’art. [29] Partant, toute civilisation devrait trouver en elle seule l’énergie nécessaire à sa croissance. Autrement dit, si l’on s’en tient au modèle idéal, l’art n’est nullement destiné à circuler. Au sein de chaque nation, il devrait potentiellement se développer dans l’ignorance des productions étrangères, s’alimenter à la seule sève du peuple qui le porte. Winckelmann livre de cette autarcie des cultures de multiples exemples. Ainsi, à leur apothéose, les Égyptiens, les Phéniciens et les Perses se sont développés dans une indépendance stricte les uns par rapport aux autres :
Diese drey Völker [d. h. die Ägypter, die Phönizier und die Perser] hatten in ihren blühenden Zeiten vermuthlich wenig Gemeinschaft unter einander : von den Aegyptern wissen wir es, und die Perser, welche spät einen Fuß an den Küsten des Mittelländischen Meers erlangeten, konnten vorher mit den Phöniciern wenig Verkehr haben. Die Sprachen dieser beyden Völker waren auch in Buchstaben gänzlich von einander verschieden. Die Kunst muß also unter ihnen in jenem Lande eigenthümlich gewesen sein. [30]
30Dans ce système ethnographique, les échanges entre peuples existent certes, mais il font figure d’accidents de l’histoire. Ils sont l’indice d’une déficience des civilisations, d’une absence d’autonomie, en un mot d’une infériorité que seul le recours à l’autre peut combler. L’art circule donc pour Winckelmann, mais c’est par la force d’une nécessité malheureuse. Ainsi, ce n’est que pour atténuer leur rigidité et leur sécheresse natives que les Égyptiens ont cherché à emprunter aux Grecs. Mais l’entreprise était vouée à l’échec, car la beauté ne s’apprend guère – et l’histoire artistique de l’Égypte est restée « une plaine désertique » d’où seuls émergent quelques rares monuments. [31] Le phénomène s’est répété pour les Étrusques puis pour le Romains, qui ont pratiqué l’emprunt jusqu’à la décadence absolue. Partout ces échanges sont d’abord associés au constat de déficit. Ils sont le signe d’une carence, d’une indigence première et irrémédiable des civilisations.
31Dans ce panorama des peuples antiques, la Grèce occupe une place d’exception. Parce qu’elle possède une énergie artistique propre infiniment supérieure à celle de ses voisins, elle n’a jamais eu à recourir à eux et a atteint en toute autonomie une beauté inégalable. L’art grec est pour Winckelmann fondamentalement autarcique. La Geschichte der Kunst s’ouvre sur cet axiome :
Bey den Griechen hat die Kunst, ob gleich viel später, als in den Morgenländern, mit einer Einfalt ihren Anfang genommen, daß sie, aus dem was sie selbst berichten, von keinem andern Volke den ersten Saamen zu ihrer Kunst geholet, sondern die ersten Erfinder scheinen können. [32]
33En art, les Grecs ont donc été de purs « inventeurs » – une originalité qui garantit leur prééminence absolue. Dans sa présentation des premiers temps de l’art grec, Winckelmann parvient, au moyen d’une construction chronologique assez floue dans sa périodisation, à éviter soigneusement d’évoquer d’éventuelles influences extérieures. Certes, dans « des temps très reculés », les Égyptiens avaient déjà produit des œuvres d’art en nombre assez important, alors que les Grecs n’en étaient qu’à leurs débuts artistiques. Mais « les Grecs n’auraient guère eu d’occasions d’apprendre quelque chose des Égyptiens en matière d’art », car jusqu’au règne de Psammétique « l’Égypte resta fermée aux étrangers ». Or les Grecs commencèrent à pratiquer l’art « dès avant cette période ». [33]
34Si Winckelmann est sans doute l’un des premiers à avoir formulé avec autant de force l’axiome de l’originalité et de l’autarcie grecque, il n’en est cependant pas l’inventeur. Pour procéder à cette individuation radicale de l’identité grecque, il s’est notamment nourri d’un auteur amplement représenté dans sa bibliothèque manuscrite : Shaftesbury. [34] Dans les Miscellaneous Reflections de Shaftesbury, Winckelmann recopie et souligne significativement ce passage (ill. 3) :
Thus Greece, tho’ she exported arts to other nations, had properly for her own share no import of the kind. The utmost which cou’d be nam’d wou’d amount to no more than raw materials, of a rude and barbarous form. And thus the nation was evidently original in art ; and with them every noble study and science was self-form’d, wrought out of nature and drawn from the necessary operation and course of things, working as it were of their own accord and proper inclination. [35]
Notes de lecture manuscrites de Winckelmann, tirées de: Shaftesbury: Miscellaneous Reflections, Bibliothèque Nationale de France, Paris, Département des manuscrits, Fonds allemand, vol. 66, fol. 40 v°
36Si la Grèce a été imitée, elle n’a donc elle-même nullement imité selon Shaftesbury, ici recopié par Winckelmann. Si elle a exporté les arts en d’autres nations, elle n’a nullement importé pour elle-même de modèles étrangers. Le soulignement de ce passage – phénomène très rare dans l’ensemble des notes de lectures de Winckelmann – traduit clairement l’intérêt d’un telle représentation pour l’auteur de la Geschichte der Kunst. Shaftesbury a été pour Winckelmann un penseur marquant de « l’originarité » grecque.
37L’axiome de l’autarcie grecque s’assortit dans la Geschichte der Kunst de diverses conditions, parmi lesquelles celle, fondamentale, du non-métissage. Si les Grecs doivent à leur seul caractère ethnique l’essor de leur art, le mélange avec d’autres peuples et les migrations qui en sont la cause lui sont en revanche contraires. Une constante structure en effet la vision winckelmannienne de l’art grec : le lien radical, au sens étymologique du terme, entre l’homme, l’art et le lieu. L’art grec tire son origine d’un espace et d’un peuple donnés, conditions dont il ne peut s’extraire sans régresser. Toute hybridation, toute translation géographique induisent nécessairement son déclin. Depuis les Gedanken über die Nachahmung jusqu’à la Geschichte der Kunst, Winckelmann multiplie les preuves de cette thèse, comme le prouve cette remarque empruntée au Brutus de Cicéron :
« So bald die Beredsamkeit », sagt Cicero, « aus dem atheniensischen Hafen auslief, hat sie in allen Inseln, welche sie berühret hat, und in ganz Asien, welches sie durchzogen ist, fremde Sitten angenommen, und ist völlig ihres gesunden attischen Ausdrucks, gleichsam wie ihrer Gesundheit, beraubet worden ». [36]
39L’éloignement est abâtardissement, le retour à l’origine, condition du renouveau. Ainsi, après la mort d’Alexandre, les artistes grecs, en quittant le sol grec pour se mettre au service des Séleucides en Asie ou de Ptolémée en Égypte, inaugurèrent une phase de décadence, notamment marquée par une érudition et une insensibilité grandissantes. [37] Ce n’est que sur le sol grec, vers le début du iie siècle av. J.C., qu’ils connurent un renouveau. [38]
5 – D’un différend historiographique : Winckelmann, Caylus et Herder
40Il faut, pour mesurer la spécificité de ce schéma historique, le comparer à un modèle contemporain, celui du comte de Caylus, que Winckelmann connaissait fort bien. Dans le Recueil d’antiquités qui paraît à partir de 1752, Caylus ébauche en effet une lecture de l’histoire antique sensiblement différente. Au schéma vertical de la germination sui generis des peuples et de leur patrimoine artistique, il oppose le schéma horizontal d’une communication transversale des civilisations. Les cultures ne tirent pas leur énergie de leurs seules racines, mais aussi, et surtout, de leur mutuelle fécondation. Caylus place au début de son Recueil d’antiquités ce tableau éloquent de la migration des arts, que Winckelmann recopie pour une large moitié dans ses cahiers d’extraits :
On […] voit [les Arts] formés en Égypte avec tout le caractère de la grandeur ; de là passer en Étrurie, où ils acquièrent des parties de détail, mais aux dépens de cette même grandeur ; être ensuite transportés en Grèce, où le savoir joint à la noble élégance les a conduits à leur plus grande perfection ; à Rome, enfin, où sans briller autrement que par des secours étrangers, après avoir lutté quelque temps contre la barbarie, ils s’ensevelissent dans les débris de l’Empire. [39]
42Certes, chez Caylus, les subdivisions ethniques continuent de présider à la structure externe de l’ouvrage. Comme la Geschichte der Kunst, le Recueil d’antiquités est organisé selon l’ordre des nations : Égyptiens, Étrusques, Grecs, Romains et Gaulois, et Caylus n’hésite pas à insister sur la différence des goûts nationaux. [40] Cependant, dès le premier volume, ces clivages nationaux se trouvent subvertis par des métissages qui brouillent sévèrement ces lignes de partage. Ainsi trouve-t-on, souligne Caylus, en Égypte et en Étrurie un ensemble de motifs (lions ailés, inscriptions diverses) qui témoignent de l’intime et fécond enchevêtrement des patrimoines formels de ces deux aires géographiques. [41] Pour Caylus, l’art naît d’abord de l’hybridation des cultures.
43Cette différence n’a pas échappé à Winckelmann qui, dans le Recueil d’antiquités, consigne précisément les remarques les plus explicites de Caylus sur le « commerce réciproque » des nations. Ainsi le regard du lecteur Winckelmann a-t-il été attiré par le cas singulier de deux cylindres égyptiens reproduits dans le Recueil d’antiquités, deux objets sur lesquels sont représentés, malgré leur origine indubitablement égyptienne, des figures persanes : « Par [quel] hasard, des figures persanes sont-elles représentées avec des hiéroglyphes égyptiens ? », s’interroge Caylus, recopié par Winckelmann, avant de fournir lui-même la réponse, également consignée dans les notes de lecture de Winckelmann :
Pour résoudre cette question, il faut observer que les Perses ont été maîtres de l’Égypte pendant 135 ans, que dans cet intervalle de temps, ils ont adopté plusieurs usages du peuple qu’ils avaient soumis et ont employé par préférence des ouvriers de cette nation. [42]
45En feuilletant le Recueil d’antiquités, Winckelmann s’est découvert avec Caylus une divergence importante, qui touche au ressort même de l’histoire. Pour Caylus, c’est du commerce et des échanges entre nations que les arts tirent leur progression. Pour Winckelmann, c’est d’une dynamique propre à l’histoire de chaque nation.
46Cette transversalité n’est évidemment pas sans incidence sur la hiérarchie des nations artistiques. Chez Caylus, la Grèce continue certes de jouir d’une prééminence absolue. « [Les Grecs] sont la plus agréable nation qui ait habité la terre », aime à répéter l’auteur du Recueil d’antiquités. [43] Cependant, ce premier rang ne leur est concédé qu’en insistant fortement sur le rôle fécondant d’une autre nation à leur endroit : l’Égypte. Les Grecs doivent aux Égyptiens l’origine de leur art, souligne Caylus, une dette que seul « l’amour de la gloire » leur fit oublier. [44] Par opposition aux Grecs de Winckelmann, donc, les Grecs de Caylus ont été pendant de longues années de talentueux imitateurs – une caractéristique qui s’applique d’ailleurs aux peuples antiques dans leur ensemble. Dans les temps primitifs, Égyptiens, Grecs, Étrusques et Phéniciens étaient liés entre eux par d’intenses relations d’emprunt, de copie et de partage. Entre le modèle winckelmannien, vertical et national, et celui de l’antiquaire français, horizontal et transversal, se dégage donc un clivage fondamental dans la lecture de l’Antiquité qui n’a d’ailleurs pas échappé aux lecteurs contemporains, et notamment à Herder.
47Le jeune Herder nourrit une admiration immense pour la Geschichte der Kunst des Altertums, qu’il lit sept fois et médite inlassablement. Derrière ces célébrations enthousiastes se cachent néanmoins des divergences, qui, subtiles au départ, n’ont pas tardé à devenir majeures. Dès 1767, Herder nomme précisément l’origine du différend, à savoir l’axiome, déjà cité, que Winckelmann place au seuil de la Geschichte der Kunst : « Den ersten Saamen zum Nothwendigen hat jedes Volk bey sich gefunden ». [45] L’idée n’est pas recevable pour Herder. Elle contrevient en effet gravement à une donnée centrale à ses yeux de la progression historique : la concaténation des peuples, cette « chaîne de la transmission » (« Kette der Mitteilung ») qui relie les nations entre elles et interdit toute lecture strictement verticale des civilisations. [46] La ligne sinueuse de la tradition impose sans cesse le détour par les cultures voisines. Pour Herder, aucun peuple ne peut prétendre se nourrir à ses seules racines – pas même les Grecs.
Selbst nach dem, was die Griechen, die Originalsüchtigen Griechen selbst berichten, sind ja Spuren gnug, daß in dem Lauf ihrer Erfindungen Fremde ihnen oft vorgetreten, Fremde bei ihnen die Kultur erweckt, und in den ersten Zeiten des Fortganges mit wiederholten Stößen beschleunigt. Von wem bekamen sie Götter, Gesetze, Wissenschaften, Künste ? Die älteste griechische Geschichte ist voll davon. [47]
49« Le souvenir d’une origine étrangère » est insupportable aux Grecs, note Herder dans son commentaire de la Geschichte der Kunst. Et Winckelmann commet à ses yeux l’erreur de rédiger son histoire de l’art en Grec, c’est-à-dire de se laisser contaminer par l’« obsession » grecque de l’originalité. Et Herder, contre Winckelmann, prend résolument le parti de Caylus, l’un des rares auteurs qui aient su au xviiie siècle résisté de façon efficace à cette « Originalsucht » grecque. [48] La réflexion sur l’origine de l’art grec cristallise, on le voit, des divergences historiographiques fondamentales.
Notes
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[*]
Élisabeth DÉCULTOT est Directrice de Recherche au CNRS, UMR 8547, « Pays germaniques : histoire, culture, philosophie », École Normale Supérieure, 45, rue d’Ulm F-75005 PARIS et Kissinger Platz 2, D-14199 BERLIN ; courriel : elisabeth.decultot@ens.fr
-
[1]
J. J. Winckelmann : Geschichte der Kunst des Alterthums, hrsg. von A. H. Borbein, T. W. Gaehtgens, J. Irmscher und M. Kunze, Mainz : Philipp von Zabern Verlag, 2002, Vorrede, S. X sq. (la pagination de la Geschichte der Kunst indiquée ici comme dans la suite du présent article correspond à celle de la première édition de 1764).
-
[2]
Cf. Michèle Duchet : Anthropologie et histoire au siècle des Lumières : Buffon, Voltaire, Rousseau, Helvétius, Diderot, Paris : Albin Michel, 31995 (11971).
-
[3]
J. J. Winckelmann : Gedancken über die Nachahmung der Griechischen Wercke in der Mahlerey und Bildhauer-Kunst (11755), in : J. J. Winckelmann : Kleine Schriften. Vorreden. Entwürfe, hrsg. von Walther Rehm, Berlin : De Gruyter, 1968, S. 27-59, cit. p. 31-32.
-
[4]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 23.
-
[5]
J. J. Winckelmann : Erläuterung der Gedanken von der Nachahmung der griechischen Werke in der Malerey und Bildhauerkunst ; und Beantwortung des Sendschreibens über diese Gedanken (11756), in : Kleine Schriften. Vorreden. Entwürfe (note 3), p. 97-144, cit. p. 100.
-
[6]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 21.
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[7]
Gedancken über die Nachahmung (note 3), p. 32.
-
[8]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 130.
-
[9]
Édouard Pommier : « Winckelmann et la vision de l’Antiquité classique dans la France des Lumières et de la Révolution », in : Revue de l’art 83 (1989), p. 9-20 ; Id. : L’Art de la liberté. Doctrines et débats de la Révolution française, Paris : Gallimard, 1991.
-
[10]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 132-133.
-
[11]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 78.
-
[12]
Cette rubrique, constituée d’extraits de Strabon, figure dans les Collectanea ad historiam artis que Winckelmann rassembla en vue de la rédaction de sa Geschichte der Kunst des Altertums (Bibliothèque Nationale de France, Paris, Département des manuscrits, Fonds allemand, vol. 57, fol. 215 v° ; dans la suite du présent article, les références à ce fonds de manuscrits sont signalées par l’abréviation : BN All.). On trouve également dans les notes de lecture de Winckelmann une rubrique intitulée : « Liebe der Griechen zu ihrem Vaterlande » contenant des extraits de Pausanias (BN All., vol. 57, fol. 203). Pour l’utilisation de ces extraits, cf. par exemple Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), S. 137. Pour une analyse plus précise du rôle de ces notes de lecture dans l’œuvre de Winckelmann, nous nous permettons de renvoyer à notre ouvrage, É. Décultot : Johann Joachim Winckelmann. Enquête sur la genèse de l’histoire de l’art, Paris : Presses Universitaires de France, 2000 (tr. allemande : Untersuchungen zu Winckelmanns Exzerptheften. Ein Beitrag zur Genealogie der Kunstgeschichte im 18. Jahrhundert, übers. von Wolfgang von Wangenheim und René Mathias Hofter, Ruhpolding : Verlag Franz Philipp Rutzen, 2004).
-
[13]
Winckelmann tire de la lecture de De l’Esprit des Lois une dense série d’extraits (BN All., vol. 69, fol. 39-40 v°).
-
[14]
BN All., vol. 69, fol. 40 (Montesquieu : De l’Esprit des lois, éd. par V. Goldschmidt, 2 vol., Paris : Garnier Flammarion, 21993-1994 [11979], vol. 1 p. 185).
-
[15]
BN All., vol. 69, fol. 40 ; De l’Esprit des lois (note 14), vol. 1, p. 189. Parmi les méfaits du despotisme, Winckelmann note encore : « La pauvreté et l’incertitude des fortunes, dans les États despotiques, y naturalisent l’usure » (BN All., vol. 69, fol. 40 ; De l’Esprit des lois [note 14], vol. 1, p. 190).
-
[16]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 130.
-
[17]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 19-20.
-
[18]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 19, 22.
-
[19]
Pour ces extraits des Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture de Jean-Baptiste Dubos, cf. BN All., vol. 61, fol. 48-61 v° et vol. 72, fol. 192. Winckelmann prend en note en Allemagne (à en juger par le filigrane et par la qualité du papier) l’ensemble des huit sections que Dubos consacre à la question des climats : Jean-Baptiste Dubos : Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture (11719, 21733, 31740), éd. par D. Désirat (d’après l’édition de 1740), Paris : École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, 1993, p. 218-274 (sections 13 à 20). L’ouvrage ne fut traduit qu’ultérieurement en allemand : J.-B. Dubos : Kritische Betrachtungen über die Poesie und Mahlerey, aus dem Französischen des Herrn Abtes Dü Bos, übers. von G. Funcke, 3 Bde., Kopenhagen 1760-1761.
-
[20]
Si la lecture de De l’Esprit des lois a été effectivement déterminante pour la pensée politique de Winckelmann, comme nous l’avons montré, il faut souligner que rien dans les cahiers d’extraits ne permet de dire qu’il ait seulement lu les réflexions de Montesquieu sur la théorie de climats. En revanche, il a pris celles de Dubos en note.
-
[21]
BN All., vol. 61, fol. 57 v°, 58 v° ; Réflexions critiques (note 19), p. 250, 264.
-
[22]
Sur les pays froids (Groenland), cf. Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 19-20 ; sur les pays chauds (Perse, Égypte), ibid., S. 25-26 ; sur les régions tempérées (Grèce, Asie mineure), ibid., p. 23, 25.
-
[23]
Réflexions critiques (note 19), p. 257.
-
[24]
Réflexions critiques (note 19), p. 257. Extrait recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 61, fol. 58.
-
[25]
Réflexions critiques (note 19), p. 258. Extrait recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 61, fol. 58.
-
[26]
Erläuterung der Gedanken von der Nachahmung (note 5), p. 105. Winckelmann cite en note les récits de voyage de Belon et de Le Brun. Pierre Belon : Observations de plusieurs singularitéz et choses mémorables trouvées en Grèce, Asie et Judée, Paris 1553-1555 ; Corneille Le Brun : Voyages au Levant, c’est-à-dire dans les principaux endroits de l’Asie Mineure, Delft 1700.
-
[27]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 21.
-
[28]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 83.
-
[29]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 4.
-
[30]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 78.
-
[31]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 68.
-
[32]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 5.
-
[33]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 8.
-
[34]
Shaftesbury est très présent dans la bibliothèque manuscrite de Winckelmann. Cf. BN All., vol. 62, fol. 7 (Characteristics) ; vol. 66, fol. 17-18 v°, 20-21 v°, 30-31 (Characteristics) ; fol. 26 (Letter concerning the Art or Science of Design) ; fol. 33-35 v° (Treatise IV, An Enquiry concerning Virtue or Merit) ; 35 v° (Treatise V, Upon the Moralists, a philosophical Rhapsody) ; fol. 37-43 (Treatise VI, Miscellaneous Reflections). Winckelmann semble avoir lu Shaftesbury à Nöthnitz et à Dresde. Le papier sur lequel il rédige ces extraits porte en effet le filigrane hollandais « I Villandry », spécifique de cette période.
-
[35]
BN All., vol. 66, fol. 40 v° (extrait de Shaftesbury, Treatise VI. Miscellaneous Reflections ; les passages en italique correspondent aux passages soulignés par Winckelmann dans le texte manuscrit).
-
[36]
Erläuterung der Gedanken von der Nachahmung (note 5), p. 104.
-
[37]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 357-360.
-
[38]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 365-366.
-
[39]
Anne Claude Philippe de Tubières, comte de Caylus : Recueil d’antiquités égyptiennes, étrusques, grecques et romaines, 7 vol., Paris 1752-1767, vol. 1 (1752), p. IX-X. Recopié (jusqu’au mot « Grèce ») par Winckelmann, in : BN All., vol. 67, fol. 46.
-
[40]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. VIII.
-
[41]
Sur ce « commerce réciproque entre les Égyptiens et les Étruriens », cf. Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. 78 ; recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 67, fol. 46 v°-47.
-
[42]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. 54-57, commentaire de la planche XVIII, 1 et 2 ; recopié par Winckelmann, in : BN All., vol. 67, fol. 46 v°.
-
[43]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 5 (1762), p. 127.
-
[44]
Recueil d’antiquités (note 39), vol. 1 (1752), p. 117-118.
-
[45]
Geschichte der Kunst des Alterthums (note 1), p. 4, cité in : J. G. Herder : Kritische Wälder. Älteres Kritisches Wäldchen, in : Id. : Schriften zur Ästhetik und Literatur 1767-1781, hrsg. von Gunter E. Grimm, Frankfurt am Main : Deutscher Klassiker Verlag, 1993, S. 11-55, hier S. 24.
-
[46]
Älteres kritisches Wäldchen (note 45), p. 25.
-
[47]
Älteres kritisches Wäldchen (note 45), p. 28-29.
-
[48]
Älteres kritisches Wäldchen (note 45), p. 30-31.